CONCLUSION
L'oeuvre d'Assia Djebar a été l'objet de
multiples travaux de recherches, dont certains se sont intéressés
à l'aspect autobiographique de ses romans, alors que d'autres ont
étudié l'image de la femme.
A travers notre mémoire, nous avons modestement
tenté d'analyser cette image de la femme, dans son oeuvre
Oran, langue morte.
En somme, l'étude que nous avons menée, nous
a révélé l'importance qu'à donnée la
romancière pour la condition de la femme. Son besoin d'écrire,
comme répondant à une nécessité de lutte contre le
silence imposé aux femmes. Mais surtout contre la mort. Ainsi, elle le
souligne dans une conférence qu'elle a animé, à Alger, en
octobre quatre vingt cinq : « J'écris contre la
mort, j'écris contre l'oubli, j'écris dans l'espoir
(dérisoire) de laisser une trace, une ombre, une griffure sur un sable
mouvant [...] j'écris parce que l'enfermement des femmes dans sa
nouvelle manière 1980(ou 90 ou 2000) est une mort
lente. »
Elle manifeste, dans cette écriture, un
espoir ; celui de sortir de cet enfermement, celui de condamner la terreur
qui règne, en Algérie. Mais aussi, celui de surmonter la
situation difficile des femmes. Durant la décennie noire.
En écrivant Oran, langue
morte, la romancière continue sa quête, à
travers le regard de ses personnages, en soulevant les divers problèmes
que doivent affronter les femmes, pour faire face à la violence du
terrorisme intégriste.
En effet, la romancière met en évidence
l'Histoire et la mémoire collectives, pour tenter de comprendre cette
violence que subie les femmes, que l'on veut opprimer.
Ce recueil de nouvelles est conçu comme un
témoignage historique, à la manière d'un journal intime,
où les femmes franchent le seuil du silence, relatant leurs rêves
brisés, ainsi que leur soif d'amour rarement comblée.
De ce fait, l'oeuvre d'Assia Djebar révèle
son intérêt pour la question de l'émancipation de la femme.
Témoignage direct sur la société algérienne, durant
la décennie du terrorisme, qui représente un moment douloureux
dans l'Histoire de l'Algérie.
Notre interprétation des trois textes que nous
avons traités ; La fièvre dans des
yeux d'enfant,
L'Attentat et La femme en
morceaux, s'est proposée de souligner la violence des
intégristes à l'égard des femmes. Notons que, dans chaque
texte, une femme sert de symbole de l'Algérie. Ainsi, nous avons vu que,
dans les trois cas, les femmes évoquées sont confrontées
aux mêmes obstacles : égorgement, attentas à la bombe
etc.
Notre but fut, avant tout, de relever un certain nombre de
caractéristiques internes des textes choisis, qui pourraient être
la base d'une étude de la violence que subie les femmes.
En ce sens, l'analyse de ces nouvelles a
révélé que la mort, qui engouffre ces femmes, se manifeste
à chaque fois qu'une d'entre elles essaye de s'émanciper, de
prendre la parole, ou même de sortir sans voile. Le sort serait alors le
même.
Or, le résultat de cette analyse semble donner une
grande importance à la voix, ainsi qu'à la
nécessité de prendre la relève contre le terrorisme, et de
continuer la lutte malgré les risques.
En outre, une des différences que nous avons pu
relever dans les trois nouvelles traitées, semble être celle de la
structure de la troisième nouvelle La femme en morceaux,
dans laquelle Assia Djebar a mis en abîme son texte avec
celui de Schéhérazade, la conteuse des Mille et une
nuits. Ce retour aux sources de l'oralité, serait un autre
exemple de la lutte contre l'oubli et la mort. Ceci dit, que les deux autres
textes sont soumis à un même mode d'écriture ; celui
d'une seule voix qui se propose à dévoiler les multiples
injustices qui enveloppent l'histoire de la femme algérienne, depuis
des générations. Par conséquent, celle de
l'Algérie.
De ce fait, nous avons tenté, dans la
première partie de notre mémoire, de mettre en évidence
l'étude titrologique et son importance pour l'analyse du récit.
Ensuite, nous avons vu quelques approches spatio temporelles en vue de situer
le récit, afin de pouvoir expliquer comment la fiction reflète la
réalité. Pour cela, nous nous sommes concentré sur des
thèmes liés à la société algérienne,
qui sont abordés dans l'oeuvre, car pour mieux comprendre le message
qu'Assia Djebar veut communiquer par son écriture, il faudrait prendre
en considération le contexte socioculturel, politique et religieux de
l'Algérie, pendant cette période, qui a influencé la place
de la femme dans la société. En ce sens, l'étude du
statut des personnages s'est également avérée
intéressante, ainsi que la violence qui résulte des
différents conflits vécus, en franchissant les obstacles. En
particulier, nous avons essayé d'analyser, avec l'évolution des
personnages, la manière dont la situation de la femme, pendant la crise
algérienne des années quatre vingt dix, est
représentée.
Dans la deuxième partie de notre mémoire,
il a été question de l'étude de l'impact du terrorisme sur
la femme algérienne. Nous avons vu sa posture face la violence qui
s'abat sur elle, ainsi que la représentation de la mort, qui se profile
sous différentes façons, dans les trois nouvelles. Nous avons
clôturé cette deuxième partie avec l'affrontement de la
femme avec le terrorisme. En ce sens, nous avons essayé d'étudier
l'importance de la voix en tant que moyen de résistance et de lutte
contre la barbarie intégriste.
En guise de conclusion, nous pourrions dire que le langage
littéraire d'Assia Djebar a su rendre la voix aux femmes, une voix qui
pourrait se faire entendre, une voix de la résistance qui a
été au coeur des combats féminins, de tous les temps et
de toutes les sociétés.
Or, malgré les recherches que nous avons
effectuées et les réflexions que nous avons portées sur
son oeuvre Oran, langue morte, il reste qu'elles sont
encore loin de répondre à toutes les questions relatives à
la lecture du texte Djebarien. Pour cela, il serait intéressant de
prendre le recueil dans sa totalité. Ainsi, nous pourrions
accéder à d'autres pistes de recherches, afin de pouvoir
répondre à d'autres problématiques qui ne cessent
d'être posées, dans l'ensemble de l'oeuvre de cette grande figure
de la littérature algérienne.
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