« Hasta la revolucion, siempre » Che
Guevara.
Cette citation fameuse de Che Guevara semble aujourd'hui
prendre un nouvel élan par le biais du nouveau président
vénézuelien Hugo Chavez. En effet, ce dernier tente aujourd'hui
de mettre en place la révolution bolivarienne changeant par là
même radicalement la politique étrangère du Venezuela.
Avant de nous plonger dans cette évolution, regardons la situation de ce
pays d'Amérique Latine à la fin du 20e siècle
et les raisons de l'accession au pouvoir d'Hugo Chavez.
En 1998, soit 168 ans après l'accession à
l'indépendance un écart abyssal sépare une minorité
de nantis du reste du peuple ; un quart de la population active est au
chômage. Ceci semble révoltant quand on sait que le Venezuela est
le deuxième exportateur mondial de pétrole à
l'époque et qu'il a reçu sur les vingt-cinq dernières
années, au titre de la vente d'hydrocarbures, environ 300 milliards de
dollars, soit l'équivalent de vingt plans Marshall réunis. C'est
dans ce contexte que Hugo Chavez remporte les élections le 6
Décembre 1998 avec 56,24% des voix porté par un programme
social.
Depuis lors, l'enfant de Sabaneta du haut de ses 51ans est
devenu un phénomène politique irrésistible à
l'échelle latino-américaine. Sa popularité, principalement
auprès des populations modestes dont il est lui-même issu, tient
en un programme politique visant à s'éloigner du modèle
néolibéral et par là même résister à
la mondialisation. La redistribution de la dépense publique en faveur
des secteurs populaires lui accorde un soutient lui permettant de mener cette
politique d'indépendance.
Comparé parfois au Général de Gaulle
dans son idée d'indépendance, Hugo Chavez s'inspire
principalement de Simon Bolivar qui avait libéré
l'Amérique du Sud du joug espagnol et qui souhaitait bâtir une
« grande patrie » dans le sud du continent
américain.
Depuis son accession au pouvoir, la ligne directrice de la
politique étrangère vénézuelienne a bien
changé. En effet, le partenariat avec les Etats-Unis a totalement
était remis en question et on peut même affirmer que Hugo Chavez
mène une véritable « guerre » au
système américain. Pour ce faire, le président
vénézuelien utilise ce qui est pour sûr actuellement,
l'objet de toutes les convoitise américaines : le pétrole.
L'or noir est devenu l'instrument essentiel des relations extérieures du
Venezuela comme l'affirme le ministre des affaires étrangères M.
Rodriguez qui institua son mandat en disant « la politique
internationale du Venezuela a une composante très forte en
matière d'hydrocarbures ». Grâce à cette
rente pétrolière importante Hugo Chavez a pu mettre en place un
autre principe de la diplomatie bolivarienne : la coopération
sud/sud qui correspond à son souhait de promouvoir un monde
multipolaire. « Nous ne voulons pas dépendre d'un seul
pays. Nous utilisons notre pétrole pour ouvrir des marchés et
nouer de nouvelles alliances ».
Dans la mise en oeuvre de sa politique, le président
vénézuelien n'hésite pas à choquer, embarrasser,
voire même passer en force. Il mène une politique ouvertement
anti-Bush allant jusque l'accuser personnellement de tentative d'assassinat, il
cultive ses relations avec des gouvernements mis au banc de la
communauté internationale comme avec son ami Fidel Castro.
Tout ceci nous amène à de nombreuses
interrogations : premièrement comment agit-il dans la pratique
notamment dans sa politique anti-américaine ? Quelle est sa
nouvelle politique pétrolière ? Quelles en sont ou seront
les répercussions ? Sa politique se limite-t-elle au
pétrole ? Quel est l'impact de sa politique sur le monde ?
Où veut-il en venir ? Mais également cette politique
est-elle viable ? Hugo Chavez est-il un feu local ou un brasier global
potentiel ?
Nous répondrons bien sûr à l'ensemble de
ses interrogations en nous attachant aux faits mais également en
extrapolant sur l'évolution de la situation. Nous verrons si Hugo Chavez
est un simple agitateur éphémère ou s'il a effectivement
les moyens de sa politique.
Pour cela nous étudierons dans un premier temps la
situation du Venezuela : quels sont les faits marquants de son
histoire ? Quelles sont ses ressources ?... Puis nous
définirons précisément le programme politique de Hugo
Chavez en comprenant ses aspirations, ses actes nationaux et leurs apports...
Dans une troisième partie nous analyserons la nouvelle politique
pétrolière du Venezuela depuis l'élection de Hugo
Chavez : l'utilisation du pétrole comme une arme, le rôle
fort à l'OPEP, les nouvelles alliances stratégiques.... Nous
finirons par l'étude des idées fortes de Hugo Chavez notamment
son projet pour l'Amérique latine, ses liens intimes avec Fidel Castro
et le rôle que ce dernier peut avoir sur le président
vénézuelien...
I. La situation du Venezuela : histoire, ressources
et enjeux géopolitiques.
A. Les traits caractéristiques majeurs du
Venezuela
Géographiquement, le Venezuela se
situe sur la côte septentrionale de l'Amérique Latine ; une
vaste plaine drainée par le fleuve Orénoque prend place en son
centre et le sud ouest du pays est occupé par le plateau des Guyanes. Sa
population totale est de 25,1 millions de personnes dont 87% sont
urbanisées.
L'histoire vénézuelienne est marquée au
fer rouge par les idées fortes et son souhait
d'indépendance ; en 1881 sous la conduite de Simon Bolivar le
Venezuela fut la première colonie espagnole à rejeter
l'autorité de Madrid. C'est en 1821, lors de la bataille de Carabobo que
la Grande Colombie (Colombie, Venezuela et Equateur) prend
définitivement son indépendance mettant fin à la
domination espagnole. Cette Grande Colombie s'effondra en 1830 donnant ainsi
naissance au Venezuela avec à sa tête José Antonio Paez
suivi par la suite de Guzman Blanco. C'est en 1908 avec l'arrivée au
pouvoir du général Juan Vincente Gomez que l'industrie
pétrolière se développe. La démocratisation du
Venezuela amorcée en 1935, marque en coup d'arrêt en 1945 et 1948
par un enchaînement de coups d'Etat militaire. Le retour de la
démocratie se fera en 1958 avec l'élection de R. Betancourt.
Dans les années 60, le Venezuela deviendra membre
fondateur de l'OPEP ; sur le plan national une lutte anti-guérilla
se développe. En 1973, le Venezuela décide de nationaliser
l'industrie pétrolière ; malgré cela une situation
économique de plus en plus désastreuse prend place. Le paroxysme
est atteint en 1983 avec la chute du prix du baril qui amène une
réduction des dépenses sociales créant un gouffre de plus
en plus large entre les nantis et les autres. Ceci entraînera de
violentes manifestations notamment les émeutes de la faim en 1989
à Caracas. Les années suivantes sont marquées par la
corruption qui ne cesse de s'étendre et dégoûte la
population.
Dans ce contexte, Hugo Chavez remporte les élections
en 1998 avec un programme social et une promesse d'honnêteté. En
Avril 2002, Chavez est renversé par un putsch, il retrouve son
siège le lendemain après les protestations nationales et
internationales. Ceci le conforte dans son image « d'ami du
peuple ».
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