CHAPITRE 2
Au regard des perspectives
Malgré le tableau quelque peu sombre
présenté à propos de l'état de la convergence des
Etats de l'Union115(*),
il convient de se convaincre que la convergence des politiques et performances
économiques voulue n'est pas définitivement un leurre. Bien au
contraire, les principaux éléments économiques et
financiers des programmes pluriannuels 2003-2005 (section
1ère), ainsi que l'ambitieux Programme Régional
d'Appui Statistique à la surveillance multilatérale (section
2ème), incitent à l'optimisme.
Section 1ère : Les programmes pluriannuels
2003-2005
Comme on le sait, ce sont ces programmes qui permettront
à moyen terme d'atteindre les objectifs de la convergence des
économies.
Pour cette nouvelle période 2003-2005, six (6) pays ont
fourni leur programme (Bénin, Mali, Niger, Togo, Sénégal
et Burkina Faso)116(*),
mais celui du Sénégal et celui du Burkina Faso n'ont pas encore
été examinés par le Conseil des Ministres de l'UEMOA.
Les autres pays se font encore attendre alors que selon l'article 3 de la
Directive n°01/2000/CM/UEMOA portant définition d'un calendrier
opérationnel pour la mise en oeuvre du Pacte de convergence, de
stabilité, de croissance et de solidarité entre les Etats membres
de l'UEMOA, chaque Etat doit transmettre à la Commission, au plus tard,
à la fin du mois d'octobre de chaque année, son programme. On ne
pourra donc pas se prononcer sur l'ensemble des programmes. Ce qui est bien
dommage pour l'analyse. Cela dit, une évaluation des quatre (4)
programmes déjà adoptés par le Conseil sera faite (parag
2ème) après avoir présenté leurs
principaux éléments (parag 1er).
Paragraphe 1er : Principaux éléments
des programmes
L'examen de ces principaux éléments consistera
à décrire d'une part, les objectifs des programmes pluriannuels
2003-2005 (A) et d'autre part, les actions qui sous tendent leur
réalisation.
A- Les objectifs
Dans l'ensemble, les options de politique économique
prévues dans le cadre de ces nouveaux programmes visent à
consolider les acquis en matière de convergence117(*) et à relever les
défis des critères dont les normes n'ont pu être
respectées.
Ainsi le Bénin, le Mali, le Niger et le Togo visent
respectivement à porter leur taux de croissance du PIB réel
à 7 %, 4,5 % et 4,2 % en moyenne par an jusqu'en 2005.
S'agissant à proprement parler des critères de
convergence, les critères retenus varient d'un pays à un autre en
fonction certainement des performances réalisées par chacun lors
du bilan du dernier programme. C'est ainsi que le critère du taux
d'inflation annuel moyen a été retenu par des Etats comme le
Bénin, le Mali et le Niger. Le premier vise une maîtrise de
l'inflation dans les limites de 3 % par an, le deuxième veut de
même le contenir au même taux, le troisième reste
également dans les mêmes limites de 3 %.
Un autre critère a été cette fois retenu
par tous les pays.
C'est le critère du déficit extérieur
courant hors dons rapporté au PIB nominal. On se souvient que seule la
Côte d'Ivoire avait pu respecter ce critère en atteignant un taux
de 1,5 % pour une norme fixée à 5 % maximum. Pour ce
critère, le Bénin se fixe comme objectif de le limiter à 5
% d'ici à l'an 2005. C'est le même objectif qui a
été retenu au Mali. Par contre le Togo prévoit de le faire
passer de 13,3 % en 2003 à 12,4 % en 2005. Au Niger, il sera
réduit à un taux de 8,8 % en 2005.
Le critère du solde budgétaire de base
rapporté au PIB nominal, appelé critère clé, sera
ramené au Mali à 2 % tandis qu'au Togo, des efforts seront
entrepris pour qu'il passe de 0,0 % en 2003 à 1,5 % en 2005.
Le taux de pression fiscale, au Niger, passera de 11 % en 2003
à 11,5 % en 2005. Au Togo, il sera de 13 % en 2005 après avoir
passé la barre de 12,6 % en 2003.
D'autres objectifs de convergence ont été
prévus au Niger. Ainsi, le ratio masse salariale rapporté aux
recettes fiscales passera de 33,4 % en 2003 à 28 % en 2005. En outre, ce
pays veut satisfaire le ratio de l'encours de la dette publique totale
rapporté au PIB nominal en la faisant passer de 82,5 % en 2003 à
63 % en 2005. Il affirme enfin sa volonté de ne pas accumuler des
arriérés de paiements sur toute la période 2003-2005.
A côté de ces défis du respect des
critères de convergence que les Etats prévoient de relever, il y
a ceux de la réduction de pauvreté qui n'ont pas
été occultés par certains d'entre eux.
En effet, le Bénin s'est fixé pour objectif
d'atteindre un minimum social commun en assurant la sécurité
alimentaire, l'accès à l'éducation de base, l'accès
aux services de santé primaire, l'accès à l'eau potable
pour tous, la réfection des pistes rurales et l'ouverture de nouvelles
pistes. Cet objectif béninois n'est pas différent de celui du
Niger quand ce pays dit que son programme vise par ailleurs la mise en oeuvre
de la stratégie de la réduction de la pauvreté et la bonne
gouvernance politique, judiciaire et financière.
Quant au Togo, il s'est donné comme autres objectifs
dans son programme :
- la poursuite de l'assainissement des finances publiques,
à travers une maîtrise des dépenses courantes ;
- l'accélération des réformes
structurelles, notamment la restructuration et la privatisation des entreprises
publiques ;
- la poursuite des efforts de restructuration et de
privatisation du système bancaire ;
- la diversification des exportations et la maîtrise de
l'accroissement des importations.
Tout ce chapelet de bonnes intentions ne peut devenir
réalité que si elles sont sous tendues par des actions
réfléchies et sainement conduites par les différents
pays.
B- Les actions
Pour conduire à bien les objectifs qu'ils se sont
défini, les Etats ont élaboré dans chaque domaine de
l'économie des actions et activités qu'ils se donneront les
moyens de réaliser.
Dans cette logique, le Bénin, peut atteindre l'objectif
de croissance accélérée de 7 % du PIB réel en 2005,
par des actions qui consisteront à relancer durablement le
système de production. Celle-ci se fera à travers notamment la
diversification des filières de production, la promotion des
activités de transformation agro-industrielle et le soutien à la
compétitivité interne des produits locaux. Dans le domaine
agricole en particulier, en plus du coton, de nouvelles filières
agricoles (noix de cajou, manioc ...) ont été identifiées
et la promotion de ces cultures, destinées pour l'essentiel à
l'exportation, est en cours.
Pendant ce temps, au Mali, on compte sur une
amélioration des conditions pluviométriques dans la
période 2003-2005, pour permettre une reprise de la production
cotonnière, qui serait renforcée par la hausse attendue dans la
production de riz et le dynamisme des autres branches du secteur primaire.
Les autorités du Niger, quant à elles,
prévoient de favoriser d'une part la production et l'exportation des
produits agro-pastoraux et d'autre part la compétitivité et la
reconstitution du stock alimentaire de sécurité.
Au Togo, les stratégies de convergence de
l'économie sur la période étudiée reposent sur la
diversification des exportations et la maîtrise de l'accroissement des
importations. Elles consistent à promouvoir la production locale et
à maîtriser les importations exceptionnelles de certaines
catégories de biens d'équipement, dans le but de réduire
le déficit chronique de la balance commerciale, d'améliorer le
solde extérieur courant et de soutenir la croissance.
Au plan des finances publiques, tous les pays prévoient
une amélioration des recettes grâce à un meilleur
renforcement des capacités des régies financières, un
meilleur respect des principes budgétaires notamment au Bénin. Ce
pays prévoit aussi de maîtriser ses dépenses publiques en
assurant une meilleure élaboration du budget unifié, la mise en
place des budgets-programmes, la maîtrise du Système
Intégré de Gestion des Finances Publiques (SIGFIP) et la mise en
oeuvre judicieuse du code des marchés publics. Cette maîtrise des
dépenses publiques n'est pas la seule affaire du Bénin, loin s'en
faut. Au Mali notamment, il a été élaboré un Cadre
de Dépenses à Moyen Terme qui devrait permettre d'assurer une
bonne orientation des dépenses publiques. Toujours au Mali, au niveau
des recettes, une attention particulière sera accordée à
la mise en oeuvre efficace des mesures relatives à la nouvelle
fiscalité applicable aux produits pétroliers et à la
modification du Code Général des Impôts sur la TVA et
l'Impôt Spécial sur Certains Produits (ISCP).
Au Niger, l'Etat poursuivra l'assainissement des finances
publiques avec des mesures telles que la fiscalisation du secteur informel, la
relance automatique de tous les contribuables retardataires, le renforcement de
l'administration fiscale.
Les mesures au Togo ne sont guère différentes.
Cependant, on précise que l'on élargira l'assiette tout en
limitant les exonérations et en luttant contre la fraude, la
contrebande, la corruption.
Seul le Bénin, selon le rapport d'exécution de
la surveillance multilatérale, a prévu une politique en
matière monétaire pour cette période 2003-2005. Il
appliquera une politique prudente en veillant à la
régularité du contrôle des établissements de
crédit par la commission bancaire et en facilitant le
développement de nouveaux instruments financiers de mobilisation de
l'épargne.
Toutes ces actions décrites permettront-elles
effectivement de réaliser les objectifs fixés dans les
programmes ? C'est la question de l'évaluation des programmes qui
se trouve ainsi posée.
* 115 On peut cependant
relever que le bilan fourni par le Sénégal et le Bénin est
globalement satisfaisant car le 1er respecte tous les
critères de convergence à l'exception du critère du
déficit extérieur hors dons/PIB nominal ; le
2ème n'a pas pu satisfaire aux critères du
déficit extérieur hors dons/PIB nominal et du taux de
pression fiscale.
* 116 Le Bénin et
le Togo ont transmis leur programme le 19 novembre 2002, le Mali le 25 novembre
et le Niger le 26 novembre. Les programmes transmis par ces quatre (4) Etats
ont tous été adoptés par le Conseil des Ministres.
* 117 Cette affirmation est
surtout vraie pour le Bénin et le Mali
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