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Solto na cidade - uruguaiana

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par Florence Emberger
ENSAPB - Master 1 2009
  

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Des réponses aux invasions du commerce de rue Les camelots, une priorité dès les années 80

Apparition des premiers camelódromos à Rio de Janeiro

Vers le milieu des années 70, le commerce de rue prend des proportions telles, que la ville de Rio se voit dans l'obligation de prendre des mesure draconiennes. Commence alors une grande opération de répression qui vise à déloger les camelots de la rue, exactement suivant le même processus évoqué pour les favelas. L'absurdité d'une telle mesure étant donné la quantité de travailleurs sans emplois qu'elle génère, force les autorités a revoir leurs positions. Ils imaginent alors légaliser le commerce de rue.

C'est à partir de 1984 que l'on peut lire dans les journaux des articles annonçant les mesures prises par le maire Marcelo Alencar, pour résoudre le problème du commerce ambulant, sans supprimer les emplois ou du moins en tentant de le minimiser. L'idée était alors de déterminer des points dans la

31 Goirand Camille, La politique des favelas, Edition Karthala, 2000, p.96

N

Figure 7

Les dix camelodromos projetés par le maire Cesar Maia (en rouge).

En vert sont signalés les camelodromos qui n'ont fait qu'une brève apparition

ville dans lesquels les camelots de Rio pourraient exercer en toute légalité. En contre partie il fallait que le camelot aille s'enregistrer à la Prefeitura ou dans un des points spéci~ és suivant la zone où le camelot désirait exercer. Il se voyait alors attribuer un emplacement, et en échange devait payer une taxe. Le principe de camelódromo voyait ainsi le jour dans la ville de Rio32.

A cette époque-là, les camelódromos ne présentaient rien de pérenne, et les petits étals des camelots étaient montés chaque matin et démontés chaque soir.

Selon les médias, la nouvelle de créer ce genre de centre fut très bien accueillie par les vendeurs ambulants qui se précipitèrent dans les points d'enregistrement. Dix « centres de commerces populaires » furent déterminés sur Rio, centre et quartiers de banlieue confondus (le mercado da Uruguaiana n'y ~ gurait pas encore). Dès le départ on constata des déséquilibres. Alors que les emplacements en centre ville étaient pris d'assaut, d'autres en périphérie ne semblaient pas présenter un grand intérêt. Un certain nombre de règles furent mises en place, visant à rééquilibrer la répartition, notamment en attribuant un emplacement en fonction du lieu de résidence du camelot. Cependant, les camelódromos de banlieue, étaient désertés, mis à part quelques uns comme à Madureira, l'un des quartiers le mieux développé de la banlieue nord de Rio. Ainsi le centre de Rio restait bondé car une fois les camelódromos pleins, les camelots préféraient tenter les rues du centre plutôt que les emplacements légaux qu'on leur avait réservé. La raison était bien-sûr l'absence de clients, en e et, les camelódromos avaient été placés dans des espaces vides et bon nombre d'entre eux étaient très peu fréquentés.

32 Ces informations sont valables concernant la ville de Rio uniquement. En effet, il existe de nombreux camelodromos dans tout le brésil et il n'est pas dit qu'ils soient apparus au par avant.

Un autre problème qui fut mis en évidence également était lors de l'enregistrement. Il fallait justi~ er d'un lieu de résidence à Rio, ce qui s'est avéré un critère éliminatoire pour une partie des postulants, venant des villes voisines qui avaient l'habitude de venir vendre sur Rio (Duques de Caxias, Nilópolis, Nova Iguaçu) et bien-sûr les sans abris, qui constituent une part non négligeable de ce type de travailleurs.

Le détail amusant, re~ et de l'ingérence de la Prefeitura face à la situation des vendeurs ambulants est le nombre de camelódromos programmés qui diminue jour après jour. Après en avoir plani~ é dix, en janvier 1984, puis 7 en février et en n 6 en aout de la même année, les médias ne se concentrent plus qu'à ne parler que d'un seul, le camelódromo de la praça XI.

L'expérience de la Praça XI

Dès la création des premiers camelódromos, il en est un qui fut baptisé experiencia piloto (expérience pilote). Il s'agissait de celui de la Praça XI (Place XI). En e et, la Prefeitura plaçait tous ses espoirs dans ce camelódromo étant donné sa localisation dans le centre de Rio (située dans la zone appelée Rue des Santana et ses adjacentes sur la carte p...). Elle proposait un centre de 250 baraques, pour lesquelles avait été prévue l'implantation de toilettes destinées à la fois aux acheteurs et aux vendeurs. Avec ces aménagements, la Prefeitura espérait créer un réel centre de vente, qui présentait des prestations di érentes du simple étalage de rue devant lesquelles les passant ne s'arrêtent pas.

Cela dit, légèrement à l'écart du coeur du centre il a lui aussi sou ert de ce manque de clients dont avait déjà pâti les camelódromos des autres zones. Malgré tout, la Prefeitura n'en démordait pas, convaincue du potentiel de le Praça XI et persuadée qu'une solution était possible. En aout 1984 elle décida de modi~ er le parcours de certaines lignes de bus, du vendredi au dimanche, pour amener l'arrêt ~ nal à la Praça XI. D'autres initiatives furent prises par la suite, telles que tour à tour l'installation d'un parc d'attraction, la mise en place de deux scènes pour accueillir des spectacles en ~ n de semaine, et la création d'une crèche destinée aux enfants des camelots. Mais alors que la Prefeitura tentait d'attirer plus de camelots en augmentant la capacité d'accueil du centre populaire de commerce, rien n'y faisait, clients et camelots se désintéressèrent peu à peu, et en septembre seulement 100 des 800 emplacements étaient occupés.

Un autre problème n'a pas tardé à surgir. À peine 3 mois après son inauguration, de nombreux échau~ ements commencèrent à éclater entre les camelots eux mêmes, qui ne parvenait pas à dé nir une hiérarchie au sein du camelódromo. En venant vite aux mains, ces derniers ne tardaient pas à se faire séparer et embarquer par la police. Il va de soi que les clients mis au courant par la presse ou assistant aux événements se faisaient de plus en plus rare, ce qui aggravait le problème général.

En novembre 1984 on pouvait déjà lire que le maire reconnaissait l'échec de ce camelódromo, mais qu'il l'attribuait « aux propres camelots qui n'ont pas souhaité occuper la zone »33. Les camelots ne quittèrent cependant pas immédiatement la place, continuant leur commerce sur un lieu petit à petit à

33 Auteur inconnu (6 novembre 1984) « Trabalho come çara segunda-feira em 180 de Central do Brasil », Globo

l'abandon. En février 1985 les 14 000 m2 de la Praça XI comptaient 4 baraques... Pour information, le sujet de l'article qui contenait cette déclaration était sur l'ouverture d'un nouveau camelódromo à Central do Brasil, un terminal de bus, trains et métros. Aujourd'hui ce camelódromo est en plein développement, en voie d'atteindre le niveau de celui de la rue Uruguaiana. Il aurait été très intéressant de l'étudier plus dans le détail, car son évolution a eu lieu très récemment, au début de 2008, et la métamorphose est réellement impressionnante.

Naissance du Mercado Popular da rua Uruguaiana

La réalisation de cette partie relève d'un tout autre ordre, les faits étant encore trop récents pour avoir fait l'objet d'écrits ou d'études, hormis de la part d'un étudiant en géographie qui a réalisé une recherche sur la notion de territoire à partir de l'exemple d'Uruguaiana34. J'avais également à ma disposition des coupures de presse, cela dit je n'ai pu obtenir aux archives du Globo aucun article datant de l'époque de la création du marché (1 993-94), ce qui est assez étonnant. La première fois que l'on rencontre l'idée de créer un camelódromo dans la rue Uruguaiana, c'est en 198435, alors que le maire Marcelo Alencar ré échissait à un transfert des camelots de la Praça XI vers une zone plus fréquentée. Le projet attendit donc dix ans a n de voir le jour. Après un grand silence le Camelódromo refait parler de lui en 199936, au sujet de son absence de contrôle.

Il a donc fallu aller à la rencontre des acteurs, fort heureusement en vie pour la plupart d'entre eux. J'ai eu la chance de rencontrer deux personnages importants; tout d'abord Roberto Anderson, un employé de la Prefeitura, qui a activement participé au projet du Camelódromo da Uruguaiana, et ensuite un ingénieur du métro, qui était à la tête du projet des di érentes lignes (au nombre de deux actuellement), connu par tous sous le nom de Sydney, et que nous appellerons donc ainsi. Ces deux interlocuteurs n'ont pas hésité à me consacrer généreusement de leur temps pour me donner des informations, des images, tout cela bien sûr dans la limite des possibilités admises par la désinvolture Carioca (je me souviens d'un rendez vous que m'avait ~ xé Sydney après notre entretien, a n d'aller fouiller dans les archives pour trouver des photographies de l'époque des travaux de la station de métro Uruguaiana. Malgré les clichés promis, le résultat fut assez limité car nous avons passé l'après midi à essayer quelques centaines de clés stockées dans une boîte de chaussure a n d'ouvrir des tiroirs, qui pour la plupart nous ont résisté).

34 da Silveira Silva Marcelus, Os camelôs e o mercado popular da ru Uruguaiana: o ordenamento territorial na area central do Rio de Janeiro, Niteroi (RJ), Thèse de doctorat de géographie à l'Universidade federal Fluminense, 2002

35 Auteur inconnu (25 juillet 1984), Globo, Anexe 4

36 Werneck Antônio (20 juin 1999) « O mercado sem lei da Uruguaiana », Globo, primeiro caderno, p.12

Quelques informations nécessaires...

A ce stade, il est important de préciser quelle est l'organisation hiérarchique des pouvoirs politiques au Brésil, a n de comprendre le contexte de l'apparition du Camelódromo da Uruguaiana et l'état de confusion dans lequel il s'est trouvé dès sa création:

Depuis le retour à la démocratie en 1983, on trouve à la tête du pays un président, élu par voies directes. Le Brésil est divisé en 26 états dont sont responsables des gouverneurs. Dans les états on rencontre en n des villes gérées par les maires. Sous les maires nous avons également les vereadores qui sont des sortes de chefs de quartiers, leur nombre varie suivant la taille du quartier. Ils sont tous a liés à des partis qui viennent prendre place au conseil municipal. Faire ces transferts vers la logique française reste di cile. En e et, étant donné l'échelle des villes et des quartiers on a parfois tendance à vouloir faire une analogie entre les vereadores et nos maires, tous comme le maire brésilien et nos préfets (d'autant que le mot porte à confusion, on parle du prefeito pour parler du maire). C'est pour cette raison par exemple que je ne traduirai jamais le terme de Prefeitura ni par celui de mairie ni par celui de préfecture, étant donné qu'ils font référence à un fonctionnement français, di érent du schéma brésilien.

Cesar Maia contre Brizola: naissance du camelódromo da Uruguaiana

Depuis l'échec du camelódromo de la Praça XI, le problème des camelots resta en suspens durant plusieurs années, et ces derniers recommencèrent à s'installer dans les rues. Entre 1985 et 1992/93, la situation s'aggrava fortement. Dans certaines rues le simple passage devenait impossible. La rue Uruguaiana était l'une des plus touchées au coude à coude avec entre autres l'avenue Rio Branco et l'avenue Nossa Senhora de Copacabana. Comme le montre la carte la ci-contre une grande quantité des rues du Centro étaient envahies. En 1993 Cesar Maia fut élu maire (Prefeito) de la ville de Rio et il se lança dans une politique baptisée Ordem Urbana (ordre urbain), qui visait à enlever les camelots des rues. Ce fut ainsi le retour à une période de forte répression, et la garde municipale s'attelait à déloger les camelots des rues, une à une.

A la tête de l'état de Rio se trouvait le gouverneur Leonel de Moura Brizola, déjà connu pour ses nombreuses réformes sociales37. Ce dernier était très opposé aux mesures prises par Cesar Maia, ce qui fut à l'origine de nombreuses altercations entre police militaire (au service de l'état) et garde municipale (au service de la ville). Alors que la garde venait déloger les vendeurs ambulants, la police militaire s'y opposait, créant une bataille où régnait la plus grande confusion.

37 Pour n'en citer qu'une, les cariocas lui doivent la réalisation de 180 CIEPs (Centre Intégral d'Education Publique). Il s'agissait d'écoles publiques dont l'ambition allait bien au-delà du simple enseignement. Souvent accompagnés de complexes sportifs pour les loisirs accessibles en dehors des heures des classes, d'activités culturelles, les

CIEP offraient également des repas, traitements médicaux et dentaires. Ces bâtiments à l'architecture marquante, dessinés par Niemeyer portent le surnom affectueux de Brizolão.

 
 
 
 
 

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Figure 8

Les zones envahies par les camelots en 1993 N

 
 
 
 
 
 
 
 

Solto na Cidade - Uruguaiana

N

Figure 9

Les zones occupées par les camelots en 1998

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« Bon, le gouverneur avait une politique un peu comme ça, dite populiste. Il gagnait beaucoup de votes des pauvres, disait que tout allait bien, que les camelots étaient des travailleurs. Il ne voyait pas que la quantité de camelots dans la rue était très grande, et nuisait au commerce. »

(Roberto Anderson Magalhaes - Prefeitura- Entretien réalisé en septembre 2008).

« Ce qui se passe ici, au Brésil, c'est que nous avons certains politiques qui veulent être populaires. L'un d'eux s'appelait Leonel de Moura Brizola. Ce Leonel Brizola pour faire... Tu vois c'est comme quand ils laissent se développer les favelas. Ils laissent aussi les camelots faire ce qu'ils veulent. Alors il a décidé de promouvoir, et pas que dans cette zone, l'invasion de certains espaces par les camelots. »

(Sydney - Rio Trilhos - Entretien réalisé en décembre 2007)

Il est bon de savoir que, malgré le caractère informel de ce type de commerce, il y a en réalité toute une organisation sous-entendue. Dans les rues les plus fréquentées, une hiérarchie se crée; une sorte de structure interne avec un système de protection, d'autorisation et d'utilisation de l'espace. Généralement, une personne ou un groupe de personnes se déclare propriétaire de la rue et met en place un système de « taxe » décidant du droit des camelots d'y installer leurs stands ou non.

Les frères Rapetou

Un des points principaux était la Rue Uruguaiana. Il y avait une quantité énorme de camelots, gérés par un groupe de trois hommes, appelés « les frères Rapetous », qui récupéraient l'argent des camelots de la rue. En 1994, la Prefeitura décida qu'il était de temps de s'occuper du cas de la rue Uruguaiana, et commença à la vider, ce qui fût à l'origine d'une série d'a~ rontements entre police militaire, garde municipale, camelots, et l'élite intellectuelle de gauche qui venait régulièrement s'interférer au milieu de la confusion. Le groupe des frères Rapetous, responsables o cieux de la rue devint ainsi l'intermédiaire direct entre vendeurs ambulants et forces de l'ordre. Ils réussirent à ouvrir une porte de négociation avec le gouverneur, qui les appuyait, et obtinrent ainsi quatre espaces vides qui faisaient l'angle entre la rue Uruguaiana et l'avenue Presidente Vargas. Il s'agissait de terrains, propriétés de l'état, dont les bâtiment avaient étés détruits lors des travaux de la création du métro, dans le cas présent pour la station Uruguaiana.

« Ce sont des vides qu'on a dû faire dans la ville, non pas parce qu'on avait besoin de la zone où on créait la station de métro, mais parce qu'on avait besoin d'espace autour pour pouvoir mettre des bungalows de chantier, où on mettait les machines, où on gardait le matériel, et après dans le cas d'Uruguaiana, c'est resté vide. »

(Sydney - Rio Trilhos - Entretien réalisé en décembre 2007)

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Solto na Cidade - Uruguaiana

 
 

Axonométrie centrée sur l'avenue Presidente Vargas et la rue Uruguaiana. On peut observer alors les ilots qui n'avaient pas encore été détruits par les travaux du métro.

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Les vides laissés en 1974, après les travaux de la station de

métro Uruguaiana

A chaque fois qu'une station de métro est créée, une fois terminée on trouve un vide de ce type. Le détail étonnant est qu'il existe une loi qui y interdit toute construction de projet privé (comme des centres commerciaux, complexes de loisirs etc). L'espace est réservé à des projets d'intérêt public comme des crèches, écoles...38 Ainsi cela explique pourquoi les vides créés par le métro perdurent. La plupart du temps ils sont occupés par des vendeurs de rue, qui les occupent de manière plus ou moins légale suivant les cas.

Cet espace servait à ce moment là de zone de stationnement, sous le contrôle de la CODERTE39, mais il était déjà fortement convoité étant donné sa grande valeur due à sa localisation, en plein centre ville. Pour la première fois les camelots n'allaient pas se retrouver dans une zone isolée comme ce fut le cas de nombreuses fois lors des tentatives de camelódromos antérieures.

Quatre jours pour s'organiser

« Alors le maire a dit « Bon, ben super, nous allons donc organiser l'arrivée des camelots là ».Et tout a été fait dans la précipitation, parce qu'on avait un délai très court... ça c'est passé un jeudi, et les camelots allaient arriver le lundi. C'étaient 4 terrains, nous avons tous commencé à travailler, nous, architectes, sous-prefet, les administrateurs régionaux, nos amis, la famille, tout le monde est allé sur le sol pour peindre, démarquer... »

(Roberto Anderson - Prefeitura- Entretien réalisé en septembre 2008)

Comme le sous entend la citation ci-dessus, la plani~ cation du Camelódromo s'est faite de façon très sommaire. Étant donné le délai imparti il a fallu passer à l'action le plus rapidement possible. Malgré cela un plan fut dessiné par le sous-préfet de l'époque, un architecte urbaniste nommé Augusto Ivã. La répartition des camelots fut on ne peut plus arbitraire. En e et, chaque espace fût numéroté et les camelots durent se présenter dans le CIEP de la Praça XI où un emplacement leur fut décerné par tirage au sort. Ainsi il n'y eu volontairement aucune logique lors de la plani~ cation à part quelques exceptions.

Tout d'abord comme le but était de créer un lieu de commerce, Augusto Ivã a souhaité reproduire certains détails de typologie spatiale que l'on trouve dans les shopping-centers à savoir la « Place de l'alimentation ». Au Brésil dans les centres commerciaux on trouve toujours un lieu appelé « Place de l'alimentation », dans lequel sont réunis les restaurants, buvettes, fast food etc. C'est pour cette raison que les vendeurs de sandwichs, boissons et nourriture en tout genre se sont tous retrouvés dans une même zone. Quelque soient les autres types de marchandises vendu, il n'y a pas eu d'autre stratégie de répartition, à part pour les Frères Rapetou à qui l'on avait réservé les emplacements jugés meilleurs dans les quadras A et D (nous expliquerons dans la partie suivante cette logique de fonctionnement par quadras).

38 Il s'agit de la loi n° 1.458 du 4 octobre 1986

39 Companhia de Desenvolvimento Rodoviário e Terminais do Estado do Rio de Janeiro (Compagnie de développement des gares routières et terminaux de l'État de Rio de Janeiro)

Plan du Mercaddo Popular da Uruguaiana dessiné par Augusto Ivã en 1994

 

N

La contribution de la Prefeitura résida également dans la réalisation de quelques équipements tels que des locaux de réunion, dans le but d'accueillir et de reconnaître une potentielle association, ou un ensemble de responsables du camelódromo. Des toilettes furent également réalisées, ainsi que la mise en place d'une sorte d'emblème sur un mur surplombant le camelódromo, annonçant Mercado popular da U ruguaiana, « pour tenter de créer l'illusion que c'était quelque chose de plus ou moins o ciel »40. Par ce symbole le Mercado popular serait reconnu et inclus dans la ville formelle. En n deux locaux clos, d'une trentaine de mètres carrés chacun furent créés a n de servir de dépôt pour le matériel.

40 Termes utilisés par Roberto Anderson Magalhães lors de notre entretien en septembre 2008.

Quelques règles de fonctionnement furent établies. Tout d'abord chaque camelot n'avait droit qu'à un seul emplacement, qu'il louait, versant une taxe mensuelle à la Prefeitura. De plus, ce Camelódromo devait être un espace de transition pour les personnes les plus démunies, à savoir essentiellement les chômeurs sans aucun revenu, à la charge de familles, etc. Cette décision n'avait pas été imaginée spécialement pour le Camelódromo. En e et, en 1992, face à une forte croissance du commerce de rue, la chambre des vereadores avait établi ce qui devait dé nir la classe des vendeurs ambulants, a n de limiter la légalisation de cette profession à une catégories de travailleurs en grande di culté. « Les personnes habilitées sont déf nies par trois groupes: les handicapés, ceux qui exerçaient déjà la dite activité avant la promulgation de la loi, et les individus identif és en situation précaire. Cette dernière catégorie inclut toutes les personnes âgées de plus de 45 ans et également les chômeurs qui comptent un temps d'inactivité ininterrompu de plus d'un an, ainsi que les sortants du système pénitencier »41

On a donc tendance à cataloguer le camelot comme un marginal, en bordure du système dont les revenus servent à peine à assurer la survie. C'est la réalité de certains, mais comme nous le verrons plus amplement par la suite, les camelots peuvent également correspondre à un tout autre type. Ainsi, l'objectif du Camelódromo était de donner l'occasion aux plus démunis d'obtenir un minimum d'argent à travers le commerce de rue en toute légalité. Une fois remis à ~ ot le camelot devait quitter le lieu se servant du tremplin o ert par le Camelódromo pour avoir une réelle activité inscrite dans le système formel. Une place se libérait alors et la Prefeitura pouvait la proposer à une autre personne dans le besoin. Il est bien évident que rien ne s'est produit de cette façon.

« Mais il y a eu beaucoup de problèmes, avec la garde municipale, la police... Et ce qui s'est passé, c'est que ces quatre quadras, certains disent qu'elles appartiennentt au métro, et d'autres après ont dit qu'elles appartenaient à la Prefeitura, et avec cette bagarre, ils ont foutu les camelots là dedans et ça a fait le Camelódromo. »

(Evaldo - ex-agent de sécurité du camelódromo- Entretien réalisé en octobre 2008)

Là ou réside la première ambiguïté est dans le fait que le terrain, propriété de l'Etat s'est vu attribué aux camelots par la Prefeitura. Cette dernière s'est occupée de l'organisation mais entre ces deux responsables, chacun se renvoie la balle quant à la gestion quotidienne du lieu. Selon Roberto Anderson la taxe de droit d'occupation de l'emplacement que les camelots doivent payer à la Prefeitura fut payée uniquement la première année42. C'est ainsi que petit à petit les camelots se retrouvèrent en quelque sorte seuls maîtres à bord.

41 Extrait de la loi 1876/92 établie le 29 juillet 1992, citée dans la thèse de Silveira Marcelus Silva, Os camelôs e o mercado popular da ru Uruguaiana: o ordenamento territorial na area central do Rio de Janeiro, Niteroi (RJ), Thèse de doctorat de Géographie de l'Universidade Federal Fluminense, 2002, p.82

42 Déclaration faite lors de notre entretien en septembre 2008.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci