D/ Cuba et la transition du capitalisme au socialisme
Le but qui veut être atteint ici, est de se poser la
question, peut on caractériser Cuba comme étant en phase de
transition vers le socialisme ? Bien sûr, Cuba n?est pas un pays
communiste comme certaines analyses simplistes et cherchant à
discréditer le communisme en tant que doctrine caractérisent
Cuba. Afin d?être sérieux, il faut se demander si Cuba est
réellement en transition du capitalisme au socialisme.
Bien que les discours des dirigeants affirment ce fait, c?est
plutôt dans l?état des rapports sociaux qu?il faut trouver les
réponses. Il est donc important de revenir sur les prémisses de
la révolution et son déclenchement et de chercher des pistes pour
répondre à la question posée et d?en conclure s?il est
justifié de réaliser une analyse de Cuba comme étant un
pays en transition vers le socialisme.
1) La révolution cubaine
a) Les prémisses de la révolution
Cuba, petit île des Caraïbes, ft une colonie
espagnole jusqu?en 1898. Après une âpre lutte, guerre des dix ans
(1968-1978), le pays deviendra indépendant en 1898 suite à trois
années de guerre civile (1895-1898). L?indépendance ft l?oeuvre
en partie des forces indépendantistes de l?époque dont la figure
marquante était José Marti, mais également des Etats-Unis
qui firent la guerre à l?Espagne et qui après leur victoire
obtinrent les dernières colonies espagnoles, les Philippines et Porto
Rico. Cuba devint indépendant mais sous la tutelle des Etats-Unis.
Le premier président cubain fût même un
citoyen des Etats-Unis et par l?ajout dans la constitution cubaine de
l?amendement Platt, du nom d?un sénateur des Etats-Unis, ces derniers
s?octroyèrent le droit à des interventions sur le sol cubain en
cas de troubles ou atteinte à la propriété privée.
De ce fait, les interventions américaines furent fréquentes
principalement jusqu?au années 1920, de nombreux troubles
existant entre les conservateurs et les libéraux, ces derniers exigeant
la fin de la tutelle nord américaine.
Liée à la tutelle politique, les Etats-Unis
firent également leur entrée économique à Cuba, et
cela déjà avant l?indépendance. Un nombre très
élevé de banques, de centrales sucrières, de plantations
appartenaient à des capitalistes américains52.
Après le colonialisme, Cuba fût dominé par
l?impérialisme.
La spécialisation sucrière héritée
de la période coloniale se maintint durant la période
impérialiste, soutenue par la volonté des Etats-Unis de se
fournir en sucre à côté de chez eux tout en
contrôlant une bonne partie du processus de production. La
majorité des exportations cubaines partait en direction des Etats-Unis,
principalement des produits bruts, donnant peu de valeur ajoutée, et les
importations réalisées par Cuba provenaient majoritairement des
Etats-Unis à travers des biens d?équipements et de consommation
manufacturés.
Les gouvernements en place avant la révolution
tentèrent peu de changer cet état de choses, même si
à partir des années 1930, la part des moyens de production dans
les mains Nord Américaines diminuèrent quelques peu, que des
quotas sucriers furent fixés avec les Etats-Unis avec un prix de vente
supérieur au marché mondial. Le premier Parti Communiste Cubain
naquit au début des années 1920, et laissa des personnages
emblématiques. Les révoltes ouvrières des années
1930, suite à la crise économique mondiale montra la place
importante du PCC à Cuba ce qui était assez peu courant en
Amérique latine. Ce dernier participa même au gouvernement de
Batista de 1940.
Malgré un développement important de certaines
infrastructures, tel que les communications et quelques voies de communication,
Cuba restait un pays « sous développé » ou pour mieux
dire un pays dominé, étranglé par l?impérialisme,
d?où un développement économique réel sur ces bases
était impossible. L?économie restait principalement agricole, un
prolétariat urbain existait mais était peu
développé. Le monde
52 Voir à cet effet, HERRERA, Rémy,
« De Morgan à Rockefeller. Le pouvoir de la grande finance
états-unienne dans la Cuba prérévolutionnaire »,
Economies et sociétés, Presses de l'ISMEA, Paris, vol.
37, no7-8, 2003,
pp. 1279-1304
rural était très touché par le
latifundium, qui laissait de grands pans de la population sans terre,
obligés de travailler selon les cycles saisonniers et donc
caractériser par un sous emploi chronique.
Le taux d?analphabétisme était également
élevé. En 1953, il était de 23,6% pour la population de 10
ans et plus et il atteignait 41,7% en zone rural.53 Peu
d?investissement était réalisé dans ce sens, et ce chiffre
était « normal » au vu de ceux que l?on trouvait en
Amérique latine à cette époque. Au niveau de la
santé, les infrastructures sanitaires étaient inexistantes en
zone rural. Les médecins et hôpitaux étaient circonscrit
à la capitale, La Havane, et aux villes d?importances économiques
déterminées.54 D?où la prolifération de
maladies et les épidémies fréquentes, accentuées
par le manque de produits d?hygiène, les conditions et
l?insalubrité des logements...
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