REPUBLIQUE DU SENEGAL ********
Un peuple - Un but - Une foi
UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE
DAKAR ********
Faculté des sciences juridiques et
politiques MASTER DROIT DE LA REGULATION
LIMITES DE LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS PAR
LES AUTORITES DE REGULATION AU SENEGAL
Mémoire de Master 2 soutenu dans le cadre
du
Master en Droit de la régulation
Présenté par !
Momar NDAO
Sous la supervision de !
Professeur Abdoulaye SAKHO Agrégé des
facultés de Droit
DEDICACE
A mon père Feu El hadji Cheikh
NDAO, Un humaniste qui était contre
l'injustice' d'où quelle puisse venir. Et pour
qui' la valeur de l'homme est' ce qu'il garde quand il
est sous la douche (valeurs' connaissance'
éducation' foi' etc.).
REMERCIEMENTS
Je remercie tous ceux qui ont' d'une
manière ou d'une autre' participé à la
réalisation de ce travail en commençant par mes
professeurs' notamment' mon directeur de
mémoire le Pr. Abdoulaye SAKHO'
Je remercie' également' Les
membres de la direction de l'ASCOSEN (Association des consommateurs du
Sénégal) MM. Pablo FALL' secrétaire
exécutif de l'AdEETélS (Association pour la défense des
abonnés à l'eau' à
l'énergie' aux télécommunications et aux
services)' Jean Pierre DIENG' Président de
l'UNCS (Union nationale des consommateurs du
Sénégal) Maguette FALL' Président de
l'ADEC (Association pour la défense de l'environnement et des
consommateurs'
LIMITES DE LA PROTECTION DES CONSOMMATEURS PAR
LES AUTORITES DE REGULATION AU SENEGAL
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION :::::::::::::::::::::::::::::. Page 8
PREMIERE PARTIE.
LIMITES DANS LA PRISE EN COMPTE DES INTÉRÊTS
DES
CONSOMMATEURS Page 16
Chapitre 1. Les limites fondamentales des organes de
régulation
par rapport à leur mission de protection des
consommateurs:.... Page 17
Section 1. Au niveau du cadre
juridique:::::::::..::::.: Page 17
§1. NATURE JURIDIQUE DE L'ORGANE:::::::::::::::::::::..
Page 17
§2. DÉFINITION DE LA
MISSION::::::::::::.::::::..::::: Page 19
§3. DOMAINE D'INTERVENTION::::::::::::::.:::::::::: Page
23
Section 2. Au niveau du statut des
organes::::::::::::. Page 24
§1. INDÉPENDANCE:::::::::::::::::::::::::::::. Page
24
§2. POUVOIRS:::::::::::::::::::::::::::::::.. Page 27
§3. COMPOSITION DES ORGANES::..::::::::::::::::::::.. Page
28
Section 3. Au niveau de l'organisation fonctionnelle des
organes:::::::::::::::::::::::::::::..:::: Page 29
§1. INTERLOCUTEUR PRINCIPAL NON
SPÉCIFIÉ:::::::::::::.:::: Page 29
§2. ABSENCE DE CELLULE « CONSOMMATEURS »:
:::::::.::::::: Page 29
Chapitre 2. Les limites au niveau de l'exécution
de la mission
des organes de Régulation
.::::..::: Page 30
Section 1. Au niveau de la mission
générale:::::::::.:: Page 30
§1. CONDUITE ET ORIENTATION DE LA
MISSION::::::::::::..:.:: Page 30
A. Non prise en compte de certains aspects de la mission:::::.::
Page 30
B. Déséquilibre dans le choix des
dossiers:::::::::.::::::. Page 31
C. Absence d'équipements propres ::::::..:::::::::: .::
Page 32
§2.
TRANSPARENCE:::::::::::::::::::::::::::.:.. Page 33
A. Non respect du devoir d'informer et de reddition de comptes::
.:.. Page 34
B. Absence de démarche et d'approche « consommateurs
» :: .:::: Page 34
Section 2. Au niveau de la collaboration avec les
consommateurs Page 35
§1. LA CONSULTATION DES ASSOCIATIONS DE
CONSOMMATEURS:::::::.:: Page 35
A. Consultation sur la politique:::::::::.::::::::::::.. Page
35
B. Consultation décisionnelle:::::::::.:::::::::::::..
Page 35
§2. IMPLICATION DES
CONSOMMATEURS:::::::::::::::::.::. Page 36
A. Cellule « consommateurs » ::::::::: .::::::::::::..
Page 36
B. Renforcement de capacités::::::::: :::::::::::::. Page
36
DEUXIEME PARTIE.
LIMITES DANS LE TRAITEMENT DES DIFFÉRENDS PAR LES
ORGANES DE REGU LATION::::::::: .:::::::::::::::::::..... Page 38
Chapitre I. Le consommateur, acteur de la
régulation::.:.::.. Page 39
Section1. Défiance des organisations de
consommateurs vis-à-vis des organes de
régulation:::::::::::::::::::::::...... Page 39
§1. EXPÉRIENCES
MALHEUREUSES:::::::::.:::::::::::...... Page 39
§2. PLUS GRANDE EFFICACITÉ DES ACTIONS PROPRES DES
ORGANISATIONS DE
CONSOMMATEURS:::::::::::::::::::::::::::..::. Page 40
Section 2. Négligence par les régulateurs
du rôle de
« Watch dog » des organisations de
consommateurs Page 41
§1. RECUEIL DES PLAINTES ET OBSERVATOIRE DE LA
QUALITÉ::::::::.::. Page 41
§2. FILTRAGE ET
INTERMÉDIATION:::::::::.:::::::::::..... Page 41
Chapitre II. Les initiatives des
opérateurs::::::::.:: .:: Page 42
Section 1. Autorégulation des
opérateurs::::::::...:: .:.. Page 42
§1. CODES DE CONDUITE:::::::::.::::::::::::::::... Page
42
§2. CERTIFICATION:::::::::.:::::::::::::::::::.. Page 44
Section 2. Dispositifs de prise en charge des
réclamations:..:.. Page 45
§1. PRÉVENTION DES
DIFFÉRENDS::::::::::::::::::::..:.. Page 45
§2. TRAITEMENT DES PLAINTES:::::::::.:::::::::::::.... Page
45
Chapitre III. Saisine et procédures de traitement
des
différends Page 46
Section 1. Organisation de la saisine Page
46
§1. STRUCTURES HABILITÉES Page 46
§2. MODALITÉS DE SAISINE Page 47
Section 2. Procédures de traitement des
différends Page 48
§1. MANUEL DE PROCÉDURES Page 48
§2. TRANSPARENCE Page 48
§3. DÉLAIS DE TRAITEMENT Page 50
Chapitre IV. Inefficacité dans le
règlement des
litiges Page 51
Section 1. Fonctionnement des services Page
52
§1. MAUVAISE ORGANISATION DES SERVICES Page 52
§2. INCOMPÉTENCE DES SERVICES Page 53
Section 2. Traitement du litige Page 54
§1. NON PRISE EN COMPTE DES RÉCLAMATIONS Page 54
§2. CAPTURE DE LA VOLONTÉ DÉCISIONNELLE Page
55
CONCLUSION Page 56
Bibliographie Page 58
Textes législatifs et réglementaires
Page 63
Sites Web Page 65
Entretiens Page 66
INTRODUCTION
Le jeudi15 mars 1962' le Président des
Etats-Unis' John Fitzgerald KENNEDY' envoya'
au Congrès américain' un message
spécial1 sur la protection des intérêts des
consommateurs' dont il lut' un
résumé' dans la matinée' pour les
médias et la télévision. Cette déclaration consacra
quatre droits fondamentaux du consommateur à savoir :
ü le droit à la
sécurité2;
ü le droit d'être
informé3;
ü le droit de choisir4 et
ü le droit d'être
entendu5.
Plus tard' avec le développement du
consumérisme' né aux Etats Unis et symbolisé
par l'action de Ralph Nader' en particulier' contre les
constructeurs automobiles' l'action du mouvement consumériste
a conduit à l'érection d'autres droits6 :
ü Le droit à la satisfaction des besoins
essentiels' ;
ü Le droit à la
réparation8;
ü Le droit à l'éducation du
consommateur9 ;
ü Le droit à un environnement
sain10
.
(1) John F. Kennedy' Special message to the
congress on consumers interests' 15 mars 1962
(2) « pour être protégé contre la
vente de produits qui représentent des dangers pour la santé ou
la vie »
(3) « pour être protégé contre
linformation trompeuse ou excessivement fallacieuse' la
publicité mensongère' ou l'étiquetage
frauduleux' et pour accéder aux éléments
nécessaires pour faire un choix éclairé»
(4) « pour être assuré' dans
la mesure du possible' d'un accès à une
variété de produits ou services à des prix
compétitifs' et dans les industries où la concurrence
n'est pas réalisable' une régulation gouvernementale
est substitué pour assurer une qualité satisfaisante et un
service à des prix raisonnables»
(5) « pour être assuré que les
intérêts des consommateurs vont recevoir une totale et sympathique
considération dans la formulation des politiques du gouvernement et un
traitement juste et rapide dans ses tribunaux administratifs. »
(6) Consumers international' WCRD history and
purpose'
www.consumersinternational.org
(7) « pour avoir accès : aux biens de base et
aux services publics essentiels' à une alimentation
équilibrée' à l'habillement'
à un toit' à la santé' à
l'éducation et à l'assainissement; »
(8) « pour bénéficier d'un
règlement équitable des réclamations justes' y
compris la réparation pour la déclaration des produits et les
services de mauvaise qualité; »
(9) « pour acquérir la connaissance et les
qualifications nécessaires pour faire des choix éclairés
sur les produits et services' tout en étant informé
des droits fondamentaux des consommateurs et comment les
réclamer»
(10) « pour vivre dans un environnement qui ne menace
pas le bien être des générations prochaines et
futures. »
Tous ces droits fondamentaux des consommateurs sont
consacrés par les principes directeurs pour la protection des
consommateurs adoptés par l'organisation des nations-unies en 1985 et
revus en 1999.11
L'organisation des nations-unies estime' dans ces
principes directeurs' « que les gouvernements devraient
élaborer ou maintenir des politiques strictes de protection du
consommateur en s'inspirant des principes directeurs qui visent à
répondre aux besoins légitimes ci-après : »
ü « Protection des consommateurs contre les
risques pour leur santé et leur
sécurité;
ü Promotion et protection des
intérêts économiques des consommateurs;
ü Accès des consommateurs à
l'information voulue pour faire un choix
éclairé' selon leurs désirs et leurs
besoins;
ü Éducation des
consommateurs' notamment concernant
l'impact socioéconomique et sur l'environnement des choix qu'ils
effectuent;
ü Possibilité pour le consommateur d'obtenir
une réparation effective;
ü Droit de constituer des groupes ou des
organisations de consommateurs et autres groupes pertinents et
possibilité' pour ces organisations' de faire
valoir leurs vues dans le cadre des décisions les concernant;
ü Promotion des modes de consommation durables.
»
Il faut cependant noter' l'introduction nouvelle de
la notion de consommation durable dans la liste des droits...
Pour l'organisation des nation-unies' «
Les gouvernements devraient fournir ou maintenir l'infrastructure
nécessaire pour élaborer et appliquer des politiques de
protection du consommateur et en suivre la mise en oeuvre. Il importe
de veiller particulièrement à ce que les mesures de protection du
consommateur soient
11 Conférence des nations unies sur le commerce et le
développement' Principes directeurs des nations unies
pour la protection du consommateur (tel qu'étendus en
1999)' New York et Genève' 2001
UNCTAD/DITC/CLP/Misc.21' p.3
appliquées à l'avantage de tous les secteurs
de la population' notamment à la population rurale et aux
pauvres ».
La protection des consommateurs doit rester une
préoccupation centrale pour les organes de
régulation.
En effet' les opérateurs régulés
sont tenus d'observer une éthique professionnelle solide et
orientée vers la satisfaction des besoins des
consommateurslibis.
8ls doivent assurer la meilleure qualité des produits
et services mis à la disposition des consommateurs;
ü s'assurer de l'emploi de la technologie de
pointe;
ü observer les règles loyales de
marketing;
ü
pratiquer des prix abordables;
ü développer les services
après-vente;
r mettre sur pied un service d'accueil et d'encadrement du
client («Le client est roi») (Customer care' consumer
service'...) ;
ü veiller à linformation des
consommateurs;
ü concourir au règlement rapide des
réclamations des clients (Privilégier le règlement interne
et non contentieux).
L'organe de régulation doit veiller à ce
que les impératifs cités ci-dessus soient respectés par
les opérateurs.
Leur respect vise essentiellement la protection des
consommateurs.
Aussi' l'organe de régulation' en
visant la protection des consommateurs' les protège t- il de
la toute puissance des opérateurs tout en assurant par la même
occasion' les meilleures conditions de compétitivité
et de transparence du marché.
L'organe de régulation devra veiller à assurer
le suivi des transactions entre opérateurs. Cette intervention pourrait
prévenir les conflits entre opérateurs souvent
préjudiciables aux intérêts des consommateurs.
llbis MASENGO Fidèle' Le Consommateur
des Services d'Itilité Publique et son Apport dans le Processus de
Régulation' in the Regulatory Partnership
Program' National association of regulatory utility
commissioners' http://www.narucpartnerships.org/
http://www.narucpartnerships.org/Documents/ConsumerInputintoRegulatoryDecisionMakingProcessPub
licHearingProcess FideleMasengo.pdf ' 29 Octobre 2004
A u Sénégal' la loi n°
2002-23 du 4 septembre 2002, portant cadre de régulation pour
les entreprises concessionnaires de services publics' définit
le cadre de création et d'organisation d'institutions de
régulation des services d'infrastructures.
Elle précise' par la même
occasion' ce qu'elle entend par mission de régulation :
«A l'instar de la pratique internationale en la
matière' la régulation' visée
ici' renvoie aux mécanismes de correction des
défaillances du marché12 » (..).
La loi n° 2002-23 du 4 septembre 2002'
précise toujours' dans son exposé des
motifs' quelques missions fondamentales des organes de
régulation.
(..)
· la gestion de la tarification et des
règles d'accès;
· l'établissement de normes de
qualité;
· le suivi du respect des règles
établies;
· la facilitation du règlement des
conflits entre opérateurs et entre
opérateurs et consommateurs;
· le conseil au
gouvernement' notamment dans l'octroi de licences ou de
droits de concession ainsi que l'imposition de
pénalités pour non respect des règles et normes
en vigueur. Une institution de régulation de services d'infrastructures
peut être spécifique à une même branche'
à un secteur ou à plusieurs secteurs. Les institutions de
régulation sont compétentes également pour les
questions de sécurité dans les secteurs
couverts(..).
La loi 2002-23' dans son article 5'
dispose' de même' que l'organe de régulation
est chargé de traiter les différends entre les
consommateurs et les opérateurs' et qu'il doit :
« (..) intervenir soit' en tant que
conciliateur' soit' pour trancher les différends
entre l'autorité concédante et les concessionnaires'
entre les entreprises des secteurs régulés' et entre
lesdites entreprises et les consommateurs »
12 Exposé des motifs loi n° 2002-23 du 4
septembre 2002' portant cadre de régulation pour les
entreprises concessionnaires de services publics
Pour le législateur
sénégalais' « La régulation des
services d'infrastructures repose sur deux éléments-clés
: des règles et des institutions chargées de faire
respecter ces règles. Un nombre croissant de pays mettent en
place des institutions spécialisées afin de compléter
l'action de la justice et de tenir dûment compte des
spécificités des services d'infrastructures ».
Au vu des dispositions de la loi 2002-23' nous
avons' au Sénégal'
essentiellement' une dizaine d'organes qui ont une mission
assimilable à une mission de régulation' qu'elle soit
horizontale ou sectorielle' et dans les divers domaines que sont :
les télécommunications et la poste'
l'électricité' l'eau' les marchés de
consommation' l'audiovisuel' les marchés
publics' le transport' les hydrocarbures' et
les infrastructures.
Il s'agit principalement de :
1. la Commission de la
concurrence' créée par les articles 3 et
suivants de la loi 94-63 du 22 août 1994' sur les
prix' la concurrence et le contentieux économique ;
2. l'Agence de régulation des
télécommunications et des postes (ARTP)'
créée par les articles 42 et suivants de la loi 2001-15 du 2
décembre 2001' portant Code des
télécommunications' modifié par la loi 2006-2
du 4 janvier 2006 ;
3. La Commission de Régulation du Secteur de
l'Electricité (CRSE)' créée par les
articles 4 et suivants de la loi 98-29 du 14 avril 1998' relative au
secteur de l'électricité ;
4. La Société nationale des eaux du
Sénégal (SONES)' créée par la
loi 95- 10 du 7 avril 1995' et les Comités de Suivi
du Contrat de performance SONES/ETAT et SONES/SDE ;
5. l'Agence de Régulation des Marchés
(ARM)' créée par le décret n°
2002- 923 du 18 septembre 2002' portant création et fixant
les règles d'organisation et de fonctionnement de l'Agence de
Régulation des Marchés ;
6. l'Autorité de Régulation des
Marchés publics (ARMP)' créée par la
loi n° 2006-16 du 30 juin 2006' modifiant la loi n°65-61
du 19 juillet 1965' portant Code des Obligations de l'Administration
;
7. Le Conseil national de la régulation de
l'audiovisuel (CNRA)' créé par la loi n°
2006-04 du 4 janvier 2006' portant création du conseil
national de la régulation de l'audiovisuel ;
8. Le Conseil exécutif des transports urbains de
Dakar (CETUD)' créé par la loi N° 97-01
du 10 mars 1997 ;
9. Le Comité national des hydrocarbures
(CNH)' créé par le décret
n°98-337 du 21 avril 1998 ;
10. Le Conseil des infrastructures'
créé par la loi 2004-14 du 1er mars 2004'
instituant le conseil des infrastructures.
Chacun de ces organes comporte' en son
sein' des dispositions explicites ou implicites de mission
de régulation et de protection des
consommateurs-usagers' sans pour autant'
tous' être' de manière
consacrée' des autorités de
régulation' dans le sens traditionnel et exclusif du
terme.
La loi n° 2002-23 du 4 septembre 2002' reste
très explicite' notamment' dans son article
3' par rapport à la mission de protection des consommateurs
et de leurs intérêts dévolue aux organes de
régulation.
« Dans chaque secteur qu'elle est chargée de
réguler' l'institution de régulation a pour mission
M
· de veiller à l'équilibre entre
les intérêts de l'autorité concédante et ceux des
investisseurs et des consommateurs; (...)
· (...) de protéger de manière
équitable les choix et intérêts des
consommateurs et assurer la protection de leurs
droits pour ce qui concerne les prix'
la fourniture et la qualité des
services.»
La loi 2002-23 précise aussi' dans son
exposé des motifs' certaines modalités de prise en
compte des intérêts des consommateurs' notamment
la consultation et la représentation.
« Des procédures de consultation'
permettent également aux institutions de régulation de recueillir
l'avis du public à travers généralement
M
· la représentation des parties prenantes dans
les organes de décision ;
· l'organisation d'audiences publiques;
· la mise en place d'organes consultatifs et de
conseil;
· la représentation des
consommateurs. »
Le législateur' dans l'article 4 de la loi
2002-23' précise les attributions consultatives de
l'autorité de régulation et son obligation d'être
équitable et de consulter'
notamment' les associations de consommateurs.
«(...) Dans les projets qu'elles soumettent
aux ministères sectoriels concernés' les institutions
de régulation des services publics veillent à ce que les
intérêts légitimes de l'autorité
concédante' des entreprises des secteurs
régulés et ceux des consommateurs soient
préservés à l'occasion de toute modification de
la réglementation. »
« (...) A cette fin'
notamment' les institutions de régulation des services
publics consultent lesdites entreprises et les associations de
consommateurs' avant de faire' aux ministères
sectoriels compétents' des propositions
motivées' pour tout projet les concernant. »
En définitive, la loi 2002-23 consacre donc, la
nécessité de protection du
consommateur' comme étant une des missions
fondamentales des autorités de régulation.
Cette approche est confirmée par beaucoup d'auteurs
tels que Jean Marimbert' Conseiller d'État' ancien
directeur général de l'Autorité de régulation des
télécommunications de France qui estime que M
« (...) si le ressort principal de l'activité
de beaucoup' sinon la plupart des régulateurs' est
la recherche et la construction d'un état de concurrence
durable' la finalité ultime est bien
l'intérêt du consommateur.
Nous' régulateurs' ne prenons
pas la concurrence comme une fin en soi' mais comme un moyen
d'apporter des satisfactions tangibles au consommateur : des
offres pluralistes là où il n'y avait qu'une seule offre de
monopole' des baisses de prix durables autantque
possible' etc, 13 »
Cette assertion' largement admise de la mission de
protection des consommateurs dévolue à l'autorité de
régulation est affirmée par le législateur
sénégalais dans la loi cadre et dans la quasi-totalité des
textes instaurant chaque organe de régulation.
Cependant, entre la théorie et la pratique, le
fossé reste encore profond et tous les organes ne jouent pas de
manière efficiente, leur rôle de protection des
intérêts des consommateurs.
Aussi' chercherons-nous' « à
mettre en exergue les limites de la protection des
consommateurs par les autorités de régulation.
Nous allons' pour ce faire'
traiter' dans une première partie' les
limites dans la prise en compte des intérêts des
consommateurs en partant des limites fondamentales des organes
de régulation' par rapport à leur mission de
protection des consommateurs' pour' ensuite'
mettre en lumière' les limites au niveau de
l'exécution de la mission des organes de régulation.
Et' dans une deuxième partie'
nous allons traiter des limites dans le traitement des
différends par les organes de régulation' en
évaluant' le rôle du consommateur en tant
qu'acteur de la régulation' les initiatives des
opérateurs dans ces limites' enfin les limites
liées à la saisine et les procédures et
l'inefficacité dans le traitement des différends.
13 Jean Marimbert' Les régulations
économiques : légitimité et efficacité. -- Paris :
Presses de Sciences Po/Dalloz' 2004 -- (Collection «
Thèmes et commentaires »' série « Droit et
économie de la régulation »' volume 1) p. 179
PREMIERE PARTIE. ****GGG****
LIMITES DANS LA PRISE EN COMPTE DES
INTÉRÊTS DES CONSOMMATEURS
Les organes de régulation sont elles bien formatées
pour prendre en compte de manière efficace les intérêts des
consommateurs ?
La réalité fait apparaître que'
la plupart des organes de régulation évoluent avec des limites
« congénitales »' qui ont trait à leur nature
juridique' leur statut' leur organisation fonctionnelle
(chapitre I) et des limites quant à la manière d'exécuter
la mission qui leur est dévolue (chapitre II).
Ces éléments entraînent,
fondamentalement, des manquements importants dans la prise en compte des
intérêts des consommateurs.
Chapitre 1. Les limites fondamentales des
organes de régulation par rapport à leur mission de
protection des consommateurs
La loi n° 2002-23 du 4 septembre
2002' portant cadre de régulation pour les entreprises
concessionnaires de services publics' donne les bases juridiques et
organisationnelles fondamentales des organes de régulation.
Mais' la majeure partie des organes déjà
créés avant la loi 2002-23' l'on été sur
une base juridique qui n'est pas forcément conforme à la loi
cadre.
L'expérience a montré que la plupart de ces
organes n'ont pas été mis en conformité avec les
principes fondamentaux indiqués dans la loi 2002-23.
Cette non-conformité, explique,
d'emblée, un certain nombre de limites congénitales
qui vont affecter de manière importante la mission de protection
des consommateurs qui leur est dévolue.
Section 1. Au niveau du cadre juridique
§1. NATURE JURIDIQUE DE L'ORGANE
Selon l'article 2 de la loi 2002-23' «
Linstitution de régulation est une autorité
administrative indépendante dotée de l'autonomie
financière et de gestion ».
A cette définition' répond'
du moins sur le plan des textes' un certain nombre d'organes de
régulation que sont :
La Commission de régulation du secteur de
l'électricité (CRSE)' la Commission
nationale de régulation de l'audiovisuel
(CNRA)' l'Autorité de régulation des
marchés publics (ARMP)' qui ont'
toutes' des dispositions expresses les définissant comme
étant des « autorités administratives
indépendantes ».
Le Conseil des infrastructures'
(CDI) est' selon la loi 2004-14' une
«instance consultative qui exerce une surveillance indépendante
». Une indépendance très affirmée dans
les textes.
Pour l'Agence de régulation des
télécommunications' l'exposé des
motifs de la loi 2001-15 qui la crée' l'annonce comme
devant être «(...) un organe indépendant
de régulation(...) »
Cependant' l'article 2 du décret 2001-63 du
17 février 2003' fixant les règles d'organisation et
de fonctionnement de l'agence de régulation des
télécommunications' définit l'ART'
comme un « établissement public à
caractère
spécial»' placé
sous l'autorité du Président de la république...
Et il n'y est question d'autonomie, que
« financière ».
Pour la régulation du secteur de l'eau' ce
rôle est joué' essentiellement' par
la SONES qui est une « Société
nationale » créée par le décret 2003 --
63 du 17 février 2003' avec l'intervention d'un
comité de suivi du contrat de performance.
Il n'est pas, du tout, question, d'autorité
indépendante.
En ce qui concerne l'Agence de régulation des
marchés (de consommation) (ARM)' son organe de
régulation est une « agence »' au vu
de l'article 1 du décret n° 2002- 923 du 18 septembre 2002 qui la
crée. Elle n'est pas une autorité
indépendante.
Le Conseil exécutif des transports urbains de
Dakar (CETUD)' est « un
établissement public à caractère professionnel
», selon l'article 1 de la loi 97-01 du 10 mars
1997. Ce n'est pas une autorité indépendante.
Le comité national des Hydrocarbures
(CNH) est un « organe consultatif»
d'après le décret n°98-337 du 21 avril
1998' et non, une autorité
indépendante.
Ces natures juridiques disparates, imprécises,
non-conformes aux dispositions de la loi cadre' constituent
des éléments qui influent sur la définition de la mission
et l'indépendance des organes de régulation.
Cette définition de la mission et cette nécessaire
indépendance du régulateur' jouent beaucoup sur la
qualité de la protection des intérêts des consommateurs.
§2. DÉFINITION DE LA MISSION
Les difficultés s'annoncent'
déjà' dans la définition de la mission
de protection des consommateurs.
Si la totalité des organes cités'
supra' ont des missions de régulation' la
mission de prise en compte et de protection des
consommateurs' n'est pas toujours explicitement
indiquée.
Elle est parfois' contrairement aux stipulations de la
loi 2002-23' implicite, ou partiellement
énoncée.
Ce qui ne milite pour une bonne prise en
compte' par les dirigeants des organes de
régulation' de cette partie de leur mission' qui
est la protection des consommateurs.
En ce qui concerne la CRSE' la
mission de veiller «à la préservation des
intérêts des consommateurs et à assurer la
protection de leurs droits' pour ce qui concerne le
prix' la fourniture et la qualité de l'énergie
électrique » (article 4 de la loi 98-29)'
est bien précisée.
De même' dans les attributions consultatives
de la CRSE contenues dans l'article 10 de la loi 98-29' les
intérêts des consommateurs sont aussi prises en
compte' car il est prévu que : «Dans ses
propositions au Ministre chargé de l'Energie' la Commission
de Régulation du Secteur de l'Electricité veille à
la préservation des intérêts
légitimes des entreprises titulaires de licence et de
concession' ainsi que de ceux des
consommateurs.
«A cet effet' la Commission de
Régulation du Secteur de l'+lectricité consulte les
entreprises titulaires de licence et de concession et les
associations de consommateurs. »
Pour l'ARTP' l'exposé des
motifs de la loi portant code des télécommunications'
la définit comme devant être un «organe
indépendant de régulation susceptible de garantir l'exercice
d'une concurrence saine au bénéfice des
consommateurs' des opérateurs' et en
général de l'économie nationale. »
L'article 44 du code des télécommunications ne
parlait' lui' que de mission «
d'instruire les plaintes des organisations de consommateurs et de
suivre leur traitement par les exploitants de réseaux et fournisseurs de
service».
Il a fallu 3 ans après'
avec le vote de la loi 2006-02 du 4 janvier 2006' modifiant le Code
des télécommunications' pour, voir,
ajouter' à la mission de
l'ARTP-à travers un article 44bis - celle d'«
assurer la protection des intérêts des consommateurs
en ce qui concerne les prix' la fourniture et la
qualité des services »...
L'adoption de la loi cadre est passée par là.
Aucune disposition explicite ne prévoit
directement' la protection des intérêts des
consommateurs des services des médias audiovisuels' dans la
mission du Conseil national de régulation de
l'audiovisuel (CNRA).
Il y a' tout au plus' des dispositions
implicites' notamment celle de l'article 7 de la loi 2006-4 du 4
janvier 2006' qui parle d'une partie des
consommateurs' en précisant que le CN RA veille
à « la sauvegarde de l'enfance et de
l'adolescence dans les contenus des programmes ».
La seconde disposition de cet article 7 qui prend en
compte' quelque part' les consommateurs' est
relative à sa mission de veiller « au respect de l'accès
équitable des partis politiques' des syndicats et des
organisations reconnues de la société civile aux
médias audiovisuels dans les conditions fixées par les lois et
règlements en
vigueurs »' étant entendu ici'
que les organisations de consommateurs sont donc
éligibles aux dispositions de cet article.
A cela s'ajoutent les dispositions de l'article 3'
qui prévoient' dans le conseil de régulation de
l'audiovisuel' « un membre issu des mouvements des
droits de l'homme ; « un membre issu du Conseil national de
la jeunesse ; « un membre issu des associations de
personnes du Troisième Age »...
En estimant que ces membres représentent
quelque part' les consommateurs dans leurs
principales tranches d'âge.
Le décret n° 95-1157 du 11 décembre
1995' portant approbation des statuts de la
Société nationale des Eaux du
Sénégal (SONES)' ne lui donne aucune
mission directe de protection des intérêts des
consommateurs.
Tout au plus' l'article 2 du décret
prévoit' une mission induite de protection des
consommateurs' par le « contrôle de la
qualité de l'exploitation du service public de la production et
de la distribution d'eau potable ».
Cet objectif « consommateur », n'est pas
forcément visible. La mission de préservation
des intérêts de l'Etat étant
prédominante.
Il faut' cependant' noter
que' l'article 14 du décret 95-1157' comme le veut
la loi cadre sur les sociétés nationales'
prévoit « un représentant des usagers
du service de l'eau' désigné par le Ministère
chargé du Commerce sur proposition des associations
existantes » (associations de consommateurs
s'entend)' au niveau du conseil d'administration de la SONES.
Notons' quand même' que le conseil
d'administration, ne joue pas un grand rôle dans la
régulation du secteur de l'eau.
Pour l'Agence de régulation des
marchés (ARM)' aucune disposition
du décret n° 2002-923 du 18 septembre 2002' ne
prévoit une protection explicite et directe du consommateur.
Les seules dispositions assimilables à une protection
des intérêts du consommateur sont les dispositions de l'article 2
consistant à « mettre en place un système d'information
performant afin de permettre aux décideurs de déclencher des
mesures de régulation idoines pour un meilleur
approvisionnement du marché » et à «
constituer un système d'alerte permettant en cas de menaces de
pénurie' d'alerter le Ministre chargé du
Commerce pour le déclenchement des procédures d'"rgence de
normalisation du marché »
Ici' la protection du consommateur est prise en
compte' uniquement, dans la lutte contre
l'indisponibilité du produit.
Pour parler de protection des consommateurs en ce qui
concerne l'Autorité de régulation des marchés
publics (ARMP)' il faut consulter l'article 2 du
décret 2007-546 du 25 avril 2007' qui la charge
«d'initier la rédaction et de valider, en collaboration
avec l'entité centrale chargée du contrôle des
marchés publics et des délégations de service
public' les ministères techniques compétents et les
organisations professionnelles et la société
civile' les textes d'application relatifs à la
réglementation des marchés publics et des
délégations de service public' notamment'
les documents- types et les manuels de procédures ».
Il faut envisager que cette disposition' permette
à l'ARMP de consulter les associations de consommateurs
afin qu'elles puissent proposer ou donner leur avis sur les
éléments permettant de veiller à ce que les attributaires
de marchés publics respectent les normes et fournissent des
services de qualité aux consommateurs.
Pour le conseil des infrastructures
(CDI)' l'article 2 prévoit' dans sa
composition' « Trois personnalités nommées
par le Président de la République sur une liste de six personnes
proposées par les organismes constitués pour la
défense des droits de l'homme et pour la préservation des
intérêts des usagers de services d'infrastructure. »
de même' l'article 8 prévoit qu'«
à la demande des parties
contractantes et des usagers' le
Conseil des infrastructures fournit un appui de médiateur pour
prévenir les litiges et faciliter leur règlement ».
Pour le cas du Conseil exécutif des transports
urbains de Dakar (CETUD)' la seule prise en compte expresse
des intérêts des consommateurs' intervient dans le sens
d'une représentation des associations de consommateurs
dans l'Assemblée plénière de l'organe.
§3. DOMAINE D'INTERVENTION
Les domaines d'intervention des organes de
régulation, ne sont pas, tous, bien délimités, à
quelques exceptions près. De même' des
domaines importants pour la régulation sont omis ou gérés
par d'autres structures.
En effet' parmi les domaines d'intervention des
organes de régulation indiqués par l'article 3 de la loi
2002-23' on peut noter « les prix, la fourniture et
la qualité des services » G
Or, rien n'est prévu dans la mission du
CNRA pour veiller aux prix et à la qualité des
prestations des opérateurs du secteur' notamment
ceux des bouquets payants.
Les textes du CNRA n'ont pas prévu de
dispositions pour, prendre en compte les intérêts des
consommateurs, prévenir, connaître et traiter des litiges entre
les fournisseurs de contenus audiovisuels et les consommateurs.
La régularité et la qualité
des prestations des fournisseurs ne sont pas prises en compte par les textes du
CNRA.
L'audiovisuel' pour le
CNRA' du moins' à travers les
textes' n'est pas considéré comme un produit
commercial, dont il faudra veiller à la conformité avec les
besoins des consommateurs, tant au niveau de la qualité que des
prix.
De même' la qualité ne semble pas
être une priorité pour le Comité national des
hydrocarbures (CNH)' car aucune disposition n'en fait
état.
Le CNH ne travaille pas sur la qualité des
hydrocarbures servis aux consommateurs.
Le CETUD n'a pas pour mission de veiller à la
qualité des services offerts par les opérateurs de
transport.
L'ARM ne connaît que
l'approvisionnement. Elle ne gère pas la qualité des
produits qu'elle régule' dans une optique de
protection du consommateur.
Section 2. Au niveau du statut des organes
§1. INDÉPENDANCE
Il n'est pas' dans la plupart des organes de
régulation' mis en exergue' leur nature
indépendante.
Les natures juridiques sont disparates'
non-conformes' le plus souvent' à la loi cadre et
l'indépendance, qui doit leur être reconnue, est souvent
ignorée' ce qui les prédispose
à une capture par les autorités politiques et
à une négligence de leur mission de prise en compte des
intérêts des consommateurs.
Si' sur le papier' il est beaucoup
question d'indépendance pour la Commission de régulation
du secteur de l'électricité' elle
est' en réalité très tributaire du
ministère de l'énergie qui lui donne toutes les
orientations' malgré les conditions de
nomination' assez encourageantes pour une bonne
indépendance' prévues à l'article 2 de la loi
98-29 qui disposent que « Le mandat du Président et des Membres
de la Commission de Régulation du Secteur de l'+lectricité est
de 5 ans' renouvelable une fois ».
Pour l'Autorité de régulation des
marchés publics (ARMP)'
l'indépendance y est assez affirmée tant au niveau de la
nature juridique qu'au niveau de la mission' en ce sens qu'elle est
considéré comme étant « une
autorité administrative indépendante » par la
loi 2007-546 du 25 avril 2007 et que sa mission de
régulation a pour objet «(:) de mettre en oeuvre des
procédures d'audits indépendants ».
De même « les membres du Conseil sont
nommés par décret' sur proposition
des administrations' organismes socioprofessionnels et
organisations de la société civile auxquels ils
appartiennent. Ils bénéficient pour les actes
qu'ils prennent dans l'exercice de leurs fonctions d'une protection
spéciale de l'Etat. Ils ne peuvent être' sous
réserve des dispositions de l'article 10 du présent
décret' poursuivis' recherchés'
arrêtés ou jugés à l'occasion des actes
accomplis' des mesures prises ou des opinions ou des votes
émis dans l'exercice de leurs fonctions. Ils exercent leurs fonctions en
toute impartialité et en toute
indépendance ».
Cependant, ce sera après une ou des années
de fonctionnement que nous serons à même d'évaluer le
niveau réel d'indépendance.
L'indépendance est une notion assez présente dans
les dispositions du CNRA.
Aussi' nonobstant les dispositions de
l'article ter sur sa nature d'autorité
indépendante' les dispositions sur la nomination des
membres du CNRA sont assez protectrices d'une certaine
indépendance.
En effet' selon l'article 4 : « La
durée du mandat des membres du Conseil National de Régulation de
l'Audiovisuel est de six ans. Ce mandat n'est ni renouvelable, ni
révocable ».
« Les membres du Conseil National de
Régulation de l'Audiovisuel ne peuvent être poursuivis'
recherchés' arrêtés ou jugés à
l'occasion des actes accomplis ou des opinions émises dans l'exercice de
leurs fonctions ».
Mais, certains acteurs, tels que les partis politiques,
restent toujours à convaincre par rapport à l'indépendance
réelle des membres du CNRA.
L'indépendance est une notion qui revient sans cesse
dans les dispositions de la loi 2004-14 du 1er mars 2004'
instituant le Conseil des infrastructures'
notamment au niveau de l'exposé des motifs' qui estime que sa
mise en place a pour objectif général « d'assurer
une veille indépendante et qualifiée
» et de formuler « des avis
qualifiés et indépendants lorsqu'il est saisi
» et qu'il est habilité à « effectuer
une publication directe et indépendante de ses avis
»' et que ses membres «sont nommés par
décret' observent les incompatibilités
légales qui garantissent leur indépendance
»
Ces dispositions sont confirmées par les articles 1 et
8 de la loi 2004-14 et particulièrement' l'article
11' qui précise que «Dans l'exercice de leurs
fonctions' les membres du Conseil des infrastructures ne
reçoivent d'instructions d'aucune autorité
».
Ce qui est une avancée notable, qui ne se
retrouve, presque, dans aucune disposition d'organe de
régulation.
En ce qui concerne l'Agence de régulation des
télécommunications et des Postes
(ARTP)' aucune disposition d'indépendance ne
vient confirmer l'affirmation contenue dans l'exposé des motifs du code
des télécommunications faisant état du
caractère indépendant que devrait revêtir
l'ARTP.
Au contraire' le décret 2003-63 du 17
février 2003' portant organisation et fonctionnement de
l'ART' ne donne aucune garantie
d'indépendance au Directeur général'
qui est « nommé par décret» et qui est
révocable à tout moment.
D'ailleurs' de toutes les instances de
régulation du Sénégal' l'ART(P)* est
celle qui a connu la plus grande instabilité, au niveau
des instances de direction avec trois directeurs généraux
nommés en 7 ans.
* Depuis l'ART jusqu'à son passage à l'ARTP
Mais' parallèlement, il n'a jamais
été question d'indépendance, pour la
Société nationale des eaux du
Sénégal' ni pour l'Agence de
régulation des marchés' ni pour la
Commission nationale des Hydrocarbures.
Ces organismes sont complètement
capturés par l'autorité politique' au
détriment, le plus souvent, de leur mission de préservation des
intérêts des consommateurs.
§2. POUVOIRS
La plupart des organismes de régulation ont des
pouvoirs' de proposition et de conseil. Ce qui fait
défaut, c'est beaucoup plus' les pouvoirs de
fixation tarifaires' d'investigation, de sanction
effective et de traitement des différends.
Le CNRA n'a aucun pouvoir de régulation de la
qualité des services offerts, ni des prix
pratiqués' par les opérateurs des bouquets
télévisuels' au bénéfice des
consommateurs' même en termes de proposition.
Cette limite est notée au niveau du
CETUD, qui n'a aucun pouvoir de sanction des
opérateurs de transport ou de règlement des
différends entre les opérateurs et les usagers.
Il faut noter que les pouvoirs de l'ARTP sont assez
étendus, en matière d'investigation'
d'approbation des tarifs des opérateurs' et de sanction
etc.
En qui concerne la SONES'
le CNH' la CRSE'
et le CETUD' l'approbation tarifaire
est du domaine du Ministre de tutelle. Ces organes'
n'exécutent que des calculs de la structure tarifaire' ce qui
fait' d'eux' juste' des structures de
proposition dans ce domaine.
Si la SONES et le CRSE ont le pouvoir
de sanctionner les manquements des opérateurs' en
ce qui concerne leurs obligations vis-à-vis des
consommateurs' ce n'est
pas le cas de l'ARM, ni du CNH, ni du
CETUD' tant au niveau du respect de la
qualité' que des prix.
En ce qui concerne l'ARM' elle peut
obtenir une fixation consensuelle des prix des
produits' après concertation entre les producteurs et les
consommateurs.
Nous voyons donc' que des dispositions
cruciales de prise en compte et de protection des intérêts des
consommateurs, échappent au contrôle des organes de
régulation' notamment' en matière
de surveillance tarifaire et de respect des normes et de la qualité.
§3. COMPOSITION DES ORGANES
La composition des organes de régulation est
très disparate. Si certains organes sont très
compacts - 3 personnes pour la CRSE' d'autres sont
pléthoriques - c'est le cas du CETUD avec 26 membres pour
l'assemblée plénière.
Certains rares organes de régulation respectent le
droit fondamental du consommateur à la représentation, et
comptent, une représentation des usagers -consommateurs dans leurs
organes.
C'est le cas du CETUD, avec une
représentation des consommateurs dans l'assemblée
plénière.
C'est le cas' aussi :
des représentants des différentes tranches
d'âge au niveau du CNRA'
des représentants des usagers au sein du Conseil
des infrastructures'
des représentants des usagers au niveau du conseil
d'administration de la SON ES'
des représentants de la société
civile' au niveau du conseil de régulation
et du comité de règlement des différends
de l'ARMP.
Par contre' aucune représentation des
consommateurs' n'est prévue au
niveau de la CRSE' au niveau du CNH et au niveau du conseil de
régulation de l'ARTP.
Or' la représentation des consommateurs est une
des conditions fondamentales de préservation et de
prise en compte des intérêts des consommateurs.
Section 3. Au niveau de l'organisation fonctionnelle des
organes de régulation
§1. INTERLOCUTEUR PRINCIPAL NON
SPÉCIFIÉ
Les organes de régulation ne sont pas organisés
dans le sens de faciliter leur accessibilté et le
contact entre eux et les consommateurs ou leurs organisations.
Aussi' il n'y a pas d'interlocuteur spécifié.
Ce qui rend, parfois extrêmement compliqué le contact interactif,
nécessaire, entre le consommateur et l'organe.
Tout va vers le Directeur
général' ce qui alourdit et ralentit,
beaucoup, la prise en charge des réclamations des consommateurs
du fait de l'indisponibilité du « patron » et qui
souvent' est le seul' à pouvoir
dispatcher' et donc initier' le traitement d'une saisine
faite par un consommateur.
De tous les organes de régulation'
seule l'ARTP a timidement mis en place' récemment un
«Monsieur consommateur» dont l'opérationnalité souffre
de l'instabilité des hommes dans l'organe' avec les
fréquents changements au niveau de l'organigramme.
§2. ABSENCE DE CELLULE « CONSOMMATEURS
»
Mise à part l'ARTP' aucun des
organes de régulation n'a mis en place une cellule « consommateurs
» organisée pour gérer et traiter les
problèmes spécifiques aux consommateurs et à leurs
organisations.
Si' ce début d'organisation en faveur de la
prise en compte des intérêts des consommateurs' est
à saluer au niveau de l'ARTP' beaucoup de choses
restent
encore, à faire, pour un bon traitement
des relations entre l'ARTP et les associations de consommateurs.
Chapitre 2. Les limites au niveau de
l'exécution de la mission des organes de
Régulation
Les limites institutionnelles traitées'
supra' occasionnent des répercussions importantes au niveau
de la conduite de la mission générale de protection des
consommateurs, en particulier' au niveau de la
prise en compte globale de la mission et au niveau du choix des
dossiers.
Ces difficultés sont renforcées par
l'absence de moyens techniques, propres aux organes de
régulation' pour leur besoins d'investigation
scientifique.
A cela s'ajoutent les limites au niveau de
l'interactivité indispensable qui doit exister entre le
consommateur' plaignant' et l'organe de
régulation' qui se doit d'être a mesure
d'appréhender' de la manière la plus juste'
les désidérata des consommateurs.
Section 1. Au niveau de la mission
générale
§1. CONDUITE ET ORIENTATION DE LA
MISSION
A. Non prise en compte de certains aspects de la mission
Certains organes de régulation' ne
prennent en compte, qu'une partie de la mission
générale' qui est la leur'
notamment' de la partie ayant trait à la protection des
consommateurs.
Le CNRA ne traite pas des prestations offertes aux
consommateurs - au niveau des prix' de
la qualité' du respect des
normes - par les fournisseurs de bouquets de
télévision.
L'ARM' ne veille pas, non
plus à la qualité et au respect des normes sur les
produits qu'elle régule. Seule' la régularité
de l'approvisionnement, reste sa priorité.
Le CNH n'a pas pour préoccupation, la gestion
de la qualité des produits et services offerts par les
distributeurs et autres opérateurs des services des hydrocarbures.
Le CETUD' ne gère
pas la qualité de l'offre de transport, et n'impose pas aux
opérateurs' un respect des normes et un
standard de qualité et de confort - qu'il surveille
- au bénéfice des consommateurs.
La SONES' ne traite pas des
différends entre la SDE et les consommateurs, tant au niveau de
la facturation' que de la qualité des prestations de
l'opérateur.
L'ARTP n'a' jusqu'à
présent pas' présenté une étude
de la structure des prix des produits de
télécommunications' afin d'apprécier leur
justesse ce qui permettrait d'ajouter dans la transparence et de permettre une
gestion plus rigoureuse des offres des opérateurs aux consommateurs.
B. Déséquilibre dans le choix des
dossiers
Aujourd'hui' il y a un
déséquilibre criard' entre les
missions qui sont dévolues aux organes de régulation
et celles qu'elles se donnent' en mettant la
priorité sur certains thèmes au détriment
d'autres' non moins importants.
Et le déséquilibre est tel'
que' pour les associations de Consommateurs' que nous
avons interrogées14:
i2- l'ARM' est l'Agence de
régulation « de l'oignon et de la pomme de terre
»;
14 l'AdEETélS (Association pour la défense des
abonnés à l'eau' à l'énergie aux
télécommunications et aux services) ;
l'ASCOSEN (Association des consommateurs du
Sénégal) ;
l'UNCS (Union nationale des consommateurs du
Sénégal) ;
l'ADEC (Association pour la défense de l'environnement et
des consommateurs) ;
r le CETUD' le comité
exécutif « du remplacement des cars rapides
» ;
ü le CNRA' le Conseil national
de régulation « des élections et des temps
d'antenne» ;
ü le CN H' le
« comité de la structure des prix du carburant
»;
r l'ARTP' l'agence de
régulation de la « Sonatel » ;
ü la SONES' la
société de surveillance « des bornes fontaines
et des branchements sociaux» ; et la
ü Le CRSE' la
commission « de régulation des tarifs de Senelec
», et est une « division du
ministère de l'énergie ».
Ces descriptions caricaturales s'expliquent par le fait que
chacun des organes cités supra s'est illustré par sa
focalisation principale sur, un produit, un opérateur ou une mission, en
négligeant toutes leurs autres missions, produits ou
structures.
En effet' même si l'ARM est
compétente sur d'autres marchés' son action
n'est visible que pour gérer, principalement,
l'oignon' notamment au moment du contingentement de son
importation.
Le CNRA, ne s'illustre que lors des élections,
pour la gestion des temps d'antenne et pour l'accès des partis
politiques à la télévision nationale. Ce n'est
que' récemment' que l'on a commencé
à voir le CNRA s'intéresser au contenu diffusé par les
privés et c'était pour protéger le Président de la
république d'une caricature faite de sa personne par la chaîne
WALF TV.
Les principales actions de l'ARTP sont celles retenues
contre la Sonatel' notamment' la plus
spectaculaire de toutes' qui a consisté à une amende
de plus de 3 milliards de Francs CFA.
La SONES s'illustre davantage dans la mise en
oeuvre des engagements sur les branchements sociaux et l'installation
de bornes fontaines.
Et le CNH s'illustre parfaitement dans la
publication, toutes les 4 semaines' de la structure
actualisée des prix des hydrocarbures.
C. Absence d'équipements propres
L'absence d'équipements de contrôle
appartenant à l'organisme de régulation est
décriée par toutes les associations de consommateurs
consultées.
En effet' la plupart des organes de
régulation' utilisent les installations des
opérateurs pour tester' mesurer ou étalonner
la qualité des équipements de ces opérateurs qu'ils sont
chargés de contrôler.
C'est le cas' par exemple' du banc
d'essai des compteurs qui se trouve au niveau des opérateurs que sont :
la SDE' pour l'eau et la SENELEC pour
l'électricité' au lieu d'être chez le
régulateur.
C'est cette situation qui prospère' pour le
contrôle de la majorité des équipements spécifiques
des opérateurs.
Cet état de fait' ôte toute
crédibilité au contrôle effectué par les
organes de régulation sur certains équipements des
opérateurs pour la préservation des intérêts des
consommateurs.
Cette situation a toujours été
dénoncée par l'Association des consommateurs du
Sénégal (ASCOSEN) et par les autres associations de
consommateurs.
§2. TRANSPARENCE
A Non respect du devoir d'informer et de reddition de
comptes
En contrepartie du pouvoir réglementaire et le pouvoir de
sanction' les régulateurs doivent fonctionner selon
la logique de transparence.
La transparence de l'action est la première exigence qui
est apparue dans le fonctionnement des autorités de
régulation.
Cette exigence se traduit dans le fonctionnement interne mais
aussi dans ses relations avec les consommateurs et les milieux externes.
L'information est considérée comme un
point central dans la conduite de la régulation.
L'efficacité du régulateur suppose sa capacité à
mobiliser et à diffuser de l'information.
Pour M. Pablo FALL Secrétaire
exécutif de l'Association pour la défense des
abonnés de l'eau, de l'énergie, des
télécommunications et des services
(AdEETélS)' « tout tarif doit avoir une
structuration' alors qu'aucune structure des prix n'est
établie par les organes de régulation »' ce qui affecte
lourdement la transparence dans la facturation des services et produits
régulés.
B Absence de démarche et d'approche «
consommateurs »
Pour M. Jean Pierre DIENG'
Président de l'Union nationale des consommateurs du
Sénégal (UNCS)' « les
régulateurs ne sont pas du tout orientés consommateurs. Ils sont
uniquement dans une logique administrative et technique.»
Cette déclaration est partagée par toutes les
associations de consommateurs interrogées qui estiment que les
régulateurs n'ont pas une démarche orientée «
consommateurs », à part quelques initiatives'
encore maladroites' de l'ARTP.
Les régulateurs sénégalais ne
maitrisent pas la problématique du consumérisme et par
conséquent' ne savent pas'
forcément' quelle approche prendre' pour mieux
tirer profit de la collaboration avec les associations de consommateurs.
Une collaboration avec les associations de consommateurs qui
renforcerait à coup sûr le pouvoir des autorités de
régulation.
Section 2. Au niveau de la collaboration avec les
consommateurs
§1. LA CONSULTATION DES ASSOCIATIONS DE CONSOMMATEURS
C. Consultation sur la politique
« La consultation des associations de consommateurs
sur les problèmes généraux et la politique de
régulation' se fait d'une manière insatisfaisante
» selon M. Maguette FALL Président de
l'Association pour la défense de l'environnement et des consommateurs
(ADEC).
Il estime en effet' que « cette consultation
est sporadique et qu'elle est sélective (toutes les organisations de
consommateurs ne sont pas consultées) ».
Pour M. Pablo FALL Président de
l'AdEETélS' « La plupart de ces
consultations sont superficielles et sont' très
souvent' des faire-valoir pour les régulateurs » et
que les objectifs réels ne peuvent être atteints « que si
les consultations sont sérieusement élaborées avec un
système de suivi des propositions des associations de consommateurs.
»
D. Consultation décisionnelle
Les organes de régulation ne consultent pas les
consommateurs pour la prise de décisions de
régulation.
Cette situation explique que' beaucoup de
décisions prises par certains organes de régulation, ne
rencontrent, pas souvent, l'assentiment des associations de
consommateurs.
C'est le cas de la décision (*) prise par l'Agence de
régulation des télécommunications et des postes relative
à l'indentification obligatoire des abonnés au
mobile
(*) Décision qui a inspiré le décret 2007 --
937 du 7 août 2007 portant indentification des acheteurs et utilisateurs
des services de téléphonie mobile offerts au public.
prépayé qui a été violemment
rejetée par l'ASCOSEN qui « estimait que cette
décision était contraire à la pratique dans la majeure
partie des pays du monde' où l'accès au
prépayé était libre et sans identification'
notamment' en Europe' en Afrique et même en Chine.
Et qu'il fallait plutôt demander aux opérateurs de trouver une
parade aux abus et à la délinquance téléphonique
éventuelle».
§2. IMPLICATION DES CONSOMMATEURS
C. Cellule « consommateurs »
« Les associations de consommateurs ne se sentent pas
réellement impliquées dans le processus de régulation
»' c'est l'avis de M. Jean pierre DIENG'
président de l'UNCS.
Ce que partagent les autres organisations de
consommateurs' même s'il y a' de temps à
autre' quelques initiatives' telles que' celle
de la création d'une « cellule consommateurs » au niveau de
l'ARTP.
Cette cellule consommateurs est, la seule, mise en
place, dans un organe de régulation au
Sénégal.
Cependant' elle n'est pas très
opérationnelle et elle est très grandement
pénalisée par l'instabilité au niveau de l'organigramme de
l'organe de régulation' et par la mauvaise maîtrise des
dossiers et des procédures' par les tenants de la cellule.
D. Renforcement de capacités
Pour que les organes de régulation aient un apport et
un soutien de qualité de la part des associations de
consommateurs, il faut,
nécessairement' une bonne maîtrise,
par les organisations de consommateurs, des problèmes spécifiques
au secteur régulé.
Il faut aussi' que les organisations de
consommateurs aient les moyens « de mettre en place un dispositif de
veille sur' la qualité' les prix et les
intérêts des consommateurs vis-à-vis des produits et
services régulés »' comme le préconise
l'ASCOSEN.
Or' les associations de consommateurs'
n'ont pas toutes' les moyens humains et matériels'
pour mener à bien' tous les aspects de leur mission de
défense et de protection des intérêts des consommateurs.
Aussi' il est impératif que le
régulateur participe, au renforcement des capacités techniques et
institutionnelles des organisations de consommateurs, pour faire face
à leur grand dénuement vis-à-vis des
puissants opérateurs.
De tous les organes de régulation au
Sénégal' seule l'ARTP est entrain de
mettre en place un système de renforcement des
capacités des associations de consommateurs' afin de
les mettre' à un niveau' leur permettant de
maîtriser le domaine des télécommunication et de la Poste
et de pouvoir' valablement' jouer le rôle qui est
le leur.
Ce programme de l'ARTP a le mérite
d'exister' mais il ne répond pas encore, tout
à fait, aux attentes des organisations de consommateurs.
DEUXIEME PARTIE
.
****OOOO**** LIMITES DANS LE TRAITEMENT
DES DIFFÉRENDS PAR LES ORGANES DE REGULATION
Le traitement des différends entre les
consommateurs et les opérateurs demeure' encore'
un point saillant' dans la mission des organes de
régulation.
Cette mission est elle menée à bien par les
régulateurs ? Assurément non 1
Au vu de la perception qu'ont les organisations de
consommateurs - qui sont les principales concernées -- de la mission de
règlement et de traitement des différends menée par les
organes de régulation' tant au niveau des acteurs'
que de la procédure et des résultats obtenus.
Chapitre I. Le consommateur acteur de la
régulation
En tant qu'acteur de la régulation' le
consommateur est, souvent, peu considéré par les organes
de régulation.
Ce manque de considération' visible dans les
relations entre le régulateur et les consommateurs'
entraîne aussi' un rejet, de la part des
organisations de consommateurs' des organes de régulation.
Cette situation' affecte beaucoup' la
qualité de la collaboration entre les associations de consommateurs et
les organes de régulation' pour le règlement des
différends.
Section1. Défiance des organisations de
consommateurs vis-à-vis des organes de régulation
§1. EXPÉRIENCES MALHEUREUSES
Les expériences malheureuses vécues par les
organisations de consommateurs' dans leurs rapports avec les organes
de régulation' ont été à la base
de la faiblesse du nombre de cas de réclamation soumis par les
consommateurs.
Toutes les associations de consommateurs consultées(*)
estiment n'avoir pas confiance à la qualité du traitement
de leurs réclamations par les organes de régulation.
En effet' elles considèrent'
n'avoir pas eu satisfaction dans le traitement des dossiers soumis aux organes
de régulation. Et' dans la majeure partie des cas'
aucune prise en compte réelle de la réclamation' n'a
eu lieu de la part de l'organe de régulation.
Ce qui ne les encourage plus à continuer à les
saisir' dans le futur' pour le traitement des
différends qui les opposeraient aux opérateurs des secteurs
régulés.
Cette insatisfaction tient' tant à la
méthode d'approche' qu'à l'absence de résultat
probant.
§2. PLUS GRANDE EFFICACITÉ DES
ACTIONS PROPRES DES ORGANISATIONS DE CONSOMMATEURS
Pour les associations de consommateurs'
l'expérience a montré que le traitement des
différends' directement avec les
opérateurs' ou par d'autres voies' initiées
et gérées par les organisations de consommateurs' a
généré beaucoup plus de résultats probants.
En effet, la soumission directe à
l'opérateur, de certains problèmes, a eu beaucoup plus
d'efficacité, que le passage par l'organe de
régulation.
En effet' l'ASCOSEN a obtenu un
certain nombre de concessions de SONATEL :
? la non facturation de la communication mobile' au
destinataire15'
ü la non facturation de la boite vocale' si vous
ne laissez pas de message'
ü le non transfert à la boite vocale --
donc' la non facturation -- dans le cas où votre
interlocuteur se trouve dans une zone hors couverture réseau'
etc. ;
sans avoir à saisir l'ARTP'
pour trancher le différend' rien qu'en saisissant directement
l'opérateur et en ayant une volonté sans faille d'obtention de
résultats. Aussi' il est aisément
compréhensible que les organisations de consommateurs
s'orientent plus vers les opérateurs, pour obtenir gain
de cause de manière plus rapide et plus efficace.
15 Au lancement du GSM' SONATEL avait prévu
de faire payer l'appelant et l'appelé' comme il le
faisait avec son système analogique Radiocom 2000 qui
précédait le GSM. SONATEL arguait que tous les deux (appelant
et appelé) devraient payer' car utilisant une
fréquence radio. L'ASCOSEN a pu s'y opposer en
proposant et obtenant que' seul' celui qui
appelle soit facturé.
Section 2. Négligence par les régulateurs
du rôle de « Watchdog(*) » que jouent les
organisations de consommateurs
§1. RECUEIL DES PLAINTES ET OBERVATOIRE DE LA
QUALITÉ
Les organisations de consommateurs jouent un rôle
fondamental de « watchdog » qui peut rendre un grand service aux
organismes de régulation.
En effet' les organismes de régulation dans
leur quasi-totalité' n'ont pas de
représentation à l'intérieur des
régions.
Cette situation' diminuant la
capacité de surveillance de l'autorité de
régulation' est comblée par la représentation
nationale des organisations de consommateurs qui sont à même de
jouer le rôle de « monitoring » de la qualité des
services offerts par les opérateurs des secteurs
régulés.
Aussi' en n'impliquant pas les organisations de
consommateurs dans le monitoring de la qualité des services et
produits offerts par les opérateurs' les organes de
régulation se privent ainsi d'un observatoire de la
qualité qui renforcerait à coup sûr leur
efficacité.
§2. FILTRAGE ET INTERMÉDIATION
Les Associations de consommateurs jouent un très
important rôle de filtrage et d'intermédiation, entre les
autorités de régulations et les consommateurs.
En effet' la plupart des organes de
régulation ne peuvent être saisis directement par
les consommateurs.
Ils doivent passer par les associations de consommateurs
qui sont, souvent, les seules habilitées à saisir le
régulateur.
(*) Littéralement Chien de garde' sentinelle
Les organisations de consommateurs en recueillant les
réclamations des consommateurs' vont les
trier en éliminant les réclamations
farfelues' celles' sans objet' et en aidant
les plaignants à reformuler' certaines.
En outre' les organisations de
consommateurs' sont en mesure d'expliquer' les
décisions des organisations de régulation et leur
fonctionnement' aux populations concernées et à les
sensibiliser dans le sens souhaité par les organes de
régulation.
Cependant' si les associations de consommateurs ont
une défiance vis-à-vis des organes de
régulations' les consommateurs ne verront pas le
régulateur traiter leurs différends avec les
opérateurs' ce qui porte un coup dur au droit
fondamental du consommateur à être défendu et à leur
droit à la réparation.
Chapitre II. Les initiatives des
opérateurs
Pour garder une compétitivité et une image
positive vis-à-vis des consommateurs' les opérateurs
déploient des trésors d'astuces marketing et de facilitation des
rapports entre eux et les consommateurs et leurs représentants.
Ces actions' détournent beaucoup le
trafic de demande de traitement des différends par le
régulateur qui perd' de plus en plus' la
possibilité d'arbitrer' au bénéfice du
consommateur' les relations avec les opérateurs.
Section 1. Autorégulation des
opérateurs
§1. CODES DE CONDUITE
Pour plaire aux consommateurs' les
opérateurs mettent en place des codes de conduite en interne pour faire
du consommateur l'objectif ultime de leur travail' montrer qu'elles
sont des « entreprises citoyennes. »
C'est ainsi que des chartes de déontologie' de
qualité et des « engagements clients »' sont
élaborés pour renforcer l'attitude client du personnel.
C'est le cas pour la SONATEL et la SDE'
qui' au-delà de l'approche client basique' parlent
de développement durable.
Le groupe SONATEL « a élaboré une charte de
déontologie qui constitue pour les salariés un repère de
valeurs et de bonnes pratiques »16.
Elle estime que « la Responsabilité Sociale
d'Entreprise (RSE)' placée au rang des priorités du
groupe Sonatel depuis 2005' est la capacité de Sonatel
à contribuer au développement durable'
c'est-à-dire à un développement économique
respectueux des équilibres sociaux et écologiques pour les
générations futures ».
La SDE « est convaincue que
l'harmonie est source de progrès' et affirme son
caractère d'entreprise citoyenne en menant de nombreuses actions au
bénéfice des populations sénégalaises
»17.
Le projet d'entreprise de SENELEC18'
« se fixe comme ambition de faire de Senelec un bien précieux
pour tous' pour le Client' pour le Personnel'
pour l'Actionnaire. Cela signifie M
· Apporter au Client un service de qualité
à un coût moindre'
· Faire retrouver au personnel' la
fierté de travailler pour une entreprise reconnue qui
l'implique' l'utilise au mieux et l'accompagne dans son
développement professionnel et personnel.
· Faire de SENELEC' une
société de référence au service du
développement économique et social du Sénégal.
»
16 Site web de SONATEL
www.sonatel.sn
17 Site web de la SDE
www.sde.sn
18 Site web de la SDE
www.senelec.sn
§2. CERTIFICATION
Pour mieux rassurer les consommateurs, développer
leur pénétration ou se faire une bonne image'
les opérateurs jouent aujourd'hui la carte «
certification. »
C'est ainsi que la Sénégalaise Des Eaux affirme
dans son site internet qu'elle« est certifiée
selon la norme internationale ISO 9001 version 2000 depuis juillet
2002.»
Selon elle' « la certification
décernée par l'AFAQ' l'un des tous premiers
certificateurs mondiaux' concerne les activités de
l'entreprise dans l'exploitation' le traitement' la
distribution d'eau potable et la gestion de la clientèle. »
La SDE ajoute que « Cette consécration fait de
la SDE la première société sénégalaise
assurant un service public à être certifiée dans une norme
ISO et la première société d'eau du continent africain qui
décroche une Certification dans la norme ISO 9001 version 2000
basée sur le management des processus et la satisfaction des clients.
»
Le 1er décembre 2003' Léon Charles
CISS' le Directeur de la Sonatel Mobiles d'alors' a
officiellement annoncé que l'Association française de l'Assurance
qualité (AFAQ) avait octroyé la certification de
qualité ISO 9001/2000 au système de gestion de la
clientèle abonnée à la formule « Téranga
»19.
Cette certification de Sonatel a' plus
tard' « été remise en cause par
l'AdEETélS » selon Pablo FALL son secrétaire
exécutif' « au vu de la mauvaise qualité du
service et de la non transparence de la facturation mobile »
Ces diverses opérations de charme des
opérateurs' à l'endroit des consommateurs'
peuvent entraîner des erreurs de jugement des consommateurs, qui
peuvent devenir plus tolérants vis-à-vis des manquements des
opérateurs des secteurs régulés.
19
Article dans OSIRIS'
www.osiris.sn
Ce qui entraîne' bien sûr' une
mauvaise prise en compte des intérêts et renforce ainsi les
limites dans le traitement des différends qui auraient dû les
opposer aux opérateurs.
Section 2. Dispositifs de prise en charge des
réclamations
§1. PRÉVENTION DES DIFFÉRENDS
La formation des consommateurs par les organes de
régulation et la surveillance de la qualité des prestations et
des produits des opérateurs' sont des actions
préventives que peuvent mener les organes de régulation
afin de prévenir les différends entre les opérateurs et
les consommateurs.
Or' dans la plupart des cas' l'approche
des organes de régulation est curative et non
préventive.
Ce qui alourdit les procédures de traitement et de
règlement des différends qui sont soumis aux organes de
régulation par les associations de consommateurs.
§2. TRAITEMENT DES PLAINTES
Pour Pablo FALL de
l'AdEETélS' « plus d'une
soixantaine de courriers de saisine et de réclamation ont
été envoyés sans succès à
l'ARTP» ; qui ne répond' d'ailleurs
pas' dans la plupart des cas' aux requêtes des
associations de consommateurs.
Il précise que « la réclamation de
l'AdEETélS auprès de l'ARTP contre la mauvaise
qualité du service mobile de SONATEL ORANGE est restée deux
années sans suite. Et sans réponse.»
L'ASCOSEN a saisi l'ARTP de la
problématique de la consultation payante de la boite vocale
de TIGO et du fait qu'en absence de réseau' le
système TIGO vous
envoie systématiquement sur la boite vocale de votre
correspondant (en vous facturant donc son incompétence).
L'ASCOSEN avait aussi saisi' sans
succès la CRSE contre la double taxation faite par
SENELEC sur ses factures d'électricité.
Il a fallu que la SENELEC sorte de la privatisation'
pour qu'elle prenne elle même l'initiative d'enlever cette
hérésie de son propre chef' malgré
l'habilitation par la CRSE.
Chapitre III. Saisine et procédures de
traitement des différends
La gestion de la saisine qui est la
première étape' dans le traitement des
différends' est cruciale.
En effet' si le consommateur de base n'est
pas habilité à saisir l'organe de
régulation' cela va sans dire qu'aucune étape
supplémentaire ne saurait être franchie dans la recherche
de la protection de l'intérêt du consommateur.
Il est tout aussi important que les modalités de
validation de la saisine soient respectées par les requérants.
Or' il y a dans certains organes de
régulation' un certain nombre de dispositions restrictives au
droit fondamental des consommateurs à la réparation'
qui commencent par la faculté de saisir l'organe de traitement des
différends' sans aucune entrave.
Section 1. Organisation de la saisine
§1. STRUCTURES HABILITÉES
Pour l'ARTP' seules, les
organisations de consommateurs, sont habilitées à la
saisir' selon les dispositions de l'article 44 du code des
télécommunications' alors que' l'article
44bis lui' ne parle que d'usagers (consommateurs ou associations non
précisé).
Ces dispositions portent atteinte à un
développement de la prise en charge des intérêts des
consommateurs dans le traitement des différends.
En dehors de l'ARTP' les autres organes de
régulation peuvent être saisis directement par les
usagers-consommateurs.
§2. MODALITÉS DE SAISINE
En vertu de l'article 3 de la décision 2005-02 de
l'ART' en date du 24 janvier 2005' fixant la
procédure de traitement des plaintes des organisations de
consommateurs' « L'ART peut être saisie M
- soit par dépôt au siège de l'Agence
d'une lettre de saisine adressée au Directeur Général de
l'Agence' réputée reçue aux' jour et
heure de son dépôt' attesté par un accusé
de réception délivré par le service
compétent;
- soit par lettre recommandée avec accusé de
réception' adressée au Directeur Général
de l'ART; »
Ces dispositions sont « estimées limitatives
et anachroniques par l'ASCOSEN qui estime qu'un régulateur
moderne, de surcroît, des télécoms, doit pouvoir être
saisi par tout moyen électronique moderne. »
L'article 4 de la décision 2005-02 dispose que
«L'ARTP ne peut être saisie d'une plainte d'une
organisation de consommateurs' qui n'aurait pas fait l'objet
préalablement d'une tentative de règlement amiable avec
l'exploitant ou le fournisseur de services concerné. »
Cette disposition ne milite pas en faveur du
développement du traitement des litiges entre les consommateurs et les
opérateurs par l'organe de régulation' mais
plutôt les pousse à se retrouver face à plus aguerris
qu'eux.
Ce qui n'est pas forcément une bonne chose pour la
protection des intérêts des consommateurs.
Mis à part les modalités fixées par
l'ARTP' les autres organes de régulation' peuvent
être saisis directement par des procédures ordinaires.
Section 2. Procédures de traitement des
différends
§1. MANUEL DE PROCÉDURES
L'absence de manuels de procédures
éprouvés' au niveau des organismes de
régulation' joue en défaveur de la
transparence et de la qualité du traitement des
différends entre les consommateurs et les opérateurs.
Quand une réclamation est
déposée' la procédure d'instruction
échappe totalement au consommateur qui ne peut' en aucun
cas' évaluer, l'évolution du
traitement de sa requête.
Or' ces manuels de procédures de traitement
des litiges' devraient être rendus publics,
pour que' nul consommateur' n'en ignore.
Il devrait' même' être
envisageable que' les organisations de consommateurs soient
associées, dans la mise en place et l'adoption
de ce manuel de procédures de traitement des litiges.
§2. TRANSPARENCE
De nombreux auteurs insistent sur la nécessaire
transparence de l'action du régulateur. Il doit'
estime-t-on' rendre compte à tout instant de son action
à l'État' aux opérateurs et aux
utilisateurs20
.
20 Guy Canivet' premier président
de la Cour de cassation' Propos généraux
sur les régulateurs et les juges' Les régulations
économiques : légitimité et efficacité. -- Paris :
Presses de Sciences Po/Dalloz' 2004 -- (Collection «
Thèmes et commentaires »' série « Droit et
économie de la régulation »' volume 1)
La transparence est tellement importante pour la
protection des consommateurs que la commission européenne a
sorti une recommandation en date du 30 mars 1998 concernant les principes
applicables aux organes responsables pour la résolution
extrajudiciaire des litiges de consommation.
Cette recommandation préconise que « des moyens
appropriés sont instaurés afin de garantir la transparence de la
procédure »
« Ces moyens comportent M
1) la communication par écrit ou sous toute autre
forme appropriée' à toute personne qui le
demande' des informations suivantes M
ü une description précise des types de
litiges qui peuvent être soumis à l'organe ainsi que les limites
éventuellement existantes par rapport à la couverture
territoriale et à la valeur de l'objet des litiges'
ü les règles relatives à la saisine de
l'organe' y compris les démarches préalables
éventuellement imposées au consommateur' ainsi que
d'autres règles procédurales' notamment celles
relatives au caractère écrit ou oral de la
procédure' à la comparution personnelle et aux langues
de la procédure' »
ü « le coût éventuel de la
procédure pour les parties' y compris les règles
concernant le partage des frais à l'issue de la
procédure;
ü le type de règles sur lesquelles se fondent
les décisions de l'organe (dispositions légales'
équité' codes de conduite' etc.) ;
ü les modalités de prise de décision au
sein de l'organe;
ü la valeur juridique de la
décision' en précisant clairement si elle est ou non
de nature contraignante' pour le professionnel ou pour les deux
parties. Si la décision est d'une nature contraignante' les
sanctions applicables en cas de non-respect de
la décision doivent être
précisées. Il en est de même des voies de recours
éventuellement existantes pour la partie qui n'a pas obtenu satisfaction
» ;
2) « la publication' par l'organe
compétent' d'un rapport annuel relatif aux décisions
rendues' permettant d'évaluer les résultats obtenus et
d'identifier la nature des litiges qui lui ont été soumis.
»
Or' nous voyons' qu'en nous inspirant
de ces dispositions' la plupart des organes de
régulation, ne sont pas encore suffisamment
transparents' pour être en bonne
conformité avec les objectifs de protection des intérêts
des consommateurs.
Ce qui nuit' bien sûr à la
préservation et à la protection des intérêts des
consommateurs.
§3. DÉLAIS DE TRAITEMENT
Parmi les éléments importants qui jouent dans
la prise en compte et la protection des intérêts des
consommateurs' dans le traitement des différends'
nous pouvons citer le délai de traitement.
En effet' certains types de violation des droits
et intérêts des consommateurs se poursuivent dans le
temps, aussi' tout retard' de
réaction de la part de l'autorité de
régulation' se fait au détriment des
consommateurs.
C'est par exemple le cas' avec la requête de
l'ASCOSEN contre TIGO « pour facturation de service non
consommé21' défaillance et mauvaise
qualité de service facturées22 et
21
En effet' quand quelqu'un appelle un abonné
TIGO et tombe sur sa boite vocale' il est facturé dès
l'établissement de la connexion' avant même
l'utilisation du service. Ce qui fait que quand l'appelant raccroche
immédiatement et ne laisse pas de message' il est
facturé alors qu'il n'a aucunement bénéficié du
service de dépôt de message. Ce qui est anormal.
22
Les usagers' qui tentent de joindre un
abonné TIGO' alors que ce dernier est hors du réseau -
de par la faiblesse de la couverture offerte par SENTEL - sont basculés
automatiquement sur la boite vocale et immédiatement
facturés' même s'ils raccrochent !
Ce qui est abusif !
pour double facturation de service23 »'
déposée à l'ARTP depuis de 16 janvier 2007 et non
traitée à ce jour' soit plus d'un an après.
En effet' pendant tout le temps d'attente de
traitement et de règlement du différend' le
préjudice financier au détriment du consommateur'
continue à être éprouvé' et dans le cas
de la plainte de ASCOSEN' les milliers de
consommateurs qui appellent des numéros TIGO'
continuent de payer de manière indue' des services
non consommés.
Chapitre IV. Inefficacité dans le
règlement des litiges
Pour que le traitement des litiges soit réellement
efficace au bénéfice de la prise en compte et de la protection
des consommateurs' il faut que les services de l'organe de
régulation soient suffisamment bien organisés
pour que rien ne soit laissé au hasard.
En effet' pour une bonne efficacité du
traitement des litiges' il faut une bonne
traçabilité des différentes
étapes' une fluidité dans la transmission des
informations entre les différents services administratifs et
techniques de l'organe de régulation' entre
ceux chargés de l'investigation et ceux
chargés de l'approche administrative du traitement du
dossier.
S'il y a grippage dans le
circuit' du fait de la mauvaise organisation fonctionnelle
des services ou du fait de l'incompétence des agents
préposés aux investigations et au traitement de
l'affaire, les intérêts des consommateurs en feront les
frais.
Aussi' il faudrait que l'organisation fonctionnelle
des services et l'organe de régulation
23
Quand un appelant laisse un message dans la boite vocale d'un
abonné TIGO' il est naturellement facturé.
Malgré ce payement initial du service de messagerie' TIGO
facture aussi' la consultation du même message par son
destinataire' ce qui est une double facturation inacceptable.
soit la plus adaptée possible aux besoins et
exigences de sa mission' notamment'
d'investigation et de traitement des litiges.
Mais' cette bonne organisation,
seule, ne saurait donner des résultats satisfaisants si elle
n'est pas renforcée par des équipes compétentes et
efficaces, d'hommes et de femmes' rompues à
la tâche.
Section 1. Fonctionnement des services
§1. MAUVAISE ORGANISATION DES SERVICES
Aujourd'hui' dans la plupart des organes de
régulation' il n'y a pas une bonne organisation des
services' notamment pour un bon suivi et une bonne
traçabilité des différentes étapes
d'instruction des plaintes et réclamations des consommateurs.
Dans la plupart des organes de régulation'
il est très difficile pour les agents de retrouver la situation exacte
d'un dossier' afin d'informer le requérant de son niveau de
traitement' dès la première sollicitation.
Il est indispensable' pour une bonne gestion des
intérêts des usagers' que les différents
services chargés de traiter le différend soient
organisés en conséquence.
Ceux qui sont chargés de l'instruction doivent avoir
les moyens adéquats pour investiguer afin d'avoir suffisamment
d'éléments fiables pour se faire une idée exacte et
objective de la situation afin de prendre la bonne décision.
Nous le voyions plus haut' les moyens
d'investigation propres au régulateur font' plus souvent
cruellement défaut' et il devra se rabattre sur les moyens de
l'opérateur qu'il est chargé de contrôler' au
grand dam de l'indépendance et de l'autonomie du régulateur qui
est soumis au bon vouloir du laboratoire de l'opérateur.
§2. INCOMPÉTENCE DES SERVICES
La maîtrise des dossiers'
soumis à l'organe de régulation par son
personnel, est primordiale pour un traitement efficace'
objectif et inattaquable des différends' et pour une
prise en compte réelle des intérêts des
consommateurs.
Aussi' cette compétence devrait se
mesurer' non pas en qualité de diplômes obtenus
par les agents' mais aussi' par leur
faculté d'appréhender la problématique qui leur
est posée' leur capacité à pouvoir mener
de manière efficiente' les investigations
techniques' administratives ou sociales et enfin leur aptitude
à formuler des solutions les meilleures aux
problèmes qui leur sont soumis.
Et tout ceci' dans une optique de résistance
à toute capture par quelque acteur que ce soit, qui
altérerait l'objectivité de leur investigation et de
leur décision.
C'est le cas de la décision de l'ARTP concernant
l'obligation d'identification des abonnés au service
prépayé de téléphonie mobile.
Le problème qui était posé était le
suivant : décourager le vandalisme téléphonique et
sécuriser le consommateur de téléphonie mobile.
Le traitement tendancieux a été de ne
rien essayer d'autre que ce qui était souhaité par
l'autorité politique c'est-à-dire l'identification
contrainte et forcée de tous les usagers' pour des raisons
pas forcément avouées.
Or' il était possible'
techniquement' de prendre des dispositions autres
au niveau des opérateurs' sans pour autant remettre
en cause la confidentialité des données personnelles
stockées au niveau des bases de données du ministère de
l'intérieur.
Car' avec la solution qui a été mise
en place - envoi d'un SMS à l'opérateur avec
les données d'indentification - il était impossible aux
opérateurs de vérifier la qualité de
l'information donnée par l'abonné sans avoir
accès à la base de données des fichiers d'identification
du Ministère de l'intérieur.
Ce qui d'ailleurs' a été à la
base du rejet total de la décision par l'ASCOSEN.
Aujourd'hui' la plupart des personnels
recrutés dans les agences de régulation ont le profil
académique du poste qu'ils occupent au sein de leur service.
Cependant' il y a encore des efforts à
faire dans le traitement objectif et non tendancieux des
différends et des problèmes qui leur sont posés.
Aussi' des chartes de déontologie
devraient aussi être signées, dans les organes de
régulation' par les agents en charge des
investigations et du traitement des différends pour assurer une
bonne prise en compte et une réelle protection de
l'intérêt des consommateurs.
Section 1. Traitement du litige
§1. NON PRISE EN COMPTE DES
RÉCLAMATIONS
Dans le traitement des litiges' il est indispensable
de prendre en compte la réclamation' dans son
objet' mais aussi au niveau de son
objectif.
En effet' l'objet d'une
réclamation peut être l'arrêt d'une
pratique faite par un opérateur' mais
l'objectif en serait la protection des
intérêts des consommateurs.
Aussi' quand l'AdEETélS saisissait l'ARTP
contre les manquements de SONATEL' au niveau de la qualité de
service de son réseau mobile' notamment lors des grandes
manifestations religieuses' l'objet était de mettre un terme
à une situation préjudiciable au consommateur.
L'objectif était de réparer le tort causé
aux consommateurs qui subissaient des préjudices énormes qui
étaient économiques' financiers et sociaux.
Mais' quand l'ARTP a pris la décision
relative à cette situation' deux années après
la saisine de l'AdEETélS' les pertes étaient
considérables pour les consommateurs' car la
situation s'était répétée à plusieurs
reprises' sans solutions'
La décision prise par l'ARTP de sanctionner la
SONATEL' n'a pas permis d'atteindre l'objectif de
réparer le préjudice subi par les consommateurs, car les
3 Milliards de Francs CFA d'amende payés par la SONATEL n'ont
pas profité au consommateur' mais sont plutôt
allés renflouer les caisses de l'autorité politique.
Alors qu'une bonne décision serait de trouver une
formule adéquate pour répondre au droit fondamental des
consommateurs à la réparation de préjudices qui
leurs sont portés.
A côté de cette non-prise-en compte de l'objet
et de l'objectif des réclamations' la prise en
compte, tout court, des réclamations des
consommateurs' par les organes de
régulation' pose problème.
En effet' beaucoup de réclamations
sont rangées dans des tiroirs et classées sans
aucune autre forme de procès et sans aucune information fournie au
plaignant' ce qui est le comble de non prise en
compte de la protection des intérêts des
consommateurs.
§2. CAPTURE DE LA VOLONTÉ
DÉCISIONNELLE
Beaucoup de comportements qui remettent en cause la prise en
compte et la préservation des intérêts des
consommateurs' notamment' la non prise en compte des
réclamations' s'expliquent par une capture de
l'autorité de régulation par l'autorité politique.
En effet' si pour la plupart des organes de
régulation' les conditions de nomination et de
révocation' sont sources d'une certaine garantie
d'indépendance vis-à-vis de l'autorité
politique' cette indépendance doit se
conquérir' par les décideurs des organes de
régulation.
Or' la plupart d'entre eux'
n'ont aucune volonté de se singulariser par une volonté
affichée d'autonomie ou d'indépendance dans des décisions
qui seraient contraires au désidérata de l'autorité
politique.
Pour les autres dirigeants' à qui,
aucune garantie d'indépendance ou d'autonomie n'a été
donnée' il serait illusoire de tenter
l'aventure' par des décisions qui iraient à
l'encontre de la volonté affichée ou sentie de l'autorité
politique.
Aussi' la volonté des
responsables d'organes de régulation d'assumer pleinement leur
mission ne s'exprime, fortement, que quand elle est en phase avec
l'autorité politique.
Par conséquent' le principe nouveau
du « devoir d'ingratitude » - qui consiste à
ne pas rechigner à prendre des décisions justes et objectives qui
peuvent être à l'encontre des intérêts de celui qui
vous a nommé - n'est pas encore à l'ordre du jour au
Sénégal.
CONCLUSION
En choisissant comme sujet de mémoire « limites
de la protection des consommateurs par les autorités de
régulation au Sénégal »' nous avons voulu traiter un
sujet concret et utile avec le développement de la mise
en place' au Sénégal d'organes de
régulation' dans' presque' tous les
domaines de l'activité économique.
Sujet concret' parce que' en ma
qualité de responsable d'organisation consumériste' je
me trouve être directement concerné' car étant
un des acteurs réclamant l'évolution d'un droit des
consommateurs dans notre pays' pour la préservation
et la protection des intérêts des consommateurs' pour
lesquels nous nous battons depuis près de 20 années.
Sujet utile' car pouvant humblement
participer à l'amélioration de pratique du droit de la
régulation au Sénégal'
notamment' par la prise en compte des limites et manquements
soulignés par les acteurs au bénéfice desquels la
régulation doit se faire' à savoir' les
usagers - consommateurs.
Ce travail' loin d'être
exhaustif' avait pour objectif de mettre en surbrillance'
un certain nombre d'éléments juridiques'
structurels' politiques qui mériteraient d'être pris en
compte dans l'amélioration future' nécessaire de notre
corpus juridique déjà très bien élaboré et
très fécond.
Nous avons pu voir un certain nombre de limites
inhérentes aux textes' et à leur
application' et des limites découlant de la mise en oeuvre
des textes et le la conduite de la mission de régulation au niveau des
organes.
Nous espérons' modestement' que
nos présentes réflexions' pourront servir dans
l'organisation et le fonctionnement des organes de
régulation' pour un renforcement de la prise en
compte de la protection des intérêts consommateurs.
BIBLIOGRAPHIE
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communications électroniques et des postes' Avis
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lui-même Vingtième siècle 2006- 3 (no 91)1
ISSN 0294- 1759 1 ISSN numérique : en cours 1 ISBN : 2-7246-3032-7 1
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http://www.cairn.info/resume
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ü Commission Européenne - Compendium CE de
Droit de la consommation - Analyse comparative - «
Compendium annoté comprenant une analyse comparative de l'acquis
communautaire en matière de consommation ». Sous la
dir. du Prof. Dr. Hans Schulte-Nôlkeen coopération
avec Dr. Christian TwiggFlesner et Dr. Martin Ebers Avril 2007- ;
i2- Commission Européenne' Livre
Vert sur la révision de l'acquis communautaire en matière de
protection des consommateurs 744 final COM (2006) ;
? Commission Européenne' Recommandation de
la commission concernant les
principes applicables aux organes responsables pour la
résolution extrajudiciaire
des litiges de consommation (Texte présentant de
l'intérêt pour l'EEE)
(98/257/CE)' 30 mars 1998 ;
? Commission Européenne'
Résolution du Conseil relative à un réseau au niveau
communautaire d'organes nationaux chargés du règlement
extrajudiciaire des litiges de consommation (2000/C
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? Commission nationale de l'informatique et des
libertés' 27e rapport d'activité'
2006;
? Conférence des nations unies sur le commerce et le
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Genève' 2007 ;
? Conférence des nations unies sur le commerce et le
développement' Principes directeurs des nations unies
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Règles et pouvoirs dans les systèmes de
régulation. - (Collection « Thèmes et commentaires
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Edition octobre 2004
TEXTES LEGISLATIFS ET REGLEMENTAIRES
ü Loi n° 81-13 du 4 mars 1981 portant Code de l'Eau
;
ü Loi no 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la
consommation (partie Législative) (1) NOR: ECOX9300016L ;
ü Loi 94-63 du 22 août 1994' sur les
prix' la concurrence et le contentieux économique ;
ü Loi 95-10 du 7 avril 1995
ü Loi N° 97-01 du 10 mars 1997 portant création
du conseil exécutif des transports urbains de Dakar ;
ü Loi n° 98-29 du 14 avril 1998 relative au secteur de
l'électricité
ü Loi 2001-15 du 2 décembre 2001' portant
Code des télécommunications ;
ü Loi relative aux nouvelles régulations
économiques (NRE) et problématique du cumul des mandats sociaux -
Propositions d'amendements de la CCIP 2 mai 2002- Rapporteur : Jean COURTIERE
;
ü Loi n° 2002-23 du 4 septembre 2002 portant cadre de
régulation pour les entreprises concessionnaires de services publics
;
ü Loi 2004-14 du premiers mars 2004' instituant
le conseil des infrastructures.
ü Loi n° 2006-04 du 4 janvier 2006 portant
création du conseil national de la régulation de l'audiovisuel
portant Code des Obligations de l'Administration ;
ü Loi n°2006-16 du 30 juin 2006 modifiant la loi
n° 65-61 du 19 juillet 19965
ü Loi no 2008-3 du 3 janvier 2008 pour le
développement de la concurrence au service des consommateurs NOR :
ECEX0768213L ;
ü Décret n° 95-1157 du 11 décembre 1995
portant approbation des statuts de la Société nationale des Eaux
du Sénégal (SONES) ;
ü Décret n°98-337 du 21 avril 1998 ;
ü Décret N° 98-557 Portant Création d'un
Conseil Supérieur de l'Eau ;
ü Décret 2001-63 du 17 février
2003' fixant les règles d'organisation et de fonctionnement
de l'agence de régulation des télécommunications ;
ü Décret n° 2002-923 du 18 septembre
2002' portant création et fixant les
règles d'organisation et de fonctionnement de l'Agence de
Régulation des Marchés ;
ü Décret N° 2007-546 du 25 AVRIL 2007 portant
organisation et fonctionnement de l'Autorité de Régulation des
Marchés Publics (ARMP) ;
ü décret 2007 -- 937 du 7 août 2007 portant
indentification des acheteurs et utilisateurs des services de
téléphonie mobile offerts au public
SITES WEBS
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http://www.60millions-maa.com/paae/
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? http://www.crse.sn/
? http://www.etudes.ccip.fr/
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http://www.finances.aouv.fr/directions
services/daccrf/documentation/publicatio
ns/ouvraaes/index.htm?fondslist=%2Ffonds documentaire%2Fdaccrf%2F03 pu
blications%2Factualitesccrf%2Findex.html&Submit=ok
? http://fr.iurispedia.ora/
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http://fr.wikipedia.org/wiki/Accueil/
r
http://fr.wikipedia.org/wiki/Consom'action
ü
http://fr.wikipedia.org/wiki/Informationet
protection du consommateur
ü
http://fr.wikipedia.org/wiki/Obligationd'information
ENTRETIENS
Avec les associations de consommateurs suivantes :
ü ASCOSEN (association des consommateurs du
Sénégal)
ü AdEETélS (association des usagers à
l'eau' à l'énergie' aux
télécommunications et aux services)
ü UNCS (union nationale des consommateurs du
Sénégal)
ü ADEC (association pour la défense de
l'environnement et des consommateurs)
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