La dialectique de la reconnaissance chez Hegel( Télécharger le fichier original )par Dominique Mvogo Mvogo Université Catholique d'Afrique Centrale - Maîtrise en Philosophie 2005 |
2.2. ConcrèteNous abordons maintenant la dernière figure qu'est l'esprit. Dans celle-ci, l'esprit, certain de soi-même, prend les espèces de la conscience entendue comme certitude morale. Le passage de la Raison à l'Esprit est un passage qu'il faut entendre comme un accomplissement de la vérité : « la raison est esprit en tant que la certitude d'être toute réalité [est] élevée à la vérité, et [qu'] elle est conscience de soi-même comme de son monde, et du monde comme d'elle-même (t.2, p.9). Donc, l'esprit n'est rien d'autre et rien de plus que la Raison vérifiée ; mais il reste sous le régime de la liberté. De plus, l'identité entre soi et la chose même devient ainsi l'identité entre la conscience éthique et la substance éthique. Quant à l'Esprit qui est l'unité de l'une et de l'autre, il est effectivité éthique (t.2, p.10). 2.2.1. La conscience morale pour une reconnaissance concrèteLa conscience morale est au fond une conscience qui n'est plus conscience. Ceci dans la mesure où elle a perdu le sens de «l'opposition de la certitude de soi-même et de l'objet » (t.2, p.142). Accomplie comme certitude morale ou encore bonne conscience, elle est de par les échecs de la conscience historique une sorte de réactualisation de la conscience honnête. Il y a cependant une différence qui la plonge dans une abstraction beaucoup plus poussée : « si la connaissance honnête saisit seulement toujours la chose même vide, la certitude morale enfin la gagne dans son emplissement qu'elle se donne par soi » (t.2, p.176). De ce fait, la conscience morale ne renonce pas en principe à l'effectivité. Mais elle décrète que l'effectivité est immédiatement engagée avec la conviction qu'elle a de pouvoir être reconnue. Et notre auteur écrit à ce propos : « L'effectivité étant de la certitude morale est une [effectivité] telle qu'elle est soi, c'est-à-dire l'être-là conscient de soi, l'élément spirituel du se-trouver-reconnu. Le faire est par conséquent seulement le transposé de son contenu, et c'est justement le fait qu'il soit reconnu qui fait de l'opération, l'effectivité. Reconnue et par-là effective, est l'opération parce que l'effectivité étant-là est liée immédiatement à la conviction ou au savoir, ou [que] le savoir de son but est immédiatement l'élément de l'être-là, le reconnaître universel » (t.1, p.175). Nous découvrons à travers le morceau choisi que la conscience inclut dans son propre concept l'exigence d'un agir concret comme élément déterminant de la reconnaissance. Or tel que nous voulons argumenter, cette reconnaissance dépend de la qualité de sa certitude morale. Dès lors qu'elle énonce cette certitude, elle est reconnue de manière effective. Or Hegel ramène le monde au savoir. Ce savoir lui-même échappe à toute universalité objective à cause de l'immédiateté de l'intuition de soi16(*). On ne peut donc plus parler de reconnaissance au sens propre. Vu de cette manière, nous mettons un peu en jeu le destin de la reconnaissance. La belle âme17(*) n'a d'autre `faire' que « l'aspiration qui se perd seulement dans le parvenir de soi-même à l'objet dépourvu d'essence, et, par-delà perte tombant dans soi en retour, se retrouve seulement comme [conscience] perdue » (t.2, p.189). Dès lors, il s'avère nécessaire que la conscience se convertisse à une nouvelle attitude. Aussi vrai que soit et nous l'avons vu, le passage d'une figure à l'autre, plus vrai encore est l'accès à l'expression de la liberté authentique. C'est un pléonasme plus que jamais nécessaire de souligner à quel point cette liberté est libre. Et nous savons bien que l'homme le plus imperméable à la raison est celui qui s'enferme dans une certitude immédiate. * 16 Nous l'avons souligné au début de la partie I de ce travail. * 17 Expression que Hegel emprunte à Goethe. |
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