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L'utilité d'une coopération technique au sud du Sahara: Le cas des relations Cameroun-Unesco

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par Gérard Martial AMOUGOU
Université de Yaoundé II SOA - DEA en Science politique 2006
  

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CHAPITRE II:

LA COMPOSANTE TRANSACTIONNELLE DES RELATIONS
CAMEROUN-UNESCO : UNE DYNAMIQUE DES ÉCHANGES
CRÉDIBILISÉE PAR LE HAUT

Le système de rapports établis entre le Cameroun et l'UNESCO fait montre d'un flux de relations dont la dynamique des échanges ressortit de sa composante transactionnelle. En effet, cette coopération participe également des relations d'intérêts et des attentes mutuelles entre les deux parties. Cette coopération est aussi une mise en exergue des relations de pouvoir, de jeux et différentes actions menées par les acteurs en vue d'une meilleure appréhension de la coopération aux mieux de leurs intérêts respectifs, et qui ne constituent forcément pas un obstacle à la promotion des idéaux universellement et conventionnellement

admis. Dans ce chapitre, il s'agit de voir comment le concept de « crédibilisation » est mobilisé et appréhendé par les deux parties afin de justifier leurs actions réciproques à l'endroit de cette coopération qui à leurs yeux reste « fructueuse ». En un mot, il s'agit de percevoir comment la coopération Cameroun-UNESCO est crédibilisée par ses principaux promoteurs.

SECTION PREMIERE : L'ACTION DU CAMEROUN A L'UNESCO COMME SIGNE DE CREDIBILITÉ DIPLOMATIQUE

La crédibilisation de la coopération par les autorités camerounaises est d'abord le fait des autorités politiques, conscientes de l'impact des activités de l'UNESCO qui mobilisent la quasi-totalité des départements ministériels du Cameroun. Cette démarche semble parfaitement relayée par les fonctionnaires internationaux camerounais en service aux différentes instances de l'UNESCO, et dont l'action quotidienne contribue significativement au renforcement de la coopération. Plus fondamentalement, l'action du Cameroun comme signe de crédibilité diplomatique se matérialise aussi bien au sein des instances de l'UNESCO que dans le territoire camerounais.

PARAGRAPHE I: LE TERRITOIRE CAMEROUNAIS COMME TERRE D'ACCUEIL DES GRANDES RENCONTRES AVEC L'UNESCO

Le territoire camerounais se présente de plus en plus comme un lieu de grands rendez- vous avec l'UNESCO. Pour s'en tenir à la période marquant le début de ce millénaire, période marquée également par le début des réformes et des grands programmes au sein de l'UNESCO, l'on remarque que le Directeur Général de l'UNESCO a foulé à deux reprises les pieds sur le sol camerounais. Lequel sol a également été témoin des rencontres déterminantes en vue d'une meilleure opérationnalisation des objectifs de l'UNESCO dans la région Afrique A. LA RÉCEPTION DE LA CONFÉRENCE AFRICAINE DES COMMISSIONS NATIONALES POUR L'UNESCO

A l'invitation de la Commission Nationale de la République du Cameroun, la dixième Conférence quadriennale et statutaire des Commissions Nationales d'Afrique s'est tenue entre le 2 et le 6 juin 2003 à Yaoundé. A cet effet, quarante-deux des 53 Commissions Nationales de l'UNESCO pour la région Afrique seront présentes à cette Conférence qui connaîtra un

peu plus d'une cinquantaine de participants. De nombreuses personnalités vont feront part à cette rencontre. Il s'agit entre autres, du Président du Comité sur les organisations non gouvernementales du Conseil exécutif, M. Michael Abiola Omolewa, du Secrétaire général de la Commission française, M. Jean-Pierre Boyen, ainsi que les représentants de plusieurs ONG. Douze membres du Secrétariat de l'UNESCO, conduits par MM. Ahmed Sayyad, Sous-Directeur général aux relations extérieures et à la coopération et Représentant du Directeur Général de l'UNESCO, et M. Noureini Tidjani-Serpos, Sous-Directeur général pour l'Afrique, seront également présents. Ils étaient notamment accompagnés par le Secrétaire de la Conférence générale, les Directrices de la Division de la Coopération avec les Commissions Nationales et les nouveaux partenariats, ainsi que par les chefs et directeurs de treize bureaux de l'UNESCO en Afrique.

En effet, ce type de rencontres, en plus de constituer des opportunités certaines d'échanges de points de vue sur les principales difficultés relatives au fonctionnement de l'UNESCO, sont sensées faciliter la traduction des priorités de l'UNESCO sous forme de plans d'action régionaux. Ils permettent également la formulation des stratégies de suivi pour les grandes conférences internationales, ainsi que la promotion de la coopération régionale et sous-régionale. Le Cameroun, en accueillant cette conférence se pose et s'impose comme un acteur essentiel de la promotion des idéaux de l'UNESCO, en même temps qu'il renforce sa crédibilité dans ses rapports avec l'Organisation. De telles initiatives requièrent aussi une portée diplomatique considérable ; car en cette occasion, le Cameroun se crée une opportunité d'amélioration de sa visibilité internationale, et espère en retour être un pôle d'excellence de projection de l'institution spécialisée des Nations unies dans la région. De telles opportunités permettent aussi aux autorités camerounaises de présenter leurs souhaits, surtouts les plus pressants aux dirigeants de l'UNESCO.

A cet effet, dans son allocution lors de l'ouverture de cette dixième conférence quadriennale, le Premier Ministre camerounais, M. Peter Mafany Musongue va, non sans avoir laissé percevoir la fierté de cette coopération, saisir l'occasion pour présenter le souhait de son Gouvernement de voir « rapidement comblé » la vacance créée à la tête du Bureau UNESCO de Yaoundé, par la nomination de Cheick Tidiane Sy au Bureau UNESCO de Dar- Es-Salaam. La nomination de M. Bernard Hadjaad à la tête du cluster de Yaoundé, quelques mois après, peut ainsi être interprétée comme un symbole de crédibilité, de confiance et d'estime réciproques existant au sein des responsables des deux parties. Laquelle estime se renforcera davantage avec la multiplication des évènements similaires en territoire camerounais.

B. LA RÉCEPTION PAR LE CAMEROUN DE LA CONFÉRENCE DES MINISTRES DE L'ÉDUCATION DES ÉTATS MEMBRES DE LA CEMAC

Du 16 au 17 janvier 2004 à Yaoundé, va se tenir une Conférence regroupant les Ministres de la CEMAC en charge de l'éducation. Des personnalités importantes vont répondre présents à cette rencontre. Nous pouvons à cet effet noter la présence, entre autres, des membres du gouvernement camerounais, des membres du corps diplomatique et représentants des Organisations Internationales, ainsi que la présence du Pr. Mboui, membre du Conseil Exécutif de l'UNESCO. Bien entendu, le fait marquant de cette rencontre sera la présence de Koïchiro Matsuura, Directeur Général de l'UNESCO, qui est à ranger dans le cadre de l'efficacité et de la crédibilité de l'action diplomatique des autorités politiques du Cameroun. La Conférence qui sera dirigée par le Ministre camerounais en charge de l'éducation, Joseph Owona, aura pour objectif principal de stimuler et d'encourager les responsables de la formation de la jeunesse dans la sous-région, à s'impliquer davantage dans la voie de l'intégration par les programmes scolaires.

C'est qu'en effet, et comme le précisera le Pr. Joseph Owona dans son allocution d'ouverture de la conférence, l'initiative majeure de l'UNESCO à la fin du 20ème siècle qu'est le forum de Dakar s'est engagé de parvenir à l'échéance 2015, à l'universalisation de l'éducation. Au lendemain de ce forum, les Ministres de l'Éducation des États Membres d'Afrique (MINEDDAF VIII), bénéficiant du soutien prioritaire de l'UNESCO, vont se réunir en décembre 2002 à Dar-es-Salaam ; réunions au sein de laquelle les participants souligneront la nécessité `de disposer de ressources... en qualité et en quantité' en vue d'une décisive contribution au développement de l'Afrique du siècle débutant. C'est ainsi que suite à deux rencontres préliminaires ayant réunies les Ministre de l'éducation de la zone CEMAC à Dar- es-Salaam d'abord, ensuite au cours de la 32ème Session de la Conférence Générale de l'UNESCO tenue à Paris, le Gouvernement camerounais par l'entremise de son Ministre de l'éducation, va se proposer d'abriter cette rencontre dans l'optique de « passer des engagements à l'action ».

Les travaux de cette rencontre déroulée en séances plénières et en panels regroupant tous les participants, ont été précédés d'une préparation des dossiers de programmes d'appui à ceux des nationaux, par des Experts. Cette réunion préliminaire portait pour l'essentiel sur la formation des enseignants, la lutte contre le VIH/SIDA, l'éducation à la citoyenneté, le

développement intégré de la petite enfance et, l'intégration des technologies de l'information et de la communication dans l'enseignement secondaire et supérieur.

Bien plus, pour les pays hôtes, comme le Cameroun ici, ces types de rencontres constituent des moments uniques de renforcement de la crédibilité des relations établies avec l'Organisation internationale, de s'affirmer comme le pôle d'attraction diplomatique dans la sous-région. Cette conférence se présente également comme une opportunité de présentation des attentes de l'État camerounais dans des secteurs qui nécessitent encore une attention particulière de l'UNESCO : « Nous osons espérer, pour un avenir proche, la mise en oeuvre d'une semblable action pour le magnifique joyau qu'est le Palais de Rey Bouba, survivance grandiose de l'Histoire de la savane et des peuples du septentrion de notre pays », glissera subtilement Joseph Owona, non sans avoir notifier les faits majeures de cette coopération « fructueuse ». La signature, à la veille de cette conférence, d'une convention avec l'UNESCO ouvrant davantage le centre d'excellence des micro-sciences de Yaoundé à toute l'Afrique Centrale, participe également des avantages tirés de ce type d'initiatives.

Pas significatif dans l'appropriation des mécanismes de coopération sous-régionale nécessaire dans la mise en oeuvre du processus d'Éducation Pour Tous, la conférence des Ministres de la CEMAC participe également de la réflexion collective aux modalités d'échange et d'appui mutuels à même de servir la cause de l'EPT. L'échelle sous-régionale, parce que constituée d'entités socioculturelles cohérentes, faciliterait la réflexion sur les problèmes locaux tout en permettant la mise en commun des ressources intellectuelles, financières et humaines des différents États membres. Pour le Directeur Général de l'UNESCO en effet, il devient de « de plus en plus clair qu'une meilleure synergie doit être trouvée entre, d'une part, le niveau de mobilisation et de coordination global en faveur de l'Éducation Pour Tous, et, d'autre part, les institutions et processus au niveau régional et sous- régional ». Pour M. Matsuura également, cette conférence constitue une courroie de transmission essentielle entre le global et le local, et mérite de ce fait d'être renforcée et encouragée ; d'où sa présence en territoire camerounaise. Sauf que le mérite de cette visite du Directeur général revient au doigté de la diplomatie multilatérale des autorités camerounaises.

Selon toute vraisemblance, l'un des faits les plus marquants dès l'arrivée du Directeur Général aura été la signature d'une convention au Centre d'excellence sur la micro-science par l'UNESCO et le Cameroun. A travers celle-ci, l'UNESCO s'engage à apporter une contribution financière de 226. 000 dollars des Etats-Unis sur fonds en dépôt du Japon, en vue du développement du projet dont le but est d'introduire et vulgariser l'expérimentation dans les filières scientifiques par la formation des enseignants, d'améliorer la qualité de

l'enseignement scientifique dans les établissements publics, enfin, de susciter des vocations chez les élèves pour les vocations scientifiques. La contre partie du Gouvernement camerounais évaluée à 240. 718 dollars des Etats-Unis, sera essentielle à l'entretien des locaux ainsi qu'aux frais de fonctionnement du Centre, à la prise en charge des salaires du personnel et, au renforcement du personnel d'appui par le recrutement de plantons et gardiens. Par ailleurs, le décernement à l'Université de Yaoundé II, du titre de Doctor Honoris causa en Science Politique, Option relations internationales, à M. Koïchiro Matsuura aura été l'autre évènement majeur de cette journée. Ce geste symbolique et honorifique trouve son importance dans l'attachement particulier de l'UNESCO et de son Directeur, au sein des relations internationales, aux valeurs du dialogue entre les civilisations. Ce dialogue qui, de l'avis du premier fonctionnaire de l'UNESCO, « apparaît aujourd'hui plus nécessaire que jamais, à l'heure où certains sont tentés d'interpréter diverses tensions internationales à l'aune de tensions de civilisations ou de cultures antagonistes ». Aussi, va-t-il poursuivre lors de la cérémonie de remise par l'Institut des relations internationales du Cameroun : « Je suis convaincu qu'il n'en n'est rien, et que le dialogue véritable, celui qui permet de comprendre et de respecter l'Autre, permettrait bien souvent de lever des malentendus, des ambiguïtés, et de résoudre avant même qu'ils n'éclatent nombres de conflits potentiels ». Toutefois, l'action du Cameroun est également « rayonnante » au sein des instances de l'UNESCO.

PARAGRAPHE II : LES INSTANCES DE L'UNESCO COMME LIEUX DE DÉPLOIEMENT DIPLOMATIQUE DU CAMEROUN

A. L'ACTION DU CAMEROUN DANS LA CONFÉRENCE GÉNÉRALE DE L'UNESCO : LE CAS DE LA 32ème SESSION

Nous avons eu à noter, dans le chapitre précédent, que la Conférence Générale, organe plénier et souverain de l'UNESCO, a pour principale fonction de déterminer l'orientation générale de l'Organisation. Et qu'à l'exception de quelques cas rares, elle tient habituellement ses sessions au siège de l'UNESCO, à Paris. En effet, les travaux de la Conférence sont généralement consacrés au débat de politique générale, ainsi qu'aux travaux en Commissions. Très souvent, il s'agit des Commissions portant sur les questions générales et le soutien du programme, sur les sciences exactes, naturelles et les sciences sociales ; d'autres débattant de l'éducation, chargées de la culture ou de la communication, ou encore sur des questions administratives et financières. Les Comités des candidatures, juridique et de vérification des

pouvoirs viennent enfin compléter la liste des Commissions dont le nombre porte généralement à neuf. Pour le Cameroun donc, cette conférence représente une opportunité déterminante de renforcement de sa visibilité diplomatique au sein des États-membres.

C'est ainsi que lors de la 32ème Session de la Conférence Générale de l'UNESCO tenue à Paris, le 29 septembre 2003, le Cameroun s'est constitué d'une importante Délégation d'un peu plus d'une dizaine de personne, et entourée autour de son chef qui n'était autre que le Pr. Joseph Owona, alors Ministre camerounais en charge de l'éducation et Président de la Commission nationale camerounaise pour l'UNESCO. Ainsi, l'on peut citer comme faisant partis de la délégation les membres tels que M. Barthélémy Mvondo Nyina, Secrétaire de la Commission nationale, les Honorables Joseph Mboui et Boulou, ainsi que des représentants des Ministères spécialisés en coopération avec l'UNESCO. Réunis avant la Session par son Chef au sein des Bureaux de la Délégation Permanente du Cameroun auprès de l'UNESCO, les Membres de la Délégation camerounaise seront assignés des tâches précises pour permettre une présence du Cameroun dans toutes les Commissions. C'est que le Chef de Délégation, sur instruction du chef de l'État camerounais, va inviter ses membres à participer activement à la promotion de la candidature du Pr. Mboui au Conseil Exécutif. Aussi, va-t-il « recommander un maximum de sérieux et de ponctualité à ses concitoyens, pour une meilleure image possible du Cameroun ».

Ainsi, dans son intervention, le 1er octobre 2003 au débat de politique générale, le chef de la Délégation camerounaise, après avoir exprimé son soutien aux préoccupations majeures de l'Organisation, va suggérer que certains thèmes transversaux tels que « l'élimination de l'extrême pauvreté » et « la contribution des technologies de l'information et de la communication au développement de l'éducation, de la science de la culture et à la construction d'une société de savoir », rentrent pleinement dans tous les programmes de l'UNESCO. Tout en exprimant sa reconnaissance au sujet des excellentes relations que le Cameroun entretient avec l'Organisation, il souhaitera néanmoins qu'une action soit renforcée en direction de l'Afrique à travers le NEPAD.

Mais compte tenu de la durée limitée des interventions accordées aux chefs de Délégations au débat portant sur la politique Générale27, l'audience avec le Directeur général de l'UNESCO constitue souvent un moment unique où sont évoquées les questions étroites concernant l'Organisation et les États-membres. A cet effet, l'audience accordée à la Délégation camerounaise aura permis que soient abordées des questions relatives aux

27 Interventions dont la durée, en principe, ne devrait pas excédée huit minutes

réformes en cours de l'UNESCO28, la visite «prochaine» du Directeur général de l'Organisation au Cameroun, et la situation des ressortissants camerounais à l'UNESCO. Par ailleurs, la Délégation du Cameroun va participer à d'autres activités telles que la table-ronde ministérielle sur la qualité de l'éducation tenue les 3 et 4 octobre, ainsi qu'à la réunion des Ministre de l'éducation des États membres de la CEMAC. Le chef de la Délégation camerounaise sera même reçu au Ministère français de la coopération et au Club 89 où il présentera les réalisations et les attentes du système éducatif camerounais. Quant aux autres membres de la délégation, ils participeront à une kyrielle d'activités en marge de la Conférence, et qui relevaient de leurs domaines respectifs. Il s'agit des représentants des Ministères de la culture, de la communication, et du représentant de l'Assemblée nationale camerounaise, l'Honorable Boulou.

Plus déterminante encore, sera le crédit engrangé par le Cameroun à l'issue des élections aux Conseils et Comités. En effet, à chaque Session de la Conférence, la désignation des États membres appelés à siéger au sein des différents conseils et comités, à même de jouer un rôle déterminant et diversifié dans la vie de l'UNESCO, se fait toujours par le biais des élections. Celles-ci sont une opportunité unique d'affirmation des États, en même temps qu'elles constituent une occasion de jugement de leur image. C'est pourquoi une campagne intéressante sera menée sous forme de contacts personnels et de réceptions offertes, mobilisant tous les membres de la Délégation camerounaise. Le Cameroun va ainsi se retrouver élu dans les Conseils et Comités suivantes :

Le Conseil intergouvernemental du programme international pour le développement de la communication (PIDC) ; le Conseil Intergouvernemental du Programme Information Pour Tous (IPT) ; Conseil Intergouvernemental du Programme «Gestion des Transformations Sociales» (MOST). Toutefois, l'événement majeur aura été l'élection au Conseil Exécutif du Pr. Mboui, choisi « personnellement » par le Président Paul Biya pour représenter le Cameroun. Mieux, les performances du Cameroun au sein de l'UNESCO semblent relever de la constance.

B. LA TRACE DES RESSORTISSANTS CAMEROUNAIS AU SEIN DES INSTANCES DE L'UNESCO

28 Lesquelles réformes, bien qu'ayant provoqué la fermeture de certains bureaux hors-siège en vue d'une meilleure efficacité, ont maintenu le maintien du Bureau de Yaoundé.

Une observation attentive de l'historique des relations Cameroun-UNESCO nous amène à relever que le Cameroun n'a pas attendu les réformes de 1999 pour marquer son empreinte au sein de l'Institution spécialisée des Nations unies. En effet Cameroun a contribué de façon efficace au fonctionnement des différents organes de l'UNESCO. Il a ainsi présidé en 1968, à travers M. William ETEKI MBOUMOUA, la Conférence Générale de l'UNESCO et a été sept fois membre de son bureau. En outre, plusieurs personnalités camerounaises ont été membres du Conseil Exécutif. Il s'agit de M. William ETEKI MBOUMOUA (1962-1968) ; M. Félix LOUNG (1980-1985) ; Dr Adamou NDAM NJOYA (1985-1989) ; Pr Ebénézer NJOH MOUELLE (1995-1999) ; Pr Joseph MBOUI, Vice-Présent pour l'Afrique (2001-2007).

Le Cameroun a également été membre de nombreux organes subsidiaires de l'UNESCO tels que le Bureau International de l'Education (2001-2005), le Comité Juridique (2001-2005), le Conseil Intergouvernemental pour l'Education Physique et le Sport (depuis 2005), et le Conseil Intergouvernemental du Développement de la Communication (PIDC). Le Cameroun apporte enfin tout son soutien à la politique de décentralisation, de restructuration du Secrétariat et des méthodes de gestion de l'Organisation menée par l'actuel Directeur Général, KOÎCHIRRO MATSUURA.

Dans le cadre du placement de ses compatriotes au sein de l'Organisation, l'effectif des Camerounais à l'UNESCO s'élevait à 20 personnes réparties ainsi qu'il suit : deux de rang de Directeur (Grade D1), trois de rang de Cadre Supérieur (Grade P4-P5), quatre de rang de Cadre moyen (Grade P2, P3), onze de rang de Secrétaire ou d'agent. Les Camerounais les plus gradés à savoir Mme Elisabeth MOUNDO, Directeur du Bureau et Représentante de l'UNESCO à Accra (Ghana), M. Peter NGU, Directeur de l'Institut de l'UNESCO à Addis Abéba (Ethiopie) et M. Emmanuel NAAH, Spécialiste Supérieur de programmes à Nairobi (Kenya) occupent des postes hors siège.

Il ressort de ce qui précède que le Cameroun est surreprésenté par rapport aux quotas de répartition géographique du personnel au sein de l'Organisation, même s'il s'avère indispensable pour son rayonnement international, que notre pays place de hauts cadres au sein des instances de l'UNESCO.

En définitive, ces différents succès diplomatiques, en plus de participer au renforcement de sa visibilité internationale, ont pour principale conséquence de placer le Cameroun au centre des grands programmes de l'UNESCO.

SECTION II : LE CAMEROUN ET LES PROGRAMMES D'ACTIVITÉS DE L'UNESCO AU SEIN DES ÉTATS-MEMBRES : UNE CRÉDIBILITÉ HISTORIQUE ?

L'UNESCO, à n'en point douter est une organisation crédible au sein de la société internationale. En effet, la situation conflictuelle de l'histoire de l'humanité a hissé des institutions de promotion de la coopération telles que l'UNESCO à un piédestal aussi élevé que cette organisation est aujourd'hui communément admis comme étant la « conscience du monde ». Cette crédibilité est renforcée par l'agenda de l'UNESCO où l'on retrouve une panoplie de programmes couvrant la quasi-totalité des grandes problématiques universelles de l'heure. En cela, le Cameroun, de par sa « diplomatie de proximité » se présente comme un bénéficiaire essentiel des programmes d'activités de l'UNESCO au sein des États-membres.

PARAGRAPHE I : UNE ORGANISATION CRÉDIBLE AU SEIN DE LA SOCIÉTÉ INTERNATIONALE

A. L'UNESCO ET LA COOPÉRATION INSTITUTIONNELLE INTERNATIONALE

1. CONTEXTE ET ÉVOLUTION HISTORIQUES

La société internationale que nous connaissons aujourd'hui remonte au seuil du Moyen Age en 476, « lorsque l'Empire romain d'occident s'effondre sous la pression des barbares » (Simone Dreyfus, 1981 : 4). Ainsi, le monde civilisé du Moyen Age va se diviser entre la chrétienté et l'islam, et se caractérisera par le régime féodal où le pouvoir est parsemé entre les autorités politiques subordonnées les unes aux autres par des liens personnels. L'État moderne va de ce fait émerger à travers une conquête de l'unité du pouvoir et de la souveraineté (Bodin, Hobbes), même si par la suite, « les liens personnels des sujets envers le roi vont se transformer en liens abstraits des citoyens envers l'État ». Et comme le note Charpentier (2002), « ce sont les révolutions américaine et française qui dissocieront les intérêts de l'États de ceux du prince et rendront la nation titulaire de la souveraineté ».

La conquête de l'Etat va se réaliser à la faveur de deux événements : à savoir la fin du pouvoir politique du pape qui s'amenuise devant la puissance croissante des princes. Cette suprématie temporelle va d'autant plus s'anéantir par la Réforme qui va consacrer la rupture de l'unité de la chrétienté, d'où les frontières religieuses vont coïncider avec les frontières

étatiques avec la Paix d'Augsbourg de 1555. Le second moment qui consacrera l'indépendance de l'État coïncide avec la fin de la tutelle de l'empereur, consacrée par les traités de Westphalie de 1648, d'où le Saint-Empire romain germanique va s'éclater en quelques 350 États ou principautés indépendants. (Charpentier, 2002 : 6).

Dès lors, le développement des relations internationales va se structurer à travers les relations politiques et les techniques juridiques. D'abord les relations politiques entre princes chrétiens par le biais des principes d'équilibre de puissance et de la liberté de la mer ; l'alliance et la guerre constituant de véritables moyens d'action. Ensuite entre princes chrétiens et païens, à travers les traités de capitulation qui permettent aux étrangers d'être soumis à leur propre droit. Le développement des relations internationales va également se structurer autour des relations politiques des princes chrétiens avec les « peuples non civilisés », relations qui vont se matérialiser par la colonisation, dans un but de commerce et d' « évangélisation ». Aussi, « la théorie de l'occupation des territoires sans maîtres et le problème de l'esclavage en découlent ».

Le développement des relations internationales enfin se structure dans les cadres de techniques juridiques que sont les Ambassades et consulats, les traités considérés comme source principale des obligations internationales, et enfin des groupements d'États.

Les doctrines quant à elles seront sous la double influence chrétienne et romaine, d'où les auteurs vont longtemps confondre le droit international public au droit naturel, c'est-à-dire « un droit idéal dicté par la raison et de portée universelle », même si l'étude du droit positif va émerger progressivement (idem : 7). Vitoria, Suarez, Grotius et Vattel sont, à en croire Charpentier, les doctrinaires les plus importants.

C'est dire que l'émergence du droit international se développera à la lisière des relations internationales, et va s'étendre de la Révolution française à la Première Guerre Mondiale, en passant par l'institution de la Sainte-Alliance et du concert européen. C'est dire également sur le plan juridique que « l'un des acquis importants du 1 9ème siècle est la mise au point progressive de cet instrument nouveau des relations internationales que sont les Conférences diplomatiques, devancières des Organisations internationales que nous connaissons aujourd'hui ». (Idem : 30) C'est dire enfin que l'interdépendance accrue des États, associée au progrès technique va rendre nécessaire la coopération internationale multilatérale. Cette coopération qui se développe dans les domaines techniques est à l'origine du succès des organisations techniques, à l'instar de l'Union Télégraphique Internationale créée en 1865 et l'Union Postale Universelle (1874). Organisations techniques qui sont des ancêtres des institutions spécialisées, et donc de l'UNESCO dont les origines remontent au 24

septembre 1924, au moment où le « gouvernement français proposait en effet, l'établissement à Paris d'un institut international de coopération intellectuelle » (Toumba Kotto, 1999 : 4).

Ainsi, les Institutions spécialisées qui vont succéder aux anciennes unions administratives internationales exercent leurs activités dans des domaines très variés. Elles sont dotées d'une personnalité distincte de celle de l'ONU, même si elles sont reliées à l'organisation de New York. C'est ainsi que l'UNESCO s'inscrit dans le cadre des institutions spécialisées exerçant une activité culturelle et scientifique. D'où le système des relations UNESCO-Cameroun s'inscrit dans le cadre global du champ d'observation de la coopération institutionnelle internationale. Mais ceci nécessite d'autres précisions.

2. L'UNESCO COMME PROMOTRICE DE LA COOPÉRATION INSTITUTIONNELLE INTERNATIONALE

Précisons qu'il existe une différence entre les institutions internationales et les organisations internationales. Car dans la perspective de Jean Charpentier, ces dernières sont d'abord des « centres de coopération permanentes entre États » et à ce titre « acquièrent une personnalité propre qui fait d'elles des sujets dérivés du droit international ». Il s'agit en effet d'une « association d'États souverains poursuivant un but d'intérêt commun au moyen d'organes qui lui sont propres » (Charpentier, 2002 : 56). Les institutions internationales, dans un cadre plus large sont constituées d'États et organisations internationales qui composent la société internationale, ainsi que des règles de droit qui régissent leurs rapports. Elles ont donc pour rôle de stabiliser les rapports de force en consolidant les équilibres entre intérêts divergents à travers les traités, en même temps qu'elles constituent « le cadre dans lequel se développent les relations internationales », par la fixation des principes et la détermination des mécanismes (idem : 2). C'est dire que les institutions internationales relèvent des relations internationales comme les institutions internes ressortissent des sociétés nationales, mais avec moins d'efficacité dans la mesure où Charpentier oppose la perfection des institutions internes à l'imperfection des institutions internationales, au sein desquelles l'application des règles uniformes n'est pas aisée, tant il est vrai que chaque État peut résister aux sanctions.

La coopération institutionnelle internationale, telle qu'instituée au sein de l'UNESCO, constitue un enjeu majeur des relations internationales. Ses promoteurs s'inscrivent en faux contre les analystes et praticiens d'inspiration réalistes pour qui « les perspectives de coopération sont peu nombreuses et fragiles et que le droit et les institutions internationales ne peuvent guère favoriser », l'anarchie internationale et le « dilemme de la sécurité » rendant

souvent difficile la coopération au sein de la société internationale. (Smouts et al, 2006 : 79) Pourtant, les pères fondateurs de l'UNESCO étaient convaincus que la convergence des intérêts communs, le nombre d'acteurs et leur influence sur le jeu, et les « mécanismes institutionnelles », peuvent influencer la propension des uns et des autres à coopérer. Et même si la convergence des intérêts particuliers vers un intérêt commun propice à la coopération ne relève guère de l'évidence, il reste que, dans une perspective constructiviste, « un sentiment d'appartenance commune, un respect mutuel, une identité similaire contribuent à la coopération et à son institutionnalisation » (idem, 84). Il s'agit en effet d'une oeuvre commune en vue du rapprochement et de la compréhension mutuelle des différentes cultures, si essentiel au développement et à la pacification de la société internationale des individus.

Ainsi l'UNESCO, au travers de la coopération institutionnelle internationale, strict sensu, vise la stabilisation des enjeux et la favorisation de la transparence par le biais des institutions qui, de ce fait, rendent le futur plus prévisible. Aussi en facilitant un système communicationnel permanent et clarifiant les différentes intentions grâce à des procédures de consultation, l'UNESCO, à travers la coopération institutionnelle internationale permet aux différents acteurs (États, ONG, société civile, individus etc....) de participer à une oeuvre commune dans un cadre où « les incertitudes dans l'évaluation des préférences et des choix politiques des partenaires potentiels » sont véritablement diminuées. C'est du reste ce que laisse percevoir les adeptes de l'institutionnalisme néo-libéral.

B. UN CADRE PROPICE DE CONCEPTION DES GRANDS PROGRAMMES : QUELLE PLACE POUR L'AFRIQUE ?

1. LES DIFFÉRENTS DOMAINES DE COMPÉTENCE DANS LA STRATÉGIE DE L'UNESCO

Au regard de la stratégie à moyen terme (2002-2007) de l'UNESCO pour l'Afrique, laquelle stratégie « vise à contribuer à la paix et au développement humain à l'ère de la mondialisation par l'éducation, les sciences, la culture et la communication », la nouvelle politique de décentralisation mise en oeuvre par l'UNESCO constitue un axe programmatique essentiel. Concrètement, l'objectif essentiel ici est d'adapter les stratégies globales de l'UNESCO aux caractéristiques, conditions et initiatives locales, de soutenir et renforcer la nouvelle politique de décentralisation, qui a pour but de rapprocher les différents pays de l'UNESCO, en même temps que la stratégie constitue un instrument d'information et de coopération, aussi bien chez les États membres que pour l'ensemble des partenaires. En effet,

les défis de la paix et du développement à l'heure de la mondialisation participent des questions délicates pour l'Afrique subsaharienne ; surtout en cette période contemporaine qui forge, à grande vitesse, un système global mondial qui « exploite et marginalise les plus faibles ».

Pour répondre aux besoins de l'Afrique, l'UNESCO entend promouvoir le développement et le renforcement des capacités humaines dans les États membres de la région. Au niveau sous-régional, l'Organisation se propose de favoriser les initiatives à même de faciliter la coordination des programmes dans le domaine de l'éducation de base pour tous. Il s'agira par la suite à l'échelon national, d'aider les différents pays à élaborer des plans d'action nationaux d'éducation, et à mettre en place une stratégie de prévention de lutte contre certaines épidémies, notamment le SIDA. Il s'agira également de mobiliser, sinon de catalyser la coopération internationale à travers la promotion de la participation active de « tous »29 les acteurs à la conception et à la mise en oeuvre des programmes de développement, ainsi que leur implication dans la prise de décision aux plans national et local. Il faut enfin noter qu'une attention particulière devra être accordée aux pays les moins avancés, notamment auprès des groupes les plus défavorisés, à la promotion de l'égalité entre les sexes, à l'utilisation de la science et de la technique pour l'amélioration des conditions matérielles d'existence et, à la responsabilisation des jeunes afin qu'ils participent activement en tant que partenaires de plein droit à « l'élaboration de la société de savoir ».

Plus fondamentalement, l'on note qu'à chaque domaine de compétence de l'UNESCO correspondent des objectifs stratégiques précis et ciblés.

C'est ainsi qu'en ce qui concerne l'éducation, la contribution de l'UNESCO s'inscrit d'abord dans le cadre d'un appui aux objectifs du NEPAD dans ledit secteur. En effet, l'éducation, qui est un préalable, à la croissance économique et à l'élimination de la pauvreté, reste un puissant instrument pour la promotion du bien-être, du progrès civique et social, de la démocratie et du respect des droits de l'homme. Élément indispensable à l'édification de la paix, l'éducation est aussi un facteur prédisposant à un environnement propice à la prospérité du pluralisme et de la diversité culturelle.

A cet effet, le premier objectif stratégique sera de promouvoir l'éducation en tant que droit fondamental conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme. Plus spécifiquement, il s'agira d'assurer la coordination du suivi de l'EPT au niveau régional, sous-régional et national, ceci en étroite coopération avec l'ensemble des partenaires et des

29 Etats membres, OUA, Organisations sous-régionales africaines, le système des Nations unies, la BIRD, la BAD, populations et représentants de la société civile

mécanismes de suivi existant au niveau global. Dans le même sillage, les deuxième et troisième objectifs se proposent d'améliorer la qualité de l'éducation par la diversification des contenus et des méthodes et la promotion des valeurs universellement partagées ; ainsi que de promouvoir l'expérimentation, l'innovation, la diffusion et le partage de l'information et des meilleures pratiques, ainsi que le dialogue sur les principes d'action dans le domaine de l'éducation. Bien entendu, l'UNESCO entend développer et élargir le dialogue dans la mise en oeuvre des différentes politiques éducatives.

Les objectifs stratégiques n°4, 5 et 6, relatifs au domaine scientifique visent respectivement à : promouvoir des principes et des normes éthiques pour guider le progrès de la science, le développement technologique et les transformations sociales ; améliorer la sécurité humaine par une meilleure gestion de l'environnement et du changement social ; et renforcer les capacités scientifiques, techniques et humaines de participation aux nouvelles sociétés du savoir. Convaincus que « la science crée les technologies, qui à leur tour peuvent générer les richesses », les principaux promoteurs voudraient ainsi parvenir à l'allègement de la pauvreté, à l'amélioration de la gestion des ressources et à la lutte contre la dégradation de l'environnement. Pour ce qui est des sciences sociales et humaines, deux défis majeurs restent à relever ici : à savoir l'instauration de la paix et de la démocratie qui implique la fin des guerres et des conflits, et la consolidation des sociétés sur la base de principes de justice sociale et d'attitudes de tolérance. L'autre grand défi est celui de l'éradication de la pauvreté y compris par la lutte contre le VIH/Sida et ses conséquences, et en terme de ressources, par l'allègement de la dette.

Si promouvoir l'élaboration et l'application d'instruments normatifs dans le domaine culturel constituent un défi stratégique spécifique, c'est parce qu'il est essentiel à cet autre objectif qui vise à protéger la diversité culturelle et à encourager le dialogue entre les cultures et les civilisations. C'est également pour mieux s'endosser au neuvième objectif qui promeut le renforcement des liens entre la culture et le développement à travers la consolidation des capacités et le partage des connaissances.

Enfin, la communication et l'information sont nécessaires à une participation effective des communautés et des citoyens à la vie démocratique des sociétés. Or dans le continent africain, les infrastructures en matière de télécommunication et de diffusion de masse restent peu ou pas développées, la formation à l'utilisation des TIC étant inadéquate lorsqu'elle n'est pas simplement absente dans un environnement où l'analphabétisme persiste, et où « les coûts d'accès à Internet... sont 5 à 10 fois plus élevés que dans les pays du Nord »30. C'est en tenant

30 Tirée de la revue publiée par la Commission nationale camerounaise pour l'UNESCO : 2005 :103

compte de ces réalités que l'objectif stratégique n°10 se propose d'encourager la libre circulation des idées et l'accès universel à l'information. Il s'agira ensuite de promouvoir l'expression du pluralisme et de la diversité culturelle dans les médias et les réseaux d'information mondiaux (n°11), et ceci en tenant compte des besoins propres aux différents publics cibles, notamment les femmes et les enfants ; l'objectif final étant d'assurer l'accès pour tous aux technologies de l'information et de la communication. En cela, l'on espère atteindre des zones rurales et régions défavorisées, afin d'accroître la participation sociale des populations concernées. Mais parce que le système des Nations unies s'est imposé des défis majeurs pour le nouveau millénaire, il convient de s'y attarder quelque peu, afin de pouvoir relever la responsabilité de l'UNESCO.

2. LE ROLE MAJEUR DE L'UNESCO A L'ÉGARD DES RÉCENTS ENGAGEMENTS DES NATIONS UNIES

L'UNESCO a certainement un grand rôle à jouer dans le cadre des objectifs majeurs des Nations unies en ce début de millénaire, au sein de la société internationale. Aussi, convient-il d'abord de préciser lesdits objectifs, avant d'explorer le rôle attendu à l'égard de l'UNESCO, principalement à travers l'EPT.

2-1. LES OBJECTIFS MILLENAIRES POUR LE DÉVELOPPEMENT (OMD)

Devenue l'expression du système des Nations Unies la mieux partagée, le concept des `'Objectifs Millénaires pour le Développement» (OMD) remonte au Sommet Millénaire réunissant en septembre 2000 les dirigeants politiques du monde entier. De ce Sommet naîtra un ensemble d'objectifs mesurables qui vont être placés au centre du programme d'action mondial, et assortis d'un délai (2015) pour lutter contre la pauvreté, la faim, la maladie, l'analphabétisme, la dégradation de l'environnement et la discrimination à l'égard des femmes. A côté de ces objectifs majeurs, la Déclaration du Millénaire prévoit également une vaste gamme d'engagements dans les domaines comme les droits de l'homme, la bonne gouvernance et la démocratie.

Il faut dire après huit ans que le monde évolue dans le sillage des OMD, même si les progrès réalisés sont inégaux lorsqu'ils ne sont pas trop lents. C'est que les OMD restent un cadre dans lequel le système des Nations unies tout entier collabore de façon étroite pour réaliser ces objectifs communs. Et c'est pourquoi le Groupe des Nations Unies pour le

développement (GNUD) s'emploi à ce que lesdits objectifs soient au coeur des efforts. Qui plus est, l'ex Secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, au lendemain du Sommet, avait confié la coordination de la campagne et des activités de suivi menées au niveau des pays en vue d'atteindre les OMD, au président du GNUD, Mark Malloch Brown. Cette tâche pour l'essentiel portait sur l'assistance concrète à l'appui des priorités nationales ; le suivi au niveau des pays à travers des rapports produit de la collaboration entre le gouvernement d'un pays, le secteur privé et la société civile ; la direction de la recherche par le conseiller spécial de Koffi Annan pour les OMD, le professeur Jeffrey Sachs ; le suivi au niveau mondial ; et enfin les activités de sensibilisation, fondées sur les stratégies et les besoins nationaux.

De manière plus détaillée, huit objectifs sont à atteindre à 2015 :

- Réduire de moitié l'extrême pauvreté et la faim, 1, 2 milliard de personnes vivant encore avec moins d'un dollar par jour.

- Réduire de trois quarte la mortalité maternelle, le risque de mourir en couche étant de 1 sur 8 dans les pays en développement.

- Assurer l'éducation primaire pour tous31, car treize millions d'enfants ne vont pas à l'école. Combattre les maladies, en particulier le VIH/sida et le paludisme, maladies meurtrières ayant eu à annuler les progrès de développement.

- Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes, deux tiers des analphabètes dans le monde étant des femmes, et 80% des réfugiés étant des femmes et des enfants.

Assurer un environnement durable, à travers un accès à l'eau potable qui fait encore défaut à plus d'un milliard de personnes.

- Réduire de deux tiers la mortalité des enfants de moins de 5 ans, car onze millions de jeunes enfants meurent chaque année.

- Mettre en place un partenariat mondial pour le développement, en fixant des objectifs relatifs à l'aide, aux échanges commerciaux et à l'atténuation de la dette. Car trop de pays en développement dépensent davantage pour les services sociaux.

Enfin à travers ses activités, l'UNESCO oeuvre principalement en faveur de quatre OMD des Nations Unies : A savoir ceux qui visent à réduire de moitié la proportion de la population vivant dans l'extrême pauvreté ; à aider les pays à inverser la tendance à la déperdition des ressources environnementales ; à éliminer les disparités entre les sexes dans l'éducation primaire et secondaire ; enfin à assurer l'éducation primaire universelle dans tous les pays. Aussi, convient-il de repréciser ce concept d'éducation pour tous.

31 C'est nous qui soulignons

2-2. ÉDUCATION POUR TOUS (EPT)

L'idée d' « Éducation pour tous » remonte au premier forum mondial sur l'éducation tenu en mars 1990 à Jomtien en Thaïlande. Lors de cette Conférence en effet, toute la communauté internationale s'était engagée à offrir à toute personne « enfant, adolescent ou adulte », une formation conçue pour répondre à ses besoins éducatifs fondamentaux, et ceci à l'échéance 2000. Dix ans après, l'évaluation de la mise en oeuvre de cet engagement, en dépit de quelques progrès en registrés dans certains pays, montrera que 121 millions d'enfants dont 65 millions de filles dans le monde ne vont pas encore à l'école. Le concept va de ce fait être redéfini lors du deuxième forum mondial sur l'éducation tenu à Dakar du 26 au 28 avril 2000. Il traduira désormais l'engagement collectif de la communauté internationale à assurer à l'horizon 2015, les objectifs suivants :

- Développer et améliorer sous tous leurs aspects la protection et l'éducation de la petite enfance, et notamment des enfants les plus vulnérables et défavorisés ;

- Faire en sorte que d'ici à 2015 tous les enfants, notamment les filles, les enfants en difficulté et ceux appartenant à des minorités ethniques, aient la possibilité d'accéder à un enseignement primaire obligatoire et gratuit de qualité et de le suivre jusqu'à son terme ;

- Répondre aux besoins éducatifs de tous les jeunes et de tous les adultes et de tous les adultes en assurant un accès équitable à des programmes adéquats ayant pour objet l'acquisition de connaissances ainsi que de compétences nécessaires dans la vie courante ;

- Améliorer de 50% les niveaux d'alphabétisation des adultes, et notamment des femmes, d'ici à 2005 et instaurer l'égalité dans ce domaine en 2015 en veillant notamment à assurer aux filles un accès équitable et sans restriction à une éducation de base de qualité avec les mêmes chances de réussite ;

- Améliorer sous tous ses aspects la qualité de l'éducation dans un souci d'excellence de façon à obtenir pour tous des résultats d'apprentissage reconnus et quantifiables - notamment en ce qui concerne la lecture, l'écriture et le calcul et les compétences indispensables dans la vie courante32.

En tant que chef de file de ce vaste programme, l'UNESCO qui orchestre les efforts consentis par la communauté internationale dans l'optique d'atteindre ces objectifs, s'attache à mobiliser les volontés politiques et à coordonner les efforts de toutes les parties prenantes

32 Source : Cadre d'action de Dakar, l'Education pour tous : tenir nos engagements collectifs, adopté par le forum mondial sur l'éducation (Dakar, Sénégal, 26-28 avril 2000), Paris, UNESCO, 2000, par.7.)

parmi lesquelles les partenaires de développement, gouvernements, ONG et la société civile. Exprimé autrement, l'éducation pour tous est au coeur des grandes actions de l'UNESCO pour :

- assister les pays dans la formulation de leurs politiques éducatives ;

- développer et diffuser des matériels - bonnes pratiques, manuels scolaires, kits de formation des enseignants - conçus pour couvrir un large éventail de questions, du développement durable à l'éducation pour la paix ;

- établir de nouvelles normes et standards, par exemple pour l'enseignement professionnel et technique et en matière de reconnaissance des diplômes de l'enseignement supérieur ;

- identifier les tendances actuelles et les stratégies appropriées pour répondre aux nouveaux problèmes affectant l'éducation, comme le sida ;

- porter une attention particulière à l'Afrique, aux pays les moins avancés et aux neuf pays les plus peuplés qui abritent plus de 70% des analphabètes adultes du monde et près de la moitié des enfants non scolarisés ;

- développer de nouvelles méthodes pour fournir un enseignement aux personnes aux personnes ayant des besoins spéciaux, vivant dans la rue, dans des zones de conflits ou d'urgence ;

- faciliter des partenariats entre les acteurs publics, privés et non gouvernementaux pour assurer une meilleure coordination des efforts et entretenir l'engagement politique33.

Toujours dans le cadre de l'EPT, l'objectif de l'égalité entre les sexes, présent à travers toutes ces actions, est aussi l'objet d'une série de projets sur le terrain, qui vont des programmes d'éducation à distance et des systèmes de micro crédit dans les zones rurales à des services de conseil aux femmes et aux filles en Afrique. En outre de nouvelles approches éducatives pour les droits de l'homme et le développement durable, ainsi que la réforme des programmes et la révision des manuels scolaires pour refléter les besoins socioculturels et promouvoir une culture de paix, vont rentrer dans les plans de l'UNESCO pour permettre une vie harmonieuse au sein des sociétés.

Il faut dire pour ce qui est des mécanismes de coordination de l'EPT, que l'élément principal de la stratégie pour atteindre les six objectifs de Dakar consiste à « susciter au niveau national et international, un puissant engagement politique en faveur de l'éducation pour tous, définir des plans d'action nationaux et augmenter sensiblement l'investissement dans l'éducation de base ». Et parce qu'une telle tâche exige le développement de mécanismes appropriés de dialogue, de participation et de mobilisation, le cadre d'action de Dakar va

33Confère site www.unesco.org/education/efa

suggérer la mise en place de forum (nationaux, sous-régionaux et internationaux) ayant pour but d'organiser un Cadre d'Action fondé sur un partenariat efficace entre les Partenaires Techniques Financiers (PTF), la société civile et les gouvernements.

C'est dire que les objectifs de l'EPT contribuent aussi à la réalisation mondiale des huit OMD, précisément l'objectif N°2 relatif à l'enseignement primaire universel et l'objectif N°3 qui concerne l'égalité des sexes à l'horizon 2015. Agence spécialisée des Nations Unies, le rôle de coordination de l'EPT revient de « jure » et de « facto » à l'UNESCO dans la mesure où les questions internationales relatives à l'éducation relèvent prioritairement de sa compétence. Suivons à cet effet l'allocution du représentant de l'UNESCO à l'occasion de la cérémonie de lancement officiel de la Semaine Mondiale de l'EPT au Cameroun, le 23 avril 2008 : « En tant qu'institution chef de file pour l'éducation, l'UNESCO a reçu pour mandat de coordonner les efforts internationaux visant à la réalisation des objectifs de l'Education pour tous. A cet égard, sa mission est de promouvoir l'éducation en tant que droit fondamental, d'améliorer la qualité de l'éducation et de stimuler l'expérimentation, l'innovation et le dialogue sur les politiques.

Dans son rôle de coordination de l'EPT, l'UNESCO aide, de concert avec les coparrains de ce mouvement que sont le PNUD, l'UNFPA, l'UNICEF et la Banque mondiale, à établir et à maintenir des partenariats aux niveaux national et international, plus précisément, faciliter le dialogue entre les partenaires de l'EPT, assurer des liens effectifs entre différents forums d' EPT et de suivi des OMD, et recenser les contributions actuelles et futures de chaque partenaire à la réalisation des objectifs de l'EPT.

En tant qu'agence spécialisée des Nations Unies, entre autres, dans le domaine de l'éducation, l'UNESCO contribue au quotidien au renforcement des capacités nationales, crucial pour atteindre les objectifs de l'EPT, par la mise à disposition de l'expertise adéquate auprès des pays qui en expriment la demande comme c'est le cas du secteur de l'éducation camerounais. »

De ce qui précède, il appert que la contribution de l'UNESCO est essentielle pour le progrès de l'éducation au sein des États membres. Sauf que la réussite du projet est aussi fonction de choix politiques qui, il faut le noter, ne sont pas aisés à déterminer du fait de la non convergence des intérêts ou priorités des parties prenantes à l'éducation. D'où la nécessité des dialogues et concertations en nombre important afin d'harmoniser les points de vue. D'où également la mise en place des mécanismes de coordination et d'appui à l'EPT. Mais aussi et surtout, les progrès de l'éducation dépendent de la prise en compte des aspirations profondes des populations cibles, aspirations dont la traduction au sein des grandes

rencontres internationales et nationales relève prioritairement du devoir de l'État, garant ultime de l'intérêt national.

Au total, trois valeurs fondamentales forgent la philosophie et la spécificité du programme EPT réaffirmé à Dakar. Il s'agit d'abord d'une vision globale fondée sur des objectifs larges, transversaux et complémentaires : l'éducation pour tous tout au long de la vie est un droit des peuples, non pas une variables économique destinée à être ajustée selon les besoins du marché ou les ressources disponibles. Ensuite, s'agit-il d'une stratégie axée sur un partenariat actif et équilibré regroupant l'ensemble des acteurs autour d'un plan national crédible conduit sous l'autorité du gouvernement. Enfin, la participation active de la société civile à tous les stades d'élaboration, de mise en oeuvre et de suivi des programmes EPT, au travers de mécanismes institutionnalisant la participation de ses structures représentatives. Au total, force est de relever que le Cameroun occupe une place essentielle dans la mise en oeuvre de ce vaste et alléchant programme, signe de la crédibilité des rapports que ce pays entretient avec l'agence spécialisée des Nations unies.

PARAGRAPHE II : LE CAMEROUN COMME PARTENAIRE DE CHOIX DES ACTIVITÉS DE L'UNESCO EN AFRIQUE

Les activités de l'UNESCO au Cameroun couvrent tous les domaines de compétence de l'organisation que sont l'éducation, la science, la culture et la communication. L'action de l'UNESCO couvre en outre des domaines nouveaux que sont les droits de l'Homme et l'environnement, qui généralement sont intégrés au sein des domaines classiques. Mais encore, des domaines « transdisciplinaires » à l'instar de celui relatif à la lutte contre le Sida y sont également intégrés.

A. LA CONTRIBUTION DE L'UNESCO A LA MISE EN PLACE DU CENTRE INTERNATIONAL DE REFERENCE CHANTAL BIYA (CIRCB)

Le Centre International de Référence « Chantal Biya » pour la recherche sur la prévention et la prise en charge du VIH/SIDA (CIRCB) est situé à Yaoundé dans l'enceinte du Centre Hospitalier Universitaire (CHU). Pour une meilleure appréciation de la contribution de l'UNESCO à son fonctionnement, il convient de mener une investigation du projet depuis ses origines

1. ORIGINES DU PROJET

Le professeur Montagnier, codécouvreur du virus VIH, préside la Fédération Mondiale Recherche et Prévention SIDA, dont la mise au point d'un vaccin pédiatrique éliminant la transmission du VIH de la mère à l'enfant, constitue l'objectif à terme. Ce faisant, ledit objectif rentre dans le cadre du projet Family First Africa lancé par l'UNESCO en 2002. Projet d'envergure international, il va connaître un engagement des différents acteurs internationaux tels les États, les institutions internationales, les ONG, pour ne citer que ceux- là. A titre illustratif, l'Italie a contribué pour 2 millions de dollars américain au lancement du projet, auquel l'Institut de Virologie humaine à Baltimore de l'Université de Maryland, se sont associées dans la mise en oeuvre.

En effet, il existe déjà des mesures thérapeutiques pour réduire la transmission mère- enfant, mais « un traitement qui supprime totalement la transmission n'existe pas toujours ». Qui plus est, les spécialistes se sont aperçus il y a quelque temps que l'allaitement réinfectait le nourrisson et que le taux d'infection au bout d'un an est le même que si l'enfant était resté sans aucun traitement. Fort de ce constat, le projet du vaccin pédiatrique se focalise sur les enfants infectés par l'allaitement. Le vaccin devant protéger l'enfant tout au long de l'allaitement, soit une période de deux années.

Il est indiqué de noter que les chercheurs venant de tous horizons travaillent en symbiose en vue de l'obtention des résultats efficients. Ce qui est primordial pour l'identification des variations des gènes de réponse au virus, qui sont fonction des populations respectives. Au niveau de l'Afrique également l'on dispose des Centres de recherche qui dispensent des thérapies aux patients et, en parallèle, participent activement à la recherche clinique dont celle d'un vaccin pédiatrique. Nous pouvons citer le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire et le Cameroun parmi les pays disposant d'un Centre en Afrique.

C'est dire en effet que sous un même toit, se trouvent regroupés la prévention, le traitement et la recherche. Ceci, selon le Professeur Montagnier, s'explique par la volonté des concepteurs du projet d' « associer les sciences aux activités éducatives pour que les populations et les formateurs soient bien informés ». « Ainsi, va-t-il poursuivre, est prévu dans chaque Centre une salle multimédia consacrée à la formation ». Toutefois, au moins pour ce qui est de l'Afrique, ces Centres sont butés à un certain nombre de difficultés inhérentes aussi bien à leur existence, qu'à l'environnement.

L'on comprend alors par là que la réussite d'un tel projet nécessite la mobilisation de « toute » la communauté internationale qui doit travailler ensemble en vue de réduire, sinon d'éradiquer cette pandémie du XXe siècle que l'on pourrait bien assimiler à une arme de

destruction massive. Une telle mobilisation suppose à son tour la participation de « tous » les acteurs du système international, qu'ils soient étatiques ou non, individuels ou collectifs, ou encore qu'ils relèvent des Organisations supra étatiques. Les professeurs Montagnier, Gallo et Vittorio, représentent parfaitement ces individus-acteurs-internationaux, issus des nationalités différentes, mais unis pour une oeuvre commune. Non moins importante constitue la participation de l'UNESCO à travers le projet Family First Africa (voir supra). Peut-être, le CIRCB rentre également dans la volonté d'un pays qui veut désormais inscrire son nom dans la construction processuelle de la « paix perpétuelle » internationale, paix qui passe également par la lutte contre les grandes pandémies, causes par excellence du sous-développement durable. Volonté elle-même s'inscrivant dans la perspective d'un continent qui, plus que jamais, se refuse d'être l'éternel objet des relations internationales.

2. NAISSANCE DU CIRCB : UNE INITIATIVE DU GOUVERNEMENT CAMEROUNAIS CERTES...

2-1. RAISON D'ETRE

Le Centre International de Référence Chantal Biya (CIRCB) pourrait à bien des égards être considéré comme étant le produit de la Fondation Mondiale de Recherche et Prévention du VIH/SIDA (FMRP), et du projet Family First Africa (FFA). Créé par Arrêté du Ministère de la Santé Publique en date du 17 Février 2006, le Centre est considéré par ses promoteurs comme l'aboutissement des efforts de la Première Dame du Cameroun, dont il porte d'ailleurs le nom. Inauguré le 23 février de la même année, il constitue également le résultat d'un énorme plaidoyer initié par les Premières Dames d'Afrique à travers un certain nombre de partenaires, ceci par le biais de l'ONG Synergies Africaines. De manière plus claire, le CIRCB a été créé par le Gouvernement camerounais avec la coopération de l'UNESCO, de la FMRP et du Gouvernement italien.

Stricto sensu, le Centre entend participer à l'élan global de la communauté internationale pour accélérer les connaissances et la qualité des soins et services destinés aux personnes infectées et affectées par la pandémie. Organisation à vocation régionale, le CIRCB aspire à devenir un membre actif du réseau africain de Centre et d'Institution de recherche scientifique africaine en vue d'intégrer et de développer la recherche clinique vaccinale et thérapeutique dans le domaine des grandes endémies en Afrique, dont les plus importantes sont notamment le VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme.

Pour ce faire, le Centre s'est entouré des partenaires crédibles aux niveaux international et national. Comme partenaires nationaux du Centre, nous avons en premier ressort le Ministère de la Santé Publique, responsable institutionnel qui représente également l'État camerounais. Le Ministère de la Recherche Scientifique et de l'Innovation, le Centre Hospitalier Universitaire de Yaoundé, et la Faculté de Médecine de Yaoundé, complètent la liste des partenaires nationaux. Plus important est le nombre constituant la liste des partenaires internationaux. Aussi pourrions nous mentionner la FMRP du professeur Montagnier à Paris en France ; l'UNESCO ; l'Institut Supérieur de Santé et Université Tor Vergata de Rome en Italie ; l'Institut de Virologie Humaine de Baltimore aux USA ; le Centre Intégré de Recherche Bioclinique à Abidjan en Côte d'Ivoire ; le Centre de Recherche Sainte Camille à Ouagadougou au Burkina Faso ; les Synergies Africaines contre le SIDA et les souffrances à Yaoundé au Cameroun ; la Fondation CLINTON à New York, et la Fondation Bill et Melinda GATES aux USA.

2-2. ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT

L'Administration du CIRCB est constituée de quatre (4) responsables chargés de veiller à sa gestion quotidienne. Les Docteurs Pierre Joseph FOUDA et Odile OUWE MISSI OUKEM occupent respectivement les charges d'Administrateur et d'Administrateur Adjoint. Font également partis de l'administration, le Chef Section des Affaires Générales, le Dr Faustin MVOGO, et le Chef Section Technique, Dr Giula CAPPELLI.

Le Comité de Gestion est l'organe chargé d'examiner toutes les questions relatives à l'organisation et au fonctionnement du Centre. Monsieur Jean Stéphane BIATCHA assure sa présidence, tandis que la Vice-présidence n'est assurée par tout autre que : le Pr. Luc MONTAGNIER. Y font également partis, des Membres dits statutaires que sont : les Services du Premier ministre ; les Ministères de la Santé Publique ; de la Recherche Scientifique et de l'Innovation ; de l'Économie, de la Planification et de l'Aménagement du Territoire ; et de l'Éducation de base. L'UNESCO, les Synergies Africaines contre le SIDA et les Souffrances, le Directeur Général du CHU, et l'Ambassadeur d'Italie au Cameroun, enfin viennent compléter la liste des Membres statutaires du Comité de gestion du CIRCB.

La Section Technique, quant à elle, est composée de deux unités et de quatre secteurs. Le Secteur d'immunologie où l'on retrouve le dépistage et confirmation des infections, numération lymphocytaire, activation et production des cytokines, identification des épitropes immunogènes et typage HLA etc. ; le Secteur de Biochimie et Hématologie : bilan biologique

pour le suivi des Personnes Vivant avec le VIH/SIDA (PVVS) et pour la recherche clinique et vaccinale ; le Secteur d'épidémiologie et bio-informatique: analyse des données de séquences et sous-types viraux, du polymorphisme immunitaire, de la progression technique de la maladie et des déterminants sociaux plus relevant ; le Secteur de virologie : détermination de la charge virale, étude des résistances génétiques aux antirétroviraux, séquençage des souches virales. A côté de ces différents Secteurs se trouvent les Unités de recherche clinique pour les essais vaccinaux ; et de maintenance pour les appareils biomédicaux : « le Centre entend devenir une institution de référence pour la formation dans une bonne utilisation et la maintenance des appareils de cytométrie en flux ».

A noter aussi l'Agence de prévention qui est une activité en développement, dirigée vers les communautés telles que les établissements scolaires et universitaires, les entreprises et les communautés rurales. Une Section médicale s'occupe également des patients qui sollicitent les services du Centre, notamment pour les différents examens biologiques des PVVD. Un Centre de Documentation et d'Information sur le VIH/SIDA (CDI), doté d'un espace numérique avec connexion Internet, est ouvert gratuitement à tout public. Centre référentiel en la matière, il compte proposer à l'avenir, des formations en présentiel et à distance.

Le Conseil Scientifique est l'organe consultatif chargé d'approuver les programmes de recherche du Centre, de valider les protocoles de recherche sur le plan méthodologique, et d'évaluer ses activités de recherche. Les professeurs Luc MONTAGNIER et Peter NDUMBE assurent respectivement la présidence et la vice-présidence. Parmi les membres se trouvent les professeurs Emmanuel EBEN MOUSSI, Rose LEKE, Victor ANOMAH NGU, Vittorio COLIZZI, David PAUZA, Jacques THEZE, et le Docteur Saladin OSMANOV.

Non moins important est l'autre organe consultatif qu'est le Comité d'Éthique dont l'une des missions est de vérifier que les droits fondamentaux de la personne humaine sont pris en compte dans les travaux de recherche. Il est composé des professeurs Rose LEKE, WALAINJOM MUNA, Godfrey TANGWA ; des dames Thérèse MALONGUE épse ATANGANA, Lucie ZAMBOU ; des sieurs Isaac TITA, LIMAN MALOUM ; et des autorités religieuses, le Pasteur Emile BAKONG MBOMA, et l'Abbé Jacques Philippe TSALA TSALA.

De ce qui précède, nous remarquons que la vocation internationale du CIRCB est plus qu'illustrative en ce sens que toutes les catégories d'acteurs y sont représentées, venant de tous les coins du globe. Une telle initiative qui suppose la mobilisation d'une pluralité d'acteurs participatifs porterait en en point douter les germes d'une coopération dite

« fructueuse »34. Dans la moindre des hypothèses, elles entretiennent des « affinités électives », au sens où l'entendait Max Weber. Ce que nous voulons démontrer ici, c'est non pas que la mobilisation des acteurs venant d'horizons différents est en soi une garantie de la réussite d'un projet, dans le sens de rendement efficient. Il s'agit encore moins de prétendre qu'une coopération fructueuse est celle qui mobilise une panoplie d'acteur. Ce que nous voulons affirmer, c'est qu'un projet fondé au départ sur la participation effective de « tous » les acteurs concernés et qui peuvent y apporter un plus pour sa réalisation, constitue à n'en point douter un facteur prédisposant à l'atteinte des objectifs escomptés (surtout si son utilité n'est guère remise en cause). Facteur prédisposant, avions-nous dit, qui n'est pas à confondre avec le facteur mécanique dans la mesure où nous tenons compte de la complexité du fait social, avec ses aléas et imprévus, mais aussi avec ses « effets pervers ». Exprimé autrement, il s'agit de l'humus ou de l'engrais qui permet au grain semé de trouve un terrain favorable à sa croissance, parce que fertile. Sauf que la garantie d'une bonne récolte suppose également que l'on puisse contourner les caprices du temps ou de la saison, ainsi que la sécurisation du fruit contre les bêtes sauvages et/ou domestiques.

Quoi qu'il en soit, l'on observera que les autorités camerounaises se sont entourées des meilleurs partenaires indiqués pour ce type de projet. Conscient que la réussite d'une telle initiative est fonction de sa propre détermination, et que la meilleure posture d'attente de la mobilisation internationale est de pouvoir présenter au préalable sa propre contribution, l'État camerounais n'a ménagé aucun effort pour la mise en place du centre. Ainsi, l'Arrêté de création est d'abord un Arrêté camerounais, la construction du bâtiment relevant aussi de son oeuvre. Et il n'est pas exagéré de dire que la visibilité de cet édifice a permis l'accélération du projet, ainsi que son installation. A noter enfin les subventions accordées chaque année par l'État camerounais, à travers le MINSUP. Un tel engagement permet de mieux appréhender la contribution des autres partenaires internationaux, à l'instar de l'UNESCO.

3. ...LA « TOUCHE » DE L'UNESCO RESTE CEPENDANT DÉTERMINANTE

La contribution de l'UNESCO au fonctionnement du CIRCB est matériellement appréciable. Mais en amont, elle reste très considérable à travers le projet Family First Africa (FFA).

34 Mais à condition que les différents acteurs parlent véritablement le même langage, participent à l'amélioration de « l'humaine condition »

3-1. LE PROJET « FAMILY FIRST AFRICA » COMME PRÉALABLE AU CIRCB

Dans le Programme et Budget UNESCO pour le biennal 2002-2003, l'UNESCO s'engage à aider « les pays les plus touchés par la pandémie à avoir un meilleur accès au savoir scientifique sur le VIH/SIDA, afin d'étayer les efforts nationaux visant à donner à tous la possibilité d'accéder aux traitements et d'encourager la mise au point de vaccins par la recherche scientifique ». Chemin faisant, la période 2003 -2006 va être le témoin du lancement d'un projet novateur intitulé « FFA », visant à briser le cercle vicieux de la relation établie entre l'infection par le VIH et la désintégration des cellules familiales africaines.

Projet UNESCO, FFA a été rendu possible grâce au financement du Gouvernement italien. Il est mené de concert avec la FMRP, l'Institut de Virologie humaine et l'Université « Tor Vergata », pour soutenir les programmes de lutte contre le VIH/SIDA en Côte d'Ivoire, Burkina Faso et au Cameroun. Trois objectifs essentiels sous-tendent le projet :

- Militer en faveur des programmes de lutte contre le sida axés sur la famille, notamment ceux qui visent les nouvelles initiatives destinées à la limitation de la transmission du virus de la mère à l'enfant.

- Mettre en place une communauté internationale associant l'Afrique et les pays avancés, dans le but de limiter la propagation du VIH au moyen de l'éducation préventive et la mise en place de plates-formes novatrices pour la protection des nouveaux-nés ; et

- Enseigner les compétences scientifiques et médicales de base nécessaires à une stratégie de prévention locale et de programme de recherche chez des partenaires de pays africains, au travers de la formation, d'échanges internationaux d'étudiants et de coopération à long terme.

Ce que l'on espère ici, c'est d'améliorer la technologie sanitaire dans les pays partenaires, qui contribueront à lutter contre d'autres maladies émergentes et réémergentes, et de tisser un lien visant à améliorer la santé publique et l'enseignement scientifique. Et ceci grâce au renforcement des capacités locales d'animation et des initiatives libres pour lutter contre le SIDA. Pour y parvenir, le projet « FFA » se propose de :

Nouer des partenariats dans le domaine scientifique et de l'éducation entre les PED et pays avancés ; garantir une formation et l'accès à des programmes d'enseignements supérieurs destinés aux médias africains ; mettre au point des compétences innovantes adaptées, axées sur la recherche scientifique en vue de l'éducation préventive, notamment en ce qui concerne la transmission mère-enfant ; mettre en place une plate-forme novatrice « tuberculose et vaccination néonatale contre le SIDA » par le développement de la recherche

en Afrique ; créer et promouvoir des centres spécifiques en Afrique associant recherche, formation et éducation préventive.

3-2. LA CONTRIBUTION DIRECTE DE L'UNESCO AU SEIN DU CIRCB

L'État camerounais a rédigé un grand projet que l'UNESCO s'est chargé de ventiler auprès des bailleurs de fonds. D'où le projet « FFA » a permis l'équipement du centre de documentation. Plus précisément, la contribution matérielle de l'UNESCO pourrait s'énoncée ainsi qu'il suit :

- un équipement en réactif du laboratoire, à hauteur de 40 millions ;

- une cinquantaine de livre pour la bibliothèque ;

- un centre multimédia, doté d'une dizaine d'ordinateurs écrans plats, avec accès gratuit sur internet, pour tout le monde, usagers comme étudiants et chercheurs, pour le moment !

Il faut dire que l'UNESCO s'est certes engagée à atténuer l'impact de la pandémie, à travers une contribution interdisciplinaire. Et parce que les initiatives visant à lutter contre le SIDA proviennent de la découverte du virus et de la recherche et des connaissances scientifiques de ceci, l'Organisation a donc un rôle capital à jouer dans la promotion et le soutien de la diffusion de l'information scientifique sur :

- la biologie des organismes infectés en général, et plus particulièrement par le VIH ; - la prévention de l'infection ;

-le traitement et le soin des personnes contaminées, y compris l'information scientifique sur les médicaments disponibles pour la thérapie ;

- la recherche fondamentale dans le domaine du VIH et du SIDA et son rôle dans la lutte contre la pandémie.

La contribution de l'UNESCO n'est pas uniquement matérielle. Bien plus important reste le travail effectué en amont. Suivons à cet effet les propos recueillis auprès du Chef Section des Affaires Générales, le Dr Faustin MVOGO : « l'UNESCO nous a beaucoup aidé lorsqu'il a fallu plaidoyer pour la création du Centre. L'appui de l'UNESCO est indispensable pour la mise sur pied d'une maison internationale. Le plaidoyer international a été fait par la Fondation de Montagnier, des Synergies Africaines, du MINSANTE et de l'UNESCO », tous ensemble ! Faut-il enfin ajouter que dans le fonctionnement quotidien du CIRCB, l'UNESCO apporte sa contribution comme membre du Comité de gestion, et participe à la prise des décisions. Enfin, la contribution de l'UNESCO à la mise en place du CIRCB semble à plusieurs égards, refléter son action dans le cadre de ses différents domaines de compétence.

B. LES ACTIVITÉS DE L'UNESCO AU CAMEROUN

1. UNE ACTION QUI COUVRE TOUS LES DOMAINES DE COMPÉTENCE DE L'UNESCO...

Les activités de l'UNESCO au sein du territoire camerounais sont aussi vieilles que l'existence même du Cameroun en tant que nation souveraine. Elles couvrent pratiquement tous les domaines de compétence de cette institution. Aussi, il sied de relever succinctement les actions majeures de l'UNESCO au Cameroun.

Dans le domaine de la culture, par exemple, l'UNESCO apporte son soutien au recensement du patrimoine immatériel camerounais, à la restauration des sites historiques, à la valorisation des traditions orales et du patrimoine culturel. La promotion du livre et des festivals culturels, ainsi que des droits d'auteurs, ont également bénéficié du soutien de ladite institution. Ce secteur se présente avec la science comme `les parents pauvres' de la coopération de l'UNESCO au sud du Sahara, comparativement aux autres. Pour ce qui est de la coopération scientifique en effet, l'UNESCO appuie la recherche scientifique ainsi que la protection et la valorisation du patrimoine forestier, faunique et environnemental camerounais. On peut à ce titre citer l'appui de l'UNESCO en faveur du suivi au Cameroun du programme sur l'Homme et la Biosphère (MAB), l'appui à la réserve forestière et de la faune du Dja35, les subventions accordées à l'école de Faune de Garoua et à l'évaluation du potentiel scientifique national. On peut dans la même logique citer le financement de séminaires organisés au Cameroun sur l'environnement, les réserves de biosphère et les énergies renouvelables.

L'action de l'UNESCO au Cameroun, en plus de la science et de la culture, est beaucoup plus considérable dans le domaine de l'éducation et de la communication. En cela, l'institution spécialisée apporte son appui à l'Ecole Supérieure des Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication basée à Yaoundé (ESSTIC), au perfectionnement des spécialistes de la communication et à l'implantation de plus de quinze radios rurales et des centres multimédia destinés aux populations rurales. D'ailleurs, l'étude du fonctionnement des radios rurales de Mbalmayo et de Sa'a, villes se trouvant à la périphérie de Yaoundé, ne

35 Située en plein coeur de la forêt équatoriale, dans la région sud-est du pays, précisément dans le département du Dja et Lobo

sera pas oubliée dans ce travail de recherche, compte tenu de leur impact auprès des zones périphériques, mais aussi de leur contribution à la vulgarisation de l'éducation des masses.

Dans le domaine de l'éducation, l'action de l'UNESCO au Cameroun s'inscrit prioritairement dans la promotion de l' « éducation pour tous ». Ce programme, qui constitue un socle tangible de notre objet d'étude, est issu du Forum mondial sur l'éducation tenu à Dakar en 2000, Forum au sein duquel la communauté internationale s'est engagée à améliorer, entre autres, l'accès à l'école et atteindre la scolarité gratuite et de qualité pour tous les enfants en âge d'être scolarisés dans le primaire. Aussi, l'enseignement primaire et secondaire au Cameroun bénéficient des financements de l'UNESCO dans le cadre de la formation des formateurs, de l'acquisition du matériel didactique, de la réflexion thématique des séminaires sur le système éducatif et de l'amélioration de l'encadrement pédagogique. Le système universitaire camerounais quant à lui bénéficie du soutien de l'octroi des bourses, du soutien à la participation au programme de l'institution et de la création des chaires UNESCO dans les universités de Dschang, Buéa et à l'Université Catholique d'Afrique Centrale (UCAC). L'éducation qui est un préalable au développement durable porte ici l'empreinte de l'UNESCO. Et à en croire l'actuel chef de l'Etat Paul BIYA, l'une des actions de l'UNESCO au Cameroun « qui a fait date reste l'appui qu'elle a apporté à la création de l'Ecole Normale Supérieure de Yaoundé en 1961 ». Ce discours tenu à la Conférence générale de l'UNESCO tenue à Paris le 23 octobre 2007 est également une reconnaissance de 27ans de coopération « intensifiée ». L'éducation, justement, parce qu'il relève du domaine « phare » des activités de l'UNESCO, mérite qu'on y jette un regard plus ou moins détaillé.

2...EN DÉPIT DE LA PRIORITÉ ACCORDÉE A L'ÉDUCATION

Les fruits de la coopération entre l'UNESCO et l'État au Cameroun, entre 1960 et 200036, concernent la participation du Cameroun aux activités de l'UNESCO, ainsi que l'action de l'institution spécialisée des Nations Unies au Cameroun. Ainsi parler des réalisations de l'UNESCO au Cameroun, c'est s'intéresser aux projets ayant été mis en oeuvre entièrement par l'UNESCO, soit avec sa contribution dans divers domaines. Dans le cadre de l'éducation, les réalisations de l'UNESCO couvrent une pluralité de domaines :

2-1. DANS LE DOMAINE DE L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE ET SECONDAIRE.

Dans le cadre de la création des écoles et instituts :

36 C'est à dessein que nous n'allons pas au-delà de l'année 2000, un chapitre entier étant réservé à l'EPT

- La création des Instituts de Pédagogie Appliquée à vocation Rurale (IPAR) de Yaoundé en 1967, et de celui de Buéa en 1973.

- La création de l'École Normale des Instituteurs de Yaoundé.

- La mise sur pied de l'Institut Nationale d'Éducation (INE) en 1973, devenu le Centre National de l'Éducation en 1976.

- La création en 1975 des Écoles Normales des Instituteurs de l'Enseignement Technique.

- La création d'un centre d'alphabétisation fonctionnelle et d'éducation continue en milieu rural.

Dans le cadre de formation et de l'information, plusieurs séminaires de formation et d'information ont été organisés avec le concours de l'UNESCO. Entre autres, nous pouvons citer :

- Un séminaire sur la réforme de l'enseignement primaire au Cameroun organisé à Yaoundé du 26 au 29 mars 1973, séminaire visant l'évaluation pédagogique, la stratégie opérationnelle et la planification de l'éducation.

- Un séminaire audio-visuel de sensibilisation en techniques modernes de gestion ayant recours à l'information a été organisé à l'intention des gestionnaires du Ministère de l'Éducation Nationale.

En outre, plusieurs tables rondes ont été organisées en janvier 1991 et 1995 sur l'Éducation pour tous (EPT). Le Cameroun ayant même bénéficié à la table ronde de 1991 d'un concours prioritaire, le principe de faire de lui un des pays tests pour la réalisation des exhortations de la Conférence de Jomtien pour l'EPT, ayant été retenu. Et c'est dans le même esprit que l'on assistera en mai 1995 à l'organisation des États Généraux de l'Éducation camerounaise.

Enfin, plusieurs experts et consultants ont été mis à la disposition du Cameroun par l'institution spécialisée des Nations Unies, dans le cadre de la réforme de l'enseignement primaire. Et en novembre 1999, l'UNESCO appuyait un séminaire de formation des enseignantes d'écoles maternelles.

2-2. DANS LE DOMAINE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR.

L'un des fruits les plus anciens, et qui pourtant fait encore date, de la coopération entre le Cameroun et l'UNESCO reste la création de l'École Normale Supérieure de Yaoundé en 1961, bien sûr en association avec le PNUD et d'autres partenaires bilatéraux. A noter également la contribution de l'UNESCO à la création de l'École Normale Supérieure de

l'Enseignement Technique. Aussi après la création de l'ENSET, l'UNESCO lui offrait un « lot important de matériel en vue de permette un bon démarrage ». Il s'agit de :

- 04 cartons de stencils,

- 01 machine à photocopie,

- 04 meubles à classeur,

- 20 machine à écrire,

- 01 machine à relier,

- 01 perforatrice,

- 01 machine offset,

- 20 tables à dessin,

- 02 table-bureaux,

- 01 stock à papier duplicateur (4000 rames)

- 01 lot de livres d'un montant de 600.000 F CFA

Ce n'est pas tout. L'École Nationale Polytechnique camerounaise a bénéficié de la mise en place d'un laboratoire de micro informatique, « et de bien d'autres aides » ! L'ES STIC a vu son Centre de Documentation informatisé par « les bons soins de l'UNESCO » ! Enfin l'UNESCO alloue des bourses d'études aux jeunes camerounais, dans le cadre des formations en tout genre de domaines de son ressort. « Entre 1960 et 1985, la moyenne annuelle était de 07 bourses ».

De ce qui précède, nous pouvons dire que l'action de l'UNESCO dans le système éducatif camerounais couvre une panoplie de programmes allant des matériels et ressources à l'offre de services et de bourses, en passant par les séminaires de formation et d'information, sans oublier la création des écoles et instituts.

* *

*

Faire une énonciation plus ou moins exhaustive des projets qui ont été mis en oeuvre au Cameroun soit entièrement, soit avec la contribution de l'UNESCO est une chose ; mais qualifier une coopération de fructueuse en est une autre. Cela requiert une certaine « rupture épistémologique » qui permet d'appréhender les faits de manière objective, avec la prise en compte sinon de tous les paramètres (contexte, enjeux, acteurs, motivations, rapports de force, etc.), du moins des éléments déterminants. Pour paraphraser DURKHEIM, il s'agit de considérer les activités de l'UNESCO au Cameroun comme des choses, dans une perspective socio-historique.

En effet, les activités de l'UNESCO au sein des États membres se scindent en deux catégories, elles-mêmes relevant de ses deux principales sources de financement. S'agissant pour le Cameroun, il nous sied de noter que le programme de participation découlant du budget ordinaire de l'UNESCO porte essentiellement sur l'octroi de subventions pour l'organisation des séminaires et colloques, conférences, études de recherches et tables rondes ; mais également le financement des activités de la Commission nationale et des clubs des amis de l'UNESCO, ainsi que l'octroi de bourses d'études et de stages.

Les activités découlant des ressources extrabudgétaires participent du titre de la coopération technique de l'UNESCO au Cameroun, et s'inscrivent dans le cadre global du programme de coopération technique du PNUD, avec la contribution des autres partenaires financiers. Il s'agit pour l'essentiel de la mise en oeuvre de projets de développement, dont l'UNESCO reste le chef de file.

Aussi, s'il n'est pas aisé d'évaluer les activités relevant du budget ordinaire, tant il est que l'impact des colloques et conférences n'est pas facilement mesurable, l'on parvient tout de même à s'interroger sur l'utilité de la publication des revues. En effet, qu'il s'agisse de la Commission Nationale ou du Bureau Régional, il n'existe aucune politique de distribution des revues et bulletins d'information au sein des populations cibles. Les populations de ce fait ne sont pas assez imprégnées des idéaux de l'UNESCO qui, à notre sens participent également de la consolidation de l'État de droit au Cameroun. L'octroi des bourses d'études et de stages quant à lui a connu une certaine régularité, avant de connaître une baisse considérable dans la décennie précédente le forum de Dakar. Depuis lors, la distribution desdites bourses se fait dans une discrétion alarmante qui renfloue la méritocratie aux calendes grecques, le clientélisme ayant repris le témoin ! Enfin le soutien accordé à la FECACU a toujours eu un impact sur la population au point où ladite fédération reste parmi les mieux structurée au sein du territoire national.

L'évaluation des activités extrabudgétaires présente un tableau assez sombre. Car si l'on peut dans une certaine limite reconnaitre que la contribution à la mise en place de l'ENSET et de l'ENS ait été déterminante, il en va autrement pour ce qui des autres projets. C'est le cas de trois projets spécifiques : IPAR de Yaoundé ; IPAR de Buéa ; INE.

L'INE était chargé entre autres de l'étude des interactions entre le milieu social et les divers milieux d'éducation scolaires et extrascolaires en vue de leur rénovation, en rapport avec le développement économique, culturel et social du pays, tandis que les deux IPAR avaient pour mission de faire de l'école primaire camerounaise, un instrument efficace du développement social et économique du pays.

En effet, ces trois projets participaient d'un même ensemble, à savoir le système éducatif camerounais, et l'oeuvre de coopération devait consister à les « insérer dans cet ensemble, et à faire en sorte que le processus enclenché puisse normalement suivre son cours sans que le gouvernement camerounais ait plus tard à faire appel à quelque aide internationale que ce soit » (EPOTE, op.cit : 104). Aussi, le Cameroun, l'UNESCO et le PNUD étaient les principaux acteurs chargés de la mise en exécution de ces projets. Après une étude attentive de la mise en oeuvre de ces trois projets, Raymond EPOTE observait en 1976 que :

- Au niveau du projet IPAR-Yaoundé, les travaux avaient débuté depuis 1969. En principe, la réforme devait être généralisée en juillet 1975 dans toutes les classes de première année du cycle primaire. Il n'en fut rien. En février 1976, on en était encore à la réorientation des objectifs assignés à l'Institut.

-Pour l'IPAR-Buéa, des bases structurelles et méthodologiques adéquates ont été certes fixées. Cependant les travaux de réforme hésitent à s'amorcer du fait de l'absence d'une plate- forme philosophique globale.

- Quant au projet INE il demeure miné par le problème institutionnel et par la carence d'une main d'oeuvre hautement qualifié.

Or ces trois projets constituant une trilogie dans le processus de réforme de l'éducation camerounaise à cette période, la coopération technique aura été, du moins dans le cadre du chiffre indicatif de Planification (CIP) 1972-1976, un échec manifeste. Et de l'avis de notre auteur, cet échec est imputable aux trois parties qui formaient le triangle de coopération : « Du côté de l'assistance PNUD/UNESCO nous soulignerons tout d'abord les lenteurs administratives qui très souvent ont occasionné des retards s'étendant sur plusieurs années ». A cela s'ajoutait la fragilité de la coordination au niveau de l'évaluation des projets. Les fautes imputables au gouvernement camerounais relevaient des domaines financier (engagements non honorés), de l'administration de l'assistance technique (manque de formule adéquate pour l'insertion de la composante bilatérale au sein des travaux), mais aussi et surtout l'absence de définition et de traduction même de la philosophie qui sous-tend les objectifs assignés aux trois institutions.

C'est dire enfin selon notre auteur que si la coopération de l'UNESCO dans le cadre de la réforme du système éducatif camerounais présente plutôt un bilan négatif, « c'est parce que justement il existait comme un hiatus entre les aspirations profondes du peuple camerounais et les modèles que lui proposait la coopération internationale » (idem : 187).

Mais peut-on dire que les acteurs nationaux et internationaux aient tirés les leçons de ces échecs passés ? Nous ne pourrions vraiment répondre à cette question qu'au terme d'une

évaluation des engagements pris par ceux-ci lors du forum de Dakar en 2000, sur la scolarisation primaire universelle. Ce qui reste certain, c'est que suite au bilan mitigé de la Conférence de Jomtien, le forum de Dakar, renforcé par l'accord sur les OMD, a réellement renforcé la cause de l'éducation au Cameroun tout comme en Afrique. En même temps que les autres domaines ont eu un regain considérable à travers le financement de nombreux projets. Il en a résulté des changements institutionnels et opérationnels appréciables.

Sauf que c'est notamment dans la mise en oeuvre de ces « grands programmes » que la coopération Cameroun-UNESCO présente de nombreuses failles ; aussi bien au niveau du financement des projets de développement, que dans l'opérationnalisation de l'EPT.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery