Paragraphe II : Fondements de l'autonomie de gestion
des hôpitaux
A- Fondement économique
Pour l'OMS la santé est un état de complet
bien-être, l'écart entre cet état et l'état
réel de l'individu constitue alors un besoin de santé dont la
satisfaction engendre des investissements et ressources aussi bien
économiques que financiers.
Or malgré l'importance de la santé, la
rareté des ressources nationales ne tolère guère le
gaspillage. Ainsi, l'objectif de rationalisation des ressources allouées
au système de soins ouvre une brèche où s'insère le
raisonnement économique.
L'économie de la santé, discipline d'inspiration
néoclassique qui a pour « objet d'apporter un éclairage sur
la gestion économique et financière de l'appareil sanitaire et de
la protection sociale de la santé »9, se chargera
d'apporter des solutions aux problèmes qui minent les systèmes de
santé en général et l'hôpital en particulier.
Organisation à la pointe du progrès technique,
souvent premier employeur de sa collectivité territoriale de
rattachement et doté d'un budget conséquent, l'hôpital fera
l'objet d'une littérature économique abondante. La
rationalisation, l'optimisation en terme de coût et d'organisation
à l'hôpital renferment les notions d'efficience,
d'efficacité, de qualité tout en permettant l'accès
géographique et surtout financier des populations aux soins hospitaliers
nécessaires.
En effet « lorsqu'un service sanitaire est source de
gain, il y a fatalement malaise à l'idée que l'on puisse
spéculer sur la souffrance humaine »10. Cependant la
barrière financière, l'insuffisance de ressources pour faire face
aux dépenses de fonctionnement, de maintenance et d'investissement de
plus en plus croissantes est un obstacle majeur pour l'accès aux soins
de santé modernes. Dès lors, la résolution des questions
de tarification et d'équilibre budgétaire pose un problème
d'organisation, de bonne gestion, de management qui permettrait de maintenir la
viabilité de l'hôpital tout en permettant l'accès des
populations aux soins modernes.
Les économistes de la santé vont, dans cet
optique, élaborer différents scénarios.
9 Seydou BEYE, l'économie et la santé
dans une perspective managériale, éd L'Harmattant, 1999, Page
113.
10 Robert LAUNOIS, la théorie de la
bureaucratie à l'hôpital, extrait des colloques de IRSEM, page
6.
B- Modèles de gestion de l'hôpital
Dans une première tentative, les économistes de
la santé vont substituer à «l'hôpital
administration» «l'hôpital l'entreprise» qui est le
résultat de l'accentuation des caractéristiques communes à
l'hôpital et à l'entreprise tout en occultant leurs
spécificités respectives pour rompre avec «l'hôpital
administration» à la base des maux de l'hôpital. Selon
Charles E. Phelps, « la santé est un bien économique »
et « comme tout bien économique, la demande des soins
médicaux dépend des revenus »11, la santé
a un coût pour le producteur et offre un bien être, une
satisfaction au consommateur, ce dernier doit payer la contrepartie de sa
satisfaction.
Mais vu les effets pervers que pourrait engendrer un tel
modèle sur la mission de service public de l'hôpital public et
l'irréalisme des hypothèses de départ, qui sont celles de
la concurrence pure et parfaite12, au regard d'un marché
hospitalier aux nombreuses imperfections, les économistes s'orientent
alors vers la théorie économique de la bureaucratie.
Cette dernière présente des limites du moment
où, un bureaucrate, le chef d'établissement, manipule
l'information dont il a le monopole afin de s'arroger un budget
discrétionnaire qui prend la forme de rentes, éventuellement
partagées avec les médecins13. Dépenses
injustifiées, efforts sous optimal, caractérisent la gestion du
bureaucrate.
La stratégie adoptée aujourd'hui par le Burkina
Faso et que la plupart des pays cherchent à adapter à leur
contexte est la création du statut d'établissement de
santé. L'établissement de santé est doté d'une
autonomie de gestion. L'objectif est de redonner un rôle aux jeux des
mécanismes économiques en palliant les méfaits aussi bien
du marché livré à la logique du « make profit »
que de la bureaucratie professionnelle (Mintzberg, 1982) où l'effort est
mis sur le travail administratif et non sur l'activité
professionnelle14. La notion de démarche de projet est la
pièce maîtresse de ce modèle.
11 Charles E. Phelp, les fondements de
l'économie de la santé, 1994.
12 Les hypothèses des marchés de
concurrence pure et parfaite sont : l'atomicité, la mobilité
parfaite des ressources, l'information parfaite,
l'homogénéité des produits.
13 Frédéric PIERRU, L' «
hôpital-entreprise » Une self-fulfilling prophecy avortée,
1999 , Vol. 12 , n° 46, P 12.
14 Seydou BEYE, l'économie et la santé
dans une perspective managériale, éd L'Harmattant, 1999 ; Page
113.
Cette dernière notion devra permettre à
l'hôpital de maximiser son profit soit par la minimisation des
coûts de production, soit par la maximisation du nombre de patients
traités et ou la qualité des installations (plateau technique) et
des compétences offertes (renommée des praticiens),
(Frédéric Pierrou)15.
|