Section 2ème : L'adoption de nouveaux
critères de
convergence
La surveillance multilatérale est fondée sur la
convergence des politiques budgétaires nationales et de leur
compatibilité avec la politique monétaire commune. Cette
convergence des politiques budgétaires nationales est fonction d'un
certain nombre de critères normatifs de référence
appelés critères de convergence. L'avènement du Pacte de
convergence a entraîné l'adoption de nouveaux critères de
convergence (parag 2ème). Mais avant le Pacte, des
critères existaient déjà (parag 1er). Il ne
serait pas superflu de les passer en revue pour mieux comprendre le sens des
nouveaux critères.
Paragraphe 1er : Les critères avant le Pacte de
convergence
Le Pacte de convergence n'a pas la paternité de
l'édiction des critères de convergence. Ceux-ci avaient
été élaborés d'abord sous l'UMOA (A) et ensuite
sous l'UEMOA (B).
A- Dans l'UMOA
Il est utile de rappeler que l'UEMOA n'est que le prolongement
de l'UMOA (Union Monétaire Ouest Africaine). L'article 2 du
Traité de l'UEMOA dispose en effet que : « Par le
présent Traité, les Hautes Parties Contractantes
complètent l'Union Monétaire Ouest Africaine (UMOA)
instituée entre elles, de manière à la transformer en
Union Economique Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) ... » Le
Traité UMOA a vu le jour le 14 novembre 1973 à Paris. Avec la
crise persistante qui s'est ressentie sur les finances publiques de ses Etats
membres dans les années 80 ; crise qui a eu un impact
négatif sur la valeur de leur monnaie commune33(*), l'UMOA a institué un
conseil de convergence en 1992 afin d'harmoniser la politique monétaire
commune avec les politiques budgétaires nationales. Dans le cadre de
cette convergence, une série de cinq (5) indicateurs de convergence
assortis de valeurs critiques a été adoptée en septembre
1993 par le Conseil des Ministres de l'Union. Ce sont :
- le ratio masse salariale/recettes fiscales =50 % ;
- le ratio investissements publics financés sur
ressources internes/recettes fiscales > 20 % ;
- le ratio solde budgétaire de base/recettes fiscales
> 15 % ;
- la variation nette des arriérés de paiement
intérieurs = 0 % ;
- la variation nette des arriérés de paiement
extérieurs = 0 %.
Ces indicateurs avaient pour objectifs la maîtrise de
l'évolution des charges salariales, la constitution d'une épargne
par les administrations publiques, la réduction des déficits
publics, la réalisation d'un solde primaire de base positif et enfin
l'élimination des arriérés de paiement. A l'analyse, on se
rend compte que, d'une manière générale, ces cinq (5)
indicateurs ne sont pas sans rappeler les quatre (4) critères de
convergence fixés par le Traité de Maastricht34(*) pour l'entrée dans
l'Union Economique et Monétaire Européenne.
Ces indicateurs de l'UMOA, en raison de l'évolution de
la situation économique au sein de l'Union et surtout avec
l'entrée en vigueur de l'UEMOA, ont été quelque peu
modifiés par le Conseil des Ministres de l'Union lors de sa session de
septembre 97.
B- Dans l'UEMOA
On se rappelle que les indicateurs de convergence que nous
venons d'exposer ont été adoptés dans un contexte
où « l'Union était dans une situation de
détresse budgétaire »35(*). Avec l'entrée en vigueur de l'UEMOA, l'on va
maintenir, pour l'essentiel, les cinq (5) critères
précédemment définis. On enregistrera, néanmoins
quelques changements dans ces critères avec les différentes
Directives édictées par le Conseil des Ministres de l'Union.
Ainsi, l'article 6 de la Directive n°02/96/CM relative
à la surveillance multilatérale des politiques
macro-économiques au sein des Etats membres de l'UEMOA pour
l'année 9736(*)
fait obligation aux Etats de porter le ratio masse salariale/recettes fiscales
à un niveau <50 % en 97. Les Directives n°01/97/CM et
n°01/98/CM portant le même objet que la Directive n°02/96/CM
précédemment citée, ont ramené ce ratio à un
niveau < 40 % pour les années 98 et 99. Cette austérité
peut s'expliquer sans doute par les bonnes performances réalisées
par la plupart des Etats membres qui ont réussi à maîtriser
l'évolution de leur masse salariale. Lorsque l'on analyse le rapport
semestriel d'exécution produit par la Commission de l'UEMOA37(*) en décembre 96, on se
rend compte que, pour l'année 96, seul le Togo a atteint 56,5 % tandis
que les sept autres Etats sont passés au dessous du seuil de 50 %.
On notera à ce propos les belles performances pour des
pays comme le Mali qui a atteint 28,9 %38(*). Senghor signale que « malgré toutes
les vertus que présente ce ratio, les pays membres de la
Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)
n'ont pas intégré ce critère, de la même
façon sur la liste des quatre (4) indicateurs retenus pour leur
dispositif de surveillance multilatérale exercée dans le cadre du
conseil de convergence »39(*). Si tel avait été le cas, on aurait pu
comme le souligne Senghor « faire une comparaison- raisonnable entre
les quinze (15) Etats membres de la zone franc ».
Au contraire de cette exigence de l'amélioration
continue du ratio masse salariale/recettes fiscales, les autres ratios
définis dans l'UMOA ainsi que leurs valeurs critiques ont
été maintenus comme tels dans l'UEMOA. La grande innovation sous
son égide est l'introduction du critère du taux d'inflation
annuel moyen comme indicateur de la surveillance multilatérale. Pour une
union monétaire ayant une monnaie et une politique monétaire
communes, comme c'est le cas de l'UEMOA, une telle prise en compte ne pouvait
plus tarder. La maîtrise de l'évolution de ce critère est
un gage pour la stabilité même de la monnaie commune. Du reste,
c'est un critère qui existait déjà au sein de l'Union
Européenne40(*).
Dans l'UEMOA, ce taux était d'abord fixé à un niveau
<5% en 97, ensuite il est passé à 3 % en 98 et 99 compte tenu
de l'amélioration observée dans sa maîtrise par les
Etats.41(*)
Ce début d'élargissement des critères de
convergence va se poursuivre et se renforcer avec l'adoption du Pacte de
convergence.
* 33 A. Senghor, le
système institutionnel de la surveillance multilatérale des
politiques macro-économiques au sein de l'UEMOA, in cahiers du CEEI,
FDSP, n°002 déc 99 p2
* 34 Dans le Traité de
Maastricht, les indicateurs sont les suivants :
- réduction de la variabilité des taux de change
(10 %),
- réduction du taux d'inflation (1 à 9 %),
- réduction du ratio déficit budgétaire/PIB
(5 %) ,
- plafonnement du financement du déficit
budgétaire par la Banque Centrale (10 %).
Le Traité du 16 mai 1994 instituant la Communauté
Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) édicte
également un certain nombre de critères de convergence. Ce
sont :
- présenter un taux de couverture extérieure de la
monnaie = 20 % ;
- dégager un solde budgétaire primaire >
0 ;
- ne pas accumuler d'arriérés de paiements tant
intérieurs qu'extérieurs ;
- ne pas augmenter la masse salariale de la fonction publique
à un rythme plus rapide que celui des recettes
budgétaires.
* 35 A. Senghor, op. cit.,
p26
* 36 Cette Directive fixe pour
la 1ère fois les critères de convergence de l'UEMOA
* 37.Rapport semestriel
d'exécution de Déc 96.
* 38 A. Senghor explique
également que cette performance est due au fait que la plupart de ces
Etats avaient déjà appliqué un programme d`ajustement
structurel qui organisait la réduction de ce ratio.
* 39 Dans la CEMAC, le
critère consiste à rapprocher les variations (en %) de la masse
salariale de la fonction publique et des recettes budgétaires.
* 40 V. supra p.16
* 41 V. Rapport semestriel
d'exécution de juillet et décembre 98 et également de
décembre 99.
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