UNIVERSITE DE STRASBOURG FACULTE DE DROIT, DE SCIENCES
POLITIQUES ET DE GESTION ANNEE 2008/2009
LE PLAFONNEMENT DE LA TAXE
PROFESSIONNELLE
MEMOIRE PRESENTE POUR L'OBTENTION DU MASTER 2 DROIT PUBLIC
GENERAL
PAR
SOPHIE DELIGIANNIS
SOUS LA DIRECTION DE MONSIEUR LE PROFESSEUR ROBERT HERTZOG
Remerciements
Je remercie Monsieur le Professeur Robert HERTZOG d'avoir
accepté de diriger mon mémoire. Ses conseils ont
été précieux dans la rédaction de mon
mémoire.
Je remercie également Monsieur le Professeur Olivier
JOUANJAN, directeur du Master 2 Droit public général, qui m'a
permis de suivre un enseignement de qualité.
Liste des principales abréviations
al. alinéa
art. article
BDCF Bulletin des conclusions fiscales
BGFE Bulletin de gestion fiscale des entreprises
c/ contre
CAA Cour administrative d'appel
CE Conseil d'Etat
cf. confer
CGI Code général des impôts
Coll. Collection
Concl. Conclusions
éd. édition
EPCI Etablissement public de coopération intercommunale
Ibid. Ibidem, au même endroit
JORF Journal officiel de la République française
n° numéro
p. page
PCG Plan comptable général
préc. précité(e)
RDF Revue de Droit fiscal
RJF Revue de jurisprudence fiscale
RFFP Revue française de finances publiques
s. suivant
TA Tribunal administratif
V. Voir
Sommaire
Chapitre 1 : La valeur ajoutée, base du calcul du
plafonnement de taxe professionnelle : une notion fiscale spécifique
p.12
Chapitre 2 : Les principaux problèmes spécifiques
en matière de plafonnement de la taxe professionnelle p.36
Chapitre 3 : Le mécanisme du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée
p.48
Chapitre 4 : Les conséquences controversées du
plafonnement de taxe professionnelle p.59
Introduction
Parmi les quatre impôts directs locaux1,
à savoir la taxe foncière sur les propriétés
bâties et non-bâties, et la taxe d'habitation qui sont
supportés par les ménages, les collectivités territoriales
perçoivent la taxe professionnelle qui ne concerne, quant à elle,
que les entreprises. Cette taxe est due chaque année par les personnes
physiques ou morales qui exercent en France, à titre habituel, une
activité professionnelle non salariée2. Elle a
succédé à la patente, créée par le
décret des 2 et 17 mars 1791 dit « décret d'Allarde »
qui supprima les privilèges et instaura la liberté du commerce et
de l'industrie. Ainsi, tout individu français ou étranger,
faisant du négoce ou exerçant une profession, un art ou un
métier, devait s'acquitter de la contribution de la patente3.
Cet impôt d'Etat devint, en vertu de la loi du 31 juillet 1917, un
impôt local destiné à alimenter les budgets
départementaux et communaux4. Par la suite, l'ordonnance du 7
janvier 1959 portant réforme des impositions perçues au profit
des collectivités locales et des divers organismes a prévu la
substitution de la patente à la taxe professionnelle5. Il va
falloir attendre la loi du 29 juillet 1975 pour que la patente soit
supprimée et remplacée par la taxe professionnelle, de
manière effective, à compter du 1er janvier 1976. Ce nouvel
impôt frappait non seulement les valeurs locatives foncières mais
aussi la valeur locative des biens et équipements mobiliers et les
salaires versés. Cependant, la fraction imposable des salaires comprise
dans l'assiette de la taxe a été progressivement supprimée
par la loi de finances pour 1999 afin d'alléger le coût que la
taxe professionnelle faisait peser sur l'emploi. Ainsi, dès les
impositions établies à compter de 2003, les salaires ne sont plus
un élément d'imposition à la taxe
professionnelle6. Ainsi, aujourd'hui, pour la
généralité des redevables, la base d'imposition à
la taxe professionnelle n'est plus constituée que par la valeur locative
de tout ou partie des immobilisations corporelles utilisées pour les
1 Les impôts directs locaux constituent des
prélèvements obligatoires, effectués par les
collectivités territoriales, sur les ressources des personnes occupant
son territoire ou y possédant des biens, afin de
financer les dépenses locales.
2 Cf. article 1447 du CGI.
3 Les dossiers liés au suivi de la contribution de la
patente, sur le site du Centre des archives économiques et
financières, source : <
http://www.caef.bercy.gouv.fr
>.
4 Ibid.
5 Ibid.
6 Cette mesure a toutefois pénalisé les entreprises
industrielles par rapport aux entreprises de service.
besoins de la profession7. Sont donc imposables les
immobilisations passibles de la taxe foncière sur les
propriétés bâties ou sur les propriétés non
bâties (terrains, constructions, installations...), et les autres
immobilisations corporelles, non passibles de la taxe foncière, dites
« équipements et biens mobiliers » (agencements,
aménagements, matériels et outillages, matériels et
mobiliers de bureau...)8.
Depuis sa mise en place, la taxe professionnelle - complexe et
technique - a toujours été difficilement acceptée par les
entreprises ; de plus, elle est très controversée, notamment
parce qu'elle pénalise l'investissement du fait de son assiette, et
parce qu'elle demeure particulièrement injuste en raison de la
disparité des taux votés par les différentes
communes9. C'est pourquoi, elle fait l'objet de réformes
permanentes, principalement en vue de corriger ses imperfections et
d'alléger son poids financier sur les redevables, ce qui a rendu le
régime de cet impôt encore plus complexe.
Aussi, cet impôt représente la principale
ressource fiscale pour les collectivités locales. Par conséquent,
l'Etat intervient de plus en plus et tend à devenir un régulateur
qui compense le manque-à-gagner provoqué par certaines
réformes de la taxe professionnelle. Tel a été le cas,
lors de la suppression de la part salariale comprise dans l'assiette de la
taxe. L'Etat s'est engagé à compenser les pertes de recettes
causées par cette réforme aux collectivités territoriales.
Ainsi, l'Etat est tenu d'assurer le compromis entre les collectivités
locales, qui souhaitent conserver la liberté des taux d'imposition, et
les entreprises, qui revendiquent davantage d'exonérations et
d'abattements10. En réalité, l'Etat se substitue aux
contribuables par le biais des dégrèvements et prend en charge
les compensations des exonérations et allègements de base
d'imposition décidés par voie législative. En 2006, il
contribuait pour 37,50% des recettes de taxe professionnelle. Cet impôt a
donc perdu son caractère local, et l'Etat devient peu à peu le
premier contribuable au niveau local.
7 « Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento
pratique, éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3865.
8 Ibid.
9 En effet, la loi du 10 janvier 1980 portant aménagement
de la fiscalité directe locale a prévu que les
collectivités locales peuvent fixer le taux des impôts locaux,
tout en encadrant étroitement cette faculté.
10 J. BOGAERT et H. UTHEZA, « Valeur ajoutée et taxe
professionnelle. Conséquences de l'introduction de la valeur
ajoutée dans l'assiette de la taxe professionnelle», Collection
Etudes & Recherches, 1991.
L'objectif de l'établissement de la taxe
professionnelle était de mieux appréhender la capacité
contributive des entreprises. En effet, l'article 1448 du Code
général des impôts (ci- après : « CGI »)
prévoit que « la taxe professionnelle est établie suivant la
capacité contributive des redevables, appréciée
d'après des critères économiques ». La comparaison
entre la taxe professionnelle mise à la charge d'un redevable et sa
capacité contributive s'effectue en pratique par le mécanisme du
plafonnement de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée,
apparu avec la loi du 3 janvier 1979 puis repris et pérennisé par
la loi du 10 janvier 1980. Il constitue le principal dégrèvement
de la taxe professionnelle. Il s'agit donc de comparer la totalité des
cotisations de taxe professionnelle dues par une même entreprise au titre
d'une année d'imposition déterminée et un pourcentage
donné11 de la valeur ajoutée produite par l'entreprise
au cours de la même période12. En principe,
l'excédent des cotisations par rapport au pourcentage de la valeur
ajoutée ainsi calculé fait l'objet d'un
dégrèvement, accordé sur demande du
contribuable13.
Les dispositions relatives au plafonnement se voulaient,
à l'origine, transitoires et se situaient dans un projet visant à
faire de la valeur ajoutée l'assiette de la taxe professionnelle. En
effet, la valeur ajoutée permettait, notamment, d'obtenir une forte
réduction des disparités d'imposition, sans porter atteinte
à l'autonomie des collectivités locales, et de garantir une
pression fiscale proportionnelle à la taille de l'entreprise.
Contrairement à la volonté de certains
parlementaires, le Gouvernement a cependant hésité à
procéder immédiatement au changement d'assiette de la taxe
professionnelle. Des simulations ont été effectuées afin
de déterminer les conséquences de ce changement mais les
résultats n'ont pas été concluants. L'argument
invoqué pour abandonner l'adoption de la valeur ajoutée comme
assiette de la taxe professionnelle, indiqua Monsieur Paul JARGOT,
sénateur, a été « l'impossibilité dans
laquelle on se trouvait de la localiser, en particulier pour les entreprises
à établissements multiples. Consolidée au siège de
l'entreprise, elle était semble-t-il impossible à ventiler entre
les établissements implantés dans les collectivités
locales »14 . Par conséquent, le III de l'article 12 de
la loi de 1980 instituant le plafonnement de la taxe professionnelle a
été codifié à l'article 1647 B sexies du Code
11 Ce pourcentage est passé de 8% en 1979 à 6% en
1980.
12 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34000.
13 Ibid.
14 Séance du 10 novembre 1978, JO Sénat du 11
novembre p. 3182, dans L. OLLEON, « Taxe professionnelle et subventions,
Attention, plafond haut ! », RJF 5/03, p. 396.
général des impôts et l'alinéa, qui
prévoyait sa disparition lors de l'adoption de la valeur ajoutée
comme assiette de taxe professionnelle, a été supprimé.
Jusqu'aux impositions établies au titre de 2006, la
cotisation de taxe professionnelle était plafonnée, en fonction
du chiffre d'affaires réalisé par l'entreprise, à 3,5%,
3,8 % ou 4% de la valeur ajoutée, et par exception à 1% de la
valeur ajoutée, pour les entreprises de travaux agricoles, ruraux et
forestiers. Le plafonnement de taxe professionnelle alloué à une
entreprise ne pouvait toutefois pas excéder 76,225 M€.
Ce plafonnement était déterminé par
rapport à une cotisation de référence calculée
à partir des taux d'imposition en vigueur en 199515, ou du
taux de l'année d'imposition - s'il était inférieur - et
non par rapport à la cotisation de taxe professionnelle
réellement acquittée par l'entreprise16. La part de
cotisation induite par les augmentations de taux d'imposition depuis 1995
restait donc à la charge des entreprises17.Ainsi, les
entreprises fortement capitalistiques - c'est-à-dire celles des secteurs
de l'énergie, de l'industrie et des transports - subissaient une charge
élevée au regard de leur capacité contributive. En effet,
pour plusieurs centaines d'entreprises, la charge fiscale réelle
représentait 10% de la valeur ajoutée voire plus. Cette situation
s'est aggravée dans toutes les collectivités territoriales qui
ont rehaussé les taux de taxe professionnelle. Le taux moyen national de
taxe professionnelle est passé de 23,34% en 2000 à 25,27% en
2005, puis à 26,01% en 2006. Ces augmentations successives de taux
d'imposition ont conduit à alourdir la charge fiscale pesant sur les
entreprises.
Ainsi, une Commission de réforme de la taxe
professionnelle, présidée par Olivier Fouquet, a
été mise en place, le 26 février 2004, afin de formuler
des propositions pour remplacer cet impôt. Elle a rendu un rapport qui a
entraîné la dernière réforme importante, en
matière de taxe professionnelle, instituée par l'article 85 de la
loi de finances pour 2006 et entrée en vigueur le 1er janvier
2007. Les principaux apports de ces dispositions ont été, d'une
part, d'uniformiser le taux de plafonnement du montant de la taxe
professionnelle à 3,5% de la valeur ajoutée, à compter du
1er janvier 2007, et d'autre part, de calculer le plafonnement sur
la base d'une cotisation calculée au taux de l'année
d'imposition, donc sur la base d'une
15 La loi de finances pour 1996 a prévu que le calcul du
dégrèvement au titre du plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée se ferait désormais sur la base des taux en vigueur en
1995. Ainsi, les hausses de taux d'imposition décidées par les
collectivités ne seront plus supportées par l'Etat mais par les
entreprises.
16 Rapport sur l'évaluation de la réforme de la
taxe professionnelle par la loi de finances pour 2006, source : <
http://lesra pports.ladocu mentationfra
ncaise.fr/BRP/084000689/0000.
pdf>.
17 Ibid.
cotisation réellement acquittée par
l'entreprise, quels que soient les taux de taxe professionnelle votés
par les collectivités territoriales, et non sur la base d'une cotisation
de référence calculée au taux gelé de 1995. Cela
présente le double avantage de simplifier les calculs et d'augmenter le
montant du dégrèvement pour les entreprises
concernées18.
Le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée a donc
contribué à transformer la taxe professionnelle en un impôt
local à taux national. En effet, depuis 2007, les entreprises, quel que
soit leur chiffre d'affaires, sont assurées, sous réserve du
plafond de 76,225 M€, que le montant de leur cotisation de taxe
professionnelle calculée sur le taux de l'année en cours
n'excèdera pas 3,5% de leur valeur ajoutée ou, pour les
entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers, 1,5% de leur valeur
ajoutée.
Le rapport de la Commission Fouquet du 8 juillet 2004 a fait
remarquer que plus de la moitié de la taxe professionnelle nette
versée en 2003 sur le territoire français est acquittée
par des entreprises qui ne sont plus imposées d'après les bases
d'imposition traditionnelles mais selon la valeur ajoutée qu'elles
dégagent, par le biais du plafonnement de la taxe professionnelle. En
réalité la valeur ajoutée s'est substituée, au fil
du temps, aux assiettes classiques de la taxe professionnelle pour devenir la
nouvelle assiette de cet impôt. En effet, elle constitue depuis 2007 la
véritable assiette d'imposition d'un tiers des entreprises soumises au
régime normal de la taxe professionnelle, acquittant plus de 60 % du
produit total de cet impôt, soit 17 M d'€ de
cotisations19.
Par ailleurs, afin de responsabiliser les collectivités
territoriales et leurs établissements publics de coopération
intercommunale dotés d'une fiscalité propre (ci-après
« les EPCI ») au coût du dégrèvement
accordé au titre du plafonnement en fonction de la valeur, la loi de
finances pour 2006 a prévu qu'ils étaient étaient tenus de
financer, à compter de 2007, tout dégrèvement
résultant des hausses de taux votés depuis 2005. Ainsi, en cas de
hausse des taux, ils bénéficient du supplément de recettes
au titre des entreprises non plafonnées, et non pas au titre des
entreprises plafonnées.
Le législateur de 2006 a donc, par le biais du
plafonnement de la taxe professionnelle, la volonté d'imposer aux
collectivités territoriales de freiner leurs dépenses. En effet,
leur marge de manoeuvre fiscale, c'est-à-dire leur capacité
à faire évoluer leurs recettes fiscales
18 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34013.
19 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de
la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
en jouant sur les taux d'imposition, a diminué depuis
la réforme de 2007. Auparavant, les collectivités territoriales
votaient un produit de taxe professionnelle et non un simple taux. Le rapport
de la Commission Fouquet précité a relevé que leurs
recettes (+ 6,2% en 2002 et + 4,6% en 2003) et leurs dépenses (+ 5,8% en
2002 et 5,3% en 2003) progressaient à un rythme
prononcé20. En effet, elles ont vu leurs budgets locaux
augmenter grâce à l'accroissement régulier des recettes
procurées par la taxe professionnelle et les compensations
financières apportées par l'Etat.
Il convient de s'interroger sur le mécanisme même
du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, à savoir son
mode de calcul et la procédure à suivre pour en
bénéficier, ainsi que les difficultés rencontrées
dans sa mise en oeuvre. De plus, les incidences qu'il peut avoir envers les
entreprises, d'une part, et les collectivités territoriales, d'autre
part.
La valeur ajoutée, servant de base au calcul du
dégrèvement accordé au titre du plafonnement,
représente une notion fiscale spécifique qu'il s'agit de
définir clairement (chapitre 1). Toutefois, des difficultés ont
été rencontrées dans ce mode de calcul (chapitre 2). Le
mécanisme du plafonnement présente, tout comme la taxe
professionnelle dans son ensemble, un fonctionnement relativement complexe
(chapitre 3), et a entraîné des conséquences
controversées (chapitre 4).
20 Insee Première, avril 2004, dans le rapport de la
Commission de réforme de la taxe professionnelle, présidée
par O. FOUQU ET, 2004, source :
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/044000333/0000.pdf>,
p.15.
Chapitre 1 : La valeur ajoutée, base du calcul
du plafonnement de taxe professionnelle : une notion fiscale
spécifique
Le dégrèvement accordé au titre du
plafonnement de la taxe professionnelle se fonde sur le montant de la valeur
ajoutée, définie à l'article 1647 B sexies du
CGI, qui en fait une notion proprement fiscale (Section 1). La valeur
ajoutée constitue la donnée la plus représentative de la
richesse produite par une entité économique, au cours de
l'année d'imposition. Elle s'obtient en retranchant de la production
(pour les activités de production ou de prestations de services) ou de
la marge commerciale (pour les activités d'achat revente) la valeur des
consommations en provenance de tiers21.
Sa définition diffère de celle retenue pour la
taxe sur la valeur ajoutée (ci-après « TVA
»)22 qui est un impôt général sur la
consommation, directement facturé aux clients sur les biens qu'ils
consomment ou les services qu'ils utilisent en France23. La base
d'imposition de la TVA est, en principe, composée de « toutes les
sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le
fournisseur ou le prestataire en contrepartie de (la livraison ou de la
prestation), de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les
subventions directement liées au prix de ces opérations
»24. Cette taxe doit donc être calculée sur
l'ensemble du prix de vente du bien additionné, s'il y a lieu, des frais
de ports et d'emballage, et diminué des taxes. La valeur ajoutée
en matière de plafonnement constitue bien une notion autonome par
rapport à la TVA.
Le juge de l'impôt a accru le caractère
spécifiquement fiscal de la valeur ajoutée, (Section 2), et a
fixé une véritable ligne jurisprudentielle qui permette aux
redevables d'avoir une vision plus claire de ce qu'englobe cette notion
(Section 3).
21 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de
la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
22 En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, le
législateur ne fournit aucune définition de la valeur
ajoutée mais il réglemente le régime du chiffre d'affaires
réel.
23 « TVA », source :
<
http://www.i
mpots.gouv.fr/porta l/dgi/pu
blic/profession nels.i mpot?pageId=prof_tva&espId=2&i mpot=TVA&s
fid=50>.
24 Cf. article 266 du CGI.
Section 1 : La définition fiscale de la valeur
ajoutée retenue par le législateur
La valeur ajoutée est définie, aux termes du II
de l'article 1647 B sexies du CGI, comme « l'excédent hors
taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance
de tiers constaté pour la période de référence
». En effet, elle se mesure en faisant la différence « hors
taxe » entre la production et les consommations de biens et services
fournis par des tiers pour cette production (I). Les termes « hors taxes
» ont suscité quelques divergences d'interprétation entre
l'administration fiscale et le juge de l'impôt (II). Malgré une
définition clairement établie de la notion de valeur
ajoutée, les difficultés pratiques persistent à propos des
éléments qui s'y intègrent et ce qui, au contraire, ne s'y
intègrent pas (III).
I. La valeur ajoutée : une notion fiscale
définie par l'article 1647 B sexies du CGI
Le plafonnement de la taxe professionnelle se calcule à
partir du montant de la valeur ajoutée produite par le redevable au
cours de la période de référence (A). La définition
de la valeur ajoutée varie, toutefois, selon le statut fiscal du
redevable (B).
A. La prise en compte de la valeur ajoutée
produite, par le redevable, au cours de la période de
référence
1. La clôture de l'exercice social de douze mois
pendant l'année d'imposition
Le montant total des cotisations de taxe professionnelle
dû par une entreprise au titre d'une année d'imposition N peut
être plafonné, sur demande, en fonction de la valeur
ajoutée produite au cours de l'année N au titre de laquelle
l'imposition est établie25, lorsque l'exercice coïncide
avec l'année civile, ou au cours du dernier exercice de douze mois clos
au
25 Pour déterminer la base d'imposition de la taxe
professionnelle, la période de référence est
constituée par l'avant-dernière année
précédent celle de l'imposition (N-2) ou, le cas
échéant, par le dernier exercice de douze mois clos au cours de
cette même année s'il ne coïncide pas avec l'année
civile.
cours de cette même année N, lorsque cet exercice
ne coïncide pas avec l'année civile26. Cette disposition
vise à ce que le plafonnement de la taxe professionnelle accordé
au titre de l'année considérée corresponde au mieux
à la situation réelle de l'entreprise au moment du paiement de la
taxe professionnelle.
Les entreprises dont l'exercice social coïncide avec
l'année civile doivent attendre la clôture des comptes de
l'exercice clos au 31 décembre N pour pouvoir calculer la valeur
ajoutée produite au cours de cette année N. Or le solde de la
cotisation de la taxe professionnelle due au titre de l'année N est
exigible au 1er décembre par l'administration fiscale et le
paiement doit être, en général, effectué au plus
tard le 15 décembre. Ainsi, l'article 1679 quinquies du
CGI27 permet au contribuable d'imputer un dégrèvement
« estimé » au titre du plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée sur le versement du solde de sa taxe professionnelle qu'il doit
effectuer28.
Quant aux entreprises dont l'exercice social ne coïncide
pas avec l'année civile, elles peuvent, lorsque les opérations de
clôture des comptes de l'exercice de douze mois en N sont
achevées, déterminer la valeur ajoutée produite au cours
de cet exercice clos. Elles peuvent donc connaître le montant exact du
dégrèvement auquel elles ont droit, et l'imputer directement au
solde de taxe professionnelle à régler au 15 décembre (en
général)29. Dans le cas inverse, elles pourront agir
selon la procédure prévue à l'article 1679
quinquies du CGI précité.
2. L'absence de clôture d'exercice de douze mois
pendant l'année d'imposition
Lorsqu'un exercice social clôturé au cours de
l'année d'imposition N a une durée supérieure ou
inférieure à douze mois ou lorsqu'aucun exercice n'a
été clôturé en N, la valeur ajoutée est
déterminée à partir des résultats des exercices
comptables couvrant cette année. Cette situation peut intervenir en cas
de création d'entreprise, ou lorsqu'une entreprise décide de
modifier la périodicité de son exercice social, dans le cadre
d'une intégration fiscale, par
26 Cf. al. 1, du I de l'article 1647 B sexies du CGI. La
période de référence ainsi définie s'est
substituée à celle qui sert à la détermination des
bases imposables (N-2), pour les impositions établies à compter
de 1993.
27 La procédure relative à l'article 1679
quinquies du CGI sera traitée dans le chapitre 3.
28 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34160.
29 Ibid., n° 34162.
exemple30. Ainsi, par exemple, on clôture un
exercice de 9 mois, le 28 février 2008, puis on clôture l'exercice
suivant, le 28 février 2009. Concernant la taxe professionnelle due au
titre de 2008 : la valeur ajoutée à retenir pour le calcul du
plafonnement est égale aux 2/9 de la valeur ajoutée produite au
cours du premier exercice, majorée des 10/12 de celle produite au cours
du second. Quant à la taxe professionnelle due au titre de 2009, elle
est égale à celle produite au cours de l'exercice clos le 28
février 200931.
La demande de dégrèvement ne peut être
effectuée que lorsque les comptes du ou des exercices s'étendant
sur l'année civile d'imposition sont définitivement
arrêtés32.
3. Le cas particulier des opérations de fusion ou
d'absorption assortie de clause de rétroactivité
La valeur ajoutée réalisée pendant la
période de référence est retenue sans aucune correction
pour le calcul du plafonnement de la taxe professionnelle, sous réserve
du cas des opérations de fusions ou d'absorptions contenant une clause
de rétroactivité (prenant généralement effet au
1er janvier de l'année de l'opération) qui n'est pas
opposable à l'administration fiscale33. Dans ce cas, les
opérations comptables définitivement enregistrées par
chaque entité ne correspondent pas à celles qu'elles ont
effectivement réalisées. Ainsi, la valeur ajoutée à
retenir, pour la société fusionnée ou absorbée,
correspond à celle réalisée du 1er janvier
à la date de cessation effective de l'activité34. En
revanche, lorsque la valeur ajoutée de la société
absorbante comprend aussi celle de la société absorbée, il
y a lieu de soustraire de cette valeur ajoutée, pour le plafonnement de
la taxe professionnelle de la société absorbante, celle
correspondant à l'activité exercée l'année de
l'opération par la société absorbée. C'est un cas
où il y a effet rétroactif de l'absorption35.
Les opérations de scissions et d'apports d'actif
n'appellent pas d'observations particulières. Les clauses de
rétroactivité ne sont également pas opposables à
l'administration36.
30 Ibid., n° 34165.
31 « Plafonnement des cotisations en fonction de la valeur
ajoutée (CGI, art. 1647 B sexies ; BO 6-E-3-07) », source
<
http://doc.impots.gouv.fr/aida/Apw.fcgi?FI
LE=I ndex.html>.
32 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34175.
33 Ibid., n° 34180.
34 Pour les sociétés absorbées ou
fusionnées, l'opération s'analyse comme une cessation
d'activité.
35 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34185 à 34195.
36 « Plafonnement des cotisations en fonction de la valeur
ajoutée (CGI, art. 1647 B sexies ; BO 6-E-3-07) », source
<
http://doc.impots.gouv.fr/aida/Apw.fcgi?FI
LE=I ndex.html>.
B. La détermination de la valeur ajoutée en
fonction du statut fiscal du redevable
1. Les redevables soumis à un régime
réel d'imposition
Pour la généralité des entreprises,
à savoir celles soumises à un régime d'imposition
réel d'imposition, « la production de l'exercice est égale
à la différence entre : d'une part, les ventes, les travaux, les
prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les
subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les
travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les transferts de charges
mentionnées aux troisième et quatrième alinéas (de
l'article 1647 B sexies-II-2 du CGI) ainsi que les transferts de
charges de personnel mis à disposition d'une autre entreprise ; les
stocks à la fin de l'exercice ; et, d'autre part, les achats de
matières et marchandises, droits de douane compris ; les
réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice
»37.
De plus, « les consommations de biens et services en
provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services
extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens
pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens,
visés (à l'article 1467-1°-a du CG I), pris en location par
un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de
six mois ou des redevances afférentes à ces biens
résultant d'une convention de location-gérance, les frais de
transports et déplacements, les frais divers de gestion, (...) les
dépenses de gros entretien et de grandes visites engagées au
cours de l'exercice, y compris lorsque leur coût estimé au moment
de l'acquisition ou de la création de l'immobilisation principale
à laquelle elles se rattachent a été inscrit à
l'actif du bilan »38.
La valeur ajoutée à prendre en compte est en
principe celle produite par l'ensemble des activités de l'entreprise.
L'administration admet toutefois d'en exclure la fraction correspondant
à des activités placées hors du champ d'application de la
taxe professionnelle ou exonérées39. Mais la
jurisprudence considère que cette doctrine ne peut pas être
invoquée pour une activité bénéficiant seulement
d'une exonération temporaire40.
37 Cf. article 1647 B sexies-II-2 du CGI.
38 Ibid.
39 Cf. D. adm. 6 E-4331 n° 10 et 21, dans «
Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento pratique, éd.
Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3922.
40 Cf. CE 27 novembre 1991 n° 78076, RJF 1/92 n° 72,
dans « Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento pratique,
éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3922.
2. Les établissements de crédit et les
entreprises ayant pour activité exclusive la gestion de valeurs
mobilières
En ce qui concerne les banques, les établissements
financiers, les établissements de crédit et les entreprises ayant
pour activité exclusive la gestion de valeurs mobilières, la
production s'obtient, selon les termes de l'article 1647 B sexies II -
3 du CGI, en faisant « la différence entre, d'une part, les
produits d'exploitation bancaires et produits accessoires ; d'autre part, les
charges d'exploitation bancaires ».
La distinction entre ces entreprises et celles qui
relèvent de la définition de droit commun de la valeur
ajoutée précitée est déterminante puisque les
entreprises visées à l'article 1647 B sexies, II-3 du
CGI doivent inclure les charges et les produits financiers dans le calcul de
leur valeur ajoutée, contrairement à la
généralité des entreprises. Ce problème se pose
essentiellement pour les sociétés dont la seule activité
est de déterminer des participations dites « sociétés
holdings pures ». Leurs produits sont exclusivement constitués de
dividendes. Ainsi, la quasi-totalité de la valeur ajoutée
qu'elles produisent est égale correspond au montant des dividendes
perçus, si elles sont considérées comme des entreprises
ayant pour activité exclusive la gestion de valeurs mobilières. A
l'inverse, leur valeur ajoutée serait nulle si ces entreprises
relèvent du régime de la généralité des
entreprises, puisque, dans ce cas, leurs produits financiers ne seraient pas
à inclure dans le calcul de la valeur ajoutée41. Cette
distinction est fondamentale pour les entreprises concernées, moins en
matière de plafonnement de la taxe professionnelle, mais pour la
détermination de la cotisation minimale sur la valeur
ajoutée42.
Ainsi, les sociétés holdings peuvent choisir
d'exercer une activité autre que la détention de participation,
telle que les prestations de services rendues aux filiales, ce qui
entraîne l'exclusion de la holding du champ d'application de l'article
1647 B sexies, II-3 du CGI. En revanche, les sociétés
holdings pures, qui souhaitent le rester, peuvent contester le principe
même de l'assujettissement à la taxe professionnelle, en arguant
de l'absence d'activité professionnelle imposable43.
41 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34501.
42 V. infra.
43 Ibid.
3. Les entreprises d'assurance, de capitalisation et de
réassurance de toute nature
La production des entreprises d'assurance, de capitalisation
et de réassurance de toute nature est égale, en vertu de
l'article 1647 B sexies II - 4 du CGI, à la différence
entre « d'une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ;
les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes,
rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des
réassureurs ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ;
les provisions techniques au début de l'exercice. Et, d'autre part, les
prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais
financiers ; les provisions techniques à la fin de l'exercice ». De
plus, « les consommations intermédiaires comprennent
également les commissions versées aux courtiers, agents et autres
mandataires ».
4. Les redevables soumis au régime
micro-entreprises ou au régime déclaratif spécial dit
« micro-BNC » 44
Sont soumis au régime des micro-entreprises, aux termes
de l'article 50-0-1 du CGI, « les entreprises dont le chiffre d'affaires
annuel, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps d'exploitation au cours
de l'année civile, n'excède pas 80 000 euros hors taxes s'il
s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises,
objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer
sur place, ou de fournir le logement (...), ou 32 000 euros hors taxes s'il
s'agit d'autres entreprises. »
Aussi, en vertu de l'article 102 ter du CGI, les
contribuables, « qui perçoivent des revenus non commerciaux d'un
montant annuel, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps
d'activité au cours de l'année civile, n'excédant pas 32
000 euros hors taxes. », sont soumis au régime déclaratif
spécial « micro-BNC ».
La valeur ajoutée produite par les redevables, qui sont
soumis à de tels régimes fiscaux, est égale à 80%
de la différence entre le montant des recettes et, le cas
échéant, celui des achats45. Les achats à
prendre en compte ici s'entendent des achats de matières et de
marchandises, à l'exclusion des consommations de biens et services
44 Ce régime concerne les redevables qui perçoivent
des bénéfices non commerciaux (BNC).
45 Cf. article 1647 B sexies - II - 5 du CGI ; BO 6 E-1-00
n° 52 à 56.
en provenance de tiers qui ont été remplacés
par l'abattement de 20% applicable au calcul de la valeur ajoutée
susmentionnée46.
En pratique, la valeur ajoutée est
déterminée suivant les indications de la déclaration
spéciale (n° 1327-S TP) dont les rubriques correspondent aux
éléments de la déclaration de résultats.
II. L'interprétation des mots « hors taxes
» figurant dans la définition de la valeur
ajoutée, donnée par le
législateur
L'administration fiscale a opté pour une
interprétation restrictive de la notion de taxe exclue de la valeur
ajoutée, en adoptant un principe de non-déductibilité des
impôts et taxes dans le calcul du montant de la valeur ajoutée
(A). Les juges du fond, divisés en la matière, (B) puis le
Conseil d'Etat ont adopté une interprétation plus libérale
des termes « hors-taxe » de la définition de la valeur
ajoutée énoncée aux 1-II de l'article 1647 B
sexies du CGI (C).
A. Le principe de non-déductibilité des
impôts et taxes du calcul de la valeur ajoutée, retenu par
l'administration fiscale
La doctrine administrative interprète les termes «
hors taxes » des dispositions de l'article 1647 B sexies II - 1
du CGI de façon plus restrictive que la jurisprudence. En application de
la définition posée par cet article, les impôts et taxes
sont en général considérés par l'administration
fiscale comme n'étant pas déductibles pour le calcul de la valeur
ajoutée, bien qu'ils constituent une véritable charge pour les
redevables. Il en est ainsi, par exemple, de l'impôt sur les
sociétés, de la taxe sur les véhicules des
sociétés, de la taxe sur les salaires, des droits
d'enregistrement de la taxe professionnelle47. En effet, leur
déduction du calcul de la valeur ajoutée aurait pour effet
d'augmenter le dégrèvement accordé au titre du
plafonnement de taxe professionnelle.
Toutefois, il existe deux exceptions au principe de
non-déductibilité des impôts et taxes, à savoir
les droits indirects supportés par l'acheteur et les droits de douane.
Ceux-ci peuvent
46 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34540.
47 Le traitement fiscal des impôts et taxes dans la
détermination de la valeur ajoutée, Option finance n° 837 du
6 juin 2005, p. 39 et s.
être déduits pour le calcul de la valeur
ajoutée à la condition qu'ils se rattachent au coût d'un
bien ou d'un service lui-même déductible48. De la
même manière, les taxes sur le chiffre d'affaires et
assimilées autres que la taxe sur la valeur ajoutée, les
contributions indirectes et la taxe intérieure de consommation sur les
produits pétroliers (TIPP) peuvent être déduites du calcul
de la valeur ajoutée, même si ces impositions sont
comptabilisées en charge d'impôt49.
Néanmoins, l'administration a donné sa propre
définition de ce que recouvrait la notion de taxes sur le chiffre
d'affaires et assimilées, et de contributions indirectes, en la
restreignant aux impositions « qui figurent dans les deux premières
parties du livre Ier du CGI »50. Sa position demeure donc
très restreinte en la matière.
B. La division des juges du fond concernant le traitement
fiscal de certaines taxes
Aucune véritable ligne directrice n'a pu être
dégagée sur le traitement fiscal de certaines taxes, dans le
cadre du calcul de la valeur ajoutée. Ainsi, la contribution sociale de
solidarité (Organic) ne pouvait être déduite pour le calcul
de la valeur ajoutée, en ce sens que, bien qu'elle soit assise sur le
chiffre d'affaires, elle ne frappe pas directement le prix des biens et des
services (TA Nantes, 19 novembre 2002, n° 99-362, SA Eurial
Poitouraine ; CAA Nantes, 5 février 2003, n° 00-740, SA
Rivalan). A l'inverse, la taxe de vérification des instruments de
mesure présentait, eu égard à son objet ainsi qu'à
ses modalités d'assiette et de liquidation, le caractère d'une
contribution indirecte ; elle était déductible pour le calcul de
la valeur ajoutée, bien que le texte l'instituant n'ait pas
été incorporé au Code général des
impôts (CAA Bordeaux, 25 mars 2003, n° 99-2203, SA
Exa)51.
Toutefois, une interprétation uniforme a
été faite par les juges du fond, concernant la qualification de
la taxe sur le stockage des déchets ménagers. En effet, en raison
des objectifs généraux de la taxe et la pratique du
renchérissement des coûts de stockage et de la répercussion
de la taxe litigieuse dans les tarifs des entreprises productrices ou
collectrices de déchets, la taxe sur le stockage des déchets
ménagers était déductible pour le
48 Ibid.
49 Ibid.
50 Cf. instruction administrative du 30 août 1982, 6
E-4-82, dans L. VALLEE, « Comment se calcule le plafonnement de la taxe
professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ? », BDCF 10/04,
n° 123, p. 48-50.
51 Le traitement fiscal des impôts et taxes dans la
détermination de la valeur ajoutée, Option finance n° 837 du
6 juin 2005, p. 39 et s.
calcul de la valeur ajoutée (TA Lyon, 20 novembre 2001,
n° 97-2119 s., SA Mos). La Cour administrative de Bordeaux a
retenu la même solution en s'attachant à la nature de la taxe,
qualifiée de contribution indirecte, quand bien même elle ne
figurerait pas dans le CGI (CAA Bordeaux, 29 mars 2004, n° 99-1950 et
91-923, SA Surca). Il faut toutefois relever que la présente
taxe n'a pas été considérée comme frappant
directement le prix des biens et des services, et ne constituerait donc pas une
contribution indirecte déductible (CAA Douai, 14 octobre 2003, n°
99-1969, SA Ecosita)52.
La multiplicité des prélèvements
obligatoires, qui ne sont pas tous intégrés dans le Code
général des impôts, amplifie les divergences entre
l'administration fiscale et le juge de l'impôt mais également
entre les juridictions du fond, ce qui entraîne un important
contentieux.
C. L'adoption d'une position libérale adoptée
par la Haute Assemblée
La jurisprudence du Conseil d'Etat a interprété
« l'excédent hors taxe » mentionné au 1 du II de
l'article 1647 B sexies du CGI comme devant être calculé
après déduction de l'ensemble de ces prélèvements.
En effet, elle n'a pas subordonné la possibilité de
déduire certains prélèvements fiscaux du calcul de la
valeur ajoutée à la condition qu'ils figurent dans le Code
général des impôts.
Le Conseil d'Etat a eu l'occasion de juger, dans sa
première décision Sté William Pitters du 5
février 1988, que la valeur ajoutée à retenir pour le
plafonnement des cotisations de taxe professionnelle est égale à
l'excédent de la production de l'entreprise, au cours de la
période de référence, après déduction des
contributions indirectes, et notamment des droits de fabrication sur les
alcools et les spiritueux53.
Aussi, dans l'affaire Sté d'exploitation de la
Vallée des Belleville du 7 juillet 2004, l'administration a
refusé la déduction des taxes acquittées par la
société au titre de la loi « Montagne » en sa
qualité d'exploitant d'engins de remontée mécanique. Le
commissaire du gouvernement Laurent Vallée54 avait
relevé que l'administration était allée plus loin que sa
doctrine puisqu'elle considère que seule la TVA peut être
déduite, à l'exclusion de toute
52 Ibid.
53 L. VALLEE, « Comment se calcule le plafonnement de la
taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ? », BDCF
10/04, n° 123, p. 48-50.
54 Ibid.
autre taxe. Le fondement de sa position repose, selon lui, sur
le fait que le législateur de 1980, en écrivant «
excédent hors taxe », n'a pas voulu modifier sur ce point le
régime antérieur de définition de la valeur
ajoutée, prévu par le décret de 1979 qui n'excluait que la
TVA de la production. L'administration paraît vouloir inciter le juge
administratif à modifier sa jurisprudence55.
Or, la solution retenue par le Conseil d'Etat s'inscrit dans
la continuité de la jurisprudence Sté William Pitters du
5 février 1988. Il affirme clairement que l'interprétation des
mots « hors taxes » figurant à l'article 1647 B
sexies du CGI, pour déterminer la valeur ajoutée, doit
exclure de la valeur ajoutée l'ensemble des taxes qui sont directement
incorporées au prix des produits vendus ou des services fournis par
l'entreprise, que ces taxes figurent ou non au CGI. Cette acception des termes
« hors taxes » permet d'assurer la cohérence économique
de la notion de valeur ajoutée entre les entreprises.
En l'espèce, le Conseil d'Etat en a donc conclu que les
taxes (l'une communale et l'autre départementale) sur les
remontées mécaniques prévues aux articles L 2333-49 et L
3333-4 du Code général des collectivités territoriales
étaient déductibles du calcul de la valeur ajoutée. Il a
donc censuré la position de l'administration fiscale, en ne se limitant
pas aux impositions figurant dans les deux premières parties du livre
Ier du CGI. En outre, il ne semble pas se fonder sur la nature de l'impôt
en cause, mais sur le critère de l'incorporation au prix des produits ou
des services du prélèvement56, critère qui a,
en revanche, l'inconvénient d'être peu clair et peu
précis.
Le fait de plafonner la cotisation de la taxe professionnelle
due par un contribuable en fonction de la valeur ajoutée qu'il a produit
revient à déterminer l'impôt en fonction de sa contribution
à un accroissement de richesse57. Par conséquent, il
semble logique d'exclure les prélèvements
répercutés ou incorporés dans le prix de vente, telles les
taxes sur le chiffre d'affaires et les contributions indirectes, du calcul de
la valeur ajoutée, ce qui a pour effet d'augmenter le
dégrèvement accordé au titre du plafonnement.
55 Cet argument a déjà été
exposé par Th. Le Roy, dans ses conclusions, concernant l'affaire
William Pitters du 5 février 1998, mais il n'avait pas été
suivi. Cf. Dr. fisc. 39/88, concl. 1765.
56 Le traitement fiscal des impôts et taxes dans la
détermination de la valeur ajoutée, Option finance n° 837 du
6 juin 2005, p. 39 et s.
57 L. VALLEE, « Comment se calcule le plafonnement de la
taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ? », BDCF
10/04, n° 123, p. 48-50.
III. La difficulté pratique de la
détermination des éléments entrant dans le calcul
de
la valeur ajoutée
Le choix du redevable d'inscrire telle charge ou tel produit
dans un compte non mentionné par l'énumération à
l'article 1647 B sexies, plutôt que dans un compte y figurant, n'est pas
anodin. En effet, ce choix peut se faire dans un but d'optimisation fiscale,
c'est-à-dire à minorer le montant de la valeur ajoutée.
Mais il n'est pas illégitime tant qu'il n'est pas manifestement
contraire à une règle comptable.
Toutefois, les litiges concernant l'inclusion de certains
comptes dans la valeur ajoutée résultent davantage des
incertitudes réelles entourant la définition retenue par
l'article 1647 B sexies du CGI que de la volonté de mettre en oeuvre des
stratégies d'optimisation fiscale. Ainsi, dans l'affaire SA
Algeco du 6 décembre 2006, la société
requérante a exclu du calcul de la valeur ajoutée, au titre de la
production de l'exercice, le produit des cessions des constructions mobiles en
cause (à savoir les algecos), effectuées au terme de la
période de leur location. Selon elle, ces cessions présentent le
caractère d'immobilisation puisqu'elles étaient destinées
à servir de façon durable à l'activité de
l'entreprise. Ainsi, les cessions d'immobilisations, représentatives de
produits exceptionnels, ne peuvent être pris en compte pour le calcul de
la valeur ajoutée.
Or, ce n'est pas parce que les constructions mobiles sont
immobilisées que leurs cessions, après une période de
location, constituent un caractère exceptionnel. En effet,
l'activité même de la société requérante est
de louer et de vendre des algecos. Cette activité de vente est donc
habituelle, ordinaire, et non accessoire. Par conséquent, les sommes en
litiges résultant des cessions de constructions mobiles constituent des
ventes entrant dans la production de l'exercice au sens et pour application de
l'article 1647 B sexies du CG I58.
En réalité, la société
requérante a voulu se voir appliquer la même logique comptable et
fiscale qu'il faudrait appliquer à la vente de son siège social,
par exemple. En effet, les « ventes » mentionnées au II de
l'article 1647 B sexies ne comprennent pas les produits de cessions
d'éléments d'actifs, selon la société. Lorsqu'une
entreprise sort de son actif un bien qu'elle cède, elle dégage
une plus-value égale à la différence entre la valeur de
cession et la valeur nette comptable de ce bien. Elle ne créée
pas de richesse, de valeur ajoutée au sens
58 L. VALLEE, « Plafonnement : définition de la
valeur ajoutée selon les dispositions du plan comptable
général », RDF, 18 octobre 2007, n° 42, p. 30-32.
de cet article car une telle cession n'entre pas dans « la
production de l'exercice » au sens de ces dispositions59.
Toutefois, cette thèse n'a pas convaincu le juge fiscal.
Section 2 : L'évolution jurisprudentielle vers une
définition spécifiquement fiscale
Lorsque le plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée a été institué par la loi du 3 janvier
1979, le décret du 29 décembre 1979, pris pour application de ces
dispositions, précisait que les éléments de calcul de la
valeur ajoutée devaient être pris en compte « tels qu'ils
sont définis par le plan comptable général ». En
revanche, la référence expresse au plan comptable
général n'a pas été reprise par le III de l'article
12 de la loi du 10 janvier 1980, codifié à l'article 1647 B
sexies du CGI. Rien ne permet cependant de penser que le
législateur a souhaité substituer la référence aux
normes comptables au profit de définitions fiscales
autonomes60. Ainsi, les catégories d'éléments
comptables, énumérées à l'article 1647 B
sexies du CGI, qui permettent de déterminer la valeur
ajoutée, semblent se fonder sur le plan comptable en vigueur au moment
de l'adoption de la loi du 10 janvier 1980, à savoir celui de 1957 (I).
Cependant, les nécessités du réalisme du droit fiscal
exigent, dans certaines hypothèses, une dérogation au moins
implicite au plan comptable général (II). Aussi, le principe
d'autonomie du droit fiscal permettrait d'écarter une écriture
comptable régulière et fondée, pour l'application d'un
texte fiscal qui renvoie aux normes comptables (III).
I. Le fondement des éléments comptables
composant la valeur ajoutée sur les dispositions du plan comptable
général de 1957
Les rubriques énumérées par l'article
1647 B sexies du CGI, en vue de calculer la valeur ajoutée,
s'interprètent à la lumière de la définition
comptable (A). Toutefois, avec l'adoption du nouveau plan comptable
général en 1982, sensiblement différent de celui de 1957.
La question qui fut soulevée consistait à savoir si la
référence aux règles comptables par
59 Ibid.
60 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
l'article 1647 B sexies du CGI devait ou non tenir
compte de cette modification. Le juge de l'impôt semble avoir opté
pour une référence glissante aux normes comptables. En effet,
afin de déterminer si une charge ou un produit doit être
rattaché à l'énumération de l'article 1647 B
sexies du CGI, il faut se reporter au plan comptable
général dans leur rédaction en vigueur lors de
l'année d'imposition concernée (B).
A. L'interprétation du contenu de chaque
rubrique de l'article 1647 B sexies du CGI, à la lumière de la
définition comptable : le maintien d'une définition purement
fiscale de la valeur ajoutée
Afin de déterminer le contenu des différents
éléments intégrés à la notion de valeur
ajoutée, au titre de l'article 1647 B sexies du CGI, le juge
fiscal s'est interrogé sur le fait de savoir s'il fallait ou non se
référer au plan comptable général de 1957
(ci-après : « PCG 1957 ») en vigueur lorsque cet article a
été adopté en 1980. Les termes de l'article 1647 B sexies
du CGI, de même que les travaux préparatoires, semblent trancher
en faveur d'une réponse positive61. En effet, le II de
l'article 1647 B sexies du CGI énumère les postes
à prendre en compte pour procéder au calcul de la valeur
ajoutée. Certains de ces postes ont été directement repris
des postes du PCG 1957 applicable au moment de l'adoption de la loi du 10
janvier 1980. Ainsi, le législateur, en adoptant cette loi, a
exprimé sa volonté non équivoque de fixer la
définition de la valeur ajoutée sur les règles
comptables.
Le Conseil d'Etat a pris acte de la volonté du
législateur, d'abord implicitement, dans son arrêt
Gagnevin du 27 juin 199062. Il a ainsi
estimé que les frais financiers n'étaient pas déductibles
de la valeur ajoutée, dès lors qu'ils n'entraient pas dans la
catégorie des « frais divers de gestion » au sens du PCG 1957.
Par la suite, il a explicitement rappelé, dans son arrêt
Clavé du 26 juillet 199163, que les
éléments énumérés par l'article 1647 B
sexies correspondent aux catégories de charges ou produits,
définis par le PCG 1957. Après avoir relevé que les
éléments énumérés par l'article 1647 B
sexies du CGI correspondaient aux catégories de charges,
identiquement désignées, qui étaient définies par
le PCG de 1957, le Conseil d'Etat en a déduit qu'il y a lieu de se
référer aux définitions du plan. Ainsi, le juge
61 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de
la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
62 CE 27 juin 1990 n° 72948 et 74164, Gagnevin, RJF
8-9/90 n° 1047.
63 CE 26 juillet 1991 n° 81975 et 95802,
Clavé, RJF 10/91 n° 1251.
fiscal a conclu que les dépenses d'approvisionnement en
fioul et linge étaient déductibles dès lors qu'elles
relevaient de poste « achats de l'entreprise » du PCG 1957 alors que
les dépenses d'eau, de gaz et d'électricité ne
l'étaient pas dès lors qu'elles relevaient du poste «
travaux, fournitures et services extérieurs » de ce même plan
comptable.
Toutefois, la définition de la valeur ajoutée
posée par le législateur reste une définition propre au
droit fiscal. L'énumération du II de l'article 1647 B
sexies du CGI ne coïncide pas exactement avec l'ensemble des
postes comptables à prendre en compte pour le calcul de la valeur
ajoutée au sens comptable. En effet, cette énumération
peut exclure des éléments que le droit comptable inclurait, ou
l'inverse (CE 26 juin 1987 n° 52046, SA Scopk et n° 52047
SA Socanord)64.
B. La référence au plan comptable
général en vigueur au moment des faits
1. L'évolution des rubriques
énumérées dans l'article 1647 B sexies du CGI
Avec l'entrée en vigueur du Plan comptable
général de 1982 (ci-après : « PCG 1982 ») puis
de celui de 1999 (ci-après : « PCG 1999 »), le juge fiscal
s'est retrouvé confronté au constat que, d'un point de vue
comptable, l'énumération de l'article 1647 B sexies du
CGI reprenant des postes comptables du plan comptable général de
1957 pouvait évoluer. Les catégories ainsi retenues par le
législateur pouvaient donc changer de dénomination, de
périmètre, voire disparaître. Parallèlement, de
nouvelles catégories, dont le contenu pourrait reprendre tout ou partie
d'une catégorie énumérée par le Code
général des impôts (ci-après : « CGI »)
mais ne figurant pas dans cette énumération, pouvaient
apparaître. Le juge fiscal se trouvait, par conséquent,
confronté à la question de savoir s'il fallait se
référer à l'article 1647 B sexies du CGI dans sa
rédaction applicable à la date d'adoption de la loi fiscale ou au
cours de la période d'imposition. Ainsi, le Conseil d'Etat a
considéré, dans son arrêt min c/ CCI de Laval et de La
Mayenne, du 8 juillet 199865, que la délimitation des
rubriques conformément aux règles du plan comptable doit se faire
au vu du plan comptable en vigueur à la date des faits. Il s'est
fondé sur la définition des « subventions d'exploitation
» adoptée par le PCG 1982
64 Cf. RJF 8-9/87 n° 887.
65 CE 8 juillet 1998, n° 118 555, ministre c/ CCI de
Laval et de la Mayenne, RJF 10/08, n° 1134.
dans une affaire où le plan comptable applicable pour
les années en litige était celui de 1957. Il n'a donc pas suivi
le commissaire du gouvernement qui proposait de s'en tenir à la seule
référence connue du législateur de 1980.
Le Conseil d'Etat semblait s'être affranchi, pour
l'interprétation de chaque rubrique, de la référence au
plan comptable général. En effet, il a fondé sa solution
sur les règles comptables édictées par le PCG 1982, alors
que celles-ci n'étaient applicables pas aux cotisations de taxe
professionnelle dont le plafonnement était sollicité. La seule
explication valable était que la Haute Assemblée avait, pour la
première fois, fait application de l'article 1647 B sexies du
CGI en suivant un raisonnement fiscal autonome66. C'est cette
interprétation que le Commissaire du gouvernement J. COURTIAL donnait,
dans ses conclusions concernant l'affaire Ministre c/ SNCF du 29
décembre 200067.
Aussi, le juge fiscal paraissait avoir opté pour
référence « glissante » aux règles comptables,
et non figée.
2. La référence au plan comptable en
vigueur lors de l'année d'imposition concernée
Le Conseil d'Etat a transposé la solution
dégagée dans l'arrêt min c/ CCI de Laval et de La
Mayenne au cas de l'article 1647 B sexies du CGI, dans l'affaire
Sté Hyper Média du 30 décembre
200268. En l'espèce, la société
requérante avait bénéficié d'un abandon de
créance de la part de sa société mère afin de
compenser une insuffisance des produits d'exploitation due à la
faiblesse des prix de vente qu'elle pratiquait en vue de conquérir des
parts de marché. Le Conseil d'Etat a jugé que cet abandon de
créance constituait, au sens du 2 du II de l'article 1647 B
sexies du CGI, une subvention d'exploitation devant concourir à
la production de l'exercice de la société requérante, et
devait donc être prise en compte dans sa valeur ajoutée. Il a
repris la distinction, introduite par le PCG 1982 et confirmée par le
PCG 1999, entre les subventions d'exploitation et les subventions
d'équilibre qui constituent des produits exceptionnels exclus de la
valeur ajoutée. Il a ainsi interprété les
catégories
66 L. OLLEON, « Taxe professionnelle et subventions,
Attention, plafond haut ! », RJF 5/03, p. 395-398.
67 J. COURTIAL, « Traitement des subventions d'exploitation
pour le calcul du plafonnement de la taxe professionnelle », BDCF 3/01,
n° 40, p. 25-27.
68 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
énumérées à l'article 1647 B sexies
du CGI à la lumière non pas du PCG 1957 mais des normes
comptables en vigueur au cours des années d'imposition en litige.
Le juge fiscal a donc confirmé qu'il convenait toujours
de se référer au plan comptable général en vigueur
pour les années en litige pour définir le périmètre
de chaque rubrique. Cette position revient à admettre que le
périmètre de ces rubriques évoluerait avec le plan
comptable général lui-même. En effet, Guillaume Goulard,
concluant sur l'affaire Hyper Média69, indiquait qu'
« il est préférable, dans la mesure du possible, de retenir
la définition du plan comptable général applicable
à la date des faits (...) Car il faut, en opportunité,
éviter d'introduire des divergences entre les notions que les
entreprises doivent appliquer en comptabilité et celles qu'elles doivent
respecter dans leurs relations avec l'administration fiscale ». Il
préconisait donc de retenir les définitions du plan comptable
général applicable à la date des faits lors de la
détermination de la valeur ajoutée. Le Conseil d'Etat a donc
suivi son commissaire du gouvernement. Par contre, si cette solution avait
été appliquée à l'affaire min c/ CCI de Laval
et de La Mayenne, elle aurait conduit à une solution inverse de
celle qui fut adoptée70.
3. La connexion entre le droit fiscal et la
réglementation comptable
La définition de la valeur ajoutée retenue dans
les décisions Clavé et Hyper Média
semble confirmer la connexion entre le droit fiscal et la réglementation
comptable. Ainsi, les produits ou les charges correspondant à des postes
comptables actuellement en vigueur, inclus ou pouvant être inclus dans
l'énumération de l'article 1647 B sexies du CGI, doivent
être pris en compte dans la valeur ajoutée. Le Conseil d'Etat
confirme, dans sa décision min c/ Sté foncière
Ariane du 4 août 2006, le principe selon lequel il y a lieu de se
reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur
rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition
concernée, afin de déterminer si une charge ou un produit se
rattache à l'une des rubriques de cet article. Cette jurisprudence,
devenue constante, renforcée dans son principe par la décision
SAS Sofinad, du 8 juin 2005, estime que la connexion entre la loi
fiscale et la réglementation comptable est glissante. Par
conséquent, lorsque la loi fiscale mentionne un terme comptable, elle
est réputée faire référence à la
définition de la
69 Ibid.
70 L. OLLEON, « Taxe professionnelle et subventions,
Attention, plafond haut ! », RJF 5/03, p. 395-398.
réglementation applicable à la période du
litige, et non à la date de l'adoption du texte de loi en cause. Tout se
passe comme si le PCG n'était qu'un texte d'application du CG
I71.
Cette règle n'est pas très conforme à
l'orthodoxie en matière d'interprétation des textes, qui aurait
plutôt conduit à définir les rubriques du CGI en fonction
du périmètre qui était le leur à la date où
le législateur les a retenues pour son énumération. Mais
le choix de se référer aux normes comptables en vigueur est le
seul compatible avec la volonté de simplicité pratique que marque
l'emploi, par le législateur, de catégories directement reprises
du droit comptable. En cas d'incohérence, la logique voudrait que le
juge s'en tienne au texte, même si cela se traduit par une perte de
recettes fiscales qu'on pourrait juger contraire à l'intention du
législateur. Rien n'interdit ce dernier d'adapter son texte à
l'évolution des normes comptables. Ainsi, s'il ne l'a pas fait, il
serait fâcheux d'en faire subir les conséquences aux
entreprises.
II. La possibilité de s'affranchir du respect des
règles comptables
Les choix comptables des entreprises constituent des
décisions de gestion qui sont opposables au juge de l'impôt, ainsi
qu'à l'administration. Le réalisme du droit fiscal permet
toutefois à l'administration de corriger la qualification comptable
erronée retenue par le contribuable ou de rechercher la
réalité derrière les apparences. En revanche, il ne peut
en aucun cas l'autoriser à écarter purement et simplement une
écriture à la fois régulière d'un point de vue
comptable et conforme à la réalité. Ainsi, lorsque deux
modes de comptabilisation sont possibles, il ne saurait être
reproché au contribuable de choisir celui qui minimise sa charge
fiscale72. Même si les écritures passées par le
contribuable respectent les règles comptables, il est possible de s'en
affranchir lorsqu'elles méconnaissent l'exigence de réalisme du
droit fiscal (A). Par ailleurs, le principe d'autonomie du droit fiscal serait
susceptible de fonder une solution consistant à écarter une
écriture comptable régulière et fondée, pour
l'application d'un texte fiscal qui renvoie aux normes comptables (B).
71 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de
la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
72 S. VERCLYTTE, « Quels sont les éléments
à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée, au sens
des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle ? »,
BDCF 11/06, n° 135, p. 46-57.
A. Le respect du principe du réalisme du droit
fiscal
1. La « requalification » des inscriptions
comptables opérée par le juge de l'impôt
Dans l'affaire Hyper Média, la
société requérante avait régulièrement
comptabilisé l'abandon de créance dont elle avait
bénéficié dans un compte de produits exceptionnels, qui ne
relevait pas d'une rubrique mentionnée à l'article 1647 B
sexies du CGI. Pour l'inclure dans la valeur ajoutée, le
Conseil d'Etat a donc requalifié cet abandon de créance en
subvention d'exploitation, et écarté comme inopposable le mode de
comptabilisation retenue par la société. Or en principe, les
abandons de créance sont comptabilisés en produits exceptionnels.
Cette rubrique n'est pas mentionnée par le CGI et, par
conséquent, ne devrait pas être incluse dans la valeur
ajoutée. Mais il est vrai qu'en l'espèce, les abandons de
créances en cause auraient également pu être consentis sous
la forme de subventions d'exploitation, à partir du moment où ils
ne présentaient pas un caractère exceptionnel73. La
« requalification »74, opérée par le juge,
était indispensable pour traiter de manière identique des
produits qui correspondent, en pratique, à une même
réalité75.
Par ailleurs, quelle que soit la manière dont les
sommes en cause ont pu être légitimement comptabilisées en
virements internes (CE 8 juillet 1998, min c/ CCI de Laval et de La
Mayenne), en subvention (CE 29 décembre 2000 min c/ SNCF),
ou en produits exceptionnels (CE 30 décembre 2002, Sté Hyper
Média), elles constituaient toutes des subventions d'exploitation
et devaient donc être traitées de la même manière
pour calculer le plafond de taxe professionnelle, sous peine de
méconnaître le principe du réalisme du droit
fiscal76.
Cette faculté que le juge fiscal s'est reconnu semble
paradoxal au regard de la logique jurisprudentielle, selon laquelle l'article
1647 B sexies du CGI renvoie à des règles comptables.
Ainsi, un certain flou s'installe en ce qui concerne les contours de la valeur
ajoutée fiscale.
73 Mémento comptable Lefebvre 2006 n° 648-3, dans Y.
BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de la valeur
ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
74 Notion qu'il ne faut pas confondre avec une rectification
d'erreur comptable.
75 S. VERCLYTTE, « Quels sont les éléments
à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée, au sens
des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle ? »,
BDCF 11/06, n° 135, p. 46-57.
76 Ibid.
2. L'intrusion du juge fiscal dans le choix comptable
opéré par les redevables
Dans la décision SA Colas Sud-Ouest de 2006,
le Conseil d'Etat écarte une écriture comptable pourtant conforme
au plan comptable général afin d'éviter une double
déduction, des mêmes charges, chez la société
mère et chez la filiale77. En effet, il a estimé que
les juges du fond n'avaient pas commis d'erreur de droit en retenant, parmi
plusieurs qualifications comptables possibles, la plus conforme au
réalisme du droit fiscal. De telles refacturations intra-groupe sont, en
principe, imposables même si elles sont effectuées à prix
coûtant, sauf si elles entrent dans l'exonération prévue
aux articles 261 B et 261 A du CGI en faveur de certains services rendus
à prix coûtant, et dont le prix doit correspondre à un prix
de pleine concurrence, à moins qu'il s'agisse d'un acte anormal de
gestion78. Ainsi, elles devraient être fiscalement
traitées comme des produits ordinaires79. Une telle
requalification est opportune, puisqu'elle est la seule à limiter, en
tout cas partiellement, la recherche d'optimisation fiscale qui guide
très souvent le choix d'inscrire de tels produits en transferts de
charges. En effet, une opération telle que celle en cause permet
à la société mère de déduire de sa valeur
ajoutée les achats de matériaux effectués pour le compte
de ses filiales. De plus, elle permet à ces filiales de déduire
de leur valeur ajoutée les mêmes achats, qui leur ont
été refacturés, mais également les sommes
correspondant au personnel mis à leur disposition. En revanche, si elles
avaient employé directement le personnel en cause, elles n'auraient pas
pu déduire les charges correspondantes. Cette « création de
charges » se traduit donc par une réduction globale de la valeur
ajoutée, retenue pour le calcul du plafonnement, en faveur de la
société mère et de ses filiales.
Par conséquent, abonder la valeur ajoutée de la
société mère du montant des sommes refacturées
semble être la seule manière d'éviter cette modification
artificielle (ou la volatilisation) de valeur ajoutée, en partie du
moins. Cet abondement permet de maintenir le volume global de cette valeur
ajoutée mais n'empêche pas une modification de la
répartition de cette valeur ajoutée. Ainsi, le montant de la
valeur ajoutée peut être réduit
77 A. BONNET, « Plafonnement : définition de la
valeur ajoutée selon les dispositions du plan comptable
général », RDF, 18 octobre 2007, n° 42, p. 32-34.
78 L'acte anormal de gestion est celui qui met une dépense
ou une perte à la charge de l'entreprise ou qui la prive d'une recette
sans être justifiée par les intérêts de
l'exploitation commerciale. Il revient à l'administration de prouver
qu'un acte n'a pas été accompli dans l'intérêt de
l'entreprise.
79 S. VERCLYTTE, « Quels sont les éléments
à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée, au sens
des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle ? »,
BDCF 11/06, n° 135, p. 46-57.
chez les filiales, et augmenté chez la
société mère, ce qui n'est pas neutre puisque le taux de
taxe professionnelle applicable à cette dernière peut être
inférieur à celui applicable aux filiales.
La correction effectuée par le juge fiscal aboutit donc
à rétablir en volume global la valeur ajoutée initiale, ce
qui paraît conforme au principe de réalisme du droit fiscal.
3. La possibilité d'écarter des
règles comptables : une faculté ouverte par le juge
Le juge de l'impôt a ouvert une possibilité de
s'écarter des règles comptables dans une hypothèse
où le redevable aurait la possibilité de comptabiliser les sommes
en cause dans deux rubriques, dont seulement une serait mentionnée dans
le CGI. Or, en principe, lorsque le droit comptable offre une option entre deux
modes de comptabilisation dont un seul entre dans l'énumération
de l'article 1647 B sexies du CGI, les sommes en cause doivent
être prises en compte dans le calcul de la valeur ajoutée, quel
que soit le mode de comptabilisation choisi par l'entreprise (CE 30
décembre 2002 n° 238030, Sté Hyper-Média, CE
4 août 2006, n° 270961 à 270965, SA Colas
Sud-Ouest) 80. Cette règle ne va pas de soi au regard du
caractère en principe opposable des décisions de gestion, et donc
du choix de tel mode de comptabilisation régulier plutôt que de
tel autre. Mais le Conseil d'Etat semble la justifier par le souci de ne pas
trop s'éloigner de la volonté du législateur, et par la
préoccupation d'éviter l'artificielle volatilisation de valeur
ajoutée81.
Le rattachement d'un élément, composant la
valeur ajoutée produite par l'entreprise, au plan comptable en vigueur
et sa conformité est donc nécessaire mais pas suffisant. Lorsque
plusieurs qualifications comptables sont envisageables, il est possible de
retenir au nom du réalisme fiscal, celle qui va permettre de respecter
au mieux la logique économique et comptable.
A l'inverse, lorsque le droit comptable impose un seul mode de
comptabilisation dans une rubrique qui ne correspond à aucune de celles
énumérées par l'article 1647 B sexies du CGI, les
sommes en cause ne doivent pas, en principe, être prises en compte pour
le calcul de la valeur ajoutée82. Si tel était le cas,
cela aboutirait à une solution contraire au réalisme fiscal.
80 L. CHATEL, « Plafonnement de la taxe professionnelle en
fonction de la valeur ajoutée : comment délimiter les
catégories énumérées par l'article 1647 B sexies du
CGI ? », BGFE 6/06, p. 23-27.
81 Ibid.
82 Ibid.
En effet, le juge de l'impôt cherche à garantir
la cohérence entre le traitement fiscal et la logique économique
et comptable. Il semble ainsi être introduit une exigence purement
fiscale qui peut être source de difficultés pour le
contribuable.
B. La suppression d'une écriture comptable
régulière et fondée au nom du principe d'autonomie
fiscale
Le principe d'autonomie fiscale permet de déroger
à la règle selon laquelle les entreprises doivent se conformer
aux normes comptables lorsque celles-ci sont incompatibles avec la loi fiscale.
Or tel est le cas de l'utilisation du compte « transfert de charges »
lorsqu'elle aboutit à déduire deux fois certaines charges, ou
à retrancher des salaires de la valeur ajoutée fiscale alors que
le législateur avait entendu les y inclure. En effet, le maniement du
principe d'autonomie du droit fiscal n'est pas des plus simples dans le cas de
l'article 1647 B sexies du CGI, dès lors qu'il oblige à
faire le tri entre les règles comptables supposées compatibles
avec cet article et celles qui ne le sont pas. Si l'on combine ce principe avec
l'idée que les rubriques énumérées à
l'article précité s'interprètent à la
lumière de la réglementation comptable, il en découle que
les sommes qui n'ont pas été comptabilisées dans un compte
rattachable à l'une de ces rubriques doivent être prises en compte
dans la valeur ajoutée, lorsqu'elles auraient pu être
comptabilisées dans un tel compte (ainsi que l'a jugé le Conseil
d'Etat dans sa décision Hyper-Média, confirmée par la
décision Société Colas Sud-Ouest). Dans le cas contraire,
elles doivent être exclues de cette valeur ajoutée (ainsi que l'a
exposé S. VERCLYTTE dans ses conclusions sur la décision du 3
novembre 2006, Caisse fédérale du Crédit Mutuel
Océan83).
83 « Nous n'avons aucune hésitation à
admettre que, lorsque le droit comptable en vigueur autorise une option entre
deux modes de comptabilisation, et quelles que soient d'ailleurs les
éventuelles recommandations en faveur de telle ou telle branche de
l'option, le juge de l'impôt doit retenir la qualification comptable qui
satisfait le mieux l'exigence de réalisme fiscal. En revanche, si le
droit comptable impose formellement la comptabilisation dans une rubrique qui
ne correspond à aucune de celles énumérées par le
CGI, il nous semblerait dangereux d'admettre que le juge fiscal, même au
nom du réalisme fiscal, puisse néanmoins rattacher les sommes en
cause à l'une des rubriques du CGI », S. VERCLYTTE, « Les
sommes refacturées par les Caisses fédérales de
Crédit Mutuel aux caisses locales entrent-elles dans la valeur
ajoutée telle que définie par l'article 1647 B sexies du
CGI ? », BDCF 1/07, n°6, p. 25.
Section 3 : L'avenir de la jurisprudence
dégagée par le Conseil d'Etat, à propos de la valeur
ajoutée.
La ligne jurisprudentielle dégagée par le
Conseil d'Etat permet d'assurer une convergence entra la valeur ajoutée
fiscale et la valeur ajoutée comptable, ce qui a permis de
résoudre un certain nombre de difficultés récurrentes.
L'intervention du législateur en 2006, n'ayant pas
modifié les définitions de la valeur ajoutée applicables
aux banques et aux assurances, ne met pas fin aux interrogations. En effet, les
normes comptables continueront à évoluer. Des hypothèses
subsistent ou vont apparaître dans lesquelles la grille de lecture
dégagée par la jurisprudence étudiée
précédemment est susceptible d'introduire des incohérences
: soit de nouvelles notions ont fait leur apparition dans les plans comptables
ultérieurs à celui de 1957, comme celle de transferts de charges
en cause dans l'affaire Sté Colas Sud-Ouest, soit des notions
anciennes ont vu leur définition comptable évoluer, comme dans le
litige opposant l'administration à la Caisse fédérale
du Crédit Mutuel Océan. Dans ces hypothèses, le juge
de l'impôt est confronté à un dilemme. Soit il fait une
application mécanique de la grille d'analyse issue de sa décision
min c/ Sté foncière Ariane, et fait prévaloir
l'impératif de sécurité juridique, au risque de laisser
subsister des possibilités d'optimisation fiscale. Soit, au contraire,
il adopte une démarche purement casuistique, et corrige au cas par cas
les incohérences provoquées par l'obsolescence de l'article 1647
B sexies du CGI, mais il prend alors le risque d'augmenter le flou
entourant la notion de valeur ajoutée fiscale et de contribuer à
la multiplication des litiges. Par ses décisions Sté Colas
Sud-Ouest et Caisse fédérale du Crédit Mutuel
Océan, le Conseil d'Etat est parvenu à se conformer à
la première possibilité tout en évitant les risques
correspondants mais aux prix de raisonnements périlleux84.
Dans l'affaire Sté Colas
Sud-Ouest85, la solution n'était pas évidente.
Les mises à disposition de personnel facturées par la
société à ses filiales avaient été
comptabilisées dans un compte de transferts de charges qui
n'était rattachable à aucune des rubriques de l'article 1647 B
sexies du CGI. Sans contester la conformité de cette
écriture au PCG 1982, le Conseil d'Etat a néanmoins jugé
que les produits constituaient des ventes et prestations de services
84 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de
la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
85 Cf. Annexe 2.
entrant dans la valeur ajoutée « et auraient,
d'ailleurs, pu être comptabilisées comme telles ». Cette
motivation soulève deux difficultés.
D'une part, l'emploi des termes « d'ailleurs »
signifie que la possibilité de comptabiliser les mises à
disposition de personnel comme des ventes et prestations (compte 70 du PCG) n'a
pas été regardée comme déterminante. Si tel
était réellement le cas, la présente décision
devrait être interprétée comme retenant une
définition purement fiscale de la valeur ajoutée, sans lien avec
les normes comptables applicables, ce qui serait en contradiction directe avec
la solution retenue dans la décision min c/ Sté
foncière Ariane. Cependant, le commissaire du gouvernement S.
VERCLYTTE considère que tel n'est pas ce qu'a entendu juger le Conseil
d'Etat, et voit dans les mots « d'ailleurs » un simple signe
d'hésitation. D'autre part, il reste difficile d'expliquer par quel
moyen le juge de l'impôt, tout en considérant que l'article 1647 B
sexies doit s'interpréter à la lumière des normes
comptables en vigueur, peut néanmoins se reconnaître la
faculté d'écarter une écriture comptable sans contester sa
régularité ni sa pertinence, pour l'application de ce texte.
Selon le commissaire du gouvernement, qui reprend la position de G. GOULARD
dans l'affaire Sté Hyper Média, cette solution serait
sous-tendue par le principe de réalisme du droit fiscal86.
La décision Caisse fédérale du
Crédit Mutuel Océan précité lève
l'ambiguïté de l'utilisation du terme « d'ailleurs » dans
la décision SA Colas Sud-Ouest, en indiquant la
référence sans réserve aux normes comptables pour
l'application de la norme fiscale87.
86 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de
la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
87 S. VERCLYTTE, « Les sommes refacturées par les
Caisses fédérales de Crédit Mutuel aux caisses locales
entrent-elles dans la valeur ajoutée telle que définie par
l'article 1647 B sexies du CGI ? », BDCF 1/07, n° 6, p.
23-30.
Chapitre 2 : Les principaux problèmes
spécifiques en matière de plafonnement de la taxe
professionnelle
Les entreprises disposent, en principe, d'une liberté
de choix dans l'écriture comptable qui représente une
opération destinée à enregistrer un flux commercial,
économique ou financier dans les différents comptes
référencés dans un plan comptable. Elles sont toutefois
tenues de respecter le principe de la comptabilité en partie double
(c'est-à-dire que le débit et le crédit doivent
s'équilibrer). Par conséquent, ses choix comptables ont une
incidence directe sur le calcul de la valeur ajoutée, encadré par
l'article 1647 B sexies du CGI.
Des difficultés sont ainsi apparues à propos de la
définition même de subventions d'exploitation devant être
comprises dans la valeur ajoutée (Section 1).
Aussi, un problème de qualification comptable s'est
posé lorsque les postes comptables ont évolué
postérieurement au plan comptable général de
195788. Tel est le cas, lorsque la définition du poste, dans
lequel est comptabilisé la charge ou le produit en cause, n'existait pas
dans le PCG 1957, ou lorsque le poste a été modifié, suite
à l'adoption de plans comptables ultérieurement à celui de
1957. Ce problème s'est posé concernant les comptes de produits
« transferts de charges » (Section 2), apparus avec le PCG 1982.
Section 1 : Le problème relatif à la
qualification de subventions d'exploitation
Les subventions d'exploitation correspondent à un des
éléments comptables compris dans la valeur ajoutée
définie à l'article 1647 B sexies du CGI. La
délimitation de cette notion est donc déterminante, pour les
redevables, puisqu'elle peut faire varier le montant de la valeur
ajoutée, servant de base au plafonnement de la taxe professionnelle (I).
C'est pourquoi les subventions d'exploitation ont fait l'objet d'un important
contentieux (II).
88 Rappelons que le l'énumération donnée par
l'article 1647 B sexies du CGI afin de déterminer le montant de
la valeur ajoutée servant de base au calcul du plafonnement se fonde sur
le PCG 1957.
I. La détermination de subvention d'exploitation
: une notion incluse dans l'énumération de l'article 1647 B
sexies du CGI définissant la valeur ajoutée
Afin d'identifier les éléments à prendre
en compte dans le calcul de la valeur ajoutée, il faut se
référer aux définitions comptables. Le plan comptable
général distingue trois catégories de subventions,
à savoir les subventions d'exploitation, les subventions
d'équilibre et les subventions d'investissement89.
Les subventions constituent, d'une manière
générale, des aides financières octroyées aux
entreprises par l'Etat ou par des collectivités publiques, et de
manière exceptionnelle, elles peuvent être accordées par
une entreprise à une autre entreprise.
La notion de subvention d'exploitation, telle qu'elle figure
dans le plan comptable général de 1999, actuellement en vigueur,
est définie comme une « subvention dont bénéficie
l'entreprise pour lui permettre de compenser l'insuffisance de certains
produits d'exploitation ou de faire face à certaines charges
d'exploitation ». Elles se distinguent des subventions d'équipement
et des subventions d'équilibre.
En effet, les subventions d'équipement sont
destinées à financer l'acquisition d'immobilisations, telles que
les subventions pour la création d'installations antipollution. Sinon il
s'agit de subventions d'investissement, lorsqu'elles financent des
activités à long terme, telles que les primes de
développement régional90.
Quant aux subventions d'équilibre, le Commissaire du
gouvernement G. GOU LARD rappelle, dans ses conclusions, leur distinction avec
les subventions d'exploitation : « La subvention d'équilibre est
celle qui compense un résultat d'ensemble négatif, défini
comme la résultante des opérations courantes, des
opérations financières et des opérations exceptionnelles.
Mais lorsque la subvention reste au niveau des produits et charges de gestion
courante, pour compenser une insuffisance de ces produits ou un excès de
ces charges, il s'agit d'une subvention d'exploitation. »91.
La subvention d'équilibre est donc destinée
à équilibrer le résultat d'ensemble d'une entreprise
qui serait déficitaire si cette subvention ne lui avait pas
été accordée92. Le
89 Source : <
http://bestofcompta.free.fr/comptagene/LES%20SUBVENTIONS.htm>.
90 Ibid.
91 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
92 Source : <
http://bestofcompta.free.fr/comptagene/LES%20SUBVENTIONS.htm>.
commissaire du gouvernement G. GOULARD relève, par
ailleurs, que les auteurs du Mémento comptable F.LEFEBVRE
précisent que « Toutefois, à notre avis, lorsque (les
subventions d'équilibre) assurent l'équilibre du résultat
d'exploitation, il s'agit, comptablement, de subventions d'exploitation
»93. Cette précision fait référence, d'une
part, à la subdivision des recettes entre produits de gestion courante,
produits financiers et produits exceptionnels, et d'autre part, à la
subdivision des charges entre charges de gestion courante, charges
financières et charges exceptionnelles94.
En définitive, lorsque la subvention compense des produits
ou des charges de gestion courante, il s'agit d'une subvention
d'exploitation.
Ces trois catégories de subventions doivent être
correctement identifiées, en particulier la différence entre
subvention d'exploitation et subvention d'équilibre, puisqu'elles
n'entraînent pas les mêmes conséquences en matière de
plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. Seules les subventions
d'exploitation doivent être comprises dans la valeur ajoutée,
définie à l'article 1647 B sexies du CGI.
II. L'important contentieux concernant la qualification
de subvention
d'exploitation, au sens de l'article 1647 B
sexies du CGI, par le juge de l'impôt
Après l'entrée en vigueur du plan comptable
général de 1982, le Conseil d'Etat a implicitement
appliqué les nouvelles définitions comptables. Il a donc
accepté de faire évoluer les notions contenues dans l'article
1647 B sexies du CGI, afin d'éviter les discordances entre les
normes comptables et les normes fiscales (CE 8 juillet 1998, ministre c/
CCI de Laval et de la Mayenne ; CE 29 décembre 2000 n° 199296,
ministre c/ SNCF). La première affaire portait sur des
virements effectués par une chambre de commerce, entre deux sections de
son propre budget, afin de combler le déficit d'exploitation de
l'aérodrome qu'elle exploitait. La seconde affaire, quant à elle,
concernait des subventions versées à la SNCF par l'Etat et des
collectivités territoriales pour permettre la fixation du prix du
93 Cf. « Mémento comptable 2003 », coll.
Mémento pratique, éd. Francis Lefèbvre, 2003, n°
2415, dans G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
94 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
transport à un montant inférieur à celui
qu'auraient dû normalement acquitter les usagers et pour
équilibrer les comptes d'exploitation des services de voyageurs
d'intérêt régional.
Dans les deux cas, le Conseil d'Etat a estimé que ces
sommes représentaient des subventions d'exploitation95. Dans
la décision ministre c/ CCI de Laval et de la Mayenne, il a
adopté une conception plus large de la notion de subvention
d'exploitation par rapport à celle retenue par le plan comptable
général de 1957 mais compatible avec le plan comptable
général de 1982, appliqué ici « par anticipation96
»97 . Cette position est confirmée dans
l'arrêt ministre c/ SNCF, bien que, cette fois, le plan
comptable général de 1982 était en vigueur à la
date des subventions litigieuses.
Par ailleurs, dans l'affaire Sté Hyper
Média, la société mère imposait à l'une
de ses filiales une politique de prix bas qui ne lui permettait pas de couvrir
ses charges. A la fin de chaque exercice, la société mère
devait lui verser une subvention permettant de rétablir
l'équilibre de ses comptes. En pratique, ces subventions prenaient la
forme d'avances, suivies d'abandons de créances. De plus, les versements
consentis par la société mère étaient
accompagnés d'une clause de retour à meilleure fortune, autrement
dit, la filiale devra les rembourser, lorsqu'elle connaîtra des exercices
bénéficiaires. La filiale soutient dans le cadre de sa demande de
plafonnement de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée
que ces versements sont des subventions d'équilibre. Par
conséquent, elles ne font pas partie, contrairement aux subventions
d'exploitation, aux éléments de la production qui sont compris
dans le calcul de la valeur ajoutée98. Ainsi, il s'agit de
déterminer si les aides que la société mère lui a
consenties constituent ou non des subventions d'exploitation au sens de
l'article 1647 B sexies du CGI.
Le Conseil d'Etat devait choisir entre la qualification de
subvention d'exploitation et celle de subvention d'équilibre. La
subvention en cause est justifiée par la pratique d'une politique
commerciale agressive se traduisant par des prix ne permettant pas de couvrir
les charges d'exploitation99. Il a ainsi estimé qu'une
subvention destinée à compenser des prix trop bas est une recette
d'exploitation. Tel était également le cas, dans les affaires
précitées, de l'aide
95 F. DONNEDIEU de VABRES, « Plafonnement en fonction de la
valeur ajoutée : définition des subventions d'exploitation dans
la valeur ajoutée », BGFE 2/03, p. 16-17.
96 En effet, le juge fiscal s'est référé aux
définitions du plan comptable général de 1980, alors que
c'était celui
de 1957 qui était applicable ratione temporis.
97 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
98 Ibid.
99 Ibid.
versée pour compenser le caractère insuffisant
des recettes d'exploitation d'un aéroport ou de l'aide accordée
à la SNCF pour compenser les prix bas appliqués sur certaines
lignes. Il n'a pas fait de différence selon la forme de l'aide -
subvention, virement interne ou avance suivie d'un abandon de créance -
ou selon le caractère plus ou moins temporaire de l'aide100.
Il a préféré, au contraire, faire prévaloir le
réalisme fiscal101.
La qualification de subvention d'exploitation présente
un intérêt important pour les entreprises, puisqu'une autre
qualification peut entraîner une baisse du montant de la valeur
ajoutée, et donc une diminution du plafond de la taxe
professionnelle.
Section 2 : Le problème relatif aux comptes de
« transferts de charges »
Le compte « transferts de charges », défini
dans le PCG 1982 (I), a posé des difficultés en ce qui concerne
son inclusion ou non dans le calcul de la valeur ajoutée (II), cette
notion étant définie, à l'article 1647 B sexies
du CGI, sur les bases du PCG 1957.
I. La définition des comptes de « transferts de
charges »
Les comptes de « transferts de charges »
n'existaient pas sous cette appellation dans le PCG 1957 et ne sont apparus
qu'en 1982. En pratique, ils sont utilisés pour deux catégories
d'opérations différentes, les unes purement comptables (A), les
autres qui s'accompagnent de mouvement de trésorerie (B). Chacune
d'entre elles n'entraînent pas les mêmes conséquences dans
la détermination de la valeur ajoutée, en matière de
plafonnement.
A. La première catégorie de «
transferts de charges » retraçant des opérations purement
comptables
La première catégorie de « transferts de
charges » regroupe les écritures destinées
à améliorer la lisibilité des résultats de
l'entreprise, en déplaçant certaines charges de son
100 Si le prix d'une matière première rencontre
une flambée des prix, pendant un exercice déterminé, la
subvention qui sera accordée à ce titre revêtira
néanmoins le caractère de subvention d'exploitation. A l'inverse,
une subvention d'exploitation peut aussi avoir un caractère plus
durable.
101 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation
entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du
plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF
3/03, n° 37, p. 36-39.
résultat d'exploitation vers son résultat net.
Tel est le cas, lorsqu'une entreprise souhaite ne pas obérer son
résultat d'exploitation - reflétant son activité ordinaire
- par les charges équivalentes à une activité
promotionnelle exceptionnelle. Ces charges sont initialement
comptabilisées parmi les charges courantes (dépenses de
personnel, fournitures, etc.). L'entreprise calcule le montant total, et passe
alors deux écritures : elle crédite de ce montant un compte de
transfert de charges, et un compte de charges exceptionnelles. Les produits
inscrits en « transferts de charges » viennent compenser le montant
équivalent figurant dans les divers comptes de charges courantes, pour
le calcul du résultat d'exploitation. Les « charges exceptionnelles
» n'affectent, quant à elles, que le résultat
net102.
D'après le commissaire du gouvernement S. VERCLYTTE,
« il serait illogique, d'un point de vue économique et comptable,
d'inclure dans la production de l'exercice les sommes créditées
en transferts de charges. En effet, l'inscription de ces sommes,
conséquence de mouvements purement comptables, ne correspond à
aucune production, à aucun accroissement de la richesse
créée par l'entreprise »103.
B. La seconde catégorie de « transferts
de charges » retraçant des opérations traduites par des
mouvements de trésorerie
La seconde catégorie de « transferts de charges
» correspond à des opérations qui s'accompagnent de
mouvements de trésorerie. Elle existait déjà sous une
autre appellation, à savoir l'ensemble des comptes de classe 788 «
charges imputables à des tiers ». Les sommes qui y sont inscrites
constituent un produit « réel » venant compenser
réellement une charge exposée, comme par exemple une
indemnité d'assurance. Un tel produit est difficile à affecter.
En principe, dans une logique économique et comptable, c'est la nature
de la charge compensée qui détermine si la somme
créditée en transfert de charges doit être ou non prise en
compte dans la valeur ajoutée. Ainsi, dans un souci de symétrie,
si la charge est déduite de la valeur ajoutée, le produit
correspondant devra être pris en compte dans cette même valeur
ajoutée104.
102 S. VERCLYTTE, « Quels sont les éléments
à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée, au
sens
des dispositions relatives au plafonnement de la taxe
professionnelle ? », BDCF 11/06, n° 135, p. 46-57.
103 Ibid.
104 Ibid.
Comme le relève le commissaire du gouvernement S.
VERCLYTTE, « les produits « réels » que retracent de tels
transferts de charges, à l'inverse de ceux correspondant à de
simples écritures comptables, devraient en bonne logique, (...), venir
abonder la valeur ajoutée de l'entreprise ». Mais le
législateur a choisi, en 1980, de ne pas les inclure dans la production
de l'exercice, et donc de ne pas en tenir compte pour le calcul de la valeur
ajoutée en s'écartant de la logique économique et
comptable de symétrie105.
II. La question relative à l'inclusion des comptes
« transferts de charges » dans la
valeur ajoutée
La question s'est posée concernant de l'inclusion dans la
valeur ajoutée des sommes portées au compte « transferts de
charges », avant l'intervention du législateur en 2006.
Ce compte n'était pas mentionné à
l'article 1647 B sexies du CGI, mais cela ne signifiait pas que le
législateur a voulu exclure les sommes qui y sont portées du
calcul de la valeur ajoutée. De plus, l'imprimé n° 1327 TP
sur lequel la demande de plafonnement doit être souscrite ne
prévoyait pas la déclaration de ces transferts de charges.
Néanmoins, l'administration considérait dans certains cas qu'il y
avait lieu de les inclure dans le calcul de la valeur ajoutée.
Les juges du fond se sont divisés sur cette question,
notamment à propos des indemnités d'assurance (A). Le juge de
cassation a fini par trancher en faveur de la prise en compte dans la valeur
ajoutée des indemnités d'assurance compensatrices d'un sinistre,
inscrites au compte « transferts de charges » (B). Le problème
a été définitivement résolu par le
législateur depuis le 1er janvier 2007 (C).
A. La division des juges du fond concernant le
traitement fiscal des sommes portées au compte « transferts de
charges », notamment des indemnités d'assurance
Les juges du fond se sont divisés sur le fait de savoir
si l'absence du compte de « transferts de charges » au sein de
l'énumération de l'article 1647 B sexies du CGI
impliquait ou non la prise en compte dans la valeur ajoutée des
sommes qui y sont inscrites. Les indemnités,
105 Ibid.
comme les indemnités d'assurance, sont en
général comptabilisées en « transferts de charges
».
Ainsi, le Tribunal administratif de Nantes106 et
celui de Pau107 ont jugé que les indemnités
d'assurance devaient être intégrées dans la production de
l'exercice nonobstant leur imputation à un compte « transfert de
charges », sous réserve que les charges exceptionnelles
correspondantes aient été comptabilisées108.
Plus précisément, dans l'affaire SA Eurial
Poitouraine, rendu par le Tribunal administratif de Nantes, le 19 novembre
2002, la société avait soutenu que la valeur ajoutée,
telle que définie dans le CGI, ne répond pas à une logique
comptable. Il n'y a donc pas lieu de mettre les produits en face des charges
pour le calcul de la valeur ajoutée. C'est pourquoi, selon elle, les
indemnités d'assurance portées au compte « transfert de
charges » doivent être exclues du calcul de la valeur
ajoutée, puisque les « transferts de charges » ne figurent pas
dans les éléments à retenir pour la détermination
de la valeur ajoutée, énumérés à l'article
1647 B sexies du CGI109. En l'espèce, la
société requérante a perçu des indemnités
d'assurance venant compenser des charges de réparation supportées
à l'occasion d'un sinistre. Il s'agit donc de charges exceptionnelles,
comptabilisées au poste « autres achats et charges externes »
elles-mêmes déduites de la valeur ajoutée. Quant aux sommes
obtenues en remboursement, elles ont été portées au
crédit du compte « transferts de charges ». Or, ce n'est pas
parce que les sommes inscrites en transferts de charges sont exclues de la
valeur ajoutée que ces sommes ne contribuent pas à la production
de la valeur ajoutée. Tel n'est pas le cas des indemnités
d'assurance perçues par la société Eurial Poitouraine. Ces
sommes lui ont permis de neutraliser les charges qu'elle avait
supportées puis déduites de la valeur ajoutée. Ainsi,
elles ont concouru à la production de la valeur ajoutée de
l'entreprise, même si elles sont considérées comptablement
comme des transferts de charges. Par conséquent, les indemnités
d'assurance doivent être intégrées dans la production de
l'entreprise, ou alors retranchées des comptes de consommation en
provenance de tiers
106 TA de Nantes, 19 novembre 2002, n° 99-362, SA Eurial
Poitouraine.
107 TA de Pau, 4 mars 2003, n° 00-2199.
108 S. VERCLYTTE, « Quels sont les éléments
à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée, au sens
des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle ? »,
BDCF 11/06, n° 135, p. 46-57.
109 G. QUILLEVERE, « Comment se détermine le montant
de la valeur ajoutée servant au plafonnement de la taxe professionnelle
? », BDCF 5/03, n° 66, p. 30-32.
correspondant aux charges de réparation supportées,
afin de déterminer la valeur ajoutée produite par la
requérante110.
C'est une solution inédite sur laquelle la doctrine n'a
pas pris position de manière officielle à l'époque
où la décision a été rendue. Ainsi, cette solution
ne vaut qu'à condition que la charge transférée ait
été constatée dans un compte par nature déductible
de la valeur ajoutée111.
A l'inverse, le Tribunal administratif de
Versailles112 et celui de Strasbourg113 ont jugé
que les indemnités d'assurance n'entraient pas dans la production de la
société, alors que les charges, que ces indemnités avaient
pour objet de compenser, avaient été prises en compte par
l'intéressée au titre des consommations de biens et services en
provenance de tiers114.
B. La prise en compte, dans le calcul de la valeur
ajoutée, des sommes inscrites au compte « transferts de charges
» compensant des charges déduites, selon le juge de
cassation
Dans sa décision du 5 mai 2008, min. c/ SA Moteurs
Leroy Somer, le Conseil d'Etat a soutenu que « si les
indemnités d'assurances perçues par une entreprise pour compenser
un sinistre doivent être inscrites au crédit du compte 79 «
transfert de charges » et si ce compte ne pouvait être
rattaché à aucune des rubriques prévues pour le calcul de
la valeur ajoutée par l'article 1647 B sexies avant sa
modification par l'article 85 de la loi de finances pour 2006 du 30
décembre 2005, ces indemnités doivent, dans le cas et dans la
mesure où elles compensent des charges qui ont été
elles-mêmes déduites par cette entreprise pour la
détermination de sa valeur ajoutée au titre des consommations de
biens et services en provenance de tiers, être regardées, au sens
et pour l'application des dispositions de cet article et en particulier du 1 de
son II, comme une production de l'exercice au cours duquel elles ont
été perçues par le redevable »115.
110 Ibid.
111 Ibid.
112 TA de Versailles, 25 février 2004, n° 99-5104,
99-7777, Sté Manurhin Défense.
113 TA de Strasbourg, 14 janvier 2003, n° 00-5184,
Sté Protires.
114 S. VERCLYTTE, « Quels sont les éléments
à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée, au sens
des dispositions relatives au plafonnement de la taxe professionnelle ? »,
BDCF 11/06, n° 135, p. 46-57.
115 CE 5 mai 2008, n° 293913, min. c/ SA Moteurs Leroy
Somer, RDF, 26 juin 2008, n° 26, p. 26-27.
Ainsi, il s'est prononcé dans la présente
décision, ainsi que dans celle rendue le même jour, min. c/
SAS Polyrey, en faveur de l'inclusion dans la valeur ajoutée d'une
indemnité d'assurance, comptabilisée en « transferts de
charges », qui vient rembourser des charges effectivement
déduites116.
Le Conseil d'Etat était confronté ici à
la jurisprudence Sté Foncière Ariane117
précitée qui considère que l'article 1647 B
sexies du CGI fixe la liste limitative des catégories
d'éléments compris dans le calcul de la valeur ajoutée et
qu'il faut se référer au Plan comptable général
pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à une de
ces catégories. De plus, dans l'affaire min. c/ Sté
France-Manche, du 13 juillet 2007, la Haute Assemblée a jugé
que les indemnités d'assurance perçues en vue de compenser des
pertes de recettes d'exploitation et inscrites au crédit du compte
« transferts de charges » ne devaient pas être incluses dans le
calcul de la valeur ajoutée, à défaut de pouvoir
être rattachées à une des rubriques prévues par
l'article 1647 B sexies du CGI. Toutefois, il s'agissait
d'indemnités d'assurance pour perte de recettes ou d'exploitation.
Par conséquent, le juge fiscal a dû rechercher la
vraie nature des sommes qui sont inscrites au compte « transfert de
charges ». Dans les affaires min. c/ SA Moteurs Leroy Somer et
min. c/ SAS Polyrey, les indemnités en cause constituaient la
contrepartie de charges effectivement exposées par l'entreprise pour
réparer les conséquences des sinistres.
Lorsqu'il est question d'une refacturation de charges qui
avaient été déduites, les consommations de biens et
services en provenance de tiers se trouvent compensées et la valeur
ajoutée augmentée. Leur inclusion dans la valeur ajoutée
est donc justifiée118. Tel a été le cas
concernant des sommes facturées à des filiales pour la mise
à disposition de personnel et de matériaux par une
société mère (CE 4 août 2006, SA Colas
Sud-Ouest), ou concernant la refacturation par une banque
fédérale à ses caisses locales de prestations d'assistance
technique et de mise à disposition de salariés (CE 3 novembre
2006, Caisse fédérale du Crédit Mutuel
Océan).
116 N, « Plafonnement de la taxe professionnelle : prise
en compte dans la valeur ajoutée d'indemnité d'assurance
compensatrices d'un sinistre, comptabilisées en transferts de charges
», RDF, 26 juin 2008, n° 26, p. 30-31.
117 CE 4 août 2006, n° 267150, min. c/ Sté
foncière Ariane.
118 N, « Plafonnement de la taxe professionnelle : prise en
compte dans la valeur ajoutée d'indemnité d'assurance
compensatrices d'un sinistre, comptabilisées en transferts de charges
», RDF, 26 juin 2008, n° 26, p. 30-31.
Un pas supplémentaire a été franchi dans
les affaires min. c/ SA Moteurs Leroy Somer, et min. c/ SAS
Polyrey où le Conseil d'Etat relève expressément
qu'une indemnité d'assurance, qui compense des charges déduites
au titre des consommations de biens et services en provenance de tiers par
l'entreprise pour la détermination de sa valeur ajoutée, doit
être regardée, au sens et pour application de l'article 1647 B
sexies du CGI, comme une production de l'exercice, nonobstant la
circonstance que cette indemnité doit être inscrite au
crédit du compte 79 « transfert de charges »119.
Cette décision a donc anticipé les effets de l'intervention du
législateur en 2006 qui a précisé le sort des transferts
de charges.
Cette solution ne vaut pas pour une indemnité
d'assurances pour perte de recettes ou d'exploitation, puisqu'elle n'est qu'un
solde artificiellement reconstitué n'ayant donné lieu à la
déduction effective d'aucune charge (CE 13 juillet 2007, min. c/
Sté France-Manche). Ainsi, elle pose un problème de
symétrie entre le traitement des charges et celui des sommes
perçues pour les compenser120.
Le Conseil d'Etat a eu l'occasion de juger, dans les deux
arrêts du 3 septembre 2008, min. c/ Sté Euro-Sérum
et Sté Euro-Sérum, pour la détermination du
montant de la valeur ajoutée, il est indifférent d'ajouter
à la production de l'exercice une somme perçue en remboursement
de charges ou de retrancher les charges de la consommation des biens et de
services en provenance de tiers. Ainsi, dès lors que la
société n'avait pas compris dans la production de l'exercice les
refacturations de charges à des tiers, l'administration était
fondée à retrancher ces sommes des consommations de biens et
services en provenance de tiers121.
C. L'inclusion des transferts de charges dans le
calcul de la valeur ajoutée, depuis le 1er janvier 2007
L'article 85, II-5° de la loi de finances pour
2006122 a prévu qu'à compter du 1er janvier
2007 seraient inclus dans la production de l'exercice, pour calculer la
valeur ajoutée, « les transferts de charges [déduites de
la valeur ajoutée] ainsi que les transferts de charges de
119 P. COLLIN, « Pour la détermination de la valeur
ajoutée en vue du plafonnement de la TP, est-il
équivalent d'ajouter les transferts de charges à la production
de l'exercice ou de soustraire les charges correspondantes
des consommations de biens et services en provenance de tiers ?
», BDCF 12/08, n° 150, p. 36-40.
120 Ibid.
121 Ibid.
122 Cet article a été codifié au 2 du II
personnel mis à disposition d'une autre entreprise
»123. Ce texte vise les transferts dont les charges
correspondantes sont déductibles de la valeur ajoutée au titre
des consommations de biens et services en provenance de tiers124.
De plus, cet article semble traiter de la même
manière transferts de charges correspondant à de simples
écritures et transferts de charges correspondant à des produits
réels125.
Il en résulte la question de savoir si
l'indemnité vient ou non compenser une charge déductible de la
valeur ajoutée. Ainsi, par exemple, les indemnités d'assurances
venant compenser des charges d'exploitation, telles que celles
afférentes à la destruction partielle d'une immobilisation,
celles-ci devront être incluses dans la valeur ajoutée. Au
contraire, les indemnités venant compenser des charges exceptionnelles,
telles que la destruction totale d'une immobilisation, celles-ci resteront
exclues de la valeur ajoutée126.
123 Il s'agit des transferts de charges mentionnées aux
troisième et quatrième alinéas du 2 du II de l'article
1647 B sexies du CGI.
124 N, « Plafonnement de la taxe professionnelle : prise en
compte dans la valeur ajoutée d'indemnité d'assurance
compensatrices d'un sinistre, comptabilisées en transferts de charges
», RDF, 26 juin 2008, n° 26, p. 30-31.
125 L. CHATEL, « Plafonnement de la taxe professionnelle en
fonction de la valeur ajoutée : comment délimiter les
catégories énumérées par l'article 1647 B sexies du
CGI ? », BGFE 6/06, p. 23-27.
126 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour
de la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
Chapitre 3 : Le mécanisme du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée
Tous les redevables de la taxe professionnelle peuvent
bénéficier du plafonnement (Section 1), sous réserve de
suivre une procédure spécifique (Section 2), à l'exclusion
de ceux qui sont uniquement assujettis à la cotisation
minimum127. En effet, la cotisation de taxe professionnelle du
principal établissement d'une entreprise ne peut être
inférieure à une base minimum fixée par la commune
d'implantation de cet établissement à partir de la taxe
d'habitation de référence acquittée l'année
précédente128. Toutefois, lorsqu'une entreprise ne se
trouve pas soumise à cette cotisation minimum, rien ne s'oppose à
ce que le dégrèvement accordé au titre du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée ramène l'imposition du redevable en
dessous du montant de la cotisation minimum qui aurait pu être
applicable129.
De plus, le principal établissement d'une entreprise
dont le chiffre d'affaires annuel est supérieur à 7 600 000
€ hors taxes est assujetti à une cotisation minimale de taxe
professionnelle égale à 1,5 % de la valeur ajoutée
produite. Cette cotisation minimale sur la valeur ajoutée n'est
toutefois due que si son montant excède celui de la taxe professionnelle
que le contribuable doit payer. Elle correspond alors à la
différence entre 1,5 % de la valeur ajoutée et le montant de la
taxe professionnelle due par la société130.
Section 1 : Le montant à déduire : la
cotisation de substitution
Le plafonnement en fonction de la taxe professionnelle
correspond à la différence entre une cotisation de
référence (I) et un pourcentage de la valeur ajoutée,
initialement calculée. Les redevables, qui en font la demande, se
verront rembourser le montant de la taxe
127 Lorsqu'un contribuable, assujetti à la cotisation
minimum au lieu de son principal établissement, est redevable d'une
cotisation de taxe professionnelle pour d'autres établissements, il doit
soustraire la cotisation minimum due au titre de l'établissement
principal du montant total des cotisations se rapportant à l'ensemble
des établissements pour le calcul du plafonnement en fonction de la
valeur ajoutée. Cf. « La pratique de la taxe professionnelle
», éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006,
n° 34028.
128 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34028.
129 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34029.
130 « Mémento fiscal 2009 », coll.
Mémento pratique, éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n°
3917.
professionnelle qui dépasse le seuil de plafonnement (II)
par l'administration fiscale (III). Dans ce cas, un dégrèvement
est alors accordé par les services fiscaux.
I. La cotisation de taxe professionnelle susceptible
d'être plafonnée
Le plafonnement de taxe professionnelle s'apprécie au
niveau de l'entreprise, pour l'ensemble de ses établissements. La
cotisation de taxe professionnelle susceptible d'être plafonnée
constitue la somme des cotisations réelles de chaque
établissement établies au titre de l'année d'imposition au
profit de chaque collectivité territoriale et d'EPCI doté d'une
fiscalité propre (A), diminuée de l'ensemble des
réductions et dégrèvements dont le redevable
bénéficie (B)
A. Un nouveau dispositif mis en place depuis le
1er janvier 2007 : un plafonnement réel pour les
entreprises
Avant l'adoption du nouveau dispositif institué par
l'article 85 de la loi de finances pour 2006, entrée en vigueur le
1er janvier 2007, le calcul de la cotisation admissible au
plafonnement en fonction de la valeur ajoutée était
calculé au moyen d'un « taux fictif », celui de l'année
1995. Ainsi, par exemple, pour 2005, la cotisation de taxe professionnelle
obtenue était multipliée par le taux de 1995. Ce résultat
était ensuite soustrait au pourcentage de la valeur ajoutée pour
obtenir le montant du dégrèvement accordé au titre du
plafonnement. Le dégrèvement ne pouvait donc pas être
réel avec un tel système. Il était fondé sur une
cotisation de taxe professionnelle dont le montant était
sous-évalué131.
Ainsi, la cotisation de taxe professionnelle réellement
acquittée, au titre de 2005, pour reprendre l'exemple
précité, pouvait être nettement supérieure à
la cotisation fictive calculée. Certaines entreprises supportaient alors
une charge de taxe professionnelle, parfois bien supérieure à
3,5% de leur valeur ajoutée, sans pour autant pouvoir
bénéficier du dégrèvement.
A présent, le plafonnement de la taxe professionnelle
à 3,5% ou 1,5% de la valeur ajoutée est réel puisqu'il
est calculé sur la base du taux de l'année d'imposition, et donc
d'une
131 J. BOURDIN, « Les Finances Communales », coll.
Finance, Economica, 4e éd., 2008, p. 145 et 146.
cotisation de taxe professionnelle réellement
acquittée par l'entreprise, indépendamment des taux de taxe
professionnelle appliqués par les collectivités territoriales ou
les EPCI dotés d'une fiscalité propre132. En effet,
chaque cotisation est déterminée en effectuant le produit entre
les bases de taxe professionnelle imposées au profit de chaque
collectivité territoriale ou EPCI doté d'une fiscalité
propre au titre de l'année d'imposition, et le taux de l'année
d'imposition voté par chaque collectivité territoriale ou EPCI
doté d'une fiscalité propre133.
B. La diminution du montant de cotisation de taxe
professionnelle des dégrèvements ou des réductions dont
bénéficient le redevable
Le dégrèvement en faveur des entreprises
disposant de véhicules routiers ou d'autocars ou de bateaux prévu
à l'article 1647 C et le crédit d'impôt en faveur des
entreprises implantées dans des zones d'emploi en grande
difficulté prévu à l'article 1647 C sexies du CGI
dont les cotisations de taxe professionnelle peuvent faire l'objet, n'entrent
pas dans le calcul de la cotisation susceptible d'être
plafonnée134. De plus, le plafonnement ne s'applique pas aux
taxes visées aux articles 1600 à 1601 B - à savoir la taxe
pour frais de chambres de commerce et d'industrie et la taxe pour frais de
chambre de métiers et de l'artisanat, ni aux prélèvements
opérés par l'Etat sur ces taxes en application de l'article 1641
- à savoir les frais de dégrèvement, de non-valeurs,
d'assiette et de recouvrement135.
En revanche, la cotisation à plafonner est
majorée du montant de la cotisation nationale de
péréquation prévue à l'article 1648 D du CGI et des
taxes spéciales d'équipements prévues aux articles
prévues aux articles 1599 quinquies, 1607 bis, 1607
ter, 1608, 1609 à 1609 F du code précité136.
Les frais de la fiscalité locale perçus au profit de l'Etat sont
également pris en compte137.
132 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34013.
133 Ibid.
134 Cf. Article 1647 B sexies - I Bis, alinéa 1-
du CGI.
135 Cf. Article 1647 B sexies - I Bis, alinéa 2 -
du CGI.
136 Par exemple, la taxe spéciale d'équipement
perçue pour la région d'Ile-de-France prévue à
l'article 1599 quinquies ou la taxe spéciale
d'équipement perçue au profit des établissements publics
fonciers prévue aux articles 1607 bis et 1607 ter du CGI. Article 1647 B
sexies - I Bis, alinéa 4 - du CGI.
137 « Mémento fiscal 2009 », coll.
Mémento pratique, éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n°
3923.
II. Le dégrèvement susceptible d'être
accordé au titre du plafonnement de taxe
professionnelle
Le dégrèvement accordé au titre du
plafonnement en fonction de la valeur ajoutée n'est consenti qu'à
la condition que la cotisation de taxe professionnelle payée soit
supérieure au plafond de la valeur ajoutée.
Ce plafonnement correspond à la différence entre
la cotisation de taxe professionnelle de l'entreprise au titre de
l'année d'imposition et 3,5 % de la valeur ajoutée. Par
exception, le taux de plafonnement est fixé à 1,5 % pour les
entreprises qui effectuent à titre principal des travaux agricoles,
ruraux et forestiers138 pour le compte d'autrui139. En
effet, l'entreprise de travaux agricoles, ruraux ou forestiers ne peut
bénéficier de ce taux qu'à la condition qu'elle
réalise de tels travaux de manière exclusive, c'est-à-dire
plus de 50% du chiffre d'affaires total. L'administration admet le
bénéfice de la mesure lorsque les travaux exclus
représentent moins de 50% du chiffre d'affaires total
mixte140.
Le montant total accordé à un redevable au titre
du plafonnement de taxe professionnelle, pour sa part prise en charge par
l'Etat, cumulé avec le montant du dégrèvement pour
investissements nouveaux, est limité à 76 225 000
euros141.
Par ailleurs, le dégrèvement accordé au
titre d'une année est réduit, le cas échéant, de la
part de dégrèvement que l'État ne prend pas en charge en
application de l'article 1647 B sexies-V du CGI. En effet, la part du
plafonnement de la valeur ajoutée correspondant à la
participation des collectivités territoriales et leurs EPCI n'est pas
plafonnée142.
138 Cf. Annexe III art. 41-0 A du CGI, dans dans «
Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento pratique, éd.
Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3923.
139 Cf. Inst. 6 E-3-03 ; Inst. 6 E-2-05, dans dans «
Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento pratique, éd.
Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3923.
140 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34606-2.
141 Cf. Article 1647 B sexies - V du CGI.
142 Cf. BO 6 E-3-07, n° 13, dans « Plafonnement des
cotisations en fonction de la valeur ajoutée (CGI, art. 1647 B
sexies ; BO 6-E-3-07) », source <
http://doc.impots.gouv.fr/aida/Apw.fcgi?FI
LE=I ndex. html>
Le dégrèvement résultant du plafonnement
en fonction de la valeur ajoutée est ordonnancé dans les six mois
suivant celui du dépôt de la demande143. Il ouvre droit
au paiement d'intérêts moratoires s'il est prononcé par
l'administration au-delà du délai de six mois, ou s'il fait suite
à une instance contentieuse144.
En principe, le paiement de la taxe professionnelle se fait
après la mise en recouvrement du rôle. Dans ce cas, les redevables
bénéficient d'une procédure au titre de l'article 1679
quinquies du CGI145.
Toutefois, lorsque la cotisation de taxe professionnelle et de
taxes annexes de l'année précédente, réduite du
plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, a été au
moins de 3000 €, les redevables doivent verser un acompte, avant le
1er avril de l'année courante146. Cet acompte
(égal à 50% du montant de la cotisation de l'année
précédente) viendra s'imputer sur le montant de l'impôt
finalement dû. Le chiffre qui figure sur l'avis d'acompte tient compte du
dégrèvement correspondant au plafonnement, s'il a
déjà été ordonnancé. Si tel n'est pas le
cas, les entreprises qui avaient demandé le bénéfice du
plafonnement peuvent (sous leur responsabilité) déduire la
moitié du dégrèvement attendu à ce titre du montant
des acomptes qui leur sont réclamés. Cette déduction
s'impute, en principe, sur l'acompte dû pour l'établissement
principal147.
Les entreprises ont également la faculté d'opter
pour le paiement de la taxe professionnelle par prélèvements
mensuels. Ce système comporte dix prélèvements
automatiques dont le montant est égal au dixième des taxes mises
en recouvrement au titre de l'année précédente,
diminuées du montant du dégrèvement accordé au
titre du plafonnement pour cette même année. Lors de la mise en
recouvrement du rôle, la situation du redevable fait l'objet d'une
régularisation148.
143 Cf. Article 1647 B sexies - IV du CGI.
144 CE 20 octobre 2000 n° 207798 et 207800, RJF 1/01 n°
111, dans « Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento
pratique, éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3921.
145 V. infra.
146 En cas de pluralité d'établissements, un
acompte est dû pour chacune des cotisations excédant cette
limite.
147 « Mémento fiscal 2009 », coll.
Mémento pratique, éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n°
3926.
148 Ibid., n° 3938.
Section 2 : La procédure pour
bénéficier du plafonnement de taxe professionnelle
Les redevables de la taxe professionnelle disposent de deux
moyens pour se prévaloir du bénéfice du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée (I). Cependant, la garantie contre le
changement de doctrine administrative, instituée par l'article L. 80 A
du LPF, n'est pas opposable en matière de plafonnement de taxe
professionnelle (II).
I. Deux possibilités offertes aux redevables pour
bénéficier du plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée
Le dégrèvement n'est accordé que sur
demande du redevable, qu'il y ait ou non plusieurs établissements, au
titre de l'article 1647 B sexies du CGI. Il peut toutefois être
imputé par anticipation sur le solde de la cotisation de l'année,
au titre de l'article 1679 quinquies du même code (A). Il s'agit
de deux procédures bien distinctes l'une de l'autre (B).
A. La demande de plafonnement et la déclaration
d'imputation
1. La demande de plafonnement au titre de l'article 1647
B sexies du CGI
Tous les redevables de la taxe professionnelle peuvent, en
principe, bénéficier du plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée, sur demande présentée au service des impôts
dont dépend le principal établissement de l'entreprise
(auprès duquel est souscrite la déclaration annuelle de
résultats)149. Cette demande doit être, en principe,
formulée sur une déclaration spéciale n° 1327
TP150, comportant le détail du calcul de la valeur
ajoutée. Les entreprises vont donc devoir reporter sur ce formulaire
fiscal le montant de chacun des postes ainsi identifiés dans le plan
comptable général qui figure dans sa comptabilité, pour
calculer la valeur ajoutée à retenir pour le plafonnement.
149 Cf. Article 1647 B sexies du CGI.
150 Cf. Annexe 1. Notons que les redevables soumis au
régime des micro-entreprises doivent effectuer leur demande sur la
déclaration n° 1327-S TP ; et les redevables concernés par
la limite de 76 225 000 euros doivent remplir la déclaration n°
1327-P-TP.
Selon le Conseil d'Etat, une demande de plafonnement de taxe
professionnelle a le caractère d'une réclamation dont la
recevabilité doit être appréciée au regard des
règles du Livre de procédure fiscale (ci-après « LPF
»)151. Ainsi, cette demande doit être effectuée
avant l'expiration du délai de réclamation prévu par
l'article R. 196-2 du LPF pour les impôts directs locaux152,
soit avant le 31 décembre de l'année suivant la mise en
recouvrement.
Un « évènement » au sens des
dispositions du b) de l'article R 196-2 du LPF permet l'ouverture d'un nouveau
le délai de réclamation pour le plafonnement de la taxe
professionnelle en fonction de la valeur ajoutée. Le Conseil d'Etat a
refusé de qualifier l'approbation des comptes de l'exercice permettant
de déterminer la valeur ajoutée
d' « évènement » au sens de cet
article (CE 20 octobre 2004, SA Montaigne-Expansion ; Sté
d'équipement du terminal de Normandie (SETN))153. En
effet, les évènements sont exclusivement, au sens du LPF, ceux
qui sont de nature à exercer une influence sur le bien- fondé de
l'imposition, soit dans son principe, soit dans son montant (CE 23 juin 1986
n° 44396 Bellamy)154. Or, l'approbation des comptes
n'a pas d'incidence sur le bien-fondé de l'imposition. La valeur
ajoutée produite au cours d'un exercice clos, qui sert de fondement
à la demande de plafonnement de taxe professionnelle, est effectivement
connue indépendamment de la date d'approbation des comptes. Sinon cela
reviendrait à admettre que le contribuable a la faculté de
choisir le moment pour déclencher le délai de réclamation
prévu au b) de l'article R 196-2. Il maîtriserait ainsi
l'évènement.
2. La déclaration d'imputation en vertu de l'article
1679 quinquies du CGI
Les redevables qui bénéficient du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée peuvent, sous leur
responsabilité, réduire, par anticipation, le montant du solde de
taxe professionnelle exigible au 1er décembre du montant
du dégrèvement auquel ils estiment
151 CE 10 septembre 1997 n° 146864, SCTT, dans
L. VALLEE, « L'approbation tardive des comptes de l'exercice
constitue-t-elle un évènement ouvrant un nouveau délai
pour demander le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la
valeur ajoutée ? », BDCF 1/05, n° 9, p. 33-35.
152 CE 13 décembre 2002 n° 228204, Sté GC
plastic, dans J-L. PIERRE, « La non-opposabilité à
l'administration fiscale de sa doctrine en matière de plafonnement de la
taxe professionnelle », RDF 03/08, n° 10, p. 40-41.
153 L. VALLEE, « L'approbation tardive des comptes de
l'exercice constitue-t-elle un évènement ouvrant un nouveau
délai pour demander le plafonnement de la taxe professionnelle en
fonction de la valeur ajoutée ? », BDCF 1/05, n° 9, p.
33-35.
154 La jurisprudence est assez stricte concernant la notion
d'évènement : par exemple, le lien avec l'imposition
contestée n'existe pas si une décision juridictionnelle admettant
un déficit pour une année est en cause, pour la demande de report
de ce déficit sur les années suivantes (CE 18 novembre 1987
n° 80191).
avoir droit, au titre de la même année. Ils
doivent ainsi remettre au comptable du Trésor chargé du
recouvrement de la taxe professionnelle une déclaration datée et
signée155. Celle- ci doit présenter le mode de calcul
de l'imputation sur le solde de la taxe professionnelle du montant du
dégrèvement auquel le contribuable estime avoir droit au titre de
l'année d'imposition. Néanmoins, une majoration de 10 % est
prévue, si le redevable a réduit le solde de la cotisation de
taxe professionnelle d'un montant supérieur au dégrèvement
auquel il a réellement droit. En revanche, concernant les redevables qui
clôturent leur exercice au 31 décembre, ils ne seront pas
pénalisés s'ils calculent le montant attendu du
dégrèvement par référence à celui qu'ils ont
eu pour l'année précédente. En effet, dans ce cas, le
calcul étant par nature incertain, la majoration de 10 % ne s'appliquera
in fine qu'à la fraction du solde non réglée qui
excède le montant accordé l'année
précédente.
B. Le bénéfice du dégrèvement
par deux procédures distinctes
La demande de plafonnement et la déclaration
d'imputation constituent deux procédures
distinctes : elles répondent à des logiques
différentes et interviennent à deux moments où
l'état du savoir du redevable concernant sa cotisation de taxe
professionnelle n'est pas la même. En effet, l'article 1679 quinquies du
CGI permet au contribuable d'évaluer à titre provisoire les
effets du plafonnement qui ne seront définitivement connus qu'au terme
de l'année, et de réduire dans cette mesure le versement qu'il
doit faire au comptable du solde de sa taxe professionnelle, alors que
l'article 1647 B sexies du CGI demande au contribuable de fournir le montant de
la valeur ajoutée connue.
Le Conseil d'Etat a eu l'occasion de juger, dans son
arrêt ministre c/ Société GC Plastic du 13
décembre 2002, qu'une lettre du redevable de la taxe professionnelle,
expliquant au comptable qu'il réduit le montant du solde de sa taxe du
montant du dégrèvement attendu du plafonnement de cette taxe, ne
tient pas lieu de demande de plafonnement qui doit être produite dans le
délai de réclamation. En effet, la déclaration
d'imputation ne tient pas lieu de demande de plafonnement, et est
dépourvue de portée si le contribuable n'adresse pas à
l'administration une demande de plafonnement. Les deux procédures sont
donc liées156.
155 Cf. Article 1679 quinquies du CGI.
156 L. VALLEE, « Selon quelle procédure le redevable
de la taxe professionnelle peut-il bénéficier du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée prévu à l'article 1647 B
sexies ? », BDCF 3/03, n° 38, p. 40-42.
Le Conseil d'Etat aurait, pourtant, pu adopter une solution
plus libérale : lorsqu'une entreprise annonce sa volonté de
limiter le montant du solde de la taxe professionnelle, on peut penser qu'elle
envisage de demander le plafonnement de sa taxe en fonction de la valeur
ajoutée. Or, il a refusé de lier ces deux actes : il souhaite
maintenir la distinction entre les deux étapes dans la procédure
de plafonnement, qui ont été expressément prévues
par le législateur. Cette solution se borne donc à respecter
strictement les textes157.
II. L'inopposabilité de la doctrine administrative
en matière de plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée, sur le fondement de
l'article L 80 A du LPF
La demande de plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée étant une réclamation contentieuse, l'avis de
rejet total ou partiel, que l'administration fiscale peut adresser au
redevable, doit être motivé.
En principe, tout contribuable a la possibilité de
limiter le pouvoir de redressement de l'administration fiscale, notamment en
vertu de l'article L.80 A du LPF (auquel se réfère l'article L.
80 B) qui offre la faculté de s'opposer à la doctrine
administrative. Cet article n'est toutefois pas invocable en matière de
plafonnement de la taxe professionnelle(A), ce qui a été
entériné par la jurisprudence (B).
A. L'opposition du contribuable à la
doctrine administrative en vertu de l'article L.80 A du LPF : une
faculté inapplicable en matière de plafonnement de taxe
professionnelle
L'alinéa premier de l'article L.80 A du LPF ne permet
pas de procéder à un « rehaussement d'impositions
antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration
est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne
foi du texte fiscal et s'il est démontré que
l'interprétation sur laquelle est fondée la première
décision a été, à l'époque, formellement
admise par l'administration. », et l'alinéa second de celui-ci
édicte que le service « ne peut poursuivre aucun rehaussement
» dans la situation où le contribuable a « appliqué un
texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait
connaître par
157 R. BEAUVAIS, « Demande de plafonnement et
déclaration d'imputation », BGFE 2/03, p. 15.
ses instructions ou circulaires publiées ». Ces deux
alinéas peuvent valablement être invoqués seulement en cas
de rehaussement d'impositions initiales.
La réclamation tendant au plafonnement de la taxe
professionnelle en fonction de la valeur ajoutée permet au contribuable
d'obtenir un dégrèvement de sa cotisation de taxe
professionnelle. Ainsi, elle ne tend pas à critiquer un rehaussement
d'impositions antérieures au sens du premier alinéa de l'article
L. 80 A du LPF. En effet, lorsque l'administration refuse de faire droit
à une demande de plafonnement, elle ne procède à aucun
rehaussement. L'alinéa premier de l'article L. 80 A du LPF n'est donc
pas applicable.
Par conséquent, le juge fiscal doit vérifier
d'office que cette condition est remplie, de même qu'il doit examiner
d'office si la condition de l'antériorité de la doctrine est
remplie158.
De plus, la réclamation tendant au
bénéfice du plafonnement ne peut être regardée comme
manifestant que le redevable a appliqué un texte fiscal selon
l'interprétation que l'administration fiscale avait fait
connaître. Le second alinéa de l'article L. 80 A du LPF n'est donc
pas davantage applicable.
Les textes de l'administration relatifs au plafonnement de la
taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée du redevable ne
peuvent donc être invoqués sur le fondement de l'article L.80 A du
LPF.
B. L'inopposabilité de la doctrine administrative
confirmée par le juge fiscal
Dans l'affaire Société Arcelor France,
la société requérante demandait le plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée de ses cotisations de taxe professionnelle
au titre de l'année 1992. Pour cette année, elle soutenait que la
valeur ajoutée devant être prise en compte était nulle, en
se fondant sur les termes d'une instruction de la Direction
générale des impôts selon lesquels en cas de changement
d'exploitant à une date autre qu'au 1er janvier, la valeur
ajoutée ajustée du nouvel établissement est
additionnée à la valeur ajoutée produite dans les
établissements déjà existants. Le Conseil d'Etat
décide que la société requérante « ne peut se
prévaloir de l'instruction administrative du 8 février 1980
dès lors que l'imposition qu'elle conteste n'a fait l'objet d'aucun
rehaussement »159.
158 L. VALLEE, « La non-opposabilité à
l'administration fiscale de sa doctrine en matière de plafonnement de la
taxe professionnelle », Revue de droit fiscal 03/08, n° 10, p.
39-40.
159 Ibid.
La solution retenue par le Conseil d'Etat dans l'arrêt
Société Arcelor France semble s'appliquer également
lorsque le contribuable adresse au comptable public une déclaration afin
de réduire sa cotisation de taxe professionnelle, par anticipation, du
montant du dégrèvement attendu du plafonnement de celle-ci en
fonction de la valeur ajoutée, au titre de l'article 1679
quinquies du CG I160.
De plus, le Conseil d'Etat a reconnu, dans l'affaire
ministre c/ SNCF, du 29 décembre 2000, que l'administration a
formellement procédé à une appréciation de la
situation de fait de l'intéressé, lorsqu'elle a statué sur
une précédente réclamation relative au plafonnement de
taxe professionnelle. Cependant, il constate que cette appréciation
n'est pas opposable à l'administration, puisque le mécanisme du
plafonnement, représentant un dégrèvement sur
réclamation, n'implique aucun rehaussement d'imposition
antérieure au sens du premier alinéa de l'article L 80 A du LPF
auquel se réfère l'article L 80 B du LPF, en cas de refus de
dégrèvement. Ainsi, le juge fiscal a refusé de faire
application de l'article L 80 B du LPF161.
Par ailleurs, lorsque le contribuable, en invoquant une
doctrine administrative, demande ultérieurement la restitution d'une
imposition qu'il a acquittée, l'inapplicabilité de l'article L.
80 A est un moyen d'ordre public162. Ainsi, elle peut être
invoquée pour la première fois devant le juge de cassation.
Aussi, lorsque le juge du fond a omis de soulever un moyen d'ordre public,
celui-ci peut être soulevé d'office par le Conseil d'Etat en
cassation163.
160 J-L. PIERRE, « La non-opposabilité à
l'administration fiscale de sa doctrine en matière de plafonnement de la
taxe professionnelle », Revue de droit fiscal 03/08, n° 10, p.
40-41.
161 J. COURTIAL, « Traitement des subventions d'exploitation
pour le calcul du plafonnement de la taxe professionnelle », BDCF 3/01,
n° 40, p. 25-27.
162 CE 31 mars 1993 n° 115511, Clinique Lafourcade,
dans J-L. PIERRE, « La non-opposabilité à l'administration
fiscale de sa doctrine en matière de plafonnement de la taxe
professionnelle », RDF 03/08, n° 10, p. 40-41.
163 CE 26 juillet 1991 n° 115494, Double V-Miss D,
dans J-L. PIERRE, « La non-opposabilité à l'administration
fiscale de sa doctrine en matière de plafonnement de la taxe
professionnelle », RDF 03/08, n° 10, p. 40-41.
Chapitre 4 : Les conséquences controversées
du plafonnement de taxe professionnelle
Ainsi que l'a démontré le rapport du 8 juillet
2004 rendu par la Commission Fouquet, aujourd'hui plus de la moitié des
cotisations de taxe professionnelle sont calculées en fonction de la
valeur ajoutée des entreprises. En pratique, celle-ci constitue donc la
principale assiette de la taxe professionnelle. En effet, avec l'accroissement
de la pression fiscale exercée par les collectivités
territoriales, le nombre d'entreprises plafonnées tend
mécaniquement à augmenter.
La valeur ajoutée a pris considérablement de
l'importance tant au niveau des entreprises qu'au niveau de l'administration.
Par conséquent, les entreprises développent une politique
d'optimisation fiscale (Section 1).
Par ailleurs, depuis 2007, le coût du plafonnement n'est
plus exclusivement pris en charge par l'Etat. Ce coût est pour partie
pris en charge par les collectivités territoriales
bénéficiaires de la taxe professionnelle. Ainsi, le plafonnement
de taxe professionnelle tend à freiner les dépenses des
collectivités territoriales (Section 2).
Section 1 : La politique d'optimisation fiscale des
entreprises
Les entreprises recherchent les moyens de diminuer la valeur
ajoutée qu'elles produisent sur le territoire français dans le
but de réduire le montant de la taxe professionnelle qu'elles auront
à acquitter. En effet, la valeur ajoutée constitue la base du
plafonnement de la taxe professionnelle. Ainsi, plus son montant est
réduit, plus les cotisations de taxe professionnelle seront
allégées. C'est pourquoi, les entreprises développent des
stratégies d'évitement (I), phénomène devant lequel
l'administration reste relativement impuissante par manque de moyens mis
à sa disposition (II).
I. Le développement de stratégies
d'évitement par les entreprises dans le but de baisser le plafond
applicable à l'impôt restant dû en France
Afin de réduire le montant de leur valeur
ajoutée, les entreprises développent des stratégies
d'évitement qui peuvent être regroupées en deux
catégories, à savoir la première, la plus radicale
consistant à délocaliser les unités de production (A), et
la seconde se résumant à rationaliser la répartition des
activités entre les différentes entités présentes
en France (B). Toutefois, le législateur est intervenu pour mettre fin
à l'une des principales techniques d'optimisation de la valeur
ajoutée, qui consistait pour les entreprises à louer les biens
dont elles avaient la disposition plutôt que de les acquérir, les
loyers correspondants venant en déduction de la valeur ajoutée.
Ainsi, les lois de finances pour 1997 et pour 1999 ont exclu du calcul de la
valeur ajoutée, définie à l'article 1647 B sexies
du CGI, les loyers versés à l'intérieur d'un
groupe164 et les loyers afférents à des biens pris en
location pour plus de six mois.
A. La délocalisation des unités de production
: un moyen d'expatrier la valeur ajoutée
La délocalisation d'activités
opérationnelles est la première technique d'optimisation fiscale
la plus médiatisée mais elle ne constitue pas la plus
représentative. En effet, le déplacement d'une unité de
production occasionne des coûts élevés. En revanche, les
opérations consistant à implanter les activités nouvelles
des groupes à l'étranger plutôt qu'en France, ou à
délocaliser seulement certaines activités à forte valeur
ajoutée (sièges sociaux, holdings, etc.) sont les plus
fréquentes. Ce type d'opération, ayant des incidences en
matière d'impôt sur les sociétés et de
prélèvements sociaux, est particulièrement
dévastateur pour les finances publiques en matière de taxe
professionnelle165. En effet, l'expatriation des activités
à forte valeur ajoutée occasionne mathématiquement une
diminution du plafond applicable à l'impôt restant dû en
France. Ainsi, le ratio « taxe professionnelle avant plafonnement/ Valeur
ajoutée » augmente, ce qui signifie qu'après la prise en
compte du plafonnement, le produit de l'impôt diminue, alors que le plus
souvent
164 Par ailleurs, la déduction des loyers des biens pris
en crédit-bail était déjà exclue depuis la loi du
10 janvier 1980.
165 Y . BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour
de la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.
les éléments physiques qui servent d'assiette
à la taxe professionnelle n'ont pas été
délocalisés166.
B. La rationalisation de la répartition des
activités entre les différentes entités situées en
France
Une seconde technique d'optimisation s'est
développée notamment au sein des secteurs industriels utilisant
des équipements lourds. Elle consiste à rationnaliser la
répartition des activités entre les différentes
entités situées en France afin de localiser les bases taxables
(EBM) dans des structures juridiques différentes de celles qui abritent
les activités à forte valeur ajoutée167.
Supposons qu'une société pharmaceutique exerce
deux activités complémentaires : d'une part, une activité
de production nécessitant des équipements, des outillages et des
installations coûteux, occasionnant une cotisation de taxe
professionnelle d'1 M d'euros par an avant plafonnement et dégageant une
valeur ajoutée de 20 M d'euros par an, soit un plafond de 700 000 euros
; d'autre part, une activité de recherche et développement
à forte valeur ajoutée, nécessitant peu
d'équipements, pour laquelle elle acquitte 500 000 euros de taxe
professionnelle par an alors que la valeur ajoutée correspondante est de
30 M d'euros, soit un plafond de 1,05 M d'euros. Au total, la valeur
ajoutée est de 50 M d'euros, et le plafond est de 1,75 M d'euros. La
société n'est donc pas plafonnée ni soumise à la
cotisation minimale assise sur la valeur ajoutée si elle exerce les deux
activités. En revanche, elle bénéficiera d'un
dégrèvement de 300 000 euros au titre du plafonnement si elle
conserve l'activité de production et confie l'activité de
recherche et développement à une filiale à 100 %. Les
mêmes bases taxables donnent donc lieu à une imposition de 1,5 M
d'euros par an dans le premier cas (1M d'euros + 0,5 M d'euros), et de
seulement 1,2 M d'euros par an dans le second (0,7 M d'euros + 0,5 M
d'euros)168.
Aussi, la mise à disposition de personnel, la
centralisation de certaines activités, et
plus généralement les choix de gestion effectués par
les groupes de sociétés quant à leur organisation
interne ne sont pas neutres sur la répartition de la valeur
ajoutée, ni sur la
166 Ibid.
167 Ibid.
168 Ibid.
cotisation minimale assise sur la valeur ajoutée et sur
le montant du dégrèvement global que le groupe pourra obtenir au
titre de l'article 1647 B sexies du CGI.
Toutefois, l'optimisation de la valeur ajoutée ne
concerne pas exclusivement les groupes. Par exemple, en choisissant d'avoir
recours à l'intérim plutôt qu'à l'embauche, une
société plafonnée ou soumise à la cotisation
minimale assise sur la valeur ajoutée réduit sa valeur
ajoutée, et donc l'imposition qu'elle aura à acquitter in fine.
En réalité, il s'agit d'un simple transfert puisque les salaires
entrent dans la valeur ajoutée de l'entreprise d'intérim.
Cependant, ce transfert n'est pas neutre du point de vue des finances
publiques, étant donné que les entreprises d'intérim de
taille moyenne ou petite, dont l'activité nécessité peu
d'équipements et biens mobiliers, ne paient quasiment pas de taxe
professionnelle169.
II. Les moyens limités de l'administration fiscale
face aux manoeuvres
d'optimisation fiscale effectuées par les
entreprises
Les pouvoirs de l'administration restent limités face
au phénomène d'évaporation fiscale. La loi de finances
pour 2004 a étendu le champ d'application de l'article 64 du LPF relatif
à la procédure de répression des abus de droit, à
la taxe professionnelle.
Cependant, cette procédure ne peut être
appliquée aux stratégies d'expatriation de valeur ajoutée
que dans les cas, probablement rares en pratique, où l'administration
est juridiquement en mesure de d'établir que le transfert
d'activité vers l'étranger est fictif ou s'assimile à un
montage purement artificiel tombant sous le coup de ces
dispositions170.
Quant à la contestation des prix de transfert sur le
terrain de l'article 57 du CGI ou de l'acte anormal de gestion constituant
l'une des armes de prédilection de l'administration fiscale
française, elle n'est susceptible de compenser la perte de ressources
fiscales que partiellement, et seulement lorsque la délocalisation n'a
pas été suivie de la mise en place d'une politique de
refacturation appropriée entre les entités du
groupe171.
Mis à part l'exception précitée,
l'administration fiscale n'a presque aucun moyen de s'opposer aux
restructurations et aux choix de gestion ayant des conséquences sur le
volume de la valeur ajoutée.
169 Ibid.
170 Ibid.
171 Ibid.
En effet, l'externalisation de certaines fonctions ou la
spécialisation des sociétés d'un même groupe dans
des activités objectivement distinctes, nécessitant des
personnels et des moyens matériels différents, peut difficilement
être regardée comme abusive au sens de l'article L64 du LPF. En
revanche, il pourrait en aller différemment si la répartition de
la valeur ajoutée entre les diverses sociétés d'un
même groupe était purement artificielle172.
Quant à la théorie de l'acte anormal de gestion,
elle n'est pas d'un grand secours, mis à part dans le cas des
délocalisations vers l'étranger.
Section 2 : Le plafonnement de cotisation de taxe
professionnelle : un instrument de freinage des dépenses
locales
La liberté de vote des taux des impôts directs
locaux, instituée par la loi du 10 janvier 1980, a été au
fur et à mesure accompagnée de limitations dans le but
d'éviter des transferts trop importants entre les catégories de
redevables173.
Les taux votés par les communes sont soumis à un
plafonnement et leurs variations doivent respecter un certain nombre de
contraintes, ce qui ne laisse aux communes, en réalité, qu'une
marge de manoeuvre réduite174. Malgré cette
liberté surveillée dont elles disposent, les communes fixent le
taux d'imposition de taxe professionnelle chaque année, ce qui peut
avoir des répercussions sur le dégrèvement accordé
au titre du plafonnement.
Ainsi, la loi de finances pour 2006 a institué de
nouvelles modalités de répartition du coût du
dégrèvement accordé au titre du plafonnement en fonction
de la valeur ajoutée entre l'Etat et les collectivités
territoriales, à compter du 1er janvier 2007 (I). La
participation des collectivités territoriales a entraîné la
limitation de leurs dépenses locales (II).
I. Les modalités de répartition de la
charge du dégrèvement entre l'Etat et les collectivités
territoriales
Le législateur de 2006 a souhaité que les
collectivités territoriales et leurs EPCI prennent en charge la
différence entre le montant total du plafonnement et la part prise en
charge par
172 Ibid.
173 Rapport de la Commission de réforme de la taxe
professionnelle, présidée par O. FOUQUET, 2004, source :
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/044000333/0000.pdf>,
p. 66.
174 Toutefois, des cas restreints de majoration ou de
réduction exceptionnelle de taux ont été prévus par
la loi.
l'Etat (A), afin de les responsabiliser au coût du
plafonnement (B)175. En effet, la responsabilisation fiscale
représente le corollaire de l'autonomie fiscale, composante essentielle
de l'autonomie financière dont bénéficient les
collectivités territoriales. En effet, elles ont la maîtrise de
leurs recettes et de leurs dépenses.
A. Le calcul de la part de dégrèvement pris
en charge par l'Etat
L'Etat prend à sa charge les effets financiers de
l'actualisation du taux de référence, c'est-àdire les
augmentations de taux entre 1995 et la nouvelle année de
référence.
Le taux de référence s'entend, pour chaque
niveau de collectivité territoriale ou EPCI à fiscalité
propre, du plus faible des trois taux de taxe professionnelle suivants : le
taux de l'année 2005 ; le taux de l'année 2004 majoré de
5,5% pour les communes et les EPCI, 7,3% pour les départements et 5,1%
pour les régions ; le taux de l'année
d'imposition176.
L'Etat prend donc en charge la part correspondant à la
différence entre la cotisation de taxe professionnelle
déterminée en fonction d'un taux de référence
actualisé et 3,5 % de la valeur ajoutée.
Ainsi, au niveau de chaque collectivité ou
établissement public de coopération intercommunale
(ci-après « EPCI ») bénéficiaire, le montant
pris en charge par l'Etat pour les entreprises plafonnées est
calculée de la manière suivante : [(Base de l'entreprise x Taux
de référence)] - (3,5% de la valeur
ajoutée)177.
Après la réforme, l'Etat prend toujours en
charge la majeure partie du coût des dégrèvements de taxe
professionnelle accordé aux entreprises au titre du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée, soit plus de 92% du coût des
dégrèvements178.
175 Rapport évaluant la mise en oeuvre de la
réforme de la taxe professionnelle (application de l'article 85 de la
loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006) remis
par le Gouvernement au Parlement, en octobre 2008, source <
www.sfe.asso.fr/docs/site/pdf/documents-vu-et-lu/rapport-taxe-professionnelle.pdf>.
176 Rapport sur l'évaluation de la réforme de la
taxe professionnelle par la loi de finances pour 2006, source : <
http://lesra pports.ladocu mentationfra
ncaise.fr/BRP/084000689/0000.
pdf>, p.30.
177 J. BOURDIN, « Les Finances Communales », coll.
Finance, Economica, 4e éd., 2008, p.147.
178 Rapport sur l'évaluation de la réforme de la
taxe professionnelle par la loi de finances pour 2006, source : <
http://lesra pports.ladocu mentationfra
ncaise.fr/BRP/084000689/0000.
pdf>, p. 40.
B. La part de dégrèvement pris en
charge par les collectivités territoriales : une responsabilisation au
coût occasionné par le plafonnement
1. Le mode de calcul de la part de
dégrèvement à la charge des collectivités
territoriales
Tout dégrèvement induit par l'augmentation des
taux votés par les collectivités territoriales et leurs EPCI
à fiscalité propre par rapport au taux de référence
(défini précédemment) sera mis à leur charge.
Ainsi, par exemple, pour la part de dégrèvement lié
à une augmentation du taux communal, la charge sera affectée
à la commune, pour la part induite par une augmentation du taux du
conseil général, la charge sera affectée au conseil
général179.
La part du dégrèvement pris en charge par les
collectivités territoriales s'obtient ainsi : Bases plafonnées de
l'entreprise située sur le territoire de la collectivité x [(Taux
de l'année d'imposition) - (Taux de
référence)]180. Le taux de référence
joue donc un rôle important.
2. Une participation financière
atténuée par un plafond de participation et des mécanismes
de réfactions prévus par le législateur
Le montant exact de la participation des collectivités
territoriales et de leurs EPCI au titre d'une année d'imposition ne peut
être connu qu'à l'issue de la période au cours de laquelle
les redevables peuvent demander le bénéfice du plafonnement (soit
en N+2). C'est pourquoi, il est prévu que leur participation
définitive ne peut excéder un plafond de participation, afin
qu'ils puissent anticiper dans le délai légal du vote des taux
d'imposition181 le montant du dégrèvement à
leur charge182.
De plus, sont prévus des dispositions
spécifiques concernant les situations particulières, notamment en
cas de créations ou de fusions d'EPCI, mais également, des
mécanismes d'atténuation de la part de dégrèvement
mis à la charge de chaque collectivité territoriale. Par exemple,
lorsque la part des bases plafonnées représente la moitié
ou plus des bases de
179 J. BOURDIN, « Les Finances Communales », coll.
Finance, Economica, 4e éd., 2008, p. 147.
180 Ibid.
181 En général, le vote des taux intervient en
même temps que le vote du budget primitif.
182 Rapport sur l'évaluation de la réforme de la
taxe professionnelle par la loi de finances pour 2006, source : <
http://lesra pports.ladocu mentationfra
ncaise.fr/BRP/084000689/0000.
pdf>, p.20 et 21.
taxe professionnelle dans un EPCI à taxe professionnelle
unique, ou à taxe professionnelle de zone183, la part du
dégrèvement mise à sa charge est réduite de
20%184.
II. Une auto-limitation des dépenses au niveau des
collectivités territoriales : une
conséquence liée à la participation
au coût du plafonnement
Les collectivités territoriales voient leur marge de
manoeuvre se réduire, en raison de leur prise en charge partielle du
coût du dégrèvement. Avant l'adoption de la loi de finances
pour 2006, le dégrèvement accordé au titre du plafonnement
était entièrement pris en charge par l'Etat. Lorsque le montant
de la cotisation de taxe professionnelle dépassait le seuil de la valeur
ajoutée à cause d'une hausse du taux d'imposition par rapport au
taux de référence de 1995, les entreprises assumaient les
conséquences du dépassement de taux. Ainsi, les
collectivités territoriales pouvaient augmenter leurs taux d'imposition,
et donc le montant des cotisations dues par les redevables de la taxe
professionnelle, sans la moindre conséquence sur la recette fiscale
attendue. Par conséquent, s'il y avait un accroissement des
dépenses locales prévues, les collectivités territoriales
pouvaient augmenter les taux d'imposition de la taxe professionnelle afin de
récolter les fonds nécessaires. Elles étaient investies
d'un véritable pouvoir fiscal au niveau local, c'est-à-dire
qu'elles pouvaient moduler la pression fiscal par des politiques de taux. C'est
pourquoi le législateur de 2006 a souhaité impliquer les
collectivités territoriales dans la maîtrise de leurs taux.
A présent, toute augmentation du taux d'imposition de
la taxe professionnelle par rapport au taux de référence peut
entraîner un plafonnement de la recette fiscale. Ainsi, la réforme
de 2007 substitue les collectivités territoriales aux entreprises, pour
partie, dans la prise en charge du plafonnement de la cotisation de taxe
professionnelle185. Les collectivités sont incitées
à rationaliser leurs coûts de fonctionnement afin de proposer des
services adéquats à coût acceptable186.
183 Les EPCI qui créent et gèrent une zone
d'activités économiques peuvent se substituer à leurs
communes membres afin de voter le taux et percevoir la taxe professionnelle
acquittée par les entreprises implantées dans la zone.
184 J. BOURDIN, « Les Finances Communales », coll.
Finance, Economica, 4e éd., 2008, p. 148.
185 V. AUBELLE, « Enjeux pour les collectivités
locales de la réforme de la taxe professionnelle », Revue Lamy
Collectivités territoriales, 10 /2007, n° 28.
186 Rapport de la Commission de réforme de la taxe
professionnelle, présidée par O. FOUQUET, 2004, source :
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/044000333/0000.pdf>,
p. 24.
Toutefois, si elles ont un besoin de financement, elles pourront
toujours rechercher des ressources en augmentant les taux d'imposition des
autres impôts directs locaux.
Conclusion
Le plafonnement à 3,5% de la valeur ajoutée
constitue un mécanisme d'exception ayant pour objet de corriger, par la
suite, les effets du régime de droit commun de la taxe professionnelle.
Sa finalité est de limiter le montant de la taxe professionnelle en
fonction de l'accroissement de la valeur ajoutée produite par
l'entreprise.
La loi de finances pour 2006 a rendu le mécanisme du
plafonnement plus efficace, puisqu'il a entraîné une
réduction annuelle de 3,7 milliards des prélèvements
à la charge des entreprises187. Cette réforme a
également amené les collectivités territoriales à
diminuer leurs dépenses locales, en raison de leur participation
financière au coût occasionné par le plafonnement.
Malgré les différentes réformes de la taxe
professionnelle qui ont contribué à réduire son dynamisme,
elle conserve son caractère « anti-économique ».
Cet impôt, n'existant pas dans les autres pays
européens, nuit à la compétitivité et à la
croissance du territoire national, en particulier dans le secteur de
l'industrie188, secteur le plus exposé à la
concurrence internationale. De plus, il pénalise l'investissement dans
l'outil de production - achat de machines et construction d'usines - et incite
les entreprises à délocaliser ou à investir à
l'étranger189.
Par ailleurs, l'Etat a tendance à solliciter davantage les
collectivités territoriales à participer à la relance de
l'économie nationale, par le biais de leurs dépenses
d'investissement190.
Depuis la mise en place de la taxe professionnelle, les
gouvernements successifs n'ont cessé d'apporter des modifications
à son régime, notamment en accordant des exonérations ou
des dégrèvements, ce qui a encore complexifié cette taxe.
Le souhait de la remplacer par un impôt plus juste et plus efficace
économiquement a souvent été évoqué par les
gouvernements successifs mais il ne s'est jamais concrétisé.
187 C. GROS, « Suppression de la Taxe Professionnelle
», source : <
http://www.christiangros.fr/2009/02/11/261-
suppression-de-la-tp-les-collectivites-dans-le-brouillard>
188 Ce secteur paie 60% de la taxe professionnelle alors qu'il ne
représente que 40% de la valeur ajoutée au sein de
l'économie.
189 « La réforme de la taxe professionnelle »,
source : <
http://www.gouvernement.fr/gouvernement/lareforme-de-la-taxe-professionnelle>
190 « Suppression de la taxe professionnelle : les
associations d'élus demandent une réforme globale de la
fiscalité locale », source : <
http://www.a
mf.asso.fr/actualites/communiques_presse/article.asp?ref_actu=881>
Le Président de la République, Nicolas Sarkozy,
lors de son intervention télévisée du 5 février
2009, a annoncé la suppression de la taxe professionnelle sur la
totalité des investissements productifs c'est-à-dire que
l'assiette de cette taxe ne porterait plus sur les équipements et biens
mobiliers (EBM), à compter de 2010. Selon le Gouvernement, la
suppression de cette taxe représenterait un allègement net
estimé à 8 milliards d'euros pour les entreprises. Ainsi, leur
capacité d'autofinancement augmenterait, et par conséquent, leurs
investissements et l'embauche s'accroîtrait191.
En attendant « la refonte » de la taxe
professionnelle, une loi de finances rectificative pour 2008, publiée le
31 décembre 2008, a prévu que les nouveaux investissements
productifs effectués avant le 31 décembre 2009 seraient
entièrement exonérés, en vue de soutenir l'activité
en cette période de crise. Ce dégrèvement aura pour effet
économique immédiat de stimuler l'investissement des
entreprises192.
La taxe professionnelle représente la première
ressource fiscale des collectivités territoriales, soit 44% du produit
des quatre taxes directes locales193. Elle constitue donc une
composante essentielle de leur autonomie financière, garantie par la
Constitution. Cette réforme annonce donc, en réalité, une
réforme plus vaste du financement des collectivités
territoriales194. C'est pourquoi, la mise au point de la
réforme de la taxe professionnelle s'avère compliquée.
Selon un article publié dans « Le Monde », le
jeudi 6 août 2009, la taxe professionnelle laisserait la place à
une "cotisation économique territoriale" qui serait constituée,
d'une part, d'une taxe foncière des entreprises, dénommée
"cotisation sociale d'activité". Son taux devrait être
minoré à 15% pour le secteur industriel. D'autre part, s'y
ajouterait une cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée,
qui remplacerait l'actuelle cotisation
191 Ibid.
192 « Réforme de la taxe professionnelle »,
source :
<
http://www.interieu
r.gouv.fr/sections/a_l_i
nterieu r/les_col lectivites_loca les/decentra lisation/dossiersthematiq
ues/reforme-taxe-profession nelle>
193 « La réforme de la taxe professionnelle
présentée le 8 juillet », source : <
http://www.impots-utiles.com/lareforme-de-la-taxe-profession
nelle-presentee-le-8-j ui
llet. ph p>
194 Ibid.
minimale mais dont l'assiette serait élargie. Le texte ne
définit pas les seuils d'imposition ni les taux195.
La valeur ajoutée, qui est devenue la base de calcul de
la taxe professionnelle par le biais du plafonnement en fonction de la valeur
ajoutée, constituerait désormais une partie de la
véritable assiette de ce nouvel impôt. Cette donnée est
appréciée puisqu'elle semble être la plus à
même de refléter la santé financière de l'entreprise
imposée, c'est-à-dire ses capacités contributives.
Une nouvelle répartition des impôts locaux est
également prévue, ainsi que des transferts et des compensations
accordés par l'Etat. Ainsi, les communes et les structures
intercommunales devraient conserver les quatre « vieilles » dont leur
part de cotisation économique. Les départements perdraient leur
part de taxe d'habitation et de foncier non bâti réservés
aux communes et ne conserveraient que le foncier bâti des entreprises. De
plus, ils bénéficieraient, avec les régions, pour
l'essentiel des recettes du nouvel impôt économique mais
également des dotations et transferts provenant de l'Etat du produit des
taxes sur les surfaces commerciales et les contrats
d'assurance196.
Cette réforme devrait aussi mettre fin aux
dégrèvements fiscaux accordés par l'Etat aux entreprises,
ce qui devra être compensé197.
Toutefois, les modalités de cette réforme n'ont
pas encore été adoptées, ce qui risque de retarder le
projet de réforme. L'article précité publié dans
« Le Monde » indique que « les ultimes arbitrages du
président de la République ont été reportés
à la fin du mois d'août »198.
En conclusion, la taxe professionnelle semble faire l'objet
davantage d'un aménagement que d'une véritable suppression. En
effet, il paraît extrêmement délicat de la supprimer en
pratique, puisqu'elle constitue une ressource essentielle dans les budgets
locaux. Ce manque-à-gagner pour les collectivités territoriales
devra être compensé par la création d'un impôt
similaire ou par l'augmentation de prélèvements obligatoires
déjà existants (ce qui serait contesté par l'ensemble des
contribuables).
195 M. DELBERGHE, « La « cotisation économique
territoriale » va remplacer la taxe professionnelle », Le
Monde, Jeudi 6 août 2009, n° 20071, p. 9.
196 Ibid.
197 Ibid.
198 Ibid.
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· CE 17 avril 2008, n° 294359, min c/ GIE des
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· CAA Nancy, 28 février 2008, n° 06NCO1201,
SAS Georgia-Pacific France.
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France.
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Algeco.
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fédérale du Crédit Mutuel Océan.
· CE 4 août 2006, n° 267150, min c/
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· CE 4 août 2006, n° 270961 à 270965,
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· CE 20 octobre 2004, n° 256550, SA
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du terminal de Normandie - SETN.
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n CAA Bordeaux, 29 mars 2004, n° 99-1950 et n° 91-923,
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n CE 13 décembre 2002, n° 228204, ministre c/
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n TA Nantes, 19 novembre 2002, n° 99-362, SA Eurial
Poitouraine.
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Mos.
n CE 29 décembre 2000, n° 199296, ministre c/
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Hydrologiques.
n CE 8 juillet 1998, n° 118 555, ministre c/ CCI de
Laval et de la Mayenne.
n CE 10 septembre 1997, n° 146864, SCTT.
n CE 9 septembre 1996, n° 122737, Sté GTE
Précision Materials France.
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régionale du Crédit agricole mutuel de Charente-Maritime.
n CE 31 mars 1993, n° 115511, Clinique
Lafourcade.
n CE 26 juillet 1991, n° 115494, Double V-Miss
D.
n CE 26 juillet 1991 n° 81975 et 95802,
Clavé.
n CE 27 juin 1990 n° 72948 et 74164, Gagnevin.
n CE 5 février 1988, n° 56782, Sté
William Pitters.
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Annexes
Annexe 1 : Imprimé n° 1327-TP 199 p. 79
Annexe 2 : CE 4 août 2006, n° 270965, SA
Colas Sud-Ouest 200 p. 82
199 Source :
<
http://www.i
mpots.gouv.fr/porta
l/deploiement/p1/fichedescri ptiveformu lai re_5145/fichedescri ptiveformu lai
re_5145.pdf>.
200 Source :
<
http://www. legifra
nce.gouv.fr/affichJ u riAd min
.do?oldAction=rechJ u riAd mi n&idTexte=CETATEXT0000082595 66&fastReq
Id=1507774760&fastPos=1>.
Table des matières
REMERCIEMENTS 3
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS 4
SOMMAIRE 5
INTRODUCTION 6 CHAPITRE 1 : LA VALEUR AJOUTEE, BASE DU CALCUL
DU PLAFONNEMENT DE TAXE PROFESSIONNELLE : UNE NOTION FISCALE SPECIFIQUE
12
SECTION 1 : LA DEFINITION FISCALE DE LA VALEUR AJOUTEE RETENUE
PAR LE LEGISLATEUR 13
I. La valeur ajoutée : une notion fiscale définie
par l'article 1647 B sexies du CGI 13
A. La prise en compte de la valeur ajoutée produite,
par le redevable, au cours de la période de référence
13
1. La clôture de l'exercice social de douze mois pendant
l'année d'imposition 13
2. L'absence de clôture d'exercice de douze mois pendant
l'année d'imposition 14
3. Le cas particulier des opérations de fusion ou
d'absorption assortie de clause de
rétroactivité 15
B. La détermination de la valeur ajoutée en
fonction du statut fiscal du redevable 16
1. Les redevables soumis à un régime réel
d'imposition 16
2. Les établissements de crédit et les entreprises
ayant pour activité exclusive la gestion
de valeurs mobilières 17
3. Les entreprises d'assurance, de capitalisation et de
réassurance de toute nature 18
4. Les redevables soumis au régime micro-entreprises ou
au régime déclaratif spécial
dit « micro-BNC » 18
II. L'interprétation des mots « hors taxes »
figurant dans la définition de la valeur
ajoutée, donnée par le législateur 19
A. Le principe de non-déductibilité des
impôts et taxes du calcul de la valeur ajoutée, retenu par
l'administration fiscale 19
B. La division des juges du fond concernant le traitement
fiscal de certaines taxes 20
C. L'adoption d'une position libérale adoptée
par la Haute Assemblée 21
III. La difficulté pratique de la détermination des
éléments entrant dans le calcul de la valeur ajoutée 23
SECTION 2 : L'EVOLUTION JURISPRUDENTIELLE VERS UNE DEFINITION
SPECIFIQUEMENT FISCALE 24
I. Le fondement des éléments comptables composant
la valeur ajoutée sur les
dispositions du plan comptable général de 1957
24
A. L'interprétation du contenu de chaque rubrique de
l'article 1647 B sexies du CGI, à la lumière de la
définition comptable : le maintien d'une définition purement
fiscale
de la valeur ajoutée 25
B. La référence au plan comptable
général en vigueur au moment des faits 26
1. L'évolution des rubriques
énumérées dans l'article 1647 B sexies du CGI 26
2. La référence au plan comptable en vigueur lors
de l'année d'imposition concernée 27
3. La connexion entre le droit fiscal et la
réglementation comptable 28
II. La possibilité de s'affranchir du respect des
règles comptables 29
A. Le respect du principe du réalisme du droit fiscal
30
1. La « requalification » des inscriptions comptables
opérée par le juge de l'impôt 30
2. L'intrusion du juge fiscal dans le choix comptable
opéré par les redevables 31
3. La possibilité d'écarter des règles
comptables : une faculté ouverte par le juge 32
B. La suppression d'une écriture comptable
régulière et fondée au nom du principe d'autonomie
fiscale 33
SECTION 3 : L'AVENIR DE LA JURISPRUDENCE DEGAGEE PAR LE CONSEIL
D'ETAT, A PROPOS DE LA VALEUR AJOUTEE. 34
CHAPITRE 2 : LES PRINCIPAUX PROBLEMES SPECIFIQUES EN MATIERE DE
PLAFONNEMENT DE LA TAXE PROFESSIONNELLE 36
SECTION 1 : LE PROBLEME RELATIF A LA QUALIFICATION DE SUBVENTIONS
D'EXPLOITATION 36
I. La détermination de subvention d'exploitation : une
notion incluse dans
l'énumération de l'article 1647 B sexies
du CGI définissant la valeur ajoutée 37
II. L'important contentieux concernant la qualification de
subvention d'exploitation,
au sens de l'article 1647 B sexies du CGI, par le juge
de l'impôt 38
SECTION 2 : LE PROBLEME RELATIF AUX COMPTES DE « TRANSFERTS
DE CHARGES » 40
I. La définition des comptes de « transferts de
charges » 40
A. La première catégorie de « transferts
de charges » retraçant des opérations purement comptables
40
B. La seconde catégorie de « transferts de
charges » retraçant des opérations traduites par des
mouvements de trésorerie 41
II. La question relative à l'inclusion des comptes «
transferts de charges » dans la
valeur ajoutée 42
A. La division des juges du fond concernant le traitement
fiscal des sommes portées au compte « transferts de charges »,
notamment des indemnités d'assurance 42
B. La prise en compte, dans le calcul de la valeur
ajoutée, des sommes inscrites au compte « transferts de charges
» compensant des charges déduites, selon le juge de cassation
44
C. L'inclusion des transferts de charges dans le calcul de
la valeur ajoutée, depuis le
1er janvier 2007 46
CHAPITRE 3 : LE MECANISME DU PLAFONNEMENT EN FONCTION DE LA
VALEUR AJOUTEE 48
SECTION 1 : LE MONTANT A DEDUIRE : LA COTISATION DE SUBSTITUTION
48
I. La cotisation de taxe professionnelle susceptible d'être
plafonnée 49
A. Un nouveau dispositif mis en place depuis le
1er janvier 2007 : un plafonnement réel pour les entreprises
49
B. La diminution du montant de cotisation de taxe
professionnelle des dégrèvements
ou des réductions dont bénéficient le
redevable 50
III. Le paiement du dégrèvement par
l'administration fiscale au profit du redevable 52
SECTION 2 : LA PROCEDURE POUR BENEFICIER DU PLAFONNEMENT DE TAXE
PROFESSIONNELLE 53
I. Deux possibilités offertes aux redevables pour
bénéficier du plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée 53
A. La demande de plafonnement et la déclaration
d'imputation 53
1. La demande de plafonnement au titre de l'article 1647 B
sexies du CGI 53
2. La déclaration d'imputation en vertu de l'article 1679
quinquies du CGI 54
B. Le bénéfice du dégrèvement par
deux procédures distinctes 55
II. L'inopposabilité de la doctrine administrative en
matière de plafonnement en
fonction de la valeur ajoutée, sur le fondement de
l'article L 80 A du LPF 56
A. L'opposition du contribuable à la doctrine
administrative en vertu de l'article L.80 A du LPF : une faculté
inapplicable en matière de plafonnement de taxe
professionnelle 56
B. L'inopposabilité de la doctrine administrative
confirmée par le juge fiscal 57 CHAPITRE 4 : LES CONSEQUENCES
CONTROVERSEES DU PLAFONNEMENT DE TAXE PROFESSIONNELLE 59
SECTION 1 : LA POLITIQUE D'OPTIMISATION FISCALE DES ENTREPRISES
59
I. Le développement de stratégies
d'évitement par les entreprises dans le but de
baisser le plafond applicable à l'impôt restant
dû en France 60
A. La délocalisation des unités de production
: un moyen d'expatrier la valeur ajoutée 60
B. La rationalisation de la répartition des
activités entre les différentes entités situées en
France 61
II. Les moyens limités de l'administration fiscale face
aux manoeuvres d'optimisation
fiscale effectuées par les entreprises 62
SECTION 2 : LE PLAFONNEMENT DE COTISATION DE TAXE PROFESSIONNELLE
: UN INSTRUMENT DE FREINAGE DES DEPENSES LOCALES 63
I. Les modalités de répartition de la charge du
dégrèvement entre l'Etat et les
collectivités territoriales 63
A. Le calcul de la part de dégrèvement pris en
charge par l'Etat 64
B. La part de dégrèvement pris en charge par
les collectivités territoriales : une responsabilisation au coût
occasionné par le plafonnement 65
1. Le mode de calcul de la part de dégrèvement
à la charge des collectivités territoriales 65
2. Une participation financière atténuée
par un plafond de participation et des
mécanismes de réfactions prévus par le
législateur 65
II. Une auto-limitation des dépenses au niveau des
collectivités territoriales : une
conséquence liée à la participation au
coût du plafonnement 66
ANNEXES 78
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