DIPLOME D'ETUDES APPROFONDIES
2006-2007
DROIT INTERNATIONAL PRIVE
DROIT DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL
ETUDE COMPAREE DE LA REGLEMENTATION DE
L'ARBITRAGE INTERNATIONAL DANS L'OHADA ET EN SUISSE
Présentation Directrice
M. Cassius Jean SOSSOU Mme Gabrielle KAUFMANN- KOHLER
Juré
M. Andreas BUCHER
Octobre 2007
REMERCIEMENTS
Tout d'abord, j'aimerais tout particulièrement
remercier l'autorité morale que représente l'État, le
canton et la ville de Genève, où j'ai trouvé
l'hospitalité et les conditions nécessaires pour poursuivre le
chemin que, je me suis tracé dans la perspective de mon accomplissement
personnel.
Je ne saurais passer outre la faculté de droit et
à travers elle, ses autorités, pour la facilitation des
renseignements et informations nécessaires à l'achèvement
de ce travail.
Un grand merci à Madame Gabrielle KAUFMANN- KOHLER,
prof. A la faculté de droit qui a accepté ma candidature et a mis
à ma disposition les outils bibliographiques de base, nécessaires
à la compréhension et à l'approfondissement de mes
connaissances en droit de l'arbitrage international. Je vous sais gré de
votre collaboration, aide et soutien sans lesquels ce travail n'aboutirait
certainement pas. Qu'il me soit permis de vous dire, Mme Gabrielle
Kaufmann-kohler, toute ma gratitude.
Merci à Monsieur Andreas BUCHER pour avoir
accepté d'être le juré de ce travail.
Enfin, je ne saurais passer sous silence les nombreux amis
(es), qui de près ou de loin, m'ont apporté leur soutien de
quelque manière que ce soit. Notamment Noël EKANMIAN RUCHTI. Que
tous vous retrouviez ici l'expression de ma sincère gratitude.
Cassius Jean SOSSOU
DEDICACE
Philomène BABAGBETO ma défunte mère,
Priscard SOSSOU ma jeune soeur, à titre posthume je vous dédicace
toutes deux ce mémoire.
À Chancelle Hermione SOSSOU, jamais deux sans trois,
dit l'adage...voilà le troisième. Qu'il te serve d'exemple pour
ta réussite personnelle. Saches que, rien de grand ne s'accouche sans
douleur et que le succès c'est la somme des efforts
répétés. Une fois de plus, j'aimerais te demander de
trouver dans ce travail, l'expression de mon effort pour arriver à te
donner un bon exemple de réussite intellectuelle et sociale. Bon vent et
longue vie à toi, ma fille.
Á mon père Adélaïd SOSSOU, mes
frères Patrick et Abdon SOSSOU, mes soeurs Espérance et Ghislaine
SOSSOU, bref à ma famille toute entière je vous dis merci pour
votre soutien et daignez accepter que je vous dédicace ce
mémoire. Je ne décevrai pas cet espoir que vous portez en moi.
Enfin, Isabelle ROHRBACH en sus des remerciements que je te
formule, daigne accepter que je te dédicace ce travail pour tout ce que
cela représente pour toi et pour moi.
Merci à tous pour votre soutien.
Cassius Jean SOSSOU
INTRODUCTION
La mise en place d'un "cercle vertueux de
développement" passe par la promotion des capitaux privés.
Il est évident, de ce fait, qu'aucun développement
économique ne peut aujourd'hui s'amorcer durablement dans un espace
géographique donné, sans la promotion de l'investissement
privé. Celui-ci constituant le piédestal de tout processus de
développement économique. Force est cependant de constater que,
le continent africain n'a visiblement jamais intéressé les
investisseurs étrangers qui, l'ont toujours considéré
comme un risque avéré, eu égard à la non
sécurisation par les États africains de la mise à
disposition des fonds nécessaires au décollage du secteur
économique. Ceci expliquant la raréfaction légendaire sur
ce continent de ces fonds d'investissement. Plusieurs raisons sont souvent
évoquées pour soutenir ce désintéressement des
bailleurs étrangers à s'investir économiquement et
financièrement en Afrique. Il est ainsi couramment évoqué,
la nébulosité des opérations commerciales sur le terrain,
l'instabilité politique, la corruption endémique, les
déficiences relatives à l'environnement juridique peu
sécurisant, les garanties judiciaires incertaines. Sur le plan de la
garantie juridique et judiciaire que doit offrir les États africains aux
bailleurs étrangers, il est important de noter que, les principales
récriminations, formulées à l'encontre des administrations
africaines, se résument en termes de manque de sécurité
juridique et judiciaire dans les systèmes de défense des droits
et de protection des intérêts des investisseurs. De manière
pratique on relève d'un côté que,
l'insécurité juridique résulterait de la sénescence
des textes légaux en vigueur dans ces États qui, pour la plupart,
sont "antédiluviens" et en total déphasage avec le droit
économique moderne. Ceci témoignant de la difficulté des
investisseurs à considérer le tissu juridique de ces États
comme fiable et sécurisant. À cela, s'ajoute leur
incohérence, leur défaut ou manque de vulgarisation le tout
brochant. De l'autre côté, l'insécurité judiciaire
se traduirait notamment par la lenteur dans les procédures souvent
fastidieuses pour les investisseurs à laquelle s'ajoutent,
l'imprévisibilité et la complaisance des tribunaux de l'ordre
judiciaire dans leurs décisions lesquelles, présentent
d'énormes difficultés dans la phase de leur mise en
exécution. Dans le listing des récriminations contre les
systèmes judiciaires africains en vigueur, avant la mise en place du
droit unifié OHADA, on ne saurait passer outre le facteur
gangréneux et non moins négligeable qui mine le bon
fonctionnement et la crédibilité des administrations judiciaires
africaines. Nous faisons ici allusion à la corruption récurrente
du corps de la justice. La somme de tous ces facteurs, justifie sans nul doute
l'appréhension des investisseurs étrangers à
s'intéresser à cette partie de l'univers terrestre. Dans ces
conditions, nous sommes tentés d'accréditer l'auteur africain qui
fait observer à juste titre que, si "investir est déjà
en soi un risque, même s'il est calculé ; s'il faut doubler
ce risque premier inéluctable de celui d'un système juridique
fluctuant, ondoyant et insaisissable, il n'y a pas beaucoup d'espoir à
susciter l'attrait des investisseur"1(*).
Cette assertion, illustrative de la défiance des
investisseurs étrangers à l'égard de l'Afrique montre
à quel point, les dysfonctionnements dans les systèmes de
défense des intérêts des investisseurs peuvent être
un véritable handicap à l'investissement et par ricochet, au
décollage économique d'un ensemble géographique
donné. C'est donc dans la perspective de remédier à ces
dysfonctionnements que, certains États africains ont pris les mesures
nécessaires à la création de conditions favorables pour la
promotion de l'investissement privé, afin d'accroître l'apport de
capitaux extérieurs. Le droit uniforme et harmonisé de
l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, ainsi
dénommé Droit OHADA est né. Ce droit uniformisé
africain est né, comme l'affirment les promoteurs, de "la
volonté politique dynamique et ambitieuse de renforcer le système
juridique des États de la zone franc2(*) en créant un cadre juridique simple, moderne et
adapté à la conduite des affaires"3(*). On peut aujourd'hui sur cette base affirmer,
sans le risque de se tromper que, l'Afrique dispose dorénavant de
véritables instruments juridiques modernes, nécessaires
à l'éclosion d'une nouvelle dynamique de développement
économique avec la mise en place de la structure communautaire OHADA
avec son cortège de panoplie de textes législatifs (les Actes
Uniformes) qu'elle coordonne.
L'organisation en soi, prise non pas dans sa posture
institutionnelle mais dans son aspect d'organe législatif, a
réglementé un certain nombre de matières relevant du
domaine du droit des affaires. En effet, des dispositions de l'art. 2 du
Traité de l'OHADA, on infère les domaines susceptibles
d'être considérés comme faisant partie du droit des
affaires harmonisé africain. Selon les dispositions de cet article,
"entrent dans le domaine du droit des affaires, l'ensemble des
règles relatives au droit des sociétés et au statut
juridique des commerçants, au recouvrement des créances, aux
sûretés et aux voies d'exécution, au régime du
redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de
l'arbitrage, au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente et
des transports, et toute autre matière que le Conseil des ministres
déciderait, à l'unanimité, d'y inclure,
conformément à l'objet du présent Traité et aux
dispositions de l'article 8 ci-après"4(*). Ainsi le droit de l'arbitrage, objet de notre
étude, occupe une place importante dans le droit unifié OHADA. Il
a fait l'objet d'un Acte Uniforme5(*), l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage. Il
conviendrait de signaler que, le droit africain OHADA de l'arbitrage comprend
toute une variété de textes fondamentaux sur l'arbitrage dont les
principaux sont :
- le Traité OHADA du 17 octobre 1993, qui dans les
dispositions du Titre IV (art 21-26) traite de l'arbitrage,
- l'Acte Uniforme sur l'Arbitrage (AU.A) et le
Règlement d'Arbitrage (RA) de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage
(CCJA) tous deux du 11 mars 1999,
- le règlement de procédure de la CCJA du 18
avril 1996.
Celui qui fera l'objet de cette étude comparée,
est l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage (AU.A) qui vient en appoint
au Traité dans ses dispositions sur l'arbitrage6(*). Ce texte constitue le droit
commun de l'arbitrage dans l'espace OHADA.
La présente étude porte sur la comparaison de
deux lois d'arbitrage en l'occurrence, l'Acte uniforme relatif au Droit de
l'Arbitrage dans le système OHADA et, le chapitre 12 portant arbitrage
international de la Loi Fédérale sur le Droit International
Privé en droit suisse de l'arbitrage. Pourquoi un tel choix de
comparaison des deux lois d'arbitrage ?
L'option faite d'étudier ces deux textes est
justifiée par deux grandes motivations :
- Il y a lieu de faire remarquer qu'à ce jour, deux
grandes approches ont prédominé dans la démarche de la
quasi-totalité de la littérature doctrinale faite aussi bien par
les éminents juristes africains mais aussi, par certains experts
occidentaux de la matière depuis l'entrée en vigueur du droit
OHADA de l'arbitrage. La première approche, qu'on peut qualifier de
purement descriptive, s'est bornée à inventorier le patrimoine de
l'arbitrage en Afrique à travers l'inventaire exhaustif des textes
législatifs et réglementaires qui, ont fondé la pratique
de cette justice privée, dans les différents États
africains depuis lors. La seconde analytique, a abordé le droit de
l'arbitrage OHADA dans sa dimension textuelle à travers l'analyse du
contenu de textes récemment adoptés, par rapport aux principes et
règles juridiques généralement admis par la pratique et
qui, régissent ce droit afin d'en restituer l'esprit du
législateur. Cette récente démarche est consubstantielle
à la naissance du droit OHADA de l'arbitrage. Dans cette logique,
beaucoup d'études ont jeté un regard critique sur
l'opportunité de certaines des dispositions des textes adoptés
mais aussi, sur le caractère dubitatif de l'applicabilité des
dispositions du ce droit7(*). Toutefois, une troisième approche, qui est
loin d'être la moins importante, celle comparative, qui doit être
menée dans la perspective de dégager les similitudes et
dissemblances, les forces et faiblesses au regard d'un ou plusieurs autres
textes, a fait à ce jour l'objet de peu de réflexions et de
développements doctrinaux. Pour combler cette lacune, nous avons
décidé de mener cette étude comparative sommaire des deux
textes légaux régissant l'arbitrage dans les deux espaces.
- Le choix d'une problématique à disserter pour
notre mémoire de DEA s'est porté sur la possible comparaison des
deux lois d'arbitrage parce que, à la lecture sommaire des deux textes
de loi, nous avions constaté que certaines dispositions de ces textes de
loi sont identiques.8(*)
Nous en avons déduit que, l'AU.A au regard de sa jeunesse procède
par simple "replâtrage" de certaines dispositions du
droit suisse, celui-ci étant lui-même une simple codification des
règles de la CNUDCI.
Aussi avions-nous fait le constat selon lequel, certaines
règles de l'AU.A sont, le prolongement des dispositions
législatives et donc un appoint du chapitre 12 LDIP par l'AU.A en droit
OHADA. Enfin, certaines dispositions de l'AU.A en droit OHADA se sont inscrites
dans une logique purement innovatrice vue comme une amélioration du
droit de l'arbitrage. Sur la base de toutes ces constatations, il eut
été nécessaire d'envisager une pareille étude
comparée pour faire la part des choses.
Ceci étant, il est important de noter que le nouveau
droit de l'arbitrage africain, le droit OHADA de l'arbitrage, est
considéré comme l'un des plus récents de la série
de modernisation des législations sur l'arbitrage. Modernisation
préconisée par les recommandations des instances internationales
en l'occurrence la CNUDCI9(*). En effet, la législation unifiée sur
l'arbitrage OHADA en Afrique, (pour être plus précis, l'Acte
Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage) a été seulement
adoptée, faut-il le rappeler, le 11 mars 1999. Cependant, la
compréhension et la maîtrise de ce nouveau droit, de ses concepts
clés ne pourrait se faire que par rapprochement à ce qui est
admis et se fait dans d'autres systèmes, d'où le choix de la
législation suisse sur l'arbitrage international. En effet, s'il est
incontestable que la Suisse dispose depuis lors d'outils modernes
adaptés à la nouvelle donne que requièrent les exigences
du développement économique, force est de constater que, la
législation suisse sur le Droit International Privé (LDIP) dans
laquelle figure le chapitre 12 relatif à l'arbitrage international,
(pour ce qui est du cas qui nous concerne dans cette étude) est d'une
antériorité relativement moins récente. Elle date du 18
décembre 1987 et donc plus vieille que l'AU.A en droit OHADA. Cependant,
il convient de rappeler que, nonobstant le caractère relativement
récent de la loi fédérale sur l'arbitrage international
(LDIP), la Suisse a une longue et vieille tradition dans la pratique de
l'arbitrage international. Cette tradition, comme l'a constaté le
Conseil Fédéral, s'inscrit dans la droite ligne de la vocation de
la Suisse à être souvent choisie comme "lieu
privilégié pour les arbitrages internationaux"10(*). La tradition suisse de
l'arbitrage international, peut être législativement
attestée par l'antériorité de sa réglementation, en
l'occurrence le concordat du 27 mars 1969 qui, avant l'entrée en vigueur
de la LIDP, est considéré comme le seul texte uniforme
constitutif du droit de l'arbitrage interne et international.
Bref, il est évident qu'à travers cette pratique
décennale de la justice privée arbitrale, la Suisse a acquis une
notoriété qui constitue un avantage en termes
d'expériences dans la pratique de l'arbitrage. Ce qui est un atout d'une
grande importance pour quiconque veut mieux comprendre le droit et la pratique
de l'arbitrage en général, qui plus est international. La Suisse,
à la lumière de son droit et de sa pratique de l'arbitrage,
constitue donc une référence mondiale, à laquelle les
juristes africains se doivent de puiser les éléments
nécessaires à la mise en place d'une pratique arbitrale
judicieuse et crédible.
Pour une bonne compréhension du fondement de cette
étude, il est important de se poser la question de savoir pourquoi
spécifiquement une étude comparée ?
Nous avons décidé de procéder à
cette étude comparée de l'AU.A en droit OHADA et du chapitre 12
de la loi fédérale sur le Droit International Privé en
droit suisse dans une triple perspective. D'une part, jeter les bases d'une
comparaison beaucoup plus large des deux lois et, dans une moindre mesure, de
la pratique de l'arbitrage afin de mettre à la disposition des juristes,
des tribunaux et des opérateurs économiques, une esquisse de
réponse aux principaux outils nécessaires à rendre
intelligible le contenu du nouveau droit de l'arbitrage OHADA. D'autre part,
mettre en lumière les deux lois d'arbitrage à travers leur
classicisme et, le cas échéant, leur originalité selon le
schéma coutumier du déroulement d'un arbitrage. Enfin, et
c'est certainement l'objectif ultime de notre travail, prouver que dans un
arbitrage ad hoc ou institutionnel OHADA, il y a toujours place pour une
internationalité de l'arbitrage en dépit de la non dualité
du texte régissant l'arbitrage dans cet espace. Il serait
prétentieux de notre part de vouloir procéder exhaustivement en
un tour de clavier à la comparaison des deux systèmes. Ce serait
trop embrasser pour un mémoire de DEA, vu la limitation qui nous est
imposée pour un tel travail. Une telle entreprise serait
aisément compréhensible et réalisable dans le cadre d'un
travail de thèse que des voix plus autorisées, feraient
assurément en son temps.
La présente étude, aussi sommaire soit elle,
répond à double objectif. D'une part, promouvoir l'arbitrage
OHADA, vu que la législation OHADA sur l'arbitrage est très peu
connue des praticiens du droit de l'arbitrage (les tribunaux, les arbitres, les
juristes) voire des parties à un litige international qui peuvent, en
connaissance de cause, la choisir comme loi procédurale ou loi du
litige. Ainsi, c'est les juristes africains qui s'en sortiraient grandis en
notoriété et la crédibilité de la justice africaine
se revaloriserait à coup sûr. La défiance des investisseurs
étrangers à l'égard du système judiciaire africain
se dissiperait de ce fait. Aussi, vu que toute la littérature doctrinale
sur le droit de l'arbitrage international parle très peu du droit OHADA
et que, la référence à ce droit est très peu faite
dans les ouvrages les plus célèbres sur l'arbitrage, il est
évident que la présente étude comblera ces lacunes et
permettra d'apporter notre contribution, aussi modeste soit elle, à la
doctrine.
D'autre part, objectif inavoué de ce travail de
comparaison de textes réglementant l'arbitrage international avec
inclusion à l'OHADA et à la Suisse, serait de démontrer
que le droit OHADA de l'arbitrage est, un véritable instrument
juridique de promotion du droit des affaires et de l'investissement au service
du développement de l'Afrique. Ainsi, parviendrons-nous à prouver
que le doit OHADA de l'arbitrage est un instrument juridique à
vocation d'abord régional et ensuite international, nécessaire
aux arbitres et aux parties à un différend né ou
éventuel pour le règlement privé de ce
différend ? Seule la suite du développement nous permettra
de le savoir.
Notre démarche consistera à collationner les
principales questions que pose l'arbitrage international aux solutions
apportées par les droits positifs dans l'espace OHADA et
helvétique. Il s'agit pour nous de mener une démarche comparative
sur le droit de l'arbitrage international avec une inclusion de l'OHADA et de
la Suisse en tant que système. Il est évident qu'à travers
cette démarche, nous dégagerons les points de convergence et de
divergence de ces deux législations. Cependant, il ne s'agira pas pour
nous de cantonner notre réflexion aux seuls textes légaux en
vigueur dans les deux espaces juridiques. Nous essayerons de prendre en
considération, les sources doctrinales et jurisprudentielles disponibles
pour peu que les sources jurisprudentielles en droit OHADA de l'arbitrage ne
soient pas déficitaires, donc existantes et disponibles.
En effet, se référer aux sources
jurisprudentielles existantes en matière d'arbitrage international est
loin d'être superflu pour faire aboutir cette étude
comparée, cela nous permettra d'aller au delà de l'analyse des
dispositions légales et de rechercher les informations accessibles, les
analyser sur la base de la pratique de l'arbitrage international dans les deux
espaces (arbitrage ad hoc, arbitrage institutionnel). Telle sera la
démarche ultime de notre étude. De manière plus
détaillée, nous envisagerons cette étude de manière
classique en plan bipartite. Dans une première partie au chapitre I, on
passera en revue l'objet du droit étudié, c'est-à-dire le
concept d'arbitrage et les domaines respectifs d'applicabilité des deux
lois de l'arbitrage. Un accent particulier sera mis sur les fondements de la
dualité et de l'unité du régime juridique de l'arbitrage
dans les deux systèmes. Nous n'occulterons pas, bien évidemment,
le concept de l'internationalité de l'arbitrage dans les deux de
systèmes. Ensuite, la variante arbitrabilité focalisera notre
attention car, nous l'analyserons sous le prisme des deux textes. Au chapitre
II de la deuxième partie, nous aborderons l'étude comparée
des grands principes qui régissent l'instance arbitrale,
appliqués aux deux systèmes. Sans oublier la sentence arbitrale
et les voies de recours ouvertes contre la sentence arbitrale
conformément aux dispositions des deux réglementations sur
l'arbitrage.
Bref, la systématique des lois sur l'arbitrage
divergeant dans les deux espaces, cette étude sera menée en
suivant le déroulement classique du processus arbitral. Ainsi, les
notions d'arbitrage, d'internationalité de l'arbitrage, les fondements
de l'unité et de la dualité du régime juridique de
l'arbitrage, la notion d'arbitrabilité du litige, le déroulement
de l'instance arbitrale à proprement parler, les caractéristiques
de la sentence arbitrale de même que les voies de recours ouvertes contre
les sentences dans les deux systèmes seront les points focaux de cette
étude comparée.
CHAPITRE I
NOTIONS D'ARBITRAGE INTERNATIONAL ET DOMAINES D'APPLICATION DE
L'ACTE UNIFORME RELATIF AU DROIT DE L'ARBITRAGE OHADA ET DU CHAPITRE 12
LDIP
Un bref aperçu historique des deux systèmes
législatifs mérite d'être fait de prime abord pour
démarrer cette étude.
Avant l'entrée en vigueur du nouveau droit de
l'Arbitrage International en Suisse, la Loi Fédérale sur le Droit
international Privé (LDIP) en son chapitre 12 portant le titre
de "Arbitrage International", seul le droit cantonal sur
l'arbitrage était applicable. Ainsi, le concordat suisse sur l'arbitrage
des 27 mars - 27 août 1969 était le seul texte constitutif de
l'arbitrage interne et international. Mais avec cette nouvelle loi (LDIP), le
droit fédéral de l'arbitrage international est ainsi
constitué, plaçant la Suisse dans le mouvement mondial de
modernisation du droit de l'arbitrage international. Notons toutefois que,
l'arbitrage institutionnel des chambres de commerce et d'industrie des
différents cantons, prévoit un arbitrage international sur la
base du règlement suisse d'arbitrage international. La présente
étude ne prendra en compte que, le chapitre 12 de la LDIP à
l'exclusion du règlement suisse d'arbitrage international et du
concordat intercantonal.
En Afrique, un état des lieux de la situation
législative avant la réforme OHADA présentait un tableau
chaotique et disparate. On observait dans lesdits pays de la zone soit un vide
juridique et institutionnel en la matière, soit une législation
sur l'arbitrage embryonnaire et/ou lacunaire. L'état de la situation
législative de l'arbitrage interne voire international présentait
un tableau peu reluisant basé sur une décalcomanie scrupuleuse
des textes français, preuve de l'héritage colonial des pays
francophones qui se référençaient le plus souvent aux
sources du droit français (code de commerce et code de procédure
civile français). Mais avec l'OHADA les seize États-Parties au
traité, tout comme la Suisse, disposent d'un nouvel arsenal juridique
nécessaire à la dynamisation des échanges commerciaux,
dans la perspective de favoriser et de soutenir le développement
économique. Le tout nouveau droit unifié et harmonisé des
affaires OHADA dont le droit de l'arbitrage fait partie intégrante est
ainsi né. L'Acte Uniforme sur l'Arbitrage en droit OHADA est
dorénavant le droit commun de l'arbitrage dans tous les États
membres de l'espace OHADA. Il s'est largement inspiré des dispositions
du nouveau code de procédure civile français (NCPC) relatives
à l'arbitrage commercial interne et international mais aussi de la loi-
type de la CNUDCI dont la reprise intégrale de certaines de ses
dispositions est soupçonnable.
Ceci étant, si l'arbitrage est souvent assimilé
à une justice privée, doit-on le considérer aujourd'hui en
Afrique comme une privatisation de la justice étant entendu que
cette forme de justice se soustrait de l'emprise des États ?
Certainement pas, car le caractère privé de la
justice arbitrale africaine (qui sans pour autant lui faire perdre sa nature
juridictionnelle) relève de sa nature contractuelle qui, confère
aux parties le pouvoir de choisir leur juge et même, d'organiser le
règlement de leur différend comme elles l'entendent. En
dépit de ce caractère privé, il n'est pas moins
évident que tout s'organise dans le cadre d'un canevas
réglementaire préétabli : le cadre législatif
de l'arbitrage dans lequel les parties peuvent tout concevoir. C'est ce cadre
législatif pré réglementé qui fera l'objet de la
présente étude comparée, sans pour autant occulter
l'analyse de la pratique arbitrale dans les deux systèmes, si besoin.
L'intérêt que suscite cette étude
comparée du droit de l'arbitrage OHADA et Suisse, ne peut
s'appréhender qu'à travers l'analyse des concepts et des
principes généraux de cette matière dans les deux espaces.
Pour ce faire, il est fort indispensable de donner les précisions
terminologiques, du point de vue doctrinal, des principales notions sur
l'arbitrage d'une part et, les caractères que l'arbitrage peut
revêtir d'autre part dans les deux espaces juridiques.
SECTION I.- L'INSTITUTION D'ARBITRAGE
La systématique des lois sur l'arbitrage divergeant
d'un espace à un autre, il va de soi que la conception de la notion
d'arbitrage et de loi d'arbitrage de même que, le rôle et
l'importance du siège de l'arbitrage, répondent à des
logiques notionnelles divergeant d'un espace à un autre. C'est cette
variabilité sémantique que nous détaillerons dans cette
section.
§I.- LA NOTION D'ARBITRAGE EN
DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE
Bien qu'il soit ici question de l'arbitrage international, on
ne saurait entreprendre cette étude comparative sans passer en revue les
définitions ou les approches de définition de la notion
d'arbitrage, dans la perspective d'une bonne compréhension de
l'arbitrage international.
A.- DEFINITIONS DE L'ARBITRAGE
1-. DEFINITION NOTIONNELLE DE
L'ARBITRAGE
La notion d'arbitrage n'a pas de définition
légale et lorsque Jarrosson11(*) le relève, nous sommes tentés de
lui donner raison car, la plupart des lois sur l'arbitrage ne la
définissent pas. Les droits OHADA et suisse de l'arbitrage
n'échappent pas non plus à cette universalité de principe.
Cette absence de définition de l'arbitrage dans ces deux textes
normatifs, n'est point étonnante car comme le souligne à bon
droit le Prof. P. MEYER "il n'est pas toujours judicieux pour un texte
normatif de procéder à des définitions qui enfermeraient
dans un cadre trop restrictif ou trop figé l'institution qu'il s'agit de
réglementer. La définition et, d'une manière
générale, la conceptualisation doivent être davantage
l'oeuvre de la doctrine, voire de la jurisprudence "12(*). Cependant, de la
définition de la notion de convention d'arbitrage que donnent les
réglementations sur l'arbitrage, on peut tenter d'inférer une
esquisse de définition notionnelle de l'arbitrage. En effet, il a
été défini comme étant "un mode alternatif de
règlement des conflits consistant pour les parties à soumettre,
soit directement, soit par l'intermédiaire d'une institution
spécialisée, leur différend, né ou éventuel,
à des personnes appelées arbitres, à charge pour celles-ci
de leur trouver une solution".13(*) Selon la formule de J. Robert et de B. Moreau,
il faut entendre par arbitrage "l'institution d'une justice privée
grâce à laquelle les litiges sont soustraits aux juridictions de
droit commun, pour être rendus par des individus, revêtus, pour la
circonstance, de la mission de les juger"14(*). Quant à Jarosson, il le
définit comme "l'institution par laquelle un tiers règle
(à titre privé bien évidemment) les
différends qui opposent deux ou plusieurs parties en exerçant la
mission juridictionnelle qui lui a été confiée par
celle-ci"15(*).
Garçonnet et César-Bru, à leur tour,
définissent l'arbitrage comme étant "la faculté pour
les parties de soustraire le différend qui les divise au jugement des
tribunaux donnés par la loi pour le soumettre à une
personnalité de leur choix".16(*) Une autre définition, et non pas des
moindres, est celle que nous donne Huys et Keutgen lorsqu'ils affirment que,
l'arbitrage est "un mode de solution des conflits qui trouve son origine
dans une convention privée et qui aboutit à une décision
revêtue de l'autorité de la chose jugée. Cette
décision est acquise à l'intervention d'un ou plusieurs
particuliers auxquels la volonté commune des parties donne pouvoir de
trancher le litige"17(*). En Suisse, Jolidon le définit comme
"la voie juridictionnelle privée qui repose sur la volonté
des parties, exprimée dans une convention, d'investir de simples
particuliers de la mission de trancher un ou des litiges en droit privé
en lieu et place des juridictions étatiques"18(*). Somme toute, l'arbitrage
est une juridiction privée comme le soulignent à bon droit les
auteurs allemands Schwab et Walter. Il est, si nous pouvons nous autoriser de
concevoir une définition de la notion, un mode de résolution des
litiges nés ou à venir par un ou plusieurs particuliers à
qui les parties confient à travers une convention, la mission de juger
à la place des juridictions étatiques de droit commun. Leur
décision ayant des effets similaires à ceux du juge
étatique est revêtue de l'autorité de la chose jugée
et nécessite, même en cas de reconnaissance dans un Etat tiers, un
exequatur pour son exécution.
Ce tour d'horizon des différentes définitions
qu'on peut donner à l'arbitrage dans la plupart des systèmes
juridiques, nous amène à envisager la conception de la notion
d'arbitrage international, c'est-à-dire une définition de
l'arbitrage dans sa composante international ou l'arbitrage vu sous le prisme
du droit international privé. Vu que notre étude porte sur la
comparaison du concept d'arbitrage international dans les systèmes
juridiques OHADA et helvétique, cette clarification sémantique se
révèle être un préalable nécessaire pour
mieux cerner comment l'arbitrage international sera appréhendé
sous le prisme des deux textes de loi d'arbitrage.
2-. LE CONCEPT D'ARBITRAGE
INTERNATIONAL
D'une manière classique, l'expression
"international" est utilisée de façon courante pour
noter la différence entre un arbitrage national qui est purement interne
à un Etat et un arbitrage qui transcende les frontières
nationales. Ceci étant, techniquement la définition du terme
"international" en matière d'arbitrage répond
ordinairement à deux grands critères.
Le premier est objectif et vise la nature du litige, de sorte
qu'un arbitrage est considéré comme international s'il "met
en jeu les intérêts du commerce international". C'est la
conception matérielle du droit français qui répond
à ce critère purement économique de
l'internationalité (cf. Art.1492 NCPC).
Le second est subjectif et s'en tient :
- soit aux parties, c'est-à-dire leur
nationalité, domicile ou siège social, c'est le cas du droit
suisse qui s'en est tenu à la notion purement formelle de
l'internationalité de l'arbitrage,
- soit au lieu de l'arbitrage dans ce cas c'est le
siège du tribunal arbitral qui est pris en compte, le droit OHADA
répond à ce dernier critère et enfin,
- soit aux modalités du contrat c'est-à-dire le
lieu de sa conclusion ou de son exécution.
Un autre critère est utilisé de façon
cumulative de sorte qu'est "international, l'arbitrage qui connaît
des litiges relatifs à des intérêts du commerce
international et dont l'une des parties a au moins son siège ou son
domicile à l'étranger".19(*) Cette dernière définition prend en
compte, à la fois la notion matérielle et formelle de
l'internationalité de l'arbitrage et donc, un croisement des
critères subjectifs et objectifs. Ceci étant, si l'arbitrage
international doit être défini comme celui qui est soumis à
une convention internationale ou au règlement d'une institution
internationale d'arbitrage, l'arbitrage institutionnel OHADA est, tout comme
celui mis en place par la convention de Washington20(*), un arbitrage
international. Mais cette qualification n'a réellement pas une
portée utilitaire pour la présente étude dans la mesure
où, l'arbitrage institutionnel OHADA (qui est celui de la CCJA) est
à l'instar de l'arbitrage CCI, un arbitrage organisé et
administré par l'institution elle-même selon son propre
règlement et procédure. Or, la présente étude
n'ayant pas vocation à analyser l'arbitrage institutionnel de la CCJA en
sa qualité d'institution d'arbitrage, pas plus que celui de la CCIG, il
serait superflu voire inutile de prendre en considération cette
définition. Nous n'envisagerons donc pas de passer en revue les
règlements d'arbitrage de ces différentes institutions
d'arbitrage, quoique réglementant l'arbitrage international. Rappelons
pour toutes fins utiles que, les chambres de commerce et d'industrie des
différents cantons suisses organisent sur la base du règlement
suisse d'arbitrage international, (basé sur le modèle du
règlement de la CNUDCI) des arbitrages institutionnels à l'instar
de celui de la CCI de Paris et de la CCJA dans l'espace OHADA. Les parties qui
s'y soumettent peuvent considérer leur arbitrage comme un arbitrage
international.
Par ailleurs, nous ne reviendrons pas sur les
précisions terminologiques relatives aux autres formes d'arbitrage
(transnational ou mixte, anational ou délocalisé...) puisque,
l'exclusivité de cette étude est réservée à
l'arbitrage international. Ceci étant, nous tenterons de définir
le concept d'arbitrage international à la lumière des principaux
systèmes (droit OHADA et LDIP) de notre étude, selon qu'ils
envisagent l'internationalité de l'arbitrage à travers
l'unité ou la dualité du régime juridique de l'arbitrage.
Ainsi, afin de mieux définir la notion d'arbitrage
international qui cadrera le mieux à cette étude, nous ne
tiendrons compte que de l'arbitrage de droit international privé par
opposition à l'arbitrage international au sens du droit international
public. Autrement dit, l'arbitrage de droit privé, international par son
objet, l'objet pouvant lui-même être défini, soit par
l'arbitrage lui-même, soit par la relation ayant donné naissance
au différend soumis à des arbitres, retiendra notre attention
dans cette étude comparée.
D'entrée de jeu il faut reconnaître que, la
définition de la notion d'arbitrage international en droit international
privé n'est pas univoque et prête souvent à confusion. En
effet, tout comme la définition de l'internationalité du contrat
en droit du commerce international, celui de l'arbitrage repose sur deux
critères. L'un juridique, où l'internationalité
suppose le rattachement de l'arbitrage à un ordre juridique
étatique parmi ceux entrant en considération et, l'autre à
caractère économique, où
l'internationalité se justifie par l'application de règles
matérielles propres à cette institution. Contrairement au droit
français21(*) qui définit l'arbitrage international en
tenant compte de l'acception économique, les droits OHADA et suisse de
l'arbitrage international définissent l'arbitrage international sur la
base du critère juridique. Ces deux textes ne donnant aucune
précision terminologique de la notion, il importe à ce niveau de
préciser que, toute définition notionnelle de l'arbitrage
international dans les deux systèmes ne peut se faire que par
déduction, au travers de l'internationalité de l'arbitrage.
B-. L'INTERNATIONALITE DE
L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET SUISSE : UNITE OU DUALITE DE
REGLEMENTATION
La définition de l'internationalité de
l'arbitrage dépend du champ d'application de la loi de l'arbitrage, en
l'occurrence pour ce qui est du cas qui concerne cette étude, l'Acte
Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage en droit OHADA et le chapitre 12 LDIP
en droit suisse. Alors que, le droit suisse distingue l'arbitrage interne de
l'arbitrage international en les soumettant à des régimes
juridiques différents, le droit OHADA n'opère pas ce distinguo.
En droit OHADA, un régime juridique unique est appliqué aussi
bien à l'arbitrage interne qu'à l'arbitrage international. Ce qui
n'est pas le cas en droit suisse où le régime juridique
applicable à l'arbitrage est dual.
Du point de vue du droit comparé, le régime
juridique de l'arbitrage international a fait l'objet de deux grandes opinions.
Les internationalistes22(*) qui, pour diverses raisons, soutiennent la
thèse selon laquelle, les spécificités propres à
l'arbitrage international requièrent que cette forme d'arbitrage soit
soumise à des règles matérielles répondant aux
besoins spécifiques de cette discipline. Ainsi, pour eux la
dualité de la réglementation a l'avantage de mettre plus en
évidence la spécificité de l'arbitrage international.
Cette thèse est en l'occurrence soutenue par la France et la Suisse. Un
autre groupe de pays, soutient qu'en dépit de ses particularités,
l'arbitrage international est un mode privé de règlement des
différends ne justifiant pas de le réglementer
différemment de l'arbitrage interne.
Pour eux, l'unité de la réglementation est le
meilleur choix qu'on puisse faire, dans la mesure où ce qui est bien
conçu pour l'arbitrage interne le serait également pour
l'arbitrage international. La présente étude, fort heureusement,
s'inscrit dans la logique des deux tendances qui s'observent eu égard
à l'application du régime juridique de l'arbitrage. Fort de cela,
nous passerons donc en revue les deux conceptions qui s'opposent du point de
vue doctrinal : celle de l'unité appliquée par le
législateur OHADA et celle de la dualité dont s'est fait
écho l'ordre juridique suisse. Dans cet ordre d'idée, nous
essayerons d'apporter la réponse à la question relative à
l'importance qui faille accorder à l'application d'un régime
juridique spécifique à l'arbitrage interne différent de
celui applicable à l'arbitrage international. Autrement dit, quel sens
donne-t-on à un arbitrage international dans les pays qui le distinguent
de l'arbitrage interne et le soumettent à des règles
particulières comme la Suisse ?
Nous distinguerons dans un premier temps, les
législations qui dédoublent leur régime juridique de
l'arbitrage comme la Suisse et par analogie la France, pour ne citer que ces
deux systèmes. Dans un second temps, le cas des pays qui cumulent le
régime juridique de l'arbitrage en une seule loi ferra l'objet de notre
attention. Ce serait le cas pour les pays faisant partie de l'OHADA et par
extension l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Angleterre, le Canada, pour ne citer que
ces systèmes. Mais avant, qu'est ce qui peut justifier le choix par le
législateur suisse de la dualité et celui de l'unité par
le codificateur OHADA ?
1-. LES FONDEMENTS DE L'UNITE DU
REGIME JURIDIQUE : LE CAS OHADA
En affirmant que "what is good for International
Arbitration is good also for Dutch arbitration", le rédacteur
néerlandais signifiait tout simplement que ce qui est bien conçu
pour l'arbitrage international peut également l'être pour
l'arbitrage interne et réciproquement. Pour justifier l'unité du
régime juridique, le codificateur néerlandais se fondait
simplement sur le fait que, les solutions retenues dans le cadre de l'arbitrage
interne peuvent bien évidemment être valables aux besoins de
l'arbitrage du commerce international et vice versa. La question à ce
niveau se pose de savoir si le codificateur OHADA s'inscrit aussi dans cette
même logique. Le cas échéant, serait-il permis, en
l'absence d'un texte spécifique sur l'arbitrage international, de parler
d'un droit OHADA de l'arbitrage international ?
Trois analyses hypothétiques nous permettent d'induire
l'effectivité de l'existence d'un arbitrage international dans l'espace
OHADA.
D'une part, l'AU.A en ne définissant pas l'arbitrage
international ne surprend guère puisqu'il s'agit d'un concept clef et,
l'acte en tant que texte normatif n'a pas vocation à donner de
définition. Ce rôle de définition voire de
conceptualisation revient, de façon générale, à la
doctrine et à la jurisprudence. Ceci étant, on peut estimer que
cette absence de définition de l'arbitrage international dans la loi
d'arbitrage OHADA est révélatrice d'une unité de
régime juridique pour les deux formes d'arbitrage, justifiant de
l'effectivité d'une existence d'un arbitrage international dans cet
espace. En effet, a priori, il est aisé de comprendre qu'en l'absence
d'une différenciation dans le texte OHADA de l'arbitrage interne et de
l'arbitrage international, rien ne laisse présager de l'existence d'un
droit OHADA de l'arbitrage international. Lorsqu'on sait que, dans les textes
de la loi d'arbitrage OHADA aucune distinction n'est faite entre arbitrage
international et arbitrage interne, on peut légitimement en
déduire que le codificateur OHADA de l'arbitrage n'a pas daigné
légiférer pour l'arbitrage international.
La conséquence logique serait qu'il n'y aurait pas une
place pour une internationalité de l'arbitrage dans cet espace et que
tout arbitrage se déroulant sous les hospices de l'OHADA serait un
arbitrage interne à l'OHADA. Mais, il serait totalement erroné
de faire cette lecture de la loi d'arbitrage OHADA dans la mesure où,
cette absence de distinction entre les deux formes d'arbitrage dans les textes
de loi sur l'arbitrage OHADA, comme l'a fait le codificateur du Nouveau Code de
Procédure Civil français, ne s'aurait s'interpréter que
comme un choix législatif discrétionnaire des promoteurs en vue
de donner à l'AU.A toute son efficacité. Efficacité qui
pourrait être vue sous l'angle de la célérité, de la
simplicité et de la modernité. Ce choix optionnel OHADA n'est pas
unique, loin s'en faut. Il est à l'image du choix opéré
par le Canada, l'Allemagne, les Pays-Bas etc. Loin de verser dans le
débat doctrinal sur l'opportunité d'un tel choix (choix entre
l'unité ou la dualité du régime juridique applicable
à l'arbitrage), nous constatons que toute la doctrine sur le droit OHADA
de l'arbitrage est quasi unanime sur les avantages de l'abolition de la
distinction entre arbitrage interne et international. Cette abolition,
d'après les rédacteurs de l'exposé des motifs de la
première version de l'avant-projet de l'AU.A, se justifierait par le
fait qu' "au caractère internationaliste déjà
très poussé de la Loi Uniforme qui a vocation à
s'appliquer dans seize Etats, tracer une nouvelle frontière entre cet
`'espace OHADA'' et les autres pays du monde peut paraître inutile et
dangereux"23(*). En
effet, il a été soutenu que, la mise en place d'une nouvelle
réglementation pour dissocier les deux formes d'arbitrage contrarierait
l'esprit intégrateur du projet en soi. Quand bien même on
relève que, la vocation première du projet OHADA est
l'harmonisation du droit des affaires de ces seize États, il est fort
aisé de constater que, la technique utilisée si l'on se
réfère aux modalités d'adoption des actes uniformes et
à leurs contenus, pour intégrer ces États, relève
beaucoup plus de la technique d'unification que celle de l'harmonisation. Sur
ce, il apparaîtrait dangereux de complexifier les textes normatifs par
leur diversification, ce qui ne rendrait pas la tâche facile aux
opérateurs économiques désireux d'investir dans cet espace
mais aussi, aux juristes et aux instances judiciaires chargés de leur
application.
Somme toute, s'il est une évidence à laquelle il
faut se rallier à la lecture du texte de la loi d'arbitrage OHADA, c'est
que dans cet espace aucune définition textuelle de l'arbitrage
international n'est référencée. Cependant, l'arbitrage
international fonctionne effectivement dans chacun des États-Parties
à l'OHADA avec comme source, en plus du Traité et de l'AU.A, tout
un arsenal de textes réglementaires étatiques et de conventions
internationales. En résumé, cette absence de distinction, loin
d'être une lacune paralysante du droit OHADA de l'arbitrage constitue,
à notre avis, le premier pilier visant à justifier les fondements
de l'unité du régime juridique de l'arbitrage en droit OHADA.
D'autre part, l'absence de spécification de normes
relatives à d'autres formes d'arbitrage dans la loi d'arbitrage OHADA
constitue un argument de poids nous permettant d'inférer les fondements
de cette unité du régime juridique de l'arbitrage en doit OHADA.
En effet, en dépit du constat de la non définition par l'AU.A de
la notion d'arbitrage international, force est de constater que l'AU.A ne
définit pas non plus de règles spécifiques applicables
à d'autres formes d'arbitrage siégeant dans cet espace comme l'a
fait le législateur suisse à travers la LDIP à son
chapitre12, portant le titre Arbitrage International.
Bien évidemment, si des règles
particulières relatives à d'autres formes d'arbitrage devant
siéger dans l'espace OHADA avaient été définies par
les rédacteurs OHADA, cela mettrait en cause l'approche unitaire du
régime juridique de l'arbitrage OHADA. De même, si des rajouts de
quelques dispositions propres à l'arbitrage international avaient
été faits dans l'Acte Uniforme relatif au droit de l'arbitrage
OHADA, comme l'ont fait les législateurs belge, italien et
suédois, cela mettrait en évidence la volonté de
clairement dissocier l'arbitrage interne de l'arbitrage international tout en
maintenant l'unité du régime juridique, ce qui n'est pas le cas.
Ce deuxième constat, à notre avis, constitue le pilier
supplémentaire de l'unité du régime juridique de
l'arbitrage en droit OHADA de l'arbitrage.
Enfin, dans les dispositions de l'art. 1er de
l'AU.A, deux expressions nous permettent de mettre en évidence les
fondements de l'unité du régime juridique en droit OHADA. Il
s'agit des expressions "tout arbitrage" et "siège du
tribunal arbitral". Avec l'expression "tout arbitrage"
peut se lire, la volonté du législateur OHADA à faire du
Traité et de l'AU.A consécutif, les seuls textes constitutifs du
droit commun de l'arbitrage. Ainsi, lorsque l'AU.A en son art.1er
dispose, qu'il a "vocation à s'appliquer à tout arbitrage
lorsque le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des
États-Parties" cela veut dire, qu'il ne fait pas de
spécificités juridiques aux différentes sortes d'arbitrage
en les soumettant à des régimes distincts. Il va s'en dire donc
que, tout le système de différenciation repose sur la notion de
siège de l'arbitrage. Donc, de la fixation de ce siège
dépendra la nature de l'arbitrage. C'est aussi ce que semble constater
le Prof. P. MEYER lorsqu'il affirmait que, tout système fondant
la nationalité de l'arbitrage au moyen d'un seul critère qui n'a
trait ni à la convention d'arbitrage, ni aux litiges soumis aux arbitres
mais, en se référant exclusivement au siège de
l'arbitrage, vise à assurer l'unité entre arbitrage interne
et arbitrage international. Ainsi, et comme nous le verrons plus tard,
un arbitrage sera interne à l'OHADA ou international selon que son
siège est conséquemment fixé dans un Etat-partie à
l'OHADA ou dans un Etat tiers. Notons toutefois que, l'unité de
régime juridique n'est ici que relative car, elle ne peut être
applicable qu'à la lex arbitri à l'exclusion toutefois
de la lex causae et de la loi applicable à la convention
d'arbitrage.
2-. LES FONDEMENTS DE LA DUALITE
DU REGIME JURIDIQUE EN DROIT SUISSE
Le fondement pour une législation
différenciée se base sur le raisonnement selon lequel,
l'arbitrage interne se situerait à l'intérieur d'un seul ordre
juridique et se caractériserait par la soustraction du litige à
la connaissance des tribunaux ordinaires, avec pour conséquence le
contrôle de la procédure et de la sentence par les
juridictions étatiques. Par ailleurs, l'arbitrage international
s'opèrerait souvent dans le cadre des relations du commerce
international et /ou de la pluralité des ordres juridiques, faisant
ainsi intervenir des conflits de lois et /ou de juridictions. Ainsi, il en
résulterait une impossibilité d'application des dispositions
légales de la législation interne sur l'arbitrage à
l'arbitrage international, lesquelles dispositions, semble-t-il, seraient
inadaptées aux besoins du commerce international. Cet argument
justifierait, selon eux, la nécessité d'une réglementation
spécifique à l'arbitrage international.
Certains y voient des différences énormes
justifiant un régime différencié puisque "le
profil-type de l'opération et du litige du commerce international
diffère de la transaction et du différend standard de droit
interne"24(*). Sur la
base de cette différenciation de critères clairement
établis, les internationalistes25(*) suggèrent et soutiennent l'impérieuse
nécessité de dissocier la réglementation applicable
à l'arbitrage interne de celle applicable à l'arbitrage
international. Même si, à la suite de cette argumentation nous
soutenons avec eux la pertinence du raisonnement, nous sommes
désolés de faire remarquer que parmi les États ayant
légiféré récemment, "une nette majorité
n'a pas estimé que la spécificité de l'arbitrage
international, justifiait de le réglementer différemment de
l'arbitrage international"26(*). Il est important de noter que, peu de pays dont
la Suisse et la France27(*) sont passés pour être les leaders de
l'application d'un régime juridique spécifique à
l'arbitrage international.
Pour en revenir au cas de la Suisse, la dualité de la
réglementation helvétique sur l'arbitrage peut trouver son
explication dans les particularités administratives de ce pays.
Lesquelles particularités sont dues à la répartition
constitutionnelle des compétences entre la confédération
et les cantons. Jarvin trouve que, le choix pour ce pays "a
été motivé par l'existence de règles locales
inadaptées à un usage international qui, compte tenu de la
tradition du pays en question ou de sa constitution, ont difficilement pu
être modifiées". En effet, la réglementation sur
l'arbitrage étant par essence une loi procédurale, elle relevait
de la compétence exclusive des cantons en Suisse. Ceci étant,
l'application à tous les arbitrages (quelle que soit leur nature) du
concordat du 27 mars 1969, seul texte constitutif du droit de l'arbitrage
interne et international à l'époque, et auquel les cantons ont
adhéré, a donné lieu à des inadaptations pour ce
qui est de son application à l'arbitrage international. On a alors
estimé que, vu la spécificité de l'arbitrage international
il est impossible de donner en une seule loi, une solution satisfaisante aux
questions que soulèvent les deux sortes d'arbitrage. La
confédération s'est alors reconnue compétente en
matière d'arbitrage internationale et, l'a réglementé avec
la LDIP du 18 Déc. 1987. Ainsi, tout comme en droit français
où la qualification internationale de l'arbitrage est fondée sur
un critère objectif et déterminant qui est la mise en cause
des intérêts du commerce international, le droit positif
suisse de l'arbitrage bénéficie d'un climat juridique
différencié basé sur la reconnaissance d'un critère
subjectif lié au domicile ou siège des parties. Selon que le
domicile ou la résidence habituelle ou le siège des parties se
trouve sur le territoire suisse, on distingue deux catégories
d'arbitrage : l'arbitrage interne dont le concordat se fait actuellement
l'écho 28(*)
et l'arbitrage international réglementé par le chapitre 12 de la
LDIP. Au surplus, il y a lieu de noter que sur ce point, la ressemblance entre
les deux systèmes ne se limite qu'à la dualité de leur
réglementation sur l'arbitrage.
Comme nous le verrons plus tard, les droits français et
suisse de l'arbitrage international ne s'accordent pas sur les critères
de définition de l'internationalité de l'arbitrage.
En résumé, cette différenciation de
régime juridique applicable à l'arbitrage, a fait l'objet de
dérogation aussi bien par le législateur OHADA que par le
rédacteur néerlandais de la nouvelle loi sur
l'arbitrage29(*)
qui, ne procède pas à cette dichotomie procédurale. A
notre avis, même si nous reconnaissons que l'arbitrage international a
ses spécificités (relatives à l'application des
règles du commerce international, si besoin) dont il faut tenir compte,
il est évident d'admettre que les deux formes d'arbitrage ne sont pas
des institutions aussi différentes qu'on puisse le croire, au point d'en
légiférer différemment.
Mis à part ces différentes conceptions, sur les
fondements du régime juridique applicable à l'arbitrage
international, il importe de définir l'internationalité de
l'arbitrage selon le droit positif OHADA et helvétique.
§ II-. LE CONCEPT
D'INTERNATIONALITE EN DROIT OHADA ET SUISSE
Comme nous l'avions dit en effet, l'arbitrage pour être
qualifié d'international doit :
- soit prendre en considération la conception
économique justifiant l'application des règles matérielles
propres à cette institution. Il s'agit du critère de distinction
objectif que le droit français utilise pour définir
l'internationalité. Entrent en ligne de compte pour cet arbitrage, ceux
(critères) qui mettent en jeu les intérêts du commerce
international. Une telle conception de l'internationalité de
l'arbitrage souffre, à notre avis, d'une lacune que le Prof. BUCHER
souligne à bon droit en invoquant le terme d'imprécision. En
effet, notre avis s'accorde à celui du Prof. A. BUCHER lorsqu'il
affirmait que, cette notion formelle de l'arbitrage international "a
l'avantage d'englober toutes les relations comportant un élément
d'extranéité mais elle présente un inconvénient non
négligeable du fait de son imprécision"30(*). Les deux systèmes
que nous étudions n'entrant pas dans ce schéma nous ne nous
appesantirons pas là-dessus.
- soit être rattaché à un ordre juridique
étatique parmi ceux entrant en considération. C'est le lieu de
relever que, la nationalité, le domicile ou le siège social des
parties d'une part, le lieu de l'arbitrage ou les modalités du contrat
d'autre part, jouent un rôle important. Le droit OHADA de l'arbitrage et
le droit suisse de l'arbitrage international semblent adhérer à
ce second critère de rattachement. Cependant, tandis que les
éléments nécessaires à la définition de
l'arbitrage international sont univoques dans le chapitre 12 LDIP, le lecteur
averti ne pourra qu'induire du champ d'application de l'AU.A cette
définition de la notion, vu que l'AU.A non seulement ne définit
pas l'arbitrage international mieux, aucune spécification sur cet
arbitrage n'est observable dans le texte. Le choix de l'unité du
régime juridique arbitral dans cet espace ne facilite pas non plus la
tâche, pour une telle définition.
A-. L'INTERNATIONALITE DE
L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA
En droit communautaire OHADA, le problème de la
définition de la notion d'arbitrage international se pose avec
délicatesse. D'un côté nous avons constaté et
souligné, qu'aucune définition de la notion ne figure aussi bien
dans les dispositions du Traité que dans celles de l'AU.A. De l'autre
côté, aucune référence textuelle n'est faite
à l'arbitrage international par les rédacteurs du code OHADA.
Cette double constatation peut laisser présager, l'hypothèse
d'une volonté des promoteurs à fédérer les deux
formes d'arbitrage à travers l'unique codification dans la seule norme
juridique : l'AU.A. Si cette hypothèse s'avère plausible,
quelle définition de l'arbitrage international peut-on tirer de la loi
d'arbitrage OHADA ?
C'est à travers la détermination de la notion de
siège du tribunal arbitral de l'art. 1er AU.A que
nous parviendrons à mieux cerner la définition de
l'internationalité de l'arbitrage dans le système OHADA. En
effet, cet article dispose que "le présent Acte Uniforme
à vocation à s'appliquer à tout arbitrage lorsque le
siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des
États-Parties". De cette définition, il s'ensuit deux
grandes hypothèses par rapport à l'internationalité de
l'arbitrage.
- Si tous les éléments constitutifs d'un
arbitrage (convention d'arbitrage, litige et instance procédurale) sont
localisés dans un seul espace géographique - celui de l'OHADA -
il n'y a là l'ombre d'aucun doute, cet arbitrage ne peut que recevoir la
qualification d'arbitrage interne (donc à l'OHADA) et soumis à
l'AU.A. A contrario, si les éléments sont tous localisés
dans un seul espace tiers à l'OHADA, il ne peut que s'agir d'un
arbitrage étranger non soumis au droit communautaire OHADA. Notons
à ce niveau qu'il n'est point important de se soucier de savoir si
l'arbitrage étranger est interne ou international. Le seul fait que les
éléments soient tous spatialement circonscrits dans un espace
hors OHADA suffit pour qualifier cet arbitrage d'arbitrage étranger. Il
va s'en dire qu'en droit OHADA, l'arbitrage interne ne s'oppose pas à
celui international mais plutôt à l'arbitrage étranger du
point de vue du régime juridique.
- Si les éléments sont spatialement
disséminés aussi bien dans l'espace OHADA que dans un Etat tiers,
il y a forcement place pour une internationalité de l'arbitrage. Ce qui
n'exclut pas dans tous les cas, en dépit de sa qualification, qu'il soit
soumis aussi bien à l'AU.A qu'à une autre loi
étrangère choisie. Comme on peut s'en douter, lorsque l'art.
1er AU.A dispose qu'il a vocation à s'appliquer lorsque
le siège du tribunal arbitral se trouve dans l'un des
Etats-parties, par déduction la logique voudrait que,
l'internationalité de l'arbitrage dans ce système soit sujette
à la fixation du siège du tribunal arbitral hors espace. Seule la
fixation du siège de l'arbitrage à l'étranger peut
permettre de déterminer le caractère international de l'arbitrage
en droit OHADA. On constate donc que, l'internationalité de l'arbitrage
en droit OHADA ne répond ni aux critères objectifs
utilisés par le droit français qui interpelle la mise en jeu des
intérêts du commerce international, ni celui de la
nationalité des parties, ni celui des modalités du contrat, non
plus celui du domicile ou le siège social des parties comme en droit
suisse. Le seul critère auquel on peut faire référence si
on s'en tient au principe du rattachement à un ordre juridique
étatique, c'est celui qui a trait au lieu de l'arbitrage. Cette
technique de détermination du caractère international de
l'arbitrage, du point de vue juridique nous parait peu consistante.
Le Prof. P. Meyer fait le même constat que nous
lorsqu'il affirmait que, l'internationalité "n'est pas
inéluctable si l'on définit la nationalité de l'arbitrage
au moyen d'un seul critère qui n'a trait ni à la convention
d'arbitrage, ni aux litiges soumis aux arbitres mais en se
référant exclusivement au siège de l'arbitrage"31(*). C'est pourtant de cette
manière que procède l'AU.A dans la compréhension que l'on
peut avoir des dispositions de son art.1er. Encore faudrait-il
savoir, quelle acception juridique le droit OHADA donne à la notion de
siège de l'arbitrage afin de mieux définir la nationalité
de l'arbitrage dans ce système, vu que tout le système
repose sur la notion de siège de l'arbitrage. S'agit-il de
l'acception territorialiste ou volontariste de la notion de siège ?
Nous le verrons dans la section relative à la notion de siège. A
ce stade, il importe de faire remarquer, comme le souligne à bon droit
le Prof. G. KAUFMANN-KOHLER que, le siège de l'arbitrage, "avec
l'évolution de la matière tend à devenir une fiction, sans
lien matériel nécessaire avec le territoire sur lequel les
opérations arbitrales se déroulent"32(*).
Par analogie, on peut rapprocher cette disposition du champ
d'application de l'AU.A aux dispositions de l'art. 1er al. 2 de la
loi-type CNUDCI33(*) qui
propose entre autres critères de rattachement, celui par le lieu de
l'arbitrage. Tout laisse croire que le codificateur de l'AU.A a repris la
loi-type de la CNUDCI. Mais fort curieusement, le législateur OHADA dans
la reprise des dispositions de ce texte a, semble t-il, oublié de
prendre en compte les autres hypothèses classiques
d'internationalité de la loi-type que sont : l'établissement
dans des États différents des parties à la convention
d'arbitrage, le lieu d'exécution d'une partie substantielle des
obligations ou de l'objet du différent et enfin la stipulation que
l'objet de la convention a des liens avec plus d'un pays.
En sus à tout ce développement, il conviendrait
d'ajouter que, le fait que l'acte recourt à l'expression "tout
arbitrage" laisse entrevoir la possibilité d'interprétation
selon laquelle, la loi d'arbitrage OHADA ne fait aucune restriction à
l'arbitrage international. Le droit OHADA de l'arbitrage, bien qu'ayant
vocation à s'appliquer à un sous ensemble d'États
régionalement proches, a un caractère international et
s'applique indifféremment à l'arbitrage interne ainsi qu'à
l'arbitrage international. Il va s'en conclure qu'en l'absence d'un texte
spécifique sur l'arbitrage international dans le droit uniforme OHADA,
le Traité OHADA et l'AU.A sont les seuls textes constitutifs aussi bien
de l'arbitrage interne que de l'arbitrage international.
B-. L'INTERNATIONALITE DE
L'ARBITRAGE EN DROIT SUISSE
C'est déjà un fait que le législateur
suisse ait consacré tout un chapitre entier dans la LDIP à
l'arbitrage international. C'en est un autre, s'il ne s'est pas soucier de
définir la notion dans la loi d'arbitrage. Cela va de soi car, la
définition et, comme nous l'avions dit ci haut, d'une manière
générale la conceptualisation doivent être l'oeuvre de la
doctrine, voire de la jurisprudence. Ceci étant, en droit suisse de
l'arbitrage international, c'est dans les dispositions du chapitre 12 portant
le titre ARBITRAGE INTERNATIONAL de la loi fédérale sur le droit
international privé que, le lecteur averti peut en inférer une.
Bien que ne donnant pas une définition
matérielle de la notion d'arbitrage international, l'art. 176 al. 1 tout
en définissant le champ d'application de la loi nous en donne la
possibilité. Il dispose que "les dispositions du présent
chapitre s'appliquent à tout arbitrage si le siège du
tribunal arbitral se trouve en Suisse et si au moins l'une des parties n'avait,
au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa
résidence habituelle en Suisse". Il en résulte qu'un
arbitrage est international en droit positif suisse, s'il répond
à une double condition cumulative. Condition que résume si bien
P. LALIVE lorsqu'il affirme que, l'application du chapitre 12 dépend de
deux conditions : le caractère international de l'arbitrage,
provoqué par l'extranéité d'une au moins des
parties et la présence du siège du tribunal
arbitral en Suisse. Passons donc en revue ces deux conditions. Par rapport
au siège du tribunal arbitral qui doit être en Suisse, il
convient de rappeler que, la référence au siège est un
critère largement répandu et appliqué en droit
comparé. Si la réglementation suisse de l'arbitrage international
s'en est inspirée, c'est juste pour se conformer à la tendance
majoritaire du droit de l'arbitrage qui admet le rattachement territorial. Nous
reviendrons sur la définition du siège, son rôle et son
importance dans le développement. Par ailleurs, le domicile ou la
résidence des parties à la convention d'arbitrage que P.
LAIVE qualifie de l'extranéité d'une au moins des
parties est une hypothèse d'internationalité classique du
contrat, récupérée par le droit de l'arbitrage
international et reprise dans le chapitre 12 LDIP. A ce niveau, force est de
constater que pour qu'un arbitrage reçoive la qualification d'arbitrage
international selon les dispositions du chapitre 12 LDIP, il faut que l'une des
parties à la convention ait son domicile ou sa résidence
habituelle dans un Etat tiers lors de la conclusion de ladite convention.
Ainsi, l'internationalité de l'arbitrage dépend du domicile ou du
lieu de résidence à l'étranger de l'une au moins des
parties au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage. Il en appert,
pour être plus clair que, l'élément
d'extranéité, pour emprunter les termes de P. LALIVE, doit
exister au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage. L'art. 176 de
la LDIP prescrit donc, pour la qualification internationale de l'arbitrage, de
se reporter au moment de la conclusion de la convention d'arbitrage. Les
modifications ultérieures n'influent pas sur la qualification primaire.
Ce qui veut dire qu'on peut déterminer dès la conclusion de la
clause arbitrale à quelle législation, interne ou internationale,
l'arbitrage sera soumis. Dans cette optique, deux points forts marquent
l'extranéité de la situation. Il s'agit du moment de la
conclusion de la convention d'arbitrage et de la résidence ou domicile
à l'étranger qui, joueront un rôle important dans la
détermination du caractère international de l'arbitrage en droit
suisse de l'arbitrage34(*). Notons toutefois que le chapitre 12 LDIP ne
définit pas les notions de domicile ou de résidence, il faut s'en
remettre pour cela à l'art. 20 LDIP.
Si la condition d'extranéité,
conformément aux dispositions de l'art. 176, est remplie à
l'égard d'une personne physique qui n'a ni son domicile ni sa
résidence en Suisse, qu'en est-il en revanche des personnes
morales ? Cette question soulève indubitablement la
problématique de la fixation des limites à l'arbitrabilité
que nous verrons dans la suite du développement. Mais avant, focalisons
notre étude sur le questionnement qui porte sur la condition
d'extranéité à l'égard des personnes morales.
Autrement dit, quel qualificatif donner à un arbitrage dans lequel une
des parties à la convention n'a, au moment où celle-ci est
conclue, ni domicile ou résidence en Suisse mais juste un siège
social, un établissement ou une succursale ?
Dans le silence du chapitre 12 LDIP sur la question,
référence est faite aux dispositions de l'art. 21 LDIP. En effet,
il est admis en droit positif suisse que le siège des
sociétés vaut domicile et, il est réputé se trouver
au lieu désigné par les statuts ou dans le contrat de
société. A défaut, il se trouve au lieu où la
société est administrée en fait. Sur la question de
l'existence d'une succursale ou d'un établissement secondaire d'une
société étrangère en Suisse, la doctrine estime que
cette existence n'enlève pas à l'arbitrage son caractère
international au sens de l'art.176 de la LDIP. Il en résulte que,
l'arbitrage entre une société suisse et une société
étrangère ayant une succursale ou un établissement en
Suisse est international, donc relevant du chapitre 12, alors que celui contre
la filiale suisse d'une société étrangère ne l'est
pas et donc relèverait du concordat35(*).
En résumé nous constatons que, même si la
qualification d'arbitrage international n'est ici envisagée qu'entre
personnes physiques, il n'en demeure pas moins vrai que, l'arbitrage de DIP
dans le cadre du chapitre 12 est aussi envisageable entre des personnes
morales en particulier les sociétés. Pour les personnes morales
de droit public, la seule preuve textuelle de ce que le chapitre 12 leur est
applicable relève des dispositions de l'art. 177 al. 2 qui, pose le
principe de la non-renonciation à l'arbitrabilité d'un litige
dans lequel un Etat et ses dépendances sont impliqués. Notons
enfin que, lorsque le critère prévu à l'art. 176 LDIP
n'est pas rempli tout arbitrage siégeant en Suisse est régi par
le concordat intercantonal sur l'arbitrage (CIA). N'envisageant pas d'analyser
le concordat nous limiterons notre étude à ce niveau.
SECTION II -. LES DOMAINES DE
L'ARBITRAGE DANS LES DEUX SYSTEMES
DROIT COMPARE
Art. 1 AU.A
"Le présent Acte Uniforme à vocation
à s'appliquer à tout arbitrage lorsque le siège du
tribunal arbitral se trouve dans l'un des Etats-parties".
Art. 176 LDIP
1) "Les dispositions du présent chapitre
s'appliquent à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se
trouve en Suisse et si au moins l'une des parties n'avait, au moment de la
conclusion de la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa
résidence habituelle en Suisse.
2) Les dispositions du présent chapitre ne
s'appliquent pas lorsque les parties ont exclu par écrit son application
et qu'elles sont convenues d'appliquer exclusivement les règles de la
procédure cantonale en matière d'arbitrage.
3) Les parties en cause ou l'institution d'arbitrage
désignée par elles ou, à défaut, les arbitres
déterminent le siège du tribunal arbitral".
-----------------------------------------------------
Il est fort utile de préciser ici que, la loi de
l'arbitrage OHADA comprend aussi bien le Traité OHADA dans ses
dispositions relatives à l'arbitrage au Titre IV que, l'Acte Uniforme
relatif au droit de l'Arbitrage (AU.A). Ceci étant, il est important de
relever que les dispositions du chapitre 12 LDIP ne s'appliquent pas à
tous les arbitrages, un domaine lui est en effet bien défini, celui de
l'arbitrage international. Ce qui n'est pas le cas en doit OHADA dans la mesure
où le Traité et l'AU.A s'appliquent d'une part
indifféremment à l'arbitrage interne et à l'arbitrage
international, d'autre part, nous verrons que, l'AU.A ne fait pas de
distinction entre arbitrage civil et commercial ce qui constitue une
spécificité, pour le reste, innovatrice en droit de l'arbitrage.
L'étude des domaines ici envisagés ne saurait se faire que par la
revue des critères d'applicabilité de l'arbitrage dans les deux
systèmes.
§I -. LES CRITERES D'APPLICABILITE DE L'ARBITRAGE DANS
LES DEUX SYSTEMES
Il s'agit d'analyser les différents champs
d'application respectifs des deux lois d'arbitrage. Pour cela nous passerons en
revue les critères d'application ratione loci et ratione
materiae de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP.
A-. LES CHAMPS D'APPLICATION RATIONE LOCI DE L'AU.A
ET DU CHAPITRE 12 LDIP
Définir le périmètre d'application
ratione loci des deux lois d'arbitrage, revient à
déterminer si un arbitrage se déroulant dans leur giron est
susceptible de recevoir l'application de leurs dispositions respectives.
Autrement dit dans quelles conditions, l'applicabilité des dispositions
de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP est-elle observable ?
Evidemment, deux techniques de rattachement permettent de
définir le champ d'application ratione loci d'une loi
d'arbitrage. Le plus souvent, la loi d'arbitrage est rattachée soit par
le biais de la volonté des parties (rattachement volontariste ou
autonomiste) soit par celui du siège de l'arbitrage (rattachement
territorialiste). Le rattachement par la volonté des parties que la
convention de New York consacre dans ses dispositions, n'est pas celui
adopté par les droits OHADA et suisse de l'arbitrage international. Ce
rattachement par la volonté des parties, il faut le dire, est
fréquent dans les législations modernes sur l'arbitrage. La
loi-type de la CNUDCI s'en est accommodé, lorsqu'elle évoque la
possibilité pour les parties de pouvoir choisir le lieu de l'arbitrage.
On le retrouve également dans la réglementation anglaise de
l'arbitrage qui se réfère à la notion de "juridical
seat" pour désigner le siège de l'arbitrage "in this
part «the seat of the arbitration» means the juridical seat of the
arbitration designated [...]". Les deux lois auxquelles nous consacrons
cette étude comparée, s'inscrivent plutôt dans la tendance
du droit comparé qui, soumet le rattachement de la loi d'arbitrage par
le biais du siège du tribunal arbitral. Elles admettent donc le
rattachement territorialiste. Cependant, on ne saurait en conclure que les
réglementations OHADA et suisse de l'arbitrage international sont en
total déphasage avec le droit moderne de l'arbitrage.
a-. LE FONDEMENT DU RATTACHEMENT TERRITORIALISTE AVEC
INCLUSION A L'OHADA ET LA SUISSE
En droit OHADA et en droit suisse de l'arbitrage
international, ce sont les dispositions respectives des articles 1er
AU.A et 176 LDIP qui nous permettent d'inférer la nature du rattachement
de ces réglementations sur l'arbitrage. De la lecture du contenu de
leurs dispositions, il ressort que, l'AU.A en droit OHADA ainsi que le chapitre
12 LDIP ne peuvent tous deux recevoir application que, si le siège du
tribunal arbitral se trouve sur le territoire déterminé par
chacun d'eux. En recourant au terme siège du tribunal arbitral,
les deux lois font donc de l'existence d'un siège sur leur champ
géographique respectif, une des conditions déterminantes pour
entraîner chacune, l'application de leurs dispositions. C'est bien
évidemment, le rattachement par le biais du siège ou rattachement
territorialiste qui, semble ressortir de la compréhension qu'on peut
avoir de la lecture des dispositions relatives au champ d'application de ces
deux lois d'arbitrage. En effet, la référence faite dans ces
textes à l'expression siège du tribunal arbitral
plutôt que, siège de l'arbitrage en est la preuve. Ce
choix n'est pas anodin dans la mesure où, avec l'expression
siège du tribunal arbitral, le choix optionnel en faveur d'un
rattachement qui ferait dépendre la procédure de l'arbitrage en
faveur de la loi du lieu où il se déroule est sans
équivocité. Par contre, si le législateur avait fait
recours à l'expression siège de l'arbitrage, il s'en
interpréterait que, le rattachement de la loi d'arbitrage est celui de
la volonté des parties. D'où toute l'importance de la distinction
entre les deux expressions. C'est donc sur la base de ce choix,
(siège du tribunal arbitral) dans les dispositions des deux
règlementations sur l'arbitrage que, nous-nous autorisons à
conclure que, les législateurs OHADA et suisse de l'arbitrage
international, préfèrent faire dépendre la
procédure à la loi du lieu de l'arbitrage plutôt que de la
rattacher à la volonté des parties. En conclusion, nous
constatons que conformément aux autres ordres juridiques, les droits
OHADA et suisse s'inscrivent dans la mouvance large et contemporaine du
rattachement au siège du tribunal arbitral. Mais, ne nous
jetons pas dans une telle conclusion hâtive et hasardeuse car, des
nuances doivent pouvoir être faites dans l'interprétation de ces
dispositions. Nuances que nous mettrons en évidence au travers du
caractère exclusif ou impératif du rattachement
selon les dispositions des deux réglementations que nous avons en
présence.
b-. LE CARACTERE DU RATTACHEMENT : EXCLUSIF OU IMPERATIF
La principale divergence entre le rattachement territorialiste
OHADA et suisse relève de ce que le rattachement par le siège
présente en droit OHADA un caractère exclusif, alors
qu'en droit suisse il est impératif.
Le caractère impératif du rattachement
suppose que le choix par les parties du siège emporte élection
implicite de la loi de l'arbitrage de ce lieu. Appliqué au contexte
suisse, le rattachement impératif signifie simplement que, pour
un arbitrage siégeant en Suisse, les parties ne peuvent exclure
l'application de la loi d'arbitrage du siège, qu'est le chapitre 12
LDIP. On en induit que, le fait de la fixation du siège du tribunal
arbitral en Suisse emporte de droit, l'application du chapitre 12 LDIP
comme loi de l'arbitrage. Même en cas d'élection d'une autre loi
de l'arbitrage par les parties, tout arbitrage ayant son siège en Suisse
recevra l'application des dispositions impératives de la loi d'arbitrage
qu'est le chapitre 12 LDIP. Les parties ne sauraient, par quelques dispositions
que ce soient, déroger aux dispositions impératives de cette loi.
L'impérativité du rattachement découle
donc de l'impossibilité de se soustraire aux dispositions du droit
suisse de l'arbitrage entendu comme, l'ensemble des normes régissant
l'arbitrage à l'intérieur de la Suisse. Cependant, l'une des
particularités de cette loi suisse de l'arbitrage international,
relève du fait qu'en dépit du caractère impératif
du rattachement par le siège, les parties peuvent exclure l'application
du chapitre 12 LDIP pour se soumettre à d'autres dispositions internes
sur l'arbitrage. Il s'agit d'une exception prévue par le droit suisse
dans les dispositions de l'art. 176 al. 2 LDIP. Selon les termes de cet
article, le chapitre 12 ne s'appliquera pas si "les parties ont exclu par
écrit son application et qu'elles sont convenues d'appliquer
exclusivement les règles de la procédure cantonale en
matière d'arbitrage". La loi suisse de l'arbitrage international
offre ainsi aux parties, par l'élection d'une clause d'exclusion, la
possibilité d'écarter l'application du chapitre 12 en
déclarant se soumettre, soit aux règles de la procédure
cantonal, soit au concordat. Cette exception, bien évidemment, n'affecte
guère le caractère impératif du rattachement dans
la mesure où, le choix de la loi cantonale ou du concordat comme loi de
procédure, n'offre aucunement aux parties la possibilité de
rattacher la procédure arbitrale à une autre loi
étrangère ou, d'échapper à l'application des
dispositions impératives de la loi suisse de l'arbitrage international.
Quid du droit OHADA de l'arbitrage ?
Le droit OHADA de l'arbitrage, contrairement au droit suisse
ne procède pas par rattachement impératif. Bien
qu'admettant le rattachement par le siège de l'arbitrage, le
caractère du rattachement en droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence
dans l'AU.A, est exclusif. Nous tirons bien évidemment cette
conclusion de l'usage de l'expression "a vocation à
s'appliquer". En recourant à cette expression, l'esprit du texte
est tout autre dans la mesure où le caractère du rattachement par
le biais du siège change du tout au tout. Il n'est plus ici
impératif comme en droit suisse mais exclusif dans la
mesure où comme le dit le texte il "a vocation à
s'appliquer". Les conséquences liées à un tel
rattachement s'induisent de ce que :
- d'une part, les parties ont la latitude d'exclure
l'application de l'AU.A comme loi d'arbitrage et s'en remettre à une
autre loi nationale, même si l'arbitrage siège dans cet espace.
Réserve faite, toutefois, des dispositions impératives contenues
dans l'AU.A qui s'avèrent être incontournables et auxquelles les
parties ne peuvent déroger. Mais, il est fort utile de faire remarquer
que, très peu de dispositions impératives figurent dans ce texte
de réglementation sur l'arbitrage OHADA.
- d'autre part, si nous demeurons fidèles à la
tendance contemporaine et dominante qui veut que, le siège du tribunal
arbitral désigne plutôt le lien de l'arbitrage avec un ordre
juridique, le caractère exclusif du rattachement nous
amènera à comprendre que, l'AU.A ne recevra pas application
d'office, toutes les fois que le siège du tribunal arbitral se situerait
sur le territoire d'un Etat-partie. Le caractère supplétif de
l'AU.A que nous tirons de l'usage de l'expression a vocation à
s'appliquer, permettra de ce fait aux parties d'écarter son
application. Ainsi, si la volonté des parties est d'écarter
l'AU.A, cette volonté se doit d'être respectée en
dépit du siège dans un Etat-partie. Autrement dit, l'AU.A ne
s'appliquera comme loi de procédure ou loi de l'arbitrage que, si les
parties en décident de son application. Il s'ensuivrait par
hypothèses successives que si le siège du tribunal arbitral se
trouvait sur le territoire d'un Etat-partie, alors les dispositions de l'AU.A
seraient applicables à défaut de volonté contraire des
parties. Si a contrario, le siège se trouvait sur le territoire d'un
Etat tiers, les dispositions de l'AU.A ne seraient applicables qu'à
condition que les parties l'aient désigné comme loi de
l'arbitrage ou loi de procédure (lex arbitri).
Bref, un constat se dégage de la lecture minutieuse des
dispositions relatives au champ d'application de ces deux lois d'arbitrage. On
constate une communauté de cause par les deux lois, dans la
détermination de leur champ d'application respectif. Cette
communauté de cause que nous évoquions c'est le recours au
siège, vu comme le for géographique, pour définir le
rattachement des deux lois d'arbitrage. Nous venons en effet de conclure,
conformément aux dispositions de l'art. 1er AU.A, qu'il ressort que
l'élément de rattachement permettant l'application des
dispositions du droit communautaire OHADA pour un arbitrage quel qu'il soit,
c'est le siège du tribunal arbitral. Comme l'acte
lui-même le stipule, toutes les dispositions qui lui sont relatives ne
peuvent s'appliquer que si le siège du tribunal arbitral se
trouve, géographiquement situé, sur le territoire de l'un des
États membres à l'OHADA. Idem en droit suisse de l'arbitrage
international où, la référence au siège du
tribunal arbitral pour définir la potée territoriale du
chapitre 12 LDIP n'est guère occultée dans la formulation des
dispositions de l'art. 176 de cette loi. Le chapitre 12 LDIP à l'instar
des conventions internationales, recoure ainsi donc au critère de
localisation territoriale pour circonscrire son champ d'application. Il dispose
que "si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse" les
dispositions du présent chapitre s'appliqueraient. Il va s'en dire donc
que, le champ d'application ratione loci de l'AU.A et du chapitre 12
se défini par rapport à la notion de siège du tribunal
arbitral. Notion qu'ils ne définissent pas tous deux. Que peut-on
alors entendre par siège du tribunal arbitral ? Quelle
importance révèle alors le siège dans un arbitrage de DIP
et comment s'opérationnalise le choix de ce siège ? Voilà
les questions nécessaires, auxquelles nous répondrons, à
la bonne compréhension de la problématique du siège.
c-. LE SIEGE DE L'ARBITRAGE DE DIP
Le choix du siège du tribunal arbitral pour
définir le champ d'application de la loi d'arbitrage pose bien
évidemment la problématique de la définition de la notion
de siège. Dans les deux lois, à la lecture des
dispositions relatives à la notion de siège du tribunal
arbitral, l'idée qu'on peut se faire de la définition, de
l'importance et du rôle qu'il joue n'est pas la même. La notion de
siège n'étant bien évidemment pas définie
dans le corpus des deux lois, il faut s'en remettre pour cette
définition à la doctrine et à la jurisprudence.
Le siège du tribunal arbitral renvoie à
l'idée de l'espace physique, c'est-à-dire un lieu spatialement
situé dans lequel le tribunal se regroupe pour ses audiences et
délibérations. Partant de là, le siège
répond beaucoup plus à la conception territorialiste qui donne au
lieu géographique de l'arbitrage toute son importance contrairement
à la conception volontariste. Du point de vue doctrinal, il est
important de souligner que, deux conceptions juridiquement antinomiques
s'opposent quant à la définition de cette notion. La conception
territorialiste et celle volontariste.
La première veut que, l'arbitrage soit rattaché
à l'ordre juridique et aux juridictions de son siège
entendu comme lieu des opérations d'arbitrage. Pour les volontaristes
par contre, le lieu physique où se déroulent les
opérations ne revêt aucune importance. Seul l'environnement
juridique choisi par les parties pour leur arbitrage constitue le fondement du
rattachement de l'arbitrage. Le siège dans ce cas peut
être indépendant du lieu géographique où se
déroulent les opérations. Cette définition de la notion de
siège a fait l'objet d'une acceptation quasi unanime de la
jurisprudence et de la doctrine.
A la suite de ces deux conceptions, la question se pose de
savoir dans quel canevas s'inscrivent réellement les droits OHADA et
suisse de l'arbitrage international dans leur définition de la notion de
siège et, quelles implications juridiques cela peut-il avoir du
point de vue de la pratique ?
Lorsqu'on s'en tient à la formulation des dispositions
de l'art. 176 LDIP, force est de constater que le chapitre 12 s'inscrit, dans
la logique de la conception territorialiste de la notion de
siège pour définir son champ d'application. Nous n'en
voulons pour preuve que, l'utilisation du terme siège du tribunal
arbitral qui renvoie à l'idée d'un for géographique.
Si nous prenons pour vraie cette interprétation, il s'en dégage
que, l'autonomie des parties à cette étape de la procédure
est sans importance. Ce qui contraste d'avec le principe de base de l'arbitrage
qui veut que les parties soient, autonomes tout au long de la procédure
et par voie de conséquence, libres dans le choix du lieu de l'arbitrage.
P. LALIVE interprétant aussi cette énonciation malencontreuse des
dispositions du chapitre 12 LDIP formulait la contrariété
suivante "il est regrettable que la LDIP, à la suite du concordat
... utilise la formule de siège du tribunal arbitral qui éveille
l'idée d'une localisation ou d'un for géographiques. L'essentiel
suggère t-il demeure toutefois que la notion de siège à
laquelle recourt la loi soit bien celle que l'on vient de définir".
La définition de la notion de siège que cet auteur
propose est, à juste titre, celle du père du concordat suisse
qui, fait sienne la conception volontariste en affirmant que, le
siège ne saurait être vu que comme le lien juridique
entre l'arbitrage et la juridiction de l'Etat choisi, autrement dit le lien
juridique qui relie les parties à l'arbitrage et l'arbitre, d'une part,
à un for judiciaire et à une loi étatique sur l'arbitrage,
d'autre part . C'est bien évidemment cette conception du
siège, qu'une jurisprudence en droit suisse du TF a
confirmée dans un arrêt du 24 mars 1997 (ATF 24 mars 1997, Bull.
ASA 1997, p.316, 329-330). Aujourd'hui, toute la doctrine est unanime sur cette
dernière définition du siège de l'arbitrage qui
permet de mettre un accent sur le lien de l'arbitrage avec un ordre juridique.
Dès lors aucune ambiguïté n'est permise dans la
définition de la notion de siège, que ce soit en droit
OHADA ou en droit suisse de l'arbitrage international, même si
l'expression siège du tribunal arbitral peut prêter
à confusion.
La question de la définition de la notion de
siège en droit OHADA est plus délicate. Si l'on s'en
tient aux dispositions de l'art. 1er AU.A, le droit OHADA recourt aussi
à l'expression siège du tribunal arbitral. Ce qui
renvoie toujours à l'idée d'un for géographique duquel
dépendrait la loi de l'arbitrage et par conséquent la loi
procédurale. Mais, avec l'expression a vocation à
s'appliquer la donne est tout autre. On en vient à
l'interprétation selon laquelle, la notion de siège en
droit OHADA revêt bien plus un caractère volontariste que
territorialiste. Cela va de soi dans la mesure où, l'usage de
l'expression a vocation à s'appliquer ne se
révèle pas banal. Cette expression, met en évidence la
volonté du législateur OHADA à faire prévaloir la
volonté des parties dans le choix du droit applicable à la
procédure. En concevant que, la volonté des parties à
l'arbitrage en droit OHADA est primordiale au principe du rattachement
impératif se pose dès lors la question de savoir, si
c'est le principe général de l'autonomie qui gouverne l'arbitrage
qui justifie le choix par le législateur OHADA, de faire
prévaloir la volonté des parties à travers l'expression
a vocation à s'appliquer dans la détermination implicite
de la loi de l'arbitrage. Dans l'affirmative, l'acte uniforme rejoint ainsi
toutes les autres législations qui estiment, conformément aux
principes généraux que, l'arbitrage est l'affaire des parties
qui, du fait de l'autonomie de leur volonté, peuvent l'organiser de fond
en comble.
Par-dessus tout l'AU.A, il faut le reconnaître,
réconforte sa position de faire prévaloir la volonté des
parties dans la détermination de la lex arbitri dans les
dispositions de l'art. 14 AU.A qui vient en appoint à l'art. 1er et qui
dispose que "les parties peuvent directement ou par référence
à un règlement d'arbitrage régler la procédure
arbitrale, elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de
procédure de leur choix". Au regard de la place
réservée par l'arbitrage OHADA à la volonté des
parties, nous pensons que l'option dans la définition de la notion de
siège serait en faveur de la conception volontariste qui,
permettrait aux parties de désigner par là même, le for
judiciaire d'appui en vue de donner plus de sécurité à
l'exécution effective de la sentence arbitrale. Cela étant,
quelle importance revêt le siège dans la pratique
arbitrale conformément aux dispositions des deux lois d'arbitrage ?
B-. IMPORTANCE ET CHOIX DU SIEGE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA
ET SUISSE
Notons, d'entrée de jeu que le rattachement par le
biais du siège ne revêt pas la même importance selon que
nous nous l'envisageons sous le prisme de l'une ou l'autre des lois d'arbitrage
que nous avons en présence. Le siège de l'arbitrage est important
à plusieurs titres.
D'une part, lorsque le siège est défini sur la
base du principe de territorialité il permet de déterminer la
lex arbitri entendue comme loi procédurale avec pour corollaire
la compétence des tribunaux du siège comme juridiction d'appui et
de recours contre la sentence. La loi applicable à la procédure,
dépendra alors du lieu ou le siège du tribunal arbitral est
fixé. C'est la solution retenue par le droit suisse de l'arbitrage
international. Par contre, lorsque le siège est défini sur la
base du principe de l'autonomie, la loi applicable à la procédure
relève du choix des parties et à défaut, soit du choix de
l'institution désignée soit du choix du tribunal arbitral. Dans
cette hypothèse, leur choix peut porter sur une loi applicable à
la procédure autre que la loi du lieu de l'arbitrage. C'est la solution
qui, semble-t-il, est retenue par le droit OHADA de l'arbitrage.
D'autre part, si dans la quasi majorité des
systèmes il est aisément concevable que, la sentence rendue
à l'issue de l'instruction de l'affaire doit mentionner le siège
de l'arbitrage, cette sentence sera réputée, alors, avoir
été rendue à cet endroit. Même si les
opérations d'arbitrage ne s'y sont pas déroulées
totalement ou partiellement. Dans cette logique, le siège permet de
donner une nationalité à la sentence et ceci, dans la perspective
de l'application des dispositions de la convention de New York sur la
reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales
étrangères pour les besoins de son exécution. Dans les
deux systèmes objet de la présente étude, ce principe
n'est pas remis en cause.
Comment s'opérationnalise alors le choix du
siège du tribunal arbitral ?
a-. LE CHOIX DU SIEGE
En vertu du principe de l'autonomie qui gouverne l'arbitrage,
ce sont les parties qui fixent le siège de l'arbitrage. C'est en
substance ce que nous rappelle l'al. 3 de l'art. 176 LDIP "les parties en
cause ou l'institution d'arbitrage désignée par elles ou,
à défaut, les arbitres déterminent le siège du
tribunal arbitral". Le principe est ainsi, clairement établi par le
chapitre 12 LDIP qui assujettit cette désignation à aucune forme
particulière. Elle peut être expresse ou tacite, directe ou
indirecte voire par référence à un règlement
d'arbitrage.
Si le droit suisse de l'arbitrage international, ne fait pas
économie des dispositions relatives au choix du siège du tribunal
arbitral et par ricochet au principe de l'autonomie qui prélude à
un tel choix, le droit OHADA sur cette question est parcimonieux voire muet. Il
est regrettable que là dessus, le droit OHADA de l'arbitrage en
l'occurrence l'AU.A ne se soit pas prononcé. Il y a donc, à notre
avis, un vide juridique qu'il faille combler. Cependant, même si en droit
OHADA on ne trouve aucune disposition relative à la fixation du
siège par les parties, il faut reconnaître que, ce droit
adhère au principe du libéralisme qui prélude à
l'arbitrage. De ce fait, il est évident qu'en droit de l'arbitrage
OHADA, la fixation du siège de l'arbitrage est d'abord l'oeuvre des
parties. Le défaut de fixation par les parties emporte, tout comme en
droit suisse, les deux possibilités évoquées par l'art.
176 al. 3 LDIP. Ce qui revient à dire, qu'en cas de non fixation par les
parties elles-mêmes du siège, le choix peut
s'opérationnaliser soit tacitement soit indirectement voire par
référence.
L'autre préoccupation, porte sur l'impossibilité
d'identification claire sur le choix du siège dans la clause
d'arbitrage. Cette hypothèse fréquente en arbitrage ne doit pas
être une entorse au déroulement de la procédure. Il faut le
déterminer à un moment ou un autre. La question se pose alors de
savoir où tenir l'arbitrage ?
Bien sûr que l'AUA et le chapitre 12 LDIP ne nous
apportent, aucunement une réponse édifiante à cette
question qui, n'est pas des moindres dans un arbitrage de DIP. Il n'y a pas une
réponse simple ni universelle à cette question, à
défaut de précision des deux réglementations sur
l'arbitrage. Il faut s'en remettre à la pratique qui, à son tour
recommande de s'en remettre à la recherche d'un certain nombre de
critères devant préluder au choix par le tribunal arbitral de
DIP, du siège de son arbitrage. Pour choisir le siège, la
pratique suggère de tenir compte des critères essentielles telles
que : la nationalité des parties en litige, la résidence
habituelle des parties, l'endroit où elles exercent leurs
activités. Certains facteurs politiques et économiques, la
possibilité de recourir facilement à certaines compétences
locales et de disposer de locaux convenables pour les audiences, ne manquent
pas de poids dans la fixation du siège de l'arbitrage. Les facteurs
relatifs à l'environnement juridique propre au lieu d'arbitrage
considéré sont aussi déterminants et à prendre en
compte puisque cet environnement exerce une influence à la fois sur le
déroulement de l'arbitrage et sur la possibilité de faire
exécuter ultérieurement la sentence.
Notons en guise de conclusion, pour parachever cette
problématique de choix du siège qu'aujourd'hui, plus que jamais,
avec le développement de l'Internet, la notion de siège de
l'arbitrage tend à devenir une fiction sans lien matériel
nécessaire avec le territoire sur lequel se déroulent les
opérations arbitrales. On assiste, de ce fait, à l'absence de
localisation matérielle des opérations procédurales. Cette
procédure qui tend à se généraliser est d'autant
plus spéciale que le droit applicable à l'instance ne
dépend plus du lieu ou du siège de l'arbitrage. Dès lors
on assiste à une certaine évolution ou du moins une
révolution certaine de la notion du lieu de l'arbitrage.
Quelle implication ce choix peut-il avoir dans la pratique au
sein des systèmes OHADA et suisse de l'arbitrage international ?
b-. IMPLICATION DU CHOIX DE SIEGE
L'évidence que les parties peuvent choisir, le lieu de
leur arbitrage et par conséquent la loi procédurale ne se pose
plus comme problématique en droit de l'arbitrage international.
Cependant, il est moins évident que l'arbitrage tout
entier se déroule en ce lieu choisi car, la plupart des lois et
règlements d'arbitrage, confirment la liberté des parties de
fixer le lieu de l'arbitrage et le pouvoir des arbitres d'en mener les
opérations ailleurs. On en déduit que, les réunions et les
audiences de même que la délibération peuvent avoir lieu en
un endroit autre que le lieu choisi par les parties. Par là, le choix du
siège n'est autre chose que l'élection du droit applicable
à l'arbitrage. La seule implication que peut revêtir, le choix par
les parties du lieu de l'arbitrage peut se lire dans l'identification de la
sentence arbitrale pour les besoins de son exécution. En effet le choix
par les parties du siège donne à la sentence la
nationalité du lieu choisi par celles-ci. Un auteur fait observer sur ce
sujet que "la désignation du lieu de l'arbitrage a notamment pour
signification que la sentence sera réputée rendue en ce lieu. Que
les audiences s'y soient effectivement déroulées ou que la
sentence y ait effectivement été prononcée est sans
incidence".
En conclusion, nous ne manquerons pas de souligner que, c'est
la conception volontariste du siège qui est quasi unanimement admise par
la doctrine et la jurisprudence des autres Etats. Même si le siège
a une connotation territorialiste dans l'espace OHADA et en suisse, on ne
saurait l'appréhender que comme le lien juridique entre l'arbitrage et
la juridiction choisie fût elle par la volonté des parties ou
à défaut par les arbitres ou l'institution d'arbitrage.
En dehors du critère de rattachement qu'est le
siège du tribunal arbitral, l'AU.A en droit OHADA innove du point de vue
du champ d'application ratione materiae par l'absence de distinction
entre arbitrage civil et commercial.
C-. LE CHAMP D'APPLICATION RATIONE MATERIAE DE L'AU.A
ET DU CHAPITRE 12 LDIP
S'il est une certitude dans l'historique du
développement de l'arbitrage, c'est que le droit de l'arbitrage
international s'est surtout amplifié avec l'essor des échanges
commerciaux. De ce fait, la nécessité que de nouvelles
règles matérielles et/ou conflictuelles soient adoptées
par les législations internes pour réglementer ce domaine
particulier du droit s'est faite ressentie. Le constat du prof. G.
KAUFMANN-KOHLER le résume si bien, lorsqu'elle affirmait que "le
commerce international franchit par définition les frontières et
dépasse les ordres juridiques nationaux. Il n'est dès lors
guère surprenant que ses opérateurs aient ressenti le besoin
d'une justice à la mesure de leurs activités inter ou
transnationales, une justice calquée sur leur mode d'opération,
déconnectée des contingences nationales". Il est donc clair
que le droit de l'arbitrage international à connu son essor avec le
développement du commerce international. Sur cette base, la logique
voudrait que l'on s'attende à ce que, les différentes
législations réglementant la matière, déterminent
la nature de l'arbitrage auquel elles s'appliquent. Mais, le constat qui se
dégage de la lecture des différents textes régissant
l'arbitrage international est que, non seulement ils ne définissent pas
le concept d'arbitrage, non plus ils ne donnent aucune spécification sur
la nature de l'arbitrage auquel leurs dispositions sont censées
s'appliquer. Le résultat, c'est la propension quasi
généralisée des législations modernes sur
l'arbitrage à ne pas déterminer le champ d'application
ratione materiae de la loi. Ce qui est le cas de l'AU.A en droit OHADA
et du chapitre 12 LDIP en droit suisse de l'arbitrage international. Ce choix
législatif comme nous le verrons dans la suite du développement
est loin d'être anodin.
Ceci étant, il est une évidence à
laquelle on doit se rallier, c'est que l'AU.A et le chapitre 12 LDIP ne
s'appliquent qu'aux arbitrages. Par contre, il est moins évident que ces
deux textes légaux nous fournissent, dans leurs dispositions, les
définitions conceptuelles des notions d'arbitrage civil et commercial.
Nous ne les définirons pas non plus ici. Notre souci par contre,
portera sur la question de savoir à quelle sorte d'arbitrage ces deux
législations s'appliquent. Autrement formulé, arbitrage civil et
arbitrage commercial peuvent-ils se prévaloir indifféremment des
textes susvisés comme fondement juridique ?
a-. PRINCIPE
La définition du champ d'application ratione
materiae d'une loi d'arbitrage, repose sur la détermination de la
portée de cette loi par rapport aux différentes catégories
d'arbitrage auxquelles elle peut s'appliquer. En droit comparé, c'est la
convention de Genève dite encore, convention européenne de 1961
qui, nous donne l'exemple le plus parlant d'une réglementation
d'arbitrage définissant sans équivocité son champ
d'application ratione materiae. Ce texte dispose qu'il "s'applique
...aux conventions d'arbitrage conclues, pour le règlement de litiges
nés ou à naître d'opérations de commerce
international [...]". Ce qui n'est pas le cas de l'AU.A et du chapitre 12
LDIP. En effet, les deux textes que nous étudions ne faisant pas, dans
leurs dispositions, des particularités juridiques applicables à
tel ou tel autre catégorie d'arbitrage, la question de leur champ
d'application ratione materiae manque d'intérêt à
notre avis.
Si nous partons du postulat que, le champ d'application
ratione materiae d'une loi d'arbitrage se détermine par rapport
à la définition dans les dispositifs de cette loi, de la nature
de l'arbitrage auquel elle se rapporte, logiquement, c'est de la
définition de la notion de commercialité de l'arbitrage dans la
loi, que devrait pouvoir s'induire, l'applicabilité de cette
législation à un arbitrage commercial. Ainsi, la
définition notionnelle du concept de commercialité, dans la loi
d'arbitrage, laisserait conjecturer de l'application des dispositions de cette
loi aux arbitrages commerciaux. Or, à ce niveau, aussi bien l'AU.A que
le chapitre 12 LDIP ne nous édifient point sur la possibilité de
la définir. Pourtant nous ne conclurons pas que leur
applicabilité à un arbitrage commercial est sujette à
caution. Le constat est invariable pour toutes les autres législations
modernes sur l'arbitrage qui ne définissent pas, non plus, la notion de
commercialité de l'arbitrage, pas plus qu'elles ne tiennent compte de la
distinction entre arbitrage civil et commercial. Dans le système OHADA,
on ne retrouve point dans l'AU.A, aucune trace de la définition de la
notion d'arbitrage commercial. Pourtant, ce texte procédural est,
semble-t-il, adopté pour être appliqué aux
différends relatifs aux opérations commerciales voire aux
différends relatifs aux actes de la vie civile arbitrables. Sur ce
point, même si les dispositions de l'AU.A ne nous appuient pas dans notre
constat, la doctrine OHADA fait observer que, l'absence de distinction entre
arbitrage civil et commercial est une originalité innovatrice tout comme
l'absence de marge entre arbitrage interne et arbitrage international du point
de vue juridique. Le Prof. P. MEYER le constate si bien et nous fait remarquer
que l'AU.A en droit OHADA ne limite pas son champ d'application aux seuls
arbitrages commerciaux. Pour ce fait, il en déduit que "toute
définition substantielle de la commercialité était
absolument inutile dans cet acte. C'est pourquoi conclut-il on ne
trouve donc logiquement aucune définition de l'arbitrage commercial dans
le droit uniforme sur l'arbitrage". En clair, il est aisément
relevable que si la loi d'arbitrage ne circonscrit pas son champ d'application
à une catégorie d'arbitrage, la définition notionnelle de
la commercialité de l'arbitrage s'avère inutile mais pas
inopérante.
En effet, elle n'est pas inopérante dans la mesure
où, si le litige soumis à la compétence du tribunal
arbitral à un caractère commercial, il s'agira bien
évidemment d'un arbitrage commercial. Si par contre, le litige n'a aucun
rapport à la commercialité, on parlera d'arbitrage civil.
D'où toute l'importante de la démarcation entre les deux formes
d'arbitrage en dépit de la non-prise en compte de cette
délimitation par les lois d'arbitrage. Sur ce, tout le système de
la détermination de la portée en raison de la matière,
repose donc sur la définition du rapport à la
commercialité du litige soumis à l'arbitrage. Dans ce cas,
comment peut-on alors définir la commercialité de l'arbitrage en
l'absence, dans une loi d'arbitrage, d'une différenciation clairement
formalisée entre arbitrage civil et commercial ?
Pour définir la commercialité d'un arbitrage
nous-nous référerons soit au critère de la loi-type de la
CNUDCI, soit au critère du droit français.
En droit français, est considéré comme
commercial, tout arbitrage international portant sur un litige né
à l'occasion d'une opération économique internationale
mettant en cause les intérêts du commerce international. Cette
définition notionnelle de la commercialité de l'arbitrage, (qui
n'a rien à voir avec la définition de l'internationalité
de l'arbitrage selon le critère de la conception économique du
droit français de l'internationalité) est déterminante
dans la définition de la commercialité du litige. Entrent donc en
ligne de compte, pour un arbitrage commercial international, les litiges qui
mettent en jeu les intérêts du commerce international et qui, se
réalisent dans le cadre d'une opération économique
international. Sur cette base, l'hypothèse d'une commercialité de
l'arbitrage en droit OHADA et suisse reposerait sur la prise en compte des
éléments matériels qui exigent l'extranéité
d'un litige mettant en jeu les intérêts du commerce international.
Une autre définition de la commercialité de
l'arbitrage et non pas des moindres, nous est donnée par la loi-type de
la CNUDCI. La loi-type nous propose une définition du caractère
commercial de l'arbitrage international dans sa note sub-paginale. Elle nous
suggère, de se référer à un sens plus large afin de
désigner les questions issues de toute relation à
caractère commercial, contractuelle ou non contractuelle afin de mieux
définir le terme commercial. Ce faisant, cette réglementation
nous fournit le model d'une législation arbitrale dont le champ
d'application ratione materiae est clairement défini. En
disposant selon l'art. 1er al. 1 que "la présente loi s'applique
à l'arbitrage commercial international [...]", toute
équivocité sur le champ d'application ratione materiae
de la loi-type est levée. De la compréhension des dispositions ce
texte, nous en concluons que la loi-type ne peut s'appliquer qu'à un
arbitrage commercial international. C'est aussi le cas, comme nous l'avions dit
précédemment, de la convention de Genève sur l'arbitrage
commercial international.
b-. ABSENCE DE DEMARCATION ENTRE ARBITRAGE CIVIL ET
COMMERCIAL
Le problème de la portée ratione
materiae de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP se pose avec moins
d'évidence que cela ne parait. En effet, lorsqu'on sait que, l'AU.A et
le chapitre 12 LDIP ne donnent aucune définition de la notion
d'arbitrage et ne déterminent guère s'ils sont applicables
à un arbitrage civil ou commercial, peut-on logiquement en
inférer qu'ils n'opèrent pas de distinction entre un arbitrage
civil qui serait soumis à un régime juridique particulier et un
arbitrage commercial lui-même soumis à un régime tout autre
?
Par voie de conséquence, les textes que nous avons en
présence auraient-ils une large portée en raison de la
matière sans considération de distinction entre arbitrage civil
et commercial, le cas échéant, celle-ci serait-elle inutile ?
Évidemment nous ne retrouvons dans la formulation des
dispositions des deux textes de loi, aucune définition de la notion
d'arbitrage commercial, pas plus qu'elles ne font aucune
référence à la commercialité de l'arbitrage. Toutes
deux, comme on peut le constater, font l'unanimité sur l'unité
d'application du contenu respectif de leurs dispositions à toute sorte
d'arbitrage. Il en résulte le fait que, leurs dispositions sont par
conséquent applicables indifféremment à un arbitrage civil
comme à un arbitrage commercial. Pour preuve, le droit OHADA au travers
des dispositions de son art. 1er est formel là-dessus il
à vocation à s'appliquer à tout arbitrage. Idoine en droit
suisse où l'art. 176 al. 1er dispose que les dispositions du
présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage. Une telle
formulation ne peut que nous conduire à envisager l'hypothèse
d'une large portée ratione materiae de leurs dispositions. Si
cette hypothèse s'avère plausible, nous en conclurons que, la
détermination du champ d'application ratione materiae des deux
textes se révèle n'avoir plus aujourd'hui une importance
significative, au regard du fait que, arbitrage civil et arbitrage commercial
ne s'opposent plus du point de vue du régime juridique dans les corpus
des textes modernes sur l'arbitrage. Dès lors, cette absence de
différenciation du point de vue juridique nous conduit à faire
remarquer que, la distinction entre les deux formes d'arbitrage, dans une
réglementation sur l'arbitrage, ne remplit plus aucune fonction
essentielle et est d'un archaïsme révolu au regard de la pratique
moderne du droit de l'arbitrage international.
Deux constats nous permettent de soutenir que, cette absence
de distinction entre les deux formes d'arbitrage n'est plus à l'ordre du
jour, du moins que son inutilité dans les textes de loi sur l'arbitrage
se justifie.
- Dans les deux systèmes OHADA et suisse, on y trouve
dans les sources juridiques de l'arbitrage, non seulement les dispositions
légales et réglementaires internes relatives à l'arbitrage
mais aussi, les conventions internationales à l'instar de la convention
de New York du 10 juin 1958, de la convention de Genève du 21 avril 1961
sur l'arbitrage commercial international, de la loi-type de la CNUDCI du 21
juin 1985. Tous ces textes faisant référence à l'arbitrage
commercial viennent en appoint aux textes ici considérés. Les
seize États-Parties au Traité OHADA d'une part et la Suisse
d'autre part sont tous signataires de la majorité de ces conventions
internationales sur l'arbitrage sus citées. Leur adhésion,
à ces instruments internationaux du commerce international,
témoigne de ce que les dispositions internes réglementant
l'arbitrage n'ont véritablement plus besoin de spécifications sur
la commercialité de l'arbitrage avant d'être
considérées comme tel.
- Une précision non moins anodine, qui porte sur
l'usage de l'expression tout arbitrage dans les articles 1er AU.A et 176 LDIP,
ne saurait passer inaperçue pour nous convaincre de l'inutilité
de cette distinction entre arbitrage civil et commercial. À notre avis,
le recours à l'expression tout arbitrage emporte l'interprétation
selon laquelle, les droits OHADA de l'arbitrage et suisse de l'arbitrage
international, n'ont pas porté une limite au champ d'application
respectif de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP. Ce qui explique la large
portée du champ d'application ratione materiae de ces deux lois
d'arbitrage. Il va s'en dire que, arbitrage civil et arbitrage commercial
peuvent se prévaloir indifféremment de l'application de chacune
des deux lois d'arbitrage.
Par ailleurs, il est fort utile de souligner que, même
si nous soutenons que la distinction n'a plus guère son importance, le
caractère civil ou commercial de la relation ayant suscité le
différent, garde tout son intérêt sur le plan du droit
applicable au fond. Ainsi, si le litige a un caractère commercial,
l'arbitre appliquera les normes particulières du droit commercial. Sur
cette question, ce ne sont pas les dispositions de l'art. 15 AU.A qui nous
contrediraient. En visant l'application "le cas échéant des
usages du commerce international" le codificateur entend signifier que, la
relation ayant suscité le litige doit pouvoir s'inscrire dans le
registre du commerce international. En droit suisse, c'est l'art. 187 al. 1
LDIP qui nous convainc de ce que la distinction garde toute son importance sur
le plan du droit applicable au fond. Cet article pose le principe sous une
forme moins évidente "le tribunal arbitral statue selon les
règles de droit ... avec lesquelles la cause présente les liens
les plus étroits". Si la cause présente des liens plus
étroits avec le commerce international, l'arbitre appliquera les normes
de cette discipline, le droit commercial. Ceci pose la problématique du
droit applicable au fond du litige que nous analyserons dans les sections
suivantes.
En résumé, étant entendu qu'il ne nous
est pas possible d'inférer des dispositions respectives des deux textes
leur champ d'application ratione materiae nous pouvons en conclure
que, l'AU.A en droit OHADA et le chapitre 12 LDIP s'appliquent
indifféremment à l'arbitrage commercial qu'à l'arbitrage
civil. Cependant, s'il est clair que le chapitre 12 LDIP n'est conçu
pour être appliqué qu'à l'arbitrage international,
l'évidence ne parait pas univoque pour l'AU.A qui semble-t-il est
défini pour être appliqué aussi bien à l'arbitrage
interne et à l'arbitrage international. L'AU.A ne fait donc aucune
distinction entre les deux formes d'arbitrage, les soumettant au même
régime juridique. Ce choix, loin d'être une ambiguïté
juridique, est une option des promoteurs qui ne doit aucunement être vue
comme un obstacle à ce que les deux formes d'arbitrage se
déroulent sous les auspices du même et unique texte normatif :
l'Acte Uniforme relatif au droit de l'Arbitrage OHADA.
§II-. PRINCIPE D'AUTONOMIE ET
DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12
LDIP
DROIT COMPARE
Art. 4 al. 1- 2 AU.A
"La convention d'arbitrage est indépendante du
contrat principal.
Sa validité n'est pas affectée par la
nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après
la commune volonté des parties, sans référence
nécessaire à un droit étatique".
Art. 178 al. 3 LDIP
"La validité d'une convention d'arbitrage ne peut
pas être contestée pour le motif que le contrat principal ne
serait pas valable ou que la convention d'arbitrage concernerait un litige non
encore né".
-----------------------------------------------------
Il convient, tout d'abord, de faire un petit rappel du
principe d'autonomie dont bénéficie toute convention d'arbitrage,
qui plus est, une convention d'arbitrage de DIP. La convention d'arbitrage
internationale (clause compromissoire ou compromis) constitue le fondement de
la compétence du tribunal arbitral qui, ne peut exercer sa mission qu'en
vertu d'une convention valable. En effet, le principe du grand
libéralisme qui régit l'arbitrage international veut que, la
convention d'arbitrage international soit autonome par rapport au contrat
principal dont la nullité ou la résolution est sans effet sur
elle. Sa validité doit être appréciée
séparément de celle du rapport de droit auquel elle se rapporte.
Conclusion, la clause arbitrale peut survivre à la
nullité, la résolution, la résiliation ou la novation du
contrat principal sans en être affectée. C'est tout le sens qu'a
voulu donner le législateur OHADA aux dispositions de l'art 4 al. 1
AU.A. Toutes les législations modernes sur l'arbitrage font
expressément référence à ce principe dit de la
séparabilité ou separability (pour emprunter le terme
anglo-saxon) de la convention d'arbitrage. Si la formulation de ce principe est
expresse en droit OHADA "la convention d'arbitrage est indépendante
du contrat principal" (art. 4 al. 1), elle l'est moins en droit suisse
dans le chapitre 12 LDIP. On ne retrouve aucune trace de l'énonciation
expresse de ce principe de séparabilité dans les dispositions du
chapitre 12 LDIP. Cependant, on ne saurait en conclure que le droit suisse de
l'arbitrage international n'envisage pas l'autonomie de la convention
d'arbitrage de DIP. En effet, lorsque l'art. 178 en son al. 3 dispose que sa
validité "ne peut pas être contestée pour le motif que
le contrat principal ne serait pas valable [...]", il pose le
principe de la validité de la convention d'arbitrage. Consacrant par
là même, celui de l'autonomie de la clause arbitrale. Partant de
ce principe, la validité de toute convention d'arbitrage international
dépend de règles spécifiques différentes de celles
qui s'appliquent à la validité du contrat principal. A
contrario, la non-validité du contrat principal contenant la
convention n'influe pas sur celle-ci. C'est un autre principe traditionnel du
droit de l'arbitrage que l'on retrouve en droit comparé. Les deux textes
légaux, au-delà du principe de séparabilité
développé par la jurisprudence moderne, soulignent tous le fait
que, les conditions de validité d'une convention de DIP ne doivent pas
être tributaires de la validité du contrat principal. Notons que,
le droit OHADA soumet simplement la validité de toute convention
d'arbitrage au consensualisme en ne la soumettant pas nécessairement, ni
à une quelconque loi étatique, ni à la loi qui la
gouverne.
Évidemment, l'appréciation de la portée
de ce principe ne saurait se faire qu'en relation avec celui de la
compétence-compétence qui donne pouvoir à l'arbitre de
statuer sur sa propre compétence. En d'autres termes, l'autonomie de la
convention d'arbitrage signifie que, si le tribunal arbitral constate que le
contrat principal est invalide, sa compétence lui est toujours
réservée. Il peut fort de cela statuer lui-même sur la
nullité du contrat principal. Parlant de la validité d'une
convention d'arbitrage de DIP, il importe de noter que toute convention
d'arbitrage international doit répondre à deux conditions
essentielles de validité : la validité matérielle et
la validité formelle que nous essayerons d'analyser dans la suite du
développement et à la lumière des deux lois
d'arbitrage.
A-. LA VALIDITE MATERIELLE DE LA
CONVENTION
En matière d'arbitrage international, la question de la
validité matérielle de la convention d'arbitrage
s'apprécie au regard de sa validité objective
(arbitrabilité) 36(*) et de sa validité subjective (la
validité quand au fond). Eu égard à ces deux conditions
sine qua non de validité matérielle, la question à
laquelle nous essayerons de donner une réponse est celle de savoir,
comment dans les deux systèmes cette validité matérielle
de la convention s'apprécient-elles ?
1-. LA VALIDITE OBJECTIVE DE LA
CONVENTION ARBITRALE DE DIP
a.- ARBITRABILITE, LE FACE
A FACE DE LA LIBRE DISPOSITION DES DROITS ET DE LA PATRIMONIALITE DE LA
CAUSE
DROIT COMPARE
Art. 2 al. 1 AU.A
"Toute personne physique ou morale peut recourir à
l'arbitrage sur les droits dont elle a la libre disposition".
Art. 177 al. 1 LDIP
"Toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet
d'un arbitrage".
-----------------------------------------------------
La compétence du tribunal arbitral, nous le savons, est
tributaire de la validité de la convention d'arbitrage liant les parties
au contrat. En effet, un tribunal arbitral de DIP n'est fondé à
exercer sa mission que si la convention d'arbitrage qui lui donne sa
compétence est elle-même valable. Pour ce faire, la
validité de la convention ne peut s'apprécier qu'au regard d'un
certain nombre de règles dont l'arbitrabilité du litige.
Pour qu'un litige soit arbitrable, il est important de
déterminer si son objet peut être soumis à un arbitrage,
c'est tout le sens de la notion de l'arbitrabilité du litige. En effet,
l'arbitrabilité, si on peut se permettre d'en formuler une
définition, est la possibilité de faire trancher un litige par
l'arbitrage. On parle d'arbitrabilité lorsque se pose la question de
savoir si le litige peut être tranché par voie d'arbitrage
(juridictionnelle) ou relever de la compétence des juridictions
étatiques (voie judiciaire). Ceci étant, l'appréciation du
concept d'arbitrabilité varie d'un système à un autre
selon qu'il s'agit de la libre disponibilité des droits en cause, comme
le propose les droits OHADA et français ou, de la patrimonialité
de la cause dont les droits suisse et allemand se sont fait l'écho.
D'une manière concrète, le concept
d'arbitrabilité en droit OHADA, idem en droit français,
repose sur la disponibilité des droits, celle-ci se
référant à l'aptitude qu'à son titulaire de pouvoir
en être le maître absolu, de l'aliéner ou même
d'y renoncer. Ces deux notions (soulignées), il faut le dire,
sont liées et on les retrouve en filigrane dans la formulation que donne
l'art. 2 al. 1 de l'AU.A de la notion de l'arbitrabilité. On retrouve
cette même définition de la notion de l'arbitrabilité en
droit français, lorsqu'il énonce dans les dispositions de son
code civil, le principe selon lequel les droits, dont les parties ont la
libre disposition, sont arbitrables37(*). Il est donc clair que, le législateur OHADA
a repris in extenso le contenu du texte de loi français pour
définir l'arbitrabilité. Ce choix législatif en faveur de
l'option française dans la définition de la notion, n'est-il pas
hasardeux voire périlleux pour ce droit qui se veut avant tout
harmonisateur ?
En effet, l'interprétation juridique qui peut
résulter de la libre disponibilité des droits telle
qu'énoncée en droit OHADA de l'arbitrage est la
suivante :
Au sein d'un système juridique, il existe plusieurs
degrés de disponibilité de droit. Il en appert donc que, le droit
peut se révéler indisponible tant qu'il est à
l'état de droit éventuel. Dans ce cas, il est impossible de
recourir à l'arbitrage. Par contre, une telle possibilité s'ouvre
lorsque le droit est acquis, autrement dit, lorsqu'il s'agit d'un droit
disponible à l'état de droit déjà né et
actuel.
Au regard de cette interprétation et d'une
manière générale, sont exclus de l'arbitrage, selon les
termes du droit OHADA, les litiges relatifs au droit virtuel incertain, dont
la potentialité à pouvoir en être le titulaire est
hypothétique. Aussi, les droits relatifs à l'état et
à la capacité des personnes et, en l'occurrence ceux qui portent
sur les droits hors du commerce juridique sont exclus de la possibilité
d'être soumis à un arbitrage. Enfin, ceux dont l'exercice met en
cause un intérêt public et ceux auxquels la loi interdit de
renoncer, sont aussi exclus de la possibilité de faire l'objet d'un
arbitrage. Il se trouve, cependant, qu'il est important pour
l'appréciation de l'arbitrabilité qu'on tienne compte de la
législation de chaque pays, or le constat s'impose sur la
variabilité des droits disponibles d'un système juridique
à un autre. Il en résulte le fait qu'on peut assister à
une divergence dans l'appréciation du concept d'arbitrabilité
même au sein du système dit unifié de l'OHADA, qui en
réalité n'en est pas un.
Ceci étant, nous savons que, dans une convention
d'arbitrage de DIP, l'appréciation de la problématique juridique
de la libre disponibilité des droits ne peut se faire que d'après
la loi régissant le droit concerné, c'est-à-dire pour
être plus précis, la loi applicable au fond du litige (lex
causae). Si, comme nous venons de le relever, l'application du concept de
libre disposition des droits subjectifs peut varier, la probabilité
d'assister à l'invalidité de la convention d'arbitrage au motif
que la loi applicable au fond du litige tient des droits en question pour
indisponibles et donc non arbitrables, n'est pas faible. Cet état de
chose pose, bien évidemment, toute la problématique sur le
questionnement de l'opportunité de la prise en compte de la notion de
libre disponibilité des droits dans la loi d'arbitrage, lorsqu'il s'agit
de fixer les limites de l'arbitrabilité. Alors, se pose la question de
savoir s'il n'est pas préférable à la législation
OHADA de recourir plutôt à une autre notion moins fuyante, celle
de la patrimonialité de la cause comme en droit suisse, plutôt
qu'à celle contraignante et moins certaine de la libre
disponibilité des droits ?
Afin d'éviter cet écueil les
législateurs suisse et allemand ont préféré
à la notion fuyante de libre disponibilité une autre plus
concrète, réaliste et plus large celle de la
patrimonialité de la cause. Contrairement au critère de la libre
disponibilité des droits tel que prévu par l'AU.A en droit OHADA,
le chapitre 12 LDIP se réfère plutôt à la nature
patrimoniale de la cause pour définir l'arbitrabilité du litige
dans ce système. Rappelons à toutes fins utiles, que
l'appréciation des critères de l'arbitrabilité en droit
suisse varie selon que le régime juridique applicable à
l'arbitrage relève du concordat ou du chapitre 12 LDIP. Tout comme le
droit français et le droit OHADA, le concordat suisse s'appesantit sur
la libre disponibilité des droits pour fixer les limites à
l'arbitrabilité du litige. Mais, le chapitre 12 LDIP marque une rupture
dans l'appréciation de l'arbitrabilité pour innover avec la prise
en compte du caractère patrimonial du litige. Ce qui est à notre
avis, un critère plus adapté au regard du recours à la loi
applicable au fond qui peut rendre le droit en question indisponible
complexifiant l'arbitrabilité du litige. Vu le succès qu'a connu
la prise en compte de la patrimonialité de la cause dans la
définition de l'arbitrabilité, nous espérons que dans sa
nouvelle version, le concordat intercantonal fera sienne cette
définition afin d'harmoniser la législation suisse de l'arbitrage
sur la question des limites de l'arbitrabilité. La pertinence de la
prise en compte de la patrimonialité de la cause, dans
l'appréciation de l'arbitrabilité, a fait écho au sein de
la doctrine arbitrale au point où, certains commentateurs du nouveau
droit OHADA de l'arbitrage se sont montrés réservés, sur
l'utilisation d'un concept aussi fuyant et relatif qu'est celui de la
disponibilité des droits comme critère d'arbitrabilité
dans une législation uniforme.
En effet, dans son commentaire sur l'arbitrabilité du
litige P. Meyer disait à bon droit "il n'empêche qu'on peut
penser qu'il eut été préférable de recourir
à une notion moins fuyante qui ne souffrirait pas
d'interprétations différenciées selon les droits qui
pourraient être utilisés pour la concrétiser. Le
critère retenu par la loi fédérale suisse, qui retient la
patrimonialité de la cause pour définir l'arbitrabilité,
peut paraître, à cet égard, plus adéquat
spécialement dans une législation uniforme"38(*). Le texte de l'art. 177 al. 1
LDIP dispose que "toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet
d'un arbitrage". La loi ne définit pas par contre, ce qu'il faut
comprendre par patrimonialité de la cause. Dans l'entendement du TF
suisse, la patrimonialité de la cause recouvre "toutes les
prétentions qui ont une valeur pécuniaire pour les parties,
à titre d'actif ou de passif, autrement dit les droits qui
présentent pour l'une au moins de celles-ci, un intérêt
pouvant être apprécié en argent"39(*). Il va s'en dire logiquement
par déduction que, toutes les causes de nature extrapatrimoniale sont
par essence inarbitrables. Ainsi, seront exclues de l'arbitrage en droit
suisse, comme le liste si bien A.BUCHER "les droits portant sur
l'état civil et ceux touchant essentiellement aux relations personnelles
entre les membres d'une famille. Sont également exclus de l'arbitrage
certains litiges qui, opposant l'Etat à l'individu, n'ont une valeur
patrimoniale que pour ce dernier, tel le contentieux administratif de
l'inscription au registre du commerce, celui relatif aux demandes des brevets
d'invention, de dépôts de dessins et modèles et
d'enregistrement de marques ou celui concernant les mesures prises par les
autorités à l'égard de certaines conventions
cartellaires"40(*).
Naturellement, on ne saurait exclure l'impossibilité de soumettre
à l'arbitrage, selon la loi d'arbitrage suisse, les droits dont
l'exercice met en cause un intérêt public et ceux auxquels la loi
interdit de renoncer.
Il importe de relever que, l'intérêt de la
distinction, entre la libre disponibilité et la patrimonialité de
la cause, porte sur le fait qu'avec le critère de la
patrimonialité l'option est faite pour l'application d'une règle
matérielle dans la définition de l'arbitrabilité. Cette
règle "a l'avantage de la simplicité et de
l'uniformité de la solution, car elle ne fait pas dépendre
l'arbitrabilité du droit applicable au fond"41(*). Contrastant, de ce fait, le
critère de libre disponibilité qui exige la démarche
conflictuelle pour déterminer le droit applicable à
l'arbitrabilité du litige.
Du point de vue du droit comparé, la ZPO42(*) rejoint la législation
suisse, elle dispose en son § 1030 que: "toute cause de nature
patrimoniale peut faire l'objet d'une convention d'arbitrage." En
résumé nous pouvons conclure que, le critère de la nature
patrimoniale choisi par le législateur suisse à l'art.177 al.1
prend en compte l'arbitrabilité dans son acception la plus large que
celui privilégié par le droit OHADA et français de
l'arbitrage international43(*).
Toutes les matières ne sont pas arbitrables, que ce
soit en droit OHADA ou en droit suisse de l'arbitrage international. En effet,
outre les impossibilités de recourir à l'arbitrage, dont nous
avons parlées eu égard aux différents droits
concernés, le respect de l'ordre public international s'impose aussi
comme une autre limite à l'arbitrabilité du litige. Nous ne
disserterons pas cette vaste problématique qui porte sur
l'arbitrabilité et l'ordre public international. Enfin, l'existence
d'une attribution impérative de compétence au profit d'une autre
juridiction se révèle être aussi une limite. Ainsi, sont
non arbitrables les litiges portant notamment sur le droit pénal,
l'ouverture des procédures collectives ou encore la validité des
brevets. Les deux systèmes n'échappent pas non plus à la
reconnaissance de ce principe universel du droit de l'arbitrage.
Nous ne détaillerons pas toutes ces sections relatives
aux limitations à l'arbitrabilité dans les deux systèmes
par soucis de limitation de pages. Par contre, l'absence de réserve
à l'arbitrabilité du fait de la participation d'une personne
morale publique ne manque pas d'intérêt pour cette étude
comparée. Les deux lois d'arbitrage respectent-elles la tendance
généralisée de la pratique du droit de l'arbitrage
international qui vise à interdire à l'Etat et aux entités
dont il a le contrôle, de refuser de se soumettre pleinement à un
arbitrage dont ils sont parties ?
b-. ABSENCE DE RESERVE A
L'ARBITRABILITE DU LITIGE
DROIT COMPARE
Art. 2 al. 2 AU.A
"Les Etats et les autres collectivités publiques
territoriales ainsi que les Établissements publics peuvent
également être parties à un arbitrage, sans pouvoir
invoquer leur propre droit pour contester l'arbitrabilité d'un litige,
leur capacité à compromettre ou la validité de la
convention d'arbitrage ".
Art. 177 al. 2 LDIP
"Si une partie à la convention d'arbitrage est un
Etat, une entreprise dominée ou une organisation contrôlée
par lui, cette partie ne peut invoquer son propre droit pour contester
l'arbitrabilité d'un litige ou sa capacité d'être partie
à un arbitrage".
-------------------------------------------------
En vertu de la bonne foi auquel l'Etat qui participe au
commerce international ne saurait échapper pas plus que les personnes de
droit privé, la pratique de l'arbitrage international a consacré
le principe selon lequel, l'Etat tout comme les autres entités morales
publiques peut compromettre. Ainsi, dans la pratique et en règle
générale, la plupart des législations excluent les
limitations au pouvoir de compromettre de l'Etat. Il s'ensuit que, l'Etat tout
comme les autres entités morales publiques, peut compromettre sans
devoir se justifier pour se prémunir, de l'inarbitrabilité du
litige, ou de son incapacité à compromettre, ou de
l'invalidité de la convention d'arbitrage ou encore se prévaloir
de son immunité de juridiction. Il s'agit ici, d'un autre principe fort
du droit de l'arbitrage interne et international. Principe
considéré comme faisant partie de l'ordre public transnational
selon lequel, l'Etat et les personnes morales publiques, ne sauraient se
prévaloir de leur propre droit pour remettre en cause un arbitrage
auquel ils auraient librement consenti leur participation, au travers d'une
convention d'arbitrage en bonne et due forme. Le droit OHADA et le droit suisse
de l'arbitrage international, ne s'excluent pas de l'application de ce principe
dans la mesure où, les dispositions des articles 177 al.2 LDIP et 2 al.
2 AU.A le formulent expressément. Mais, le contenu de la formulation du
principe diverge d'un système à un autre.
Alors que l'art. 177 al.2 LDIP énumère
l'Etat, une entreprise dominée ou une organisation
contrôlée par lui le droit OHADA au travers de l'AU.A
à son art. 2 al. 2 cite exhaustivement l'Etat et les autres
collectivités publiques territoriales ainsi que les
Établissements publics. La question se pose de savoir, si cette
énumération, qu'elle soit exhaustive ou non, dans son application
doit recevoir une interprétation stricto sensu, dans
l'affirmative on assisterait à une partialité d'absence de
réserve. Si par contre, l'interprétation doit être faite au
sens large on parlerait d'une absence de réserve totale à
l'arbitrabilité.
La solution à la question a été
esquissée par une certaine doctrine. Cette énumération, en
droit OHADA des personnes morales de droit public aptes à compromettre,
a donné naissance à une controverse doctrinale quant à
l'exhaustivité de la liste. Pour certains auteurs, la liste est
exhaustive et les seules personnes morales de droit public
énumérées sont celles aptes à conclure une
convention d'arbitrage. Pour d'autres comme Kenfack-Douajni et Ph.
Fouchard44(*), cette liste
est établie à titre indicatif et, par voie de suite, cette
aptitude à compromettre est, à juste titre, dans l'esprit de
l'AU.A, valable pour toutes les personnes morales de droit public, sans
exclusion aucune. A notre avis, que ce soit en droit OHADA ou en droit suisse
de l'arbitrage international, la position doit être prise en faveur d'une
interprétation largo sensu dans la mesure où, l'absence
de réserve à l'arbitrabilité ayant pour fondement
d'éviter que toute personne morale publique, partie à un contrat
d'arbitrage, se prévale du rapport de force en sa faveur pour
prétériter un arbitrage, toute interprétation au sens
stricte préjudicierait l'option, en faveur de la participation sans
réserve de l'Etat et de ses dépendances à l'arbitrage, qui
se généralise dans les lois et règlements modernes de
l'arbitrage.
Par ailleurs, telle que formulée par l'art. 177 al. 2
LDIP, la question se pose de savoir si l'Etat peut prétexter de
l'invalidité de la convention d'arbitrage pour prétériter
à cet arbitrage, vu que la loi suisse de l'arbitrage international
n'énumère pas ce cas de figure. Il est évident que,
l'appréciation des conditions de validité d'une convention
d'arbitrage ne revient pas à une des parties à cet arbitrage qui
plus est un Etat, quel que puisse être le rapport de force entre
celles-ci. Mais plutôt, c'est au tribunal arbitral qu'il revient, en
vertu du principe de la compétence-compétente, d'avoir la
compétence pour ce faire. L'Etat ne saurait donc
prétériter à un arbitrage auquel il participe en invoquant
tout simplement une invalidité de la convention d'arbitrage.
En résumé, sur cette question relative à
l'absence de réserve à l'arbitrabilité du litige, nous
remarquons que le droit suisse de l'arbitrage international, au travers des
dispositions de l'art. 177 al 2 de la LDIP, fixe une limite de droit
matériel à l'intervention des lois étrangères
excluant l'arbitrabilité. Ce qui veut dire, qu'une loi
étrangère qui exclut la participation de l'Etat et de ses
entités à un arbitrage de DIP n'a aucune chance de recevoir
application, lorsque le chapitre 12 LDIP est choisi comme loi du contrat ou loi
applicable au fond du litige. Le droit OHADA aussi, au travers des dispositions
de l'al. 2 de l'art. 2 de l'AU.A, pose une règle matérielle
essentielle portant sur l'arbitrabilité subjective lorsque l'Etat ou une
entité publique est partie à une convention d'arbitrage.
Les dispositions de ces articles confirment "la tendance
générale qui vise à interdire à l'Etat de paralyser
par voie d'exception une convention d'arbitrage à laquelle il est
partie, en arguant de son incapacité à compromettre, ou du
caractère inarbitrable du litige"45(*) ou de l'invalidité de la convention
d'arbitrage. Bref, tendance à limiter le pouvoir de compromettre de
l'Etat est aujourd'hui exclue en droit de l'arbitrage international, le droit
OHADA et suisse de l'arbitrage ne font pas exception à cette
règle matérielle du droit de l'arbitrage.
2-. VALIDITE SUBJECTIVE OU
VALIDITE QUANT AU FOND DE LA CONVENTION DE DIP EN DROIT OHADA ET SUISSE
DROIT COMPARE
Art 4 al. 1-2 AU.A
"La convention d'arbitrage est indépendante du
contrat principal.
Sa validité n'est pas affectée par la
nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après
la commune volonté des parties, sans référence
nécessaire à un droit étatique".
Art 178 al 2 LDIP
2) "Quant au fond, elle est valable si elle répond
aux conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit
régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat
principal, soit encore le droit suisse".
-------------------------------------------------------
S'agissant des autres conditions de validité
matérielle de la convention d'arbitrage, notamment la validité
subjective, le droit suisse admet que la convention d'arbitrage international
est valide si "elle répond aux conditions que pose soit le droit
choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du litige et
notamment le droit applicable au contrat principal, soit encore le droit
suisse" (Art. 178 al. 2 LDIP). Le chapitre 12 LDIP pose ainsi une
règle de conflit pour déterminer les conditions de
validité matérielle, subjective de la convention d'arbitrage de
DIP. Ainsi, pour qu'une convention arbitrale de DIP soit valide quant au fond,
il est important qu'elle réponde soit aux conditions relevant de la
volonté des parties notamment du droit choisi par elles, soit aux
conditions relevant du droit régissant l'objet du litige, ou soit le
droit suisse. On remarque que législateur suisse a admis à
travers cette disposition, la possibilité de combiner alternativement
règles matérielles et règles de conflit au sujet
de la validité de la convention d'arbitrage, on parle de combinaison
in favorem validitatis. Ce rattachement alternatif a pour objectif de
rendre à la convention d'arbitrage international sa validité si
elle répond aux conditions du moins exigeant de ces trois droits. Du
point de vue pratique, l'option de rattachement est toujours faite en premier
lieu en faveur du droit suisse qui est sur ce point le moins exigeant. Ce n'est
que si la convention n'est pas valable selon le droit suisse que le tribunal
arbitral s'en remet au premier ou au deuxième rattachement sous
réserve bien évidemment des exigences minimales que pose le droit
suisse à la validité d'une convention de droit international
privé.
Sur cette question, le droit OHADA procède autrement.
Il pose dans les dispositions de l'art. 4 AU.A une véritable
règle matérielle de validité subjective de la convention
d'arbitrage qui n'est pas moins perceptible.
Au lieu que la validité au fond, d'une convention
d'arbitrage dans ce système, réponde aux conditions que pose
chacune des législations internes des États-Parties sur la
validité d'une convention de DIP, le droit OHADA s'en remet pour cela
à la volonté unanime des parties.
Ceci étant, lorsqu'on s'en réfère aux
dispositions de l'art. 4 AU.A il ressort qu'outre l'affirmation de l'autonomie
substantielle de la convention d'arbitrage par rapport au contrat principal, le
droit OHADA pose le problème de la validité de la convention
d'arbitrage à l'al. 2 qui, est au terme de la disposition
"appréciée d'après la commune volonté des
parties sans référence nécessaire à un droit
étatique". Il s'agit d'une sacralisation de la volonté des
parties qui ne s'entend pas comme une simple séparabilité de la
convention d'arbitrage par rapport au contrat principal, mais un
véritable principe matériel de validité de la convention
d'arbitrage. Il conviendrait de préciser que, la méthode de
rattachement retenue par le droit OHADA de l'arbitrage est celle des
règles matérielles qui privilégie la volonté des
parties.
L'objectif ultime de ce rattachement, consiste à rendre
la convention d'arbitrage valide si elle répond au principe de base de
validité du contrat : le consensualisme.
Que ce soit en doit OHADA ou en droit suisse46(*), l'utilisation de la
méthode des règles matérielles47(*) pour apprécier
l'existence et la validité de la convention d'arbitrage revient à
affirmer que la convention d'arbitrage a une validité et une
efficacité propre. Cette technique trouve son origine dans une
consécration jurisprudentielle française. En effet, dans un
arrêt du 26 mars 1993 la cour de cassation française a jugé
qu' "en vertu d'une règle matérielle du droit international
de l'arbitrage, la clause compromissoire est indépendante juridiquement
du contrat principal qui la contient directement ou par référence
[...] son existence et son efficacité (entendue ici
validité) s'apprécient, sous réserve des règles
impératives du droit français et de l'ordre public international,
d'après la commune volonté des parties, sans qu'il soit
nécessaire de se référer à une loi
étatique".
B-. LA VALIDITE FORMELLE DE LA
CONVENTION D'ARBITRAGE DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE
INTERNATIONAL
DROIT COMPARE
Art. 3 AU.A
"La convention d'arbitrage doit être faite par
écrit, ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve,
notamment par la référence faite à un document la
stipulant".
Art. 178 al. 1 LDIP
"Quant à la forme, la convention d'arbitrage est
valable si elle est passée par écrit, télégramme,
télex, télécopieur ou tout autre moyen de communication
qui permet d'en établir la preuve par un texte".
---------------------------------------------------------
La question de la validité quant à la forme de
la convention d'arbitrage international, nécessite que soit pris en
compte les principes qui gouvernent la forme de la convention d'arbitrage
international dans les deux systèmes d'une part et, la question de la
convention d'arbitrage par référence d'autre part.
Mais avant tout, il y a lieu de préciser que, aussi
bien l'AU.A en droit OHADA que le chapitre 12 LDIP reconnaissent tous, les deux
formes classiques de convention d'arbitrage : la clause compromissoire et
le compromis. Aucune scissiparité juridique n'est faite, comme en droit
français de l'arbitrage, sur les deux formes de convention. Les deux
lois évoquent le terme de convention d'arbitrage.
1-. PRINCIPE
En matière d'arbitrage international, c'est le principe
du formalisme qui gouverne la convention d'arbitrage, il se manifeste par
l'extériorisation de la volonté des parties à la
convention, tel que la loi l'exige afin d'assurer à l'acte toute son
efficacité (entendu ici comme validité formelle). Celle-ci peut
se situer au plan du fond c'est-à-dire de la validité de la
convention auquel cas le formalisme est un formalisme de validité, ou au
plan de la preuve et, dans ce cas, il s'agit d'un formalisme probatoire. Les
deux réglementations que nous analysons dans la présente
étude s'opposent sur ce plan. Tandis que le formalisme se trouve
être de validité en droit suisse de l'arbitrage international, le
droit OHADA de l'arbitrage se positionne pour un formalisme probatoire.
a-. LE FORMALISME PROBATOIRE DE LA
CONVENTION D'ARBITRAGE EN DROIT OHADA
Le droit OHADA de l'arbitrage ne pose aucune exigence de forme
quant à la validité de la convention d'arbitrage (formalisme de
validité). Dans ce système, une large place est faite au principe
général du droit des contrats, nous voulons signifier, le
principe du consensualisme pour régir la validité formelle de la
convention d'arbitrage. L'art. 3 de l'AU.A dispose à ce sujet que
"la convention d'arbitrage doit être faite par écrit, ou par
tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve, notamment par la
référence faite à un document la stipulant". Il s'en
déduit que, l'AU.A ne porte que sur le formalisme probatoire. Ceci est
expressément remarquable à travers la liaison qui est faite entre
l'écrit ou tout autre moyen par rapport à la preuve
("permettant d'en administrer la preuve"). Le texte ici ne subordonne
donc pas la validité d'une convention d'arbitrage à une forme
écrite. Ainsi, dans le système d'arbitrage OHADA la convention
d'arbitrage n'a pas besoin d'être matérialisée pour
être valable, elle peut être écrite ou orale, expresse ou
tacite, directe ou par référence. Sur cette dernière
possibilité, le recours à l'expression "par la
référence faite à un document la stipulant" le prouve
bien. L'écrit n'étant donc pas privilégié, il n'a
de valeur en droit OHADA qu'au plan de la preuve sans pour autant être
exclusif dans la mesure où l'AU.A parle de tout autre moyen.
Par ailleurs, l'art. 31 AU.A renforce ce caractère
privilégié de l'écrit au plan de la preuve quant à
l'existence de la sentence arbitrale lorsqu'il dispose que celle-ci doit
être établie "par la production de l'original (de la
sentence) accompagné de la convention d'arbitrage". Ceci
étant, nous remarquons fort curieusement que le droit uniforme OHADA ne
précise pas la nature que doit avoir l'écrit
(télégramme, télex, télécopie, e-mail,
échanges de conclusions...) pour servir de preuve d'existence à
la convention d'arbitrage.
De la lecture des dispositions de la règle de l'art. 3
AU.A, il ressort que le droit OHADA, par rapport à la validité
formelle de la convention d'arbitrage, pose une règle matérielle
applicable non seulement à la convention d'arbitrage interne mais aussi
international.
Il va s'en dire que, pour une convention d'arbitrage de DIP
mettant en cause un système juridique tiers à l'OHADA, cette
règle aura pour effet d'écarter la règle de conflit qui en
principe soumet la forme d'une convention à la loi du lieu de sa
conclusion. Ce qui permettra de valider en la forme une convention d'arbitrage
conclue dans un pays qui exigerait un écrit soit au plan de la
validité de la convention soit au plan de sa preuve. Cette faveur
à la validité et à la preuve de l'AU.A, traduite par
l'art. 3 de cette réglementation sur l'arbitrage, s'accommode assez bien
du caractère de la règle locus régit actum dans
le droit international privé conflictuel de nombreux États qui
énonce la soumission de l'acte juridique, quant à la forme,
à la loi du lieu ou il a été passé.
Lorsqu'on sait que, dans la théorie de la preuve il n'y
a pas que l'écrit pour faire la preuve d'un acte juridique, le choix du
formalisme probatoire, pour justifier la validité formelle de la
convention d'arbitrage par le droit OHADA, peut paraître
périlleux. La non-exigence de l'écrit pour justifier de la
validité formelle de la convention d'arbitrage en droit OHADA, constitue
un risque grave à notre avis. En effet, l'hypothèse d'une
sentence définitive rendue sur la base d'une convention d'arbitrage, qui
plus est internationale, non écrite n'a aucune chance de recevoir
exécution conformément aux dispositions de la convention de New
York (art. IV ch. 1 let. b) et de l'AU.A lui-même (art. 31 al. 2). Nous
verrons bien plus tard que, dans les conditions de reconnaissance et
d'exécution de la sentence arbitrale étrangère il est
exigé de produire l'original de la convention d'arbitrage. Comment dans
l'hypothèse d'une convention non écrite peut-on exiger la
reconnaissance et l'exécution d'une sentence arbitrale rendue sur la
base d'une convention arbitrale orale ? D'où l'absurdité de
l'acceptation de la validité formelle d'une convention arbitrale non
écrite. En résumé, on peut avec P. Meyer confirmer le
constat selon lequel "le caractère non exclusif de l'écrit au
plan de la preuve de la convention, permet de dire que le droit uniforme
africain ne pose en général aucune exigence de forme pas
même au niveau probatoire"48(*).
b-. LE FORMALISME DE VALIDITE DE
LA CONVENTION D'ARBITRAGE EN DROIT SUISSE
Dans les dispositions du chapitre 12 a contrario, le
formalisme posé par le droit suisse de l'arbitrage international se
situe au plan du fond c'est-à-dire, de la validité de la
convention d'arbitrage. L'on ne retrouve pas dans les dispositions de cette loi
d'arbitrage, aucune place au formalisme probatoire. Le législateur
suisse ayant préféré faire prévaloir le formalisme
de validité au formalisme probatoire. L'art. 178 al. 1 LDIP dispose sur
ce sujet que "quant à la forme, la convention d'arbitrage est
valable si elle est passée par écrit, télégramme,
télex, télécopieur ou tout autre moyen de communication
qui permet d'en établir la preuve par un texte". En effet, les
dispositions de cet article font de l'exigence de forme une condition de
validité de la convention d'arbitrage. En d'autre terme, le respect de
la forme écrite de la convention d'arbitrage international, subordonne
la validité de cette dernière. Ce faisant, on constate que le
droit suisse de l'arbitrage international est cohérent avec la
règle qui veut que la reconnaissance et l'exequatur de la sentence soit
formulée par demande, sur la base de la production de l'original de la
sentence et de la convention. L'option en faveur du formalisme de
validité du texte suisse de l'arbitrage international.
On la retrouve aussi dans la formulation des dispositions de
l'art. 7 al. 2 de la loi-type de la CNUDCI, des articles 1443 (au sujet de la
clause compromissoire) et 1449 (au sujet du compromis) du NCPC pour ne citer
que ces textes de loi d'arbitrage.
Pour en revenir au droit suisse de l'arbitrage international,
la loi fait du non respect de cette exigence de forme, une condition de
nullité de la convention. Mais, cette condition n'est pas absolue dans
la mesure où, l'entrée en matière sur le fond d'une partie
qui ne soulève pas le vice de forme suppose qu'elle est
réputée avoir accepté la convention et de ce fait est
déchue du droit de contester la compétence du tribunal arbitral
sur cette base. Ainsi, pour qu'une convention d'arbitrage international soit
recevable en droit suisse, il est important que celle-ci soit
passée :
- soit par écrit, en la matière le droit suisse
ne définit pas ce qu'il faut entendre par écrit. Il faut se
référer aux dispositions de l'art. II ch. 1 et 2 de la convention
de New York pour se faire une idée de la définition de la forme
écrite que, peut avoir une convention d'arbitrage. Cet article dispose
qu'il faut entendre par convention écrite "une clause compromissoire
insérée dans un contrat ou un compromis, signés par les
parties ou contenus dans un échange de lettres ou de
télégrammes". Cette définition, à notre avis
est loin d'être suffisante à elle seule pour justifier de
manière exhaustive la forme écrite d'une convention d'arbitrage.
A. BUCHER, concluant sur l'exigence de l'art. 178 al. 1 LDIP et de l'art. II
ch. 1 et 2 de la convention de New York, pour corroborer notre constat, disait
à bon droit que "la condition d'un écrit ne signifie pas que
la convention d'arbitrage doive exister matériellement sous cette
forme ; il suffit que l'engagement d'arbitrage figure sur un support
permettant la reproduction écrite et attestant l'acceptation
réciproque par les parties". Cette dernière
définition de la forme écrite de la convention d'arbitrage, nous
paraît la mieux représentative de l'acception que peut endosser la
notion de l'écrit en matière de convention arbitrale.
- soit par télégramme, télex ou par
télécopieur.
- soit par tout autre moyen de communication qui permet
d'en établir la preuve par un texte. L'utilisation de l'expression
tout autre moyen de communication dans le corpus du texte, nous fait
penser au support virtuel qu'est l'informatique en l'occurrence les Nouvelles
Techniques de l'Information et de la Communication (NTIC) et l'Internet qui
sont aujourd'hui de plus en plus utilisées pour les besoins de la cause
et qui, constituent des outils incontournables dans cette ère de
globalisation.
En conclusion à cette partie nous pouvons dire que,
comme en droit OHADA, l'art. 178 al. 1 pose une règle matérielle
de droit international privé qui se doit d'être appliquée,
nonobstant les dispositions d'une règle conflictuelle. Il va s'en dire
que, pour un arbitrage de DIP dont le siège se situe en Suisse, cette
règle aura pour effet d'écarter la règle de conflit qui en
principe soumet la forme d'une convention à la loi du lieu de sa
conclusion. Ainsi la validité formelle de la convention
s'appréciera par l'arbitre au regard des dispositions de l'art. 178 al.
1 exclusivement.
2-. LA CONVENTION D'ARBITRAGE PAR
REFERENCE
Lorsque les parties ne formalisent pas en détail les
termes de leur convention et se contentent de s'en référer
à des documents préexistants, on parle de convention par
référence. La convention arbitrale par référence,
est une clause compromissoire qui n'est pas contenue dans le contrat litigieux
mais est insérée soit dans des conditions
générales ou, soit dans un autre acte auquel le contrat ayant
suscité le litige fait référence.
La question ici, est celle de la validité d'une telle
convention dite par référence. En règle
général, que ce soit en droit OHADA de l'arbitrage ou en droit
suisse de l'arbitrage international, aucun obstacle à la validité
d'une telle clause n'est admis.
La solution est idoine en droit comparé. Pour preuve,
la cour de cassation française, dans un arrêt en date du 9
novembre 1993 basculant en faveur du consensualisme, énonce une
règle matérielle du DIP de l'arbitrage en ces termes :
"en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par
référence écrite à un document qui la contient, par
exemple des conditions générales ou un contrat type, est valable,
à défaut de mention dans la convention principale, lorsque la
partie à laquelle la clause est opposée, a eu connaissance de la
teneur de ce document au moment de la conclusion du contrat, et qu'elle a,
fût-ce par son silence, accepté l'incorporation du document au
contrat". L'insertion d'une pareille clause, ne pose bien
évidemment pas de problème conformément aux dispositions
de cette jurisprudence arbitrale internationale.
En droit OHADA, il faut admettre que L'AU.A ne pose aucune
exigence quant aux conditions de fond de reconnaissance de la clause par la
référence qui y est faite, pas plus qu'il ne pose d'exigence
quant aux conditions formelles de son acceptation. Les dispositions de l'art. 3
in fines en disent long "la référence faite
à un document la stipulant".
En droit suisse le cas de la clause
référencée est un peu plus délicat. La doctrine
propose de distinguer selon qu'il s'agit d'un renvoi spécifique ou d'un
renvoi global49(*). En cas
de renvoi spécifique, la jurisprudence constante du Tribunal
Fédéral admet la validité de la convention d'arbitrage
nonobstant le fait que celle-ci figure dans un document séparé.
Par contre, en cas de renvoi global, le Tribunal Fédéral admet
que, si le renvoi global est accepté par écrit "le
problème se déplace de la forme au consentement et fait
dès lors intervenir le principe de la confiance50(*)". En d'autres
termes, il y a lieu de considérer si en vertu du principe de la bonne
foi, ce renvoi global peut être assimilé à une
adhésion des parties.
CHAPITRE II
L'INSTANCE ARBITRALE, LA SENTENCE ET LES VOIES DE
RECOURS SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP
Dans
cette section, nous analyserons d'une part les principales questions de droit
que pose la constitution du tribunal arbitral conformément aux deux lois
d'arbitrage, tout en essayant de mettre en évidence les points forts de
la procédure qui présentent des similitudes et dissemblances
notoires. D'autre part, nous tenterons d'apprécier, à la
lumière des deux lois, les conditions légales que doivent avoir
une sentence arbitrale dans les systèmes OHADA et suisse de l'arbitrage.
Les voies de recours susceptibles d'être admises contre ladite sentence
ne seront pas du reste.
SECTION I-. LA PROCEDURE
ARBITRALE
§ I-. LE TRIBUNAL ARBITRAL ET
LE STATUT DES ARBITRES
Le principe fondamental dont relève toute la
procédure de constitution d'un tribunal arbitral en droit de l'arbitrage
international, est celui de l'autonomie des parties laquelle se
réfère à leur volonté. Ainsi, toute la
procédure régissant l'instance arbitrale de DIP doit se fonder
sur la liberté des parties qui, dans la phase préalable
de constitution de la juridiction, se traduit par la constitution
conventionnelle du tribunal arbitral. C'est à défaut, que la
constitution légale dite encore celle du juge d'appui trouve à
s'appliquer. Mais avant tout, il conviendrait de souligner que cette
autonomie des parties, les deux systèmes que nous
étudions la reconnaissent expressément dans les dispositions de
leur loi d'arbitrage respectives.
A-. LA CONSTITUTION DU TRIBUNAL
ARBITRAL
Il existe en arbitrage de DIP tout comme en arbitrage interne,
deux modes de constitution du tribunal arbitral : la constitution
conventionnelle du tribunal arbitral et l'aide judiciaire à la
constitution qui fait office de constitution judiciaire.
1-. LA CONSTITUTION
CONVENTIONNELLE
DROIT COMPARE
Art. 5 al. 1 AU.A et Art.179 al. 1 LDIP
"Les arbitres sont nommés, révoqués
ou remplacés conformément à la convention des
parties".
-----------------------------------------------------
Par constitution conventionnelle, nous entendons mettre en
évidence l'importance du rôle que joue la volonté des
parties dans le montage de l'ossature du tribunal arbitral de DIP. En effet, le
principe du libéralisme qui gouverne l'arbitrage en
général trouve une fois de plus son champ d'application ici. Il
se manifeste par la prééminence de la volonté des parties
dans la constitution du tribunal arbitral. Ce n'est qu'à défaut
de cette volonté ou, en cas d'insuffisance de celle-ci que, les
dispositions légales relatives à la constitution trouveront
à s'appliquer et ce, de manière subsidiaire. Le droit OHADA et
le droit suisse de l'arbitrage international, mentionnent expressément
ce principe de constitution selon la volonté des parties. En effet, les
dispositions de l'art. 5 al. 1 de l'AU.A sont identiques aux dispositions de
l'art. 179 al. 1 LDIP. Indistinctement, ces deux textes disposent que "les
arbitres sont nommés, révoqués ou remplacés
conformément à la convention des parties".
Il en résulte que, c'est de la volonté des
parties (convention des parties) que tout le principe de constitution du
tribunal arbitral se fonde. Cette prééminence de la
volonté des parties dans la constitution du tribunal arbitral, est
conforme à la philosophie de l'arbitrage qui est basée dans son
entièreté sur le principe de la liberté des parties, de
leur autonomie.
Sur le plan opérationnel, on identifie en arbitrage de
DIP deux modalités de désignation : les parties peuvent de
manière concertée soit dans la convention d'arbitrage
désigner le ou les arbitres ou soit le faire dans le cadre du
règlement d'arbitrage auquel elles renvoient. Elles peuvent de
façon concrète, directement désigner les arbitres (par
leur nom ou leur fonction on parle de choix ès qualité,
cas rare et non recommandé51(*)) ou indirectement en donnant carte blanche à
un organe de le faire. Les deux textes législatifs sur l'arbitrage que
nous étudions ne l'occultent point dans leurs dispositions. Pour le
choix des arbitres, il dépend d'un certain nombre de variables dont
seules les parties elles-mêmes peuvent en déterminer la
portée et l'impact du point de vue de la composition du tribunal et de
l'issue du litige. Notons que, quelle que soit la modalité retenue par
les parties, il peut arriver qu'il y ait des difficultés dans la
désignation des arbitres en cas de litige, d'où toute
l'importance du recours à l'assistance judiciaire à la
constitution du tribunal arbitral que nous analyserons dans la suite du
développement.
Même si les parties sont libres de choisir par
elles-mêmes les arbitres, force est de constater que cette liberté
n'est pas illimitée puisque, certaines législations lui apportent
des mesures prohibitives. Sur ce point, les restrictions que lui apporte le
droit OHADA sont édifiantes.
- Une première limite porte sur le nombre des arbitres.
C'est une limitation légale assez inhabituelle en droit comparée
de l'arbitrage et qui est prévue par l'art. 8 al. 1 de l'AU.A qui
dispose que, "le tribunal arbitral est constitué soit d'un seul
arbitre, soit de trois arbitres". En règle générale
et du point de vue du droit comparé, aucune loi d'arbitrage mis à
part l'AU.A en droit OHADA n'impose un nombre déterminé
d'arbitres. Seulement, certains droits en exigent simplement l'imparité
et le non respect de cette exigence pourrait permettre d'attaquer la sentence
au motif de la constitution irrégulière du tribunal. En droit
suisse de l'arbitrage international, la solution est nuancée. Le
chapitre 12 LDIP sur la question est muet et ce n'est que par renvoi de l'art.
179 al. 2 LDIP ("à défaut d'accord" entre les parties)
que, les dispositions de l'art. 10 al. 1 CIA "[...] les arbitres sont au
nombre de trois", trouveront à s'appliquer. Toutefois, il est fort
utile de préciser que la variabilité numérique du corps
arbitral constituant le tribunal, dépend de la nature du litige et de
l'importance de la cause à juger. Dans la pratique et en règle
générale, quelle que soit l'importance que peut revêtir le
litige, l'imparité est souhaitée. Elle permet, en cas de
difficultés et donc d'égalité décisionnaire sur des
questions d'importance, de faire prévaloir la voix du président
du tribunal qui, se trouve être celui qui numériquement fait
l'imparité. Cependant, la parité en droit positif suisse, a
longtemps été considérée comme ne posant aucun
problème puisqu'elle est vue comme faisant état de la
volonté exprimée des parties, laquelle doit primer sur toute
autre considération. Le cas échéant, seule la sentence
rendue à l'unanimité est recevable et à défaut
d'accord entre les arbitres sur la sentence à rendre, la convention
deviendra caduque et le litige soumis à la juridiction étatique
compétente.
- Une deuxième limite porte sur le respect du principe
de l'égalité des parties dans la désignation des arbitres.
Cette égalité des parties on la retrouve dans les dispositions de
l'art. 9 de l'AU.A qui dispose que "les parties doivent être
traitées sur un pied d'égalité et chaque partie doit avoir
toute possibilité de faire valoir ses droits".
L'intérêt d'une telle exigence de respect de
l'égalité des parties, c'est de créer des conditions
égalitaires entre les parties à la convention dans la
constitution du tribunal arbitral. Il est de ce fait inconcevable qu'une
convention d'arbitrage de DIP mette une partie dans une situation
privilégiée par rapport à l'autre. Toutes les parties se
doivent de bénéficier et de disposer des mêmes droits dans
la désignation des arbitres. Ce principe, même si on ne le
retrouve pas expressément consacré par le chapitre 12 LDIP, il
conviendrait de souligner qu'il fait partie des principes
généraux du droit de l'arbitrage international et constitue, pour
ainsi dire, une des "conditions indispensables à la
crédibilité de la justice arbitrale et à sa
conformité aux exigences internationales -universelles ou
régionales52(*)-
relatives à la justice53(*)". Le non respect de ce principe peut
entraîner l'annulation de la sentence ou le refus de son
exequatur. Notons qu'il n'est pas moins absent du droit positif suisse
de l'arbitrage car, l'art. 25 CIA ne manque pas de le mentionner en ces termes
"la procédure choisie doit en tout cas respecter
l'égalité entre les parties". Aussi, il est pris en compte,
en droit comparé, par d'autres lois et règlements d'arbitrage
international.
Lorsque l'al. 2 de l'art. 179 LDIP dispose qu'"a
défaut d'une telle convention, le juge du siège du tribunal
arbitral peut être saisi; il applique par analogie les dispositions du
droit cantonal sur la nomination, la révocation ou le remplacement des
arbitres" l'expression à défaut d'une telle
convention ne signifie nullement que la convention n'existe pas. En effet,
la convention non seulement existe mais aussi atteste de la volonté des
parties de recourir à cet arbitrage. Cependant, il se trouve que la
convention ne prévoit rien quant à la désignation des
arbitres (c'est le cas des clauses blanches par exemple). Le droit OHADA au
travers de l'AU.A prévoit aussi cette défaillance de la clause
arbitrale dans les dispositions de l'al. 2 de l'art.5 AU.A. Celui-ci en plus du
défaut de convention ajoute le paramètre de
convention insuffisante. Il est ainsi libellé, "à
défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la convention est
insuffisante [...]". La notion de convention insuffisante suppose
un accord d'arbitrage valable mais incomplet parce que contenant des indices ne
permettant pas la désignation des arbitres. Que ce soit le
défaut de convention ou son insuffisance cela
entraîne pour conséquence le recours à la constitution
judiciaire du tribunal arbitral, du moins il requiert l'aide à la
constitution judiciaire du tribunal arbitral que, tous les systèmes
consacrent expressément. Mais dans quelles mesures, cette
possibilité de recourir à la constitution judiciaire est elle
admise en droit OHADA de l'arbitrage et en droit suisse de l'arbitrage
international ? Autrement dit, quelles sont les conditions qui
prévalent à l'intervention de l'autorité d'appui (juge
d'appui de l'ordre judiciaire) du lieu dans lequel l'arbitrage de DIP se
déroule ? Les solutions apportées par l'AU.A et le chapitre
12 LDIP, en la matière, sont-elles identiques ?
2-. LA CONSTITUTION PAR LE JUGE
D'APPUI
DROIT COMPARE
Art. 5 al. 2 AU.A
"A défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si
la convention est insuffisante :
a) en cas d'arbitrage par trois arbitres, chaque partie
nomme un arbitre et les deux arbitres ainsi nommés choisissent le
troisième arbitre ; si une partie ne nomme pas un arbitre dans un
délai de trente jours à compter de la réception d'une
demande à cette fin émanant de l'autre partie, ou si les deux
arbitres ne s'accordent pas sur le choix du troisième arbitre dans un
délai de trente jours à compter de leur désignation, la
nomination est effectuée, sur la demande d'une partie, par le juge
compétent dans l'Etat-partie ;
b) en cas d'arbitrage par un arbitre unique, si les
parties ne peuvent s'accorder sur le choix de l'arbitre, celui-ci est
nommé, sur la demande d'une partie, par le juge compétent dans
l'Etat-partie".
Art. 179 al. 2- 3 LDIP
2- "À défaut d'une telle convention, le juge
du siège du tribunal arbitral peut être saisi; il applique par
analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination, la
révocation ou le remplacement des arbitres.
3- Lorsqu'un juge est appelé à nommer un
arbitre, il donne suite à la demande de nomination qui lui est
adressée, à moins qu'un examen sommaire ne démontre qu'il
n'existe entre les parties aucune convention d'arbitrage".
--------------------------------------------------------
Lors de la désignation directe des arbitres par les
parties, peuvent surgir des difficultés d'ordre organisationnel. Ainsi,
si le choix ou la désignation par les parties des arbitres ou la
nomination du 3ème arbitre par les deux 1ers (dans
l'hypothèse d'un trio arbitral) est problématique, l'AU.A et le
chapitre 12 LDIP prévoient la possibilité de saisine, par l'une
des parties, du juge étatique afin que ce dernier nomme un arbitre pour
combler le vide et mettre fin à cette difficulté. Ceci
étant, il est fort intéressant de noter que l'utilisation de
l'expression "A défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la
convention est insuffisante" marque l'alternative qui est offerte pour
éviter le blocage du processus à ce niveau, même si la
mauvaise foi manifestée par l'une des parties est évidente et
notoire. Cependant, les conditions de saisine du juge d'appui dans cette
situation varient d'un système judiciaire à un autre en fonction
des dispositions légales et réglementaires en vigueur. Les
dispositions de l'AU.A en droit OHADA de l'arbitrage sur cette question, sont
identiques, du point de vue du droit comparé, aux dispositions de la loi
type de la CNUDCI. On peut aisément constater que, le codificateur OHADA
a repris in extenso l'art. 11 § 3 a et b de la loi-type. Mais
au-delà de ce constat, la lecture du contenu du texte de l'AU.A nous
amène à remarquer que le droit communautaire OHADA pose deux
hypothèses légales fondées sur un tribunal arbitral
composé de trois arbitres et un tribunal arbitral composé d'un
arbitre unique :
- Dans l'hypothèse du trio arbitral, l'AU.A en droit
OHADA prévoit que, le défaut ou l'insuffisance de la convention
emporte comme conséquence la désignation de l'arbitre manquant
par le juge étatique au préjudice de la partie défaillante
(art. 5 al.2 a). Mais l'applicabilité de cette hypothèse est
assujettie au respect d'un délai légal de trente jours qui court
soit à compter de la réception d'une demande à cette
fin émanant de l'autre partie soit à compter de
leur désignation (les deux arbitres). L'autre condition sine
qua non, de l'intervention du juge étatique dans la constitution du
tribunal arbitral, relève du caractère exprès de la
demande qui doit émaner d'une des parties. Il en résulte le fait
que, le juge ne peut s'auto saisir pour cette fin puisque, le texte de loi est
fort formel là-dessus et précise que, la saisine doit être
faite " sur la demande d'une partie".
- Dans l'hypothèse d'un arbitre unique, le
désaccord ou défaut des parties et/ou l'insuffisance de la
convention des parties sur le choix de l'arbitre, emporte comme
conséquence, sur la demande d'une partie, la nomination de ce dernier
par le juge compétent dans l'Etat-partie (art. 5 al. 2 b).
Paradoxalement dans cette seconde hypothèse, le codificateur OHADA
n'impose plus un délai au-delà duquel les parties peuvent
être amenées à demander le concours du juge d'appui. Il
s'agit ici, à notre avis, d'une faille juridique qui peut servir
à des fins dilatoires et s'avérer paralysante pour le bon
déroulement de la procédure. La tâche reviendra donc aux
tribunaux chargés de l'application de cette disposition de pouvoir
l'interpréter judicieusement. Aucune jurisprudence OHADA ne s'est encore
prononcée sur cette question. Notons enfin que, étant entendu que
le droit OHADA est un droit communautaire applicable aujourd'hui dans seize
Etats africains, le juge saisi par une requête en nomination d'arbitre
applique, en principe, son propre droit national pour régler les
difficultés liées à la constitution du tribunal
arbitral.
Contrairement au droit OHADA, le droit positif suisse ne
procède pas à cette dichotomie dans les conditions de saisine du
juge d'appui. En droit suisse, l'al. 2. de l'art. 179 LDIP dispose qu'
"à défaut d'une telle convention, le juge du siège du
tribunal arbitral peut être saisi; il applique par analogie les
dispositions du droit cantonal sur la nomination [...]". On induit de ces
dispositions que, le recours au juge étatique n'est formellement
prévu que parce qu'il n'y a pas de convention des parties
désignant les arbitres. Dans cette hypothèse, si le siège
du tribunal se situe en Suisse, le juge suisse vient suppléer la
volonté des parties incomplète et il applique par analogie
les dispositions du droit cantonal sur la nomination c'est-à-dire
les articles 10 et 12 CIA. Mais au vu des particularités de
l'organisation judiciaire de chaque canton en Suisse, la question se pose de
savoir quel tribunal cantonal peut s'estimer compétent pour ce
faire ? Bien évidemment, la loi nous renvoi aux dispositions du
droit cantonal c'est-à-dire, le CIA pour déterminer le tribunal
compétent. A la lecture des dispositions de l'art. 12 CIA relative
à la nomination par l'autorité judiciaire, on note que ce texte
procède lui-même par renvoi à l'art. 3, pour
déterminer cette autorité judiciaire compétente. Il
dispose que "le tribunal supérieur de la juridiction civile
ordinaire du canton où se trouve le siège de l'arbitrage est
l'autorité judiciaire compétente [...] pour nommer les
arbitres que les parties n'auraient pas désignés54(*)". En
résumé, l'intervention du juge d'appui est nécessaire
toutes les fois qu'il y a défaillance dans le mécanisme
prévu par la convention des parties. Elle ne se limite pas aux seuls cas
où les parties n'ont pas opté pour un arbitrage institutionnel ou
n'ont pas chargé un tiers de nommer un arbitre. En effet, toute
déficience dans l'engrenage de la procédure de nomination des
arbitres que les parties auraient choisie, emporterait systématiquement
comme conséquence, l'intervention du juge judiciaire d'appui à
l'arbitrage. Toutes les législations et règlements d'arbitrage
interne et international l'admettent et l'appliquent et, permettent aux
parties de saisir le juge en vue de désigner les arbitres.
Cependant, vu que nous sommes en matière
internationale, le recours au juge ou à l'autorité d'appui, dans
le cadre de sa compétence en matière de constitution du tribunal
arbitral, ne manque pas de soulever plusieurs questions d'ordre technique qu'il
importe de passer en revue.
1.- La question de la compétence internationale du juge
d'appui que plusieurs droits d'arbitrage reconnaissent et consacrent
expressément. Le juge d'appui OHADA et suisse dispose-t-il d'une
aptitude légalement reconnue pour ce faire ? C'est dans les
dispositions même du chapitre 12 au travers du texte de l'art. 179 al. 2
LDIP qu'on infère cette compétence internationale du juge d'appui
"[...] le juge du siège du tribunal arbitral peut être
saisi". En droit OHADA ce sont les alinéas 2. a in fine et
2. b in fine de l'art. 5 de l'AU.A "[...] par le juge
compétent dans l'Etat-partie" que cette aptitude du juge d'appui
peut se déduire.
2.- La question de la subsidiarité du recours au juge
qui permet de limiter l'intervention du juge d'appui au cas où les
parties n'auraient rien prévu à ce sujet. Le recours au juge est
ainsi dit subsidiaire par rapport à tout autre mécanisme de
désignation choisi par les parties. Les expressions à
défaut d'une telle convention ou si la convention est
insuffisante que les des deux lois utilisent le prouvent bien.
3.- Le pouvoir d'examen du juge pour contrôler la
validité de la convention d'arbitrage à ce stade précoce
de la procédure. Le droit suisse reconnaît sur ce point que le
juge d'appui a un pouvoir d'examen restreint et qu'il se doit, par voie de
conséquence, de donner suite à la requête en
désignation d'arbitre sauf si la convention d'arbitrage est
manifestement nulle. C'est tout le sens que le législateur suisse donne
au contenu de l'al. 3 de l'art.179 LDIP lorsqu'il dispose que "lorsqu'un
juge est appelé à nommer un arbitre, il donne suite à la
demande de nomination qui lui est adressée, à moins qu'un examen
sommaire ne démontre qu'il n'existe entre les parties aucune convention
d'arbitrage".
Au titre du droit comparé, il est fort
intéressant de faire constater que, si le droit suisse reconnaît
au juge d'appui un pouvoir d'examen restreint, le droit anglais quant à
lui admet que, le juge d'appui à le pouvoir de contrôler la
validité de la convention d'arbitrage avant de nommer un arbitre.
Contrastant ainsi d'avec la solution retenue en droit positif suisse de
l'arbitrage international. Par contre, on ne retrouve en droit OHADA aucune
disposition sur la question, dans les textes de loi réglementant la
matière.
Somme toute, les voies de recours contre la décision de
nomination du juge d'appui prise dans ce cadre ne sont pas envisagées
par la plupart des législations sauf en droit anglais. Même si les
droits OHADA et suisse n'admettent pas de recourir contre la décision de
nomination du juge d'appui, la pratique internationale de l'arbitrage n'admet
pas que sa décision ne fasse l'objet d'un contrôle. Celui-ci
s'exercera indirectement lors du recours contre la sentence arbitrale. Cette
possibilité de contrôle a posteriori de la nomination du
juge d'appui n'est pas exclue en droit OHADA et suisse de l'arbitrage
international. Par ailleurs, l'une des particularités du chapitre 12 ne
figurant pas dans les dispositions de l'AU.A en droit OHADA porte sur le fait
que, lorsque les parties confient à un juge suisse la tâche de
nomination des membres du tribunal arbitral, celui-ci, d'après l'art.
179 al. 3 se doit de donner "suite à la demande de nomination qui
lui est adressée". Obligation est donc faite au juge suisse de
nommer un arbitre sauf, s'il constate par un examen sommaire que la
convention n'existe pas ou que le litige n'est pas arbitrable. Cette
constatation sommaire qui peut servir de justificatif au juge d'appui pour
rejeter la demande de nomination d'un arbitre en droit suisse est assimilable
à la constatation prima facie du droit français. Cette
question n'est pas abordée par le droit OHADA de l'arbitrage qui,
pourtant en partie, est calqué sur le modèle français du
droit de l'arbitrage.
Enfin pour être complet sur la problématique du
juge d'appui et de sa compétence en matière d'arbitrage
international, il y a lieu de dire que la décision qui porte refus de
nommer le ou les arbitres du juge d'appui, peut en droit suisse être
considérée comme un dénie de justice et faire l'objet d'un
recours. Sur cette question aussi, le codificateur OHADA de l'AU.A est muet
d'autant plus qu'on ne retrouve ni dans l'Acte Uniforme relatif au droit de
l'Arbitrage, ni dans le Règlement d'Arbitrage de la CCJA, ni dans le
Traité OHADA en soi, une disposition du genre. En sachant que le
dénie de justice est en général punissable, on peut se
fonder sur ce principe général dans l'espace OHADA pour recourir
contre le refus de nomination d'un arbitre du juge d'appui, dans la mesure
où le code de procédure civil de l'Etat duquel le juge
défaillant est ressortissant l'admet.
B-. LA RECUSATION DES ARBITRES
DROIT COMPARE
Art. 7 al. 2-5 AU.A
2- "Si l'arbitre suppose en sa personne une cause de
récusation, il doit en informer les parties, et ne peut accepter sa
mission qu'avec leur accord unanime et écrit.
3- En cas de litige et si les parties n'ont pas
réglé la procédure de récusation, le juge
compétent dans l'Etat-partie statue sur la récusation. Sa
décision n'est susceptible d'aucun recours.
4- Toute cause de récusation doit être
soulevée sans délai par la partie qui entend s'en
prévaloir.
5- La récusation d'un arbitre n'est admise que pour
une cause révélée après sa nomination".
Art. 180 LDIP
1- "Un arbitre peut être
récusé:
a) Lorsqu'il ne répond pas aux qualifications
convenues par les parties;
b) Lorsque existe une cause de récusation
prévue par le règlement d'arbitrage adopté par les
parties, ou
c) Lorsque les circonstances permettent de douter
légitimement de son indépendance.
2- Une partie ne peut récuser un arbitre qu'elle a
nommé ou qu'elle a contribué à nommer que pour une cause
dont elle a eu connaissance après cette nomination. Le tribunal arbitral
et l'autre partie doivent être informés sans délai de la
cause de récusation.
3- En cas de litige et si les parties n'ont pas
réglé la procédure de récusation, le juge
compétent du siège du tribunal arbitral statue
définitivement".
----------------------------------------------------
Elle fait partie de l'un des incidents qui peuvent affecter la
composition du tribunal arbitral à l'instar de l'incapacité, du
décès, de la démission, de la destitution, de la
révocation d'un arbitre. Nous n'envisagerons ici que, le cas le plus
récurrent celui de la récusation qui est prononcée lorsque
l'indépendance et l'impartialité, principales vertus de
l'arbitre, sont mises en cause. En effet, aussi bien la législation
uniforme sur le droit de l'arbitrage OHADA que le droit suisse de l'arbitrage
international ne prévoient, dans leurs dispositions que, cette seule
forme d'incident pouvant affecter la composition du tribunal arbitral et
nécessitant pour sa procédure l'intervention du juge
étatique, et sur ce, à titre subsidiaire. Du point de vue du
droit comparé, le chapitre 12 LDIP est plus vaste et plus
énumératif que l'AU.A sur cette question. Ce qui lui
confère un avantage certain du détail et de la concision sur la
problématique de la récusation.
Il est fort utile de noter toutefois ici que, dans un
arbitrage ad hoc la possibilité que les parties elles-mêmes, de
leur propre chef, envisagent une procédure de récusation est
rarissime. Par contre, nombreux sont les lois et règlements d'arbitrage
qui dans un arbitrage institutionnel disposent d'une procédure interne
d'examen de la récusation. L'option en faveur de cet arbitrage
(institutionnel) par les parties, relègue la compétence du juge
étatique d'appui, à la subsidiarité.
En conséquence, il n'est pas compétent pour
connaître d'un incident relatif à la récusation d'un
arbitre puisque, comme le soulignent si bien les dispositions des deux
législations que nous étudions, "en cas de litige et si les
parties n'ont pas réglé la procédure de récusation,
le juge compétent [...] statue" (art 7 al. 3 AUA et 180 al. 3
LDIP). Les deux lois d'arbitrage, objets de la présente étude,
sont explicites là dessus. Priorité est donc donnée par la
loi, à la convention des parties ou au règlement qu'elles ont
adopté (qui de toute manière comporte le principe de la
subsidiarité) en ce qui concerne tant les motifs que la procédure
de récusation. S'agissant des motifs de récusation et comme
nous le verrons dans la suite du développement, les exigences
légales d'indépendance et/ou d'impartialité des arbitres,
à l'égard de la partie ou de l'institution qui les ont
désignés, sont en droit de l'arbitrage international, le
principal motif de récusation à caractère
impératif pris en compte par les deux lois d'arbitrage.
1-. LES MOTIFS DE RECUSATION ET
LEURS CONSEQUENCES JURIDIQUES
D'une manière générale, les motifs de
récusation élaborés par les différentes
législations sur l'arbitrage tiennent, au lien existant d'une part entre
l'arbitre et un des intervenants dans la procédure pour défaut
d'impartialité et/ou d'indépendance et d'autre part, au lien
existant entre l'arbitre et la cause à juger. Si en droit suisse de
l'arbitrage international un arbitre peut être récusé pour
cause de non-conformité aux qualifications convenues par les parties
tenant entre autre aux aspects professionnels, linguistiques ou techniques ou
même à la nationalité ou au domicile, c'est à bon
droit qu'il est retenu que, ces exigences doivent être formulées
pour être recevables "dans les limites de ce qui est raisonnablement
exigible". Lorsque l'art. 180 al.1 let. a dispose qu'"un arbitre peut
être récusé lorsqu'il ne répond pas aux
qualifications convenues par les parties", il accorde de ce fait, une
place non moins négligeable à la convention des parties dans la
fixation des motifs de récusation.
Même si le texte de l'AU.A du droit OHADA de l'arbitrage
ne fait pas de cette cause un motif de récusation valable, doit-on en
conclure que la non-conformité aux qualifications convenues par les
parties peut servir de passe-droit pour justifier la non-récusation d'un
arbitre dans l'espace OHADA ? À notre avis, il n'en demeure pas
moins vrai que, la convention des parties, tout comme en droit suisse, est tout
aussi déterminante pour ce qui est des motifs de récusation car,
l'hypothèse de l'al. 3 de l'art. 7 AU.A en dit long "[...] si les
parties n'ont pas réglé la procédure de récusation
[...]". Cela sous-entend que la convention des parties joue un rôle
important aussi bien dans la fixation des motifs de récusation que, dans
la procédure y afférente. Ainsi, si les parties ont posé
des exigences de qualification des arbitres, le défaut de
conformité aux exigences des parties doit, en droit OHADA, être
analysé comme un manquement à leur loi, une violation de leur
accord de base qui emporterait légitimement le droit de
récusation de l'arbitre mis en cause. Si le législateur OHADA
n'en a pas fait cas, cela peut se justifier par le souci d'une évidence.
Celle selon laquelle, l'arbitrage étant conventionnel par nature, le
moins qu'on puisse exiger c'est le respect de la volonté des parties
dans leurs exigences, de leur convention. Toute volonté contraire
constituerait une atteinte à la validation de leur accord.
La même observation peut être faite au sujet des
motifs de récusation, prévus par le règlement d'arbitrage
adopté par les parties qui, en droit suisse de l'arbitrage
international, tiennent à la disposition de l'art. 180 al.1 let. b LDIP.
Cet article dispose en effet qu'"un arbitre peut
être récusé [...] lorsque existe une cause de
récusation prévue par le règlement d'arbitrage
adopté par les parties". Ces motifs ne figurant pas non plus dans
les dispositions de la loi d'arbitrage OHADA, nous pouvons également
soutenir le fondement de cette omission du texte de l'AU.A par le fait que, si
les parties adoptent un règlement d'arbitrage, les dispositions
prévues par ce règlement, en l'occurrence celles prévues
pour la récusation, se doivent d'être appliquées en vertu
du respect du choix des parties, de leur volonté. Même si ces
motifs de récusation ne figurent pas dans le corpus de la loi
d'arbitrage OHADA notamment l'AU.A, leur évocation pour justifier la
récusation d'un arbitre de DIP peut, à notre avis, se faire sur
la base des principes généraux du droit de l'arbitrage
international.
Le lien supposé et avéré entre les
arbitres et l'un des intervenants dans la procédure de l'arbitrage peut
constituer une cause de récusation en arbitrage de DIP. En effet, il
n'est pas rare que le risque de prévention d'un arbitre dans la cause
à juger soit soulevé par une partie qui évoque le
défaut d'indépendance et/ou d'impartialité d'un ou des
arbitres intervenant dans la procédure. Autrement dit, si l'existence de
liens étroits entre l'arbitre et l'une des parties à la
procédure est avérée, l'arbitre mis en cause n'est pas
à l'abri de la procédure de récusation pour défaut
d'indépendance et/ou d'impartialité. Les concepts
d'indépendance et/ou d'impartialité en arbitrage international,
concepts forts reconnus et appliqués constituent sans nul doute l'une
des conditions légales les plus essentielles du statut des arbitres,
s'appliquant à tous le corps arbitral. Il est généralement
considéré que leur défaut constitue une cause de
récusation et toutes les législations sur l'arbitrage de DIP
l'admettent explicitement.
Du point de vue du droit comparé, certaines
législations à l'instar du chapitre 12 LDIP exigent seulement
l'indépendance de l'arbitre. En effet, la formulation de cette exigence
n'est pas expresse dans le texte du chapitre 12 LDIP. L'art. 180 al. 1 let. c
LDIP dans son énumération des conditions de récusation des
arbitres, fait état du doute légitime sur son
indépendance. Il dispose qu'"un arbitre peut être
récusé [...] Lorsque les circonstances permettent de douter
légitimement de son indépendance", mettant ainsi en exergue,
l'obligation d'indépendance de l'arbitre. Par contre, d'autres, à
l'instar de l'AU.A formulent la double exigence d'indépendance et
d'impartialité "l'arbitre doit [...] demeurer indépendant et
impartial vis-à-vis des parties" (art. 6 al. 2 AU.A). Il en est
ainsi, de la très grande majorité des lois et règlements
d'arbitrage comme les règlements de la CNUDCI du 15 décembre 1976
(art 9-10), de la CCI du 1er janvier 1998 (art. 11 al.
1er), de la LCIA du 1er janvier 1998 (arts. 10.1 et
10.2). Des législations d'arbitrage allemande ZPO (§1036 ZPO),
belge (art. 1690 CJB), néerlandaise (art. 1033 al. 1 WBR). Bref,
relevons que, la référence juridique faite aux exigences
d'indépendance et/ou d'impartialité, dans les lois d'arbitrage,
est une exigence d'ordre public dont la violation peut constituer une cause
d'annulation de la sentence ou le refus de sa reconnaissance et
exécution selon la procédure appropriée.
Que peut-on alors entendre par absence
d'indépendance ?
L'absence d'indépendance est une situation de fait qui
a trait à l'absence de relations de travail, de collaboration de
parenté ou d'alliance entre l'une des parties et un arbitre. Elle ne
doit pas être confondue avec la condition d'impartialité qui est
un état d'esprit de l'arbitre exigeant l'absence de toute circonstance
d'une intervention en faveur des intérêts de l'une des parties.
L'impartialité est considérée comme le corollaire de
l'indépendance et se trouve être par la force des choses, plus
difficile à prouver que la notion d'indépendance qui est
objective et factuelle.
On comprend alors aisément, pourquoi certaines
législations à l'instar de la LDIP, se satisfont à
préciser l'exigence de l'indépendance de l'arbitre sans faire cas
de son impartialité. Ceci étant, sans pour autant verser dans le
développement doctrinal sur l'état d'indépendance et
d'impartialité de l'arbitre à l'égard des parties55(*), il est important de noter que
ces exigences s'imposent à tout arbitre sans distinction quant à
sa fonction au sein du tribunal arbitral.
En droit suisse de l'arbitrage international, c'est dans les
dispositions du chapitre 12 LDIP que l'art. 180 al. 1 let. c traite du
problème. Sans faire référence à
l'impartialité de l'arbitre le texte évoque le défaut
d'indépendance de l'arbitre comme cause envisageable de
récusation d'un arbitre. En invoquant le doute légitime sur
l'indépendance de l'arbitre, le droit suisse de l'arbitrage
international offre aux parties la possibilité de récusation du
tribunal arbitral selon les termes prévus par la loi. Ainsi, un arbitre
peut se voir appliquer la procédure de récusation s'il y a
présomption de défaut d'indépendance. Autrement dit, si
dans les conditions d'appréciation de son indépendance
apparaissent des doutes. Par rapport à l'absence d'impartialité,
le législateur suisse a considéré qu'il va de soi que dans
un tribunal arbitral, les arbitres soient autant impartiaux
qu'indépendants puisque le droit à un juge impartial
découlant de l'art. 58 Cst., existe aussi bien en matière
d'arbitrage interne que devant les juridictions étatiques, l'arbitrage
international n'en étant pas du reste.
En dépit de sa non-prise en compte par le
législateur suisse, il n'en demeure pas moins vrai que cette exigence
peut constituer une cause de récusation dans un arbitrage de DIP en
droit positif suisse. En effet, dans un arrêt du Tribunal
Fédéral on note ceci : "le tribunal
fédéral continue à se référer à sa
jurisprudence antérieure exigeant, pour des motifs constitutionnels, un
tribunal arbitral impartial"56(*). Selon cet arrêt du TF,
l'impartialité est une garantie constitutionnelle qui doit
viser à éviter que les circonstances extérieures
à la cause influencent le jugement en faveur ou au détriment
d'une partie (ATF 126 I 68,73)57(*).
Quid du droit OHADA de l'arbitrage ?
Le droit OHADA à travers l'al. 2 de l'art. 6 de l'AU.A
prévoit que "l'arbitre doit [...] demeurer indépendant et
impartial vis-à-vis des parties". Cependant, dans ses dispositions
il n'est point fait état du défaut d'indépendance et
d'impartialité comme cause de récusation de l'arbitre.
Simplement, en reconnaissant le principe de l'indépendance et de
l'impartialité des arbitres, le droit OHADA oblige l'arbitre à
s'auto-récuser, lui laissant la faculté de déceler
lui-même les motifs raisonnables de récusation qui, doivent
être soumis à la discrétion des parties à
l'arbitrage. Il va à contre-pied de la solution retenue par la LDIP en
ne procédant à aucune énumération des causes de
récusation des arbitres, donnant ainsi aux arbitres eux-mêmes, le
pouvoir d'apprécier de prime abord la faisabilité de la mission
qui leur est confiée et aux parties, le pouvoir d'apprécier les
conditions de récusation des arbitres. C'est tout le sens des
dispositions de l'art. 7 al. 2 AU.A "si l'arbitre suppose en sa personne
une cause de récusation, il doit en informer les parties [...]".
Le droit OHADA s'en remet ainsi, pour l'appréciation
des motifs de récusation d'un arbitre et de la procédure
afférente au pouvoir discrétionnaire des parties. Cependant, il
n'en demeure pas moins vrai que les causes classiques de récusation
admises dans une justice arbitrale au regard de la pratique internationale et,
qui sont les motifs impératifs du droit de l'arbitrage international,
basés sur le défaut d'indépendance et
d'impartialité, ne sont pas recevables en droit positif communautaire
OHADA. Ceci nous amène à envisager la disclosure ou
l'obligation d'information qui pèse sur l'arbitre tout au long de
l'instance.
2-. LA DISCLOSURE OU OBLIGATION
D'INFORMATION DES ARBITRES
L'autre particularité du droit OHADA de l'arbitrage est
que, les exigences d'indépendance et d'impartialité, il faut le
dire, génèrent pour les arbitres dans ce système une
obligation d'information qui, à défaut, peut constituer un motif
de récusation. Plusieurs lois et règlements d'arbitrage
consacrent ce principe du devoir de révélation appelé
disclosure selon la terminologie anglo-saxonne. L'AU.A en droit OHADA,
le formule expressément dans les dispositions de l'art 7 al. 2 comme
suit "si l'arbitre suppose en sa personne une cause de récusation,
il doit en informer les parties, et ne peut accepter sa mission qu'avec leur
accord unanime et écrit". Il en appert pour tout arbitre, qui
suppose un doute peser sur son indépendance et/ou son
impartialité, en vertu du principe de la bonne foi, le devoir
d'information à l'adresse des parties à qui, il revient d'en
apprécier la légitimité afin d'accepter la mise en branle
de la procédure de récusation ou la rejeter.
Du point de vue du droit et de la pratique de l'arbitrage
international, l'obligation de révélation de tout
élément fort susceptible de susciter la récusation d'un
arbitre est, un autre principe qui est considéré comme un
corollaire fondamental du régime de récusation. Même si
certaines législations n'estiment pas nécessaire de faire figurer
dans le corpus de texte de loi sur l'arbitrage international l'obligation de
révélation, force est de constater que, la disclosure
dans la pratique du droit de l'arbitrage international est, du fait même
de l'existence du contrat d'arbitre, un principe clé qui ne saurait se
défier de toute légitimité. La législation suisse
de l'arbitrage international (LDIP) ne l'a pas prise expressément en
compte. Cependant, une jurisprudence du TF a reconnu cette disclosure
en ces termes : "l'arbitre a le devoir précontractuel, puis
contractuel, d'informer les parties au procès des faits pouvant
être tenus pour un motif de récusation, du moins lorsqu'il a des
raisons de penser que ces faits ne sont pas connus des parties ou de celles
d'entre elles qui pourraient s'en prévaloir" (ATF 111 la 72,
75-76).
Ceci étant, il est fort utile de préciser que,
l'appréciation des éléments matériels fournis par
l'arbitre à l'appui de son devoir d'information, doit pouvoir se faire
selon la jurisprudence française "au regard à la fois de la
notoriété de la situation critiquée et de son incidence
raisonnablement prévisible sur le jugement de l'arbitre". Il va
s'en dire que, cette appréciation des éléments fournis par
l'arbitre, doit pouvoir se faire par les parties objectivement sur la base de
son impact plausible sur l'issue du procès arbitrable. En cas de non
rejet des motifs évoqués par l'arbitre, le consensus
matérialisé par une preuve écrite, doit être fait
par les parties sur la continuation de la mission de l'arbitre. C'est tout le
sens que donne l'art.7 al. 2 in fine de l'AU.A qui prévoit que,
l'arbitre "ne peut accepter sa mission qu'avec leur accord unanime et
écrit".
L'exigence d'un écrit, dans ce cas, n'est pas fortuite
car comme le pense à bon droit P. LEBOULANGER, elle "est sans doute
une sage précaution, qui évitera des tentatives de
récusation à des fins purement dilatoires, mais qui pourra,
à l'inverse, être une source de blocage, si une des parties refuse
de donner son accord"58(*). Somme toute, la finalité de la
disclosure c'est d'une part, de permettre aux parties "d'exercer
leur droit de récusation en toute connaissance de cause" (GAILLARD, p.
1243)59(*) et d'autre
part, d'empêcher "toute contestation à un stade
ultérieur de la procédure (REDFERN/HUNTER, n° 4-61, p. 204),
si les parties n'exercent pas leur droit ou le font sans
succès"60(*).
Sur ce dernier point curieusement, le droit suisse de l'arbitrage
international, en dépit de la non prise en compte dans le corpus du
texte de la loi d'arbitrage de la disclosure, souligne le devoir
d'information à l'adresse du tribunal arbitral de la cause de
récusation "le tribunal arbitral et l'autre partie doivent
être informés [...] de la cause de récusation" (art.
180 al. 2 in fine).
La récusation, nous le savons, est facultative et non
obligatoire pour les parties. Cependant, en vertu du principe de la bonne foi,
la cause de récusation doit "être soulevée sans
délai par quiconque entend s'en prévaloir" (art. 7
al. 4 AU.A). Il s'en infère qu'une partie qui entend faire usage de la
faculté de récusation du tribunal arbitral, que lui accorde la
loi, doit invoquer le motif de récusation aussitôt qu'elle en a eu
connaissance. Le droit suisse de l'arbitrage international ne fait pas
l'économie de cette règle. On peut le constater dans la
formulation expresse du contenu du texte de l'art. 180 al. 2 in fine
du chapitre 12 LDIP qui, oblige de tenir informé sans délai
le tribunal arbitral et l'autre partie de la cause de récusation.
En effet, que ce soit en droit OHADA de l'arbitrage ou en droit suisse de
l'arbitrage international, la recevabilité de la demande de
récusation suppose qu'elle soit soulevée sans délai par la
partie qui entend s'en prévaloir. À défaut, elle emporte
pour celle-ci, comme conséquence "négative", la renonciation
implicite à se prévaloir de la faculté de
récusation et par la même occasion, renonciation au droit de
demander l'annulation de la sentence au motif de l'irrégularité
dans la constitution du tribunal arbitral ou de la violation de l'ordre public
international. Formulé autrement, le principe veut que, la partie qui en
connaissance de cause n'introduit pas sa demande de récusation dans les
délais ne puisse plus ultérieurement avoir la possibilité
d'attaquer la sentence, sur la base de cette irrégularité.
C'est tout le sens que veut donner à la procédure de
récusation les articles 7 al. 4 AU.A et 180 al. 2 LDIP.
Pour aborder dans le même sens, le respect du
délai fixé pour introduire une demande de récusation est
une obligation conventionnelle mise à la charge de la partie qui entend
se prévaloir de la récusation. Evidemment, le défaut d'une
fixation conventionnelle emporte comme conséquence, pour la partie qui
entend s'en prévaloir, le devoir, en vertu du principe de la bonne foi,
d'agir sans délai au risque de perdre non seulement ce droit de demander
récusation mais aussi, celui de recourir ultérieurement à
l'annulation de la sentence pour ce motif. En droit suisse, la doctrine et la
jurisprudence en ont déduit que, même si l'art. 180 al. 2 ne fixe
aucun délai "la partie qui ne réagit pas immédiatement
perd son droit de faire valoir ultérieurement le motif de
récusation qu'elle invoque"61(*).
Sur ce point, il est fort intéressant de noter que, les
législations modernes sur l'arbitrage international ne fixent
généralement aucun délai pour l'introduction d'une demande
de récusation. Elles se contentent de s'en remettre simplement au
principe de l'autonomie qui régit l'arbitrage et donc à la
fixation conventionnelle de ce délai.
Enfin, l'étude comparée de la
problématique de récusation dans les deux systèmes, ne
saurait se faire sans le rapprochement de la maxime qui veut que nul ne se
prévale de sa propre turpitude du principe de l'interdiction de
venire contra factum proprium des articles 7 al. 4 AU.A et 180 al. 2
LDIP. En effet, dans sa réglementation de la procédure de
récusation, la loi d'arbitrage suisse, en l'occurrence le chapitre 12
LDIP, prévoit en son art. 180 al. 2 qu'"une partie ne peut
récuser un arbitre qu'elle a nommé ou qu'elle a contribué
à nommer que pour une cause dont elle a eu connaissance après
cette nomination". Elle met ainsi en exergue, l'application du principe de
l'interdiction de venire contra factum proprium. Il s'en dégage
que, toute cause de récusation révélée avant la
nomination d'un arbitre emporterait comme conséquence la non remise en
cause de son indépendance et/ou impartialité. Ce qui ne parait
pas illogique dans la mesure où, la récusation avant nomination
d'un arbitre par la partie qui l'a choisi, est une attitude contradictoire
justifiant le fait que ne soit pas entendu celui qui donne pour excuse sa
propre turpitude. Attitude non protégée par les lois d'arbitrage
et par la pratique de l'arbitrage international. C'est aussi le sens que le
législateur OHADA donne aux dispositions de l'art. 7 al. 4 AU.A,
lorsqu'il formule que "la récusation d'un arbitre n'est admise que
pour une cause révélée après sa nomination". Comment
s'opérationnalise alors la récusation ?
3-. LA PROCEDURE DE
RECUSATION
Du point de vue procédural, les deux systèmes
que nous étudions consacrent tous le principe de l'autonomie des parties
en matière de récusation. Il va s'en dire que, le juge d'appui
n'est compétent pour statuer sur la récusation d'un arbitre que
si les parties n'ont pas réglé par elles-mêmes ladite
procédure. C'est en effet, tout le sens des dispositions de l'art. 180
al. 3 LDIP qui dispose qu' "en cas de litige et si les parties n'ont pas
réglé la procédure de récusation, le juge
compétent du siège du tribunal arbitral statue
définitivement". Autrement dit, le juge du siège de
l'arbitrage n'est en matière de récusation que subsidiairement
compétent. Le droit OHADA de l'arbitrage, pour ce principe, n'est pas du
reste. Il le reconnaît aussi expressément lorsqu'il dispose en son
art. 7 al. 3 AU.A qu' "en cas de litige, et si les parties n'ont pas
réglé la procédure de récusation, le juge
compétent dans l'Etat-partie statue sur la récusation. Sa
décision n'est susceptible d'aucun recours".
Ceci étant, il importe de faire remarquer que, tandis
qu'en droit suisse de l'arbitrage international, la subsidiarité de
l'intervention du juge d'appui, pour son assistance en matière de
récusation, relève du juge compétent du siège
du tribunal arbitral, en droit OHADA elle est du juge compétent
dans l'Etat-partie. Cette différenciation sémantique est,
à notre avis, fondée sur la particularité
organisationnelle du point de vue structurel du système OHADA qui
regroupe 16 États qualifiés d'États-Parties, ayant chacun
une organisation juridique et judiciaire propre. La désignation du juge
d'appui chargé de la mise en application de la procédure de
récusation, sous le vocable de juge compétent dans
l'Etat-partie, n'est rien d'autre que le juge du siège du tribunal
arbitral dans chacun des États faisant partie du système de
procédure unifiée du droit OHADA. Quant à savoir, quel est
le juge compétent pour ce faire dans l'ordre interne de chaque Etat, il
revient à la loi de procédure civile de chacun de ces
États de le déterminer.
En droit suisse par contre, le juge compétent qui
pourra être saisi de la procédure de récusation "par
défaut" est celui du siège du tribunal arbitral. Pour
déterminer ce juge il y a lieu de recourir aux dispositions du droit
cantonal. Celui-ci par renvoie de l'art. 21 CIA (en cas de contestation,
l'autorité judiciaire prévue à l'article 3 statue sur la
récusation), nous conduit à découvrir que "le
tribunal supérieur de la juridiction civile ordinaire du canton
où se trouve le siège de l'arbitrage est l'autorité
judiciaire compétente pour, [...] statuer sur les demandes de
récusation des arbitres, prononcer leur révocation et pourvoir
à leur remplacement" (art. 3 let. b).
Par ailleurs, deux variantes s'observent en matière de
procédure de récusation dans un arbitrage de DIP. En effet, selon
que les parties ont opté pour un arbitrage institutionnel la
procédure suivra le canevas de l'organe institutionnel appelé
à trancher les demandes de récusation. Évidemment dans ce
cas, la procédure de récusation dépendra en 1er
lieu du règlement d'arbitrage adopté par les parties et en
2ème lieu à titre subsidiaire de la loi de l'Etat du
siège de l'arbitrage. Si par contre, elles optent pour un arbitrage ad
hoc, le défaut de définition de procédure ad hoc emporte
application de la procédure du juge d'appui. Dans ce cas, il faudra se
référer pour la démarche à suivre au droit
applicable c'est-à-dire le droit de l'Etat du siège de
l'arbitrage. Dans la pratique, l'hypothèse de l'application du
règlement d'une institution d'arbitrage emporte normalement soit
l'introduction de la demande de récusation devant le tribunal arbitral
quitte à former un appel ultérieur contre cette décision
devant les tribunaux étatiques. Il en est ainsi de la loi-type CNUDCI
art.13 § 2 identique au §1037 (2) du droit allemand dans la
Zivilprozessordnung "... [...] faute d'un tel accord, la partie qui a
l'intention de récuser un arbitre expose par écrit les motifs de
la récusation au tribunal arbitral", ainsi que du droit
suédois. Soit l'introduction directe de la demande de récusation
devant l'institution d'arbitrage, c'est le cas du droit OHADA, suisse,
français, belge, anglais et italien, cas qui nous intéresse.
Ainsi, si un arbitrage institutionnel de DIP se déroule sur le
territoire suisse ou sur le territoire de l'un des États-Parties
à l'OHADA, la procédure de récusation consistera à
introduire directement sa demande devant l'institution d'arbitrage en
l'occurrence pour le canton de Genève c'est la CCIG et pour les
Etats-Parties à l'OHADA c'est la CCJA.
Notons enfin que, la décision de récusation
rendue par le juge d'appui, qui qu'il soit, dans tous les cas (dans les deux
systèmes), est non susceptible de recours. Cette prescription
légale est perceptible dans les dispositions des articles 180 al. 3 LDIP
"[...] le juge compétent du siège du tribunal arbitral statue
définitivement" et 7 al. 3 in fine AU.A "[...] sa
décision n'est susceptible d'aucun recours". Du point de vue du
droit comparé, les droits allemand et suédois proposent des
solutions idoines. Ceci étant, même si en droit suisse de
l'arbitrage international et en droit OHADA de l'arbitrage, la décision
de récusation rendue par le juge d'appui ne saurait faire l'objet d'un
recours quelconque, cela ne doit aucunement être interprété
comme un rejet systématique de la possibilité de l'attaquer.
Simplement, elle ne saurait faire l'objet des voies de recours ordinaires. Mais
elle peut cependant, faire l'objet d'un contrôle qui pourra s'exercer
indirectement lors du recours contre la sentence arbitrale ou lors de son
exequatur.
§ II-. LE STATUT DE L'ARBITRE
DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE
Le concept de statut de l'arbitre est une récente
innovation du droit de l'arbitrage par la doctrine. Il regroupe d'un
côté les conditions légales que doivent remplir les
personnes pressenties pour être arbitre, les droits et obligations issus
du receptum arbitri (contrat d'arbitrage ou d'investiture) et de
l'autre côté les charges qui pèsent sur l'exercice d'une
telle fonction à savoir : la responsabilité qui pèse
sur les arbitres et enfin leur immunité. Notons toutefois que, les lois
d'arbitrage des différents systèmes juridiques ne
prévoient, dans leur immense majorité, rien quant au statut de
l'arbitre. Du moins si elles existent, certaines de ces dispositions sont
très lacunaires ou à l'étape embryonnaire dans les
législations.
A-. LES CONDITIONS LEGALES
Sous cette rubrique nous analyserons, d'un côté
les modalités légales prescrites par les deux lois d'arbitrage
pour être un arbitre et, de l'autre côté, les droits et
obligations pour les arbitres issus du receptum arbitri (contrat
d'arbitre ou d'investiture).
1-. LES MODALITES LEGALES
En fait de modalités légales, le droit OHADA
contrairement au droit suisse, dispose dans le texte de loi que "la
mission d'arbitre ne peut être confiée qu'à une personne
physique. L'arbitre doit avoir le plein exercice de ses droits civils, demeurer
indépendant et impartial vis-à-vis des parties" (art. 6
AU.A). C'est en ces termes que le droit communautaire OHADA fixe les conditions
légales pour être arbitre dans cet espace. Même si la
législation suisse de l'arbitrage international (LDIP) ne contient
aucune disposition sur les conditions requises pour être un arbitre, la
doctrine quant-à elle abonde d'éléments sur la question.
En général, deux conditions légales sont souvent requises
pour être un arbitre : être une personne physique et avoir le
plein exercice de ses droits civils. L'analyse détaillée de ces
deux conditions de base nécessaires la qualité d'arbitre de DIP
en droit OHADA, nous conduit à faire les constatations
suivantes :
* la disposition du droit OHADA qui exige de l'arbitre
d'être "une personne physique" est une reprise de l'art. 1451
al. 1er NCPC du droit français qui pose la
même exigence. Si on peut en induire qu'une personne morale ne peut pas
être un arbitre dans le système OHADA, il n'est cependant pas
prohibé qu'elle intervienne comme centre d'organisation. C'est le cas de
la CCJA (Cour Commune de Justice et d'Arbitrage) et de la CCI (Chambre de
Commerce Internationale de Paris). Ceci étant, le droit positif suisse
sans pour autant dénier à la personne morale son statut admet
a contrario son rôle non moins négligeable comme arbitre
lorsqu'elle est indexée. Selon la doctrine, le TF considère que
l'indication dans la convention arbitrale d'une personne morale, peut
être interprétée comme désignant implicitement l'un
de ses responsables comme arbitre. Bref, de la compréhension qu'on peut
avoir des dispositions de l'art. 6 AU.A en droit OHADA, on peut tirer la
conclusion selon laquelle, une personne physique étrangère peut
être aussi arbitre dans cet espace. Sur ce point, la pratique est
généralisée en droit de l'arbitrage international et le
droit suisse n'en est pas du reste.
Cette conséquence de la qualité de l'arbitre,
trouve certainement son origine formelle dans les dispositions de la loi type
de la CNUDCI en son art. 11 qui stipule que "nul ne peut, en raison de sa
nationalité, être empêché d'exercer les fonctions
d'arbitre sauf convention contraire des parties". En
général, et il est important de le souligner, les restrictions
liées à la qualité d'arbitre se référant
à la nationalité sont interdites dans la plupart des
systèmes d'arbitrage. Cependant, si certaines restrictions
spécifiques peuvent être imposées soit par les parties
elles-mêmes dans leur convention, pour des raisons qui sont propres
à la nature de la cause à juger ou la personne de l'arbitre,
d'autres conditions a contrario peuvent être imposées par
le droit applicable à la qualité d'arbitre qui, peut relever soit
du choix des parties ou à défaut de la loi du siège de
l'arbitrage. Pour ce dernier cas, le CIA en droit suisse de l'arbitrage en son
art. 7 interdit, à titre d'exemple, l'exclusion des juristes en la
qualité d'arbitre "est nulle, toute disposition d'une clause
compromissoire qui interdit d'avoir recours à des juristes dans un
procès arbitral, comme arbitres, secrétaires ou
représentants des parties".
* l'arbitre "doit avoir le plein exercice de ses droits
civils". La lecture entre les lignes de cette disposition nous
amène à envisager la capacité juridique de l'arbitre. Tout
comme en droit des contrats, l'évidence que l'arbitre partie au
contrat d'arbitrage doit remplir la condition sine qua non de
capacité n'est plus à démontrer. Cependant, la principale
question de droit qui se pose ici est celle de la détermination du droit
applicable à la capacité de l'arbitre. Les solutions
apportées pour résoudre ce problème divergent selon les
systèmes. Le droit OHADA en invoquant le plein exercice des droits
civils de l'arbitre laisse entrevoir sa capacité qui dans la plupart des
États OHADA s'apprécie d'après la loi personnelle de
l'arbitre. Mais, dans la fixation de cette loi personnelle, en interrogeant la
règle de conflit gouvernant la capacité d'exercice des personnes,
le système OHADA rattache celle-ci à la nationalité de la
personne dont la capacité est en cause, se démarquant ainsi de la
majorité des États hors OHADA. C'est le cas du droit suisse dans
lequel, la loi personnelle est celle du domicile de l'arbitre. A
l'intérieur du système unifié communautaire OHADA il
revient de se référer à la loi nationale de la personne
pressentie pour être arbitre afin de déterminer si elle
répond aux exigences de capacité. En Suisse, c'est sa loi de
l'Etat de résidence ou de domicile qui détermine la loi
personnelle de l'arbitre et donc sa capacité.
* L'arbitre doit "demeurer indépendant et
impartial vis-à-vis des parties". Nous ne reviendrons plus sur la
double exigence d'indépendance et d'impartialité que nous avons
déjà développée en long et en large dans la section
relative à la récusation des arbitres.
Ceci étant, eu égard au rapport de droit qui
oppose les parties initiales au contrat litigieux ayant donné naissance
à l'arbitrage, l'arbitre apparaît comme un tiers qui se trouve
être lié aux parties par un contrat appelé contrat
d'investiture en droit OHADA et contrat d'arbitrage en Suisse ou encore
receptum arbitri. De l'existence et de la nature de ce contrat
particulier, peuvent apparaître des contentieux mettant en cause
l'arbitre personne physique ou le centre d'arbitrage et les parties au litige
et/ou des tiers. Quelle que soit la dénomination retenue, aucune
réglementation exhaustive de la notion n'est observable dans les
différentes lois d'arbitrage. Même si en droit suisse, ni la loi
sur l'arbitrage international (chap. 12 LDIP) ni le concordat et en droit
OHADA, ni l'acte uniforme relatif au droit de l'arbitrage ni le Traité
en soi et le Règlement d'Arbitrage de la CCJA par extension ne
définissent, la nature de la relation juridique qui pourrait
naître de l'acceptation de la mission de l'arbitre, force est de
constater que le fondement du rapport de droit qui oppose l'arbitre et/ou le
centre d'arbitrage aux parties est contractuel.
Ce rapport contractuel, ayant pour objet la mission
d'arbitrer, confiée à un tiers fixe, de par sa nature
synallagmatique, des droits et des obligations réciproques avec pour
conséquence le fait que les obligations des arbitres constituent des
droits pour les parties et vice versa. Il s'agit d'une approche qui est
aujourd'hui non contestée et consacrée dans tous les ordres
juridiques. Mais, quelle est concrètement la nature du receptum
arbitri dans les droits OHADA et suisse de l'arbitrage ? C'est la
principale question de droit à laquelle nous essayerons d'apporter une
réponse à la lumière des deux textes ici en
présence.
En effet, la nature de ce contrat particulier diverge selon
les systèmes. Certains y voient un contrat sui generis,
d'autres le considèrent comme un mandat d'intérêt commun,
mieux, d'autres encore lui attribue le qualificatif de contrat de prestation de
service. En Suisse, le codificateur utilise le terme de contrat d'arbitrage
alors que le législateur OHADA a jeté son dévolu sur
l'expression de contrat d'investiture. Cette différenciation
sémantique d'apparence futile n'est pas neutre, elle permet de
différencier le régime juridique auquel ce contrat particulier
est soumis. En effet, en Suisse la doctrine considère que le contrat
d'arbitrage est "une variété de mandat, au sens très
large de cette institution"62(*). Cependant, il n'est pas un mandat pur et simple
puisqu'il échappe à la règle selon laquelle le mandat
peut être répudié ou révoqué en tout temps.
Ce mandat "hors normes" diverge du mandat "ordinaire" par un certain nombre de
dérogations au régime légal ordinaire le régissant,
notamment celui qui exclu tout pouvoir du mandant de donner des instructions
à son mandataire. Cela va de soi dans la mesure où, si on
conçoit bien que le mandant peut donner des instructions au mandataire,
dans le cadre de ce mandat spécial qu'est le receptum arbitri
une telle pratique violerait le principe sacro-saint de
l'indépendance et de la neutralité de l'arbitre. Le droit OHADA,
en optant pour la dénomination de contrat d'investiture, s'est
aligné sous la position du droit français de l'arbitrage. A cet
effet, la doctrine et la jurisprudence française rejettent
systématiquement la qualification de mandat et préfèrent
soumettre le lien entre l'arbitre et les parties à un régime
sui generis reposant sur l'objet propre de la mission de l'arbitre qui
est juridictionnel. Le receptum arbitri en droit positif
français, n'est pas un mandat du simple fait que l'arbitre n'est pas un
représentant de celui ou ceux qui l'ont nommé. Il est alors,
différent du mandat et s'oppose au mandat, du fait de
l'indépendance que l'arbitre possède, et dont il doit faire
preuve, à l'égard des parties. Enfin sur cette question notons
que, lorsque le receptum arbitri a un caractère international,
la question de la loi qui lui est applicable se pose. Pour ce faire, à
défaut d'élection de droit par les parties, le droit applicable
aussi bien au receptum arbitri qu'au statut de l'arbitre, c'est bien
celui du siège de l'arbitrage. Dans la mesure où l'Etat du
siège présente, à ne point en douter, les liens les plus
étroits avec la mission qu'accomplira l'arbitre, il est normal que ce
soit sa loi qui soit prise en compte dans le cadre de la détermination
de la loi applicable au receptum arbitri et au statut de l'arbitre. En
effet, l'Etat du siège est beaucoup plus enclin à définir
dans le cadre de la loi de l'arbitrage, l'étendue de la mission de
l'arbitre et ses éventuels pouvoirs légaux. Mieux, c'est
incontestablement le lieu de l'exécution de la prestation
caractéristique du contrat dont il est récipiendaire, celle
d'arbitrer.
Nous ne passerons pas sous silence le fait que, dans un
procès judiciaire il est de principe que, le juge étatique ne
peut se refuser de juger sous peine de déni de justice.
Il en va cependant autrement pour ce qui est du procès
arbitral. En effet, nul ne peut être contraint contre sa volonté
à être un arbitre dans une affaire déterminée. Le
droit de l'arbitrage en a fait un principe général auquel la
pratique de l'arbitrage international a adhéré et les deux lois
que nous étudions ne lui échappent guère. Ainsi, aucun
arbitre ne peut contre son gré être contraint à officier
dans un arbitrage. Pour cela, tout arbitre doit avoir expressément
accepté sa mission, laquelle acceptation doit être portée
"à la connaissance des parties par tout moyen laissant trace
écrite" (art. 7 al. 1er AU.A). Même si, dans les
dispositions du chapitre 12 LDIP on ne retrouve aucune prescription sur la
question, le contenu du dispositif de l'art. 14 CIA en droit suisse en dit long
sur ce sujet "les arbitres doivent donner leur
acceptation". Notons que, cette exigence de la matérialisation
écrite de l'acceptation de la mission de l'arbitre est toute
particulière au droit OHADA, le droit suisse est peu regardant sur la
forme que doit prendre l'acceptation par l'arbitre de sa mission. Nous
concevons qu'elle peut être écrite ou orale tacite ou expresse peu
importe, la seule exigence repose sur l'acceptation par l'arbitre de sa
mission.
2-. LES DROITS ET OBLIGATIONS DES
ARBITRES
Le receptum arbitri fait naître entre les
arbitres et les parties une relation de type contractuelle dont la
concrétisation permet à l'arbitre de remplir la mission à
lui confiée par les parties: vider le litige source de la discordance
entre elles. Comme tout contrat synallagmatique, le contrat d'arbitrage ou
d'investiture (selon la terminologie appropriée choisie par chaque
système) fixe des droits et obligations pour chacune des parties. Il
impose aux arbitres des devoirs qui sont la contrepartie des droits des parties
et vice versa. On ne retrouve ni dans l'AU.A en droit OHADA ni dans le chapitre
12 LDIP aucune énumération des différents droits et
devoirs des arbitres. C'est à la doctrine et la jurisprudence qu'on doit
toutes les sources de référence.
Notons que, en ce qui concerne les obligations des arbitres
elles peuvent soit résulter de la convention des parties soit de la loi
ou simplement faire appel à la conscience morale de l'arbitre. Sans
pouvoir rentrer dans la catégorisation systématique de ces
différents devoirs, nous pouvons citer comme exigences obligatoires pour
les arbitres de DIP les devoirs suivants :
* Le devoir d'être indépendants et impartiaux
vis-à-vis des parties à l'arbitrage et celui de respecter
l'égalité des droits des parties tout au long de l'instance
arbitrale. Ces deux exigences cumulées se réfèrent au
devoir d'agir équitablement que l'art. 9 al. 1er AU.A
consacre "les parties doivent être traitées sur un pied
d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de
faire valoir ses droits". Il en est de même en droit suisse des
conditions de l'art. 25 CIA qui traite du droit d'être entendu
"la procédure choisie doit en tout cas respecter
l'égalité entre les parties [...]". Lorsque l'art.
192 al. 2 let. b dispose que, la sentence "ne peut être
attaquée que [...] lorsque l'égalité des parties ou leur
droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas
été respecté", il pose ainsi l'exigence du respect
dans le traitement égalitaire des parties dans la phase
procédurale de l'instance.
* Le devoir qui, en vertu du receptum arbitri liant
les parties aux arbitres, oblige ces derniers à agir avec toute la
diligence requise dans l'intérêt du succès de l'arbitrage.
Il s'agit d'une obligation morale qui, généralement est
renforcée par une disposition légale (délai d'arbitrage)
et qui impose à l'arbitre de rendre sa décision et donc la
sentence dans le délai requis, quitte à pouvoir le proroger en
cas de retard bien évidemment en tenant compte de la possibilité
conventionnelle ou légale de prorogation.
* Le devoir qui, en vertu du receptum arbitrii ou du
règlement d'arbitrage, oblige les arbitres à poursuivre leur
mission jusqu'à son terme. Il s'agit ici aussi, d'une obligation morale
relevant de la conscience professionnelle des arbitres et qui a pour objectif
d'empêcher une démission sans motifs valablement
justifiés.
* Le devoir qui, en vertu de receptum arbitrii ou du
règlement d'arbitrage, tient les arbitres au respect de la
confidentialité de l'arbitrage surtout dans sa phase procédurale.
La confidentialité de l'arbitrage étant l'un des avantages de
cette forme de justice par rapport au procès judiciaire qui est le plus
souvent public ne saurait souffrir d'une quelconque entorse.
* Le devoir du respect du délai conventionnel
d'arbitrage. Notons toutefois qu'à défaut d'une fixation
conventionnelle, un délai de six mois à compter du jour où
le dernier arbitre a accepté sa mission est prévu par le droit
OHADA de l'arbitrage (art. 12 AU.A).
* Le devoir qui s'impose aux arbitres, dans le traitement du
litige au fond, de se conformer aux prescriptions conventionnelles à
charge pour eux de respecter les prescriptions impératives des parties
voire les prescriptions impératives de la loi de l'arbitrage.
* Le devoir qui résulte de l'obligation conventionnelle
à la charge des arbitres de respecter la forme procédurale dans
laquelle la sentence devra être rendue.
Par ailleurs, pour les parties leur principale obligation se
ramène à la rémunération les arbitres par des
honoraires et le défraiement de leurs débours. C'est une question
sensible que les lois ne règlent pas en général, c'est
donc la pratique qui s'en charge et elle est variable d'un système
à un autre. Notons que les honoraires sont fixés selon les
barèmes fournis par les institutions permanentes d'arbitrage. Ils sont
à la charge des parties et leur montant dépend de l'importance du
litige, de sa complexité, du temps consacré à l'affaire et
de la notoriété des arbitres. Au regard de la pratique
internationale, trois méthodes de rémunération existent:
la rémunération ad valorem, la
rémunération par per diem et la
rémunération qui fixe un montant forfaitaire et global dite
méthode du forfait global. Le système de
rémunération retenu par la CCJA tout comme la CCI de Paris est
celle dite ad valorem. Si l'on se réfère aux
dispositions du règlement suisse d'arbitrage international, la section
relative à la rémunération des arbitres des articles 38
à 40 nous donne la précision sur la méthode de
rémunération retenue en droit suisse de l'arbitrage. L'annexe B
du texte nous laisse penser que le système retenu est semble-t-il celui
de la rémunération ad valorem.
B-. LA QUESTION DE LA
RESPONSABILITE ET DE L'IMMUNITE DES ARBITRES DE DIP EN DROIT POSITIF
OHADA ET LA SUISSE
Toute la doctrine fait observer que la question de la
responsabilité de l'arbitre appelle celle de son immunité.
Évoquer en droit de l'arbitrage international la question de la
responsabilité de l'arbitre, revient à l'envisager sous l'angle
de son immunité. Autrement dit, la problématique juridique qui se
pose ici est celle de savoir si la responsabilité des arbitres de DIP
peut être engagée sur la base du contrat qui les lie aux parties,
pour tous les actes commis par eux dans l'accomplissement de la mission
à eux confiée par les parties ? Ou bien doit-on
considérer qu'ils sont couverts par une immunité totale ou
partielle se justifiant par la singularité de la mission qu'ils
exercent ? Le cas échéant doit-on assimiler cette
immunité à celle du juge étatique de l'ordre juridique
dans lequel ils officient ? Enfin quelle solution préconisent les
deux lois d'arbitrage par rapport à la problématique de la
responsabilité des arbitres de DIP ?
S'agissant de la responsabilité de l'arbitre, nous
l'avons dit, la nature du rapport de droit qui existe entre les arbitres et les
parties est contractuelle et aucun système ne remet ce principe en
cause. De ce simple fait, il est évident que les arbitres doivent, en
toute logique, répondre de tous les manquements à leurs
obligations contractuelles. Partant de ce postulat, il est aisément
concevable que toute partie qui a été victime d'une carence de la
part d'un arbitre, doit chercher à rendre ce dernier personnellement
comptable des dommages qu'elle a subit de ce fait, en mettant en cause sa
responsabilité contractuelle. Cette logique, pour en revenir au droit
comparé, semble ne pas recevoir l'accord d'adhésion de principe
de tous les juristes praticiens du droit de l'arbitrage international, ce qui
explique grosso modo la dualité qui s'observe sur ce plan.
- Une première tendance calquée sur le
schéma présent aux États-Unis d'Amérique,
déresponsabilise les arbitres et leur accorde une large immunité.
Ainsi, les arbitres et les juges étatiques bénéficieraient
sur le plan de la responsabilité, du même régime juridique
étant donné la nature juridictionnelle de la mission qu'ils
accomplissent. Cette tendance, qui s'inscrit dans la logique de la tradition
des pays de droit coutumier que sont les pays de la Common Law, veut
que les arbitres bénéficient de l'immunité de juridiction.
Ils sont ainsi, dans une large mesure, à l'abri des poursuites pour les
décisions prises dans l'exercice de leurs fonctions. Autrement dit, leur
responsabilité ne doit pas être mise en cause pour des actes
directement liés à leur mission juridictionnelle. Toute action en
responsabilité contre un arbitre, allant dans le sens de la mise en
cause "du bien ou mal jugé" de sa décision, doit être
déclarée irrecevable. Cependant cette déresponsabilisation
ne saurait signifier que, nous nous retrouvons dans l'hypothèse d'une
absolution totale de la responsabilité des arbitres, ils ne peuvent
bénéficier d'une véritable immunité couvrant leurs
actes ou leurs omissions. Leur responsabilité ne doit être
engagée qu'en cas de faute lourde, de fraude ou de
dol et non lorsque ce qui leur est reproché, repose directement
sur le contenu de l'acte juridictionnel pour négligence ou
incompétence. Un auteur fait observer sur ce sujet que "même
lorsque l'on tient pour acquis qu'il existe un contrat entre les arbitres et
les parties, il ne s'ensuit pas nécessairement que l'arbitre sera
personnellement responsable envers les parties des dommages causés par
sa négligence ou son incompétence [...]"63(*). Cependant, n'excluant
pas la responsabilité contractuelle et extracontractuelle des arbitres,
ils (les auteurs) estiment que cette responsabilité contractuelle doit
être modérée et adaptée au principe de la
responsabilité contractuelle du fait de la singularité de la
mission de l'arbitre. Les arguments forces qui soutiennent cette tendance ont
été largement développés par une certaine doctrine
qui fait valoir des questions d'ordre personnel et pratique.64(*)
- Si cette thèse ne manque pas de pertinence, on peut
cependant lui opposer l'antithèse selon laquelle, aucune logique ne
permet de dégager les arbitres de leur responsabilité en cas de
négligence, de légèreté ou
d'incompétence.
Tandis que, d'autres professionnels, prestataires de services
tout comme eux en sont exposés et en répondent en toute
légitimité, rien ne justifie la déresponsabilisation des
arbitres, d'où la pertinence des idées soutenues par la
deuxième tendance. Pour les partisans de celle-ci, les arbitres sont des
prestataires de services et ils sont donc tenus de répondre de leurs
négligences et fautes comme n'importe quel professionnel, prestataire de
services. Par conséquent l'évocation de leur immunité,
fût-elle partielle ou totale, couvrant leur responsabilité sur la
base des dommages causés par leur négligence ou
incompétence ne doit pas être de mise.
Quid du droit OHADA et du droit suisse de l'arbitrage
international?
La nature contractuelle de la relation entre les arbitres et
les parties n'est pas remise en cause par la doctrine suisse. Quoique dans la
pratique les arbitres dans ce système jouissent d'une large
immunité65(*)
l'action en responsabilité contre eux n'est pas exclue pour faute
lourde, fraude et dol. Aussi, les limitations aux responsabilités du
juge étatique ne sont pas applicables par analogie aux arbitres.
Cependant, les dispositions du chapitre 12 LDIP, en réduisant la gamme
des voies de recours contre la sentence, semblent de ce fait, accroître
la responsabilité des arbitres dans l'accomplissement de leur mission.
En droit OHADA par contre le codificateur semble éluder la question de
la responsabilité de l'arbitre et c'est sous le prisme de son
immunité que la question est évacuée. Dans ce
système, il faut savoir que l'arbitre rend la sentence en son nom
personnel et non pas au nom du peuple de l'Etat-partie ou des
États-Parties au traité OHADA. Ceci étant,
l'évidence de l'accomplissement par l'arbitre d'une mission
juridictionnelle n'est point contestée. Cependant, la
responsabilité qu'il encourt dans l'exercice de sa mission, obéit
non au régime particulier de la responsabilité des juges
étatiques mais au droit commun. S'inspirant de ce fait des règles
applicables à la responsabilité des mandataires
(responsabilité pour faute prouvée par exemple, le non respect du
délai imparti pour rendre la sentence, arbitre ayant accepté sa
mission malgré une incompatibilité qu'il connaissait,
responsabilité pour faute lourde, responsabilité dolosive etc.).
Aussi, il conviendrait de souligner que, le droit OHADA exonère les
arbitres désignés par la CCJA de toute responsabilité en
leur accordant une immunité totale. Même sur ce plan, force est de
constater que, ni l'AU.A ni le Traité en soi ne contiennent aucune
disposition conférant aux arbitres une quelconque immunité, mais
par contre, dans l'arbitrage institutionnel de la CCJA, l'art. 49 du
traité confère une immunité diplomatique aux seuls
arbitres nommés par la cour. Il va s'en dire qu'ils ne peuvent
être attraits devant une juridiction pour faute même intentionnelle
ou grave commise dans l'exercice de leurs fonctions. En règle
générale, sur le plan du droit applicable, l'immunité des
arbitres ne peut être affirmée que par la loi gouvernant la
procédure arbitrale ou le contrat d'investiture. A bon droit, certains
auteurs de l'arbitrage commercial international affirment que "cette
immunité ne peut être accordée que par l'autorité
publique dans un but d'intérêt général". Ils
ajoutent "qu'en l'absence de convention internationale sur cette question
seuls les droits nationaux peuvent conférer à l'arbitre cette
immunité". Pour d'autres auteurs, "la législation
applicable... peut conférer aux arbitres l'immunité du fait
qu'ils exercent une fonction judiciaire ou quasi-judiciaire [...] c'est une
question d'ordre public qui est de nature à varier d'un Etat à
l'autre".
SECTION II-. L'INSTANCE ARBITRALE
§ I-. L'INSTANCE
ARBITRALE
Lorsque le rapport de droit entre les parties au contrat
s'effrite, il y a lieu de régler le litige afin de parer au plus
pressant à l'altération complète de la situation. C'est
l'objet ultime de l'instance arbitrale qui couvre toute la période du
déroulement de la procédure arbitrale. Celle-ci, court de la
constitution du tribunal arbitral à la sentence rendue. Dans un
arbitrage de DIP, le principe directeur du libéralisme qui gouverne le
droit de l'arbitrage trouve également sa place. On le retrouve
formellement dans les dispositions des deux lois d'arbitrage que nous
étudions. Mais avant, il conviendrait d'aborder la question de la
litispendance telle que prévue par les deux lois d'arbitrage.
A-. LA LITISPENDANCE
DROIT COMPARE
Art. 10 al. 2 AU.A
"L'instance arbitrale est liée dès le moment
où l'une des parties saisit le ou les arbitres conformément
à la convention d'arbitrage, ou, à défaut d'une telle
désignation, dès que l'une des parties engage la procédure
de constitution du tribunal arbitral".
Art. 181 LDIP
"L'instance arbitrale est pendante dès le moment
où l'une des parties saisit le ou les arbitres désignés
dans la convention d'arbitrage ou, à défaut d'une telle
désignation, dès que l'une des parties engage la procédure
de constitution du tribunal arbitral".
------------------------------------------------------
En droit privé, on parle de litispendance lorsque deux
juridictions de même degré ont été concomitamment
saisies du même litige alors qu'elles sont également toutes
compétentes pour connaître de l'affaire. Aussi, lorsque le litige
a été porté devant deux différentes juridictions,
qui plus est de même degré, et qu'il y a un intérêt
à ce qu'elles soient instruites et jugées ensembles, la
litispendance est envisageable. Dans ce cas, il y a lieu de procéder au
dessaisissement de la juridiction saisie en second lieu au profit de l'autre si
l'une des parties le demande ou à défaut d'office.
En droit de l'arbitrage international, la problématique
de la litispendance se pose en termes de détermination du début
de l'instance liant les parties à l'arbitrage. Elle est d'une importance
singulière et se pose à plusieurs égards. D'une part, la
fixation du début de l'instance liant les parties à l'arbitrage
permet par exemple de vérifier le respect par elles du délai
lié à l'exercice d'un droit en l'occurrence, celui fixé
conventionnellement ou légalement pour engager la procédure.
D'autre part, la détermination du début de l'instance liant les
parties permet, au surplus, de déterminer le moment où la cause
est pendante devant le tribunal arbitral. Ceci, dans l'optique de
l'éventualité d'une suspension de la procédure (judiciaire
ou arbitrale) introduite postérieurement entre les mêmes parties
sur le même objet. Enfin, elle peut avoir comme effet la fin de la
prescription ou la péremption des prétentions soumises au
tribunal arbitral, lorsque le droit applicable (celui du fond du litige) lui
confère cet effet.
Pour en revenir au cas de l'étude comparée des
deux textes législatifs objets de notre travail, il y a lieu de dire
que, pour déterminer le moment où l'instance lie les parties
à l'arbitrage, le droit OHADA de l'arbitrage et le droit suisse de
l'arbitrage international distinguent deux conditions.
L'instance est pendante dès lors que, l'arbitre est
désigné dans la convention d'arbitrage et que l'une des parties
le saisit conformément à cette convention d'arbitrage. C'est ce
qu'on infère logiquement des dispositions suivantes :
"l'instance arbitrale est liée dès le moment où l'une
des parties saisit le ou les arbitres conformément à la
convention d'arbitrage [...]" (art. 10 al. 2 AU.A). Idem en droit suisse
de l'arbitrage international où, le texte de l'art. 181 LDIP dispose que
"l'instance arbitrale est pendante dès le moment où l'une des
parties saisit le ou les arbitres désignés dans la convention
d'arbitrage". Cependant, en cas de pluralité d'arbitres et selon
les termes de la convention, la simple saisine de l'un d'entre eux suffit
à lier l'instance. Si par contre cette première condition n'est
pas remplie, les deux lois d'arbitrage prévoient que, l'engagement de la
procédure de constitution du tribunal arbitral suffit à lier les
parties à l'instance arbitrale. En effet, la non-désignation
conventionnelle de l'arbitre ou des arbitres emportant leur saisine
subséquente, en cas de litige, suffit pour que la seconde condition soit
remplie. C'est tout le sens des dispositions des articles 10 al. 2 in
fine AU.A et 181 in fine LDIP. La formulation est identique dans
les deux textes " [...] ou, à défaut d'une
telle désignation, dès que l'une des parties engage la
procédure de constitution du tribunal arbitral". Dans cette
hypothèse, les parties sont liées à l'instance arbitrale
dès l'engagement de la procédure de constitution du tribunal
arbitral par l'une des parties en vertu des dispositions subsidiaires des
articles 5 al. 2 AU.A et 179 al. 2 LDIP relatives à la constitution du
tribunal arbitral par le juge d'appui. Somme toute, il y a lieu de faire
remarquer que les dispositions des deux textes sur la question, à la
lecture de leurs contenus respectifs sur la litispendance (art. 10 al. 2 AU.A
et art. 181 LDIP) sont quasi identiques. Une remarque qu'on ne saurait passer
outre dans les deux systèmes porte sur le fait que, dans les deux cas,
l'instance est liée uniquement dès l'engagement de la
procédure en désignation des arbitres sans que
l'impériosité d'une demande d'arbitrage adressée à
la partie adverse soit exigée, de la partie demanderesse.
B-. LA PROCEDURE ARBITRALE SELON
L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP
Avant tout, il convient de faire un petit rappel de la
distinction qui existe entre les règles applicables à l'instance
arbitrale et la loi d'arbitrage. En effet, les règles applicables
à l'instance arbitrale regroupent l'ensemble des normes qui
régissent la marche de la procédure à suivre devant le
tribunal arbitral. Pour être plus précis, ces normes ne prennent
pas en compte la validité de la convention d'arbitrage non plus le
rapport entre la juridiction arbitrale et la juridiction étatique
c'est-à-dire, les voies de recours ouvertes devant celles-ci. Par
ailleurs, la notion de loi d'arbitrage est beaucoup plus vaste et regroupe
aussi bien les conditions de validité de la convention d'arbitrage, le
contrôle par les tribunaux étatiques de l'activité des
arbitres, l'arbitrabilité du litige, l'assistance du juge
étatique, que les règles applicables à l'instance
arbitrale. Ceci étant, sans pour autant nous déconnecter de
l'étude comparée des deux lois d'arbitrage, il est important de
relever que si les parties ont choisi l'AU.A et le chapitre 12 comme loi
procédurale, le principe d'autonomie dont nous avions fait cas ne
concernera que les règles applicables à l'instance arbitrale.
Quelle est donc l'importance du choix par les parties elles-mêmes de la
loi procédurale ?
La primauté du choix par les parties de la loi
régissant la procédure arbitrale est d'une importance capitale.
En effet, les parties étant au centre de l'arbitrage leur choix
influencera, sans aucun doute, certaines questions d'importance capitale pour
le règlement privé de leur litige notamment.
Ainsi, toutes les questions relatives à la constitution
du tribunal arbitral, la compétence des arbitres, les questions
relatives aux différents délais, la communication des
pièces, les mesures provisoires et conservatoires, la conduite de
l'arbitrage proprement dit, l'existence, la validité, le
caractère définitif et l'applicabilité de la sentence,
seront influencées par le choix des parties. Cette précision
était d'importance pour la suite du développement.
1-. LE LIBERALISME :
PRINCIPAL VECTEUR PROCEDURAL EN MATIERE D'ARBITRAGE INTERNATIONAL
DROIT COMPARE
Art. 14 AU.A
"Les parties peuvent directement ou par
référence à un règlement d'arbitrage régler
la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à
la loi de procédure de leur choix".
Art. 182 LDIP
"Les parties peuvent directement ou par
référence à un règlement d'arbitrage régler
la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à
la loi de procédure de leur choix".
--------------------------------------------------------
Le droit de l'arbitrage, faut-il le rappeler, est
dominé par le principe du libéralisme qui est
particulièrement affirmé pour ce qui est de la procédure
à suivre par les arbitres. Mais cependant, certaines limites lui sont
apportées par les législations modernes sur l'arbitrage.
En effet, s'il est un principe sur lequel on ne saurait
transiger en droit de l'arbitrage en général et celui de
l'arbitrage international en particulier, c'est celui de l'autonomie de la
volonté des parties, de leur liberté procédurale. Ce
principe est le fondement de la nature conventionnelle de l'arbitrage en tant
que méthode privée de règlement des litiges. Ainsi, la
détermination de la procédure à suivre dans un arbitrage
international est donc gouvernée par le principe directeur de
l'autonomie de la volonté des parties à titre principal et,
à titre subsidiaire, la volonté des arbitres. Ce principe est non
seulement pris en compte par les législations nationales sur l'arbitrage
interne et international mais aussi par les règlements des institutions
et organismes internationaux d'arbitrage. Au titre du droit comparé, on
remarque que la loi-type l'adopte lorsqu'elle énonce en son art. 19 que
"sous réserve des dispositions de la présente loi, les
parties sont libres de convenir de la procédure à suivre par le
tribunal arbitral". Il en est de même du NCPC du droit
français qui, formule en son art. 1494 le principe en ces termes :
"la convention d'arbitrage peut directement ou par référence
à un règlement d'arbitrage, régler la procédure
à suivre dans l'instance arbitrale; elle peut aussi soumettre celle-ci
à la loi de procédure qu'elle détermine". Lorsqu'on
sait que, par tradition juridique, le respect de ce principe "d'autonomie de
volonté" se situe dans le prolongement du protocole de Genève de
1923 qui dispose que "la procédure de l'arbitrage, y compris la
constitution du tribunal arbitral, est réglée par la
volonté des parties" ; et de la convention de New York au terme de
laquelle "la reconnaissance et l'exécution de la sentence seront
refusées... si la procédure d'arbitrage n'a pas été
conforme à la convention des parties", il est évident que
l'AU.A et le chapitre 12 LDIP n'échappent guère à
l'application de ce principe de base du droit de l'arbitrage.
Les deux lois d'arbitrage font l'unanimité dans leur
formulation de ce principe puisque, les dispositions du droit suisse en son
art. 182 LDIP et du droit OHADA en son art. 14 AU.A sont, en la matière,
identiques.
Elles disposent toutes deux que "les parties peuvent
directement ou par référence à un règlement
d'arbitrage régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi
soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix". De
la lecture et de la compréhension de cet article, il s'ensuit que les
parties disposent de la possibilité de réglementer la
procédure arbitrale dans deux hypothèses :
- Les parties ont l'entière liberté de
définir directement la démarche procédurale. Dans ce cas,
elles fixent elles-mêmes les modalités de la procédure lors
de la conclusion de la convention d'arbitrage ou postérieurement, ces
modalités s'imposeront aux arbitres qui les auront acceptées en
même temps que leur mission.
- Les parties par référence soit à un
règlement d'arbitrage ou soit par référence à une
loi nationale, à une loi de procédure civile régissant la
procédure devant les tribunaux étatiques ou encore à une
loi d'arbitrage étrangère, choisissent la procédure que
les arbitres devront suivre. Dans ce cas, c'est par renvoi de la convention que
le choix des règles procédurales s'opère. Ce choix
préludera la démarche procédurale à suivre par le
tribunal arbitral.
Qu'elle soit directe ou indirecte la règle d'autonomie
est d'application, c'est-à-dire que les parties sont totalement libres
d'indiquer dans leur convention leur choix pour une loi applicable à la
procédure différente de la loi régissant le fond du litige
ou le contrat principal. Ce choix lorsqu'il est exprimé clairement, il
se doit d'être respecté par les arbitres.
Cependant, si dans la convention on ne retrouve pas ces deux
hypothèses, il revient au tribunal arbitral de déterminer les
règles procédurales appropriées. C'est l'hypothèse
de la détermination de la procédure arbitrale par les arbitres.
L'acte uniforme en droit OHADA le précise bien en ces termes "[...]
faute d'une telle convention, le tribunal arbitral peut procéder
à l'arbitrage comme il le juge approprié" (art. 14 al. 2).
Le droit suisse formule le même principe mais en des termes
différents. L'art.182 al. 2 LDIP dispose que "[...] si les parties
n'ont pas réglé la procédure, celle-ci sera, au besoin,
fixée par le tribunal arbitral, soit directement, soit par
référence à une loi ou à un règlement
d'arbitrage". Dans cette dernière alternative, c'est la
volonté du tribunal arbitral qui est ainsi mis en exergue soit
directement, soit indirectement (par référence à un
règlement d'arbitrage ou à une loi étatique). Ce dernier,
en principe, n'est pas tenu de suivre la procédure édictée
pour les tribunaux étatiques même s'il officie en qualité
d'aimable compositeur.
Une remarque fortement intéressante pour cette
étude comparée mérite notre attention. Dans sa
formulation, les dispositions du droit OHADA sur cette question paraissent plus
libérales que ne le sont celles du chapitre 12 LDIP. En effet, la
formulation "comme il le juge approprié" du droit communautaire
OHADA donne au tribunal arbitral la totale liberté de
déterminer par défaut les règles procédurales.
Ainsi, l'AU.A offre au tribunal la possibilité de pouvoir opérer
son choix dans un large éventail, dans un registre plus vaste que ne lui
offre le chapitre 12 LDIP. Le texte tel qu'il est formulé offre une
grande flexibilité au tribunal arbitral lui permettant de s'en remettre
par exemple soit à une procédure ad hoc, soit à un
règlement arbitral institutionnel ou non, soit à une loi de
procédure civil ou non de son choix ou soit carrément,
d'élire les règles procédurales qu'il juge
appropriées. C'est le cas notamment lorsque le tribunal arbitral s'en
remet par exemple aux règles de l'International Bar Association quant
aux preuves (IBA). Le répondant à cette hypothèse en droit
suisse de l'arbitrage international peut se lire dans la formulation "au
besoin" du texte de l'art. 182 al. 2. Tout peut porter à croire
que, la référence à un ensemble de normes
préétablies comme nous le propose le texte du chapitre 12 LDIP
"par référence à une loi ou à un
règlement d'arbitrage" restreint la marge de manoeuvre du
tribunal.
Le tribunal arbitral dans ce cas, serait-il astreint dans son
choix à l'alternative "loi / règlement
d'arbitrage" ? En réalité, la liberté du
tribunal n'est pas limitée à l'adoption d'un règlement de
procédure préexistant ou d'une loi quelconque. Tout comme
l'autonomie des parties, celle du tribunal arbitral, par défaut, est
sans limite et les dispositions du chapitre 12 LDIP ne devraient recevoir une
interprétation restrictive. D'une manière générale,
la pratique admet que le tribunal arbitral édicte par le truchement
d'une ordonnance de procédure, des règles applicables aux points
focaux de la procédure arbitrale, quitte à pouvoir au fur et
à mesure du déroulement de l'arbitrage, adapter de nouvelles
règles de procédure aux nécessités de l'instance.
C'est en substance ce que nous rappelle J-F. POUDRET et S. BESSON dans
l'assertion suivante : "les arbitres n'ont pas l'obligation de
définir d'emblée toutes les règles gouvernant l'instance
arbitrale et peuvent édicter des normes au fur et à mesure du
déroulement de la procédure en fonction des difficultés
qui se présentent à eux"66(*). Une autre admission, non pas des moindre, de la
pratique internationale de l'arbitrage, dans le cadre de la
détermination de la loi procédurale, voudrait que, aussi bien les
parties que le tribunal se référent à l'usage de la loi de
référence, laquelle permet d'arrêter les directives de
procédure en s'inspirant de tel règlement d'arbitrage ou de telle
loi de procédure. Toutes ces possibilités sont bien
évidemment admissibles dans les systèmes OHADA et suisse sur le
fondement du contenu des deux lois d'arbitrage.
Pour en revenir à l'hypothèse de la
détermination de la procédure arbitrale par les arbitres, il est
clair que c'est le défaut de la convention qui offre cette
possibilité au tribunal arbitral. En effet, si les parties n'ont rien
prévu, c'est-à-dire le défaut d'une telle
définition n'emporte pas systématiquement compétence du
tribunal arbitral pour la détermination de la norme procédurale
appropriée. Celui-ci doit rechercher dans la volonté des parties,
les indices qui permettront de déterminer cette loi. Même si dans
les deux lois d'arbitrage on ne retrouve pas cette hypothèse de
recherche d'indices dans la volonté des parties, il est
nécessaire de souligner que la pratique de l'arbitrage l'admet et la
consacre.
Le problème se corse lorsqu'en dépit de la
recherche d'indices dans la volonté des parties d'une part et, le
défaut du tribunal arbitral d'autre part, on ne parvient pas à
dégager la loi applicable à la procédure. Dans ce cas,
quel droit faudra-t-il appliquer à la procédure ?
Un élément de réponse à cette
question cruciale, qu'il est difficile de retrouver dans les lois d'arbitrage
que nous étudions, peut être recherché dans les conventions
internationales. En effet, dans l'énonciation des motifs de refus de
reconnaissance et d'exécution de la convention de New York, il y est
stipulé à l'art. V al. 1 b que "la reconnaissance et
l'exécution de la sentence ne seront refusées [...] que si cette
partie fournit à l'autorité compétente du pays où
la reconnaissance et l'exécution sont demandées la preuve
[...] que la constitution du tribunal arbitral ou la procédure
d'arbitrage n'ait pas été conforme à la convention des
parties ou, à défaut de convention, à la loi du pays
où l'arbitrage a eu lieu". La Convention de New York affirme donc,
une alternative dans laquelle la référence à la loi du
siège n'est que supplétive. Ce n'est qu'à défaut
d'indication par les parties à titre principal et, les arbitres à
titre subsidiaire de la loi procédurale, qu'il faut se
référer à la loi du lieu de l'arbitrage. La loi
d'arbitrage du siège vient donc suppléer au défaut
d'indication des parties et des arbitres et devient de ce fait la loi de
l'arbitrage, contenant aussi, de ce simple fait, les dispositions applicables
à l'instance arbitrale.
Nonobstant ce libéralisme, dans la
détermination de la loi procédurale reconnu aux parties à
titre principal et aux arbitres à titre subsidiaire, le principe de
l'autonomie procédurale connaît aussi, un certain nombre de
restrictions ou limites que l'on retrouve dans presque toutes les
législations sur l'arbitrage. L'AU.A et le chapitre 12 LDIP n'en sont
pas du reste.
2-. LES LIMITES A L'AUTONOMIE
PROCEDURALE EN DROIT OHADA ET SUISSE
Le but ultime du procès arbitral étant de rendre
une sentence qui à terme sera exécutoire, les principes
directeurs d'un procès civil lui sont bien évidemment
applicables. Ainsi, les parties à titre principal et les arbitres
à titre subsidiaire, en dépit de leur liberté de choix de
la norme procédurale, sont limités dans la pratique de
l'arbitrage international par, le respect des droits procéduraux
fondamentaux sans lesquels l'arbitrage basculerait dans l'arbitraire. Ces
limites, on les retrouve aussi dans les dispositions des articles 9 AU.A et 183
al. 3 LDIP. Notons que, l'autonomie en matière procédurale trouve
aussi, de toute manière, ses autres limites dans les dispositions
impératives des lois d'arbitrage du siège.
En droit OHADA, les limitations à l'autonomie
privée des parties et des arbitres se trouvent disséminées
de manière éparse dans l'AU.A (art. 9, 10 et 14). Mais
qu'importe ! La loi fait du respect des droits procéduraux
fondamentaux, la condition avant-gardiste de la liberté privée
des parties et des arbitres en matière procédurale. Quelles sont
donc ces limitations prévues par l'AU.A.
Une première limite à l'autonomie des parties
ou des arbitres dans la détermination des règles
procédurales nous est donnée dans les dispositions de l'art. 9
AU.A. Tout comme la loi type de la CNUDCI en son art. 18, l'AU.A en son art. 9
dispose que "les parties doivent être traitées sur un pied
d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de
faire valoir ses droits". Dans la formulation de cette disposition sont
mises en évidence deux règles:
- la règle de l'égalité de traitement
entre les parties. En effet, l'idée que les parties soient
traitées sur un pied d'égalité est au coeur de tous les
systèmes judiciaires et juridictionnels, et l'arbitrage en tant que
système juridictionnel de règlement des litiges, en dépit
de son caractère privé, n'échappe pas à
l'application de ce principe.
- la règle qui porte sur le fait que, les parties
doivent pouvoir faire valoir leurs prétentions sans entrave aucune.
Cette règle relève du souci d'équité dans le
traitement des parties, par rapport à la formulation des questions de
fait et de droit qu'elles peuvent soumettre à l'examen du tribunal
arbitral.
De l'idée du Prof. P. Meyer, ces deux règles
cumulées se rapprochent du principe du contradictoire visé par
l'art. 26 AU.A. Nous ne contredirons pas ce rapprochement dans la mesure
où, le principe du contradictoire qui suppose que les deux parties
aient, de manière égale, été mises en mesure de
faire valoir leurs droits, ne contrarie en rien les dispositions de l'art. 9
AU.A. Principe que l'on retrouve aussi en droit suisse de l'arbitrage
international.
Une deuxième limite, porte sur le fait qu'il est
interdit aux arbitres de "[...] fonder leur décision sur les moyens
qu'ils auraient relevé d'office sans avoir au préalable
invité les parties à présenter leurs observations"
(art. 14 al. 6 AU.A). Se situant dans la suite logique de la continuité
des applications des règles de l'art. 9 AU.A précédemment
citées, cette disposition constitue aussi, une condition restrictive
à la portée de l'autonomie procédurale. À ce titre,
elle fait partie de l'ordre public procédural et son non-observation
devra entraîner l'annulation de la sentence ou le refus de sa
reconnaissance et de son exécution.
La même lecture peut être faite au sujet de la
règle de l'art. 14 al. 5 AU.A qui, prescrit aux arbitres de "retenir
dans leur décision les moyens, les explications ou les documents
invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont
été à même d'en débattre
contradictoirement". Cette règle est une des interprétations
du droit d'être entendu en procédure contradictoire.
Une dernière limite consiste dans la violation par le
tribunal arbitral des dispositions de l'art. 9 AU.A. En effet, tout tribunal
arbitral qui accepterait la procédure qui prévoirait l'audition
d'une seule partie violerait les règles contenues dans les dispositions
de l'art. 9 AU.A. Autrement dit, le tribunal arbitral ne saurait transgresser
le principe du traitement égalitaire en auditionnant qu'une seule partie
au préjudice de l'autre. De même les parties, fort du principe de
l'égalité de traitement que la loi leur reconnaît, doivent
disposer du même délai dans l'examen des pièces et
mémoires pour préparer leurs moyens de fait et de droit.
Quid du chapitre 12 LDIP ?
Le chapitre 12 LDIP ne disait pas autres choses lorsqu'il
affirmait à son art. 182 al. 3 LDIP que "[...] le tribunal arbitral
doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit
d'être entendu en procédure contradictoire". Cette
disposition à elle seule, résume si bien toutes les exigences de
respect des droits fondamentaux procéduraux, lorsqu'il s'agit de
déterminer les limites à la liberté privée des
arbitres et des parties dans une instance arbitrale en matière
procédurale. En dépit du caractère laconique du texte de
la loi suisse sur la question, il est fort aisé de comprendre que, la
formulation "droit d'être entendu en procédure
contradictoire" est une séquence de phrase qui contient deux
différentes notions mais tout de même complémentaires. Il
s'agit du droit d'être entendu et la procédure du
contradictoire. Le droit d'être entendu est une notion
très vaste qui n'a pas une portée indépendante par rapport
au droit au traitement égalitaire entre les parties dont le texte fait
d'ailleurs mention67(*).
Quant à la procédure du contradictoire, elle constitue
une garantie qui permet à chaque partie de se déterminer sur les
moyens de fait et de droit de son adversaire. Elle permet aussi, d'examiner et
de discuter les preuves rapportées par lui et de les réfuter par
ses propres preuves. La procédure contradictoire constitue, pour ainsi
dire, une règle relevant de l'ordre public procédural et donc,
son non-respect devrait, sans nul doute, être un motif d'annulation de la
sentence ou le refus de sa reconnaissance et de son exécution. En
résumé, les deux lois d'arbitrage que nous collationnons
formulent toutes, de manière fort différente, le principe de
l'autonomie de la volonté des parties à titre principal et des
arbitres à titre subsidiaire dans la détermination de la norme
procédurale. Cependant, le respect des droits procéduraux
fondamentaux seul gage du succès d'une justice équitable
constitue les limites admises par l'AU.A et le chapitre12, limites sans
lesquels la justice arbitrale basculerait dans l'arbitraire.
B-. LES MESURES PROVISOIRES OU
CONSERVATOIRES ET LES MESURES PROBATOIRES
Il est question ici pour nous, d'analyser les mesures qui dans
un arbitrage de DIP permettent la conservation des preuves voire l'objet sur
lequel porte le différend. Aussi, nous passerons en revue la preuve en
elle-même et son régime juridique envisagés sous l'emprise
de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP.
1-. LES MESURES PROVISIONNELLES OU
CONSERVATOIRES
DROIT COMPARE
Art. 13 al. 4 AU.A
"Toutefois, l'existence d'une convention d'arbitrage ne
fait pas obstacle à ce qu'à la demande d'une partie, une
juridiction, en cas d'urgence reconnue et motivée ou lorsque la mesure
devra s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA, ordonne des
mesures provisoires ou conservatoires, dès lors que ces mesures
n'impliquent pas un examen du litige au fond, pour lequel seul le Tribunal
arbitral est compétent".
Art.183 LDP
1) "Sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut
ordonner des mesures provisionnelles ou des mesures conservatoires à la
demande d'une partie.
2) Si la partie concernée ne s'y soumet pas
volontairement, le tribunal arbitral peut requérir le concours du juge
compétent. Celui-ci applique son propre droit.
3) Le tribunal arbitral ou le juge peuvent subordonner les
mesures provisionnelles ou les mesures conservatoires qu'ils ont
été requis d'ordonner à la fourniture de
sûretés appropriées".
------------------------------------------------------
Aussi bien l'AU.A en droit OHADA que le chapitre 12 LDIP en
droit suisse, ne donnent aucune définition des notions de mesures
provisionnelles et conservatoires. Cette lacune, comme le disent si bien P.
LALIVE, J-F POUDRET et C. REYMOND, peut trouver une explication dans le fait
que l'évocation de ces deux mesures dans les textes et la pratique de
l'arbitrage de DIP, constitue "un domaine nouveau pour la pratique
arbitrale, pour lequel on ne peut aujourd'hui qu'esquisser des
solutions"68(*). Pour
la définition de ces mesures nous esquisserons donc des solutions.
Les mesures conservatoires préservent une situation ou
les droits des parties, elles sont destinées à sauvegarder soit
les preuves, soit l'objet litigieux en attendant qu'une décision sur le
fond soit rendue. Les mesures provisoires quant à elles, elles peuvent
soit avoir un but simplement conservatoire, soit viser à créer ou
à modifier un certain état de fait, en vue d'assurer une
exécution effective de la sentence, ou de limiter les effets
négatifs que peut provoquer l'existence et la durée du
procès arbitral. Ces dernières mesures, se caractérisent
non pas par leur objet mais, par leur effet et de ce fait, elles ne lient pas
l'autorité qui les a rendues a fortiori l'arbitre ou le juge
appelé à statuer sur le fond69(*). Ceci étant, la double question
récurrente qui se pose d'abord ici, est celle de la compétence du
tribunal arbitral de DIP à pouvoir ordonner de telles mesures et, le cas
échéant, la reconnaissance et l'exécution de ces mesures
du tribunal conformément à la réglementation de
l'arbitrage international OHADA et suisse.
a-. LA COMPETENCE DES JURIDICTIONS ARBITRALES ET/OU
ETATIQUES
D'une manière générale, les mesures
conservatoires et provisoires peuvent être prises par le tribunal
arbitral de DIP. Au titre du droit comparé, presque toutes les
réglementations modernes sur le droit de l'arbitrage international
autorisent le tribunal arbitral à prendre, s'il le juge
nécessaire, ces mesures en ce qui concerne l'objet du litige. Il en est
ainsi de l'art. 26 du règlement CNUDCI, de l'art. 17 de la loi-type
CNUDCI, du § 1041 al. 1 ZPO en droit allemand, de l'art.1696 al. 1 CJB en
droit belge, et l'art. 25 al. 4 SU en droit suédois, pour ne citer que
ces textes. En droit positif français, le codificateur ne prévoit
aucune disposition sur la prise de telles mesures dans un arbitrage de DIP,
seules les références jurisprudentielles et doctrinales et qui,
d'ailleurs, ont fait l'objet de controverses,70(*) légitiment la prise par le tribunal arbitral
de telles mesures. Toutefois, le code de procédure civil italien est
très restrictif et formel sur l'interdiction qui est faite aux arbitres
d'autoriser des saisies et d'autres mesures conservatoires (art. 818 CPCI).
Les deux lois d'arbitrage que nous étudions,
n'échappent pas à la généralisation de la tendance
admettant la compétence du tribunal arbitral à ordonner de telles
mesures. En effet, les réglementations OHADA et suisse de l'arbitrage
international reconnaissent toutes deux, une compétence au tribunal
arbitral en matière de mesures provisionnelles et conservatoires.
Cependant, elles procèdent différemment aussi bien dans la
formulation et le contenu de telles mesures que dans les conditions d'exercice
de ces pouvoirs par les tribunaux arbitraux et étatiques au besoin.
En droit suisse de l'arbitrage international, l'art. 183 LDIP,
contrairement au droit concordataire, donne au tribunal arbitral de DIP
l'autorisation d'ordonner des mesures provisionnelles ou conservatoires sauf
stipulation contraire. La formulation d'une telle autorisation légale
est claire "sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut ordonner
des mesures provisionnelles ou des mesures conservatoires à la demande
d'une partie". Si nous convenons de par cette disposition que, les parties
peuvent exclure par convention ce droit légalement accordé au
tribunal arbitral, ce dernier quant à lui ne peut exercer ce pouvoir
légal que, si la demande est formulée par une des parties
à l'arbitrage. Cependant, en dépit de sa compétence, le
tribunal arbitral n'est pas autorisé à ordonner toutes sortes de
mesures. Il en en ainsi, des mesures provisoires liées à une
exécution forcée comme la saisie conservatoire, le
séquestre des biens. Il a besoin pour ce faire, du concours d'une
autorité qui détient l'imperium notamment le juge
étatique. Dans ce cas, il sera légitimé dans sa
démarche par les dispositions de l'art. 184 LDIP qui conclut que "si
l'aide de l'autorité judiciaire est nécessaire dans d'autres cas,
on requerra le concours du juge du siège du tribunal arbitral".
La prise de ces mesures en droit OHADA, n'est pas explicite
dans la formulation du texte de l'art. 13 al. 4 AU.A. En effet, ce texte tel
qu'il est formulé, laisse entrevoir l'interprétation selon
laquelle, l'AU.A ne réserve que la compétence de la juridiction
étatique pour l'octroi de telles mesures.
Ce qui peut paraître vraisemblable dans la mesure
où, aucune trace d'une allusion à la possibilité pour un
tribunal arbitral de rendre de telles mesures, n'est observable dans l'AU.A.
Mais dans ce système rien, semble-t-il, ne permet de dénier au
tribunal arbitral le pouvoir d'ordonner de telles mesures. Même si aucune
disposition expresse de l'AU.A ne nous permet d'inférer une telle
compétence du tribunal arbitral, la doctrine la lui reconnaît et y
affirme d'ailleurs, une compétence concurrente avec les juridictions
étatiques71(*). En
effet, le contenu du texte de l'art. 13 al. 4 AU.A reconnaît aux parties
le pouvoir de solliciter l'intervention du juge étatique ou juge d'appui
pour prendre de telles mesures. La lecture entre les lignes de cette
disposition, nous amène à conclure sur ce point que, la
compétence reconnue à l'arbitre n'est pas exclusive de celle du
juge. Les parties ont, en dépit de l'existence d'une convention
d'arbitrage, la faculté de saisir directement le juge d'appui sans avoir
l'obligation de recourir d'abord au tribunal arbitral. C'est tout le sens que
donne le droit OHADA aux dispositions de l'art. 13 al. 4 de l'AU.A
"l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle à ce
qu'à la demande d'une partie, une juridiction [...] ordonne des mesures
provisoires ou conservatoires". Ainsi, il est aisé de comprendre
que l'AU.A en droit OHADA, bien qu'accordant au tribunal arbitral de telles
compétences, évite à faire de sorte que la
compétence du juge soit résiduelle, c'est-à-dire que son
intervention ne soit requise que si la protection arbitrale se
révèle insuffisante. Sa compétence pour prendre des
mesures provisoires et conservatoires est alors concurrente de celle du juge et
non subsidiaire. Si la tendance majoritaire admet, du point de vue de la loi
et de la jurisprudence, que le tribunal arbitral peut ordonner des mesures
conservatoires et provisoires, la doctrine est presque unanime à
reconnaître une compétence concurrente du juge, nécessitant
une "action complémentaire des juges et des arbitres en vue
d'assurer l'efficacité de l'arbitrage commercial international"72(*). D'où
l'impérieuse nécessité de clarifier les pouvoirs
respectifs des juges et des arbitres en cette matière. L'enjeu à
notre avis, d'une telle compétence concurrente serait de ne pas priver
des procédures d'urgence, les parties à une convention
d'arbitrage et, la doctrine le détaille si bien. Par rapport au droit
suisse de l'arbitrage international, bien évidemment le chapitre 12 LDIP
n'évoque pas la question de la compétence des tribunaux
étatiques en matière de mesures provisionnelles et
conservatoires. La doctrine suisse, quant à elle, est
controversée sur la question de la compétence concurrente. En
effet, une opinion minoritaire de cette doctrine considère que, la
compétence du juge en la matière cesse dès lors que le
tribunal arbitral est constitué. Fort heureusement, la doctrine
majoritaire admet une compétence concurrente pleine aux juridictions
arbitrales et étatiques73(*). En droit comparé, il y a lieu de faire
remarquer que, le principe de la compétence concurrente est
consacré par plusieurs dispositions légales et conventionnelles
et, est "reconnu par la jurisprudence et la doctrine des différents
États et rappelé dans de nombreuses sentences
arbitrales"74(*). Le
droit OHADA de l'arbitrage, tout comme la plupart des législations sur
l'arbitrage, reconnaît donc aux juridictions étatiques et
arbitrales une compétence en la matière et, du coup ne prive pas
les parties, du droit de recourir aux procédures d'urgences
prévues à cet égard devant les juges étatiques.
Cependant, deux conditions prévalent dans ce
système à cette compétence des juridictions
étatiques: l'urgence et l'examen du litige au fond.
L'urgence :
En effet, le juge étatique ne peut prendre une mesure
provisoire ou conservatoire que s'il y a une urgence avérée et
motivée. L'urgence en matière d'arbitrage, ne doit se justifier
que lorsque le tribunal est déjà formé et saisi du fond du
litige mais ne peut pas prendre les mesures qui s'imposent. À la
condition d'urgence, s'adjoint celle du lieu de l'exécution de la
mesure. En effet, si la mesure doit s'exécuter dans un Etat partie au
Traité OHADA, le caractère urgent prend tout son sens. Autrement
dit, la condition d'urgence est valable. Ce qui veut dire, qu'en dehors de la
compétence du tribunal arbitral d'ordonner des mesures provisoires en
droit OHADA, la loi reconnaît aux juridictions étatiques une
compétence concurrente qu'à la seule condition qu'il y ait une
mesure urgente avérée et motivée exécutable dans un
Etat partie et non à l'extérieur de l'espace OHADA. A
contrario, si la mesure devra s'exécuter dans un Etat non
partie à l'OHADA, un Etat tiers par exemple, la mesure urgente n'est
plus recevable. Mais cela n'empêche pas qu'une partie demande à
une juridiction, en dépit de l'existence de la convention, la prise de
mesures conservatoires ou provisoires. C'est ce que semble nous confirmer P.
Meyer, qui pense que "la condition relative à l'urgence est
écartée lorsque la mesure provisoire ou conservatoire devra
s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA".
L'examen du litige au fond :
La deuxième condition veut que ces mesures n'impliquent
pas un examen du litige au fond. En effet, chaque fois que l'octroi des mesures
suppose un examen au fond, le juge étatique doit se reconnaître
incompétent et seul l'arbitre peut ordonner ladite mesure. Il s'agit
ici, de la conséquence à l'incompétence des juridictions
étatiques de statuer au fond en cas d'existence d'une convention
d'arbitrage. Principe que plusieurs législations sur l'arbitrage
international consacrent expressément (art. 13 al. 1 AU.A).
En résumé, le pouvoir du juge d'ordonner des
mesures conservatoires et provisoires, qui ne doit pas être confondu au
rôle d'assistance du juge, conjecture la possibilité pour les
parties de recourir à sa compétence sans renoncer au
bénéfice de la convention d'arbitrage. C'est tout le sens qu'a
voulu donner le législateur OHADA à la compétence du juge
en matière de mesures urgentes, nonobstant la convention d'arbitrage
" toutefois, l'existence d'une convention d'arbitrage
[...]".
Notons toutefois que, les mesures provisionnelles si elles
sont admises, elles ne peuvent être ordonnées que dans les limites
des demandes dont l'arbitre est saisi. Il en est également de même
du juge sollicité dont la compétence
est non seulement limitée à la demande des parties (aux mesures
provisoires) mais il doit aussi veiller à ne pas
prétériter à l'exclusivité accordée à
l'arbitre par la loi quant à son pouvoir de statuer sur le fond du
litige. D'où tout le sens de la seconde condition dont l'art. 13 al. 4
de l'AU.A fait cas en droit OHADA.
b-. LA PROBEDURE
Du point de vue procédural, les deux textes de loi ne
disent rien quant à la procédure à suivre par les parties
ou par les arbitres. À notre avis, la démarche prescrite par les
dispositions des articles 14 AU.A en droit OHADA et 182 LDIP en droit suisse de
l'arbitrage international seront applicables.
Si les lois de l'arbitrage, ici étudiées,
reconnaissent au tribunal arbitral de DIP la faculté de rendre des
mesures provisoires et conservatoires, la décision rendue par le
tribunal dans ce cadre, ne doit pas être assimilée à une
sentence au point d'en exiger un exequatur en cas d'insoumission.
Cette décision est une ordonnance qui n'est pas directement
exécutoire, elle ne peut pas non plus être munie d'une
déclaration de force exécutoire par le juge selon la
procédure appropriée. L'efficacité de telles mesures
ordonnées, en vertu des dispositions des articles 183 LDIP et 13 al. 4
AU.A doit être limitée. Comme on peut le noter dans le texte du
chapitre 12 LDIP, en cas de non soumission volontaire à l'ordonnance, le
tribunal arbitral (et non la partie bénéficiaire de la mesure
arbitrale) ne peut que requérir le concours du juge étatique.
C'est tout le sens que donne le droit suisse de l'arbitrage international
à l'al. 2 de l'art. 183 LDIP "si la partie concernée ne s'y
soumet pas volontairement, le tribunal arbitral peut requérir le
concours du juge compétent. Celui-ci applique son propre droit". Le
juge compétent ici, peut ne pas être le juge du siège du
tribunal arbitral mais le juge suisse compétent, ratione loci
et ratione materiae, pour ordonner les mesures provisionnelles
à l'égard de la partie ou du bien visé par la
décision de l'arbitre. Il faut ici aussi regretter que, l'assistance du
juge étatique en cas de non soumission à l'ordonnance du tribunal
arbitral concernant ces mesures, n'ait pas été
évoquée par le droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence l'AU.A.
Cependant, on peut légitimement imaginer que, cette assistance peut
être requise sur la base des dispositions de l'art.14 al. 7 de l'AU.A qui
dispose que "si l'aide des autorités judiciaires est
nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral
peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge
compétent dans l'Etat-partie". Ainsi, si la requête est
fondée sur la demande de mesures destinées, à la
production ou la conservation de certaines preuves utiles au procès
arbitral ou menacées de disparition, l'assistance du juge d'appui dans
ce cas, est nécessaire et légitimée sur la base des
dispositions légales précitées.
2-. LA PROBLEMATIQUE DES
PREUVES EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL
DROIT COMPARE
Art. 14 al. 4 et 7 AU.A
4. "Les arbitres peuvent inviter les parties à leur
fournir les explications de fait, et à leur présenter, par tout
moyen légalement admissible, les preuves qu'ils estiment
nécessaires à la solution du litige.
7. Si l'aide des autorités judiciaires est
nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral
peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge
compétent dans l'Etat-partie".
Art 184 LDIP
1) "Le tribunal arbitral procède lui-même
à l'administration des preuves.
2) Si l'aide des autorités judiciaires de l'Etat
est nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal
arbitral, ou les parties d'entente avec lui, peuvent requérir le
concours du juge du siège du tribunal arbitral; ce juge applique son
propre droit".
--------------------------------------
Dans un arbitrage de DIP, la preuve a pour objet de couvrir
tout élément d'information qu'une partie invoque à l'appui
de sa prétention ou comme moyen de défense. Les lois d'arbitrage,
il faut le remarquer, dans leur quasi majorité (et ce ne sont pas les
deux textes légaux que nous étudions qui font exception) ne
réglementent pas de façon exhaustive, la problématique de
l'administration de la preuve devant le tribunal arbitral. Celle-ci
soulève indubitablement, les questions relatives au choix des modes de
preuves, à leur admissibilité, au pouvoir d'appréciation
du juge et à la charge de la preuve.
Dans un arbitrage de DIP, c'est prioritairement l'autonomie
des parties et subsidiairement celle du tribunal arbitral qui gouverne
l'admissibilité des moyens de preuve et la procédure
d'administration de ces preuves. Les parties sont ainsi libres d'administrer
la preuve d'un acte par tous les moyens. Cette liberté des parties,
trouve son fondement dans le principe d'autonomie qui gouverne l'arbitrage en
général. La problématique de la preuve relevant des
questions de procédure, elle ne lui échappe guère. Ceci
étant, les dispositions de l'AU.A et du chapitre 12 LDIP ne
dénient pas au tribunal arbitral sa compétence en matière
d'administration de preuves. Elles instruisent chacune, dans leurs dispositions
respectives, le tribunal arbitral lui-même à prescrire la
manière dont les preuves seront administrées. En effet,
l'alinéa 1er de l'art. 184 LDIP est explicite dans sa
formulation du principe "le tribunal arbitral procède lui-même
à l'administration des preuves". Cette loi reconnaît donc au
tribunal arbitral, la compétence de pouvoir statuer sur
l'admissibilité, la pertinence et le fardeau des preuves fournies par
les parties. Le droit OHADA ne s'exempte pas non plus de ce principe lorsqu'il
affirme, dans les dispositions de l'art. 14 al. 4 que, "les arbitres
peuvent inviter les parties à leur fournir [...], les preuves qu'ils
estiment nécessaires à la solution du litige". De cette
compétence légale reconnue aux tribunaux arbitraux d'administrer
les preuves, résultent les conséquences suivantes :
- c'est devant tout le corps arbitral que les preuves doivent
être rapportées,
- la délégation à un seul arbitre n'est
admise qu'avec l'accord des parties,
- l'arbitre ne peut pas déléguer son pouvoir
à un tiers (pouvoir d'administrer des preuves).
Le caractère laconique des dispositions des deux
lois d'arbitrage, sur le droit des tribunaux arbitraux à se prononcer
sur l'administration des preuves d'une part, et le défaut
d'énumération des preuves susceptibles d'être admises
devant les tribunaux arbitraux d'autre part, ne sont guère surprenants.
Cela va de soi d'autant plus que, l'arbitrage international répondant
par essence aux besoins du commerce international, c'est le principe de la
liberté de preuve en matière commerciale75(*) qui y est admis. Ce manque
d'énumération, laisse envisager a priori l'admission de
toutes formes de preuve quelles qu'elles soient.
Sans pour autant rentrer dans les détails, sur la
catégorisation et la définition des preuves usuelles dans chacun
des systèmes relatifs aux lois d'arbitrage que nous étudions,
nous faisons remarquer, somme toute que, les deux législations
n'abordent pas les questions essentielles relatives à la nature des
preuves et à la procédure adéquate.
- Par rapport à la nature des preuves susceptibles
d'être admises, les preuves les plus usitées dans la pratique de
l'arbitrage de DIP sont en général, la preuve par pièce,
la preuve par témoins, la preuve par expertise. D'autres modes de preuve
à l'instar de la comparution personnelle, de l'interrogatoire des
parties, ou de l'inspection locale existent mais ne sont guère
utilisées dans l'arbitrage de DIP. Leur évocation ne suscite
aucun intérêt pour cette étude comparée, c'est
pourquoi nous ne nous appesantirons pas sur elles. Quant à la question
de savoir si les autres preuves sont admissibles dans un arbitrage de DIP OHADA
et suisse, seules la jurisprudence et la doctrine, relatives à la
problématique de la preuve peuvent nous y renseigner dans la mesure
où, les deux lois d'arbitrages ne nous y renseignent guère. Nous
ne voyons cependant pas, les raisons pour lesquelles certaines
catégories de preuves peuvent être admises et d'autres pas.
- Par rapport à la procédure, il revient
prioritairement aux parties de définir le cadre procédural qui
permettra au tribunal arbitral de statuer sur l'admissibilité et la
pertinence des preuves fournies par elles. À défaut,
c'est-à-dire si les parties n'ont pas réglé la question
directement ou par référence conformément aux dispositions
des articles 14 al. 1er AU.A et 182 al. 1er LDIP, le
tribunal arbitral est légitimé pour ce faire par les
alinéas 2, des deux articles précédemment cités.
Cette légitimité est renforcée par les dispositions des
articles 14 al. 4 et 7 AU.A et 184 al. 1 et 2 LDIP. Pour ce faire, le tribunal
arbitral de DIP n'est pas appelé à suivre les règles de
procédure de la juridiction étatique du siège. Le droit de
la preuve n'étant pas impératif, le tribunal arbitral en vertu du
principe d'autonomie en matière d'arbitrage peut, à défaut
de précision de la convention d'arbitrage, se permettre de régler
la procédure comme il l'entend pour autant qu'elle relève de la
loi de procédure (lex fori) et non de la loi régissant
le fond (lex causae). Cela ne signifie pas pour autant que, les
dispositions de la lex causae relatives au fardeau de la preuve
doivent être totalement ignorées par le tribunal arbitral de DIP.
En effet, comme le renchérissent si bien J-F. POUDRET et S. BESSON
"le choix de l'arbitrage n'implique pas la volonté implicite des
parties d'écarter les règles de preuve relevant du droit
matériel, notamment celles régissant la répartition du
fardeau de la preuve et ses diverses exceptions (présomptions
légales)"76(*). Cette autonomie du tribunal arbitral de DIP peut
même lui permettre, de recourir aux règles de l'International
Bar Association (IBA) du 1er juin 1999, lesquelles jouent un
rôle non moins négligeable dans la pratique de l'arbitrage
international. Ces règles constituent une authentique source
référentielle, fréquemment utilisée par les
arbitres même si les parties ne s'y sont pas soumises. Véritable
nomenclature des principes, elles ont l'avantage d'être plus
détaillées et constituent de ce fait, un code de dispositions
précises en matière de preuve régissant non seulement la
procédure d'administration mais encore l'admissibilité d'une
preuve dans un arbitrage de DIP.
Même s'il faut reconnaître que, les
réglementations sur l'arbitrage international OHADA et suisse donnent
compétence aux tribunaux arbitraux d'administrer les preuves,
c'est-à-dire qu'ils disposent d'une autonomie en la matière,
l'illusion n'est guère permise sur l'étendue de cette
liberté qui a des limites.
Une première limite porte sur l'accord particulier des
parties, nécessaire avant toute recherche de la loi appropriée
à la procédure probatoire. En effet, si le tribunal arbitral de
DIP, dans la détermination du droit applicable aux preuves, peut se
permettre, fort du principe d'autonomie, de choisir selon son bon vouloir le
droit qu'il juge approprié, il faut avouer qu'il ne peut le faire que
sur accord particulier des parties. Ainsi, le principe d'autonomie dont il est
légalement récipiendaire ne le libère pas totalement de la
convention des parties et de l'accord de celles-ci en cas de défaut de
convention.
Une deuxième limite porte sur la
nécessité de requérir l'aide d'une autorité
compétente en cas de blocage dans l'administration de la preuve. Sur ce,
il conviendrait de dire que le tribunal arbitral, nonobstant sa liberté
légale en matière probatoire, peut se voir dans certains cas,
astreint à la coopération avec le juge d'appui. Cette
hypothèse est envisagée lorsque, le tribunal arbitral se retrouve
dans des situations de difficultés dans l'administration des preuves,
l'obligeant à requérir le concours du juge d'appui au
siège du tribunal arbitral.
En effet, l'absence d'imperium de l'arbitre ne lui
facilite pas la tâche lorsqu'une des parties ou une tierce personne,
détentrice d'une preuve nécessaire à l'issue du
procès arbitral, se montre récalcitrante ou ne participe pas
volontiers à l'administration des preuves. C'est à ce stade que,
tout le mécanisme de l'assistance judiciaire en matière
probatoire en droit de l'arbitrage international revêt tout son sens.
Ceci nous conduit à constater à la suite de P. LALIVE que, le
concours du juge, en dépit de la liberté légale du
tribunal arbitral, n'est pas moins requis dans un arbitrage de DIP. Comme on
peut le constater, dans leur formulation respective, l'AU.A et le chapitre 12
LDIP ne privent pas, les tribunaux arbitraux, du droit de solliciter
l'assistance judiciaire en matière probatoire. Le droit communautaire
OHADA dans les dispositions de son art. 14 al. 7 AU.A dispose sur cette
question de requête en vue d'un soutien à l'administration de la
preuve que "si l'aide des autorités judiciaires est
nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral
peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge
compétent dans l'Etat-partie". En droit suisse de l'arbitrage
international, c'est dans les dispositions de l'art. 184 al. 2 LDIP qu'on
infère une telle requête d'assistance à la preuve "si
l'aide des autorités judiciaires de l'Etat est nécessaire
à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral, ou les parties
d'entente avec lui, peuvent requérir le concours du juge du siège
du tribunal arbitral; ce juge applique son propre droit". Relevons en
dernière position que, même si le juge n'intervient qu'à
titre subsidiaire, le tribunal arbitral ne sollicitera pas
systématiquement son assistance en cas de défaillance d'une des
parties. Evidemment, il lui reviendra d'interpréter ce défaut de
collaboration dans le cadre de l'appréciation des preuves. Par ailleurs,
il n'est pas superflu de noter que la collaboration du juge se
révèle d'une importance singulière dans le cadre de
mesures probatoires touchant des tiers ou lorsqu'il s'agit de procéder
par voie de commissions rogatoire.
En guise de petite conclusion, nous pouvons dire que les
limites à la liberté du tribunal arbitral à administrer
les preuves sont reconnues par les systèmes OHADA et suisse qui,
prévoient tous deux un mécanisme général
d'assistance du juge dans le cadre de l'obtention des preuves devant le
tribunal arbitral. Du point de vue du droit comparé, presque toutes les
législations modernes sur l'arbitrage international le prévoient
à l'exception toutefois, du droit italien et plus spécifiquement
le droit français qui ne contient pas expressément de telles
dispositions. Cependant, la jurisprudence française reconnaît au
juge étatique une large compétence pour la sauvegarde de la
preuve sur la base de la disposition de l'art. 145 NCPC qui dispose que
"s'il existe des motifs légitimes de conserver ou d'établir
avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la
solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles
peuvent être ordonnées à la demande de tout
intéressé sur requête ou en
référé". On constate que le recours au juge sur la
base de cette disposition n'est possible que jusqu'à la saisine du
tribunal arbitral, la condition de l'urgence évoquée par le droit
OHADA pour justifier la prise de mesures conservatoires ou provisoires n'est
pas exigée. Bref, la coopération du juge étatique
évoquée aux articles 184 l'al. 2 LDIP et 14 al. 7 AU.A accordent
au tribunal une compétence générale, lui permettant de
prendre toute mesure d'assistance indispensable pour l'obtention ou
l'administration d'une preuve devant le tribunal arbitral. La formulation des
deux dispositions est quasi identique seulement que leur lecture attentive fait
apparaître des remarques à deux différences près.
La première porte sur le pouvoir des parties, à
cette étape de la procédure, à requérir l'aide des
autorités judiciaires.
L'expression le tribunal arbitral peut [...] sur
requête requérir... du texte OHADA suppose, à notre
avis, que la demande peut être formulée aussi bien par les parties
(le cas n'est pas contestable et parait évident d'ailleurs) que les
tiers qui ont, pour une raison ou pour une autre, un intérêt
particulier à intervenir dans le procès arbitral. A la
différence de la formulation du texte de l'al. 2 de l'art. 184 qui a le
mérite de la précision [...] le tribunal arbitral, ou les
parties d'entente avec lui, peuvent requérir..., le droit OHADA
ouvre la brèche pour que sur requête d'un tiers à la
demande d'une partie et à des fins dilatoires, le juge soit amené
à intervenir dans la procédure probatoire.
La deuxième porte sur le droit applicable par
l'autorité judiciaire saisie. Il s'agit d'une autre précision du
droit suisse qui ne manque pas d'importance dans le contexte particulier du
droit de l'arbitrage international. La question qui se pose ici est celle de
savoir si le juge saisi d'une requête en vue de l'administration de la
preuve doit appliquer son propre droit ou rattacher le droit applicable
à la preuve à un autre droit ?
En précisant que le juge saisi applique son propre
droit, tout équivoque est levée sur le droit applicable
à la problématique de la preuve par le juge étatique qui,
dispose contrairement à l'arbitre d'un for. Il se voit ainsi astreint
par l'al. 2 in fine du texte de l'art. 184 LDIP à ne pas
s'écarter des mesures d'instruction prévues par sa loi de
procédure civile. Cette précision du droit suisse a le
mérite de définir du point de vue de la norme procédurale,
le droit que le juge étatique se doit d'appliquer. Ce qui n'est pas le
cas dans le texte de loi d'arbitrage du droit OHADA en l'occurrence l'AU.A. Ce
faisant, la loi helvétique est plus concise que ne l'est le droit OHADA.
Elle se démarque du vide juridique qu'on observe dans la
législation OHADA. Mais enfin, tout comme dans la procédure
prévue à l'art. 14 AU.A, il est clair que le juge OHADA
sollicité appliquera son propre droit dans le cadre de la
procédure probatoire.
Notons pour toute fin de précisions, qu'en droit
international privé le choix des modes de preuve, leur
admissibilité et le pouvoir d'appréciation du juge sont
rattachés à la loi de procédure (lex fori),
celle-ci cède devant la lex causae en ce qui concerne la charge
de la preuve et les différentes présomptions légales
pouvant les renverser sur des points particuliers.
Nous avons vu que, la liberté du tribunal arbitral en
matière d'administration de la preuve dans un procès arbitral de
DIP est contingentée par la coopération du juge étatique,
pour assistance en vue de l'obtention ou de l'administration d'une preuve
devant ce tribunal arbitral. Ceci étant, cette compétence du juge
étatique en matière probatoire est tout aussi doublement
limitée. D'un côté, certains droits ne l'admettent que pour
les arbitrages ayant leur siège dans l'Etat dont relève le juge
saisi, c'est le cas du droit suisse de l'arbitrage international et du droit
OHADA de l'arbitrage. De l'autre côté, le juge ne peut valablement
intervenir que si la mesure sollicitée entre dans le cadre de sa
compétence international. En cas de blocage, seule l'entraide judiciaire
internationale selon le système de la convention de la Haye de 1970 sur
l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile ou
commerciale pourra permettre de lever cet obstacle.
§ II-. LE DROIT APPLICABLE AU
FOND ET LA SENTENCE ARBITRALE DE DIP
Une petite mise au point d'ordre procédural
mérite d'être faite avant toute analyse.
Un tribunal arbitral de DIP dispose, dans sa démarche
de traitement du litige au fond, de deux alternatives.
Soit, il s'applique à statuer en droit et dans ce cas,
il tranche le fond du litige conformément aux dispositions d'une
règle de droit préalablement choisie par les parties ou à
défaut, définie par lui. Soit, il statue en amiable compositeur,
à la seule condition qu'il en ait reçu compétence
exclusive des parties. L'amiable composition est encore appelée
arbitrage et équité par opposition à l'arbitrage en droit.
Nous verrons dans la suite du développement que, le législateur
suisse a préféré le terme d'arbitrage en
équité par opposition au codificateur OHADA qui, a jeté
son dévolu sur l'expression amiable composition. Qu'importe ! Les
deux veulent signifier la même chose. D'ailleurs, l'expression latine
ex aequo et bono veut aussi signifier la même chose mais, est
moins usitée parce que peut être un peu trop rébarbative.
Enfin, notons qu'à l'issu du procès arbitrale, la décision
rendue par le tribunal (qui est la sentence), qu'il ait statué en droit
ou en équité, doit remplir un certain nombre de critères
exigés par les lois d'arbitrage. Les voies de recours ouvertes contre
les sentences ne peuvent que respecter le canevas légal que
représentent les lois d'arbitrage. Appliquées au cas OHADA et
suisse, qu'est-ce que cela donne ? C'est tout le sens du
développement à suivre.
A-. LE FOND DU LITIGE
DROIT COMPARE
Art. 15 AU.A
"Les arbitres tranchent le fond du litige
conformément aux règles de droit désignées par les
parties ou à défaut choisies par eux comme les plus
appropriées compte tenu le cas échéant des usages du
commerce international.
Ils peuvent également statuer en amiable
compositeur lorsque les parties leur ont conféré ce
pouvoir".
Art. 187 LDIP
1) " Le tribunal arbitral statue selon les règles
de droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon
les règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens
les plus étroits.
2) Les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral
à statuer en équité".
-----------------------------------------------------
1-. AMIABLE COMPOSITION ET
ARBITRAGE EN EQUITE : L'AUTRE FACETTE DU TRAITEMENT DU LITIGE AU FOND EN
DROIT OHADA ET SUISSE
L'arbitrage en équité (selon la terminologie
suisse) ou en amiable composition (pour emprunter les termes du texte de
l'AU.A) est une autre manière de trancher le fond du litige, sans pour
autant statuer en se référant aux règles de droit d'une
structure préétablie ou à la loi d'un Etat.
Dans un arbitrage international, le tribunal saisi d'un litige
peut être aussi amené à statuer ex aequo et bono
c'est-à-dire en amiable compositeur ou en équité.
En droit OHADA, les dispositions de l'AU.A qui confèrent au
tribunal arbitral le pouvoir de statuer en amiable compositeur, relèvent
de l'al. 2 de l'art. 14 selon lequel, les arbitres "peuvent [...] statuer
en amiable compositeur lorsque les parties leur ont conféré ce
pouvoir". La formulation en droit suisse de l'arbitrage international, de
la possibilité qui est offerte au tribunal arbitral de statuer ex
aequo et bono est à peu près identique. Selon l'al. 2 de
l'art. 187 "les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à
statuer en équité". On note en droit comparé, une
formulation quasi classique et identique dans les dispositions de la loi-type
de la CNUDCI à l'art. 28 al. 3 "le tribunal arbitral statue ex aequo
et bono ou en qualité d'amiable compositeur uniquement si les parties
l'y ont expressément autorisé". Plusieurs
conséquences juridiques peuvent être déduites de ces
dispositions sur l'arbitrage en équité.
La première remarque que l'on peut dégager de la
lecture de toutes ces dispositions, fait apparaître que, l'arbitrage en
équité a un caractère double exceptionnel :
- d'un côté, il requiert que la convention des
parties sur ce point soit explicite. En effet, le pouvoir d'amiable compositeur
doit résulter d'une volonté certaine des parties. Dans le doute,
il y a lieu de considérer que telle n'a pas été la
volonté des parties et donc, le litige sera traité au fond en
droit. Le non-respect de cette volonté des parties entraînerait de
toute évidence, en cas de recours, l'annulation de la sentence au motif
que le tribunal arbitral ne se serait pas conformé à la mission
qui lui aurait été confiée.
- de l'autre côté, c'est les parties qui doivent,
pour ce faire, donner l'autorisation expresse au tribunal arbitral, lui
concédant le pouvoir de trancher le fond du litige sans avoir
l'obligation de se référer à une norme quelconque. P.
LALIVE le confirme si bien lorsqu'il affirme que, l'arbitrage en
équité postule "une solution prise en considération du
cas d'espèce sans égard à des normes
générales préexistantes"77(*).
Une deuxième remarque, porte sur le fait qu'avec
l'amiable composition, s'il est une seule évidence à laquelle il
faut se rallier, c'est que les pouvoirs du tribunal arbitral se trouvent
être élargis. Lui donnant une large amplitude dans sa
manière d'appréhender le litige. Fort de cela, un tribunal
arbitral de DIP pourra appliquer le correctif d'équité pour
trancher de la manière la plus juste possible, le litige qui lui est
soumis. Du point de vue pratique, il n'est relevable aucune contradiction
lorsque les parties dans une clause, confient au tribunal arbitral de DIP la
mission d'amiable composition tout en désignant une norme juridique
quelconque pour régir leur relation. Cela voudra tout simplement
s'interpréter comme leur volonté de voir la norme choisie,
être prise en compte par le tribunal arbitral qui, dans sa
décision au fond doit passer l'examen du litige par le filtre de
l'équité. Dans le même registre, il est fort
intéressant de noter que même dans un arbitrage de DIP, la
matérialisation préalable de l'accord sur l'amiable composition
préfigurant dans la convention n'est pas requise comme condition de
validité de l'accord sur l'amiable composition. Nous voulons signifier
par là que, l'amiable composition peut intervenir en cour de
procédure et même, peut être partiel. Ce cas est
récurrent lorsque, les parties imposent à l'arbitre que la
partialité de l'accord d'amiable compositeur, porte sur les
différends nés de l'inexécution du contrat ou encore sur
les conséquences pécuniaires (évaluation des dommages
intérêts) résultant de l'inexécution du contrat,
alors qu'il reçoit les pouvoirs de statuer en droit pour les litiges
nés de la validité du contrat. En résumé, l'accord
sur l'arbitrage en équité peut bénéficier d'une
flexibilité lui permettant l'application d'un régime juridique
dual ou multiple. Tout dépend du bon vouloir des parties
détentrices du pouvoir de réglementation de la norme
applicable.
La troisième remarque avec l'amiable composition est
relative à la procédure. Quoique les dispositions sur l'arbitrage
en équité se trouvent être insérées dans la
plupart des lois d'arbitrage, en l'occurrence celles que nous étudions,
il n'y a aucun doute sur le fait que, les pouvoirs d'amiable compositeur
conférés aux tribunaux arbitraux ne concernent exclusivement que
le fond du litige et non la procédure arbitrale. Même si cette
précision n'est pas apportée dans ces lois, la doctrine et la
jurisprudence arbitrale s'autorisent à rappeler que, l'autorisation de
statuer en équité ne vise que le fond du litige et non la
procédure.
En conséquence, l'amiable composition ne doit pas
permettre au tribunal arbitral d'écarter les règles de
procédure posées, le cas échéant, par les parties
dans leur convention d'arbitrage "l'arbitre décidant de statuer en
équité est donc tenu de respecter les règles
impératives de procédure et l'ordre public
procédural".78(*) C'est le cas des règles essentielles de
la procédure qui, découlent de l'application des principes
d'égalité des parties et de la possibilité de faire valoir
leurs droits. Les tribunaux se doivent naturellement de les respecter. Abordant
dans le même sens, le tribunal arbitral n'est pas déchargé
de l'obligation de motiver sa sentence lorsqu'il statue en équité
ou ex aequo et bono. Ces solutions sont classiques et, on les retrouve
en droit comparé et par voie de conséquence en droit OHADA et
suisse de l'arbitrage international.
La quatrième remarque, porte sur les limitations au
pouvoir de statuer en équité. Lorsqu'on affirme, du point de vue
du fond du litige, que l'amiable composition permet de statuer en
équité, on en induit le fait que le tribunal arbitral a, de ce
fait, la latitude d'écarter ou d'adapter les règles de droit
applicables au litige. Cette faculté d'adaptation ou d'exclusion du
droit n'est cependant pas illimitée. En d'autres termes, le tribunal
arbitral peut écarter ou adapter des lois supplétives, des usages
du commerce, des lois impératives de protection d'une des parties.
Cependant, il est exclu que cela puisse être le cas pour des lois d'ordre
public. Ainsi, il ne lui est pas pour autant permis d'ignorer l'application des
règles d'ordre public s'imposant à la situation
d'espèce.
Toutes ces remarques, faut-il le rappeler, sont les
conséquences du pouvoir de statuer en amiable composition ou en
équité que, les réglementations relatives à
l'arbitrage international OHADA et suisse formulent dans leurs dispositions
respectives.
Par ailleurs, l'opportunité de la demande en annulation
d'une sentence, en cas de recours contre l'usurpation du pouvoir de statuer en
équité ou, l'exercice non autorisé de ce pouvoir par le
tribunal arbitral, est controversée aussi bien en droit OHADA qu'en
droit suisse de l'arbitrage international. En effet, le seul grief susceptible
d'être admis contre la sentence en droit suisse c'est
l'incompatibilité de la sentence à l'ordre public de
l'art. 190. al. 2 let. e. Il s'en conclut que la chance de voir une telle
demande prospérée est quasi nulle. Il en est de même en
droit OHADA car, dans les dispositions de l'art. 26 al. 7 AU.A il est
précisé que le recours en annulation n'est recevable que
[...] si la sentence arbitrale n'est pas motivée. Seule l'absence
de motivation contre la sentence peut justifier la recevabilité d'un
recours sur la base de cette disposition.
Cependant, l'une des questions auxquelles les deux lois
d'arbitrage n'apportent aucune précision, est celle de savoir si le
tribunal arbitral de DIP statuant en équité est tenu par les
dispositions du contrat à l'origine du différend qu'il doit
trancher. En droit OHADA, l'AU.A ne donne aucune réponse à cette
question, le seul bémol vient du règlement d'arbitrage qui
considère que "dans tous les cas l'arbitre tiendra compte des
stipulations du contrat" (art. 17 RA). Idem en droit suisse de l'arbitrage
international où le texte du chapitre 12 LDIP est muet sur cette
question. Pourtant, la réponse à cette question permettra de
déterminer la portée de l'arbitrage en équité par
rapport aux dispositions contractuelles ; autrement dit, les pouvoirs du
tribunal arbitral statuant en équité sur le contrat litigieux.
Le tribunal arbitral dispose t-il d'un pouvoir
modérateur au regard des stipulations contractuelles comme le
suggère la doctrine française79(*) ? Sinon doit-on considérer que le
tribunal arbitral statuant en équité ne dispose d'aucun pouvoir
sur le contrat litigieux ? Nous n'apporterons pas une réponse
à ces questions par souci de limitation de page.
2-. L'ARBITRAGE DE DROIT DU
TRIBUNAL DE DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE
Par opposition de principe à l'arbitrage en
équité, l'arbitrage de droit est aussi admis et est de
règle dans la pratique internationale. Toutes les législations
récentes et modernes sur l'arbitrage interne voire international le
consacrent. Ceci étant, il y a tout d'abord lieu de faire une mise au
point d'ordre procédural. L'amalgame n'est plus permis entre la
loi de l'arbitrage et la loi de fond. Un arrêt de la haute
juridiction britannique dans l'affaire compagnie d'armement maritime
nous le confirme par ceci : "il ne fait aucun doute que si les parties
à un contrat commercial se sont expressément mises d'accord sur
le système de droit d'un pays comme loi appropriée au contrat et
ont choisi une loi de procédure différente [...], les arbitres
doivent appliquer comme loi applicable au fond du litige le système de
droit sur lequel les parties se sont mises d'accord". Il va s'en dire que,
la loi applicable à la procédure peut, ce qui est souvent le cas,
être différente de la loi applicable au fond du litige. En
d'autres termes, le droit applicable à la décision au fond
(la lex causae ou lex contractus) ne doit pas être confondue
avec le droit applicable à la validité de la convention pas plus,
qu'au droit applicable à la procédure (la lex arbitri ou loi
de l'arbitrage). Ceci étant, il est de règle dans
l'arbitrage qu'il soit interne ou international que, la volonté des
parties est primordiale dans le choix du droit applicable au fond du litige par
le tribunal arbitral. Le recours à la volonté des arbitres n'est
que subsidiaire. C'est le principe général qui prévaut en
matière de détermination de la norme applicable au fond du
litige. Il s'agit d'un principe quasi unanimement consacré par le droit
et la pratique de l'arbitrage en général. Ce principe, est un des
rares à être universellement appliqué dans le domaine de
l'arbitrage pour lequel l'arbitrage de DIP ne saurait se dérober. P.
LAGARDE ne disait pas autre chose lorsqu'il affirmait que "l'autonomie des
parties dans le choix de la loi régissant les obligations contractuelles
qui peut être aussi bien exprès, présumé ou
implicite est, à vrai dire, un principe généralement
accepté par les systèmes juridiques contemporains". Les
droits de l'Arbitrage OHADA et suisse le formulent expressément mais
fort différemment. Mais avant tout, faisons un peu de la théorie
juridique. Elle nous permettra de mieux cerner le sens et la portée des
dispositions des articles relatifs à l'arbitrage de droit (15 al. 1 AU.A
et 187 al. 21 LDIP).
La mise en application de ce principe du point de vue
pratique, suppose que l'autonomie dont les parties sont
bénéficiaires leur donne la possibilité de définir
le cadre juridique de référence pour le traitement de leurs
obligations contractuelles. Par analogie aux dispositions de la convention de
Rome sur les obligations contractuelles80(*), on constate que, l'autonomie de la volonté en
matière d'arbitrage quant au droit applicable au fond est une
transposition du principe d'autonomie en matière contractuelle selon
lequel, autant les parties à un contrat sont libres de déterminer
par elles-mêmes les règles qui régiront leurs rapports
contractuels, autant elles sont libres de choisir la loi qui s'appliquera
à la résolution de leur litige arbitral. Cette possibilité
offerte aux parties leur permet de désigner le droit qui, en raison de
sa texture, leur semble être le mieux adapté à leurs
opérations. Contribuant de ce fait, d'une part à la
prévention de toute difficulté et de tout litige quant au droit
devant régir leur contrat, et d'autre part à leur
sécurité juridique. Cette liberté de choix des parties est
toutefois conditionnée par la certitude d'un accord de volonté
des parties sur ce point. Cet accord ne doit pas inévitablement
résulter d'une clause écrite expressément mais, peut aussi
se présumer de certains indices à relever par le tribunal
arbitral. Rappelons, à toute fin de clarification, que le choix du lieu
d'arbitrage ne peut s'analyser en aucun cas en un choix implicite de la lex
causae. Le choix effectué par les parties, devra être
respecté par les arbitres sous peine de contrevenir à leur ordre
de mission, même si ces derniers auraient appliqué un autre droit.
Ce n'est qu'à défaut de choix par les parties, ou lorsqu'elles
tiennent des positions opposées sur ce point, qu'il reviendra à
l'arbitre de rechercher le droit applicable au fond du litige. En effet,
lorsque le litige a un caractère international au sens du DIP et si la
convention des parties n'a pas précisé la norme applicable
à leurs obligations contractuelles, la tâche de la
détermination de cette norme n'est pas d'une facilité pour le
tribunal arbitral qui, pour trancher le litige se doit de déterminer le
droit applicable. Les deux lois d'arbitrage s'accordent sur cette
démarche procédurale mais chacune à sa manière et
dans son style.
a-. LA VOLONTE DES PARTIES OU LE
RATTACHEMENT SUBJECTIF
S'il est une similitude dans les dispositions des articles 15
AU.A et 187 LDIP, c'est l'accordance sur la liberté des parties à
déterminer le droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du
litige. En effet, ces deux articles, conformément au principe de
l'autonomie de la volonté en DIP, donnent aux parties le pouvoir de
conclure une élection de droit sous forme d'une clause contractuelle qui
peut être tacite ou expresse et dont la validité est
indépendante du contrat principal dans lequel elle est
insérée et même de la convention d'arbitrage.
Le principe de détermination de la lex causae,
à titre principal par les parties et à titre subsidiaire par les
arbitres, est un principe universellement accepté en droit de
l'arbitrage international. Pour preuve, il est clairement énoncé
à l'art. 7 de la Convention de Genève de 1961, à l'art. 42
de la Convention de Washington de 1965, à l'art 33 al. 3 du
Règlement d'arbitrage de la CNDUCI ainsi qu'à l'art. 17 du
Règlement d'arbitrage de la CCI: "les parties sont libres de choisir
les règles de droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du
litige. A défaut de choix par les parties des règles de droit
applicables, l'arbitre appliquera les règles de droit qu'il juge
appropriées". Pour ne citer que ces textes.
Cependant, la question de la détermination de ce droit
n'a tout son sens que lorsqu'il y a une situation empreinte
d'éléments d'extranéité. En droit suisse, l'art.
187 al. 1 LDIP dispose que "le tribunal arbitral statue selon les
règles de droit choisies par les parties". Si cette méthode
de détermination ici ne pose aucun problème étant entendu
que l'art. 176 LDIP circonscrit le champ d'application du chapitre 12 (nous
sommes en matière d'arbitrage international et donc le problème
de la détermination du droit applicable aux obligations contractuelles
peut se poser au tribunal arbitral), il en va autrement dans le système
OHADA. L'arbitrage OHADA, nous l'avions vu, est conçu dans la
perspective de l'unité du régime juridique de l'arbitrage, il n'y
a donc pas place pour une opposition du point de vue du régime juridique
entre un arbitrage interne et un arbitrage international. Partant de ce
constat, la question qui se pose est celle de savoir si la
détermination par les parties du droit applicable,
préconisée par les dispositions de l'art. 15 AU.A, est compatible
à tous les litiges susceptibles d'être soumis à l'arbitrage
OHADA quels qu'ils soient (internes ou internationaux).
En effet, en disposant que "les arbitres tranchent le
fond du litige conformément aux règles de droit
désignées par les parties", il parait évident, dans
ce cas, que la détermination du droit applicable n'est admise que pour
seulement certains litiges internationaux. Évidemment, nous ne nous
faisons aucun doute sur le fait, qu'une situation purement interne à
l'OHADA (les seize pays membres de cet espace) ne susciterait guère le
problème de la détermination du droit applicable à la
situation litigieuse en cause. C'est aussi à juste titre, le constat
qu'a fait P. MEYER lorsqu'il fait observer que pour un rapport purement
interne à l'OHADA, il ne saurait y avoir "ni choix du droit
applicable par les parties, ni détermination du droit applicable par
quelque moyen que ce soit. Il n'y a nul besoin de règles de conflit de
lois puisqu'il n'y a pas, dans une situation interne, de conflit de
lois"81(*). Il est
donc clair que, même dans l'hypothèse où les parties, en
vertu du principe d'autonomie, dans leur contrat interne choisissent de
reprendre les dispositions d'une loi étrangère (suisse par
exemple) qu'elles contractualisent, cela ne saurait être
interprété comme une application de la loi
étrangère. Évidemment dans le contexte interne à
l'OHADA, cela devrait être vu comme une simple stipulation contractuelle
ne nécessitant pas, que se pose le questionnement sur la
détermination du droit applicable. En conclusion, sur cette question, il
est important de noter que les dispositions de l'art. 15 AU.A en droit OHADA ne
peuvent concerner que des situations privées internationales et non des
situations privées internes à l'OHADA. Ce qui nous conforte dans
notre interprétation de la nature unique du régime juridique
arbitrale de l'AU.A en droit OHADA.
Sur cette question, il est fort intéressant de noter
à titre de droit comparé que, la même observation a
été faite à propos des législations unifiées
sur l'arbitrage du Québec et des Pays-Bas82(*).
Dans le même ordre d'idée, il est important de
souligner que, le choix du droit applicable au litige dans un arbitrage de DIP
n'est que relatif. En effet, mêmes évoquées dans un litige
international, certaines questions contractuelles à l'instar des
questions de capacité et de représentation mais aussi, non
contractuelles comme la responsabilité quasi-délictuelle ou la
propriété industrielle ou les questions de concurrence
échappent à la volonté des parties quant au choix du droit
applicable.
Ainsi, un litige même international n'offre pas dans
tous les cas, aux parties la possibilité de choisir le droit applicable,
le choix du droit applicable par les parties n'a de sens qu'en matière
d'obligations contractuelles générées par un contrat
international. C'est ce que nous appellerons la théorie de la
relativité du choix de la lex causae.
Pour en revenir à notre étude comparée,
les alinéas 1ers des deux articles sus cités,
suggèrent la possibilité qui est offerte aux parties
d'élire un droit qui se doit d'être appliqué par le
tribunal arbitral. Ils disposent comme suit : "les arbitres tranchent
le fond du litige conformément aux règles de droit
désignées par les parties ou à défaut choisies par
eux comme les plus appropriées compte tenu le cas échéant
des usages du commerce international (art. 15 AU.A), "le tribunal
arbitral statue selon les règles de droit choisies par les parties ou,
à défaut de choix, selon les règles de droit avec
lesquelles la cause présente les liens les plus étroits
(art. 187 LDIP). On infère de ces textes deux possibilités qui
s'offrent aux parties.
a-.] Soit l'élection de droit est directe, dans ce cas
leur choix portera sur l'application de n'importe quel droit matériel et
non les règles de conflit de loi de l'Etat dont le droit est
visé. Ce droit aura pour vocation de régir toutes les questions
d'ordre contractuel à l'exclusion des questions non
contractuelles83(*).
b-.] Soit l'élection est indirecte, auquel cas les
parties choisiront non pas un droit matériel mais une règle de
conflit de lois permettant au tribunal arbitral de déterminer ce droit
matériel applicable. L'élection d'un droit indirect, peut se
faire par le truchement d'un règlement d'arbitrage contenant les
règles de rattachement. Ce choix indirect du règlement
d'arbitrage aura bien évidemment pour conséquence une
primauté sur la règle subsidiaire des articles 15 AU.A et 187
LDIP qui prévoient le rattachement objectif en l'absence
d'élection de droit.
Toutefois, la portée de la liberté des parties
dans la détermination du droit applicable dépend de la
formulation du contenu de l'article relatif au droit applicable.
L'étendue de cette liberté, nous ne pourrons la saisir
qu'à la lumière des réponses que nous apporterons à
certaines questions essentielles relativement aux lois d'arbitrage que nous
avons en présence.
a1-. Les parties peuvent-elles choisir une loi sans lien avec
leur contrat ?
Oui, en général les parties ne sont pas
astreintes au choix d'une loi présentant des liens objectifs voire
spatiaux avec le contrat principal. Aucun lien n'est exigé entre le
droit élu par les parties et les éléments du contrat.
Elles peuvent jeter leur dévolu sur une loi dite "neutre"
simplement parce que le contenu de la loi choisie leur paraît
adéquat. C'est la solution consacrée par la plupart de
législations et règlements d'arbitrage et plus
particulièrement, le droit OHADA sur l'arbitrage et le droit suisse de
l'arbitrage international lorsqu'ils font référence tous deux
aux "règles de droit choisies par les parties". Le seul
embarras qui résulterait de cette option, lorsque les parties choisiront
une loi sans lien avec le contrat, serait celui de fraude à la loi.
Mais puisque la preuve de fraude à la loi est dans presque tous les cas
impossible à rapporter, il est inconcevable que ce principe de la
liberté des parties soit compatible avec le recours à la fraude
de la loi.
a2-. Les parties peuvent-elles choisir plusieurs
lois ?
Le choix par les parties de plusieurs lois ne pose en
général pas de problèmes. Elles peuvent même opter
pour un choix différencié de lois, chacune ayant pour objectif
à ne s'appliquer qu'à une partie de leur contrat. En fait, il
s'agit d'une technique connue en droit international privé des contrats
sous le vocable de dépeçage du contrat qui, se trouve être
aussi applicable en droit de l'arbitrage international. Ce qu'on peut retenir
de cette technique est que, si le dépeçage peut porter sur un
sous-ensemble de droits et obligations objectivement détachables, il
n'est pas impossible en arbitrage. Par contre, s'il doit porter sur divers
aspects du contrat, comme par exemple le consentement, la lésion ou la
responsabilité contractuelle, il est difficile à admettre dans la
pratique arbitrale, dans la mesure où il se révèlera
inopportun et peut engendrer de graves incompatibilités. Même si
les deux lois d'arbitrage ne font pas état de la possibilité de
dépeçage du droit applicable, il est important de noter qu'il,
n'est pas interdit dans les systèmes OHADA et helvétique de
l'arbitrage international.
a3-. Les parties peuvent-elles porter leur choix sur un droit
qui n'est l'expression d'aucun ordre juridique étatique ?
L'idée de permettre aux parties, de choisir un droit
qui n'est l'expression d'aucun système juridique étatique pour
régir le fond de leur litige, est de plus en plus ancrée dans la
pratique de l'arbitrage international. On la retrouve aussi dans la
majorité des systèmes juridiques comme ce fut le cas pour la loi
type de la CNUDCI. Cette loi propose de faire référence à
d'autres sources de droit mis à part les droits nationaux pour
régir le fond du litige. Les termes dans lesquels la loi-type de la
CNUDCI suggère, de recourir à un droit autre que celui d'un Etat,
sont on ne peut plus clairs "le tribunal arbitral tranche le
différend conformément aux règles de droit choisies par
les parties comme étant applicables au fond du différend. Toute
désignation de la loi ou du système juridique d'un Etat
donné est considérée, sauf indication contraire expresse,
comme désignant directement les règles juridiques de fond de cet
Etat et non ses règles de conflit de lois" (art. 28 al.
1er). Quant aux lois d'arbitrage OHADA et helvétique, tout
peut s'inférer du choix par chacun des deux législateurs de la
terminologie appropriée utilisée pour formuler la
problématique du droit applicable au fond du litige. Tous empruntent
l'expression règles de droit choisies par les parties
plutôt que lois choisies par les parties. Il est
évident qu'il y a une différence notoire entre la loi
choisie et la règle de droit choisie.
Du point de vue de la sémantique juridique, il y a lieu
de faire remarquer que, si le législateur utilise le terme de
loi cela s'entend comme une limitation du choix des parties en faveur
des lois étatiques et des conventions internationales, réserve
faite des usages auxquels ces normes peuvent renvoyer. Si par contre, le
législateur utilise le terme de règle de droit,
comme s'en est le cas dans les deux lois que nous étudions, c'est
qu'il permet aux parties de porter aussi leur choix sur des règles
anationales non étatiques en sus des lois nationales. Or, la remarque de
la référence au terme de règles de droit par la
plupart des législations et règlements d'arbitrage contemporains
s'impose et mérite qu'on le souligne.
Les terminologies adoptées, pour désigner le
recours aux sources autres que les lois nationales, visent tantôt la
lex mercatoria, les principes généraux du droit en
général et du droit de l'arbitrage en particulier, les usages du
droit commercial, les règles anationales, ou encore le droit
international public. Ces sources anationales peuvent être
complémentaires ou même substitutives de règles nationales.
Nous ne rentrerons pas dans les détails sur les
principes transnationaux auxquels les parties peuvent faire
référence dans le choix de la norme applicable au fond du litige,
mais simplement, tenterons de rappeler que les parties sont
légitimées à les adopter lorsque la loi d'arbitrage
utilise le terme de règles de droit.
Bref, en résumé, nous constatons que les
parties en vertu de leur liberté peuvent élire directement ou
indirectement un droit pour régir leurs obligations contractuelles. Les
deux lois que nous étudions le consacrent expressément.
Cependant, tout principe devant être nuancé, ce dernier est aussi
tempéré. En effet, aussi vrai que les parties peuvent librement
choisir le droit applicable, elles seront légitimées aussi
longtemps qu'elles le fassent de bonne foi et sans contrevenir à
l'ordre public. Ainsi, il est du devoir du tribunal arbitral de vérifier
si, ce choix respecte les limites nécessaires à son application.
D'où toute l'importance du respect des principes de la bonne foi et de
l'ordre public que nous ne détaillerons pas ici.
Cependant, même lorsque les parties n'ont pas
exprimé de choix exprès sur la question, le Tribunal arbitral
avant toute recherche de la loi applicable, doit s'évertuer à
déceler d'éventuels indices de volonté des parties
permettant de déduire un choix implicite. Pour ce faire, il se doit
d'analyser, avant toute autre recherche, les comportements des parties et
essayant de déceler, dans les termes du contrat ou les circonstances de
la cause, des éléments susceptibles de définir un accord
tacite de celles-ci sur le droit applicable. Ce n'est que lorsqu'il est
résolument impossible pour le tribunal arbitral de déduire du
comportement des parties un quelconque choix implicite du droit applicable,
qu'il aura à le rechercher selon les méthodes dites de
rattachement.
Quid de la volonté des arbitres dans la
détermination du droit applicable aux obligations
contractuelles ?
b-. LA VOLONTE DES ARBITRES OU LE
RATTACHEMENT OBJECTIF
La compétence subsidiaire du tribunal arbitral, vise la
situation dans laquelle les parties ne sont pas parvenues à s'entendre
ou, ont omis d'élire un droit comme norme applicable au fond du litige.
Ce tribunal, à l'opposé du juge étatique, est dans ce cas
indépendant par rapport aux droits des États et par
conséquent, libre de déterminer la norme juridique applicable aux
obligations contractuelles, c'est-à-dire le fond du litige. On parle de
rattachement objectif. Ainsi, à défaut d'élection du droit
applicable par les parties aux obligations contractuelles, la
détermination relèvera du pouvoir discrétionnaire du
tribunal arbitral. C'est tout le sens du terme à défaut
qu'on retrouve dans la formulation des dispositions des textes de l'AU.A et du
chapitre 12. Dans cet ordre d'idée, le tribunal arbitral peut
décider appliquer au litige un ou plusieurs droits nationaux, il peut
également se référer, tout comme les parties, à des
sources de droit non étatiques comme la lex mercatoria, les
usages du commerce ou les principes généraux du droit. Relevons
que, ce pouvoir subsidiaire du tribunal arbitral n'est guère
contesté par la jurisprudence arbitrale et fut même
consacré par les deux systèmes OHADA et suisse de l'arbitrage
international. Toutefois, deux différences fondamentales s'observent
dans la formulation des deux textes, quoique tous consacrent le principe
"sacro-saint" de la subsidiarité du rattachement.
- La première, qui constitue une des
particularités enrichissantes de cette étude comparative,
relève du fait que, le droit OHADA est beaucoup plus fidèle au
principe d'une autonomie plus large et totale que ne l'est le droit suisse de
l'arbitrage international sur la question du rattachement objectif.
Pour preuve, l'AU.A dans ses dispositions prévoit une
élection de droit indirecte qui, du point de vue de sa formulation, est
proche de celle prévue par l'art. 17 al. 1 RCCI. Aux termes de cette
disposition, il est prévu qu'à défaut d'élection de
droit par les parties, les arbitres tranchent le fond du litige
conformément aux règles de droit choisies par eux comme
étant les plus appropriées. En faisant usage du terme
approprié, cette formulation loin d'être anodine, nous
amène à être d'avis avec le Prof. G. KAUFMANN KOHLER
lorsqu'elle affirmait, à propos de l'art. 17 al. 1 RCCI, qu'il s'agit
d'un critère qui laisse à ces derniers (aux arbitres) une grande
liberté de jugement, plus grande encore que celle qui résulte du
principe de proximité, ancré à l'art. 187 LDIP84(*). Cet article dispose
qu'à défaut, les arbitres tranchent le fond conformément
aux règles de droit avec lesquelles la cause présente les
liens les plus étroits. Même si ce rattachement par le biais
des liens les plus étroits du texte suisse de l'arbitrage international
nous permet de reconnaître à la suite de HEINI que, l'arbitre doit
avant tout tenir compte des expectatives légitimes des parties quant au
droit applicable, il n'offre pas au tribunal arbitral la possibilité de
choix illimité comme le suggère le droit OHADA.
- La seconde différence, non moins féconde pour
cette étude, porte sur la possibilité qui est offerte au tribunal
arbitral, de tenir compte le cas échéant des usages du
commerce international. Le droit OHADA contrairement au droit suisse de
l'arbitrage est explicite là-dessus. En disposant que, le tribunal
arbitral le cas échéant, peut tenir compte des usages du commerce
international, le texte du droit OHADA de l'arbitrage en l'occurrence l'AU.A
renforce le dispositif libéral qui, offre au tribunal la
possibilité d'application de la lex mercatoria
indépendamment de la volonté des parties. Il va s'en dire que,
dans la double hypothèse où le litige n'aurait pas un
caractère commercial et/ou international et que le tribunal arbitral,
dans le cadre de la mise en oeuvre de son pouvoir subsidiaire, aurait choisi
l'application de la lex mercatoria, il faut que ce tribunal tienne
compte, s'il le faut, des usages du commerce international. Dans ce cas et
comme le fait remarquer à bon droit le Prof. P. MEYER "il est
évident que ceci suppose que le litige suscite l'application de telles
usages. En d'autres termes, la situation litigieuse doit rentrer dans
l'hypothèse d'une norme juridique constituée d'un usage du
commerce"85(*).
Le principe de l'autonomie des tribunaux arbitraux, dans la
détermination de la norme applicable au fond du litige étant
acquis par les différents systèmes d'arbitrage, et en
l'occurrence par les deux lois que nous étudions, il ne reste plus
qu'à déterminer de quelle manière le tribunal arbitral
peut la rechercher. Autrement dit, parmi ces divers systèmes juridiques,
comment le tribunal arbitral doit-il effectuer son choix? Doit-il respecter
certaines méthodes de rattachement ? Dispose t-il d'une
liberté totale, ou bien la loi d'arbitrage lui impose-t-elle des
règles de conflit de loi qu'il se doit de respecter ?
La réponse à ces questions résout toute
la problématique que pose la méthode de rattachement
objective.
Deux approches s'opposent dans cette démarche, l'une
dite de la proximité et l'autre dite de l'analyse globale. La
première, celle de la proximité, est reconnue en DIP et on la
retrouve en droit suisse de l'arbitrage international. Elle suppose dans la
pratique que, le tribunal arbitral, à défaut applique, non
obligatoirement, la loi qui présente les liens les plus
étroits avec le contrat. La seconde, celle de l'analyse globale,
est une propension qu'on retrouve chez l'arbitre qui lui permet de se baser
sur une analyse globale de la situation litigieuse pour déterminer les
normes qui, permettront au mieux de la résoudre. Il s'agit d'une
approche que s'est fait sien le droit OHADA et qu'on retrouve aussi en droit
français en l'occurrence, dans les dispositions de l'art. 1496 NCPC
"l'arbitre tranche le litige conformément aux règles de droit
que les parties ont choisies ; à défaut d'un tel choix,
conformément à celles qu'il estime appropriées. Il tient
compte dans tous les cas des usages du commerce". Le tribunal
arbitral peut donc dans ce cas, opter pour la loi qu'il estime la plus
appropriée, la plus opportune. Pour ce faire, l'arbitre tient
compte d'un certain nombre d'indications laissées par les parties dans
leur convention. Celles-ci ne doivent être interprétées,
comme le suggère un auteur que "sur base d'un test objectif
révélant ce qu'aurait dû être l'intention et
l'attente raisonnable des parties concernant le droit applicable [...],
c'est-à-dire une approche contextuelle".
L'une des questions non moins importantes, en matière
d'arbitrage international et que nous poserons bien évidemment dans
cette section, est celle de savoir si le défaut d'indications des
parties, emporte le pouvoir du tribunal arbitral de recourir ou non à
une règle de conflit de lois.
La règle de conflit, on la retrouve dans la
majorité des systèmes juridiques, elle permet lorsque plusieurs
possibilités existent, de définir le droit applicable à un
contrat par le biais de techniques de rattachement. En général,
aucune méthode de rattachement ne s'impose au tribunal arbitral de DIP.
Quid de l'OHADA et du droit suisse de l'arbitrage
international ?
En dépit de la différence d'approche, les deux
systèmes ne privilégient pas expressément l'utilisation de
règles de conflit de lois, dans le choix par les arbitres de la norme
appropriée pour trancher le fond du litige. C'est le cas lorsque, dans
ses dispositions, le texte de loi impose à l'arbitre de recourir aux
règles de conflit de loi comme le suggèrent la convention
européenne du 21 avril 1961 en son art.VII86(*) ou l'art. 13 de l'ancien
Règlement d'arbitrage de la CCI. Ce dernier texte, imposait à
l'arbitre de recourir aux règles de conflit de lois: "A
défaut d'indication par les parties du droit applicable, l'arbitre
appliquera la loi désignée par la règle de conflit qu'il
jugera appropriée en l'espèce". Il en est également
de même, du règlement d'arbitrage de la CCJA en son art. 17 qui,
n'est rien d'autre qu'une reprise in extenso du texte
précédent.
Ceci étant, on note dans les deux lois d'arbitrage
(AU.A, chapitre 12 LDIP), tout comme en droit français (NCPC), une
consécration de la voie directe qui, suppose que le tribunal arbitral
peut estimer ne pas avoir besoin de règles de conflit de lois pour
déterminer le droit applicable au fond du litige. Dans ce cas, le
tribunal arbitral détermine le droit applicable sans se
référer à un système de droit international
privé.
C'est en substance ce que nous propose, le texte
français de l'art. 1496 NCPC qui dispose que: "l'arbitre tranche le
litige conformément aux règles de droit que les parties ont
choisies ; à défaut d'un tel choix, conformément à
celles qu'il estime appropriées". Cette technique, on la retrouve
au titre du droit comparé, dans les systèmes OHADA, suisse de
l'arbitrage international, belge, néerlandais, algérien, libanais
et tunisien. C'est une vision fort libérale qui, ne nécessite
aucune référence à la règle de conflit de loi de
sorte que le tribunal arbitral applique directement le droit qu'il estime le
plus approprié au litige. Il peut même recourir à une
application cumulative des règles matérielles concordantes. La
formulation du texte des deux articles 15 al.1 AU.A et 187 al. 1 LDIP sur la
question ne souffre d'aucune ambiguïté.
B-. LA SENTENCE ARBITRALE ET LES
VOIES DE RECOURS
1-. LA SENTENCE ARBITRALE
DROIT COMPARE
Art. 19 AU.A
"La sentence arbitrale est rendue dans la procédure et
selon les formes convenues par les parties.
A défaut d'une telle convention, la sentence est
rendue à la majorité des voix lorsque le tribunal est
composé de trois arbitres".
Art. 189 LDIP
1) "La sentence arbitrale est rendue dans la
procédure et selon la forme convenues par les parties.
2) À défaut d'une telle convention, la
sentence est rendue à la majorité ou, à défaut de
majorité, par le président seul. Elle est écrite,
motivée, datée et signée. La signature du président
suffit.".
-----------------------------------------------------------
Du point de vue du droit comparé, il conviendrait de
faire la remarque selon laquelle, les dispositions de l'AU.A sur la forme et
le contenu de la sentence arbitrale sont presque analogues à celles de
l'art. 189 du chapitre 12 LDIP. Le droit allemand dans les dispositions de son
§1054 ZPO reprend les mêmes exigences relatives à la forme et
au contenu de la sentence arbitrale, lesquelles sont identiques au contenu de
l'art. 31 de la loi-type de la CNUDCI. Il en est également de
même, de certains règlements d'arbitrage dont entre autre le
règlement de la CCI à son art. 19, du règlement CAIL
à son art. 26.
Ceci étant, il parait utile de noter que le vocable
sentence présuppose, d'une manière générale, que le
litige est vidé de son intégralité mettant un terme
à la mission du tribunal arbitral par dessaisissement total. À
l'évocation du vocable sentence, l'esprit se focalise donc sur le terme
de la procédure arbitrale. Si ce lapsus est en partie
révélateur d'une fin, la sentence dans tous les cas, ne
clôt pas définitivement le litige car, l'expression sentence dans
un arbitrage international recouvre toute une variété de
décisions susceptibles d'être rendues par les tribunaux arbitraux,
sous forme de décisions parcellaires ou finales.
Nous convenons que, le tribunal arbitral de DIP peut, dans les
deux systèmes, rendre toute une variété de sentences dont
entre autre les sentences dites finales, les sentences partielles, celles dites
préjudicielles ou incidentes mais encore, d'autres dites sentences sur
la compétence et, les sentences d'accord-parties dites encore sentences
par consentement mutuel etc. Même si aucune énumération des
sentences susceptibles d'être admises n'est faite dans ces deux textes,
le cas de la sentence partielle mérite une attention
particulière. En effet, le chapitre 12 LDIP en son art. 188 mentionne la
possibilité pour le tribunal arbitral de DIP de rendre des sentences
partielles. Ce texte précise que "sauf convention contraire, le
tribunal arbitral peut rendre des sentences partielles".
On ne retrouve cependant pas cette formulation expresse dans
le texte de la loi d'arbitrage OHADA. Doit-on pour autant en conclure que, le
tribunal arbitral de DIP siégeant dans l'espace OHADA ou statuant au
fond sur la base des dispositions du droit OHADA de l'arbitrage, notamment
l'AU.A, n'est pas autorisé à rendre des sentences
partielles ?
Le doute n'est pas permis à ce niveau lorsqu'on sait
que, la sentence partielle est une décision qui porte sur une partie de
l'objet du litige tel que défini par les demandes ou conclusions des
parties. Il est clair, qu'une telle sentence dessaisit l'arbitre non de
l'intégralité du litige mais relativement sur un point du litige
portant sur la question qu'elle est appelée à solutionner.
L'exemple le plus parlant, c'est celui de la sentence qui statue sur la
compétence des arbitres dite sentence sur compétence. Or sur ce
sujet, nous avons vu que la règle de la
compétence-compétence, universellement admise par les
systèmes d'arbitrage des différents Etats et qui, est
consacrée par la pratique institutionnelle de l'arbitrage, s'applique
aussi à l'OHADA. Non seulement l'art. 11 al. 1er donne
compétence au tribunal arbitral de statuer sur sa propre
compétence, mais aussi l'al. 2 lui suggère la possibilité
de rendre sa décision par une sentence sur la compétence. Le
texte de l'article dispose que "le tribunal arbitral peut statuer sur sa
propre compétence [...] dans une sentence partielle sujette au recours
en annulation". Il va s'en dire que, la possibilité pour un
tribunal arbitral de rendre une sentence partielle dans le système
OHADA, sur la base des dispositions de l'AU.A, n'est pas exclue, même si
la formulation n'est pas expresse dans le corpus de la loi. Il ne fait donc pas
de doute que, même dans le silence de cette loi, le tribunal arbitral
peut rendre des sentences partielles, si les parties conventionnellement n'ont
pas exclu cette possibilité. Ce qui veut dire que, le défaut de
convention contraire des parties donne donc pouvoir au tribunal arbitral de le
faire. La plupart du temps, il faut le souligner, ces sentences sont
contestables et peuvent donc faire l'objet d'un recours devant
l'autorité judiciaire compétente dans le respect du délai
imparti. Ce délai peut varier selon le dispositif des lois d'arbitrage.
Les deux textes ici étudiés n'apportent aucune précision
sur cette question.
La problématique de la sentence arbitrale de DIP,
soulève indubitablement les questions essentielles relatives à la
procédure de la sentence, à sa forme et à son contenu.
C'est sur ces points focaux que des divergences s'observent au niveau des deux
textes de loi d'arbitrage que nous étudions.
a-. LA PROCÉDURE
Il convient de rappeler d'une part que, dans un arbitrage de
DIP, le principe de l'autonomie de la volonté des parties qui est le
piédestal du processus de l'arbitrage trouve ici aussi son application.
En effet, il est de notoriété que le respect de la forme
procédurale dans laquelle la sentence devra être rendue est une
obligation conventionnelle à la charge de l'arbitre, le recours à
la forme légale n'est que subsidiaire. Cela veut dire en clair que, la
sentence arbitrale est rendue dans la procédure et selon la forme
convenue par les parties. Aucune des lois d'arbitrage ici concernées, ne
dénient aux parties le pouvoir de détermination de la forme
procédurale dans laquelle le tribunal arbitral devra rendre sa sentence.
C'est tout le sens des deux premiers alinéas des articles 19 AU.A et 188
LDIP qui, disposent tous deux invariablement que "la sentence arbitrale est
rendue dans la procédure et selon les formes convenues par les
parties".
Nous remarquons donc que, l'AU.A et le chapitre 12 LDIP ne
dérogent pas à la tendance majoritaire du droit de l'arbitrage
qui, subordonne la validité de toute sentence arbitrale aux conditions
de fond et de forme retenues par les parties à la convention
d'arbitrage, à titre prioritaire. D'autre part, tout comme en
matière de détermination du droit applicable au fond, le
défaut de volonté des parties emporte la compétence
subsidiaire du tribunal arbitral qui, par application des dispositions
légales sur la forme et la procédurale de la sentence, rend sa
décision. Sur cette dernière hypothèse, les deux textes
procèdent différemment. La principale question de
procédure qui se pose à ce niveau, est celle du vote à
l'issue du délibéré arbitral. En effet, la décision
prise à l'issue du délibéré par le tribunal
arbitral unique, dans la pratique, ne pose bien évidemment aucun
problème particulier. L'arbitre unique dans ce cas prend, en toute
légitimité, la responsabilité de rendre la sentence sans
aucune autre forme particulière de procédure. Par contre, le
problème devient tout autre en cas de collège arbitral.
Nous savons que, la pratique arbitrale admet la
possibilité multiple de rendre les sentences arbitrales. En effet, elles
peuvent selon les législations être rendues soit à
l'unanimité du collège arbitral, ou soit à sa
majorité et à défaut de majorité par le
président seul. C'est cette dernière alternative qui est
préconisée par le chapitre 12 en droit suisse de l'arbitrage
international, à condition qu'il en soit habileté par la
convention des parties ou par la loi applicable. Le vote à la
majorité est presque unanimement reconnu et accepté en arbitrage
international. Pour preuve, le droit OHADA de l'arbitrage dans les dispositions
de l'AU.A et le droit suisse de l'arbitrage international à travers le
chapitre 12 LDIP envisagent, qu'en cas de défaut de convention des
parties, le tribunal arbitral dans sa procédure, rende la sentence
à la majorité des voix "la sentence est rendue à la
majorité des voix". Si le codificateur OHADA a jugé bon
d'adjoindre une condition complémentaire au vote majoritaire du texte
OHADA, celle du trio arbitral composant le tribunal (art. 19 al. 2 AUA), notre
questionnement porte sur l'attitude que pourrait avoir un tribunal arbitral
composé de plus de trois arbitres, face à l'exigence
légale du vote majoritaire. À notre avis, cette précision
sur la condition complémentaire du trio arbitral nous parait inutile et
complique à bien des égards la tâche du tribunal au stade
du vote après le délibéré. Ce qui parait curieux,
c'est le manque de précisions de ce texte sur le défaut de
majorité. Quel sort réserver au vote non majoritaire à
l'issue du délibéré arbitral ? C'est dans le chapitre
12 LDIP que le législateur suisse a eu la bienveillance d'esprit pour
donner une solution à cette question, il dispose qu' "à
défaut de majorité, le président du tribunal arbitral
statue seul".
b-. LA FORME DE LA SENTENCE ARBITRALE
Par rapport à la forme écrite de la sentence
arbitrale, la question relève en DIP de l'arbitrage d'une importance
toute singulière. Une certaine doctrine fait observer que l'art. 189 al.
2 LDIP ne prévoit la forme écrite de la sentence arbitrale
qu'à défaut de convention contraire des parties87(*). On en déduit donc que,
la forme écrite n'est une condition de validité de la sentence
arbitrale qu'en cas de silence des parties sur la forme qu'elle doit avoir.
Nous ne partageons pas cet avis car, le défaut de convention
dont fait état le texte de la disposition de l'al. 2 de l'art. 189 n'est
relatif, qu'à l'exigence procédurale pour rendre la sentence et
non la forme de la sentence.
En tout état de cause, qu'elle soit rendue
conformément à la volonté des parties ou à
défaut, par le tribunal arbitral sur la base des dispositions
légales, la sentence arbitrale se doit d'être écrite. Nous
soutenons cette position par le simple fait que, lorsqu'on s'en
réfère aux conditions de fond de reconnaissance et
d'exécution de la sentence étrangère, la convention de New
York exige de faire la preuve de l'existence de la sentence. Or, celle-ci ne
peut être faite que si elle a été au préalable
matérialisée par écrit. Ce qui implique qu'une sentence
arbitrale étrangère non écrite ne pourra pas faire l'objet
d'une reconnaissance et exequatur conformément aux dispositions
de la convention de New York.
Si en droit suisse de l'arbitrage international, l'al. 2 de
l'art. 189 est univoque sur la question de la forme écrite de la
sentence "elle est écrite, motivée, datée et
signée", la question est moins évidente en droit OHADA en
l'occurrence dans les dispositions de l'AU.A qui, se trouve être par
contre muet sur la forme que doit avoir la sentence. Cependant, cela ne doit
aucunement s'interpréter comme une lacune de la loi d'arbitrage OHADA
car, dans les conditions de reconnaissance et d'exécution de la sentence
arbitrale, l'art. 31 AU.A dispose que "la reconnaissance et l'exequatur de
la sentence arbitrale supposent que la partie qui s'en prévaut
établisse l'existence de la sentence arbitrale". Or,
l'établissement de l'existence d'une sentence arbitrale de DIP ne peut
se faire que matériellement, ce qui laisse aisément conjecturer
de la nécessaire formulation écrite de la sentence. Peu importe
le support sur lequel la sentence est matérialisée, il peut
s'agir en l'occurrence de support virtuel ou papier et autres etc. Cette
exigence du droit de la sentence arbitrale OHADA est renforcée par les
dispositions de l'al. 2 du même article lorsqu'il fait de la
production de l'original (sous-entendu de la sentence)
accompagné de la convention d'arbitrage ou des copies de ces
documents réunissant les conditions requises pour leur
authenticité, la condition sine qua non de la reconnaissance de la
sentence arbitrale. Ainsi on peut affirmer, sans le risque d'être
contredit que, du point de vue de la validité formelle, toute sentence
arbitrale de DIP doit être faite par écrit. En dépit du
défaut d'une formulation expresse de cette exigence en droit OHADA, le
tribunal arbitral OHADA ne peut s'y soustraire car l'art. 31 l'y contraint
implicitement. Du point de vue du droit comparé, la majorité des
lois et règlements d'arbitrage international soumettent la sentence
à cette exigence de forme écrite.
c-. LE CONTENU DE LA SENTENCE
La question du contenu de la sentence est plus
délicate. À l'inverse du chapitre 12 LDIP, l'AU.A procède
à une énumération exhaustive du contenu d'une sentence
arbitrale. Sur ce point l'AU.A est plus concis et détaillé, ce
qui lui confère un avantage par rapport au chapitre 12 LDIP88(*). Remarquons que, le contenu
des dispositions des articles 20 à 22 de l'AU.A est une reprise
systématique des dispositions du NCPC en droit français.
En dépit du défaut de prolixité du
chapitre 12 LDIP, il y a lieu de reconnaître à la suite de J. F.
POUDET et S. BESSON repris par le Prof. G. KAUFFMANN KOHLER que, cette lacune
juridique ne saurait remettre en cause, la possibilité qui est offerte
au tribunal arbitral de DIP de "consigner par écrit les
éléments nécessaires à l'intelligibilité de
la sentence et à son exécution (POUDRET/BESSON / n°745,
p.706), et notamment, le nom des parties et des arbitres, le siège de
l'arbitrage, l'objet du litige et la décision des
arbitres"89(*). On en
infère logiquement que, les mentions comme : le nom des parties
et des arbitres, le siège de l'arbitrage, l'objet du litige et la
décision des arbitres tels que le suggère le Prof. G.
KAUFMANN KOHLER, ne sont pas d'une importance anodine en droit de l'arbitrage
international. Même si nous adhérons à cet avis commun de
ces auteurs, nous sommes tentés de dire à la suite de cette
latitude qui est offerte au tribunal arbitral que, rien légalement
n'oblige le tribunal arbitral de DIP, en droit suisse de l'arbitrage
international, de consigner ces éléments pouvant rendre, comme
ils le disent, "intelligible" la sentence arbitrale. Or, ces exigences de
contenu de la sentence arbitrale telles que définies par les articles 20
et 21 AU.A sont d'une très grande importance dans la mesure où,
elles jouent un rôle non moins négligeable dans un arbitrage de
DIP et ce, à double titre.
Dans une première perspective, elles peuvent
procéder de la facilitation à l'identification de la sentence
arbitrale. Ainsi, les noms et prénoms du ou des arbitres qui l'ont
rendue, la date de la sentence, le siège du tribunal arbitral, les noms,
prénoms et dénomination des parties ainsi que leur domicile ou
siège social, le cas échéant, les noms et prénoms
des avocats ou de toute personne ayant représenté ou
assisté les parties et enfin, la signature du ou des arbitres, sont pour
ainsi dire, la carte d'identité de la sentence. Aucune des mentions
ci-dessus énumérées n'est exigée en droit OHADA
à peine de nullité. Aucune sanction non plus n'est
attachée à leur omission.
Dans une deuxième perspective, certaines mentions
confèrent indubitablement à la décision du tribunal
arbitral son caractère juridictionnel. Ainsi alors, l'exposé des
prétentions respectives des parties, l'exposé de leurs moyens
ainsi que l'exposé des étapes de la procédure, la
motivation et le dispositif de la sentence sont d'une portée purement
juridictionnelle. Notons qu'à l'exclusion de la motivation, aucune
sanction n'est attachée à l'omission de ces
éléments en droit OHADA. Ceci étant, nous remarquons
à la lecture du chapitre 12 LDIP que, la législation suisse de
l'arbitrage international formule les exigences de la datation de la sentence,
de sa forme écrite, de sa motivation et de la signature de la sentence.
Ces exigences minimales nécessaires à la validité de la
sentence on les retrouve en droit comparé, chacune jouant un rôle
bien déterminé.
- L'exigence de datation de la sentence est d'autant plus
importante qu'elle permet, de contrôler le respect du délai
d'arbitrage et, détermine le moment où la sentence est
revêtue de l'autorité de la chose jugée en vue de son
exécution (art. 20 al. 3 AU.A / Art. 189 al. 2 LDIP).
- Par rapport à la motivation de la sentence arbitrale,
il n'est pas concevable d'envisager un acte juridictionnel sans motif, qui plus
est une sentence arbitrale. Évidemment, tout acte juridictionnel suppose
des motifs, lesquels doivent être exprimés matériellement
surtout lorsqu'il s'agit d'une sentence arbitrale.
L'AU.A en droit OHADA prescrit cette exigence à peine
de nullité (art. 26 al. 7 AU.A). Il en est également ainsi, du
droit positif suisse où l'al. 2 de l'art. 189 LDIP prescrit l'obligation
de motivation de la sentence (art. 189 al. 2 LDIP). Mais cependant, le
chapitre 12 LDIP ne fait pas, par contre, du défaut de motivation une
cause de nullité de la sentence. Cette importance accordée
à la motivation s'inscrit dans la tendance contemporaine du droit de
l'arbitrage où, l'obligation de motivation est retenue par les
législations sur l'arbitrage nationale et internationale. Même si
cependant, force est de le constater, certaines législations ne posent
pas cette exigence, cela ne signifie pas pour autant qu'elles entendent
permettre une sentence sans motif, elles autorisent, le cas
échéant, simplement les arbitres à ne pas exprimer
matériellement la motivation de leur décision dans la sentence.
Ainsi, la sentence doit être motivée sauf stipulation contraire
des parties. Si réserve peut être faite par les parties à
la motivation de la sentence, aucune des législations que nous
étudions ne mentionne la possibilité qui est offerte aux parties
de renoncer à toute motivation de la sentence.
- Par rapport à la signature de la sentence arbitrale,
il est clair que pour rester fidèle au conformisme ambiant du droit de
l'arbitrage international, les deux textes ont fait de la signature de la
sentence une exigence qui, avant d'être légale est
conventionnelle. Toutefois, le texte du droit communautaire OHADA se
démarque par sa précision, sur le refus de signature par une
minorité dans l'hypothèse d'un collège arbitral. Afin
d'éviter tout blocage à ce stade de la procédure, il
propose que mention soit faite de ce refus dans la sentence et celle-ci aura le
même effet que, si elle avait été signée par tous
les arbitres. Le dispositif du texte précise que "toutefois, si une
minorité d'entre eux refuse de la signer, il doit en être fait
mention et la sentence a le même effet que si elle avait
été signée par tous les arbitres" (art. 21 al.
2 AU.A). Précisions que nous n'avons pas dans le texte du chapitre
12 LDIP.
Un autre aspect non moins négligeable, est celui du
délai légal ou conventionnel dans lequel le tribunal arbitral
doit rendre sa sentence. Le respect d'un tel délai prorogeable est
impératif et s'impose au tribunal arbitral afin de lui permettre la
rédaction et la signature de la sentence. L'AU.A et le chapitre 12 LDIP,
contrairement à d'autres lois d'arbitrage international ne font pas
état de ce délai.
En résumé, quelle soit partielle, provisoire,
complète ou définitive, la sentence lorsqu'elle est rendue
à un caractère définitif puisque comme le précise
l'art. 190 LDIP "la sentence est définitive dès sa
communication". Ce caractère définitif de la sentence,
permet de l'opposer à la notion d'ordonnance de procédure (dite
abusivement sentence interlocutoire) qui, ne concerne qu'une décision de
procédure et, n'est pas susceptible de recours ni d'exécution par
une autorité judiciaire.90(*) L'ordonnance de procédure ne tranche aucun
litige mais, se prononce seulement sur le déroulement de la
procédure arbitrale.
Notons que seules les sentences quelles qu'elles soient,
pourvu qu'elles aient un caractère définitif, ouvrent droit aux
voies de recours et, le cas échéant, à
l'exequatur en vue d'une exécution forcée.
2-. LES VOIES DE RECOURS
A l'issue du procès arbitral, lorsqu'une partie
succombe, elle peut recourir contre la sentence rendue par le tribunal arbitral
de DIP. Le recours consistera donc, à contester la validité de la
sentence rendue qui, peut prendre selon les dispositions du droit
concerné, soit la forme d'un appel, soit la forme d'un recours en
annulation, ou soit la forme d'une demande en renvoi de la sentence en vue
d'une révision. Ainsi, les voies de recours ouvertes contre une sentence
arbitrale, dépendent des dispositions de la loi d'arbitrage
concernée. Sur ce point, le chapitre 12 LDIP ne nous renseigne
guère sur les possibles voies de recours contre une sentence arbitrale
rendue conformément aux dispositions de cette loi d'arbitrage. Si on
peut facilement comprendre ce choix du législateur suisse qui, dans sa
logique de réformer le droit de l'arbitrage international, a
sensiblement "réduit les possibilités de recourir contre la
sentence"91(*), on
comprend cependant moins, le défaut d'énumération des
voies de recours ouvertes, dans la législation de DIP suisse sur
l'arbitrage. On ne retrouve dans le texte du chapitre 12 LDIP que, les motifs
de recours de l'al. 2 de l'art. 190. Cependant semble-t-il, la seule voie de
recours ordinaire admise contre une sentence arbitrale en droit suisse de
l'arbitrage international, c'est le recours en annulation. Ce ne sont pas les
propos du Prof. G. KAUFMANN-KOHLER qui, nous contrediront sur ce constat
lorsqu'elle affirmait que "le recours contre les sentences arbitrales a un
effet purement cassatoire, raison pour laquelle il est qualifié de
recours en annulation. La LDIP ne prévoit pas d'autres recours"92(*). Il est donc clair que,
la Loi fédéral suisse sur le Droit International Privé,
notamment le chapitre 12, ne prévoit comme voie de recours contre une
sentence arbitrale que, le recours en annulation. Ceci étant, à
travers une jurisprudence, le TF suisse "a admis qu'une sentence arbitrale
peut faire l'objet d'un recours en révision"93(*). Donnant de ce fait, aux
sentences rendues en Suisse une chance supplémentaire d'être revue
à l'occasion d'un recours exercé contre elles. Cette restriction
des voies de recours contre la sentence arbitrale de DIP en Suisse, peut
trouver sa justification dans le fait que, la principale voie de recours contre
les sentences arbitrales dans les pays de droit civil, à l'instar des
pays de l'OHADA et de la Suisse, est le recours en annulation. Contrairement
aux pays de droit coutumier où le recours peut prendre la forme d'une
opposition, d'un appel ou d'un pourvoi en cassation. En effet, le recours en
annulation peut dans ce cas, s'exercer par le biais de demandes fondées
sur la violation de certaines exigences inhérentes à la sentence,
à la compétence, à la procédure ou à l'ordre
public interne et international.
Contrairement au chapitre 12 LDIP, le droit OHADA à
travers l'AU.A ouvre aux parties la possibilité de recourir contre une
sentence arbitrale non seulement par le biais de recours ordinaires (recours en
annulation) mais aussi, par le biais de deux recours extraordinaires que sont
le recours en révision ou la tierce opposition.
En effet, le texte de l'al. 2 de l'art. 25 est, on ne peut
plus, formel sur la possibilité de recourir en annulation contre une
sentence arbitrale rendue sur le fondement de l'AU.A, seul texte constitutif du
droit commun de l'arbitrage OHADA "elle peut faire l'objet d'un
recours en annulation, qui doit être porté devant le juge
compétent dans l'Etat-partie". Si l'art. 25 al. 1 AU.A est univoque
sur l'impossibilité de recourir contre une sentence arbitrale par voie
d'opposition, d'appel ou de cassation "la sentence arbitrale n'est pas
susceptible d'opposition, d'appel, ni de pourvoi en cassation", les
alinéas 4 et 5 par contre, ouvrent la possibilité d'attaquer la
sentence par voies de recours extraordinaires. Ainsi, une sentence arbitrale
dans ce système peut faire "l'objet d'une tierce opposition devant
le tribunal arbitral [...]" (art. 25 al. 4). La
possibilité de recourir contre elle, en vue de sa révision n'est
pas non plus exclue "elle peut également faire l'objet d'un recours
en révision devant le tribunal arbitral [...]" (art. 25
al. 5).
Par rapport à la tierce opposition, il est clair
qu'elle n'est possible que si, les personnes qui n'ont été ni
parties, ni représentées à la convention d'arbitrage et
à la sentence qui en résulte, ont un intérêt
légitime à recourir contre ladite sentence. Dans ce cas, le
recours de tierce opposition peut être formé "devant le
tribunal arbitral par toute personne physique ou morale qui n'a pas
été appelée et lorsque cette sentence préjudicie
à ses droits" (art. 25 al. 4 AUA).
Par rapport au recours en révision, il conviendrait de
souligner que, sa mise en application nécessite que le tribunal arbitral
se réunisse de nouveau. Le cas contraire le recours sera porté
devant la juridiction étatique du siège du tribunal arbitral.
Conformément au principe de la révision, le recours a
nécessairement un effet dévolutif puisqu'il remet en cause la
chose jugée par le tribunal arbitral, pour qu'il soit à nouveau
statué en fait et en droit. Ceci suppose que les parties à
l'instance initiale soient appelées à l'instance en
révision.
a-. LA PROCEDURE DE RECOURS
Il est de règle que, la procédure de recours
doit, pour être valable, avoir un caractère contradictoire. Pour
cela, le recours doit être introduit devant le juge compétent dans
le respect du délai imparti, qui court en général,
à partir de la signification de la sentence munie de
l'exequatur. Le droit suisse présente cependant une
particularité due au fédéralisme. En règle
générale, le recours contre toute sentence arbitrale jugée
non valable est porté devant l'autorité judiciaire
compétente du lieu de l'arbitrage. A cet effet, la loi suisse
précise que c'est le tribunal fédéral qui est
compétent pour connaître du recours contre une sentence rendue sur
la base des dispositions du chapitre 12 LDIP. En comparaison aux autres
systèmes, en France c'est la cour d'appel du ressort du siège de
l'arbitrage qui, est compétente pour connaître de tout recours
contre une sentence arbitrale jugée non valable. En Angleterre, c'est la
commercial court et, en droit OHADA c'est la juridiction
compétente du siège de l'arbitrage dans l'Etat-partie.
Pour revenir au cas suisse, tout recours contre une sentence
arbitrale en Suisse "n'est ouvert que devant le tribunal
fédéral. La procédure est régie par les
dispositions de la loi fédérale d'organisation judiciaire
relatives au recours de droit public [...]"(art. 191 al. 1 LDIP).
Il va s'en dire que, les sentences rendues par un tribunal arbitral dont
le siège est situé sur le territoire helvétique ne peuvent
faire l'objet d'un recours que, devant le tribunal fédéral et non
devant la juridiction du siège.
Ce qui contraste d'avec la solution retenue en droit OHADA
puisque, le texte de l'AU.A relatif à la procédure de recours
prévoit que le recours "doit être porté devant le juge
compétent dans l'Etat-partie" (art 25 al. 2 AU.A). Il faut noter
cependant que, depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur le
Tribunal Fédéral (LTF)94(*), le recours contre la sentence n'est plus régi
par les dispositions de la Loi fédérale d'Organisation Judiciaire
relatives au recours de droit public. Seule, aujourd'hui la LTF
régissant les recours en matière civile est applicable.
Cependant, les parties, fort de l'autonomie de leur volonté, peuvent
librement à travers une clause d'exclusion spécifier que, tout
recours contre la sentence sera déféré à une
juridiction cantonale "toutefois, les parties peuvent convenir qu'en lieu
et place du tribunal fédéral, ce soit le juge du siège du
tribunal arbitral qui statue définitivement. Les cantons
désignent à cette fin une autorité cantonale unique"
(art. 191 al. 2 LDIP). On s'imagine que si la procédure est
dorénavant régie par les dispositions de la nouvelle Loi sur le
Tribunal Fédéral, en cas de clause d'exclusion, elle sera
régie par les dispositions de la loi de la juridiction du siège
de l'arbitrage c'est-à-dire le droit cantonal. Notons que, les parties
à l'arbitrage peuvent aussi renoncer au droit de recourir contre la
sentence sur des questions de droit ou de fait par l'insertion d'une clause
d'exclusion, "si les deux parties n'ont ni domicile, ni résidence
habituelle, ni établissement en suisse, elles peuvent par une
déclaration expresse dans la convention d'arbitrage ou un accord
écrit ultérieurement, exclure tout recours contre les sentences
du tribunal arbitral" (art. 192 LDIP). Ce droit ne leur offre cependant
pas, la possibilité de renoncer au droit à un procès
équitable ni à celui de voir le tribunal se prononcer uniquement
sur les questions qui lui ont été régulièrement
soumises.
Que ce soit en doit OHADA ou en droit suisse, le recours en
annulation a un effet suspensif. Il faut réserver le cas où
l'exécution provisoire de la sentence a été
ordonnée par le tribunal arbitral. Le juge étatique est dans ce
cas, compétent pour statuer sur le contentieux de l'exécution
provisoire. Par effet induit, le recours en annulation contre la sentence est
également, indirectement, un recours contre la décision ayant
accordée l'exequatur de la sentence.
Les effets du recours sont tels qu'en cas d'annulation de la
sentence arbitrale, "il appartient à la partie la plus diligente
d'engager, si elle le souhaite, une nouvelle procédure arbitrale
[...]" (art 29 AU.A).
Afin de préserver la volonté initiale des
parties de voir leur litige être tranché par un tribunal arbitral,
la juridiction étatique ayant annulé la sentence, ne dispose pas
du pouvoir d'évocation95(*).
Le rejet du recours en annulation emporte le caractère
exécutoire de la sentence, à cet effet l'art. 33 de l'AU.A
dispose que "le rejet du recours en annulation emporte de plein droit
validité [...] de la décision ayant accordée
l'exequatur".
b-. LES MOYENS DE RECOURS
Avant de souligner les moyens d'annulation de la sentence, il
nous parait important de mettre un accent particulier sur le sens d'une
règle procédurale importante en matière d'arbitrage
"la partie qui, en connaissance de cause, s'abstient d'invoquer sans
délai une irrégularité et poursuit l'arbitrage est
réputée avoir renoncé à s'en prévaloir"
(art. 14 al. 8 AU.A). Cette règle qui ne concerne que la
procédure arbitrale, n'est efficace que si elle peut être
opposée dans le cadre d'un recours en annulation fondée sur une
irrégularité procédurale. Elle signifie en clair que si
une partie introduit un recours en annulation, fondé sur une
irrégularité procédurale, alors qu'ayant connaissance de
ladite irrégularité, elle ne l'a pas invoquée au cours de
la procédure, cette partie devrait se faire opposer sa renonciation
à se prévaloir des telles irrégularités.
Si l'on s'en réfère aux dispositions du droit
communautaire de l'arbitrage OHADA, à son art. 26 AU.A et, du chapitre
12 à son art. 190 LDIP, les moyens pour la recevabilité d'un
recours en annulation dans les deux systèmes sont les suivants :
- si le Tribunal arbitral a statué sans convention
d'arbitrage ou sur une convention nulle ou expirée (art. 26 al. 2
AU.A),
- si le Tribunal arbitral a été
irrégulièrement composé ou l'arbitre unique
irrégulièrement désigné (art. 26 al. 3 AU.A).
Cette même formulation, on la retrouve dans les dispositions du chapitre
12 LDIP lorsque l'arbitre unique a été
irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral
irrégulièrement composé (art. 190 al. 2 let. a
LDIP),
- si le Tribunal arbitral a statué sans se
conformer à la mission qui lui a été confiée
(art. 26 al. 4 AU.A),
- si le principe du contradictoire n'a pas
été respecté (art. 26 al. 5 AU.A). Le même
moyen, on le retrouve évoque dans le chapitre 12 LDIP lorsque
l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en
procédure contradictoire n'a pas été respectée
(art. 190 al. 2 let. d LDIP),
- si le Tribunal arbitral a violé une règle
d'ordre public international des Etats signataires du Traité (art.
26 al. 6AU.A). Il en est de même en droit suisse de l'arbitrage
international lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public
(art. 190 al. 2 let. e LDIP),
- si la sentence arbitrale n'est pas motivée
(art. 26 al. 7 AU.A),
- lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré
à tort compétent ou incompétent (art. 190 al. 2 let.
b LDIP),
- lorsque le tribunal arbitral a statué
au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de
se prononcer sur un des chefs de la demande (art. 190 al. 2 let. c
LDIP).
CONCLUSION
Nous n'avons pas la prétention, à travers ce
travail, de rédiger une oeuvre de la plus parfaite cohérence et
précision. D'une part, elle n'est pas d'une exhaustivité qui lui
permettrait de cerner tous les aspects d'une étude comparée du
droit de l'Arbitrage International, loin s'en faut (il s'agit d'un
mémoire de DEA qui peut être pris comme un avant goût
à une thèse). D'autre part, elle n'a pas la prétention
d'être le fruit d'une réflexion dogmatique sur les deux
systèmes mais, se veut être une modeste contribution à la
doctrine sur le Droit International Privé notamment l'Arbitrage dans sa
composante Internationale. Cette étude comparée, pourra comporter
certes des imperfections et des lacunes. Cependant, nous avons la conviction
qu'elle sera d'une certaine utilité et dans une autre mesure d'une
utilité certaine, pour tous ceux qui souhaitent collationner les
solutions des droits nationaux aux principales questions que soulève
l'arbitrage international dans les deux espaces.
ANNEXES
TEXTE LEGISLATIF REGISSANT
L'ARBITRAGE OHADA
ACTE UNIFORME RELATIF AU DROIT DE L'ARBITRAGE DANS LE CADRE DU
TRAITE OHADA
Le Conseil des ministres de l'Organisation pour
l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA),
Vu le Traité relatif à l'harmonisation du droit
des affaires en Afrique, notamment en ses articles 2, 5 à 12 ;
Vu le rapport du Secrétaire permanent et les
observations des Etats-parties ;
Vu l'avis en date du 3 décembre 1998 de la Cour Commune
de Justice et d'Arbitrage ;
Après en avoir délibéré, adopte
à l'unanimité des Etats-parties présents et votants l'acte
uniforme dont la teneur suit :
CHAPITRE I CHAMP D'APPLICATION
Article 1
Le présent Acte Uniforme à vocation à
s'appliquer à tout arbitrage lorsque le siège du tribunal
arbitral se trouve dans l'un des Etats-parties.
Article 2
Toute personne physique ou morale peut recourir à
l'arbitrage sur les droits dont elle a la libre disposition.
Les Etats et les autres collectivités publiques
territoriales ainsi que les Etablissements publics peuvent également
être parties à un arbitrage, sans pouvoir invoquer leur propre
droit pour contester l'arbitrabilité d'un litige, leur capacité
à compromettre ou la validité de la convention d'arbitrage.
Article 3
La convention d'arbitrage doit être faite par
écrit, ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve,
notamment par la référence faite à un document la
stipulant.
Article 4
La convention d'arbitrage est indépendante du contrat
principal.
Sa validité n'est pas affectée par la
nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après
la commune volonté des parties, sans référence
nécessaire à un droit étatique.
Les parties ont toujours la faculté, d'un commun
accord, de recourir à une convention d'arbitrage, même lorsqu'une
instance a déjà été engagée devant une autre
juridiction.
CHAPITRE II COMPOSITION DU TRIBUNAL ARBITRAL
Article 5
Les arbitres sont nommés, révoqués ou
remplacés conformément à la convention des parties.
A défaut d'une telle convention d'arbitrage ou si la
convention est insuffisante :
a) en cas d'arbitrage par trois arbitres, chaque partie nomme
un arbitre et les deux arbitres ainsi nommés choisissent le
troisième arbitre ; si une partie ne nomme pas un arbitre dans un
délai de trente jours à compter de la réception d'une
demande à cette fin émanant de l'autre partie, ou si les deux
arbitres ne s'accordent pas sur le choix du troisième arbitre dans un
délai de trente jours à compter de leur désignation, la
nomination est effectuée, sur la demande d'une partie, par le juge
compétent dans l'Etat-partie ;
b) en cas d'arbitrage par un arbitre unique, si les parties ne
peuvent s'accorder sur le choix de l'arbitre, celui-ci est nommé, sur la
demande d'une partie, par le juge compétent dans l'Etat-partie.
Article 6
La mission d'arbitre ne peut être confiée
qu'à une personne physique.
L'arbitre doit avoir le plein exercice de ses droits civils,
demeurer indépendant et impartial vis-à-vis des parties.
Article 7
L'arbitre qui accepte sa mission doit porter cette acceptation
à la connaissance des parties par tout moyen laissant trace
écrite.
Si l'arbitre suppose en sa personne une cause de
récusation, il doit en informer les parties, et ne peut accepter sa
mission qu'avec leur accord unanime et écrit.
En cas de litige, et si les parties n'ont pas
réglé la procédure de récusation, le juge
compétent dans l'Etat-partie statue sur la récusation. Sa
décision n'est susceptible d'aucun recours.
Toute cause de récusation doit être
soulevée sans délai par la partie qui entend s'en
prévaloir.
La récusation d'un arbitre n'est admise que pour une
cause révélée après sa nomination.
Article 8
Le Tribunal arbitral est constitué soit d'un seul
arbitre, soit de trois arbitres.
Si les parties désignent les arbitres en nombre pair,
le Tribunal arbitral est complété par un arbitre choisi, soit
conformément aux prévisions des parties, soit, en l'absence de
telles prévisions, par les arbitres désignés, soit
à défaut d'accord entre ces derniers, par le juge
compétent dans l'Etat-partie.
Il en est de même en cas de récusation,
d'incapacité, de décès, de démission ou de
révocation d'un arbitre.
CHAPITRE III L'INSTANCE ARBITRALE
Article 9
Les parties doivent être traitées sur un pied
d'égalité et chaque partie doit avoir toute possibilité de
faire valoir ses droits.
Article 10
Le fait pour les parties de s'en remettre à un
organisme d'arbitrage les engage à appliquer le Règlement
d'arbitrage de cet organisme, sauf pour les parties à en écarter
expressément certaines dispositions.
L'instance arbitrale est liée dès le moment
où l'une des parties saisit le ou les arbitres conformément
à la convention d'arbitrage, ou, à défaut d'une telle
désignation, dès que l'une des parties engage la procédure
de constitution du Tribunal arbitral.
Article 11
Le Tribunal arbitral statue sur sa propre compétence, y
compris sur toutes questions relatives à l'existence ou à la
validité de la convention d'arbitrage.
L'exception d'incompétence doit être
soulevée avant toute défense au fond, sauf si les faits sur
lesquels elle est fondée ont été
révélés ultérieurement.
Le tribunal arbitral peut statuer sur sa propre
compétence dans la sentence au fond ou dans une sentence partielle
sujette au recours en annulation.
Article 12
Si la convention d'arbitrage ne fixe pas de délai, la
mission des arbitres ne peut excéder six mois à compter du jour
où le dernier d'entre eux l'a acceptée.
Le délai légal ou conventionnel peut être
prorogé, soit par accord des parties, soit à la demande de l'une
d'elles ou du Tribunal arbitral, par le juge compétent dans
l'Etat-partie.
Article 13
Lorsqu'un litige, dont un Tribunal arbitral est saisi en vertu
d'une convention arbitrale, est porté devant une juridiction
étatique, celle-ci doit, si l'une des parties en fait la demande, se
déclarer incompétente.
Si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi, la juridiction
étatique doit également se déclarer incompétente
à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle.
En tout état de cause, la juridiction étatique
ne peut relever d'office son incompétence.
Toutefois, l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait
pas obstacle à ce qu'à la demande d'une partie, une juridiction,
en cas d'urgence reconnue et motivée ou lorsque la mesure devra
s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA, ordonne des
mesures provisoires ou conservatoires, dès lors que ces mesures
n'impliquent pas un examen du litige au fond, pour lequel seul le Tribunal
arbitral est compétent.
Article 14
Les parties peuvent directement ou par référence
à un règlement d'arbitrage régler la procédure
arbitrale ; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de
procédure de leur choix.
Faute d'une telle convention, le tribunal arbitral peut
procéder à l'arbitrage comme il le juge approprié.
A l'appui de leurs prétentions, les parties ont la
charge d'alléguer et de prouver les faits propres à les
fonder.
Les arbitres peuvent inviter les parties à leur fournir
les explications de fait, et à leur présenter, par tout moyen
légalement admissible, les preuves qu'ils estiment nécessaires
à la solution du litige.
Ils ne peuvent retenir dans leur décision les moyens,
les explications ou les documents invoqués ou produits par les parties
que si celles-ci ont été à même d'en débattre
contradictoirement.
Ils ne peuvent fonder leur décision sur les moyens
qu'ils auraient relevés d'office, sans avoir au préalable
invité les parties à présenter leurs observations.
Si l'aide des autorités judiciaires est
nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral
peut d'office ou sur requête requérir le concours du juge
compétent dans l'Etat-partie.
La partie qui, en connaissance de cause, s'abstient d'invoquer
sans délai une irrégularité et poursuit l'arbitrage est
réputée avoir renoncé à s'en prévaloir.
Sauf convention contraire, les arbitres disposent
également du pouvoir de trancher tout incident de vérification
d'écriture ou de faux.
Article 15
Les arbitres tranchent le fond du litige conformément
aux règles de droit désignées par les parties ou à
défaut choisies par eux comme les plus appropriées compte tenu le
cas échéant des usages du commerce international.
Ils peuvent également statuer en amiable compositeur
lorsque les parties leur ont conféré ce pouvoir.
Article 16
L'instance arbitrale prend fin par l'expiration du
délai d'arbitrage, sauf prorogation convenue ou ordonnée.
Elle peut prendre fin également en cas d'acquiescement
à la demande, de désistement, de transaction ou de sentence
définitive.
Article 17
Le Tribunal arbitral fixe la date à laquelle l'affaire
sera mise en délibéré.
Après cette date, aucune demande ne peut être
formée ni aucun moyen soulevé.
Aucune observation ne peut être présentée,
ni aucune pièce produite si ce n'est à la demande expresse et par
écrit du Tribunal arbitral.
Article 18
Les délibérations du Tribunal arbitral sont
secrètes.
CHAPITRE IV LA SENTENCE ARBITRALE
Article 19
La sentence arbitrale est rendue dans la procédure et
selon les formes convenues par les parties.
A défaut d'une telle convention, la sentence est rendue
à la majorité des voix lorsque le tribunal est composé de
trois arbitres.
Article 20
La sentence arbitrale doit contenir l'indication :
- des nom et prénoms de ou des arbitres qui l'ont
rendue,
- de sa date,
- du siège du tribunal arbitral,
- des noms, prénoms et dénomination des parties,
ainsi que leur domicile ou siège social,
- le cas échéant, des nom et prénoms des
avocats ou de toute personne ayant représenté ou assisté
les parties,
- de l'exposé des prétentions respectives des
parties, de leurs moyens ainsi que des étapes de la procédure.
Elle doit être motivée.
Article 21
La sentence arbitrale est signée par le ou les
arbitres.
Toutefois, si une minorité d'entre eux refuse de la
signer, il doit en être fait mention et la sentence a le même effet
que si elle avait été signée par tous les arbitres.
Article 22
La sentence dessaisit l'arbitre du litige.
L'arbitre a néanmoins le pouvoir d'interpréter
la sentence, ou de réparer les erreurs et omissions matérielles
qui l'affectent.
Lorsqu'il a omis de statuer sur un chef de demande, il peut le
faire par une sentence additionnelle.
Dans l'un ou l'autre cas susvisé, la requête doit
être formulée dans le délai de 30 jours à compter de
la notification de la sentence. Le tribunal dispose d'un délai de 45
jours pour statuer.
Si le tribunal arbitral ne peut à nouveau être
réuni, ce pouvoir appartient au juge compétent dans
l'Etat-partie.
Article 23
La sentence arbitrale a, dès qu'elle est rendue,
l'autorité de la chose jugée relativement à la
contestation qu'elle tranche.
Article 24
Les arbitres peuvent accorder l'exécution provisoire
à la sentence arbitrale, si cette exécution a été
sollicitée, ou la refuser, par une décision motivée.
CHAPITRE V RECOURS CONTRE LA SENTENCE ARBITRALE
Article 25
La sentence arbitrale n'est pas susceptible d'opposition,
d'appel, ni de pourvoi en cassation.
Elle peut faire l'objet d'un recours en annulation, qui doit
être porté devant le juge compétent dans l'Etat-partie.
La décision du juge compétent dans l'Etat-partie
n'est susceptible que de pourvoi en cassation devant la Cour Commune de Justice
et d'Arbitrage.
La sentence arbitrale peut faire l'objet d'une tierce
opposition devant le tribunal arbitral par toute personne physique ou morale
qui n'a pas été appelée et lorsque cette sentence
préjudicie à ses droits.
Elle peut également faire l'objet d'un recours en
révision devant le tribunal arbitral en raison de la découverte
d'un fait de nature à exercer une influence décisive et qui,
avant le prononcé de la sentence, était inconnu du tribunal
arbitral et de la partie qui demande la révision.
Article 26
Le recours en annulation n'est recevable que dans les cas
suivants :
- si le Tribunal arbitral a statué sans convention
d'arbitrage ou sur une convention nulle ou expirée ;
- si le Tribunal arbitral a été
irrégulièrement composé ou l'arbitre unique
irrégulièrement désigné ;
- si le Tribunal arbitral a statué sans se conformer
à la mission qui lui a été confiée ;
- si le principe du contradictoire n'a pas été
respecté ;
- si le Tribunal arbitral a violé une règle
d'ordre public international des Etats signataires du Traité.
- si la sentence arbitrale n'est pas motivée.
Article 27
Le recours en annulation est recevable dès le
prononcé de la sentence ; il cesse de l'être s'il n'a pas
été exercé dans le mois de la signification de la sentence
munie de l'exequatur.
Article 28
Sauf si l'exécution provisoire de la sentence a
été ordonnée par le Tribunal arbitral, l'exercice du
recours en annulation suspend l'exécution de la sentence arbitrale
jusqu'à ce que le juge compétent dans l'Etat-partie ait
statué.
Ce juge est également compétent pour statuer sur
le contentieux de l'exécution provisoire.
Article 29
En cas d'annulation de la sentence arbitrale, il appartient
à la partie la plus diligente d'engager, si elle le souhaite, une
nouvelle procédure arbitrale, conformément au présent Acte
Uniforme.
CHAPITRE VI
RECONNAISSANCE ET EXECUTION DES SENTENCES ARBITRALES
Article 30
La sentence arbitrale n'est susceptible d'exécution
forcée qu'en vertu d'une décision d'exequatur rendue par le juge
compétent dans l'Etat-partie.
Article 31
La reconnaissance et l'exequatur de la sentence arbitrale
supposent que la partie qui s'en prévaut établisse l'existence de
la sentence arbitrale.
L'existence de la sentence arbitrale est établie par la
production de l'original accompagné de la convention d'arbitrage ou des
copies de ces documents réunissant les conditions requises pour leur
authenticité.
Si ces pièces ne sont pas rédigées en
langue française, la partie devra en produire une traduction
certifiée par un traducteur inscrit sur la liste des experts
établie par les juridictions compétentes.
La reconnaissance et l'exequatur sont refusés si la
sentence est manifestement contraire à une règle d'ordre public
international des Etats-parties.
Article 32
La décision qui refuse l'exequatur n'est susceptible
que de pourvoi en cassation devant la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.
La décision qui accorde l'exequatur n'est susceptible
d'aucun recours.
Toutefois, le recours en annulation de la sentence emporte de
plein droit dans les limites de la saisine du juge compétent de
l'Etat-partie, recours contre la décision ayant accordé
l'exequatur.
Article 33
Le rejet du recours en annulation emporte de plein droit
validité de la sentence arbitrale ainsi que de la décision ayant
accordé l'exequatur.
Article 34
Les sentences arbitrales rendues sur le fondement de
règles différentes de celles prévues par le présent
Acte Uniforme, sont reconnues dans les Etats-parties, dans les conditions
prévues par les conventions internationales éventuellement
applicables, et à défaut, dans les mêmes conditions que
celles prévues aux dispositions du présent Acte Uniforme.
CHAPITRE VII DISPOSITIONS FINALES
Article 35
Le présent acte uniforme tient lieu de loi relative
à l'arbitrage dans les Etats-parties.
Celui-ci n'est applicable qu'aux instances arbitrales
nées après son entrée en vigueur.
Article 36
Le présent Acte uniforme sera publié au Journal
Officiel de l'OHADA et des Etats-Parties.
Il entrera en vigueur conformément aux dispositions de
l'article 9 du traité relatif à l'Harmonisation du Droit des
Affaires en Afrique.
LOI FEDERALE SUR LE DROIT INTERNATIONAL PRIVE (LDIP) CHAPITRE 12 : ARBITRAGE INTERNATIONAL
Art.176
I. Champ d'application; siège du tribunal arbitral
1) Les dispositions du présent chapitre s'appliquent
à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se trouve en
Suisse et si au moins l'une des parties n'avait, au moment de la conclusion de
la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa résidence habituelle
en Suisse.
2) Les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent
pas lorsque les parties ont exclu par écrit son application et qu'elles
sont convenues d'appliquer exclusivement les règles de la
procédure cantonale en matière d'arbitrage.
3) Les parties en cause ou l'institution d'arbitrage
désignée par elles ou, à défaut, les arbitres
déterminent le siège du tribunal arbitral.
Art. 177
II. Arbitrabilité
1) Toute cause de nature patrimoniale peut faire l'objet d'un
arbitrage.
2) Si une partie à la convention d'arbitrage est un
Etat, une entreprise dominée ou une organisation contrôlée
par lui, cette partie ne peut invoquer son propre droit pour contester
l'arbitrabilité d'un litige ou sa capacité d'être partie
à un arbitrage.
Art. 178
III. Convention d'arbitrage
1) Quant à la forme, la convention d'arbitrage est
valable si elle est passée par écrit, télégramme,
télex, télécopieur ou tout autre moyen de communication
qui permet d'en établir la preuve par un texte.
2) Quant au fond, elle est valable si elle répond aux
conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit
régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat
principal, soit encore le droit suisse.
3) La validité d'une convention d'arbitrage ne peut pas
être contestée pour le motif que le contrat principal ne serait
pas valable ou que la convention d'arbitrage concernerait un litige non encore
né.
Art. 179
IV. Tribunal arbitral
1-. Constitution
1) Les arbitres sont nommés, révoqués ou
remplacés conformément à la convention des parties.
2) A défaut d'une telle convention, le juge du
siège du tribunal arbitral peut être saisi; il applique par
analogie les dispositions du droit cantonal sur la nomination, la
révocation ou le remplacement des arbitres.
3) Lorsqu'un juge est appelé à nommer un
arbitre, il donne suite à la demande de nomination qui lui est
adressée, à moins qu'un examen sommaire ne démontre qu'il
n'existe entre les parties aucune convention d'arbitrage.
Art. 180
2-. Récusation des arbitres
1) Un arbitre peut être récusé:
a* Lorsqu'il ne répond pas aux qualifications convenues
par les parties;
b* Lorsque existe une cause de récusation prévue
par le règlement d'arbitrage adopté par les parties, ou
c* Lorsque les circonstances permettent de douter
légitimement de son indépendance.
2) Une partie ne peut récuser un arbitre qu'elle a
nommé ou qu'elle a contribué à nommer que pour une cause
dont elle a eu connaissance après cette nomination. Le tribunal arbitral
et l'autre partie doivent être informés sans délai de la
cause de récusation.
3) En cas de litige et si les parties n'ont pas
réglé la procédure de récusation, le juge
compétent du siège du tribunal arbitral statue
définitivement.
Art. 181
V. Litispendance
L'instance arbitrale est pendante dès le moment
où l'une des parties saisit le ou les arbitres désignés
dans la convention d'arbitrage ou, à défaut d'une telle
désignation, dès que l'une des parties engage la procédure
de constitution du tribunal arbitral.
Art. 182
VI. Procédure
1*. Principe
1) Les parties peuvent, directement ou par
référence à un règlement d'arbitrage, régler
la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à
la loi de procédure de leur choix.
2) Si les parties n'ont pas réglé la
procédure, celle-ci sera, au besoin, fixée par le tribunal
arbitral, soit directement, soit par référence à une loi
ou à un règlement d'arbitrage.
3) Quelle que soit la procédure choisie, le tribunal
arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit
d'être entendues en procédure contradictoire.
Art. 183
2-. Mesures provisionnelles et mesures
conservatoires
1) Sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut
ordonner des mesures provisionnelles ou des mesures conservatoires à la
demande d'une partie.
2) Si la partie concernée ne s'y soumet pas
volontairement, le tribunal arbitral peut requérir le concours du juge
compétent. Celui-ci applique son propre droit.
3) Le tribunal arbitral ou le juge peuvent subordonner les
mesures provisionnelles ou les mesures conservatoires qu'ils ont
été requis d'ordonner à la fourniture de
sûretés appropriées.
Art. 184
3-. Administration des preuves
1) Le tribunal arbitral procède lui-même à
l'administration des preuves.
2) Si l'aide des autorités judiciaires de l'Etat est
nécessaire à l'administration de la preuve, le tribunal arbitral,
ou les parties d'entente avec lui, peuvent requérir le concours du juge
du siège du tribunal arbitral; ce juge applique son propre droit.
Art. 185
4-. Autres cas du concours du juge
Si l'aide de l'autorité judiciaire est
nécessaire dans d'autres cas, on requerra le concours du juge du
siège du tribunal arbitral.
Art. 186
VII. Compétence
1) Le tribunal arbitral statue sur sa propre
compétence.
2) L'exception d'incompétence doit être
soulevée préalablement à toute défense sur le
fond.
3) En général, le tribunal arbitral statue sur
sa compétence par une décision incidente.
Art. 187
VIII. Décision au fond
1-. Droit applicable
1) Le tribunal arbitral statue selon les règles de
droit choisies par les parties ou, à défaut de choix, selon les
règles de droit avec lesquelles la cause présente les liens les
plus étroits.
2) Les parties peuvent autoriser le tribunal arbitral à
statuer en équité.
Art. 188
2-. Sentence partielle
Sauf convention contraire, le tribunal arbitral peut rendre
des sentences partielles.
Art. 189
3-. Sentence arbitrale
1) La sentence arbitrale est rendue dans la procédure
et selon la forme convenues par les parties.
2) A défaut d'une telle convention, la sentence est
rendue à la majorité ou, à défaut de
majorité, par le président seul. Elle est écrite,
motivée, datée et signée. La signature du président
suffit.
Art. 190
IX. Caractère définitif. Recours
1-. Principe
1) La sentence est définitive dès sa
communication.
2) Elle ne peut être attaquée que:
a* Lorsque l'arbitre unique a été
irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral
irrégulièrement composé
b* Lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré
à tort compétent ou incompétent;
c* Lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà
des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur
un des chefs de la demande;
d* Lorsque l'égalité des parties ou leur droit
d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas
été respecté;
e* Lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre
public.
3) En cas de décision incidente, seul le recours pour
les motifs prévus au 2e alinéa, lettres a et b, est ouvert; le
délai court dès la communication de la décision.
Art. 191
2-. Autorité de recours
1) Le recours n'est ouvert que devant le Tribunal
fédéral. La procédure est régie par les
dispositions de la loi d'organisation judiciaire relatives au recours de droit
public.
2) Toutefois, les parties peuvent convenir qu'en lieu et place
du Tribunal fédéral, ce soit le juge du siège du tribunal
arbitral qui statue définitivement. Les cantons désignent
à cette fin une autorité cantonale unique.
Art. 192
X. Renonciation au recours
1) Si les deux parties n'ont ni domicile, ni résidence
habituelle, ni établissement en Suisse, elles peuvent, par une
déclaration expresse dans la convention d'arbitrage ou un accord
écrit ultérieur, exclure tout recours contre les sentences du
tribunal arbitral; elles peuvent aussi n'exclure le recours que pour l'un ou
l'autre des motifs énumérés à l'article 190,
2e alinéa.
2) Lorsque les parties ont exclu tout recours contre les
sentences et que celles -ci doivent être exécutées en
Suisse, la convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et
l'exécution de sentences arbitrales étrangères s'applique
par analogie.
Art. 193
XI. Dépôt et certificat de force
exécutoire
1) Chaque partie peut déposer, à ses frais, une
expédition de la sentence auprès du tribunal suisse du
siège du tribunal arbitral.
2) Le tribunal suisse certifie, sur requête d'une
partie, que la sentence est exécutoire.
3) À la requête d'une partie, le tribunal
arbitral certifie que la sentence a été rendue
conformément aux dispositions de la présente loi; un tel
certificat vaut dépôt.
Art. 194
XII. Sentences arbitrales étrangères
La reconnaissance et l'exécution des sentences
arbitrales étrangères sont régies par la convention de New
York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences
arbitrales étrangères.
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et 3 avril 1976. - Genève : Georg, 1977. - P. 60-113.
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droit des affaires en Afrique, in : Revue de l'arbitrage, n°3, 1999.
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l'exécution des sentences arbitrales, in : Penant, n°833,
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- PATOCCHI PAOLO MICHELE.- Demandes et exceptions de
nature délictuelle dans l'arbitrage international :
Arbitrabilité, compétence arbitrale et détermination de la
loi applicable selon le droit suisse et la pratique internationale - quelques
observations, In: Responsabilité civile et assurance :
études en l'honneur de Baptiste Rusconi. - Lausanne : Bis et Ter, 2000.
- P. 237-265.
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procédure et l'obtention de la preuve dans l'arbitrage commercial
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matière bancaire et financière, In: La semaine judiciaire. -
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provisionnelles et l'arbitrage : aperçu comparatif des pouvoirs
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François Knoepfler. - Bâle ; Genève [etc.] : Helbing &
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d'être entendu dans l'arbitrage international In: Etudes de droit
international en l'honneur de Pierre Lalive. - Bâle;
Francfort-sur-le-Main : Helbing & Lichtenhahn, cop. 1993. - P. 607-624.
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fédéral suisse en matière d'arbitrage interne et
international, In: Bulletin ASA. - Bâle. - Année 6 (1988), 1,
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matière d'arbitrage international en Suisse selon le concordat et la
nouvelle loi fédérale, In: Revue de l'arbitrage. - Paris
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- SECK Tom Amadou.- L'effectivité de la pratique
arbitrale de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA) et les
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juridique et judiciaire favorable aux investissements privés
internationaux, in : Penant, n°833, Mai-Août 2000.
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litispendance et l'arbitrage international: quelques réflexions sur le
pour et le contre, In: Le juriste suisse face au droit et aux jugements
étrangers. - Fribourg : Ed. Universitaires, 1988. - P. 71-88.
- TCHAKOUA, Jean Marie.- Sentences arbitrales,
exécution, ordonnances d'exequatur : Revue camerounaise de
l'arbitrage, n° 10, Juillet-Août-Sept.2000.
- VOLLENWEIDER ULRICH H.- L'arbitrage volontaire en droit
international privé : aperçu des jurisprudences de la Suisse, de
la France et de l'Allemagne 1938.
- WERNER WENGER / LALIVE PIERRE (rapporteurs).-
L'arbitrage international privé et la Suisse (Die
internationale private Schiedsgerichtsbarkeit und die Schweiz) : Colloque des 2
et 3 avril 1976 organisé par le Département de droit
international privé de la Faculté de droit de Genève ; en
collaboration avec l'Association suisse de l'arbitrage, Genève : Georg,
1977, Mémoires publiés par la Faculté de droit de
Genève no 53.
- YAFEI ZHANG.- Contrôle et intervention judiciaire
étatique sur l'arbitrage commercial international : étude
comparée en droit français et suisse, Genève :
[s.n.], 1998.
- ZINZINDOHOUE, Abraham.- Les juges nationaux et la loi
aux prises avec le droit harmonisé, in RDAI, n°2, 2000.
SIGLES ET ABREVIATIONS
ATF : Arrêt du Tribunal Fédéral
CAIL : Cour d'Arbitrage International de Londres
CCI : Chambre de Commerce Internationale de Paris
CCIG : Chambre de Commerce d'Industrie et des Services de
Genève
CCJA : Cour Commune de Justice et d'Arbitrage
CIA : Concordat Inter cantonal sur l'Arbitrage
CJB : Code Judiciaire Belge
CIRDI : Centre International pour le Règlement des
Différents relatifs aux Investissements
CNUDCI : Conférence des Nations Unies pour le Droit
Commercial International
CPCI : Code de Procédure Civile Italien
IBA : International Bar Association
JP : Jurisprudence
LDIP : Loi fédérale sur le Droit International
Privé
NCPC : Nouveau Code de Procédure Civile français
OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit
des Affaires
SU : Loi suédoise d'arbitrage du 4 mars 1999
TF : Tribunal Fédéral
ZPO : Zivilprozessordnung (Loi de Procédure Civile
allemande du 22 décembre 1997)
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS
1
DEDICACE
2
INTRODUCTION
3
CHAPITRE I-. NOTIONS D'ARBITRAGE INTERNATIONAL ET
DOMAINES D'APPLICATION DE L'ACTE UNIFORME RELATIF AU DROIT DE L'ARBITRAGE OHADA
ET DU CHAPITRE 12 LDIP
9
SECTION I.- L'INSTITUTION D'ARBITRAGE
11
§I.- LA NOTION D'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE
11
A.- DEFINITIONS DE L'ARBITRAGE
11
1-. DEFINITION NOTIONNELLE DE L'ARBITRAGE
11
2-. LE CONCEPT D'ARBITRAGE INTERNATIONAL
12
B-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA ET
SUISSE : UNITE OU DUALITE DE REGLEMENTATION
14
1-. LES FONDEMENTS DE L'UNITE DU REGIME JURIDIQUE : LE
CAS OHADA
15
2-. LES FONDEMENTS DE LA DUALITE DU REGIME JURIDIQUE EN DROIT
SUISSE
17
§ II-. LE CONCEPT D'INTERNATIONALITE EN DROIT OHADA ET
SUISSE
19
A-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADA
20
B-. L'INTERNATIONALITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT SUISSE
21
SECTION II -. LES DOMAINES DE L'ARBITRAGE DANS LES
DEUX SYSTEMES
23
§II-. PRINCIPE D'AUTONOMIE ET DE VALIDITE DE LA CONVENTION
D'ARBITRAGE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP
35
A-. LA VALIDITE MATERIELLE DE LA CONVENTION
36
1-. LA VALIDITE OBJECTIVE DE LA CONVENTION ARBITRALE DE DIP
37
A.- ARBITRABILITE, LE FACE A FACE DE LA LIBRE DISPOSITION
DES DROITS ET DE LA PATRIMONIALITE DE LA CAUSE
37
B-. ABSENCE DE RESERVE A L'ARBITRABILITE DU LITIGE
40
2-. VALIDITE SUBJECTIVE OU VALIDITE QUANT AU FOND DE LA
CONVENTION DE DIP EN DROIT OHADA ET SUISSE
42
B-. LA VALIDITE FORMELLE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE DE
DIP EN DROIT OHADA ET EN DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL
43
1-. PRINCIPE
44
A-. LE FORMALISME PROBATOIRE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE EN
DROIT OHADA
44
B-. LE FORMALISME DE VALIDITE DE LA CONVENTION D'ARBITRAGE EN
DROIT SUISSE
45
2-. LA CONVENTION D'ARBITRAGE PAR REFERENCE
46
CHAPITRE II-. L'INSTANCE ARBITRALE, LA SENTENCE ET LES
VOIES DE RECOURS SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP
48
SECTION I-. LA PROCEDURE ARBITRALE
49
§ I-. LE TRIBUNAL ARBITRAL ET LE STATUT DES ARBITRES
49
A-. LA CONSTITUTION DU TRIBUNAL ARBITRAL
49
1-. LA CONSTITUTION CONVENTIONNELLE
49
2-. LA CONSTITUTION PAR LE JUGE D'APPUI
52
B-. LA RECUSATION DES ARBITRES
55
1-. LES MOTIFS DE RECUSATION ET LEURS CONSEQUENCES JURIDIQUES
56
2-. LA DISCLOSURE OU OBLIGATION D'INFORMATION DES
ARBITRES
59
3-. LA PROCEDURE DE RECUSATION
61
§ II-. LE STATUT DE L'ARBITRE DE DIP EN DROIT OHADA ET EN
DROIT SUISSE
63
A-. LES CONDITIONS LEGALES
63
1-. LES MODALITES LEGALES
63
2-. LES DROITS ET OBLIGATIONS DES ARBITRES
66
B-. LA QUESTION DE LA RESPONSABILITE ET DE L'IMMUNITE DES
ARBITRES DE DIP EN DROIT POSITIF OHADA ET LA SUISSE
67
SECTION II-. L'INSTANCE ARBITRALE
70
§ I-. L'INSTANCE ARBITRALE
70
A-. LA LITISPENDANCE
70
B-. LA PROCEDURE ARBITRALE SELON L'AU.A ET LE CHAPITRE 12 LDIP
71
1-. LE LIBERALISME : PRINCIPAL VECTEUR PROCEDURAL EN MATIERE
D'ARBITRAGE INTERNATIONAL
72
2-. LES LIMITES A L'AUTONOMIE PROCEDURALE EN DROIT OHADA ET
SUISSE
75
B-. LES MESURES PROVISOIRES OU CONSERVATOIRES ET LES MESURES
PROBATOIRES
77
1-. LES MESURES PROVISIONNELLES OU CONSERVATOIRES
77
2-. LA PROBLEMATIQUE DES PREUVES EN DROIT OHADA ET EN
DROIT SUISSE DE L'ARBITRAGE INTERNATIONAL
81
§ II-. LE DROIT APPLICABLE AU FOND ET LA SENTENCE ARBITRALE
DE DIP
85
A-. LE FOND DU LITIGE
86
1-. AMIABLE COMPOSITION ET ARBITRAGE EN EQUITE : L'AUTRE
FACETTE DU TRAITEMENT DU LITIGE AU FOND EN DROIT OHADA ET SUISSE
86
2-. L'ARBITRAGE DE DROIT DU TRIBUNAL DE DIP EN DROIT OHADA
ET EN DROIT SUISSE
89
A-. LA VOLONTE DES PARTIES OU LE RATTACHEMENT SUBJECTIF
90
B-. LA VOLONTE DES ARBITRES OU LE RATTACHEMENT OBJECTIF
94
B-. LA SENTENCE ARBITRALE ET LES VOIES DE RECOURS
97
1-. LA SENTENCE ARBITRALE
97
2-. LES VOIES DE RECOURS
102
CONCLUSION
107
ANNEXES
108
TEXTE LEGISLATIF REGISSANT L'ARBITRAGE OHADA
108
LOI FEDERALE SUR LE DROIT INTERNATIONAL PRIVE (LDIP)
CHAPITRE 12 : ARBITRAGE INTERNATIONAL
116
BIBLIOGRAPHIE
121
SIGLES ET ABREVIATIONS
125
TABLE DES MATIERES
126
* 1 Aregba Polo "L'OHADA
: histoire, objectifs, structures" in L'OHADA et les perspectives de
l'arbitrage en Afrique Bruylant 2000. P. 9
* 2 La Zone franc regroupe 14
pays d'Afrique sub-saharienne, les Comores et la France. Elle est issue de
l'évolution de l'ancien empire colonial français et de la
volonté commune de ces pays de maintenir un cadre institutionnel qui a
contribué à la stabilité du cadre
macroéconomique.
* 3 Le droit Uniforme
africain des Affaires éd. Juris-classeur 2004, P. 1
* 4 Art 2 du Traité
OHADA. Il conviendrait de souligner que, dans le corpus de cet article, le
législateur à citer le droit du travail comme faisant partie du
droit des affaires, ceci peut à tort ou à raison être
considéré par les puristes comme un lapsus. Ce qui est vrai, car
sur le plan de l'orthodoxie juridique on ne saurait classer le droit du travail
dans la famille du droit des affaires. Cependant, sachant que le droit du
travail encadre l'action et la vie des entreprises engagées dans le
développement économique, le législateur a jugé bon
de le citer dans la famille du droit des affaires.
* 5 «Les actes pris
pour l'adoption des règles communes prévues à l'article
premier du présent Traité sont qualifiés : "actes
uniformes"». Art. 5 du Traité OHADA
* 6 Il est important de noter
ici que, dans les dispositions du Traité OHADA la matière de
l'arbitrage est réglementée au titre V dans les articles 21
à 26
* 7 Voir sur ce sujet les
travaux suivants :
- L'arbitrage OHADA : réflexions critiques par
Ndiaye Mayatta MBAYE Mémoire, DEA de Droit Privé sous la
direction du Prof. FADLALLAH Ibrahim Université Paris X (Nanterre)
année académique 2000-2001. version électronique
disponible sous
http://www.lexana.org/memoires/htm/200106mm.htm
- Réflexions dubitatives sur le droit de
l'arbitrage Par Joseph ISSA-SAYEGH Agrégé des
Facultés de droit Professeur Consultant. version électronique
disponible sous
www.ohada.com/doctrine.php?page=7&mod=preview&
* 8 On note dans les deux
textes de loi une unité de formulation c'est le cas des articles :
5 al. 1 AU.A et 179 al. 1 LDIP, art. 10 al. 2 AU.A et art. 181 LDIP, art. 14
AU.A et art. 182 LDIP etc.
* 9 Il est intéressant
de lire sur ce sujet l'apport contributif de Renaud SORIEUL Administrateur
principal au secrétariat de la CNUDCI « convergences entre
la CNUDCI et l'OHADA » in L'OHADA et les perspectives de
l'arbitrage en Afrique, ed. Bruylant 2000. P. 43-49
* 10 Message Conseil
Fédéral N° 134, p. 24
* 11 Jarrosson, p. 398
N.779.
* 12 Pierre Meyer, OHADA
droit de l'arbitrage, bruylant 2002 p. 22
* 13 Communication de
Monsieur Amady BA, Magistrat, Directeur du Centre de Formation Judiciaire Dakar
Sénégal in droit de l'arbitrage OHADA session de
formation des formateurs auxiliaires de justice (Greffiers & Huissiers de
Justice) MODULE 1du 09 au 21 juillet 2001.
* 14J. Robert / B. Moreau
L'arbitrage, droit intermédiaire privé, 5e éd.
Dalloz, 19873, n°1
* 15 Jarrosson, idem.
* 16 Traité
théorique et pratique de procédure civile et commerciale,
Paris éd. La Rose, 1904, tome 8, n° 220.
* 17 HUYS/KEUTGEN, P. 21 N. 21
cités par J-F -. POUDET et S. BESSON, Droit comparé de
l'arbitrage international, Bruylant 2002, p. 1
* 18 JOLIDON, introduction, P.
28 N.I. 1 ; cf. P. 33-39 N.6 sur la délimitation par rapport aux
institutions voisines
* 19 Art. 1181 Code des
activités Économiques de la Guinée, Art. 458 bis Code de
Procédure Civile de l'Algérie).
Certaines législations combinent les deux
critères objectifs et subjectifs pour définir
l'internationalité de l'arbitrage, il en est ainsi de l'Italie dans son
nouvel art. 832 CPCI. En effet, dans sa définition de l'arbitrage
international le CPCI s'est inspiré d'une part du critère
subjectif : une des parties doit avoir sa résidence ou son siège
effectif à l'étranger au moment de la conclusion de la clause
arbitrale, et d'autre part du critère objectif inspiré de la
loi-type de la CNUDCI : une partie substantielle ou significative des
prestations découlant du contrat doit être exécutée
à l'étranger.
La convention européenne de 1961 dite de Genève
combine aussi les deux critères en déclarant à l'art. 1er
ch.1 let. que la convention est applicable «aux conventions
d'arbitrages conclues pour le règlement des litiges nés ou
à naître d'opération du commerce international entre
personnes physiques ou morales ayant, au moment de la conclusion de la
convention, leur résidence habituelle ou leur siège dans des
États contractants différents».
Enfin la loi-type de la CNUDCI en son art. 1er al. 3 combine
aussi les deux critères et qualifie d'international, l'arbitrage qui se
retrouve dans les quatre hypothèses suivantes :
- si les parties ont, lors de la conclusion de la
convention, leur établissement dans des États
différents (critère subjectif)
- si le siège de l'arbitrage est situé en
dehors de l'Etat de domicile commun des parties (critère
subjectif)
- si une partie substantielle des obligations issues du
contrat doit être exécutée en dehors de l'Etat de domicile
des parties (critère objectif)
- si le lieu avec lequel l'objet du litige a le lien le
plus étroit est situé dans un Etat autre que celui du domicile
des parties (critère objectif).
* 20 Convention de
Washington du 18 mars 1965 créant le Centre International pour le
Règlement des Différends relatifs aux Investissements (CIRDI).
* 21 L'art 1492 du NCPC
définit l'arbitrage international en ces termes « est
international l'arbitrage qui met en cause des intérêts du
commerce international». En effet, c'est le critère
économique du terme commerce qui est mis en valeur par le droit
français. Sur ce, est international l'arbitrage qui est relatif à
une opération comportant le transfert de biens, de services ou de
monnaie à travers les frontières.
* 22 Cf. sur cette question
les notes de J-F -. POUDET et S. BESSON, Droit comparé de
l'arbitrage international, Bruylant 2002, p. 24 -30.
* 23 Communication de
Monsieur Amady BA, Magistrat Directeur du Centre de Formation Judiciaire Dakar
- Sénégal- in droit de l'arbitrage OHADA session de
formation des formateurs auxiliaires de justice (Greffiers & Huissiers de
Justice) MODULE 1 du 09 au 21 juillet 2001.
* 24 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 36.
* 25 Cf. B. Goldman,
P.Lalive, les problèmes spécifiques de l'arbitrage
international, rev. arb. 1980, p.323-340, p 341-372. Ph. Fouchard,
la spécificité de l'arbitrage international,
rev. arb. 1981, P.467-499.
* 26 J-F POUDRET S.
BOSSON, Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant
2002, p. 24.
* 27
Spécificité reconnue par les décrets français du
12 mai 1981 et espagnole du 22 mai 1981. Outre ces deux pays, le Danemark
(1973), l'Irlande (1998), la Grèce (1999) ont optés pour une
réglementation spécifique de l'arbitrage international.
* 28 Le concordat est
élaboré dans la double perspective de l'arbitrage interne et
international et s'appliquait à l'un et à l'autre. Cependant il
ne présente plus une portée pratique en matière
d'arbitrage internationale au regard du chapitre 12 de la LDIP
* 29 The New Ducth
Arbitration Act entré en vigueur le 1er déc. 1986 (cf.
P. Sanders, Droit des Affaires Internationales, N° 6, 1987,
P.539-558). Les législations allemande, anglaise, italienne,
suédoise et belge pour ne citer que celles-là répondent
à ce même souci d'unité.
* 30 ANDREAS BUCHER, le
nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn 1988 p.
24.
* 31 P. Meyer, OHADA
Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p.44.
* 32 G. KAUFMANN-KOHLER le
lieu de l'arbitrage à l'aune de la mondialisation, réflexions
à propos de deux formes récentes d'arbitrage, Revue de
l'arbitrage 1998 N° 3.
* 33 Art. 1, §2 de la
loi type de la CNUDCI «Les dispositions de la présente loi...
ne s'appliquent que si le lieu de l'arbitrage est situé sur le
territoire du présent Etat».
* 34 Le moment de la
conclusion de la convention joue un très grand rôle d'autant plus
que si les parties au moment de la conclusion de la convention ont toutes deux
leur domicile ou résidence en suisse, l'arbitrage ne pourra recevoir
aucunement la qualification d'arbitrage international en dépit du
siège suisse du tribunal arbitral. Le moment pertinent pour la
détermination du domicile au sens de l'art. 176 al. 1 est celui de la
conclusion de la convention d'arbitrage. En d'autres termes, le fait qu'au
moment de la survenance du litige ou de l'introduction de la procédure,
une partie qui était domiciliée à l'étranger au
moment de la conclusion de la convention d'arbitrage, ait
transféré son siège en suisse est sans incidence sur la
qualification international de l'arbitrage. Dans le même ordre
d'idée, le contrat contenant une clause d'arbitrage conclu entre deux
sociétés domiciliées en suisse, le fait que l'une d'entre
elles cède ses droits à une entité domiciliée
à l'étranger ne rend pas l'arbitrage international (ATF 27 oct.
1995, Bull. ASA 1996, p. 227).
* 35 Notons que, l'art. 176
ne mentionnant pas le critère de succursale et d'établissement,
tout arbitrage qui opposerait une société domiciliée en
Suisse à une société étrangère ayant un
établissement ou une succursale en Suisse recevrait la qualification
d'arbitrage international. (ATF 118 II 508, 509). Par contre, l'arbitrage est
interne entre deux sociétés domiciliées en Suisse à
propos d'un litige survenu exclusivement dans le cadre des activités de
leurs succursales ou établissements respectifs à
l'étranger.
* 36 L'arbitrabilité
est une condition de validité de la convention d'arbitrage et de la
compétence des arbitres, il s'agit de la validité objective du
contrat d'arbitrage dans la mesure où cette condition est
indépendante de la qualité et de la volonté des
parties.
* 37 Art. 2059 code civil
français : Toutes les personnes peuvent compromettre sur les droits
dont elles ont la libre disposition.
* 38 P. Meyer, OHADA
Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 101.
* 39 23 juin 1992,
Fincantieri, ATF 118, II. P.356; bulletin ASA, 1993, p.58;
Rev. Arb., 1993, p. 691, note F. Knoepfler
* 40 Cf. Andreas Bucher,
le nouvel arbitrage international en Suisse Helbing & Lichtenhahn
1988 p. 39.
Référence doit être ici faite pour toute
la théorie sur l'arbitrabilité du litige en droit suisse au
même livre p. 39-42
* 41 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 69.
* 42 ZPO
(Zivilprozessordnung) loi de procédure civile allemande du 22
décembre 1997.
* 43 Cf. Andreas Bucher,
le nouvel arbitrage international en Suisse Helbing & Lichtenhahn
1988, n. 93 p. 39.
* 44 Cf. rapport du Colloque
du 2 février 2001 à Paris sur l'arbitrage OHADA.
* 45 P. Meyer, OHADA
Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 97.
* 46 Notons que, le droit
suisse de l'arbitrage international pour la validité matérielle
de la convention d'arbitrage procède par combinaison des règles
matérielles et des règles de conflit.
* 47 Les règles de
conflit de lois qui désignent la loi applicable sont qualifiées
de règles formelles ou indirectes par opposition aux règles de
droit contenant les dispositions applicables à la situation en cause qui
sont qualifiées de règles matérielles ou substantielles ou
directes.
* 48 P. Meyer, OHADA
Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 107.
* 49 Le renvoi est dit
spécifique lorsque le document souscrit se réfère
explicitement à la convention d'arbitrage contenue dans un autre
document. Par contre il est global lorsque les parties souscrivent un accord
qui renvoie en termes généraux à un document contenant une
clause d'arbitrage sans faire référence à cette
dernière.
* 50 Arrêt du TF
4C.44/1996 du 31 octobre 1996, cons. 2, Rec. TAS-I, p. 577, 582.
* 51 On fait observer que le
choix es qualitès présente le désavantage de voir le ou
les arbitres désignés par les parties se comporter en
arbitre-partie (ou friend arbitrator selon la terminologie anglo-saxonne), ce
qui est incompatible avec la règle sacro-sainte de l'indépendance
et de l'impartialité des arbitres en droit de l'arbitrage.
* 52 Art. 14 du pacte
international du 16 décembre 1966 sur les droits civils et politiques et
Art. 7 de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples du 28 juin
1981
* 53 P. Meyer, OHADA
Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 137-138
* 54 Cf. sur cette question
les réponses données à la solution par G. KAUFMANN-KOHLER
/ A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 117-118.
* 55 Cf. sur ce sujet G.
KAUFMANN-KOHLER / A. RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique
à la lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006,
Schulthess, Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 126-135. ANDREAS BUCHER,
le nouvel arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn,
Bâle et Francfort-sur-le-Main 1988 p. 62-64.
* 56 J-F. POUDRET/S. BESSON,
Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J.,
Schulthess 2002, P. 369
* 57 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 129.
* 58 PHILIPPE LEBOULANGER,
Présentation générale des actes sur l'arbitrage
in l'OHADA et les perspectives de l'arbitrage en Afrique, Bruylant,
Bruxelles 2000 p. 75.
* 59 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 141.
* 60 Ibidem.
* 61 ATF du 9 février
1998, Bull. ASA 1998, p.634, 664 ; citant notamment PETER/FREYMOND,
Basler Kommentar, n° 21 ad art.180, p. 1493.
* 62 P. LALIVE, J-F POUDRET,
C. REYMOND, Le droit de l'arbitrage interne et international en Suisse
: édition annotée et commentée du Concordat sur
l'arbitrage du 27 mars 1969 et des dispositions sur l'arbitrage international
de la Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit
international privé, p. 332.
* 63 Ibidem. Sur la question
l'auteur en citant les facteurs qui militent en faveur de cette immunité
fait observer au plan pratique, qu'il serait d'un côté très
difficile de trouver des gens qualifiés disposés à agir
comme arbitres s'ils s'exposent, de ce fait, à une responsabilité
personnelle illimitée. De l'autre côté, il estime que la
partie qui a succombé dans un arbitrage pourrait chercher à faire
réexaminer l'affaire par le biais d'un procès qu'elle ferait
à l'arbitre personnellement, au motif qu'il aurait commis une faute
professionnelle, ce qui porterait manifestement atteinte à l'arbitrage
en tant que moyen de trancher définitivement les litiges.
Au plan personnel, il fait observer que si les arbitres
étaient exposés au risque de voir leur responsabilité
personnelle engagée, ils refuseraient d'être
désignés à moins que les parties ne les indemnisent, de
sorte qu'ils obtiendraient contractuellement l'immunité
recherchée, même s'ils ne peuvent y prétendre par l'effet
de la loi.
* 64 Cf. sur ce sujet A.
REDFERN, M. HUNTER, M. SMITH, E. ROBIN, droit et pratique de l'arbitrage
commercial international L.G.D., P. 216.
* 65 P. LALIVE, The
immunity of Arbitrators, Lew ed., Lloy's 1990, P. 117.
* 66 J-F. POUDRET/S. BESSON,
Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J.,
Schulthess 2002, p. 490.
* 67 Sur cette question cf.
le développement de A. BUCHER, le nouvel arbitrage international en
suisse Helbing & Lichtenhahn, Bâle et Francfort-sur-le-Main 1988
note 196 p. 71. L'auteur fait observer que, l'art. 182 al.3 signifie que le
tribunal doit mettre en oeuvre, la procédure arbitrale de telle
manière qu'elle permette effectivement à chacune des parties
d'exercer son droit d'être entendu. Ce droit comprend notamment le droit
égal de chaque partie d'alléguer tous les faits pertinents,
d'exposer ses moyens, de soumettre toute preuve pertinente, de prendre
connaissance des pièces du dossier, d'assister aux audiences
d'administration des preuves et aux débats oraux ordonnés par le
tribunal ainsi que le droit de se faire représenter ou assister par un
mandataire de son choix.
* 68 P. LALIVE, J-F POUDRET,
C. REYMOND, Le droit de l'arbitrage interne et international en Suisse
: édition annotée et commentée du Concordat sur
l'arbitrage du 27 mars 1969 et des dispositions sur l'arbitrage international
de la Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit
international privé, p. 363.
* 69 Un exemple type de
cette mesure porte sur l'ordonnance judiciaire qui accorde au demandeur une
provision sur sa créance.
* 70 J-F. POUDRET/S. BESSON,
Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J.,
Schulthess 2002, note 606, p. 552. Ces auteurs estiment que la
compétence implicite admise par une certaine doctrine sur le pouvoir de
l'arbitre d'ordonner des mesures provisoires et conservatoires en dépit
du fait que la législation française ne prévoit aucune
disposition dans sa loi d'arbitrage au sujet de telles mesures est contestable.
Ils soutiennent à l'appui de cette position que le pouvoir de rendre des
mesures provisoires n'est pas une question de
« procédure » au sens de l'art. 1494 NCPC mais de
« compétence ».
* 71 P. Meyer,
OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 183.
* 72 Cf. B. GOLDNAN,
in : 60 ans après, regard vers l'avenir, Publication CCI
n. 412, Paris 1984 p. 271-299.
* 73 J-F. POUDRET/S. BESSON,
Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J.,
Schulthess 2002, note 618, p. 561. On note que RUEDE/HADENFELDT, p. 252,
BUCHER, p. 74 N° 208, p.76 N°213 et p. 56 N°143 font partie du
groupe minoritaire. Par contre KSP-BERT, P. 1539 N°5, ad art.183;
LALIVE/POUDRET/REYMOND, p. 369 N°15 ad art. 183 LDIP font partie de la
tendance majoritaire.
* 74 Ibidem, note 611, p.
554.
* 75 La liberté de la
preuve est un principe admis en matière commerciale selon lequel, il n'y
a pas de hiérarchie entre les différents modes de preuve, les
parties sont donc libres d'administrer la preuve d'un acte par tous moyens.
* 76 J-F. POUDRET/S. BESSON,
Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J.,
Schulthess 2002, note 618, n° 645, p.582.
* 77 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 275.
* 78 Ibidem, p. 276.
* 79 Sur cette question voir
P. Meyer, OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 191.
En France on admet que le tribunal arbitral dispose d'un pouvoir
modérateur vis-à-vis des stipulations contractuelles. Ce pouvoir
lui permet de tempérer les droits nés du contrat sans pouvoir
modifier, au moins, substantiellement les obligations contractuelles. En
revanche il ne lui est pas permis de bouleverser, de réviser ou de
dénaturer ledit contrat.
* 80 Conformément
à l'art 3.1. de la convention de Rome sur la loi applicable aux
obligations contractuelles, le contrat est régit par la loi choisie des
parties, aucune restriction n'est posée à la liberté des
parties.
* 81 P. Meyer,
OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 192.
* 82 Ph. FOUCHARD, E.
GAILLARD, B. GOLDMAN Traité de l'arbitrage commercial
international P. 106.
* 83 Le droit élu,
pour les questions contractuelles régira par exemple la formation et la
validité du contrat, les droits et obligations des parties,
l'exécution du contrat et les conséquences de son
inexécution...etc. Par contre, le droit élu ne régira pas
les questions non contractuelles comme celles relatives à la
capacité civile, au transfert de propriété, aux
sûretés immobilières...etc.
* 84 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 268.
* 85 P. Meyer,
OHADA Droit de l'arbitrage, Bruylant 2002, p. 204.
* 86 Art VII de la
convention européenne de 1961 "les parties sont libres de
déterminer le droit que les arbitres devront appliquer au fond du
litige. A défaut d'indication par les parties du droit applicable, les
arbitres appliqueront la loi désignée par la règle de
conflit que les arbitres jugeront appropriée en l'espèce. Dans
les deux cas, les arbitres tiendront compte des stipulations du contrat et des
usages du commerce".
* 87 J-F. POUDRET/S. BESSON,
Droit comparé de l'arbitrage international, Bruylant, L.G.D.J.,
Schulthess 2002, note 618, n° 645, note 744, p. 705.
* 88 Il convient de
souligner que l'art. 33 de CIA énumère, tout comme l'AU.A en
droit OHADA, un certain nombre de conditions nécessaires pour la
validité quant au fond de la sentence arbitrale.
* 89 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, p. 295.
* 90 Par exemple
l'ordonnance de procédure relative à la communication de
pièces ou de mémoires, l'ordonnance de procédure relative
aux mesures d'instruction du litige comme la commission d'expert, etc.
* 91 A. BUCHER, le nouvel
arbitrage international en suisse Helbing & Lichtenhahn, Bâle et
Francfort-sur-le-Main 1988 note 335 p. 115.
* 92 G. KAUFMANN-KOHLER / A.
RIGOZZI, arbitrage international droit et pratique à la
lumière de la DIP, éd. Weblaw, Berne 2006, Schulthess,
Zurich/Bâle/Genève 2006, note 696, p. 301.
* 93 Ibidem.
* 94 Loi sur le Tribunal
Fédéral (LTF) du 17 juin 2005 (RS 173. 110). Cette loi est
entrée en vigueur le 1er janvier 2007.
* 95 Pouvoir reconnu
à la cour d'appel d'attraire à elle le fond du litige, i.e. de
trancher les points non jugés en première instance pour diverses
raisons.
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