I.2.2. La disparition des Rhizophora laisse le sel entrer
dans les rizières
L'hydrologie superficielle de la Basse-Casamance est
dominée par la mer15 et en raison d'un relief très
plat16 et d'une pluviométrie déficitaire, la zone a
des problèmes très aigus de salinisation des rizières
(POSNER, 1988). Sur toute la Casamance, il s'agit de lutter pour la
récupération de 2.400 ha de rizières salées, et de
protéger 15.000 ha contre la montée des eaux salées
(DIEDHIOU, 1999).
Pour OCEANIUM, « La mangrove constitue un barrage naturel
contre le sel qui menace les rizières » (OCEANIUM, 2008).
BOUDOURESQUE17 nous renseigne que chez
Rhizophora, l'absorption du sel (chlorure de sodium, NaCl) est
bloquée au niveau des racines, grâce à l'absorption
sélective des ions potassium. Le barrage se fait donc au niveau des
racines. LEBRUSQ (1987) nous informe que dans les vasières à
mangrove des mouvements de nappes d'eau salée profondes allant du bolon
vers le plateau se réalisent. Par ailleurs MARIUS (1985) nous informe
que la rhizosphère des mangroves à Rhizophora est de 1
mètre de profondeur. La nappe d'eau salée passe donc sous la
mangrove. La mangrove ne constitue donc pas un barrage contre le sel.
Je n'ai trouvé aucune publication, scientifique ou
autre, vérifiant l'hypothèse selon laquelle la mangrove constitue
un barrage naturel contre le sel. Nous tentons d'apporter, dans la partie II.,
page 39, un avis sur le rôle de la mangrove dans la lutte contre la
salinisation des rizières.
I.2.3. Les villageois coupent la mangrove à
Rhizophora
En tant que matériau technologique, le
palétuvier joue un rôle important dans le fonctionnement des
populations de Casamance. « Le bois de nombreuses espèces de
palétuviers étant considéré comme durable et
résistant aux termites, on en fait des pieux et des poteaux largement
utilisés pour la construction de maisons rurales et de fondations
urbaines » (GAUDIN, 2006). Le Rhizophora tient une place
d'autant plus importante qu'il sert à construire les habitations des
casaçais. « La construction d'une case requiert 5 à 6
perches d'une circonférence moyenne de 22 cm. Un pieu d'environ 25
à 30 cm de circonférence est placé au centre de la case.
Ce poteau aide les chevrons à supporter la case. Le toit est
composé de 30 lattes d'une circonférence moyenne de 10 cm
» (VANDEN
15 La Basse-Casamance est un milieu paralique (milieu
lagunaire côtier soumis à l'influence marine) (OLIVRY, 1987).
16 Les crêtes d'interfluves (ligne de partage
des eaux de pluie) ne dépassent pas 30 à 40 mètres
d'altitude (OLIVRY, 1987).
17 Charles François BOUDOURESQUE est
océanologue et professeur en « structure et
fonctionnement des écosystèmes benthiques marins » à
l'Université de Marseille.
FAUGERE N. 2009. Étude du projet de reboisement de
palétuviers Rhizophora en Basse-Casamance (Sénégal) par
l'ONG Océanium de Dakar. Mémoire de fin d'étude
d'ingénieur en Agro-Développement International (ISTOM). 96p.
BERGHEN, 1999). Le Rhizophora est aussi utilisé comme
bois de chauffe car il est reconnu pour ses propriétés
calorifiques. « Rhizophora est particulièrement
populaire car son bois est lourd, brûle en donnant une chaleur uniforme
et peu de fumée » (GAUDIN, 2006). Le bois de
Rhizophora donne aussi d'excellents piquets : les dalles des ponceaux
menant aux bras de mer sont supportées par des piquets en bois de
palétuvier (VANDEN BERGHEN et al., 1999).
Rhizophora est donc appréciés comme
bois d'oeuvre et bois de chauffe. A l'occasion de son utilisation, les
casaçais coupent la mangrove. La disparition du Rhizophora
constitue aujourd'hui un manque pour les populations qui l'utilisent.
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