La dialectique de la reconnaissance chez Hegel( Télécharger le fichier original )par Dominique Mvogo Mvogo Université Catholique d'Afrique Centrale - Maîtrise en Philosophie 2005 |
CONCLUSION GENERALEIl n'est pas facile de conclure et d'apprécier à sa juste valeur une oeuvre dont Maurice Merleau-Ponty disait qu'elle est à l'origine de tout ce qui s'est fait de grand en philosophie depuis un siècle (1948 : 109). De plus, il semble étonnant de savoir que Jacques Derrida estime que « le débat avec Hegel est infini et interminable » et que Michel Foucault se demande si : « une philosophie peut encore exister qui ne soit pas hégélienne ? »24(*). Il s'y dégage un point commun à ces deux penseurs contemporains. C'est qu'ils ne sont pas sans savoir que s'opposer à Hegel, c'est aussi bien l'accueillir. Qu'elle soit bienvenue ou non, sa philosophie est un chemin qui conduit à toutes les pensées. Car on ne peut demander la signification de la pensée parce que sa signification, c'est elle-même. Ce modeste travail n'a nullement eu la prétention d'être une appréciation globale de la pensée de Hegel. Nous nous sommes limités à sa Phénoménologie de l'esprit et plus précisément au problème de la reconnaissance à travers la dialectique de la domination et de la servitude. On pourrait alors oser résumer Hegel par sa dialectique. Ceci signifie qu'il ne faut pas juger les choses d'après leur état actuel, mais considérer à chaque fois le processus dans lequel le fait considéré est apparut. C'est ainsi le point de départ de toute évolution et de l'histoire dans la pensée. Il faut en plus considérer qu'à chaque fois le processus signifie que toute chose est éphémère. Il y a aussi à considérer que tout bien a son mauvais côté. Car : « Dans la conception positive des choses existantes, la dialectique inclut du même coup l'intelligence de leur négation fatale, de leur destruction nécessaire, parce que, saisissant le mouvement même dont forme faite n'est qu'une confirmation transitoire, rien ne saura lui en imposer ; parce qu'elle est essentiellement critique et révolutionnaire » (Karl Max : I, 559). Voilà pourquoi il n'y a pas de vérité en soi, hors de l'histoire et du temps, mais seulement pour un sujet concret. Le `' savoir absolu'' est simplement la certitude que tout savoir résulte d'un apprentissage. Mais le processus implique une force motrice. C'est la force de l'esprit. Chez Hegel, elle se confond avec la négativité25(*). Le processus commence par l'opposition du sujet à l'objet dans la perception, pour se réaliser à la fin comme liberté consciente d'elle-même et reconnaissance mutuelle. Le processus dialectique est le mouvement de cette négation. Nous pouvons le décomposer par la position (thèse), l'opposition (antithèse), puis la synthèse temporelle comme processus conscient de soi. C'est la négation de la négation. La phénoménologie de l'esprit, illustre la dialectique par l'histoire concrète qui commence avec la conscience, puis par négations successives, la conscience de soi et enfin la conscience pour un autre. Celle-ci aboutit à la lutte du maître et de l'esclave. Cette lutte initie l'histoire humaine. C'est l'histoire concrète de la moralité d'abord et de la politique ensuite. Que nous a-t-on enseigné la dialectique hégélienne ? Que les choses changent, et non pas seulement d'un changement calme et paisible ; mais en oppositions et ruptures. La prise en compte de ce dernier impose l'évidence que tout progrès de la connaissance exige le niveau logique précédent pour se constituer comme objet. La connaissance n'étant possible qu'après-coup de cet objet. Et la supériorité de la dialectique, avons-nous constaté, n'est pas dans son épistémologie historiciste, mais son enseignement moral et politique. Celui-ci consiste à faire ressortir le positif de la négation de la négation. A partir du thème de notre recherche, que retenir de la philosophie de Hegel ? On pourrait croire qu'elle est une sorte de quintessence d'intelligibilité abstraite. On peut aussi penser qu'elle est une exaltation du concept (Hegel, 1966 : 52). Nous pensons que c'est ni l'un ni l'autre. Mais elle donne plutôt à voir que ce qui y est en cause n'est pas la représentation, mais l'idée considérée comme concept concret. De plus cette réalité est appelée à se manifester à travers un mouvement d'une réalité qui se réalise par le même coup qu'elle réalise ce savoir. Il se met alors en place une logique dialectique qui épouse le cours de l'histoire. Puisque l'idée est l'histoire, il n'y a aucune opposition entre ce qui est intelligible et ce qui est réel : « tout ce qui réel est rationnel, tout ce qui est rationnel est réel» (Hegel, 1970 : 127). « L'histoire universelle n'est que la manifestation de la raison » (ibidem) Et pourtant, l'histoire est inéluctablement tendue vers l'unité. Cette unité dans son progrès suscite une opposition interne. Le mal est à la mesure du bien auquel il s'oppose. Et bien évidement, le besoin d'unité renforce la rigueur des divisions. Cependant, il y a progrès vers un paroxysme. La dialectique maître-esclave dilate sans fin sa force de disjonction tandis que montent les solidarités à l'échelle mondiale. Voilà pourquoi il s'avère nécessaire d'être aussi attentif à la radicalité nouvelle des affrontements qu'à la croissance de la socialisation. L'opposition et les luttes de deux blocs (idéologiques, économiques ou politiques) sont des réalités aussi nouvelles que la mondialisation (François Perroux, 1958 : 406). * 24 Gwoda Adder Abel, «mondialisation ou restauration d'un ordre ancien de domination et d'exploitation ? », note de lecture de la fin de l'histoire et le dernier homme, de F. Fukuyama, Paris, 1992. * 25 Négativité : c'est l'esprit qui dit non. Il implique la dissolution de toute particularité et par le même fait l'universalisation. |
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