Le document de politique d'électrification rurale est
décliné en programmes et comprend un programme d'action,
c'est-à-dire un cadre précis avec trois phases (une phase de
96 Article 25 : Obligations relatives à la
fourniture d'énergie électrique ; Section V : Droits et
obligations des Concessionnaires et Exploitants ; Code de
l'électricité en République du Bénin
97 Ministère des Mines, de l'Énergie et
de l'Hydraulique, Direction Générale de l'Énergie s.d.c,
29
98 De Gouvello et al. op.cit., 57-60
99 Article 36 et 27 ; Section VII : Régimes de
l'auto production ; Chapitre III : Régime juridique du secteur de
l'électricité
préparation 2006-2007, une phase de lancement
2008-2010 et une phase de consolidation et développement des actions
d'électrification rurale 2011-2015). Le but affiché est de
créer les conditions pour favoriser l'accès des populations
rurales à l'électricité pour les usages domestiques,
communautaires et le développement des activités
économiques, dans l'optique qu'elles ne peuvent supporter seules les
coûts du service et parce que l'électrification rurale se fait
dans une logique de service public, étant donné que dans les PED,
les coûts du service sont généralement supérieurs
aux capacités de paiement et aux disponibilités à payer
des populations rurales100.
De plus, les pouvoirs publics - pour
impulser l'électrification rurale - doivent mettre en
oeuvre un mécanisme de financement de l'électrification rurale
pour que cette dernière soit réalisable. Pour résoudre le
problème du secteur privé étranger habituellement non
intéressé par l'électrification rurale en raison des
faibles taux de retour sur investissement et d'absence de stratégies
d'implication du secteur privé locale, il est préconisé
d'avoir une agence, un programme et un fonds d'électrification rurale
s'appuyant sur une loi d'électrification rurale101. C'est
ainsi qu'au Bénin un Fonds d'Électrification Rurale (FER) a
été mis en place. Il tire une partie de ses ressources de
dotations de l'État. Seulement, l'effort financier ne
provient pas entièrement de l'État étant donné que
les ressources de tout pays en développement sont limitées et
qu'il y a des arbitrages à effectuer pour les répartir entre les
différents secteurs (santé, éducation, etc.), sans compter
que le Bénin ne possède aucune ressource du sous-sol (ni
pétrole, ni diamant, ni or...) ainsi que très peu d'industries et
la majorité de ses devises proviennent principalement de l'agriculture.
De plus, l'électrification rurale exige un investissement continu et
durable. On fait ainsi appel à des ressources extérieures
publiques et privées (subventions de bailleurs de fonds, dons, legs et
emprunts) mais également à des prélèvements sur les
acteurs de l'électrification avec des redevances à payer par les
concessionnaires et des prélèvements sur les kilowattheures
vendus aux consommateurs (taxe de 3 FCFA par kWh). D'autres sources de
financement sont également cherchées pour pouvoir atteindre
l'électrification chaque année d'au moins 150 localités
rurales et qu'en 2015 le taux d'électrification rurale soit de 40%. Pour
parvenir à ces objectifs 35 à 40 milliards chaque année de
Francs CFA sont nécessaires.
100 Antoine Nogier et Rafik Missaoui définissent la
capacité de paiement comme la capacité des ménages
à payer un service électrique correspondant à leurs
besoins (liée à la contrainte monétaire des
ménages). La disponibilité à payer est quant à elle
définie comme le montant moyen que les usagers sont prêts à
dépenser par mois en tenant compte de leurs besoins exprimés et
de leur acceptabilité du prix du service proposé. (De
Gouvello et al. op.cit., 139-174)
101 Wamukonya et al. op. cit., 41
Une taxe sur le litre d'essence et le gasoil fut
envisagée mais avec la flambée du prix du pétrole,
l'idée fut abandonnée. Il est donc plutôt prévu de
s'appuyer sur les ressources propres du système financier national, les
apports des entreprises de service de fourniture d'électricité en
milieu rural ainsi que ceux des collectivités locales. On envisage
également de faire appel aux fonds spéciaux du mécanisme
des Nations Unis (pour les projets d'électrification par les
énergies renouvelables102). Le double objectif du FER est de
promouvoir l'investissement privé pour l'électrification rurale
et d'impliquer les banques commerciales nationales ainsi que les institutions
de micro finances dans la mise en oeuvre de la politique de financement de
l'électrification rurale au Bénin.
De tels dispositifs s'inscrivent dans l'optique qui veut que
subventionner l'électrification rurale permet de créer des
conditions de rentabilité sur trois niveaux : la subvention compense la
rareté des capitaux et des prêts à long terme ; elle
réduit les charges financières (capitaux investis et
dettes), ce qui équilibre la rentabilité
financière de l'électrification rurale et permet de
réduire les tarifs ; elle permet d'imposer des exigences de
qualité, de fourniture de service publique à des tarifs
particuliers (exemple : centres communautaires) et de garantie103.
Par ailleurs, ces subventions directes104 permettent une
équité entre ruraux et urbains et peuvent inciter à
promouvoir des sources d'énergie propre.
Ainsi les ressources du FER sont placées sur un compte
de la BCEAO et sont utilisées comme ressources d'investissement, de
garantie des emprunts, d'avance remboursable et de subvention ainsi que de
prêt participatif pour les opérateurs. Les utilisateurs doivent
ouvrir un compte d'épargne et les opérateurs un compte courant
dans une des institutions décentralisées de crédit et
d'épargne. Ce sont les banques qui ont la décision finale en
terme d'attribution de crédit.
Par ailleurs, dans le document sur les mécanismes de
financement de l'électrification rurale105,
on envisage de
mettre en place un régime fiscal spécial pour les projets
d'électrification rurale
102 Dans le cadre de la convention Climat et du protocole de
Kyoto, deux mécanismes financiers ont été mis en place
pour les projets induisant des réductions d'émission de CO2 dans
les pays du Sud : le Fonds pour l'environnement mondial (Fem) et le
Mécanisme de Développement Propre (MDP).
103 Massé 2004, 16
104 Selon Antoine Nogier et Rafik Missaoui, il y a deux types
de transferts : les subventions croisées et les subventions directes.
Ces premières sont des transferts monétaires entre les secteurs
ou consommateurs pour lesquels le service est « sur-tarifé »
et ceux pour qui il est « sous-trarifé » (comme pour les
tarifs de la SBEE). Les secondes sont quant à elles allouées
directement par l'État sur son propre budget pour certains
consommateurs. (De Gouvello et al. op.cit., 139-174)
105 Ministère des Mines, de l'Énergie et de
l'Hydraulique 2005, 10
avec, éventuellement, une
exonération de la taxe douanière sur le matériel et les
équipements destinés à l'électrification des
localités rurales, une exonération de la TVA pour les achats
locaux de matériels et autres, afin de réduire le coût des
projets et d'attirer l'investisseur privé. Le schéma de base pour
le financement des investissements - tel qu'il se trouve dans le Programme
d'actions pour l'électrification des localités rurales du
Bénin106 - est décomposé comme suit :
· un autofinancement de l'opérateur d'au moins 15
à 20% de l'investissement
· une contribution des localités locales
jusqu'à 10% de l'investissement initial
· des crédits aux opérateurs
> avance de 30% de l'investissement initial accordée
à l'opérateur par l'État, remboursable sans
intérêt sur cinq ans à partir de la sixième
année
> 40 à 45% de crédits : crédits sur
les ressources du fonds de crédit des bailleurs de fonds (pourcentage
négocié par les bailleurs de fonds) et crédits sur les
ressources propres des banques commerciales
> (si nécessaire) subvention pour l'opérateur
afin de garantir une rentabilité financière