Les programmes de convergence sont des programmes pluriannuels
destinés à assurer à moyen terme la réalisation des
critères de convergence. Ils font l'objet d'un suivi et d'une
évaluation minutieux (B) après leur adoption par les Etats
membres (A).
Selon l'article 4 du Pacte de convergence,
« Dès l'entrée en vigueur du Pacte, chaque Etat membre
dispose d'un délai de trois (3) mois pour soumettre au Conseil un
programme pluriannuel destiné à assurer la réalisation
à moyen terme des normes de convergence ». Ce programme doit
comporter les informations suivantes :
- les réalisations de l'année
précédente, les objectifs de l'année en cours et les
principales hypothèses concernant l'évolution prévisible
de l'économie ainsi que les variables économiques importantes qui
sont susceptibles d'influer sur l'exécution du programme, telles que les
recettes fiscales, la masse salariale, le service de la dette et les
dépenses d'investissement public. S'agissant des autres secteurs, la
croissance du PIB, l'inflation et le solde des transactions extérieures
constituent les indicateurs économiques importants ;
- une description des mesures budgétaires et des
autres mesures de politique économique à mettre en oeuvre afin de
réaliser les objectifs du programme au regard des critères de
convergence ;
- l'évolution des critères de convergence et
principalement celle du critère clé ;
- la définition d'un sentier d'évolution des
critères de convergence ainsi que des mesures spécifiques
envisagées pour chaque tranche annuelle. Cette dernière
information, que doivent contenir les programmes, fait apparaître que
ceux-ci bien qu'étant pluriannuels, comportent des tranches
annuelles.76(*)
L'examen du contenu des programmes montre que, plus que des
actions à envisager, ce sont des informations statistiques pour
l'essentiel qui sont demandées aux Etats membres. Celles-ci sont en
général relatives à l'évolution des composantes des
ratios servant de critères de convergence en vue de vérifier le
respect des normes de convergence.
Après leur élaboration par les Etats, ils sont
adressés à la Commission. Celle-ci les transmet au
Secrétariat Conjoint77(*), aux fins d'analyse. L'analyse, consiste à
vérifier la conformité des programmes de chaque Etat par rapport
aux objectifs communautaires, notamment leur compatibilité d'ensemble,
au regard de l'impératif de mise en cohérence des autres volets
de politique macro-économique de l'Union avec les objectifs de la
politique monétaire commune. Suite à cette analyse, les
programmes, après avoir été vérifiés par la
Commission, sont transmis au Conseil des Ministres pour adoption par voie de
décision78(*). Si
le Conseil estime que les objectifs et le contenu d'un programme doivent
être réaménagés, il ordonne à l'Etat membre
concerné de réviser son programme par voie de décision.
Malheureusement, aucun délai n'est fixé à l'Etat pour un
réaménagement éventuel de son programme. Toujours est-il
que les programmes réaménagés suivent la même
procédure que les programmes initiaux.
Une fois adoptés par le Conseil, ces programmes sont
publiés par la Commission dans un délai d'un (1) mois au Bulletin
Officiel de l'Union et dans les organes de publication de l'Etat membre
concerné.
L'idée d'adoption de programmes n'est pas mauvaise en
soi si tant est qu'un programme est un ensemble de moyens et d'actions mis en
oeuvre en vue d'atteindre un objectif déterminé. Cette
idée est avantageuse à un triple point de vue.
Primo, son existence permet de canaliser les efforts à
entreprendre par les Etats vers un sens bien donné. Ici, il s'agit
d'assurer le respect des critères de convergence.
Secundo, de par sa périodicité triennale, elle
laisse aux Etats la possibilité de procéder à des
réaménagements sur chaque tranche annuelle de sorte à
adapter les programmes à la conjoncture économique du moment.
Tertio, la précision du contenu des programmes,
notamment les informations statistiques relatives à l'évolution
des critères de convergence, est un moyen pour l'Union d'anticiper tout
dérapage relatif à un critère de convergence. Cependant,
sur ce dernier point, on peut s'interroger sur la fiabilité des
données que transmettent les Etats à travers leurs Comités
Nationaux de Politique Economique (CNPE)79(*). Ces CNPE ne seraient-ils pas tentés de
modifier les données de base en vue d'améliorer leur situation
économique ?
Devant cette difficulté, la Directive n°01/96/CM a
prévu que le secrétariat technique des CNPE est assuré par
les directeurs nationaux de la BCEAO. Ce secrétariat technique recense
les données et vérifie leur fiabilité avant leur
transmission à la Commission. Aussi, la Directive susvisée a
conféré une autonomie de fonctionnement aux CNPE80(*). Malgré ces
précautions prises par la Directive n°01 de 96, on ne saurait
écarter toute tentative d'influence des Etats membres même si par
ailleurs la directive reconnaît aux CNPE, dans le cadre exclusif de leur
mandat, le droit de communiquer en toute autonomie entre eux avec les membres
des autres comités nationaux81(*). Cet obstacle pourrait, à notre avis,
être plus ou moins levé si, en dernière instance, les
citoyens de l'Union jouent le rôle qui est le leur avec la
possibilité qui leur est reconnue de revendiquer l'application du Pacte
de convergence par les Etats en raison de l'effet direct de celui-ci.82(*) Ainsi adoptés et
publiés, les programmes sont suivis et évalués.
B- Suivi et évaluation
Tout comme l'a prévu l'article 72 du Traité
concernant le suivi et l'évaluation des actions à mener dans le
cadre des grandes orientations de politiques économiques et
budgétaires, le Pacte de convergence en son article 7 dispose que le
programme élaboré par chaque Etat et adopté par le Conseil
fait l'objet d'une évaluation semestrielle par la Commission de
l'Union.
L'évaluation consiste ici à s'assurer que le
profil des critères de convergence est marqué par une
amélioration continue jusqu'au respect des normes communautaires
fixées83(*). En
effet, la date cible du 31 décembre 2002 avait été
fixée comme date à laquelle tous les Etats membres devaient
satisfaire aux critères de convergence. Dans l'intervalle, les Etats
devaient proposer des objectifs intermédiaires annuels qui
étaient validés dans le programme par le Conseil.
L'exécution d'un programme est jugée conforme lorsque les
réalisations respectent l'ensemble de ces objectifs
intermédiaires fixés à l'Etat membre concerné. Elle
est considérée comme non satisfaisante si l'évolution d'au
moins un des critères de convergence n'est pas conforme aux dispositions
de la décision d'adoption du programme notifiée par le Conseil
à l'Etat membre concerné84(*). Dans ce dernier cas et si c'est
précisément l'un des critères de 1er rang qui
n'est pas satisfait, l'Etat membre concerné élabore, en
concertation avec la Commission dans un délai de trente (30) jours
à compter de la notification de la décision du Conseil, un
programme de mesures rectificatives85(*).
Si la mise en oeuvre du programme de mesures rectificatives
n'aboutit pas à l'évolution souhaitée des critères
de 1er rang autres que le critère clé solde
budgétaire de base/PIB nominal, une nouvelle série de mesures
appropriées, élaborée par la Commission, toujours en
relation avec l'Etat membre concerné, doit être adoptée par
le Conseil. Lorsque, cependant, le critère clé fait partie des
critères de convergence dont l'évolution n'était pas
jugée conforme dans le cadre des mesures rectificatives, le
mécanisme de mise en oeuvre des sanctions 86(*) doit être
déclenché, sauf circonstances exceptionnelles87(*). Ces sanctions n'auraient
été mises en oeuvre que lors de l'examen des réalisations
de fin décembre 2002. Mais, et cela est d'importance, depuis le mois
d'octobre 2002, le Conseil sur proposition de la Commission a
décidé de différer l'horizon de convergence pour la
période 2003-2005. Ce qui veut dire que les sanctions ne seront mises en
oeuvre que lors de l'examen des réalisations de fin décembre
2005. Le Conseil explique cette importante décision par le fait que
compte tenu de l'impact de certains facteurs (crise ivoirienne, manque de
financement extérieur), les Etats n'étaient pas à
même de réaliser les programmes pluriannuels de convergence.
C'est avec ce système ainsi décrit que la
surveillance multilatérale prend tout son sens. En effet, elle n'aurait
pas sa raison d'être si elle n'était pas suivie et
évaluée. Et, en la matière, le Pacte de convergence a
renforcé le dispositif prévu dans le Traité en
prévoyant notamment un système d'alerte précoce permettant
d'anticiper tout dérapage dans la réalisation des programmes de
convergence. Cette alerte précoce rappelle, à bien des
égards, celle prévue dans le Traité de l'Organisation pour
l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) relatif aux
procédures collectives d'apurement du passif88(*).
L'étude du Pacte de convergence a montré qu'il
constitue cet instrument de renforcement du dispositif de surveillance
multilatérale depuis sa mise en application en janvier 2000. Trois (3)
années après son application, quel bilan peut-on en
dresser ? Quelles sont ces perspectives ?