La bonne foi dans le contrat d'assurance( Télécharger le fichier original )par Henriette E. KAMENI KEMADJOU Université de Douala - Master II Recherche 2008 |
CONCLUSION PREMIERE PARTIEL'assureur et l'assuré, unis par un contrat d'assurance, se doivent d'exécuter leurs différentes obligations281(*) de bonne foi. Ces obligations, ayant trait dans la majeure partie à l'information, la bonne foi joue alors le rôle d'outil visant à resserrer l'obligation d'information leur incombant. Sans avoir la prétention de limiter les différentes obligations découlant du contrat d'assurance à l'obligation d'information, les manifestations de la bonne foi dans les autres obligations des parties ont été tour à tour élucidées, démontrant à des périodes spécifiques du contrat le dépassement de l'obligation d'information, son caractère subsidiaire ou sa substitution par d'autres exigences. L'assuré et l'assureur sont de ce fait tenus de demeurer de bonne foi avant, pendant et après la conclusion du contrat qui les lie, car le non respect intentionnel de cette exigence étant réprimé de manière sévère282(*). Ceci n'est pas le cas lorsqu'ils commettent des fautes non intentionnelles encore qualifiées fautes de bonne foi. Dans ces derniers cas, les sanctions appliquées sont légères et ne visent qu'à rétablir l'équilibre financier rompu. Sur ce, la bonne foi est aussi considérée comme garante de l'équilibre financier du contrat d'assurance. BONNE FOI COMME MOYEN DE PRESERVATION DE L'EQUILIBRE FINANCIERIIème PARTIE : LALA BONNE FOI COMME MOYEN DE PRESERVATION DE L'EQUILIBRE FINANCIER DU CONTRAT D'ASSURANCEL'assureur tout comme l'assuré-souscripteur doit manifester sa bonne foi dans les diverses informations qu'il véhicule, que cela soit au moment de la formation du contrat ou en cours d'exécution dudit contrat, même lorsque survient le risque. Cette exigence synallagmatique de bonne foi dans les renseignements vise ainsi à assurer l'égalité des parties au contrat d'assurance. Bien informée dans leur rapport contractuel, chaque partie pourra alors défendre ses intérêts. Il s'agit dès lors pour ce qui concerne l'assureur, de prendre en charge un risque tout en assurant la rentabilité de son entreprise283(*) sous la forme d'une société anonyme ou d'une mutuelle284(*). Quant à l'assuré, celui-ci voudra transférer un risque probable à l'assureur en payant en contrepartie une prime ou cotisation convenable285(*). Ces intérêts étant beaucoup plus pécuniaires, la bonne foi est donc un outil visant à préserver l'équilibre financier du contrat d'assurance286(*). Venant du latin « Libra » qui a développé celui de « balance à deux plateaux ou à contrepoids » d'où « Librare » signifiant penser, et « aequilibrium » désignant l'équilibre287(*), l'équilibre se définit comme l'état de ce qui est soumis à des forces opposées qui se contrebalancent, l'état de stabilité, d'harmonie qui en résulte288(*). Gage de l'harmonie et de la stabilité dans un contrat d'assurance, la bonne foi est donc le moyen de maintenir le juste milieu dans les rapports contractuels existants entre l'assuré et l'assureur. Ainsi est-il toujours affirmé, la loyauté de l'assureur permettra à l'assuré de bien choisir la police d'assurance lui convenant avec une contrepartie à sa juste mesure. En retour, la sincérité de l'assuré conduira l'assureur à bien calculer la prime à payer par celui-ci. Cette prime doit aussi permettre à l'assureur, par le jeu de la mutualisation, d'indemniser l'assuré si jamais le sinistre survient : c'est l'équilibre financier289(*) voulu au moment de la conclusion du contrat d'assurance à travers la présomption de bonne foi. Cet équilibre financier est toutefois précaire car étant fragile, il peut être remis en question à tout moment290(*). Son aspect précaire est de ce fait justifié chaque fois que la mauvaise foi d'un des contractants est démontrée par la rupture des rapports contractuels. En plus, cet équilibre est restauré suite aux déclarations des circonstances nouvelles survenues en cours d'exécution dudit contrat (Chapitre I). Cependant, si le déséquilibre financier n'est constaté qu'à la suite de la découverte d'une faute, qu'elle le soit avant ou après la réalisation du risque, les sanctions des fautes commises non intentionnellement ne sont que légères. Ces fautes commises de bonne foi ne sont donc réprimées qu'à travers des mesures ne visant qu'à sauvegarder l'équilibre financier entre les différentes parties, contrairement à celles commises de mauvaise foi dont les dispositions revêtent un caractère punitif (Chapitre II). A CHAPITRE I : LA PRECARITE DE L'EQUILIBRE DU CONTRAT D'ASSURANCE ISSUE DE LA PRESOMPTION DE BONNE FOI T'ASSURANCE ISSUE DE LA PRESOMPTION DE BONNE FOI Il existe entre l'assureur et l'assuré un déséquilibre naturel issu non seulement de la nature du contrat d'assurance mais aussi de la qualité de ces contractants. A propos de la nature dudit contrat, le contrat d'assurance est un contrat d'adhésion préétabli par l'assureur, l'assuré n'y venant que pour y adhérer. Il y a donc de forte possibilité que l'auteur du contrat y introduise des clauses qui vont dans son seul intérêt291(*). S'agissant de la qualité des cocontractants, on a d'un côté un assureur professionnel maitrisant les rouages de ce secteur d'activité, et de l'autre côté un assuré consommateur qui est très souvent profane292(*). Si l'on ne se focalisait que sur ces deux raisons, il devrait à coup sûr ne jamais exister de contrat d'assurance. Pour faire face à cet état de chose, le législateur en matière d'assurance, en vertu des pouvoirs que lui confèrent les arts. 1349 et suivants du Code civil, a donc mis en oeuvre une présomption de bonne foi293(*) replaçant les parties à une égalité contractuelle. C'est ainsi qu'est créé un équilibre de base ou primaire du contrat d'assurance lors de sa conclusion (Section I). Mais force est de constater qu'il s'agit d'un équilibre précaire qui peut être revu à tout moment du déroulement du contrat. Ainsi, il est rompu lorsque la preuve de l'agissement de mauvaise foi de l'un des cocontractants est démontrée ou bien rétabli suite aux déclarations nouvelles d'une partie de bonne foi (Section II). Cet équilibre présumé devient dans ce dernier cas parfait. SECTION I / L'EQUILIBRE PRIMAIRE A LA CONCLUSION DU CONTRAT D'ASSURANCEPar le biais de la rencontre des volontés au moment de la conclusion du contrat, le déséquilibre naturel du contrat d'assurance se transforme en un équilibre artificiel, car façonné par les parties. Mais c'est un artifice particulier parce que voulu par les cocontractants. De ce fait, il parait plus réel que jamais. Dès lors, il est considéré qu'il existe entre les parties une sorte d'équilibre de base dont la manifestation (§II) ne peut mieux être comprise que si l'on s'attarde sur ses fondements (§I). * 281 Il s'agit des obligations contractuelles, légales et même professionnelles. * 282 Comme sanctions sévères, il s'agit de la nullité du contrat et paiement des dommages et intérêts pour l'assuré de mauvaise foi (engagement de sa responsabilité civile). Quant à l'assureur de mauvaise foi, il est tenu au paiement des amendes et/ ou privé de sa liberté (engagement de sa responsabilité pénale). * 283 ALLA (K.A), L'escroquerie à l'assurance et ses implications, quelles solutions, mémoire I.I.A, 2000, p. 28. Il affirme que « l'assureur n'est pas un philanthrope ». * 284 Voir art. 301 du Code CIMA, op. cit., p. 129. Cet article énonce en son al. 1 : « Toute entreprise... ». * 285 BERR (C-J) et GROUTEL (H), Droit des assurances, op. cit., p. 37. * 286 Voir la décision de la cour de cassation française en sa première chambre civile suite à l'audience publique du 16 mars 2004 opposant l'Association Foyer des Jeunes Travailleurs à la Société les Repas Parisiens relativement à un contrat de sous concession. Pour ladite cour, la bonne foi doit permettre aux parties de maintenir un équilibre économique existant entre eux. * 287 PINOCHE (J), Dictionnaire Etymologique, op cit., p. 391 et 392. * 288 MAUFFREY (A) et COHEN (I), Dictionnaire HACHETTE langue française, op cit., p. 414. * 289 D'après la définition du mot « financier » selon le dictionnaire HACHETTE (relatif à l'argent dont dispose une personne ou un groupe), le juste milieu voulu lors de la conclusion du contrat d'assurance est un équilibre financier parce qu'ayant trait à l'argent dont dispose chacun des contractants. * 290 MAUFFREY (A) et COHEN (I), Dictionnaire HACHETTE langue française, op cit., p. 873. Précaire se définit comme ce «qui est incertain, sans base assurée, qui peut être remis en question à tout moment ». * 291 FIL (P), L'obligation d'information et de conseil en matière d'assurance, op. cit., p. 2. Il affirme que « Dans un contrat d'adhésion, il y a déséquilibre réel entre les parties » * 292 Ibid. * 293 Cette présomption de bonne foi obéit aux règles des arts. 1349 et suivants du Code civil camerounais. En effet, elle est issue de la loi conformément à l'art. 1350 dudit Code ; qui y a admise la preuve contraire telle que stipulée à l'art. 1352 al. 2 de ce Code. Ce dernier article prescrit : «Nulle preuve n'est admise contre la présomption de la loi, lorsque, sur le fondement de cette présomption, elle annule certains actes ou dénie l'action en justice, à moins qu'elle n'ait réservé la preuve contraire ». |
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