Diagnostic et redressement des entreprises en difficulté( Télécharger le fichier original )par Samir MEZIANE SIBF -Alger - D.E.S. Banque 2008 |
4.3 Les démarches du diagnostic stratégique :Les premières méthodes : ² Le cycle de vie du produit : Cette méthode estime que le produit traverse durant sa vie quatre étapes : le lancement, la croissance, la maturité et le déclin. Lors de son lancement, le produit nécessite des moyens financiers plus importants que ceux qu'il est en mesure de générer. La demande de ce produit sur le marché évolue lentement. Par la suite, en phase de croissance, cette demande augmente et les bénéfices deviennent plus importants. La maturité va se caractériser par des gains importants qui commencent à faiblir pour laisser la place à des pertes durant la phase de déclin. Chiffre d'affaires Temps Lancement Croissance Maturité Déclin Schéma25(*) : le cycle de vie du produit La construction de cette courbe permet à l'entreprise d'apprécier l'évolution potentielle de son marché et de positionner ses différents produits. Ainsi, l'entreprise pourra visualiser la répartition de son portefeuille, apprécier les risques inhérents et envisager les actions nécessaires pour assurer sa pérennité. ² La courbe d'expérience : Cette courbe exprime la relation entre le coût et la production ; chaque augmentation de la production va se solder par une diminution du coût. Ce phénomène s'explique par deux facteurs essentiels : l'effet d'apprentissage et l'économie d'échelle. Pour bénéficier de l'effet de la courbe d'expérience, l'entreprise doit augmenter sa part de marché. Ainsi, elle dispose d'un avantage par rapport à ses concurrents, celui de coûts plus bas et de prix de vente plus compétitifs (domination du marché par les coûts). Néanmoins, la réussite de cette domination suppose la maîtrise de ses risques qui sont notamment : l'évolution du progrès technique, l'imitation et les investissements plus modernes des concurrents et la baisse de la capacité d'innovation du fait de l'obsession des coûts. ² Les check-lists : Cette méthode consiste à examiner l'ensemble des activités de l'entreprise à l'aide d'un très grand nombre de variables regroupées selon les différentes fonctions de l'entreprise. Ainsi, elle offre l'avantage de passer en revue une multitude de points de fonctionnement et de dysfonctionnements éventuels. Cependant, elle reste descriptive et ne s'intéresse pas aux relations qui peuvent exister entre les différentes données de l'entreprise.
Après avoir défini les différents segments stratégiques de l'entreprise (la segmentation stratégique), il va falloir les analyser en profondeur en couplant analyse externe et analyse interne. L'analyse de l'ensemble du portefeuille d'activités de l'entreprise peut être entamée par la suite en utilisant les modèles d'analyses stratégiques. ² L'analyse externe : Elle consiste à analyser la demande, l'offre et l'évolution de l'environnement et à identifier les facteurs de succès spécifiques. · L'analyse de la demande : les principales données à examiner concernent le type de clientèle, le type de besoins satisfaits et le volume de la demande sur le segment. · La détermination des facteurs de succès du segment : il s'agit d'identifier, pour chaque segment stratégique, les facteurs clés de succès et les compétences à maîtriser pour favoriser le développement de l'entreprise. · L'analyse de l'offre : elle consiste à apprécier la consistance de l'offre et à analyser le potentiel de la concurrence. · L'analyse de l'évolution de l'environnement : cette analyse doit porter sur les évolutions à moyen et à long terme dans les différents domaines d'activité afin de procéder à l'évaluation future de l'intérêt des domaines d'activités stratégiques pour l'entreprise. ² L'analyse interne : Cette analyse passe par les étapes suivantes : · Rappel préalable sur la finalité de l'entreprise : le rappel de la finalité de l'entreprise et de ses grands objectifs généraux permet de définir une base de référence pour analyser les segments stratégiques de l'entreprise dans une perspective globale. · L'évaluation du degré de maîtrise des facteurs clés de succès par l'entreprise : après avoir identifié et hiérarchisé les facteurs clés de succès pour chaque D.A.S. lors de l'analyse externe, il convient de mener, au niveau de l'analyse interne, une démarche d'évaluation du potentiel interne par rapport à ces mêmes facteurs de succès. · L'évaluation de la position concurrentielle : il s'agit de définir la position relative de l'entreprise par rapport à celle de ses principaux concurrents, notamment sur les points considérés comme fondamentaux. · La détermination des compétences requises et des nouvelles ressources nécessaires : il convient d'évaluer les besoins futurs en hommes et en matériels, et de prévoir les moyens financiers nécessaires au renforcement et au remplacement des moyens existants.
L'analyse de l'ensemble des activités qui constituent le portefeuille de l'entreprise consiste à apprécier leur valeur intrinsèque et leur importance vis-à-vis de la concurrence en vue de définir pour chaque DAS la stratégie la plus adaptée et l'investissement le plus approprié. Cette analyse peut être menée à partir de différents modèles d'analyse stratégique développés par des auteurs ou cabinets de conseil anglo-saxons. On peut distinguer deux courant principaux : P L'analyse classique. P L'analyse industrielle de Michael Porter. · L'analyse classique : Il s'agit, principalement, des méthodes élaborées par les grands bureaux de consulting tels le Boston Consulting Group (B.C.G.), Arthur.D. Little (A.D.L.) et Mc Kinsey. Ces méthodes se caractérisent par une démarche commune constituée de deux étapes : - Analyse stratégique des différentes activités de l'entreprise. - Aide à la formulation d'orientations stratégiques propres à chaque secteur d'activité. Chacune de ces méthodes est basée sur deux concepts fondamentaux : l'état du marché et son évolution et la position concurrentielle de l'entreprise dans chaque D.A.S. 1. le modèle du Boston Consulting Group (B.C.G.) : La méthode B.C.G. permet de classer les domaines d'activités de l'entreprise selon deux critères :
La combinaison de ces deux paramètres permet d'obtenir la matrice du BCG constituée de quatre situations stratégiques très différentes : VEDETTES Contribuent à la croissance et s'autofinancent. DILEMMES Contribuent à la croissance mais réclament des liquidités. VACHES A LAIT Contribuent peu à la croissance mais fournissent des liquidités. POIDS MORTS Ne contribuent ni à la croissance ni aux profits. Taux de croissance du DAS (utilisation des liquidités) Faible Fort Forte Faible Part de marché dans le DAS (génération de liquidités)
Forte faible Schéma26(*) : la matrice du BCG La représentation des principaux domaines d'activités stratégiques de l'entreprise dans les différentes cases de la matrice permet de vérifier l'équilibre de son portefeuille et de déterminer les stratégies envisageables pour chaque activité : se maintenir, se développer ou se retirer. La meilleure situation consiste, pour une entreprise, à disposer à la fois d'activités mûres susceptibles de générer des liquidités, et d'activités en démarrage ou en croissance, chargées d'assurer à terme la relève. La méthode du B.C.G. est utile pour une première analyse stratégique du fait de sa grande simplicité de construction et d'interprétation. Cependant, elle présente quelques limites à son utilisation telles le fait qu'elle ne prend pas en considération les effets de l'innovation technologique et suppose la libre concurrence sur le marché. En fait, elle est trop simpliste pour représenter la réalité. Pour répondre à ces critiques, le Boston Consulting Group a préparé une autre matrice qui tient compte des différents systèmes concurrentiels. Cette matrice se compose de deux axes : P L'importance de l'avantage concurrentiel qui peut être crée sur les concurrents (faible ou élevé). P Le nombre de façons de l'obtenir, c'est-à-dire le nombre de sources de différentiation concurrentielle. Le croisement des deux axes permet de définir les quatre grandes catégories d'industrie présentées dans le schéma27(*) suivant : Métiers fragmentés Métiers de volume Métiers spécialisés Impasses Avantage concurrentiel Sources de différentiation Faible Elevé Multiples Limitées Schéma : la nouvelle matrice du B.C.G.
· Les métiers fragmentés : présentent une multitude de manières de se différencier, mais l'avantage concurrentiel est faible. · Les métiers spécialisés : se caractérisent par un nombre élevé de manières de se différencier avec, pour chaque différentiation, une possibilité de créer un avantage concurrentiel important. · Les métiers en impasse : il y a peu de possibilités de se différencier et de créer des avantages concurrentiels durables. Il est dans ce cas difficile de définir une stratégie. · Les métiers de volume : se caractérisent par l'existence d'une démarche stratégique unique s'appuyant sur la domination par les coûts. 2. le modèle d'Arthur D.Little (ADL) : Le modèle ADL repose sur une approche un peu différente des deux dimensions initialement étudiées par le BCG. Il s'agit d'une approche multicritères regroupés autour de deux dimensions :
La maturité du secteur : elle est appréciée selon son stade d'évolution : démarrage, croissance, maturité, déclin. La détermination du taux de maturité d'un secteur se fait à partir des indicateurs suivants : taux de croissance, potentiel de croissance, gamme de produits, nombre de concurrents, distribution des parts de marché, stabilité des parts de marché, stabilité de la clientèle, facilité d'accès au secteur et la technologie. La position concurrentielle de l'entreprise : il ne s'agit pas de se limiter à la part de marché relative, mais d'examiner également la position de l'entreprise vis-à-vis des facteurs clés de succès du segment stratégique considéré. Selon le cas, la position concurrentielle peut être appréciée comme : dominante, forte, favorable, défavorable ou marginale. La matrice d'ADL se présente comme suit : Maturité du secteur
Position concurrentielle Dominante Forte Favorable Défavorable Marginale
Schéma28(*) : la matrice d'ADL 3. le modèle Mc Kinsey : Ce modèle présente le portefeuille d'activités d'une entreprise à travers une matrice qui prend en compte deux critères :
Concernant le premier critère, le modèle Mc Kinsey relativise l'intérêt du secteur pour l'entreprise. Ainsi, la valeur relative du secteur peut être appréciée selon les critères suivants : la contribution de ce segment en termes financiers, les synergies avec les autres segments d'activités de l'entreprise, des raisons purement stratégiques ou politiques. Pour la position concurrentielle de l'entreprise, celle-ci est évaluée à l'aide de facteurs liés aux approvisionnements, à la production et à la commercialisation. La matrice de Mc Kinsey se présente comme suit : Position concurrentielle Faible Modérée Elevée Elevé Attrait du marché
Modéré Faible Schéma29(*) : la matrice de Mc Kinsey · L'analyse industrielle de MICHAEL PORTER : La démarche proposée par M.Porter comporte trois volets : P La détermination des forces concurrentielles. P L'analyse de la structure industrielle. P La détection des avantages concurrentiels. 1. la détermination des forces concurrentielles : Porter identifie cinq forces qui influencent l'état de la concurrence dans un secteur : l'entrée de nouveaux concurrents, la menace de produits de remplacement, le pouvoir de négociation des clients, le pouvoir de négociation des fournisseurs et la rivalité entre les concurrents existants. L'intensité de ces forces détermine le niveau de profit final d'une activité. L'objectif stratégique d'une entreprise consistera, donc, à faire face à la force concurrentielle la plus importante qui va influencer la rentabilité d'un secteur. 2. l'analyse de la structure industrielle : Après avoir identifié et hiérarchisé les principales forces concurrentielles d'un secteur, il conviendra, dans une deuxième étape, d'établir une véritable carte de l'industrie montrant les principales forces et faiblesses, les concurrents les plus importants et les moyens utilisés par cette concurrence. La carte de l'industrie peut être dessinée autour des principaux groupes stratégiques, chacun étant formé de l'ensemble des entreprises d'un secteur qui suivent la même stratégie ou une stratégie voisine selon les dimensions stratégiques suivantes :
Cette carte permet à l'entreprise de définir en fonction de ses moyens soit une stratégie autonome, soit une stratégie de rapprochement ou de recherche de position plus forte au sein du groupe dominant.
L'avantage concurrentiel constitue un facteur de succès que l'entreprise pourra exploiter pour améliorer sa position concurrentielle. Son analyse passe par l'examen de toutes les activités qu'exerce l'entreprise en utilisant un outil appelé « chaîne de valeur » proposé par Porter. Cet instrument permet de faire ressortir les activités créatrices de valeur et les facteurs clés de succès de l'entreprise. Il s'agit en fait d'identifier les différentes phases d'élaboration d'un produit ainsi que les liaisons existant entre celles-ci pour comprendre où et comment l'entreprise crée de la valeur. Il convient également de mettre en évidence les liaisons qui existent entre la chaîne de l'entreprise et les chaînes des fournisseurs et des circuits de distribution. L'avantage concurrentiel sera alors déterminé par comparaison aux chaînes de valeur de la concurrence. En conclusion, on peut constater que les différentes méthodes d'analyse stratégique étudiées se distinguent par le nombre de variables choisies, l'étendue du champ concurrentiel, le degré de finesse et la facilité de mise en oeuvre et d'interprétation. Le choix de la méthode appropriée doit être arrêté en fonction des circonstances, du temps, du degré de difficulté de l'entreprise et des ressources consacrées au diagnostic. Le diagnostic met en lumière les faiblesses ainsi que les forces de l'entreprise en difficulté dans ses dimensions financière, commerciale, technique, organisationnelle et sociale. Il s'inscrit, de la sorte, dans un mode de gestion prévisionnelle et de management stratégique, et apparaît donc comme un outil d'aide à la décision permettant de se prononcer sur les chances de survie de l'exploitation et d'orienter l'action des responsables dans une perspective de gestion pragmatique. Ainsi, le recours au diagnostic constitue t-il, non seulement une exigence de bonne gestion, mais également un préalable à toute tentative de redressement. *** *** *** CHAPITRE III : * 25 C.BUSSENAULT & M.PRETET, Organisation et gestion de l'entreprise : direction de l'entreprise et diagnostic, Vuibert, paris, 1999, p 263. * 26 C.BUSSENAULT & M.PRETET, Organisation et gestion de l'entreprise : direction de l'entreprise et diagnostic, Vuibert, paris, 1999, p 264. * 27 A.C.MARTINET, Diagnostic stratégique, Vuibert entreprise, paris, p 74. * 28 J.P.THIBAUT, Le diagnostic d'entreprise, SEDIFOR, Corenc, 1989, p 286. * 29 J.P.THIBAUT, Le diagnostic d'entreprise, SEDIFOR, Corenc, 1989, p 289. |
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