B. La définition d'une politique agricole
viable.
De façon plus globale il incombe de revoir la politique
agricole camerounaise dans sa définition. Le but à atteindre doit
être d'avoir une vision du long termes des objectifs de production non
seulement pour la compétitivité à l'exportation, mais
aussi pour la sécurité alimentaire. Il s'agit non seulement de
tracer les priorités de la Nation mais également de fixer les
moyens de les satisfaire. La MIDA est un des instruments qu'il serait judicieux
d'actionner. Toutefois elle ne concerne que l'aspect de l'accompagnement
financier de la politique agricole. Pour que cet outil soit efficace il importe
en amont une définition claire des actions prioritaires non seulement
dans la production mais aussi en termes de groupes cibles (instituts de
recherche, formation des agriculteurs). Le Cameroun dispose certes d'un
programme rénové en 1990 et lancé sous le sigle Nouvelle
Politique Agricole. Cependant d'après l'avis de nombreux observateurs ce
programme tarde à donner les résultats escomptés.
Plusieurs aspects sont mis en cause ; le plus important est celui du
désintérêt vis à vis de la recherche agricole. Les
financements des instituts de recherche ont fortement
baissé1, ce qui a conduit à la baisse de leur
efficacité. Ces organismes ont ainsi de la peine à retenir les
meilleurs chercheurs camerounais et à fournir une conduite de projet
efficace. Dès lors on observe que même les organismes non
gouvernementaux (ONG) d'appui à la recherche se détournent des
instituts nationaux du fait des mauvaises expériences
passées2. Au niveau du management on note que des faiblesses
continuent d'exister. Il y a un manque de coordination entre projets conduits
pour le développement du monde agricole. Il existe une disparité
d'interventions qui ne sont pas en liens les unes avec les autres. Les ONG, les
projets de développement ou les organismes nationaux comme l'IRAD sont
en concurrence dans la fourniture des même service aux organisations
paysannes. Ce fait ne permet pas le partage et l'actualisation des
données relatives aux besoins des populations paysannes. Par ailleurs
les instituts de recherche ne siègent pas dans les comités
techniques de suivi des programmes économiques. Leur absence est un
obstacle à l'évaluation judicieuse des progrès
réalisés et des besoins recensés. Une politique agricole
réformée devrait donc pouvoir définir les objectifs
visés (production et sécurité alimentaire) mais
également les mettre en perspective avec les moyens disponibles
notamment en terme de capacité de réactivité des
organismes de recherche. La recherche en ce domaine doit permettre non
seulement d'atteindre les objectifs quantitatifs en
1 Georges W. Bush, cité par François Guillaume
ancien Ministre de l'Agriculture et Député UMP, rapport sur
l'agriculture et les pays en développement à l'OMC ;
Assemblée Nationale française 21 janvier 2004
mettant sur pied des espèces végétales
plus productives mais aussi d'améliorer les techniques culturales pour
rendre le travail moins pénibles. Ce second volet pour le moment n'est
pas suffisamment développé ; cependant il demeure un obstacle
important à la compétitivité de l'agriculture
camerounaise. Des améliorations à ce niveau auront un impact
positif sur l'espérance de vie des populations rurales qui est
très bas actuellement.
En ce qui concerne la diversification des productions
agricoles on peut reconnaître que cet aspect est pris en compte par le
Document stratégique de réduction de la pauvreté
rédigé par le Gouvernement pour l'atteinte du point
d'achèvement. Dans un contexte de contrainte budgétaire comme
c'est le cas actuellement, il faut faire des choix et une
hiérarchisation des priorités dans cette ambition de
diversification de l'agriculture. En toute logique le principe qui doit
être prioritaire est celui de la garantie de la sécurité
alimentaire. En effet comme le reconnaît le Président de
l'exécutif américain "Une nation qui peut nourrir sa
population est une nation davantage en sécurité
"1. Le choix de la sécurité alimentaire est donc
avant tout un choix de sécurité. Le rapport de l'Assemblée
nationale française met en exergue le fait que la dépendance des
pays en voie de développement vis à vis des produits de base est
un facteur de pauvreté.
Ces propositions à l'échelle nationales
n'ignorent pas les contraintes extérieures qui pèsent sur la
libéralisation de l'agriculture des pays en développement comme
le Cameroun. Pour cette raison il convient aussi d'envisager des
évolutions pour un commerce d'avantage équitable
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