L'action internationale du parlement camerounais de 1960 à nos jour: approche historique( Télécharger le fichier original )par Joël narcisse Meyolo Université de Ngaoundéré ( Cameroun) - DEA 2007 |
I. OBJETLa configuration actuelle des relations internationales est à l'image d'une pièce de théâtre où s'entremêlent des logiques variables, mettant en scène des acteurs multiformes. Dans cette ambiance, qui est une révolution de la conception classique des relations internationales, on assiste à une nouvelle orientation du jeu international. L'approche classique des relations internationales situe l'Etat au centre de son processus. Pierre Renouvin subordonne les autres types de rapports internationaux (rapports entre les peuples, rapports économiques etc.) à l'Etat. Selon lui, l'Etat impose, réglemente, oriente tous les rapports entre les peuples. Il ressort de sa vision que les relations internationales sont sous-tendues par la souveraineté. C'est elle qui commande aux destinées des relations dans le champ international. Marie-Claude Smouts en fait une illustration assez claire. Pour elle, le monde est ``découpé en unités distinctes, à l'image des cartes des atlas, où la couleur spécifique de chaque entité symbolise la souveraineté exclusive de l'Etat qui l'occupe''1(*). Toutefois, avec le développement des sciences humaines aux 19ème et 20ème siècles, les schémas explicatifs du comportement des Etats sont devenus plus raffinés et plus complexes. Les variables philosophiques, psychologiques, sociologiques s'y sont ajoutées. Les historiens ont de ce fait intégré d'autres systèmes tant sur l'analyse du comportement de l'Etat que sur les processus de prise de décision. Jacques Feymond insiste sur le fait que ``le cadre défini par les chancelleries est définitivement brisé, même si on continue à se servir des ressources documentaires qu'il offre. C'est sur le dialogue que l'homme d'Etat mène avec la société, sur l'influence des forces profondes, des facteurs économiques, des circonstances que l'accent sera mis''2(*). Les relations internationales sont appelées à sortir du cloisonnement délimité par l'Etat. A la réalité, avec l'usure du temps, elles se sont adaptées au contexte de l'heure. La conséquence est la perte du monopole de l'Etat sur la conduite des relations internationales, et l'apparition de nouveaux acteurs. Cette situation découle selon Bernard Badie du fait de l'affaiblissement du territoire qui pourtant est l'élément essentiel de la survie de l'Etat. Il le dit en des termes assez clairs ``le territoire est cisaillé par les flux internationaux, de plus en plus surclassé par la sophistication des techniques du commerce international, inadapté aux données nouvelles de l'économie, impuissant, ébranlé par les progrès du multicultilarisme, il est dépassé par les poussées d'une mondialisation qui prétend unifier les valeurs et les objectifs de l'humanité toute entière3(*). Face à la nouvelle donne, l'Etat apparaît dans le rôle qui est le sien sur la scène mondiale comme un masque derrière lequel se dissimulent plusieurs acteurs. Parmi ceux-ci figure en droite ligne le Parlement. L'introduction des Parlements dans la conduite des affaires internationales vient combler des attentes créées par le contexte de compression de l'espace et d'intensification des relations sociales, doublé en cela par la mise en exergue des temps locaux dans leur autonomie relative ou rationnelle. Au moment où s'affirme plus la faculté de convaincre et de rassembler que le pouvoir de contraindre, il est naturel que les parlementaires, élus du peuple prennent en main, ou du moins, s'intéressent au devenir de leurs électeurs. Ceci passe non seulement par le contrôle des actions internationales des gouvernements, mais également par leur implication effective sur la scène mondiale en tant qu'acteurs. Etant les représentants des gouvernés, ils assurent la courroie de transmission entre ces derniers et les gouvernants, et de même, entre les populations de différents pays, ceci en joignant leurs aspirations nationales aux intérêts internationaux. Au-delà de la vision représentative des Parlements sur la sphère internationale, il y a le déficit de démocratie mondiale qui fait qu'aujourd'hui, les citoyens font de moins en moins confiance aux gouvernements, taxés de partialité et jugés responsables des déséquilibres mondiaux. La constitution des sociétés civiles réclamant à haute et intelligible voix leur participation dans les processus de prise de décision en est une illustration assez claire. Au Cameroun, la participation du Parlement dans les relations internationales est effective dès son accession à l'indépendance en 1960. A travers les différentes constitutions qu'a connues le pays4(*), il a toujours été reconnu au Parlement le pouvoir de contrôler et de légiférer les actions du gouvernement et en l'occurrence son expression internationale. Son implication à l'échelon mondial obéit aux exigences d'ouverture matérialisées dans les différents règlements intérieurs en vigueur dans l'institution parlementaire jusqu'ici5(*). Il en ressort des dispositions constitutionnelles et réglementaires que la participation du Parlement camerounais se situe en aval et en amont. Si en amont, il s'agit de l'approbation et du contrôle de l'action internationale du gouvernement, chose très importante pour la vie de l'Etat. En aval, il est question d'une expression véritable sur la scène internationale. Le contrôle et la législation obéissent au souci d'information et de sanction de l'action internationale du gouvernement. L'expression internationale du Parlement quant à elle, s'articule autour de trois axes, à savoir, la coopération parlementaire, la coopération interparlementaire et l'action individuelle des parlementaires. L'action du Parlement camerounais dans ces différentes articulations est un fait avéré. La double tradition française et britannique du Cameroun, à laquelle il convient d'ajouter la cohabitation de nombreux courants religieux, notamment le christianisme et l'islam, multiplie le réseau des partenaires sur la scène internationale, selon qu'il s'agisse des relations multilatérales, individuelle ou de la coopération interparlementaire. Dans la perspective de démêler la participation du Parlement camerounais aux relations internationales en établissant son historicité, son statut et ses actions et éventuellement ses limites, il a paru nécessaire de l'étudier dans le cadre de ce projet de thèse dont l'intitulé est : L'action internationale du Parlement camerounais de 1960 à nos jours : approche historique. * 1 M-C. Smouts, 1988, Les nouvelles relations internationales, Paris, Sciences Po. * 2 J. Feymond, 1985, ``Histoire des relations internationales vingt ans'' in Relations internationales, n°41, Printemps. * 3 B. Badie, 1995, La fin des territoires. Essai sur le désordre international et sur l'utilité sociale du respect, Paris, Fayard, p. 12. * 4 Il s'agit de constitutions de 1960, 1961, 1972 et de 1996. Pour plus de détail consulter les archives de l'Assemblée Nationale du Cameroun ou le site Internet www.ancm.cm. * 5 Il s'agit des différents règlements intérieurs depuis sa création en 1960. Pour plus d'information, se référer au site Internet de l'Assemblée Nationale www.ancm.cm |
|