CHAPITRE IV : RESULTATS ET DISCUSSION
4.1. Ressource, acteurs, usagers et usages
La croissance démographique combinée à
l'effet de changement climatique a un impact grandissant sur les ressources en
eau dans la zone. La disponibilité de la ressource en eau est
très variable sur les sites de la commune Bouza qui présente une
grande aridité et les sites de la commune de Madaoua où sa
disponibilité est acceptable. Mais on n'a un problème
d'infrastructure dans les deux (2) communes. Les infrastructures hydrauliques
et leurs états se trouvent dans le tableau 3 de l'annexe 2. Les photos
4, 5 illustrent la corvée d'eau à pied et à dos
d'âne loin des villages. Une étude Barré et al.,
2009 a montré la même problématique dans le
département de Dakora plus précisément dans les communes
de Ajékoria et Birni Lallé. Il ressort de cette étude que
dans la plus part des villages des deux (2) communes la même
problématique se pose qu'à Bouza, les femmes et les enfants font
plus des dizaines de kilomètre pour s'approvisionner en eau. Les photos
4, 5 illustrent la corbeille d'eau à pieds et à dos d'âne
loin des villages. Notons par ailleurs que le mode de gestion communautaire de
l'eau dans la zone d'étude est très variable. Il implique une
organisation pratique aussi bien des acteurs et usagers. En fin, on distingue
très grande diversité d'acteurs et d'usagers selon les communes
étudiés.
saison sèche à Takaraoua, un village voisin
situé en bordure du bas fond à 1,5 km au Nord de Karofane. Dans
la ville de Bouza, il y'a une diversité paysagère qui a un impact
sur l'approvisionnement en eau potable de la population. On observe très
souvent de pénurie d'eau, ce qui amène les populations à
s'approvisionner dans le village Koupouptché situé sur le versant
à environ 7 km de Bouza.
~ Contrairement aux sites de la commune de Bouza, les sites de
la commune de Madaoua : Gadambo, Nassaraoua et Sabon Guida, le
problème de l'eau ne pose pas en général mais, il y'a un
problème crucial d'infrastructure hydraulique comme à Bouza. A
Sabon Guida, le matériel de construction de puits PVC est disponible
partout sur les marchés mais il y'a un problème
prépondérant concernant de la construction des latrines. La
population est très hésitante à leurs constructions car
pour elle, la nappe est peu profonde cela peut être source de
contamination. Mais le P-GIRE dans sa démarche étant entrain de
mettre en place des latrines spécifiques hors sol en fonction des
caractéristiques zonales des sites. A Nassaraoua, comme à
Gadambo, le problème d'infrastructure se pose aussi malgré la
recharge de la nappe constatée par la population.
Au niveau de tous les sites, le problème d'hygiène
est visible. Les photos 6 et 7 montrent de moisissures auréolées
visible autour des puits.
La pression sur la ressource en eau est tellement grande que des
pertes en vies humaines sont souvent enregistrées lors de la
corvée d'eau autour des puits.
pour une gestion durable. L'étude de Moustapha A.
(2010) confirme cette diversité concernant leurs rôles à
divers degrés depuis la conception jusqu'à l'exploitation de
l'eau. Ces derniers jouent un rôle est très important dans la
sensibilisation, l'organisation des associations, médiation et la
conciliation en cas des conflits et l'exploitation rationnelle équitable
et raisonnable des ressources en eau.
Depuis la mise en oeuvre de la décentralisation, les
communes, en tant que structures administratives territoriales
décentralisées, ont la personnalité juridique et
l'autonomie financière de gérer leurs ressources naturelles. Cela
leur confère à ce titre les compétences pour exercer la
maîtrise d'ouvrage dans le domaine de l'approvisionnement de l'eau
potable à la population.
4.1.3. Usagers et usages
Les différents usages autours de la ressource en eau
sont presque identiques aussi bien sur les sites des communes de Madaoua que
ceux de Bouza. Il s'agit de : la consommation, l'abreuvage, la pêche, la
briqueterie, l'abattoir, la poterie, la vente, le maraichage et l'usage
culturel.
De tous ces usages, on constante une grande variabilité
de l'utilisation de l'eau en fonction des besoins des différents
usagers. La plupart de ces usages sont présents sur tous les sites, il
s'agit de la consommation, l'abreuvage, la briqueterie, usage culturel et la
poterie. La pêche et le maraîchage sont plus présents sur le
site de la commune de Bouza du fait de l'existence du mini barrage à
Guidan Bado. On y trouve aussi le maraichage sur l'un des sites de la commune
de Madaoua précisément à Sabon Guida. Il faut aussi noter
la présence des abattoirs à Bouza et Karofane ; sur les sites de
Bouza et sur l'ensemble des sites de Madaoua. Un aspect originel a
concerné l'étude, il s'agit du service de vente d'eau sur les
sites des communes Bouza et Madaoua. A Bouza, notamment sur le site de
Karofane, des vendeurs et vendeuses d'eau sont placés dans les coins
stratégiques du marché avec des tonneaux de 180 litres. Ils sont
situés aux alentours du marché pour faciliter leurs
visibilités. Contrairement à Madaoua plus
précisément sur le site de Gadambo, des forages privés
sont construits par des particuliers dans leurs champs pour la vente. Il existe
aussi des forages communautaires appartenant au village ou la vente est
dirigée par un comité de gestion notamment à
Massaraoua.
4.2. Revenu du service de l'eau
Le revenu du service de l'eau est très varié, et
concerne aussi bien les hommes, les femmes que les enfants des sites de Bouza
et Madaoua.
~ A Bouza notamment sur le marché de Karofane, le
gobelet d'un litre est vendu à 10 F.CFA. Le tonneau de 180 litres,
initialement acheté 400 F.CFA au puits est vendu à 1800 F.CFA
avec une marge brute de 1400 F.CFA par tonneau. Cette activité est faite
tous les jours
de marché avec une fréquence 3 à 5 tours
au puits avant la fin de la journée. A des moments très chauds de
la journée, elle peut atteindre 7-8 tonneaux par jour. Elle procure
beaucoup de revenu au « Gâ roua » (vendeur d'eau en
Haoussa).
~ A Madaoua, précisément à Gadamdo ; la
vente d'eau se déroule dans les champs. Des particuliers ont construit
dans leurs champs de forages privés de vente d'eau sur place. Le bidon
de 20 litres est vendu à 10 F.CFA. Ils peuvent vendre plus de 10
tonneaux par jours. La population apprécie beaucoup cette eau.
Il a été constaté une autre forme de
vente d'eau à Massaraoua, site de Madaoua et Koupouptché, site de
Bouza où les populations se sont entendues pour mettre en place un
comité de gestion des fonds de leur seul forage communautaire du
village. Le bidon de 20 litres est vendu à 5 F.FCFA. Les photos 8
à 10 donnent un aperçu de la vente d'eau à Karofane et
Gadambo.
Au niveau de tous les sites, le service de vente d'eau est
surtout organisé autour des forages car leur fonctionnement et leur
gestion demandent un fonds de roulement pour l'achat des pièces de
rechange. Par ailleurs, l'eau est presque gratuite sur tous les sites. Il
n'existe pas de vente d'eau au niveau des puits cimentés et
traditionnels. La prise d'eau se fait de façon continue à
n'importe quel moment de la journée.
4.3. Usages culturels de l'eau
L'eau occupe une place très importante dans la vie des
communautés son manque où son abondance cause problème.
Des us et coutumes sont bien développés dans la zone
d'étude. Selon la population, en cas de retard des pluies, des
cérémonies d'imploration des dieux de l'eau sont
organisées. Ce type de cérémonial dépend des
villages et des traditions. Il existe par exemple des interdits comme : `'ne
jouez pas avec de l'eau, ne refusez pas l'eau aux étrangers, ne partez
pas la nuit au bord des marigots, ne laissez pas les enfants jouer autour des
puits, car les dieux de l'eau peuvent se fâcher et tuer
quelqu'un».
Un aspect anthropologique est visible à Karofane
où la population attribue le problème actuel du manque d'eau au
gaspillage de l'eau que les femmes font lors des corvées d'eau. Selon la
population, au moment où il y'avait de l'eau en abondance, les femmes en
se croisant sur le chemin du puits se tiraillent l'une de l'autre
jusqu'à faire verser leurs seaux et retournent ensuite ensemble au puits
pour se réapprovisionner. Cette pratique est bannie actuellement, des
sanctions populaires (réprimandes) étant infligées aux
récalcitrantes.
Des rites traditionnels sont organisés à
Karoufane, Koupouotché, Nassaraoua et Bouza comme « Allah Yan
Kassa » organisé par les populations en cas de retard des
pluies. A cette occasion, les femmes portent les habits de leurs maris et se
dirigent vers la brousse où danses et chants sont organisés et un
bouc rouge est égorgé. La viande est partagée et il est
conseillé de manger toute la viande sans rien ramener au village. A
Sabon guida, un autre rite est organisé comme « Allé
» au cours duquel du mil est pilé et la pâte de mil est
préparée ; cette cérémonies réalisée
intégralement en brousse se termine par l'offrande d'une partie de la
pâte de mil aux puissances occultes, l'autre étant
consommées par les participants ; en règle
générale, la pluie se met à tomber avant la fin de la
cérémonie.
Un autre rite, `'la prière pour l'eau» est conduit
par des marabouts et `'boka» (féticheur traditionnel) en
cas de retards enregistrés des pluies ; ces dignitaires instruisent les
chefs de villages à faire des sacrifices à l'aide d'un bouc blanc
ou rouge dont la viande est partagée aux enfants du village. Selon eux
avant même la fin du sacrifice, la pluie commence à tomber.
Tous ses rites et traditions ont eu une place très
importante dans la gestion de l'eau. Mais aujourd'hui avec l'avènement
de l'islam, ces pratiques tendent à disparaître. Pouvons-nous
continuer à enterrer toutes ces traditions sans laisser des traces
à la génération future ?
4.4. Mode et l'organisation pratique de la gestion
communautaire des ressources en eau Il ressort de l'étude,
qu'il existe dans le temps jusqu'à nos jours une diversité de
gestion communautaire des ressources en eau et des infrastructures
hydrauliques. Les populations ont intégré dans leurs traditions
une gestion des leurs ressources en eau. On distingue deux (2) grandes types de
gestion communautaire des ressources en eau : la gestion traditionnelle
individuelle et la gestion traditionnelle participative.
4.4.1. Gestion traditionnelle individuelle
Il est attribué à une seule personne la
responsabilité de gérer la ressource en eau et infrastructures
hydrauliques dans un village. L'attribution et l'organisation du mode de
gestion relève du chef de canton ou de village. Au cours de cette
étude cinq (5) modes de gestion traditionnelle individuelle et leurs
organisations pratiques ont été déterminés.
4.4.1.1. Gestion traditionnelle
déléguée
Au cours de cette gestion, c'est généralement le
chef de canton qui délègue les chefs des villages pour
gérer chacun en fonction de son domaine de compétence les
ressources en eau et infrastructures hydrauliques dans son terroir. Le chef de
village organise la gestion et assure le règlement et gestion de
conflits. Cette gestion concerne toutes les ressources en eau. Il gère
directement lui-même les conflits. Mais, dans ce cas le tour d'eau n'est
pas permanemment contrôlé du fait du manque de la
disponibilité du chef du village. Ce type de gestion fait parti de
l'historique de la gestion traditionnelle des ressources dans la zone
d'étude.
4.4.1.2. Gestion traditionnelle
reléguée
Dans ce cas le chef de village après avoir
été délégué par le chef de canton se voit la
nécessité de décongestionner ses tâches. C'est ainsi
qu'il responsabilise les chefs de quartiers « Wakili » en
Haouassa pour lui assurer la gestion des ressources en eau. Ils lui rendent
compte de temps en temps au besoin. Ces derniers organisent le tour d'eau et
assurent la gestion des conflits. Au cas où certaines situations
dépassent leurs compétences, ils conduisent directement les deux
parties chez le chef de village pour la conciliation. Ce type de gestion est
organisé au tour des ressources en eau des puits et des forages. Il fait
aussi partie de l'historique de la gestion traditionnelle des ressources en eau
qui est pratiqué de nos jours dans tous les sites d'étude autour
des ressources en eau.
4.4.1.3. Gestion traditionnelle isolée
C'est un type de gestion traditionnelle où chacun voit
sa responsabilité de gérer lui-même les ressources en eau
de son domaine (Champs, maisons...). Cette gestion concerne
généralement les ressources en eau des mares, puits traditionnels
et forages dans les champs et dans la concession. Ce type de gestion se voit
généralement dans la plupart des sites. Il fait aussi partie de
l'historique de la gestion traditionnelle des ressources en eau des sites
d'étude. Chacun
détermine les normes d'utilisation de sa ressource en eau.
En cas de conflit, il essaie de gérer ça lui même. Au cas
où ils n'arrivent pas à s'entendre, il les porte chez le chef de
village.
4.4.1.4. Gestion traditionnelle
déléguée concertée
Le chef de village en concertation avec la population se voit
la nécessité de déléguer quelqu'un pour assurer la
gestion du puits ou forage. Ce type de gestion est présent autour des
puits cimentés, forages publiques. Généralement, cette
personne joue le rôle de surveillant de la ressource en eau et rend
compte directement au chef de village. Il joue le rôle de liaison entre
différents usagers en cas de conflits. Il assure le règlement des
conflits sur place avant d'être portés au chef de village. Il
organise le tour d'eau et veille à son respect. Il organise aussi les
quêtes et cotisations en cas des travaux de curage des puits et de
réparation des forages. Il assure la salubrité autour de la
ressource en eau avec l'aide du chef de village, de la population et des bonnes
volontés (les natifs du village qui ont les moyens). Ce type de gestion
est pratiqué actuellement sur des sites de Madaoua notamment à
Massaraoua et sur sites de Bouza précisément à
Koupouptché. Il fait aussi partie de l'historique de la gestion
traditionnelle de ressource en eau à Kaforane, avant le tarissement de
leurs puits.
4.4.1.5. Gestion traditionnelle « privée
»
Dans le temps, le service de vente de l'eau n'existe pas dans
les villages. Il est apparu du fait du problème de disponibilité
l'eau; c'est une gestion traditionnelle récente. Des habitants du
village qui ont les moyens y voient la nécessité de construire
des « puits-motopompes traditionnels » à fonctionnement avec
une motopompe. La vente est organisée par eux même dans leurs
champs. Généralement ce sont de tonneaux de 180 litres qui sont
remplis et la vente est faite en continue. En cas de conflits, le
règlement se fait sur place rare sont ceux atteignent le chef du
village. Il est pratiqué sur un des sites de Madaoua plus
précisément à Gadambo, où le service de l'eau n'est
pas gratuit au niveau du forage. Généralement ce sont des
propriétaires terriens qui construisent des forages traditionnels
assurant le service de vente de l'eau dans leurs champs. Il organise le tour
d'eau par ordre d'arrivée. Ce type de gestion est presque identique
à ce qui se passe au niveau de forages publics. Mais dans ce cas ci
l'argent n'est pas destiné à la communauté mais à
un privé.
4.4.2. Gestion traditionnelle participative
C'est le deuxième mode d'organisation pratique et de
gestion communautaire de ressources en eau. Elle est aussi l'un des modes de
gestion traditionnelle de ressources en eau le plus élaboré car,
elle permet aux différents usagers d'être impliqués dans la
gestion. On distingue trois (3) modes de gestion traditionnelle participative
des ressources en eau.
4.4.2.1. Gestion traditionnelle participative intra
village
Ce mode de gestion est plus visible dans les villages voisins
où la concertation est très grande. La population se concerte
pour déterminer des normes d'utilisation de l'eau. Ce type de gestion
s'applique autour de toutes les ressources en eau : puits, forages, mares
où toute la population se responsabilise pour assurer la gestion de ses
ressources en eau. Des amandes sont infligées à n'importe quelle
personne qui gaspille où laisse divaguer ces animaux dans zone de
délimitation. Généralement avant la mise en place de cette
amende, tous les usagers de la ressource sont informés au
préalable. La zone est déterminée par l'ensemble des
populations du village avec l'appui de services techniques du
développement rural. En cas de conflits on informe directement le chef
du village pour déterminer l'amende. Ce type de gestion est
appliquée au site de maraichage à Guidan Bado de la commune de
Bouza où les populations se sont responsabilisées pour la gestion
des leurs ressources en eau.
4.4.2.2. Gestion traditionnelle participative inter
village
Ce mode de gestion qui est visible au niveau des zones
pastorale où la population se voit dans l'obligation de se concerter
pour un bon usage de la ressource en eau. Cela y va de leur
intérêt car, ils sont pour la plupart des cas frustrés par
les populations sédentaires. Ce mode de gestion est pratiqué
surtout à Karofane plus précisément au niveau de puits
pastoraux de Guidan Ada, Guidan Hachi et Zongon Gandagui. La population
apprécie beaucoup cette pratique qui permet, selon elle, une importante
réduction des risques de conflits d'usage.
4.4.2.3. Gestion traditionnelle participative populaire
et volontaire
C'est un mode de gestion qui est généralement
pratiqué au niveau de tous les sites où toute la population se
responsabilise dans la gestion des ressources en eau. Cette gestion concerne
l'ensemble des ressources en eau dans une zone. Généralement la
population se voit l'obligation de veiller au bon usage de la ressource en
eau.
Au niveau du site de Nassaraoua dans la commune de Madaoua,
des jeunes volontaires du village se sont responsabilisés dans la
gestion de leur unique forage fonctionnel et puits du village. Ils ont mis en
place un « Kougiah » (association en Haoussa) composé
de quarante (40) membres qui veillent aux bons usages de la ressource en eau.
Il faut noter la place prépondérante jouée par le «
Sarki », (le président de l'association en Haouassa) qui
selon lui : `'toute personne utilisant de chiffons pour faire une corde
d'exhaure se verra sa corde coupée, de plus tout gaspillage, jeux ou
bousculade autour de la ressource sont formellement interdits. Il confirme
qu'il eu le plein pouvoir de la communauté dans le cadre de la
protection de ressources en eau et des infrastructures hydrauliques.
L'historique de l'organisation pratique de la gestion
communautaire des ressources est presque identique sur tous les sites.
Autrefois du fait de la disponibilité en eau, il n'était pas
nécessaire
d'organiser la gestion des ressources. En effet, selon eux
c'était une ressource naturelle intarissable qui appartient à
tous. A cette époque, la gestion des ressources en eau de puits
traditionnels et mares était faite seulement par les chefs de
village.
C'est par la suite que cette idiologie a changé du fait
des sécheresses répétitives et du phénomène
de changement climatique. C'est à partir de là que la population
a commencé à prendre conscience que cette ressource n'est pas
à gaspiller mais, à gérer.
De nos jours, cette conscientisation commence à gagner les
esprits car tout le monde comprend la nécessité de bien
gérer sa ressource en eau. C'est ainsi que :
~ la gestion traditionnelle déléguée
concertée ;
~ la gestion traditionnelle « privée » ;
~ la gestion traditionnelle participative intra village ;
~ la gestion traditionnelle participative inter village ;
~ la gestion traditionnelle participative populaire et volontaire
;
ont pris le devant sur toutes les gestions de la ressource en eau
pour une gestion durable, équitable et raisonnable de cette
ressource.
Dans la commune de Bouza le manque d'eau est perceptible
partout depuis quelques années. Les populations sont obligées de
parcourir des grandes distances pour chercher l'eau de boisson ; si bien que la
question du gaspillage ne pose même pas. Dans la commune de Madaoua la
disponibilité de l'eau évolue en dents de scie si certains
villages commencent à vivre les mêmes problèmes qu'à
Bouza, la plupart des sites n'ont pas un grand problème d'eau mais un
problème d'infrastructures hydrauliques. Le maraichage est bien
développé dans ces zones où des grandes quantités
d'oignons sont exportées vers l'étranger.
4.5. Typologie des conflits d'usage et proposition des
approches de solution
Les recherches sur le terrain ont permis de montrer
l'hospitalité réservée aux étrangers qui viennent
chercher de l'eau au puits. Cela est confirmé par la population de
manière suivante : il est interdit d'empêcher à tout
étranger de l'eau quelle que soit son origine. De l'avis de toutes les
personnes enquêtées des différents villages, il apparait
qu'il faut donnent toujours priorité aux étrangers pour prendre
de l'eau à boire. C'est pourquoi les conflits liés à l'eau
sont très négligeables dans les deux (2) communes. Tous les
conflits se résument sous deux (2) ordre : conflits entre un même
type d'usagers autour des ressources en eau et entre différents type
d'usagers autour des ressources en eau.
4.5.1. Conflits entre un même type d'usagers au
tour des ressources en eau
Les puits sont les infrastructures hydrauliques qui
enregistrent le plus de pression. Cela est dû à la
gratuité du service de l'eau car la population n'a pas d'argent tout le
temps pour l'achat du service de l'eau au forage. Au niveau des forages,
dans la plupart des cas, le service de l'eau
n'est pas gratuit. Le prix varie entre 5 à 25 FCFA le
bidon de 20 litres en fonction des sites. Les conflits autour des puits se
focalisent sur le tour d'eau où généralement de petites
bousculades pour avoir accès plus rapidement peuvent
dégénérer en bagarres rangées. Elles sont
généralement maitrisées sur place suivies des
réprimandes et de la conciliation. Rare sont celles qui atteignent le
chef des villages. Selon la tradition, il est interdit de se bagarrer autour
des puits car cela peut faire naître une malédiction du puits
entrainant son assèchement. De l'avis de certains usagers, les dieux de
l'eau peuvent se fâcher et l'eau du puits peut se retirer. Au niveau des
forages, du fait de présence d'un comité de suivi, le tour d'eau
est généralement respecté. De plus la vendeuse de l'eau
car contribue fortement à l'organisation du tour d'eau.
4.5.2. Conflits entre différents types d'usagers
et autour des ressources en eau
Cette problématique concerne les éleveurs et la
population sédentaire. Il faut noter qu'en saison pluvieuse du fait de
l'abondance de l'eau le problème ne se pose même pas à
cause de la formation de mares. Mais en saison sèche, la pression
animale est trop grande selon la population. Le peu d'eau qui reste dans les
puits et forages est rapidement consommé par les éleveurs. La
pression animale est telle importante qu'au niveau communautaire des
dispositions ont été prises pour y palier.
Dans la commune de Bouza, au niveau de campements
d'éleveurs de Gidan Ada, Gidan Hachi et Zongon Gandagui dans la commune
rurale de Karofane, des puits pastoraux ont été mis en place pour
réduire les conflits. Sur le site de Bouza à Guidan Bado, un
périmètre de sécurité a été mis en
place pour le respect des normes d'utilisations de cette ressource en eau. A
Koupouptché, un des puits (Alabé) du village est
réservé uniquement aux éleveurs transhumants au moment de
leurs descentes vers le sud.
Au niveau de la commune de Madaoua, plus
précisément sur le site de Gadambo et Massaraoua, le même
dispositif qu'à Koupouptché est mis en place par les villageois.
Mais à Sabon Guida, du fait de la disponibilité en eau et
infrastructures le problème ne pose pas. L'observation sur le terrain a
cependant montré que tous l'eau des puits réservés aux
éleveurs dans les villages sont généralement de
qualité douteuse. Cette eau peut constituer un problème de
santé humaine et animale. Pour une mise en place d'une gestion durable,
une stratégie de gestion communautaire de ressources en eau est
nécessaire.
4.6. Stratégies de mise en oeuvre efficiente de
gestion communautaire des ressources en eau La mise en oeuvre d'une
bonne gestion communautaire passe par plusieurs approches communautaires ; il
s'agit de:
~ procéder à une forte sensibilisation des
populations sur l'approche GIRE ; cela concerne les différents usagers
et les acteurs qui interviennent directement et indirectement sur la ressource
en eau ;
~ montrer à travers des scénarios comment la
problématique GIRE se présente au niveau bassin versant pour une
bonne implication de tous les usagers et les acteurs;
~ organiser les populations des différents villages en
association et groupement agrées dont les compétences couvrent le
bassin versant ;
~ faire participer les populations de l'ensemble du bassin
versant au travaux HIMO (travaux de Haute Intensité de Main d'OEuvre)
pour qu'ils gèrent ensemble leurs problèmes.
V. Proposition pour une bonne gestion communautaire de
ressources en eau
Les problèmes de gestion communautaire actuelle des
ressources en eau montrent la nécessité de mettre en place un
dispositif d'une gestion durable, équitable et raisonnable pour la
pérennité des ressources en eau.
5.1. Sur le plan organisationnel
La mise en place des structures villageoises de gestion
communautaire des ressources en eau est nécessaire. Ces structures
doivent avoir des agréments des municipalités. Pour cela, il est
nécessaire d'impliquer tous les usagers qui interviennent sur une
même ressource en eau à multiples usages. La place de la femme
n'est pas à négliger. Les interactions entre usagersacteurs,
usages-usages et entre acteurs doivent s'effectuer de façon continue en
tenant compte de la préoccupation de chacun.
5.2. Sur la ressource en eau et hygiène autour de
la ressource en eau
~ Un périmètre de protection est nécessaire
pour une bonne gestion de la ressource en eau ;
~ des mesures d'hygiène comme des puits
clôturés et protégés par les lignes de plantation
d'espèces locales sont très importantes ;
~ mettre en place des auréoles couverture de gravier en
contre-pente autour des puits pour réduire la stagnation des eaux ;
~ faciliter l'accès aux animaux en créant des
passerelles et des bassins d'abreuvements ; ~ faciliter l'accès à
tous les usagers sans restriction afin de réduire les risques de
conflits ; ~ créer des points d'eaux pastoraux dans les réserves
et enclaves pastorales.
5.3. Sur le bassin versant
~ Continuer à sensibiliser les populations sur
l'importance de la GIRE pour une meilleur gestion des ressources en eau dans
leurs zones ;
~ sensibiliser les acteurs (usagers et non usagers) sur la GIRE
;
~ montrer aux différents acteurs et usagers par des
scénarios la problématique de bassin versant et le pourquoi d'une
gestion concertée de la ressource en eau ;
~ assurer une implication de tous les usagers dans les structures
et organisations de gestion communautaire des ressources en eau au niveau
village ;
~ faciliter la mise en place d'un comité de gestion du
bassin versant de la basse vallée de la Tarka en tenant compte des
préoccupations de tous les sous bassins.
5.4. Sur le plan de l'hygiène et
assainissement
~ Encourager les mesures d'hygiène et assainissement
autour des points d'eau, dans les maisons et dans les marchés et
alentours ;
~ créer des caisses d'hygiène et assainissement
par la construction des latrines communautaires autour des villages et aux
alentours des marchés moyennent 5 FCFA par passage afin pour l'entretien
des lieux ;
~ introduire des prix d'encouragement aux personnes qui
maintiennent les meilleures conditions d'hygiène dans les maisons et
autour des points d'eau des quartiers.
5.5. Sur l'importance du service de vente de l'eau pour
les populations et municipalitéLe revenu du service de vente de
l'eau est très important pour la population et
les municipalités. Il est nécessaire d'instaurer un tarif par
usage. Tous usagers qui utilisent une ressource en eau pour la consommation
doit payer 1 FCFA en fonction de la fréquence. Tout éleveur ou
agropasteur qui abreuve son animal doit payer 1 FCFA par tête de petit
ruminant et 2 FCFCA par tête de gros ruminants. Tous usagers qui
utilisent l'eau à d'autre fin que la consommation et l'abreuvement
des animaux doit payer 10 FCFA par bidon de 25litres. Ce type de gestion est
très intéressant pour la gestion de ressource et l'entretien des
infrastructures hydrauliques sous assistance d'un comité de gestion
communautaire et d'une caissière qui s'occupe de la caisse de l'eau.
Il peut aussi être une source de revenu pour les
municipalités. 5.6. Mise en place d'un cadre de concertation
pour une gestion intégrée du bassin versant de la basse
vallée de la Tarka
En attendant la mise en place du PAGIRE-Niger, il est
nécessaire de créer un cadre institutionnel de la gestion
intégrée des ressources en eau dans la basse vallée de la
Tarka c'està-dire un Comité Local de l'eau Tarka (CLET). Ce
comité sera une instance locale de concertation, d'échanges,
d'animation et de promotion associant tous les acteurs concernés au
niveau local, pour la gestion des ressources en eau. Il aura pour rôle
:
- de promouvoir la concertation entre les différents
acteurs et usages ;
- d'initier des actions de développement et de protection
des ressources en eau ;
- de donner son avis sur les projets de l'Agence de l'eau du
bassin versant de la basse vallée de la Tarka ;
- de contribuer à l'arbitrage des conflits d'usage dans
leur champ territorial de compétence.
Afin de prendre en compte tous les intérêts des
différents acteurs et usagers pour un bon fonctionnement; il est
souhaitable que le CLET soit composé comme suit :
- Le Président du conseil régional de Tahoua qui
préside le CLET ;
- Les Présidents des conseils départementaux de
Madaoua et Bouza, première et deuxième vice présidence du
CLET de façon rotative tous les deux (2) ans ;
- Les maires de tous les communes membres du CLET ;
- les services techniques au niveau des départements de
Madaoua et Bouza, conseillers techniques ;
- les représentants des conseillers communaux et conseils
villageois de développement : conseillers dans la gestion de
conflits;
- Deux (2) représentants par usagers avec un mandat deux
(2) ans non renouvelables ;
- Deux (2) représentantes des groupements de femmes, avec
un mandat deux (2) ans non renouvelables ;
- Deux (2) représentants de la société
civile, avec un mandat deux (2) ans non renouvelables.
La première tâche du CLET sera
l'élaboration d'une convention locale de gestion des ressources en eau
dans le bassin versant de la basse vallée de la Tarka. Cette convention
locale de gestion constituera un recueil des accords contractuels
négociés et approuvés par tous les usagers en vue de
réglementer l'accès à la ressource et à son
utilisation. L'adoption des règles doit donc reposer sur un consensus
résultant de la prise de conscience de la dépendance des
populations, à moyen et long terme, du bassin versant. Ces règles
doivent cependant être conformes à la réglementation
nationale en la matière.
Cette convention définira de façon explicite les
principes de préleveur /payeur et pollueur/payeur en fixant les
redevances et les taxes à payer par les usagers, ainsi que l'utilisation
qui sera faite des sommes perçues.
|