SECTION II-. L'INSTANCE ARBITRALE
§ I-. L'INSTANCE
ARBITRALE
Lorsque le rapport de droit entre les parties au contrat
s'effrite, il y a lieu de régler le litige afin de parer au plus
pressant à l'altération complète de la situation. C'est
l'objet ultime de l'instance arbitrale qui couvre toute la période du
déroulement de la procédure arbitrale. Celle-ci, court de la
constitution du tribunal arbitral à la sentence rendue. Dans un
arbitrage de DIP, le principe directeur du libéralisme qui gouverne le
droit de l'arbitrage trouve également sa place. On le retrouve
formellement dans les dispositions des deux lois d'arbitrage que nous
étudions. Mais avant, il conviendrait d'aborder la question de la
litispendance telle que prévue par les deux lois d'arbitrage.
A-. LA LITISPENDANCE
DROIT COMPARE
Art. 10 al. 2 AU.A
"L'instance arbitrale est liée dès le moment
où l'une des parties saisit le ou les arbitres conformément
à la convention d'arbitrage, ou, à défaut d'une telle
désignation, dès que l'une des parties engage la procédure
de constitution du tribunal arbitral".
Art. 181 LDIP
"L'instance arbitrale est pendante dès le moment
où l'une des parties saisit le ou les arbitres désignés
dans la convention d'arbitrage ou, à défaut d'une telle
désignation, dès que l'une des parties engage la procédure
de constitution du tribunal arbitral".
------------------------------------------------------
En droit privé, on parle de litispendance lorsque deux
juridictions de même degré ont été concomitamment
saisies du même litige alors qu'elles sont également toutes
compétentes pour connaître de l'affaire. Aussi, lorsque le litige
a été porté devant deux différentes juridictions,
qui plus est de même degré, et qu'il y a un intérêt
à ce qu'elles soient instruites et jugées ensembles, la
litispendance est envisageable. Dans ce cas, il y a lieu de procéder au
dessaisissement de la juridiction saisie en second lieu au profit de l'autre si
l'une des parties le demande ou à défaut d'office.
En droit de l'arbitrage international, la problématique
de la litispendance se pose en termes de détermination du début
de l'instance liant les parties à l'arbitrage. Elle est d'une importance
singulière et se pose à plusieurs égards. D'une part, la
fixation du début de l'instance liant les parties à l'arbitrage
permet par exemple de vérifier le respect par elles du délai
lié à l'exercice d'un droit en l'occurrence, celui fixé
conventionnellement ou légalement pour engager la procédure.
D'autre part, la détermination du début de l'instance liant les
parties permet, au surplus, de déterminer le moment où la cause
est pendante devant le tribunal arbitral. Ceci, dans l'optique de
l'éventualité d'une suspension de la procédure (judiciaire
ou arbitrale) introduite postérieurement entre les mêmes parties
sur le même objet. Enfin, elle peut avoir comme effet la fin de la
prescription ou la péremption des prétentions soumises au
tribunal arbitral, lorsque le droit applicable (celui du fond du litige) lui
confère cet effet.
Pour en revenir au cas de l'étude comparée des
deux textes législatifs objets de notre travail, il y a lieu de dire
que, pour déterminer le moment où l'instance lie les parties
à l'arbitrage, le droit OHADA de l'arbitrage et le droit suisse de
l'arbitrage international distinguent deux conditions.
L'instance est pendante dès lors que, l'arbitre est
désigné dans la convention d'arbitrage et que l'une des parties
le saisit conformément à cette convention d'arbitrage. C'est ce
qu'on infère logiquement des dispositions suivantes :
"l'instance arbitrale est liée dès le moment où l'une
des parties saisit le ou les arbitres conformément à la
convention d'arbitrage [...]" (art. 10 al. 2 AU.A). Idem en droit suisse
de l'arbitrage international où, le texte de l'art. 181 LDIP dispose que
"l'instance arbitrale est pendante dès le moment où l'une des
parties saisit le ou les arbitres désignés dans la convention
d'arbitrage". Cependant, en cas de pluralité d'arbitres et selon
les termes de la convention, la simple saisine de l'un d'entre eux suffit
à lier l'instance. Si par contre cette première condition n'est
pas remplie, les deux lois d'arbitrage prévoient que, l'engagement de la
procédure de constitution du tribunal arbitral suffit à lier les
parties à l'instance arbitrale. En effet, la non-désignation
conventionnelle de l'arbitre ou des arbitres emportant leur saisine
subséquente, en cas de litige, suffit pour que la seconde condition soit
remplie. C'est tout le sens des dispositions des articles 10 al. 2 in
fine AU.A et 181 in fine LDIP. La formulation est identique dans
les deux textes " [...] ou, à défaut d'une
telle désignation, dès que l'une des parties engage la
procédure de constitution du tribunal arbitral". Dans cette
hypothèse, les parties sont liées à l'instance arbitrale
dès l'engagement de la procédure de constitution du tribunal
arbitral par l'une des parties en vertu des dispositions subsidiaires des
articles 5 al. 2 AU.A et 179 al. 2 LDIP relatives à la constitution du
tribunal arbitral par le juge d'appui. Somme toute, il y a lieu de faire
remarquer que les dispositions des deux textes sur la question, à la
lecture de leurs contenus respectifs sur la litispendance (art. 10 al. 2 AU.A
et art. 181 LDIP) sont quasi identiques. Une remarque qu'on ne saurait passer
outre dans les deux systèmes porte sur le fait que, dans les deux cas,
l'instance est liée uniquement dès l'engagement de la
procédure en désignation des arbitres sans que
l'impériosité d'une demande d'arbitrage adressée à
la partie adverse soit exigée, de la partie demanderesse.
|