REPUBLIC OF CAMEROON Peace - Work -
Fatherland
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THE UNIVERSITY OF MAROUA
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FACULTY OF LAW AND POLITICAL SCIENCES
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DEPARTMENT OF PUBLIC LAW AND POLITICAL SCIENCE
RÉPUBLIQUE DU CAMEROUN Paix -
Travail - Patrie
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UNIVERSITÉ DE MAROUA
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FACULTÉ DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES
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DÉPARTEMENT DE DROIT PUBLIC ET SCIENCES POLITIQUES
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BP 46 MAROUA
LES MODES ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES LITIGES FISCAUX AU
CAMEROUN
Mémoire
En vue de l'obtention du Diplôme de Master Recherche
Option : DROIT PUBLIC INTERNE
Présenté par :
KUE TOUKAM Martial Rony Matricule: 17M155JP
Licence en droit public
Sous la Direction de :
NYABEYEU TCHOUKEU Léopold Maitre de
Conférences en Droit Public Université de Maroua
ANNéE ACADéMIQUE 2017/2018
La Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de
l'Université de Maroua n'entend donner aucune approbation ni improbation
aux opinions émises dans ce mémoire ; ces opinions doivent
être considérées comme propres à leur auteur.
II
DÉDICACE
A mes regrettés parents KUE Lucas et MAFODAM Colette
qui par le culte de l'effort et du travail bien fait qu'ils m'ont
inculqués, n'auront malheureusement pas l'opportunité de se
délecter de ce travail intellectuel.
REMERCIEMENTS
III
Sur le plan académique, je tiens d'abord à
remercier le Professeur NYABEYEU TCHOUKEU Léopold, qui a accepté
de diriger mes recherches malgré son emploi du temps très
chargé. Ma profonde gratitude va également à l'endroit du
Professeur SPENER YAWAGA, Doyen de la Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques.
Ensuite au Dr ZOUMLII Philippe pour ses précieux
conseils relatifs aux indications méthodologiques. Enfin de
manière non exhaustive, à nos camarades de promotion DAAMO JAGUE,
LIRWE SAODA et YANDA Gilbert.
Je tiens également à remercier sur le plan
extra-académique la Direction Générale des Impôts
pour l'accès aux statistiques, mes frères : KUE Bertin, KUE
Valery, KUE Chrispo et KUE Patrick, mes soeurs : KUE Derline et KUE Nelly, le
Chef de Centre Régional des Impôts de l'Extrême-Nord :
MPOUOGOU Jean, le Chef CIME de Maroua : HAMADOU SOUAIBOU, mes collègues
: TAYOUSSI Annette, BOULLEYS, NEMATCHOUA, NGWA NZIE Joseph, NOUBI Patrick,
KANKEU Confiance, ABOULA Hervé, YETKOU, KOLAIKAM, NGANDO ESSAME, BASGA
MEIDANDI, ABDOUL AZIZE, ISSOFA, IGNABE Justin, NDJAKA David, AHMADOU ABDOULAHI,
BENT Donatien, MENKAMALO Jean, NTONGA Lombard, LAOUBELA HAMASSELBE AISSATOU,
EKOUE MBODY Samuel, ABAKAR AGUILOU, MOHAMADOU DALIL, FADIMATOU et SARATOU qui
par leur soutien tant moral que matériel ont participé à
la réalisation de cette étude.
Je tiens enfin à exprimer toute ma reconnaissance
à mon épouse TOUKAM Diane qui m'a supporté tout au long de
ce projet et à mes enfants : Ivanna Colette, Olivia Maëlle, Arnold
Gabriel et Rony Fils, qui m'ont laissé un peu de temps pour
écrire.
LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET
SIGLES
iv
ADR : Alternative Dispute Resolution
AMR : Avis de Mise en Recouvrement
CAA : Cour Administrative d'Appel (France)
CDI : Centre Divisionnaire des
Impôts
CE : Conseil d'État (France)
CGI : Code Général des
Impôts
CIME : Centre des Impôts des Moyennes
Entreprises
CRI : Centre Régional des
Impôts
CSPLI : Centre Spécialisé des
Professions Libérales et de l'Immobilier
CTD : Collectivités Territoriales et
Décentralisées
DGE : Direction des Grandes Entreprises
DGFIP : Direction Générale des
Finances Publiques
DGI : Direction Générale des
Impôts
DIRCOFI : Direction du Contrôle Fiscal
(France)
Dr. Fisc : Droit Fiscal
EUR : Euro
EPA : Établissement Public
Administratif
Ibid : Ibidem (renvoie à la page
précitée)
ISF : Impôt de Solidarité sur la
Fortune
JO : Journal Officiel
LGDJ : Librairie Générale de
Droit et de Jurisprudence
LPA : Les Petites Affiches
LPF : Livre des Procédures Fiscales
MARC : Modes Alternatifs de Règlement
des Conflits
MARL : Modes Alternatifs de Règlement
des Litiges
MINFI : Ministère chargé des
Finances
N° : Numéro
Op. Cit : Opus citatum,
précédemment cité
PME : Petites et Moyennes Entreprises
PUF : Presses Universitaires de France
RJF : Revue de Jurisprudence Fiscale
TSPP : Taxe Spéciale sur les Produits
Pétroliers
TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée
RESUME
V
Avec l'accroissement des litiges entre l'Administration
fiscale et le contribuable et la complexité de la fiscalité qui
s'adapte sans cesse au fil du temps, les voies nouvelles pour résorber
ces litiges fiscaux sont plurielles. Si ces conflits ne sont pas résolus
et réduits à leur simple expression, ils peuvent déteindre
sur la qualité de relation entre le contribuable et l'Administration
fiscale pourtant partenaires suivant l'approche de la clientèle. Ces
derniers ont donc besoin de procédures souples et efficaces pour
résoudre les litiges fiscaux. Or les procédures actuelles
existant dans notre législation fiscale sont limitées et
consacrées de manière restrictive : il s'agit de la transaction
et de la remise gracieuse.
Ces travaux invitent à une analyse critique des modes
alternatifs de règlement des litiges fiscaux sus cités. Ces
procédures sont étudiées, leur rigorisme mis en relief
aussi bien sur la plan théorique que pratique, et des pistes nouvelles
sont scrutées à la lumière des modes alternatifs novateurs
de règlement des litiges qui, en instaurant les conditions d'un
échange contradictoire, offrent au contribuable et à
l'Administration fiscale en conflit, la possibilité de se
réapproprier la solution de leurs litiges à travers une «
justice douce et concertée ».
La première partie traite de la consécration
limitée des modes alternatifs de règlement des litiges fiscaux au
Cameroun. L'analyse suit une approche critique de l'existant,
caractérisée par une conception restrictive et une pratique
limitée de la transaction fiscale et de la remise gracieuse.
La seconde partie, traite des voies alternatives nouvelles de
règlement des litiges fiscaux que constituent la conciliation et la
médiation fiscale qui connaissent un succès notamment en France.
A travers une analyse comparative, des perspectives sont ouvertes en vue d'un
plaidoyer pour l'internalisation de ces modes novateurs dans notre
législation fiscale.
Mots-clés : Litiges fiscal,
contribuable, administration fiscale, modes alternatifs de règlement des
litiges, transaction, remise gracieuse, conciliation fiscale, médiation
fiscale.
ABSTRACT
vi
With the growing of disputes between the fiscal administration
and the tax-payer and the fiscal system which is changing by the time going,
several new means of solving these disputes have been discovered. If these are
not solved or reduced, they may have a negative influence on the quality of the
relationship between the fiscal administration and the tax-payer, yet both
being good partners according to the customer approach. It is therefore a
necessity to find supple and efficient means of solving the problem between
them. However, the existing means granted by our fiscal laws are limited and
poorly implemented. These include fiscal settlement and free of charge discount
or cancelation of the fiscal debt.
This work is therefore an open-gate to alternative means of
solving this ongoing dispute. We have studied new procedures, showing their
strength and their efficiency both theoretically and practically. We have also
scrutinize other paths which can create safe means of exchange while giving the
two parts the possibility to find solutions of their dispute by themselves
through flexible and concerted justice.
In the first part of this work, we discussed about the limited
implementation of the alternative means of solving fiscal disputes in Cameroon.
The analysis was done through a critical of the existing laws which are
characterized by a restricted conception and a limited implementation of fiscal
settlement or transaction and the free of charge discount or cancellation.
The second part of this work aimed at finding new alternative
ways of solving this fiscal dispute. This can be done through arrangement such
as fiscal conciliation and fiscal mediation which are being successfully
implemented in France. Through a comparative and contrastive analysis, new
perspectives have been opened to plead for the adoption of these innovator
modes in our fiscal laws.
Key-words: fiscal dispute, tax-payer, fiscal
administration, alternative modes of solving disputes, fiscal settlement, free
of charge discount or cancellation, fiscal conciliation, fiscal mediation.
VII
SOMMAIRE
Avertissement .i
Dédicace .ii
Remerciements . iii
Sigles et abréviations .iv
Résumé v
Abstract .vi
Sommaire .vii
Introduction générale 1
I- Cadre de l'étude 2
II- Objet de l'étude 7
III- Conduite de l'étude 9
IV- Annonce du plan de rédaction
.11 Première partie : La consécration limitée
des modes alternatifs de règlement
de litiges fiscaux au Cameroun .12
Introduction de la première partie 13
Chapitre 1 : La conception restrictive des modes alternatifs de
règlement des
litiges fiscaux 15
Section 1 : La conception restrictive de la transaction fiscale
18
Section 2 : La conception restrictive de la remise gracieuse
23
Chapitre 2 : La pratique limitée des modes alternatifs de
règlement des litiges
fiscaux ...29
Section 1 : La pratique limitée de la transaction fiscale
..32
Section 2 : La pratique limitée de la remise gracieuse
37
Conclusion de la première partie 44
Partie 2 : L'extension souhaitable des modes alternatifs
de règlement des
|
litiges fiscaux au Cameroun
|
46
|
Introduction de la seconde partie
|
47
|
Chapitre 1 : La conciliation fiscale
|
49
|
Section 1 : La plus-value théorique de la conciliation
fiscale
|
.52
|
Section 2 : Le modèle français de conciliation
fiscale
|
.58
|
Chapitre 2 : La médiation fiscale
|
64
|
Section 1 : La plus-value théorique de la médiation
fiscale
|
.68
|
Section 2 : Le modèle français de médiation
fiscale
|
77
|
Conclusion de la seconde partie
|
90
|
Conclusion générale
|
92
|
Bibliographie
|
94
|
Annexes
|
98
|
Index
|
102
|
Table des matières
|
..103
|
INTRODUCTION GÉNÉRALE
|
2
La présente étude s'intéresse aux modes
alternatifs de règlement des litiges fiscaux dans le système
fiscal camerounais.
Pour y parvenir, il convient de baliser le cadre que couvre
l'étude (I), d'en cerner l'objet (II)
et de fixer sa conduite (III) à travers la
méthode qui guidera la réflexion.
I- CADRE DE L'ÉTUDE
C'est un ensemble d'éléments qui permettent de
circonscrire le sujet. Afin de déterminer le cadre conceptuel de
l'étude, il importe de présenter d'abord son contexte
(A), d'en définir ensuite les termes
(B), de mettre en exergue son actualité (C)
sans faire fi de sa délimitation
(D).
A. Contexte de l'étude
Cette étude s'inscrit dans un contexte particulier,
celui de la postmodernité, marqué par la « crise de
l'autorité », où dans un «
chassé-croisé »1 entre justice
étatique et justice alternative, beaucoup choisissent leurs propres
valeurs et critères d'action. Le constat est clair : l'individu
postmoderne dans un élan d'autonomisation, d'affranchissement de toutes
formes d'autorité, « prend conscience de la multiplicité
des manières de vivre et des visions du monde, valorise
l'hétérogénéité et le pluralisme
»2. Cette nouvelle évolution tend à
conférer une plus grande place aux modes alternatifs de règlement
des litiges. Au déclin de la loi et à la crise de
l'État-Providence, répond le regain d'intérêt pour
ces mécanismes.
Ils correspondent en effet à cette nouvelle conception
des relations sociales où « le recul de la loi et le repli de
l'État abandonnent à la volonté des acteurs sociaux de
nouvelles plages de liberté, y compris celle d'assurer, en dehors des
juridictions, la solution des litiges qui les oppose »3.
Cette mutation sociale qui se traduit par la contestation par les individus du
« fonctionnement et des structures de l'État, de la
règle de droit et de la façon dont elle est appliquée par
le juge »4, montre aujourd'hui qu'il faut compter avec la
solution résultant d'un mode alternatif de règlement des litiges,
c'est-à-dire une solution négociée par les parties, ou
élaborée par une instance qu'elles ont elles-mêmes mises en
place. Du fait de ce nouveau type
1 NELISSE (C.), « Le règlement
déjudiciarisé : entre la flexibilité technique et la
pluralité juridique », La revue de droit, Vol. 23,
n°1, 1992, p. 271.
2 BORGEAT (L.) et GIROUX (I.), « Droit et
administration publique : entre tradition et postmodernité »,
Administration publique du Canada, 1997, Vol. 40, n°2, p. 307.
3 CADIET (L.), « Les modes alternatifs de
règlement des litiges et le droit » in Les modes alternatifs de
règlement des litiges : les voies d'une autre justice, CHEVALIER
(P.), DESDEVISES (P.), MILBURN (P.) (dir.), Mission de recherche
« Droit et justice », La Documentation française, 2003,
p. 257.
4 MUNOZ (F.), La conciliation : du droit
privé au droit public, Thèse, Paris 1, 1997, p. 48.
3
de régulation sociale relatif au besoin d'autonomie
caractérisant les individus postmodernes, les modes alternatifs voient
leur place rehaussée au sein du paysage juridique contemporain.
Le contexte étant ainsi circonscrit, il s'agit à
présent de baliser le sujet d'un point de vue conceptuel.
B. Définition des termes
Pour mieux cerner au plan définitionnel le thème
: les modes alternatifs de règlement des litiges fiscaux, nous ne
pouvons faire l'économie d'une définition de ce qu'est un «
MARL » (1) et appréhender à travers l'adjonction de
l'adjectif qualificatif « fiscal », sa spécificité dans
le domaine fiscal (2). Simplement, il nous revient à définir ce
qu'est un « MARL » au plan fiscal.
1- Qu'est-ce qu'un mode alternatif de règlement
des litiges (MARL)
Ce terme est la transcription française de la formule
anglo-saxonne Alternative Dispute Resolution, apparait dans les
années 90. Il se rapporte aux processus et aux techniques de
résolution des litiges en dehors des procédures juridiques sous
autorité étatique. En d'autres termes, c'est «
l'ensemble des procédés visant à résoudre des
conflits ou litiges, sans recourir à un juge, notamment par la voie de
la conciliation ou de la médiation conduite par un tiers, ainsi que par
le truchement de la transaction, mode conventionnel de solution à la
contestation »5.
L'arbitrage est une procédure dans laquelle des juges
privés (les arbitres), règlent le litige dans le délai qui
leur est imparti. La transaction est un processus de règlement amiable
qui aboutit à un contrat mettant fin à la contestation ou
empêchant celle-ci de se développer, au travers d'un procès
par l'abandon réciproque des droits. Quant à la médiation,
c'est une procédure par laquelle des parties cherchent à trouver
un accord sur base de propositions de règlement émises par un
tiers appelé médiateur. Enfin la conciliation qui se manifeste
par le fait que l'accord sus évoqué soit trouvé sans
l'intervention d'un tiers.
Tous ces procédés ont en commun de constituer
une alternative à la justice étatique, c'est à dire au
juge étatique intervenant dans sa mission de juridictio. La
summa divisio se dessine ainsi : il est des modes de résolution des
litiges consistant pour certains à faire trancher le litige par le juge
étatique dans le cadre de son pouvoir de dire le droit, d'autres
à régler les
5 GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.) (dir.), GUINCHARD
(S.), MONTAGNIER (G.), Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz,
17e éd, 2010, p. 473.
4
litiges « autrement », expression qui du
reste a été utilisée par le Conseil d'État (CE)
français dans son rapport en 2013, d'où le terme alternatif. La
définition du MARL est ainsi ébauchée, le sens du litige
fiscal reste à éclaircir.
2- Le litige fiscal
Le litige fiscal est un litige qui concerne le domaine de la
fiscalité. D'abord, le litige au sens du lexique des termes juridiques
se définit lorsqu'une « personne ne peut obtenir amiablement la
reconnaissance d'une prérogative qu'elle croit avoir et envisage de
saisir un tribunal pour lui soumettre sa prétention
»6.
Le litige est ainsi « un conflit juridiquement
relevant, c'est-à-dire susceptible de faire l'objet d'une solution
juridique, par application des règles de droit
»7.
Ensuite le Fisc selon le dictionnaire précité
désigne : « l'ensemble des services chargés
d'établir et de percevoir les impôts »8.
L'adjectif « fiscal » désigne « ce qui se
rapporte à l'impôt, à la fiscalité
»9, ou ce qui marque « l'appartenance au fisc de
ce qu'il qualifie »10.
C'est dire en fait que le qualificatif « fiscal
» détermine tout ce qui concerne ou qui a trait, peu ou prou
à l'impôt. Le litige fiscal met ainsi en relief d'une part un
contribuable qui peut être une personne physique ou morale, d'autre part
l'Administration fiscale et un litige portant sur les règles
d'établissement et de perception de l'impôt. Le terrain
étant déjà balisé au plan conceptuel, quelle est
son actualité ?
C. Actualité du sujet
Les litiges en général et fiscaux en particulier
sont inhérents à la vie en société, et il faut
nécessairement trouver des moyens pour les résoudre. C'est en
cela que ce sujet est actuel, tellement les « MARL » suscitent dans
la plupart des pays du monde un vif intérêt. Le sociologue
allemand Simmel GEORG sur la réalité implacable du conflit,
immanente à la nature humaine s'exprimait en ces termes : «
Cessons de nier le conflit. Le conflit est une manifestation de la vie
elle-même. C'est un élément vital. Au lieu de le nier,
essayons de comprendre le conflit,
6 GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.) (dir.), GUINCHARD
(S.), MONTAGNIER (G.), Lexique des termes juridiques, op.cit., p.
438.
7 CADIET (L.), « Des modes alternatifs de
règlement des conflits en général et de la
médiation en particulier », In La médiation,
Société de législation comparée, Paris,
Dalloz, 2009, p. 14.
8 GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.) (dir.), GUINCHARD
(S.), MONTAGNIER (G.), Lexique des termes juridiques, op.cit., p.
334.
9 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, Paris,
P.U.F., 1987, p. 407.
10 AGRON (L.), Histoire du vocabulaire
fiscal, Paris, LGDJ, 2000, p. 264.
5
de le circonscrire. Essayons d'apprendre à le
gérer, à le traiter »11. Transposé au
plan fiscal, il faut reconnaitre que les relations entre le Fisc et le
contribuable sont souvent sources de conflits.
La mission mobilisatrice de l'administration fiscale des
ressources nécessaires en vue de la satisfaction des questions
d'intérêt général, s'accorde difficilement avec des
contribuables qui ont du mal à s'acquitter régulièrement
de leurs obligations fiscales. En effet, profitant du système fiscal
déclaratif qui leur permet de liquider eux-mêmes le montant des
impôts dus, ces contribuables ont « la tendance naturelle
à éluder ou à minimiser le montant de la contribution due
en prenant quelques libertés avec les lois et règlements
»12. La contrepartie de ce système
déclaratif est le contrôle qui permet au Fisc de déterminer
d'autorité la contribution supplémentaire liée notamment
au calcul de l'impôt, au retard de paiement ou, en cas de fraude fiscale.
Dans ces cas, l'administration fiscale peut engager une procédure de
redressement qui peut déboucher sur le contentieux en cas de persistance
du désaccord entre l'administration et le contribuable.
D'énormes réclamations contentieuses sont
effectuées chaque année au Cameroun en matière
fiscale13. Le contentieux fiscal est généralement
long, couteux et très technique. C'est pourquoi des procédures
non contentieuses, fondées sur le dialogue entre l'administration et les
contribuables ont été mises en place.
A l'heure où il existe des recours de plus en plus
fréquents aux instances juridictionnelles, traduisant un
phénomène de judiciarisation de la
société14, les modes « alternatifs
»15 de résolution des conflits sont une option
séduisante face aux procédures contentieuses classiques «
lourdes, complexes, frustrantes, couteuses, aux délais infinis et
aux débats acrimonieux »16. Parallèlement,
la crise de la justice étatique a favorisé au cours de ces
dernières années, une alternative, « une autre voie
offerte aux adversaires pour trouver une solution à leur litige
»17. Comme le note en effet Loïc CADIET, ADR
(Alternative dispute
11 SIMMEL (G.), « Le conflit », In
Sociologie. Études sur les formes de la socialisation,
Paris, P.U.F, 1999, p. 14.
12 ATECK A DJAM (F.), Droit du contentieux fiscal
camerounais, Paris, l'Harmattan, 2009, p. 1.
13 ATANGA FONGUE (R.), Le contrôle fiscal
et protection du contribuable dans un contexte d'ajustement structurel : le cas
du Cameroun , Thèse de doctorat en droit public, Université
du MAINE, Faculté de Droit et des Sciences Economiques, octobre 2006,
pp. 356 et 357.
14 ROUVILLOIS (V-F.) (dir.), « La
société au risque de la judiciarisation », Débat
et Colloque, Litec, 2008.
15 Sur le débat de l'alternativité
voir Juriste Solidarités, « Les modes Alternatifs de
Règlement des Conflits : Quelle Alternativité ? »
http://www.agirledroit.org/article
515.html. Consulté le 10 janvier 2017.
16 OTIS (L.), « La justice conciliationnelle :
l'envers du lent droit », Revue Internationale d'Ethique
sociétale et Gouvernementale, Automne 2001, Vol. 3. n°2, p.
1.
17 CADIET(L.), « Solution judiciaire et
règlement amiable des litiges : de la contradiction à la
conciliation », In Mélanges C.Champaud, 1997, p. 329;
GUINCHARD (S.), « L'évitement du juge civil », In
Martin (G.) (dir.), Les
6
resolution) et MARC (Modes alternatifs de règlement des
conflits), selon les acronymes consacrés en pays de Common Law et en
France, désignent l'ensemble de ces divers procédés de
règlement amiable des différends18.
Ce qui est vrai au plan civil l'est aussi au plan fiscal.
Lorsqu'un litige fiscal se produit sans accord final, la voie juridictionnelle
est inévitablement le moyen traditionnel permettant de le
résoudre. Ce règlement juridictionnel des litiges fiscaux
s'explique dans un contexte de crise des finances publiques, car la principale
difficulté du contentieux de l'impôt en Afrique et
particulièrement au Cameroun mu par des objectifs quantitatifs
budgétaires, provient de l'attitude de l'administration fiscale à
l'égard du contribuable conduisant à la seule recherche du
rendement fiscal au détriment de la sécurité juridique.
Ailleurs comme en France, le champ de la médiation
fiscale occupe une place originale. Les modes de règlement amiable des
différends fiscaux à l'instar de la conciliation, l'arbitrage, la
transaction et la médiation instaurent les conditions d'un
échange contradictoire, offrant ainsi au contribuable et à
l'administration en conflit la possibilité de se réapproprier la
solution de leur litige à travers une « justice douce
» 19 et « concertée » issue de la
volonté des parties ou sous l'égide d'un tiers.
Ces différents mécanismes de médiation
mis en place en France ont montré leur efficacité puisque moins
de 1% des litiges sont soumis au juge20. C'est pourquoi un examen
des recours non juridictionnels fiscaux nous a paru s'imposer. Ils suscitent un
débat passionnant aujourd'hui au sein de la théorie du droit
public sur une possibilité juridique au niveau du fond mais
également mis en examen par les pratiques réelles sur leur
compatibilité avec les divers contextes socio-économiques. Il est
constant que l'actualité du thème sur les modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux est indéniable, mais alors comment
se délimite-t-il?
métamorphoses de la régulation
juridique, Paris, LGDJ, coll. « Droit et société
», 1999, p. 221; JARROSON (C.), « Les modes alternatifs de
règlement des conflits : présentation générale
», Revue Internationale de Droit Comparé, 1997, p. 329.
18 Médiation et arbitrage Alternative
dispute resolution Alternative à la justice ou justice alternative ?
Perspective comparative, sous la direction de L. Cadiet, Litec, 2005, p. 5.
19 TAGNE TOIKADE (T.S.), « La conciliation en
droit judiciaire privé camerounais », HAL, 2016, Consulté 30
juillet 2018 sur le site des archives ouvertes : http://
hal.archives-ouvertes.fr/ hal-01333621, p. 2.
20 Cette statistique est disponible sur le site
:
www.mediateur-republique.fr,
Médiateur Actualités du Journal du Médiateur de la
République, janvier 2008, N°33. Consulté le 10 janvier
2017.
7
D. La délimitation du sujet
Il s'agira de mettre en relief la délimitation
matérielle, spatiale et temporelle.
D'abord en ce qui concerne la délimitation
matérielle, notons comme prolégomènes que de
manière classique le Droit en tant que discipline, est
généralement caractérisée par la summa divisio
: Droit Public et Droit Privé. Le Droit public comporte plusieurs
branches qu'on peut classer en deux groupes : le droit public interne et le
droit public international. Le droit public interne comporte trois
matières : le droit constitutionnel, le droit administratif et le droit
financier.
Ce thème s'inscrit dans le segment du droit financier
à l'intérieur du droit public interne. Plus
spécifiquement, il s'agit du contentieux fiscal. Par ailleurs la
théorie générale de droit, le droit administratif seront
également convoqués.
Ensuite concernant la délimitation spatiale, il
apparait que chaque société est régie par un droit, c'est
ce qu'on désigne sous la formule latine « Ubi societas, ibi jus
». Le Professeur KAMTO fait d'ailleurs remarquer à ce sujet
que la réciproque de cette proposition équivaut à la
proposition elle-même. « Ubi jus, ibi societas
»21. C'est dire que le droit est nécessairement le
droit d'une société. Fort de ceci, il convient de signaler que
l'espace d'étude du thème sur les modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux est le Cameroun.
Enfin, la délimitation temporelle n'est pas
enfermée dans une séquence temporelle précise.
L'étude s'inscrit dans une séquence ouverte. Le cadre de
l'étude est ainsi fixé, il s'agit dans un deuxième
mouvement de circonscrire l'objet de l'étude.
II- OBJET DE L'ÉTUDE
Présenter l'objet de l'étude revient à
s'intéresser à l'intérêt qu'il présente
(A), à produire l'état de la question
(B), et à énoncer la problématique
(C) et l'hypothèse de recherche
(D).
A. Intérêt du sujet
Ce thème recèle un intérêt en
théorie fiscale ; notamment en matière de sécurité
juridique. La recherche de solution de règlement des litiges fiscaux en
dehors du juge répond à une double préoccupation. Il
s'agit d'abord au plan théorique de déjudiciariser le contentieux
fiscal, c'est-à-dire régler à l'amiable autant que faire
se peut les litiges portés au contentieux
21 KAMTO (M.), Pouvoir et droit en Afrique
noire. Essai sur les fondements du constitutionnalisme dans les Etats d'Afrique
noire francophone, L.G.D.J., Bibliothèque africaine et malgache,
1987, p. 28.
8
qui représentent un coût pour les contribuables,
l'administration fiscale et le système juridictionnel. Ensuite au plan
pratique, il est question d'améliorer la qualité des relations
entre le contribuable et l'administration fiscale. L'intérêt pour
ce sujet n'a pas manqué d'intéresser certains auteurs.
B. Revue de la littérature
De nombreux livres et articles de doctrine, de nombreuses
thèses ont été consacrés aux modes alternatifs de
règlement des litiges. Toutefois, rares sont ceux-là qui ont
réservé une bonne place à la matière fiscale.
Néanmoins, des auteurs comme BOULLEZ Christian et SCHIELE Pascal,
LAMBERT-WIBER, HICHAM BAKKALI et WUTTIPONG mettent un point d'orgue sur la
thématique relative au règlement amiable des litiges fiscaux.
En effet BOULLEZ Christian et SCHIELE Pascal dans un Article
commun intitulé « Le règlement non contentieux des conflits
en droit fiscal »22, distinguent dans le droit fiscal
français la juridiction gracieuse et le recours à des
autorités compétentes ou à des tiers par la
procédure amiable ou l'arbitrage et la médiation fiscale.
Madame LAMBERT-WIBER23 dans la même
lancée recense les différents modes alternatifs qui permettent un
règlement non juridictionnel des litiges fiscaux. Il s'agit des recours
hiérarchiques, des recours administratifs préalables, de la
médiation, conciliation, transaction et le recours gracieux.
Contrairement à cette approche explicative qui recense
les différents modes alternatifs de règlement des litiges
fiscaux, Messieurs HICHAM BAKKALI24 et WUTTIPONG
SIRICHANTRANON25 dans leurs thèses, mettent en débat
les différentes possibilités d'intégrer ces modes
alternatifs dans les procédures afin de les mettre en examen pour tester
leur compatibilité avec le système fiscal. Selon par exemple
HICHAM, la pratique qui a été admise au bout du compte par la
Direction Générale des Impôts marocaine est celle du
règlement négocié du litige aboutissant à la
transaction26 .
22 Voir BOULLEZ (C.) et SCHIELE (P.), « Le
règlement non contentieux des conflits en droit fiscal »,
BFF.Lefebvre, 1997.
23 Voir LAMBERT-WIBER (S.), « Les modes
alternatifs au règlement des litiges fiscaux », Les Petites
Affiches, 22 mai 2007, n°102.
24 Voir HICHAM (B.), Le règlement
amiable du litige fiscal au Maroc, Thèse de doctorat en droit
public, Paris 1, 2016.
25 Voir WUTTIPONG (S.), Les modes alternatifs
de règlement des litiges fiscaux, Thèse de doctorat en droit
public, Paris 2, 2010.
26 HICHAM (B.), Le règlement amiable du
litige fiscal au Maroc, Thèse de doctorat en droit public, op.cit.,
p. 125.
9
En ce qui nous concerne, à partir de l'analyse froide
de l'existant, c'est-à-dire des modes alternatifs de règlement
des litiges fiscaux consacrés dans le droit fiscal camerounais en
vigueur à savoir : la transaction et les remises, modérations
d'impôts, nous étudions certains modes alternatifs qui ont fait
leurs preuves ailleurs, notamment en France à l'instar de la
médiation et la conciliation fiscale afin de plaider pour leur
incorporation, internalisation et contextualisation dans notre système
fiscal en vue de son amélioration, au sens de legge
ferenda27. D'où la nécessité de camper le
sujet.
C. Problématique
Même si c'est une notion difficile à
définir de manière incontestable, nous pouvons néanmoins
énoncer que la problématique est « l'ensemble
cohérent, organisé des questions et concepts relatifs à un
sujet déterminé, permettant d'ouvrir sur des hypothèses
dont la démonstration constitue le coeur de la recherche.
»28. En l'espèce, concernant notre sujet, elle
repose sur l'appréciation qui est faite des modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux en vigueur au Cameroun.
Le problème sous-jacent est le suivant : quelle
appréciation peut-on faire des modes alternatifs de règlement des
litiges fiscaux au Cameroun ?
D. Hypothèse de la recherche
Il convient de noter que les modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux que sont la transaction et les remises ou
modérations d'impôts, sont consacrés de manière
limitée dans notre arsenal législatif fiscal.
Le cadre et l'objet de l'étude étant fixés,
qu'en est-il de la conduite de l'étude ? III- CONDUITE DE
L'ÉTUDE
Elle se fera en mettant en relief l'approche
méthodologique (A) et le plan de rédaction
(B). A. Approche méthodologique
Tout juriste qui cherche la vérité doit trouver
une méthode capable de l'y conduire. Toutes les sciences ont en commun
une méthodologie qui consiste en un savoir logique,
27 Voir l'explicitation sur le site du Centre de
Traduction et de Terminologie Juridique de la Faculté de droit de
Moncton,
www.termiumplus.gc.ca,
Consulté le 30 juillet 2018.
28 JAILLARDON (E.) et ROUSSILLON (D), Outils
pour la recherche juridique : méthodologie de la thèse de
doctorat et du mémoire de master en droit, Coll de l'AUF,
éd. des archives contemporaines, 2007, p. 40.
10
rationnel, construit ; la méthode est d'une
manière générale le chemin qui permet d'aboutir à
un résultat, à un objectif. La méthode n'est pas de ce
fait une simple affaire de mécanisme, d'automatisme.
Elle présuppose la soumission à un esprit,
l'esprit scientifique ; l'adhésion à une morale, la morale de
l'objectivité. C'est tout naturellement vers la méthode juridique
qu'on se tourne. Cette approche juridique qui conduira tout au long de cette
recherche, intègre les deux variantes de la méthode juridique
esquissées par le Professeur EISENMANN dans ses Cours
de Doctorat, à savoir la dogmatique et la casuistique29.
Dans un premier mouvement, la dogmatique relève du
domaine de la science du droit consacré à l'interprétation
et à la systématisation des normes Juridiques30.
Dans la conception du Professeur EISENMANN et
des positivistes, la dogmatique est une méthode fondée sur
l'analyse des textes. C'est l'exégèse des textes. Selon la
méthode exégétique, l'unique source du droit est la loi.
La solution de tout problème juridique, doit être trouvée
dans les textes ou dans l'esprit qui les a inspirés. Lorsqu'une loi est
claire, il faut respecter sa lettre, lorsqu'elle est obscure, il faut
découvrir l'intention du législateur31.
Une solution est celle des travaux préparatoires du
texte à interpréter, lorsqu'ils sont disponibles. Nous pouvons
dire que faire l'exégèse des textes, c'est rechercher leur
signification et leur portée par la seule analyse de ces textes
eux-mêmes.
La dogmatique postule la détermination et la
restitution du droit en vigueur, appréhendée à travers les
textes juridiques. Cela suppose l'examen de toutes normes du droit, mais aussi
de la doctrine. En plus, cette méthode sera appuyée par la
casuistique.
Dans un second mouvement, la casuistique est la
démarche positiviste qui repose sur l'étude des décisions
de justice. La démarche de casuistique impose légalement une
confrontation des solutions posées par la jurisprudence en vigueur d'une
part et de l'autre, le droit en vigueur tel que par prévu par les
textes.
Dès lors l'analyse des modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux au Cameroun se fait sous le prisme du
positivisme juridique avec ses deux composantes : la dogmatique et la
casuistique sous-tendues par une approche comparative, laquelle est soutenue
par plusieurs
29 PARQUET (M.), Introduction
générale au droit, éd. Lexifac Droit, 1996, P. 33.
30 EISENMANN(C.), cité par
le Professeur NLEP Gabriel, In L'administration Publique Camerounaise.
Contribution à l'étude des systèmes africains
d'administration publique, Thèse, Paris, LGDJ, 1986, p. 8.
31 COHENDET (M.A.), La méthode de travail
en droit public, Paris, Montchrestien, 3 éd, p. 36.
11
techniques de collecte de données, notamment l'observation
directe, la recherche documentaire et les entretiens. Il reste désormais
à ébaucher notre plan de rédaction.
B. Annonce du plan de rédaction
Il s'agit d'abord d'examiner la consécration
limitée des modes alternatifs de règlement des litiges fiscaux en
droit positif camerounais, de legge lata s'entend
(première partie), afin de déboucher sur le
plaidoyer pour son extension, au sens de legge ferenda
(seconde partie).
12
PREMIÈRE PARTIE :
LA CONSÉCRATION LIMITÉE DES
MODES
ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES
LITIGES FISCAUX AU CAMEROUN
13
INTRODUCTION DE LA PREMIÈRE PARTIE
|
Le contentieux fiscal débute par une réclamation
introduite auprès de l'Administration. Lorsque la réponse
donnée par cette dernière ne satisfait pas totalement le
contribuable, celui-ci peut saisir le juge32. Toutefois, le
contribuable qui le souhaite peut, durant toute la procédure
contentieuse, solliciter un règlement à l'amiable par une
transaction ; ou alors, s'agissant essentiellement des pénalités
et intérêts de retard, solliciter l'indulgence de l'administration
à travers une demande de remise gracieuse.
A l'analyse, contrairement à des pays comme la France,
ces deux types de règlement amiable du contentieux fiscal se
caractérisent par un certain rigorisme; d'où leurs conceptions
restrictives (Chapitre I) et leurs pratiques limitées
(Chapitre II).
14
32 ATECK A DJAM (F.), Droit du contentieux fiscal
camerounais, op. cit., p. 12.
15
CHAPITRE I :
LA CONCEPTION RESTRICTIVE DES MODES
ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES LITIGES
FISCAUX
INTRODUCTION DU CHAPITRE I
|
A côté de la juridiction
contentieuse33 qui débute par la saisine préalable de
l'Administration fiscale avant de culminer chez le juge, en cas de litige, il
existe une juridiction gracieuse34. Celle-ci consiste en un
ajustement que l'Administration fiscale fait subir, dans un cas particulier,
à une règle générale dont l'application rigide
aboutirait à une injustice. Il s'agit ainsi d'une faculté
qu'à l'Administration fiscale de déroger à l'application
de la loi fiscale en vue d'autoriser le non-paiement provisoire ou
définitif, total ou partiel d'impôts ou des
pénalités légalement dues.
Son champ recouvre en droit positif la remise, la transaction,
les décharges de responsabilité solidaire et les demandes
d'octroi des délais supplémentaires des paiements des
impôts.
Dans notre législation fiscale, cette juridiction
gracieuse est conçue de manière restrictive et cette conception
restrictive s'articule autour des principaux modes alternatifs des
règlements des litiges fiscaux à l'oeuvre dans notre droit
fiscal, à savoir la transaction (Section I) et la
remise gracieuse (Section II).
17
33 ATECK A DJAM (F.), Droit du contentieux fiscal
camerounais, op. cit., p. 2.
34 Ibid, p. 2.
18
SECTION I : LA CONCEPTION RESTRICTIVE DE LA TRANSACTION
FISCALE
L'article L125 du Livre des Procédures Fiscales
(LPF)35 du Code Général des Impôts (CGI) dispose
: « Sur proposition du Directeur Général des
Impôts, le Ministre chargé des finances peut autoriser, dans le
cadre d'une transaction, une modération totale ou partielle des
impositions dans les deux cas suivants . ·
- avant la mise en recouvrement suivant une
procédure de contrôle , · - durant toute la
procédure contentieuse , ·
En cas d'acceptation de cette proposition de transaction
par le contribuable, celui-ci s'engage expressément . ·
- à ne pas introduire une réclamation
ultérieure , ·
- à se désister des réclamations ou des
requêtes par lui introduites , ·
- à acquitter immédiatement les droits et
pénalités restant à sa charge»36.
La lecture attentive de l'article précité laisse
transparaitre les modalités de la transaction fiscale au Cameroun. A
l'analyse, il se dégage une rigueur dans les conditions
(Paragraphe I) et dans la procédure (Paragraphe
II).
Paragraphe I : La rigueur des conditions de la
transaction fiscale
De manière générale, la transaction est
un contrat, qui peut être conclu entre l'Administration et le
contribuable en cas de contestation née ou à naitre. Elle peut
être utilisée, si une imposition est contestée ou
susceptible de l'être. Elle peut également l'être, notamment
en France, dans le cas où une action judiciaire aurait été
entreprise par l'Administration fiscale contre un contribuable. Dans ce dernier
cas, le contribuable concerné est en droit d'utiliser la transaction
même en l'absence de toute possibilité de contestation. Cette
démarche est susceptible d'interdire l'engagement de l'action judiciaire
ou d'y mettre fin37.
Concrètement, la transaction prend la forme d'un accord
écrit entre l'Administration et le contribuable. Il s'agit de la
formalisation d'accords et de concessions réciproques38.
35 Le Livre des Procédures Fiscales,
après le Livre premier qui concerne les impôts et taxes, en est le
second qui regroupe les articles du Code General des Impôts relatifs aux
procédures suivies pour asseoir, contrôler ou recouvrer
l'impôt ainsi que les sanctions fiscales, pénales, les garanties
et voies de recours des contribuables. 36Voir Code
Général des Impôts, article L125 du Livre des
Procédures Fiscales, Yaoundé, édition officielle Sopecam,
2018, p. 246.
37 Voir site
https://www.cabinet-d-expertcomptable.com,
Consulté le 11 janvier 2019.
38JARROSON (C.), « Les concessions
réciproques dans la transaction », Paris, Recueil Dalloz, 1997, p.
267.
19
L'article L125 du LPF du CGI39 qui explicite les
modalités de la transaction fiscale met en relief des conditions assez
rigoureuses qui vont de l'interdiction de la conclusion de la transaction avant
l'émission d'un avis de mise en recouvrement suivant une
procédure de contrôle (A) à la triple
obligation tenant à l'observance d'engagements stricts
(B).
A. L'interdiction de la conclusion d'une transaction
avant l'émission d'un avis de mise en recouvrement suivant une
procédure de contrôle
De manière générale, la procédure
de contrôle sur le plan fiscal débute par un avis de
vérification40 (vérification générale de
comptabilité et contrôle ponctuel). A la fin des travaux sur
place, une notification de redressement motivée et chiffrée en
cas d'anomalies est servie, et celle d'absence de redressement l'est s'il
n'existe pas d'anomalies41.
En vertu du principe du contradictoire42, la
réponse du contribuable à la notification de redressement est
attendue. Cette dernière est examinée par l'Administration qui,
après avoir planché sur les arguments de défense du
contribuable, donne sa position définitive à travers une lettre
de réponse aux observations du contribuable43;
accompagné d'un avis de mise en recouvrement (AMR) qui fixe la
créance définitive que doit régler le contribuable.
Il convient ainsi de noter que l'AMR est
l'élément décisif qui rend certaine et obligatoire la
dette du contribuable envers l'Administration44. Une fois
établi, le contribuable se doit de payer sa dette sinon toutes les
mesures de recouvrement y compris celles forcées sont enclenchées
pour recouvrer la créance45. Dans notre arsenal
législatif fiscal, les contribuables désireux de transiger ne le
peuvent pas dès lors que l'AMR est établi.
Or, à titre de droit comparé, en France la
procédure est plus ouverte et souple. Contrairement au Cameroun
où la transaction porte sur le principal de l'impôt et les
pénalités, en France elle porte sur les pénalités
non définitives, c'est-à-dire avant que les voies de recours
juridictionnelles n'aient été épuisées. Toutefois
et c'est à ce niveau que se situe la différence fondamentale,
contrairement au Cameroun où il existe une interdiction stricte de
transiger dès
39 Source : Code Général des
Impôts.
40 Voir Code Général des
Impôts, article L13 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 216.
41 Voir Code Général des
Impôts, article L24 (al1) du Livre des Procédures Fiscales,
op. cit., p. 220.
42 KARIM (S.A.), Droits fondamentaux du
contribuable et procédures fiscales, Paris, l'Harmattan, 2007, p.
10.
43 Voir Code Général des
Impôts, article L26 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 220.
44 Voir Code Général des
Impôts, article L53 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 229.
45 Voir Code Général des
Impôts, article L55 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 230.
20
lors que l'AMR est établi, en France l'émission
d'un AMR quelle que soit sa provenance (contrôle ou gestion) n'interdit
nullement la conclusion d'une transaction fiscale46.
Il apparait clairement que cette disposition limite fortement
la volonté de transiger des contribuables ; ceci se trouve encore
renforcé par les obligations édictées dans l'article L125
du CGI du LPF précité.
B. La triple obligation tenant à l'observation
d'engagements stricts de la part du contribuable
En cas d'acceptation de la proposition de transaction par le
contribuable, il s'engage à respecter une triple obligation :
- L'impossibilité de l'introduction d'une
réclamation ultérieure ;
- Le désistement des réclamations ou requêtes
déjà introduites ;
- Et l'acquittement immédiat des droits et
pénalités restant à sa charge.
En fait, le contribuable en donnant son accord, les effets
juridiques de la transaction le privent de toute marge de manoeuvre en
matière de réclamations contentieuses en cours et future. De
surcroit, il est obligé de s'engager à régler dans
l'immédiat l'intégralité de la dette restant à sa
charge dans des délais très courts et étroitement
surveillés par le Service de recouvrement concerné.
Il va sans dire qu'il s'agit là de conditions
substantielles relatives à la validité de la transaction dont
l'inobservance entraine de facto sa nullité.
Autant l'impossibilité de la conclusion d'une
transaction avant l'émission d'un AMR et cette triple obligation
contraignante caractérisent la rigueur des conditions de la transaction;
autant au niveau de la procédure, la rigueur est également de
mise.
Paragraphe II : La rigueur de la procédure de la
transaction fiscale
La procédure est un ensemble de formalités qui
doivent être suivies pour soumettre une prétention à une
instance47. La transaction qui est d'abord un contrat
n'échappe pas au respect des règles de procédure. Au
Cameroun, la transaction fiscale qui est un acte écrit (A)
est marqué
46 Voir site
https://www.dangela-avocats.com,
Consulté le 11 janvier 2019.
47 GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.) (dir.), GUINCHARD
(S.), MONTAGNIER (G.), Lexique des termes juridiques, op.cit., 2010,
p. 570.
21
par un certain centralisme par la proposition du Directeur
Général des Impôts (DGI) suivi de l'autorisation du
Ministre chargé des finances (MINFI) (B).
A. L'exigence d'un écrit
Conformément aux dispositions de l'article 2044 du
code civil, la transaction se définit comme un contrat écrit par
lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent
une contestation à naitre. Il est clair que cette disposition rend
compte d'un écrit obligatoire concernant la proposition de transaction
fiscale.
Par contre, en France, la jurisprudence a battu en
brèche cette exigence. La chambre sociale de la cour de cassation a
jugé que l'écrit n'est pas une condition de validité de la
transaction, dans son arrêt du 09 avril 1996. Ainsi les demandes de
transaction sont non seulement établies au moyen d'une simple lettre ou
d'un courriel, mais les demandes orales sont admises48. Dans ce cas,
une fiche de visite est rédigée par les services des impôts
et signée par l'auteur de la demande. Elles doivent contenir les
indications nécessaires pour identifier l'imposition, le cas
échéant, être accompagné, soit de l'avis
d'imposition ou d'un extrait de rôle, soit de l'avis de mise en
recouvrement49.
L'écrit en droit fiscal camerounais est une exigence
cardinale pour la validité de la transaction fiscale pendant qu'en
France, nous notons une certaine souplesse à travers la
possibilité ouverte des demandes orales. La rigidité de la
procédure de la transaction est encore plus prégnante à
travers le centralisme de l'autorisation de celle-ci.
B. Le centralisme de l'autorisation de la
transaction
Lorsque les conditions développées supra
sont respectées, notamment l'absence de mise en recouvrement pour
les procédures de contrôle, les engagements de la part du
contribuable de ne pas introduire une réclamation ultérieure, de
désistement des réclamations ou requêtes déjà
introduites, d'acquittement immédiat des droits et
pénalités restant à la charge du contribuable ; le
Directeur Général des Impôts transmet la proposition de
transaction au Ministre chargé des Finances qui peut l'autoriser.
Il s'agit d'une procédure assez lourde et
centralisée qui nécessite absolument l'accord final du Ministre
chargé des Finances. C'est en cela que nous parlons d'une
autorisation
48Voir l'article de Patrick Michaud sur les
juridictions gracieuses en fiscalité,
www.études-fiscales-internationales.com/média/02/01/287811240.pdf,
consulté le 10 janvier 2018, p. 4.
49 Voir Code Général des
Impôts Français, article R247-1 du Livre des
Procédures Fiscales.
22
fortement centralisée. Or de plus en plus, afin de
favoriser le climat des affaires, des notions telles que la simplification des
procédures, la décentralisation sont usitées pour
l'éclosion des investissements directs étrangers et locaux, gage
de la croissance économique.
En France, la procédure de la transaction est
plutôt souple. Il s'agit d'une convention entre le Directeur des Finances
Publiques territorialement compétent (l'équivalent du Chef de
Centre Régional des Impôts au Cameroun) et le contribuable.
Concrètement, la proposition de transaction est établie par le
service des impôts dont dépend le lieu d'imposition. Une fois les
termes du contrat arrêtés, elle est transmise au contribuable sous
la forme d'une lettre recommandée avec accusé de
réception. Y est joint, un contrat qui détaille les conditions de
la transaction. Le contribuable reçoit le contrat et dispose d'un
délai de 30 jours à partir de la date de réception pour
donner suite à la proposition de transaction.
En somme, la transaction fiscale au Cameroun se
caractérise par la rigueur. Rigueur de ses conditions et rigueur de sa
procédure à travers un centralisme fort qui contraste avec la
simplification et la décentralisation qui devaient plutôt
être érigées en paradigme. La remise gracieuse de
pénalités, en tant que second mode alternatif de règlement
des litiges fiscaux n'est pas en reste.
23
SECTION II : LA CONCEPTION RESTRICTIVE DE LA REMISE
GRACIEUSE
L'article L141 du CGI dispose dans le LPF : « La
juridiction gracieuse connait des demandes tendant à obtenir :
- La remise ou une modération d'amendes fiscales ou
de majoration d'impôts et droits, lorsque ces pénalités,
intérêts de retard et le cas échéant, les
impositions principales sont définitives »50.
Il arrive que l'Administration mette à la charge du
contribuable des impositions en principal et en pénalités. Dans
le cas où le contribuable accepte et paie le principal, la loi lui offre
la possibilité de bénéficier de la modération des
pénalités dans le cadre d'une procédure
particulière : la remise gracieuse de pénalités.
Contrairement à la transaction fiscale qui porte
essentiellement sur le principal de l'impôt, la remise porte sur les
pénalités. Cependant le trait commun qui se dégage est la
rigueur. Comme la transaction, la remise gracieuse se caractérise non
seulement par la rigueur de ses conditions (Paragraphe I) mais
également par celle de sa procédure (Paragraphe
II).
Paragraphe I : La rigueur des conditions de la remise
gracieuse
Tout contribuable ayant fait l'objet de taxation avec
pénalités peut, s'il le souhaite, demander la remise gracieuse de
ces pénalités. Mais pour être recevable, la demande de
remise gracieuse doit remplir des conditions de forme (A) et
ne pas porter sur les pénalités liées aux impôts sur
le chiffre d'affaires, les impôts collectés auprès des
tiers et les pénalités consécutives à une taxation
d'office51 (B).
A. Les conditions de forme de la demande de remise
gracieuse
La recevabilité de la demande de remise dépend
du respect de certaines conditions formelles. De manière
concrète, la demande doit en respect de l'article L143 du Code
Général des Impôts52 : être datée,
signée par le contribuable ou son conseil dument mandaté ;
mentionner la nature de l'impôt, l'exercice d'émission, le
numéro de l'AMR ; être accompagnée d'une copie du titre de
créance et être appuyée de justificatifs du paiement du
principal de la dette (quittances).
50 Voir Code Général des
Impôts, article L26 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 249.
51 Voir Code Général des
Impôts, article L142 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 250.
52 Voir Code Général des
Impôts, article L143 du Livre des Procédures Fiscales, op.
cit., p. 250.
24
A l'analyse, la condition sine qua none qui rend la
demande de remise assez ferme est le paiement préalable du principal de
la dette. En l'absence du règlement du principal, la demande est tout
simplement irrecevable et rejetée. Par contre, si ce paiement du
principal est fait, la demande est recevable ; mais il faut encore que les
pénalités en cause ne portent pas sur les impôts sur le
chiffre d'affaires, sur les impôts collectés auprès des
tiers et ceux consécutifs à une taxation d'office.
B. L'exclusion des pénalités relatif aux
impôts liés au chiffre d'affaires, aux impôts
collectés auprès des tiers et ceux
consécutifs à une taxation d'office
L'autre manifestation de la rigueur des conditions de la
remise est justement le choix sélectif des types d'impôts auxquels
se rattache la pénalité. Contrairement à la France
où elle porte essentiellement sur les impôts directs,
c'est-à-dire dans ce contexte, ce sont les impôts indirects qui
sont exclus du champ d'application53; au Cameroun, l'exclusion porte
non seulement sur les impôts indirects comme ceux liés au chiffre
d'affaires mais en plus sur les impôts collectés auprès des
tiers et ceux consécutifs à une taxation d'office.
En ce qui concerne d'abord l'exclusion des impôts
indirects, celle-ci s'explique notamment par la rentabilité de ce type
d'impôt qui contribue fortement au budget de l'État. Les
impôts et taxes ont une contribution variable au rendement global de la
DGI. Les impôts sur la consommation, impôts indirects, à
l'instar de la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), des droits d'accises et
de la Taxe Spéciale sur les Produits Pétroliers (TSPP),
constituent ainsi par leur contribution au rendement, le poste le plus
important dans le système fiscal Camerounais. Notons que dans la
typologie de ces impôts à fort rendement, la TVA, impôt
indirect par excellence, reste celui dont le rendement est le plus
élevé. En 2017 par exemple, la TVA a rapporté 731,8
milliards, soit un taux de contribution de 40,9% par rapport aux autres
impôts54.
Ensuite, pour l'impôt collecté auprès des
tiers, il s'agit des impôts retenus à la source pour le compte de
l'État, par des « redevables légaux qui ne supportent
pas nécessairement de façon effective l'impôt, car ils le
répercutent sur d'autres »55 (Collectivités
Territoriales Décentralisées, Établissements Publics
Administratifs et Grande Entreprises Citoyennes triées
53Voir l'article de Patrick Michaud sur les
juridictions gracieuses en fiscalité,
www.études-fiscales-internationales.com/média/02/01/287811240.pdf,
consulté le 10 janvier 2018, p. 2.
54 Voir Rapport Annuel 2017 de la DGI, p. 43.
55KALINA (K.) et MONNIER (J-M.), « La nature
juridique de l'impôt dans l'ancienne et la nouvelle économie du
droit fiscal », HAL, 2006, Consulté 31 janvier 2019 sur le site des
archives ouvertes : http:// hal.archives-ouvertes.fr/ halshs-00118878, Centre
d'Economie de la Sorbonne, Cahier de la Maison des Sciences Economiques, p.
7.
25
sur le volet), qui ont l'obligation de le reverser dans les
caisses du Trésor Public. Le mécanisme de la retenue à la
source est la « technique de perception de l'impôt sur le
revenu, consistant à obliger le débiteur d'une somme qui est
imposable chez le contribuable (salaire, intérêts, dividendes par
exemple) à opérer sur celle-ci une retenue qu'il versera
lui-même au fisc »56. Il s'agit ainsi de l'argent
public retenu conformément à la loi à l'occasion des
prestations diverses par ces entreprises. L'idée du législateur
d'exclure du champ de la remise les impôts collectés auprès
des tiers, s'explique simplement non seulement par la volonté de ne pas
encourager ces redevables légaux à confondre fonds publics et
fonds privés mais aussi du corollaire des contraintes budgétaires
marquées par des tensions de trésorerie aigues57qui
induit la sécurisation des recettes de l'État. Du coup une
entreprise qui ne reverse pas intégralement les retenues
opérées dans les caisses de l'État, se verra
pénalisée doublement. Non seulement, le principal de
l'impôt dû sera réclamé mais également les
pénalités y afférentes ; de surcroit ces
pénalités seront non susceptibles de remise. Il s'agit en fait
d'une modalité dissuasive permettant le reversement intégral des
retenues opérées par les Grandes entreprises privées et
les Collectivités Territoriales Décentralisées et les
Établissements Publiques administratifs.
Enfin pour ce qui est des pénalités
consécutives à une taxation d'office, l'adage selon lequel «
nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude » trouve
sa justification. En effet la taxation d'office est une procédure qui
s'applique aux « contribuables qui n'ont pas déposé dans
le délai légal les déclarations qu'ils sont tenus de
souscrire en application du Code Général des Impôts en leur
qualité de redevable »58.
Au demeurant, les conditions de forme et l'exclusion des
pénalités relatives aux impôts liés au chiffre
d'affaires, collectés auprès des tiers et consécutif
à une taxation d'office, marquent la rigueur des conditions de la remise
gracieuse des pénalités. Que dire de la procédure ?
Paragraphe II : La rigueur de la procédure de la
remise gracieuse
La question qui surgit est celle de savoir à quelle
autorité la demande de remise gracieuse des pénalités
doit-elle être adressée ?
56 GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.) (dir.), GUINCHARD
(S.), MONTAGNIER (G.), Lexique des termes juridiques, op.cit., 2010,
p. 636.
57 MEKONGO (J.M.), Les retenues à la
source dans le système fiscal du Cameroun, Thèse de doctorat
en droit public, Université de Paris 1, Faculté de droit, 2005,
p. 12 et S.
58 Voir Code Général des
Impôts, article L29 du Livre des Procédures Fiscales,
op.cit., p. 221.
26
L'autorité à saisir dépend à la
fois de la nature de l'impôt et du montant de la remise sollicitée
par le contribuable. Ainsi au simplisme procédural du droit fiscal
français en fonction des cas, la procédure de la demande au
Cameroun dépend soit des pénalités liées aux droits
directs (A) soit celles relatives aux droits d'enregistrement
(B).
A. La procédure de remise gracieuse pour les
pénalités liées aux droits directs
Conformément à l'article L145 du LPF du
CGI59, en ce qui concerne les pénalités liées
aux droits directs, la demande est adressée : au Chef de Centre
Régional des Impôts (CRI) territorialement compétent, ou au
Directeur des Grandes Entreprises (DGE), s'agissant des contribuables qui
relèvent de cette structure, dans la limite de trente (30) millions ; au
DGI dans la limite de cent (100) millions ; et au MINFI pour les
pénalités des droits directs supérieurs à cent
(100) millions.
En fonction du montant de la pénalité et du
type d'impôt, la procédure diffèrera. En France, c'est
selon les cas. Dans la plupart du temps, la demande de remise gracieuse est
adressée au service des impôts dont dépend le lieu
d'imposition du demandeur. Généralement il s'agit du centre des
finances publiques. Dans les cas où l'imposition concernée par la
demande a été établie par une Direction du Contrôle
Fiscal (DIRCOFI) ainsi que par une Direction nationale ou
spécialisée, la demande doit être adressée au
Directeur de cette Direction. Il s'agit d'une procédure assez simple
contrairement à la nôtre qui exige non seulement une typologie du
montant de la remise mais aussi du type de l'impôt.
B. La procédure de remise pour les
pénalités liées aux droits d'enregistrement
Cette procédure est encadrée par l'article 567
du CGI. S'agissant des pénalités relatives aux droits
d'enregistrement, la demande est adressée : au Chef de Centre des
Impôts de rattachement du contribuable , Centre Divisionnaire des
Impôts (CDI), Centre des Impôts des Moyennes Entreprises (CIME),
Centre Spécialisé des Professions Libérales et de
l'Immobilier (CSPLI), dans la limite de 01 (un) million ; au Chef de Centre
Régional des Impôts territorialement compétent ou au DGE,
s'agissant des contribuables qui relèvent de cette structure, dans la
limite de 05 (cinq) millions ; au DGI dans la limite de vingt (20) millions ;
et au MINFI pour les pénalités des droits d'enregistrement
supérieurs à 20 (vingt) millions.
59 Source : Code Général des
Impôts.
28
Rendu au terme de ce premier chapitre, force est de constater
que la transaction fiscale et la remise gracieuse en tant que modes alternatifs
de règlement des litiges fiscaux de notre système fiscal sont
conçus de manière restrictive. Cette restriction apparait
à la fois aux niveaux des conditions et des procédures. La
transaction, par la contrainte de ses obligations, le centralisme de son
autorisation et l'exigence formelle de l'écrit marquent ce rigorisme.
De même, au niveau de la remise gracieuse, l'obligation
préalable du paiement du principal de l'impôt avant tout
dépôt de la demande et le choix sélectif des types
d'impôts se rattachant aux pénalités ne s'en
éloignent pas.
La rigueur à la fois de leurs conditions et
procédures tranchent nettement avec le simplisme procédural et la
souplesse des conditions à l'oeuvre dans le système fiscal
français. Ce rigorisme mis en relief au niveau théorique
déteint également dans la pratique qui se trouve elle-même
limitée à certains points.
29
CHAPITRE II :
LA PRATIQUE LIMITÉE DES MODES
ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES
LITIGES FISCAUX
INTRODUCTION DU CHAPITRE II
|
31
Conçus d'un point de vue juridique de manière
restrictive comme nous l'avons démontré dans le chapitre
précédent, les modes alternatifs de règlement des litiges
fiscaux se trouvent également limités dans la pratique.
Le présent chapitre qui se veut empirique propose sur
la base des statistiques et des éléments factuels, non seulement
de vérifier les différents développements formels qui ont
été ci-dessus effectués, mais également d'explorer
des pistes d'explications nouvelles qui soutiennent l'idée d'une
consécration limitée des modes alternatifs de règlement
des litiges fiscaux au Cameroun.
Cela étant, la pratique limitée concerne aussi
bien la transaction fiscale (Section I), que la remise
gracieuse (Section II).
32
SECTION I : LA PRATIQUE LIMITÉE DE LA
TRANSACTION FISCALE
Consacrée à l'article L125 du LPF du CGI, la
transaction fiscale protège les différents acteurs de
l'économie, les contribuables, tout en préservant les
intérêts de l'État en évitant des contentieux longs,
couteux, aléatoires. Elle permet en outre un encaissement rapide d'une
partie de la dette fiscale exigible.
Cette finalité certes louable tranche et contraste
nettement avec ce que nous observons dans la réalité. Dans la
pratique, celle-ci est fortement limitée d'où le faible volume
des dossiers transactionnels (Paragraphe I). Lequel s'explique
par un certain nombre de raisons (Paragraphe II).
Paragraphe I : Le faible volume des dossiers de
transaction
L'administration a développé des techniques
destinées à maitriser la pression contentieuse mais aussi de
dialoguer avec le contribuable60. La transaction est un
véritable moyen procédural par lequel l'administration peut
être saisie d'une demande de transaction.
Pour comprendre la faible activité transactionnelle au
niveau de la DGI, il convient de mettre en relief les statistiques
disponibles61, aussi bien en ce qui concerne le faible volume des
dossiers de transactions reçues (A) que celles
relatives au faible taux de modération ou de transaction
(B).
A. Le faible volume des dossiers de transactions
reçues
Au cours des années 2016, 2017 et 2018, la Division du
contentieux de la DGI a respectivement enregistré 111, 72 et 101
demandes de transaction62. Plus particulièrement, en 2018, la
Division du contentieux a recensé 101 demandes de transaction
traitées, d'un montant total de 49 322 175 983 FCFA,
soit 30 086 168 705 FCFA en principal et 19 236 007 278 FCFA au titre
des pénalités63. Une légère augmentation
sur le nombre des demandes de transaction et les enjeux financiers, a
été constatée comparativement à l'exercice 2017. En
effet, ces demandes étaient de 72 pour des enjeux d'environ 37
milliards64. Mais il s'agit d'une augmentation relative, car elle
tourne toujours autour de la centaine.
60 ZO RASAMOELINA (A.), « Le juge fiscal
à l'aune de la démocratisation de la justice : comment faire face
au recul du droit au procès des contribuables ? », Revue
Internationale des Gouvernements Ouverts, Vol 7, 2018, p. 1.
61 Source : Direction Générale des
Impôts
62 Source : Ibidem
63 Source : Ibid.
64 Source : Ibid.
33
Comparativement à la France, nous notons au contraire
une forte activité transactionnelle. En 2016, uniquement le
Comité du contentieux fiscal et douanier s'est prononcé sur 105
demandes, en 2015 sur 113, en 2014 sur 148 et 171 en 201365. Ceci
compte non tenu des statistiques des services des autres autorités
compétentes pour statuer en matière de transaction, à
l'instar du Ministre, du Directeur National des Finances Publiques,
départemental et spécialisé. Nous notons ainsi une
différence fondamentale d'avec notre pays. Ce faible volume des dossiers
reçus induit également le faible taux de transaction.
B. Le faible taux de modération ou de
transaction
En prenant toujours l'exercice 2018 comme
exercice de référence pour poursuivre l'analyse comparative des
statistiques de la DGI, sur les 101 demandes de transaction
traitées d'un montant total de 49 322 175 983 FCFA,
avec 30 086 168 705 FCFA en principal et 19 236 007 278 FCFA au titre
des pénalités, 65 ont été
révisées à hauteur de 19 829 722 635
FCFA66. Ce qui correspond certes à un taux de
révision des dossiers de 81%, avec un taux de
transaction de 40%67. Un taux du
reste faible car en dessous de la moyenne. Ceci rend compte de ce que
l'Administration fiscale instruit les dossiers prioritairement dans le sens de
ses intérêts régaliens. Du coup le contribuable est mis en
minorité dans ses prétentions en termes d'impositions qui doivent
être annulées.
En combinant les faibles volumes de dossiers de transaction
reçus au faible taux de modération qui rendent compte de la
faiblesse du contribuable à transiger, une question légitime
taraude notre esprit : qu'est ce qui peut bien expliquer cela?
Paragraphe II : Les raisons de la faiblesse du volume
des dossiers transactionnels
L'impôt est un construit social dont l'efficacité
suppose dans toute la société une adhésion massive des
sujets fiscaux. Chaque société a un ensemble de valeurs autour
desquels se bâtit sa cohésion68. Transiger est une
faculté qui est ouverte aux contribuables qui veulent alléger le
poids de leur dette fiscale. Pourtant dans la pratique, nous notons peu
d'engouement en la matière. Des raisons psycho-sociales (A)
et des mobiles techniques (B) peuvent expliquer cet
état de chose.
65 Source : Comité du contentieux fiscal,
douanier et des changes français, Rapport Annuel à l'intention du
Gouvernement et du Parlement, 2016, p. 9.
66 Source : Direction Générale des
Impôts.
67 Source : Ibidem.
68 FOTSING (J-B.), Le pouvoir fiscal en Afrique
: essai sur la légitimité fiscale dans les États d'Afrique
Noire Francophone, Paris, LGDJ, 1995, p. 3.
34
A. Les raisons psycho-sociales
Parler de paradoxe en ce qui concerne cette faiblesse du
volume des dossiers transactionnels ou encore de la faculté offerte aux
contribuables de transiger n'est pas exagéré.
En effet, la transaction peut être
considérée comme l'héritière de l'arbre à
palabre69 africaine. Dans leur souci de normalisation et de
résolution des conflits, les peuples africains ont accordé une
importance capitale aux procédures de négociation70.
L'arbre à palabre, véritable juridiction de la parole, est
l'expression d'une véritable culture de la paix dont le but est
d'apaiser les esprits71. Comme nous pouvons le voir, la transaction
est fortement liée à l'arbre à palabre en termes
d'approche de résolution des conflits. C'est vrai l'un est écrit
et l'autre est oral mais il n'en demeure pas moins vrai qu'ils poursuivent le
même but.
La transaction notamment fiscale est pourtant peu usitée.
Sur le plan psychologique d'abord cela s'explique :
Transiger pour le contribuable, c'est remettre quasiment son
sort, son destin à cet ogre, monstre froid, « diabolus ex
machina » qu'est l'Administration caractérisée par la
discrétion de ses décisions qui entraine une certaine
partialité. Dans ce système, « l'administration fiscale
reste maitresse de la procédure. Elle accepte ou refuse la transaction
et pèse lourdement sur la décision du
contribuable»72.
Par ailleurs, transiger c'est également admettre
déjà son tort, les multiples fraudes mises à nu par le
Fisc. Or, ce qui caractérise l'être humain c'est sa propension
à davantage retenir pour soi que céder aux autres. Ce
schéma se ramène au contribuable face à l'État. Le
contribuable est poussé par l'appât du gain et se retrouve en
situation de frauder, de fausser les rapports vis-à-vis du Fisc qu'il
croit berner et contourner73.
Sur le plan social ensuite, cela s'explique également :
Le facteur justifiant la faiblesse du volume des dossiers
transactionnels est le pragmatisme dans la détermination du contenu du
redressement lors des procédures de
69 NGANGO YOUMBI (E-M.), « les modes
alternatifs de résolution des litiges administratifs en Afrique Noirs
francophone », Revue Africaine de Sciences Politiques et
Sociales, n° 21, mars 2019, p. 234.
70 Ibidem, p. 233.
71 THIERNO BAH, « Les fondements
endogènes d'une culture de la paix en Afrique : les mécanismes
traditionnels de prévention et de résolution des conflits en
Afrique Noire », Publication de l'UNESCO, p. 6.
72 BARILARI (A.), Le consentement à
l'impôt, Paris, Presse de la Fondation Nationale de Sciences
Politiques, 2000, p. 129.
73 MEKONGO (J.M.), Les retenues à la source
dans le système fiscal du Cameroun, op. cit., 2005, p. 128.
35
contrôles. Notons que l'administration dispose d'une
suffisante marge de manoeuvre dans la fixation des droits et
pénalités réclamés au contribuable.
Le réalisme commande aussi dans la pratique que le Fisc
tienne compte de la capacité contributive réelle du
contribuable74. Sinon à quoi servirait-il à
l'administration de réclamer à un contribuable des sommes qu'il
ne peut payer ? La logique actuelle du rendement du contrôle commande une
prise en compte des capacités financières du contribuable. Dans
cette optique, il n'est pas étonnant que les dossiers de transaction
soient faibles car la plupart des litiges sont encadrés dès la
base.
Il s'agit des raisons psycho-sociales qui expliquent la
faiblesse du volume des dossiers transactionnels. A côté il existe
également des raisons techniques.
B. Les mobiles techniques
Les mobiles techniques touchent aux lenteurs des
procédures et au défaut d'encadrement des contribuables.
En ce qui concerne les lenteurs de procédure, l'absence
d'un manuel de procédure de traitement de la transaction qui fixerait
objectivement les délais de traitement, la procédure
usitée... dénote à suffisance la navigation à vue
et est de nature à décourager les contribuables à
transiger. A titre d'exemple, en 2018, la durée de traitement des
dossiers de transaction est d'environ 82 jours en
moyenne75. Rendu au 31 décembre 2018, les instances se
déclinent à 21 demandes non vidées pour
des enjeux de 7 802 658 099 FCFA, soit 4 902 215 267 FCFA en
principal et 2 900 442 832 FCFA au titre des majorations et
intérêts de retard76.
Parlant du défaut d'encadrement des contribuables, il
convient de noter tout de même les efforts consentis par la DGI sur ce
plan. Une cellule de communication nationale avec ses composantes
régionales ont été créés mais beaucoup
d'efforts restent à fournir notamment pour l'encadrement des petites et
moyennes entreprises (PME). En dehors des contribuables citoyens «
gullivériens » de la Direction des Grandes Entreprises
(DGE) qui ont un service dédié de communication à la
carte, les PME dit contribuables « cendrillon » ne
bénéficient pas toujours d'une grande sollicitude de
l'administration fiscale en termes de pédagogie fiscale. Les
informations courantes sont constituées des rappels des obligations
fiscales et des échéanciers
74 ATANGA FONGUE (R.), Le contrôle fiscal
et protection du contribuable dans un contexte d'ajustement structurel : le cas
du Cameroun, Thèse de doctorat en droit public, Université
du MAINE, Faculté de Droit et des Sciences Economiques, octobre 2006, p.
187.
75 Source : Direction Générale des
Impôts.
76 Source : Ibidem
36
de paiement, délaissant ainsi l'indispensable action
d'information, de concertation et d'éducation des contribuables non
seulement sur leurs devoirs mais également sur leurs droits.
En conséquence, celui-ci, soit mal informé, soit
peu informé, soit pas du tout informé, des procédures
offertes à lui pour alléger sa dette fiscale à l'instar de
la transaction, ne peut que l'ignorer.
Les conseils fiscaux qui devaient prendre le relais en les
encadrant efficacement ont souvent plutôt pactisé avec le Fisc,
détériorant ainsi leur neutralité et leur rôle
premier qui est d'abord de défendre les intérêts de leurs
clients qui sont les contribuables.
Il a été démontré que la
transaction fiscale est limitée dans la pratique compte tenu du faible
volume des dossiers transactionnels enregistrés dans la durée,
qui dénotent de la faiblesse des contribuables à transiger. Des
raisons subjectives et objectives ont été relevées pour
expliquer cet état de chose. La remise gracieuse n'est pas en reste, le
schéma explicatif développé au niveau de la transaction
s'y applique mutatis mutandis.
37
SECTION II : LA PRATIQUE LIMITEE DE LA REMISE
GRACIEUSE
Comme la transaction fiscale, la remise gracieuse
consacrée à l'article L141 du LPF du CGI77 est
également limitée dans la pratique. Pourtant il s'agit de
procédures ouvertes dont l'enclenchement dépend uniquement de la
volonté du contribuable78.
Une volonté qui s'estompe paradoxalement à
travers le constat froid du faible volume des dossiers de remise
(Paragraphe I) ; lequel s'explique par des raisons objectives
(Paragraphe II).
Paragraphe I : Le faible volume des dossiers de
remise
La remise est une procédure relevant de la juridiction
gracieuse qui permet au contribuable d'alléger sa dette
fiscale79. En effet au-delà de la fonction budgétaire,
il faut préciser que l'impôt ou la fiscalité joue aussi un
rôle économique et social.
Pour cerner son faible volume au niveau de la DGI, il importe
de convoquer les statistiques des remises reçues (A)
avant de s'appesantir sur le nombre de demande traitées et
révisées (B).
A. Le faible volume des dossiers de remises
reçues
Au cours des exercices 2016, 2017 et 2018, la
Division du Contentieux de la DGI a respectivement enregistré
1361, 962 et 102080 dossiers de remises gracieuses
au plan national.
En 2018, l'ensemble des structures ayant en
charge l'instruction des recours gracieux, totalise 1020
demandes de remises gracieuses de pénalités d'un montant
total de FCFA 58 952 129 50881. Le constat est
clair, nous notons un faible volume des dossiers des remises reçues qui
tourne en moyenne autour du millier.
Or comparativement à la France, nous constatons au
contraire une forte activité dans ce domaine. Après avoir
régulièrement progressé entre 1992 et 1997
en passant de 655 879 à 1 043
25082, le nombre de demandes gracieuses reçues par
les services de la Direction Générale
77 Source : Direction Générale des
Impôts
78 ZO RASAMOELINA (A.), « Le juge fiscal
à l'aune de la démocratisation de la justice : comment faire face
au recul du droit au procès des contribuables ? », Revue
Internationale des Gouvernements Ouverts, Vol 7, 2018, p. 1.
79 ATANGA FONGUE (R.), Le contrôle fiscal
et protection du contribuable dans un contexte d'ajustement structurel : le cas
du Cameroun, op. cit., octobre 2006, p. 252.
80 Source : Direction Générale des
Impôts.
81 Source : Ibidem
82 Source : Comité du contentieux fiscal,
douanier et des changes français, Rapport Annuel à l'intention du
Gouvernement et du Parlement, 2016, p. 17.
38
des Finances Publiques (DGFIP) s'est maintenu au-dessus du
million jusqu'en 2000. En 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et
2015, la DGFIP a enregistré respectivement 1 096 866, 1
087 297, 1 182 984, 1 269 150, 1 193 975 et 1 402 60983
demandes de remises gracieuses. Un fossé comparativement au millier
enregistré au Cameroun.
Que dire du nombre de demandes traitées et
révisées? B. Du nombre des demandes traitées et
révisées
Notons que pour l'exercice 2018 que nous avons pris comme
exercice de référence, sur 1020 demandes de remises gracieuses
reçues, 98084 ont été traitées. Quand
nous savons que la modération d'impôts est la modalité ou
procédure par excellence la plus usitée par les contribuables
pour l'allègement de leur dette fiscale, nous ne pouvons être
qu'interrogateur sur le nombre de demandes traitées qui est loin de
100%.
Forcément les instances peuvent être des
indicateurs pour décourager la propension des contribuables à
usiter cette procédure.
Sur les 980 demandes traitées, seul 851 sont
révisées avec un taux moyen de remise de 86%85. A ce
niveau les rejets ou dossiers classés sans suite peuvent
également constituer des facteurs démotivants pour les
contribuables désireux de s'engager dans cette procédure et
expliquer par ricochet le faible volume des dossiers de remises reçues.
A côté de cette tentative d'analyse, l'approfondissement des
facteurs explicatifs met en relief des raisons objectives encore plus
substantielles.
Paragraphe II : Les raisons de la faiblesse du volume
des dossiers de remise reçues
L'exercice de la juridiction gracieuse en matière
fiscale est un champ de prédilection du pouvoir discrétionnaire.
En effet, en la matière « c'est un pouvoir
discrétionnaire qui est en cause et dont l'emploi fait peser de
très sérieux risques au respect du principe de
l'égalité devant l'impôt et recèle un danger tout
particulier d'arbitraire »86.
Le sentiment ou la perception du contribuable d'une
administration fiscale suprême ayant la faculté de déroger
à l'application de la loi fiscale en autorisant de manière
autonome sans système de contrôle, le non-paiement provisoire ou
définitif, total ou partiel de pénalités
83 Ibidem, p. 18.
84 Source : Direction Générale des
Impôts.
85 Source : Direction Général des
Impôts.
86 LENA (H.), Aspect de la juridiction
gracieuse en droit fiscal, In MBOME (F.), Le contentieux fiscal
camerounais, Yaoundé, Presses Universitaires d'Afrique, 2000,
p.163.
39
légalement dues ; ce sentiment d'arbitraire
disions-nous, apparaissent comme des raisons démotivant le contribuable
à usiter cette procédure, car rompant le sacro-saint principe de
l'égalité devant l'impôt.
Il s'agit de raisons objectives qui encadrent le contenu de la
décision gracieuse. Celle-ci est essentiellement
caractérisée par une procédure non contradictoire
(A) et l'absence d'une obligation de motiver
(B).
A. La procédure non contradictoire attachée
à la procédure de remise gracieuse
Si l'enclenchement de la procédure de remise
dépend de la volonté du contribuable, son aboutissement
dépend discrétionnairement du bon gré de l'administration
qui n'implique nullement le contribuable. Or en matière
juridictionnelle, le principe du contradictoire est un principe
général de la procédure contentieuse. Le juge est tenu
d'instruire contradictoirement les affaires qui lui sont soumises.
En matière administrative, la modalité qui
consiste à faire participer l'administré à
l'opération normative est rare. L'action administrative reste
caractérisée par des pouvoirs exorbitants et, en particulier par
l'absence de participation des particuliers dans l'édiction de l'acte
administratif, ceux-ci n'en prenant connaissance en principe qu'au moment de
son entrée en vigueur87.
Dans la pratique, la procédure de traitement des
remises gracieuses n'appelle pas d'échanges particuliers entre les
services du Fisc et le contribuable. Une fois la demande formulée par
écrit, le service s'assure que le contribuable s'est acquitté du
principal de l'impôt, des conditions formelles de la demande. Dès
lors que la demande est déposée, la procédure devient
purement interne à l'administration et l'agent instructeur n'est
aucunement obligé de recueillir des observations du contribuable. A la
fin de l'instruction de la demande, l'autorité signataire (Le Chef de
Centre Régional des Impôts, le DGE, le DGI ou le MINFI), qui n'est
tenu de requérir aucun avis, accorde ou rejette la demande et notifie sa
décision au contribuable88.
La démarche qui encadre cette procédure est
essentiellement non contradictoire. Elle est de nature à laisser libre
cours à toute sorte d'arbitraire, à rompre le principe
d'égalité devant
87 KAMDEM (J.C.), Institutions administratives et
droit administratif. Cours polycopiés, Tome 1, Université de
Yaoundé, année universitaire 1988-1989, p. 235.
88 Voir Code Général des
Impôts, article L144 du Livre des Procédures Fiscales,
op.cit., p. 250.
40
l'impôt. Toutes choses de nature à
démotiver le contribuable à user de cette procédure.
L'absence de l'obligation de motiver la décision gracieuse constitue une
autre raison.
B. L'absence de l'obligation de motiver de la
décision gracieuse
Les motifs sont l'énoncé dans l'acte, des
considérations de fait et de droit ayant inspiré l'auteur de
l'acte. La motivation des actes administratifs est dans le principe facultatif
sauf si une prescription textuelle l'exige expressément, confirmant
ainsi l'adage « pas d'obligation de motiver sans texte ».
Cette liberté de l'administration quant à la motivation de ses
actes, par ailleurs non absolue89, existe dans de nombreux domaines
d'intervention de la puissance publique.
Au plan des procédures fiscales, la juridiction
gracieuse en constitue un exemple patent. Aucun texte ne pose le principe d'une
obligation de motiver les réponses de l'administration en matière
gracieuse. Même s'il est vrai qu'il existe en procédure fiscale
des dispositions qui prévoient la motivation des
décisions90, il nous parait impossible d'invoquer un principe
général de droit. En la matière, cette absence s'explique
car sur le plan gracieux, il ne s'agit plus de considérations de droit.
Le demandeur de la clémence administrative peut évoquer tout
motifs sauf ceux de droit, il s'agit généralement des motifs
économiques, d'indigence, de gêne, de tension de
trésorerie. Cet état de fait distingue fondamentalement la
juridiction gracieuse du contentieux proprement dit.
Il reste que, même compréhensible, l'inexistence
d'une obligation de motiver est juridiquement déplorable. En effet, elle
ne facilite pas la mise en place d'un contrôle juridictionnel réel
de l'activité de l'administration fiscale dans ce domaine. L'implication
davantage du juge s'impose d'elle-même91.
En effet, il faut relever que la faculté de
l'administration fiscale de recevoir et de statuer sur une demande de remise
gracieuse est conditionnée entre autres, selon les dispositions de
l'article L141 du LPF du CGI92, à la gêne ou
l'indigence mettant les redevables dans
89 Les exceptions textuelles et jurisprudentielles.
Une exception réglementaire à la règle de la non
motivation est constituée par l'article 14 du décret n°77-91
du 25 mars 1977 déterminant les pouvoirs de tutelle sur les communes qui
exige la motivation de l'arrêté ministériel qui annule les
délibérations d'un conseil municipal. C'est également le
cas en matière fiscale lorsque Ministre chargé des Finances
rejette la réclamation contentieuse d'un contribuable (article L 123 du
LPF)
90 Entre autres : Article L27 sur la motivation des
pénalités ; Article L 40 sur la motivation du délai
supplémentaire en matière de vérification de
comptabilité ; Article L 123 sur le rejet de la réclamation
préalable du contribuable en matière contentieuse.
91 ZO RASAMOELINA (A.), « Le juge fiscal
à l'aune de la démocratisation de la justice : comment faire face
au recul du droit au procès des contribuables ? », op.cit., p.
2.
92 Source : Direction Générale des
Impôts.
41
l'impossibilité de se libérer envers le
Trésor. Dans ces conditions, le pouvoir d'accorder une remise partielle
ou totale ne relève en aucune manière de la discrétion de
l'Administration ; il est plutôt question de compétence
liée. En ce sens, un système de contrôle est de mise et
l'octroi d'une remise partielle ou totale non justifiée serait passible
de sanction. Si tant est que, il est de principe que les agents ne peuvent
abandonner l'établissement et le recouvrement d'un impôt dû
; or il s'agit là des principales attributions de l'administration
fiscale. Bien plus, s'agissant de créance publique le renoncement au
recouvrement d'un impôt par une remise non justifiée pourrait en
effet engager la responsabilité de l'administration
fiscale93.
Cette absence de motiver les décisions gracieuses
renforce le sentiment d'arbitraire et de subjectivité de ces
décisions, d'où la tendance pour les contribuables à
délaisser cette procédure qui n'offre aucune garantie
d'objectivité.
93 FOUQUET(O), « La responsabilité de
l'administration fiscale : jusqu'où ? », Etudes fiscales
internationales, 2011, p. 24.
CONCLUSION DU CHAPITRE II
|
43
La conception restrictive des modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux à savoir la transaction et la
remise ont de facto entrainé des limites sur le plan pratique,
la cause produisant l'effet.
Cette pratique viciée, comme nous l'avons
démontrée sur la base des statistiques se manifeste par le faible
volume des dossiers de transaction et remises reçues. Cette faiblesse du
volume constatée dénote ipso facto le faible engouement
des contribuables à usiter ces procédures.
Dans un essai de compréhension, nous avons pu relever
des raisons tant objectives que subjectives qui pourraient expliquer cette
pratique limitée. Des raisons psycho-sociales ont été
avancées, des mobiles techniques également. Mais, l'absence du
principe du contradictoire et de l'obligation de motiver les décisions
gracieuses se révèlent comme des tendances lourdes qui
pèsent sur la volonté du contribuable de transiger ou d'user de
la procédure de remise. Car finalement, la transaction reste un contrat
d'adhésion et la remise fortement caractérisée par la
subjectivité de ses décisions qui conduisent à
l'arbitraire.
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
44
Dans cette première partie, nous avons
présenté les imperfections du dispositif existant des modes
alternatifs de règlement des litiges fiscaux à l'oeuvre dans
notre système fiscal. D'abord au niveau théorique, il s'est agi
d'une conception restrictive de la transaction fiscale et de la remise
gracieuse, marquées par la rigueur de leurs conditions et de leurs
procédures. Ensuite sur le plan pratique, à partir des
statistiques et des éléments factuels, nous avons exploré
des pistes d'explications qui ont débouché sur la pratique
limitée de la transaction et la remise. Le constat froid du faible
volume de leurs demandes enregistrées au plan national94,
montre à suffisance l'essoufflement du système alternatif de
règlement des litiges fiscaux au Cameroun. D'où
l'impérieuse nécessité d'essayer autre chose. Nous
formulerons dans une seconde partie des propositions en terme de mode
alternatifs novateurs ayant fait leur preuve ailleurs comme en France.
Lesquelles propositions devraient permettre à notre système
fiscal de continuer sa mue en se rapprochant le plus possible des
modèles internationaux sans pour autant négliger nos
réalités socio-politiques.
45
94 Source : Direction Générale des
Impôts.
46
DEUXIÈME PARTIE :
L'EXTENSION SOUHAITABLE DES MODES
ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES
LITIGES FISCAUX AU CAMEROUN
47
INTRODUCTION DE LA SECONDE PARTIE
|
48
Après avoir dans la première partie mis en
exergue la consécration limitée des modes alternatifs de
règlement de litiges fiscaux à l'oeuvre dans notre système
fiscal, la présente partie se veut projectrice. Elle entend, à
partir de certains modes novateurs alternatifs de règlement de litiges
fiscaux souples, proposer leur insertion dans notre dispositif juridique
fiscal.
Il s'agit de procédures qui instaurent les conditions
d'un échange contradictoire. Elle offre ainsi au contribuable et
à l'administration en conflit, la possibilité de se
réapproprier la solution de leurs litiges à travers une «
justice douce » et « concertée »95 issue de la
volonté des parties ou sous l'égide d'un tiers.
Caractéristiques qui tranchent nettement avec les modes alternatifs de
règlement des litiges fiscaux étudiés plus haut. Ceux-ci
faisaient prévaloir le pouvoir discrétionnaire de
l'administration cumulé au caractère non contradictoire de la
procédure96.
Ces modes novateurs alternatifs de règlement de litiges
fiscaux sont la conciliation fiscale (Chapitre I) et la
médiation fiscale (Chapitre II).
95 TAGNE TOIKADE (T.S.), « La
conciliation en droit judiciaire privé camerounais », HAL, 2016,
Consulté 30 juillet 2018 sur le site des archives ouvertes : http://
hal.archives-ouvertes.fr/ hal-01333621, p. 2.
96 ATANGA FONGUE (R.), Le contrôle fiscal
et protection du contribuable dans un contexte d'ajustement structurel : le cas
du Cameroun, op. cit., octobre 2006, p. 256.
49
CHAPITRE I :
LA CONCILIATION FISCALE
INTRODUCTION DU CHAPITRE I
50
La conciliation désigne l'arrangement amiable auquel
parviennent des personnes en conflit, au besoin avec l'aide d'un
tiers97. Il s'agit d'un mode alternatif, rapide et gratuit de
règlement des litiges dont la nature ne nécessite pas
l'engagement d'une procédure judiciaire.
La conciliation implique généralement
l'intervention d'un tiers, le conciliateur. Il est chargé de rencontrer
les parties, de les écouter et de les inviter à adopter une
solution de compromis98. A l'inverse du médiateur, qui
possède un rôle actif dans l'adoption d'un accord entre les
parties, le conciliateur est davantage chargé de garantir un terrain
d'entente minimal sans définir lui-même les termes d'un
éventuel accord.
Elle peut concerner divers litiges de la vie quotidienne :
conflit de voisinage, difficulté de recouvrement d'une créance,
contestation d'une facture, problèmes entre le propriétaire et le
locataire d'un immeuble... Il concerne aussi les conflits entre
l'administration fiscale et le contribuable, d'où la conciliation
fiscale.
Contrairement à la transaction fiscale et la remise, la
conciliation fiscale en mettant le contribuable au centre de la recherche du
compromis, se démarque positivement. En cela, elle regorge d'une
plus-value théorique (Section I) et le modèle
français devrait inspirer notre système fiscal (Section
II).
51
97 Voir site
https://fr.m.wikepedia.ordg,
consulté le 10 avril 2019.
98 NZOBANDORA (A.), La conciliation et la
médiation comme modalités d'accès à une justice
équitable, Travail de fin d'étude, Mémoire DESS,
Université de Bujumbura, mars 2009, p.11
52
SECTION I : LA PLUS VALUE THÉORIQUE DE LA
CONCILIATION FISCALE
Loin du rigorisme procédural et des conditions de la
transaction et de la remise gracieuse, la conciliation fiscale se
caractérise essentiellement par l'absence de formalisme. Elle rapproche
les points de vue pour tenter de parvenir à un compromis qui
résout le différend. En refusant le centralisme et
l'autoritarisme, elle fait appel au consentement des destinataires de la
décision99.
Il s'agit en fait d'une procédure souple et peu
couteuse (Paragraphe I), contradictoire et efficace
(Paragraphe II).
Paragraphe I : Une procédure souple et peu
couteuse
Notons que les procédures alternatives usitées
dans notre législation, notamment la transaction et la remise, sont
essentiellement lourdes. Fortement centralisée avec la
nécessité de l'accord ultime du MINFI100 en ce qui
concerne la transaction, et une moyenne d'environ 82 jours101 pour
le traitement. La transaction est certes une procédure contractuelle
mais il s'agit plutôt d'un contrat d'adhésion et bien plus d'un
contrat léonin, où l'Administration du haut de son
impérium fixe unilatéralement les termes de l'accord. La
conclusion du contrat de transaction fiscale ne donne lieu à aucune
négociation entre les cocontractants : le contribuable ne peut
qu'accepter ou refuser la proposition qui lui est faite par l'Administration
fiscale, sans possibilité de formuler une offre
alternative102.
Par contre, la conciliation fiscale par son consensualisme
offre l'avantage de la souplesse (A), et du moindre
coût103(B).
A. La souplesse de la procédure de conciliation
fiscale
Comme il a été mentionné supra en
première partie, la transaction et la remise ou modération
d'impôts exigeaient entre autres l'écrit comme formalité et
condition sine qua none du dépôt de la demande. Cette
conditionnalité est aux antipodes de la conciliation fiscale.
99 MOHAMED AMAL (M.), « Les modes alternatifs
de règlement des conflits : un procédé séduisant,
mais d'une efficacité incertaine », In Annales de
l'Université d'Alger, HAMID (B.), ALI (F.), (dir.), Colloque
International, 2014, p. 61.
100 Code général des impôts,
op.cit., article L125 du LPF, p. 267.
101 Source : Direction Générale des
Impôts.
102 LATIL (G.), Contentieux fiscal : réclamations,
sursis de paiement, recours juridictionnels, modèles et
formulaires, F. Lefebvre, coll. Dossiers pratiques, 2002, p. 138.
103 TAGNE TOIKADE (T.S.), « La conciliation en droit
judiciaire privé camerounais », HAL, 2016, Consulté 30
juillet 2018 sur le site des archives ouvertes : http://
hal.archives-ouvertes.fr/ hal-01333621, p. 2.
53
L'expérience de cette dernière en France par
exemple démontre une absence de formalités. En dehors de
l'écrit, le contribuable personne physique et morale, peut faire appel
au service de conciliation fiscale par email, fax, ou même oralement lors
des permanences organisées.
Une fois saisi, le service de conciliation fiscale fixe le
calendrier où les parties sont invitées à échanger
leur point de vue104. A la fin de cette procédure, le
conciliateur remet un rapport de conciliation dans lequel il ne peut que
constater le compromis ou les points divergents des
interlocuteurs105.
En pratique, il est évident que ce service prendra
position sous forme d'un « avis » qui permettra
éventuellement à l'Administration ou au contribuable d'admettre
une décision ou un fait établi et ainsi éviter une
procédure judiciaire. Mais il ne prononce aucune décision
contraignante pour les parties.
Dans cette optique, le contribuable n'est pas lié par
ce rapport, autre élément de la souplesse de la procédure,
il peut en conséquence porter son litige devant les tribunaux si le
désaccord persiste.
En revanche, si l'Administration conclut un compromis avec le
contribuable, elle sera liée par celui-ci étant donné
qu'il s'agit d'un accord administratif. Le fisc ne pourra donc pas
ultérieurement, lors de la réponse à la
réclamation, changer d'avis en rendant une tout autre
décision.
La procédure de conciliation fiscale comme sus
décrite ne s'encombre pas de formalisme106. Elle est simple
et souple mais aussi peu couteuse.
B. Le faible coût de la procédure de
conciliation fiscale
Les frais de justice varient en fonction de la
complexité de l'affaire, de sa durée. En général
ils comportent d'une part les dépens qui sont les frais de
procédure, à savoir tous les frais à engager pour mener
à bien les démarches relatives au dossier. Ce sont les frais et
honoraires d'huissiers ainsi que les éventuels frais d'expertise et de
traduction ...
104 OTIS (L.), « La justice conciliationnelle : l'envers
du lent droit », Revue Internationale d'Ethique sociétale et
Gouvernementale, Automne 2001, Vol. 3. n°2, p. 40.
105 Ibidem, p. 52.
106 Ibid, p. 102.
54
D'autre part, les frais de justice sont également
constitués des honoraires d'avocat. Ceux-ci sont fixés au
forfait, au temps passé ou encore au résultat. Dans tous les cas,
le montant des honoraires est libre et dépend de l'accord entre l'avocat
et son client.
En somme, ce qui est certain c'est que la procédure
judiciaire à un coût énorme. Elle est encore plus
aggravée par les lenteurs judiciaires. L'adage, « mieux vaut un
mauvais arrangement qu'un bon procès » trouve ici sa
justification. L'évitement du juge étatique permet de gagner du
temps mais aussi de l'argent et surtout de parvenir à un compromis mieux
accepté par les parties en litige car fondé sur la liberté
et l'équité.
C'est pourquoi la justice alternative, la « justice
conciliationnelle »107est plus usitée compte tenu de sa
souplesse mais aussi et surtout de son faible coût.
En fait, contrairement à la justice classique, la
conciliation fiscale est gratuite. En utilisant cette « autre voie
offerte aux adversaires pour trouver une solution à leur litige
»108, le contribuable fait l'économie des frais et
des charges d'une procédure judiciaire couteuse et longue dont l'issue
n'est pas prévisible. C'est également une procédure
contradictoire dont l'efficacité n'est plus à
démontrer.
Paragraphe II : Une procédure contradictoire et
efficace
L'une des caractéristiques fondamentales qui limite la
transaction et la remise gracieuse, c'est l'absence du principe contradictoire.
Elles sont plutôt profondément marquées du sceau de la
discrétion de l'Administration. Or la conciliation fiscale est une
procédure contradictoire (A) et efficace en ce qu'elle
participe au décongestionnement des prétoires
(B).
A. Le caractère contradictoire de la
procédure de conciliation fiscale
Également invoqué par la locution latine «
audi alteram partem », la contradiction est traditionnellement
présentée comme « la garantie fondamentale d'une justice
saine, loyale et équitable »109.
Le conciliateur est tenu d'entendre les arguments en fait et
en droit de chacune des parties en litige et d'examiner leurs pièces
avec leur accord. Car il ne dispose d'aucun pouvoir d'injonction de
communication des pièces. Afin de respecter ce principe, il est tenu
de
107 OTIS (L.), « La justice conciliationnelle : l'envers
du lent droit », Revue Internationale d'Ethique sociétale et
Gouvernementale, Automne 2001, Vol. 3. n°2, p. 1.
108 CADIET (L.), « Solution judiciaire et
règlement amiable des litiges : de la contradiction à la
conciliation », In Mélanges C.Champaud, 1997, p. 329.
109 FRISON-ROCHE (M-A.), Généralités sur
le principe du contradictoire, Thèse, Paris 2, 1988, p. 50.
55
confronter ensemble les parties ou peut les entendre
séparément dans le but de donner toute chance de succès
à la conciliation sans porter atteinte à la contradiction.
La conciliation fiscale, procédure non contentieuse et
volontaire, invite ainsi à une application souple de la contradiction.
Laquelle doit aboutir à un accord en permettant au tiers conciliateur,
en fonction de l'espèce, d'entendre séparément les parties
au litige.
Ceci est d'autant plus vrai que l'objet de la conciliation est
de régler les différends en ayant recours à l'instauration
ou à la restauration du dialogue. Cela nécessite effectivement
une mise en confiance préalable des parties, laquelle ne peut pas se
faire si ces dernières sont constamment placées face à
face. Ce qui s'apparenterait à une confrontation, tel un duel
judiciaire, qui aurait toutes les chances de rester infructueuse. C'est
pourquoi, il importe que, pour permettre aux parties de renouer ou nouer le
dialogue, celles-ci soient en mesure de se trouver seules à seules avec
le conciliateur, lequel se chargera de transmettre les informations qui lui
auront été communiquées, à l'autre partie, selon la
technique de la navette110.
Il convient tout de même de noter le débat au
sein de la doctrine en ce qui concerne l'encadrement ou non des
procédures de conciliation et de médiation par des principes de
droit processuel. L'origine conventionnelle de ces procédures semble a
priori devoir les affranchir de toute règle trop contraignante, au nom
du principe de la liberté contractuelle et, en tout état de
cause, les limiter au seul respect des principes directeurs111du
droit des contrats. Au soutien de cette thèse, deux justifications sont
avancées.
La première consiste à dire que le consentement
des parties d'entrer en pourparlers d'origine conventionnelle emporte
éviction du traitement juridictionnel de leur litige112,
renonciation temporaire à leur droit au juge. Autrement dit il ya
affranchissement de l'application stricte de certaines règles de fond
comme de forme et donc non soumission au respect des principes directeurs du
procès ou à tout le moins de la majeure partie d'entre eux.
La seconde justification consiste plus simplement à
dire que les principes directeurs du procès n'ont été
conçus que dans la perspective d'un traitement juridictionnel du
litige113, parce que celui s'achève par une décision
qui s'impose aux parties. Or pour que cette décision soit
110 LAGARDE (X.), Droit processuel et modes alternatifs de
règlement des conflits, In Revue de l'arbitrage, 2001, p. 438.
111 GHESTIN (J.), La formation du contrat, Paris, LGDJ,
2001, p. 177.
112 LAGARDE (X.), Droit processuel et modes alternatifs de
règlement des conflits, op. cit., p. 440.
113 Ibidem, p. 450.
56
acceptable, il est impératif qu'elle soit « la
traduction d'un idéal de justice »114dont les
principes directeurs du procès et, au-delà, les principes
fondamentaux du procès équitable, sont l'expression.
Aussi, des lors que les parties substituent au traitement
juridictionnel de leur litige un traitement purement consensuel et amiable, les
principes directeurs du procès n'ont plus lieu
d'être115. Aux principes processuels doivent être
substitués les principes directeurs du droit des contrats, a priori
suffisant pour assurer une justice contractuelle.
En vérité, ces deux explications sont un peu
extrêmes, dans la mesure où les conventions concernées ne
sont pas des contrats ordinaires. Elles ont trait au règlement amiable
des litiges si bien que « l'existence d'une contestation
déteint sur leur régime contractuel
»116précise un auteur avant d'ajouter que «
parce que le règlement amiable a pour objet un litige, il ne peut
entièrement s'abstraire des règles normalement applicables
à son objet »117. Plus encore, on ne peut faire
abstraction du fait que la conciliation et par extension la médiation
sont amenés à se dérouler éventuellement dans le
cadre d'une instance, ce qui implique que les exigences de l'ordre public
processuel sont également à prendre en considération dans
la détermination des principes applicables à ces
procédures.
Il ya donc une place pour les principes de droit processuel
dans la conciliation. Cependant, une stricte application des principes
directeurs du procès n'est pas envisageable car elle «
empêcherait à coup sûr l'émergence d'une issue
négociée au litige »118faute pour les
parties, de disposer de suffisamment de liberté de manoeuvre. Aussi,
c'est une application souple et parcimonieuse de ces principes, moyennant leur
aménagement, qu'il convient plutôt d'envisager. Avec la
conciliation fiscale, c'est moins la lettre des principes de droit processuel
qui doit prévaloir que leur esprit. Son caractère contradictoire
est effectif même s'il peut faire l'objet de certains aménagements
mais son efficacité n'est plus aussi à démontrer.
B. Le caractère efficace de la procédure de
conciliation fiscale
La conciliation fiscale est efficace en ce sens qu'elle permet
de désencombrer les tribunaux étatiques qui souffrent
déjà de tendances lourdes. Ils souffrent notamment de
114 Ibidem, p. 452.
115 Ibid, p. 460.
116 LAGARDE (X.), Droit processuel et modes alternatifs de
règlement des conflits, op. cit., p. 464.
117 Ibidem, p. 435.
118 Ibid, p. 439.
57
procédures « lourdes, complexes, frustrantes,
couteuses, aux délais infinis et aux débats acrimonieux
»119.
D'ailleurs, en France, les mécanismes de
règlement amiables des litiges ont montré leur efficacité
puisque moins de 1% de ces litiges sont soumis au juge120. En cela,
la conciliation constitue un enjeu dans la transformation du système
judiciaire. Ces dernières années, la justice traditionnelle est
décriée. Face à ces critiques, l'on assiste à la
désinstitutionalisation de la régulation des conflits pour mieux
répondre à la demande croissante d'une justice rapide, moins
couteuse, souple et proche des justiciables121.
En limitant les litiges fiscaux en justice, la conciliation
fiscale constitue « un mode de désengorgement des juridictions
»122 selon les mots du Premier Président de la Cour
d'appel de Bordeaux, dans son discours de rentrée solennelle en 2015.
Cette procédure est perçue comme un moyen de moderniser la
justice et de rendre le droit plus accessible aux citoyens.
La conciliation fiscale contrairement aux modes alternatifs
à l'oeuvre dans notre législation fiscale a une plus-value
théorique. Loin de la rigueur des conditions, des procédures de
la transaction et de la remise, elle se démarque par la souplesse, le
faible coût, le caractère contradictoire et l'efficacité de
sa procédure. L'étude du modèle français nous
permettra de ressortir les mécanismes pratiques.
119 OTIS (L.), « La justice conciliationnelle : l'envers du
lent droit », op. cit., p. 1.
120 Cette statistique est disponible sur le site :
www.mediateur-republique.fr,
janvier 2008, N°33. Consulté le 10 janvier 2017.
121 GORCHS (B.), « La conciliation comme enjeu dans la
transformation du système judiciaire », In Droit et
société, 2006, N°62, p. 223.
122 FERRIERE (D.), « Discours de rentrée solennelle
», In les Annales de la Seine, le 12 février 2015.
58
SECTION II : LE MODÈLE FRANÇAIS DE
CONCILIATION FISCALE
En cas de désaccord persistant entre l'Administration
fiscale et le contribuable français, ce dernier peut avoir recours
à la conciliation à travers deux instances : la commission
départementale de conciliation (Paragraphe I) et le
conciliateur fiscal départemental (Paragraphe II).
Paragraphe I : La commission départementale de
conciliation
Selon l'article L59 du LPF du CGI français, lorsque le
désaccord persiste sur les rectifications notifiées par
l'Administration, le contribuable peut soumettre le litige à l'avis
entre autres de la « commission départementale de conciliation
»123.
Il convient de présenter cette instance (A)
avant d'en décrire le fonctionnement (B).
A. Présentation de la commission départementale de
conciliation
La commission départementale de conciliation a
été créée en 1948. Elle est instituée dans
chaque département français. Au plan strictement formel, sa
saisine s'apparente tout à fait aux modalités pratiques propres
à la consultation de la commission départementale des
impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Cependant, par
rapport à celle-ci, cet organisme consultatif se différencie sur
son champ de compétence, sa composition composite, et la teneur de son
avis.
Cette instance est compétente en cas d'insuffisance des
prix ou des évaluations ayant servi de base aux droits d'enregistrement,
à la taxe de publicité foncière ou encore à
l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
Ainsi, lorsque dans le cadre d'un contrôle fiscal,
l'administration des impôts relève une insuffisance de prix ou
d'évaluation d'après lesquels sont liquidés ces
impôts et taxes, la commission départementale de conciliation peut
être saisie si aucun accord amiable n'a pu être trouvé entre
le contribuable ou l'administration fiscale.
Le litige peut être porté devant la commission
à l'initiative de l'administration ou du contribuable. La saisine doit
être faite postérieurement à l'envoi par le service
vérificateur de la réponse aux observations du contribuable
faisant suite à une proposition de rectification.
123 Voir Code Général des Impôts
français, article L59 du LPF.
59
Après cette présentation de la commission
départementale de conciliation, suivra le fonctionnement de cette
dernière.
B. Fonctionnement de la commission départementale de
conciliation
La commission départementale de conciliation est
présidée par un magistrat du siège. Elle comprend huit
membres, à savoir quatre représentants de l'administration, un
notaire et trois représentants des contribuables124.
Les membres non fonctionnaires de la commission sont
nommés pour un an renouvelable et sont soumis aux obligations du secret
professionnel.
Le contribuable doit être convoqué trente jours
au moins avant la réunion de la commission. Il peut se faire entendre,
présenter ses observations écrites, se faire assister par une
personne de son choix ou désigner un mandataire.
Pour la première fois dans un arrêt en date du 8
mai 2005125, la Cour de Cassation a indiqué de manière
précise que la commission départementale de conciliation doit,
dans son fonctionnement, appliquer les principes d'impartialité et de
contradictoire. La Cour a jugé, d'une part qu'un représentant de
l'administration fiscale siégeant dans la commission ne doit pas
disposer d'informations concernant le contribuable en dehors des informations
figurant au dossier de ce dernier, sous peine d'atteinte au principe
d'impartialité. D'autre part, les documents sur lesquels se fonde la
commission doivent être tenus à la disposition du contribuable,
sous peine de violation du principe du contradictoire.
La commission peut entendre toutes les personnes qu'elle croit
pouvoir l'éclairer. Elle a également la possibilité de se
transporter sur les lieux ou de déléguer à cet effet un de
ses membres126. La commission départementale de conciliation
a donc un rôle actif. Elle ne se fonde pas seulement sur les dires des
parties mais également sur ses propres investigations.
Elle prend position sur le fond du litige et rend un avis qui
doit être motivé à peine d'irrégularité de la
procédure127. Il est formulé à la
majorité des voix. En cela, elle exerce des fonctions analogues à
celles attendues d'un médiateur, à ceci près qu'elles sont
exercées par un
124 Voir Code Général des Impôts
français, article 1653.
125 Cour de cassation, chambre commerciale, 8 mars 2005, n°
Y 01-17758 et Z 02-13301.
126 Voir Code Général des Impôts
français, Article R 59 B-2 du LPF.
127 Cour de cassation, chambre commerciale, 21 octobre 1997, RJF
1/98, N°125.
60
organe collégial, préconstitué. Le
contribuable peut également, dans certains cas, saisir le conciliateur
fiscal départemental.
Paragraphe II : Le conciliateur fiscal
départemental
Un conciliateur fiscal départemental a d'abord
été mis en place en France dans 13 départements pilotes
à partir de septembre 2003. Ce service a ensuite été
généralisé dans tous les départements
français. Il a ainsi une mission spécifique (A)
et des compétences précises (B).
A. La mission du conciliateur fiscal
départemental
Le conciliateur fiscal départemental a pour mission de
limiter les recours contentieux en matière fiscale.
Il peut être saisi par les contribuables de la
réponse qui leur a été adressée par
l'Administration à la suite d'un premiers recours. Il traite seulement
les demandes des contribuables qui ont déjà fait l'objet d'une
première démarche auprès des services de l'Administration
fiscale.
Si à la suite de cette première démarche,
le contribuable estime que sa demande n'a pas été examinée
de façon satisfaisante, il peut alors s'adresser au conciliateur
fiscal.
Le rôle du conciliateur est de dissuader le
contribuable d'aller au contentieux, et si une action est déjà
engagée, de l'amener à se désister en cours d'instance.
Pour obtenir ce désistement ou l'absence de recours
contentieux, le conciliateur cherche à rapprocher la position de
l'Administration fiscale et celle du contribuable. Il a pour ce faire une
compétence élargie.
B. La compétence du conciliateur fiscal
départemental
Le conciliateur fiscal départemental traite des
problèmes fiscaux rencontrés par le contribuable.
Le conciliateur peut être sollicité par courrier
ou courriel pour toute question relative au calcul et au paiement de
l'impôt, au rejet ou à l'admission partielle d'une
réclamation, au rejet d'une demande gracieuse de remise de
pénalités et au refus d'octroi de délais de
paiement128. Il est chargé de traiter les demandes des
usagers et de rechercher une solution amiable. En cas
128 Hublot (M-L.), Les procédures de
règlement de la double imposition résultant de la correction des
prix de transferts entre entreprises associées, Thèse,
Université de Panthéon-Assas, 2014, p. 272.
61
d'échec, le différend peut ensuite être
porté devant le médiateur des ministères
économiques et financiers. Il s'engage à répondre dans les
trente jours pour informer le contribuable de sa décision, ou de
l'état du traitement de sa demande pour les dossiers plus complexes.
Il traite également des litiges relatifs aux
engagements de qualité de service pris par l'Administration fiscale. Ces
engagements peuvent ne pas avoir été respectés par
celle-ci en vertu de la charte qualité. A titre d'exemple,
l'Administration peut ne pas avoir répondu aux demandes de rendez-vous
ou aux demandes de renseignements téléphoniques des
contribuables.
Le champ d'intervention du conciliateur est large. Il peut se
prononcer aussi bien dans le cadre d'un contrôle sur pièce que
dans le cadre du contrôle externe. En revanche, il ne peut se prononcer
sur le déroulement de ce dernier. Il peut modifier, s'il ya lieu, la
décision prise initialement par les services fiscaux. Il dispose donc
d'un pouvoir qui excède celui classiquement attribué aux
conciliateurs et aux médiateurs129.
Trois types de situations sont exclus de sa compétence
: les litiges relatifs à la publicité foncière, les
demandes ayant fait l'objet d'une requête auprès du
Président de la République, du Premier Ministre, du ministre de
l'économie et des finances, des directeurs généraux de
l'administration fiscale, du Défenseur des droits, des parlementaires et
des élus locaux, et enfin, les procédures de vérification
de comptabilité ou d'examen de situation fiscale130.
L'intervention du conciliateur fiscal départemental est
un recours hiérarchique. Sa réponse se substitue à celle
de l'Administration. Elle permet le règlement définitif du
litige. Mais son intervention n'interrompt pas le délai de recours
contentieux.
De même la saisine du conciliateur fiscal ne dispense
pas du paiement des sommes dues. La saisine ne bénéficie pas de
l'effet suspensif.
129 HUBLOT (M-L.), Les procédures de
règlement de la double imposition résultant de la correction des
prix de transferts entre entreprises associées, Thèse,
Université de Panthéon-Assas, 2014, p. 273.
130 Ibid, p. 272.
CONCLUSION DU CHAPITRE I
62
63
L'étude de la conciliation fiscale a permis au plan
théorique de démontrer qu'elle a une plus-value certaine. En
effet contrairement aux modes alternatifs de règlement des litiges
fiscaux usités dans notre droit fiscal en vigueur, la conciliation
fiscale se démarque positivement. Loin des procédures
limitées, contraignantes, non ouvertes à la négociation et
fortement centralisées de la remise et de la transaction fiscale, la
conciliation fiscale par la souplesse, le faible coût et le
caractère contradictoire de la procédure, s'affirme comme un mode
novateur qu'il importe d'intégrer dans notre corpus législatif
fiscal.
Au plan pratique, l'étude du modèle
français de la conciliation fiscale à travers la commission
départementale de conciliation et les missions, compétences du
conciliateur fiscal départemental ont permis de mettre en relief le
rôle de la négociation en matière fiscale. Celui-ci, en
offrant les conditions, le cadre d'un échange contradictoire entre le
contribuable et l'Administration fiscale en conflit, leur donne la
possibilité de se réapproprier la solution de leur litige. La
médiation fiscale à quelque différence près n'est
pas éloignée de ce but.
64
CHAPITRE II :
LA MÉDIATION FISCALE
INTRODUCTION DU CHAPITRE II
|
66
Étymologiquement le terme médiation vient du
latin médiator qui est un intercesseur. Et le mot latin
médiator est formé du terme medium qui
désigne une position « centrale », « médiane
». La médiation fait partie des MARC. Elle est une manière
d'intervenir dans une situation difficile entre des personnes physiques ou
morales.
Selon certains auteurs, elle est pratiquée depuis
longtemps, aussi longtemps que des tiers interviennent dans les conflits
d'autrui. Contrairement à ce que laisse supposer le développement
spectaculaire de la médiation au cours de ces dernières
décennies, cette notion n'est pas nouvelle.
Il est possible d'identifier une amorce de médiation
dans les récits sumériens vieux de plus de 4000
ans131. Cette société avait recours fréquemment
à la médiation pour résoudre les différends entre
ses citoyens. Les Sumériens ne sont pas un cas isolé, de nombreux
récits de médiation ont été rapporté avant
notre ère, tant en Chine impériale qu'en Grèce antique. La
culture de la Grèce antique, avec le courant philosophique platonicien
visant à faire réfléchir les personnes sur leurs relations
aux autres et, conséquemment à soi-même. La maïeutique
instrumentait cette recherche.
L'outil maïeutique avait pour objectif de permettre
à une personne d'exprimer ses connaissances en soi, en l'occurrence qui
auraient été acquises dans ses vies antérieures. Le
philosophe mettait en pratique ce savoir-faire pour qu'une personne puisse
réfléchir et exprimer le meilleur d'elle-même. Cette
maïeutique était ainsi un véritable acte médiateur du
philosophe.
Dès le XVIIIe siècle, la médiation va
apparaitre comme un instrument de pacification des relations internationales.
Mais la conception de celle-ci, en tant que discipline à part
entière s'affirme à la fin du XXe siècle. Elle se diffuse
avec l'acceptation de la médiation conventionnelle, hors de tout
contexte judiciaire. Elle apportera aux parties d'un différend les
moyens de reposer une situation qui pose problème, d'y
réfléchir et de chercher la meilleure solution possible pour
retrouver ou trouver un terrain d'entente.
La médiation s'est ainsi progressivement
transposé dans divers domaines de la vie sociale, conflits collectifs du
travail, économiques, de famille et même sur le plan fiscal.
D'où le recours à la médiation fiscale.
C'est un processus de règlement des différends
fiscaux qui implique de faire appel à un médiateur qui aide les
parties à atteindre une compréhension commune des enjeux et de
131 LEONARD (W.), The sumerian, New York, W. W. Norton
& Company, 1965.
67
conclure une entente mutuellement satisfaisante. Le
médiateur fiscal est ainsi un tiers impartial et indépendant qui
a pour fonction de guider la communication entre les parties impliquées
dans un conflit concernant la fiscalité. C'est un professionnel
spécialisé en fiscalité ainsi qu'en résolution de
conflit qui utilise différentes techniques de communication et de
négociation pour aider les parties à faire valoir leurs
perspectives. Il ne peut pas imposer des solutions aux parties.
Comme la conciliation fiscale, la médiation fiscale
mutatis mutandis regorge d'une plus-value théorique (Section I)
dont le modèle français pourrait être une source
d'inspiration (Section II).
68
SECTION I : LA PLUS VALUE THÉORIQUE DE LA
MÉDIATION FISCALE
Comme la conciliation fiscale, la médiation fiscale
poursuit le même objectif, celui de rétablir le dialogue entre les
parties et de rapprocher les points de vue. Le médiateur est ainsi
l'équivalent de l' « ombudsman » suédois.
Celui-ci est constitué d'un ensemble d'organes extraordinaires de
contrôle de l'Administration se situant en dehors des procédures
habituelles de recours, à qui on peut présenter des litiges
opposant particuliers et Administration et qui ont au maximum le pouvoir de
donner un avis sur ces litiges. Sa saisine est dénuée de tout
formalisme.
L'ombudsman est généralement une personne
indépendante de l'Administration, extérieure à celle-ci,
mais bénéficiant d'un privilège total d'information sur ce
qui se passe à l'intérieur de l'Administration132.
Cette autorité neutre, éclaire les citoyens sur leurs droits et
sur leur situation à l'égard de l'Administration. C'est un
véritable instrument contre l'arbitraire administratif. Par ailleurs,
pour mieux cerner la notion de médiation il convient de la
définir négativement par comparaison à des notions
voisines.
La doctrine s'est attachée à cet exercice qui
permet de mieux analyser la médiation et de déterminer ses liens
à d'autres institutions133. La médiation s'inscrit en
effet dans les modes alternatifs de règlement des conflits qui se
déclinent en plusieurs institutions.
D'abord avec la conciliation, le lien est complexe. Pour
certains, la médiation relève au moins dans le langage courant,
de la conciliation au point où ils tendent parfois à se
confondre. Mais, il existe juridiquement une différence de degré
d'implication du tiers entre médiation et conciliation. Finalement
tandis que le conciliateur essaie de manière passive de rapprocher les
parties en vue de la recherche d'une solution, le médiateur, non
seulement favorise et développe les échanges entre les parties
mais aussi il peut proposer des solutions. En cela, il joue un rôle
actif. Alors que le conciliateur assiste les parties dans leur recherche de
conciliation, le médiateur est proactif. Cette position est conforme
à la définition donnée par le dictionnaire juridique de
Gérard Cornu qui identifie le médiateur comme étant «
celui auquel les parties à un conflit demandent de proposer la
solution à leur différend (à la différence du
conciliateur seulement chargé d'oeuvrer au rapprochement des personnes
en conflit), sans cependant être investi du pouvoir (juridictionnel) de
l'imposer »134.
132 OWONA (J.), Le contentieux administratif de la
république de Cameroun, Paris, l'Harmattan, 2011, p. 10.
133 CACHARD (O.), « Les modes amiables de règlement
des litiges », Paris, RLDC, 2011, n°94, p. 19.
134 CORNU (G.), Vocabulaire juridique, Association Henri
Capitant, Paris, P.U.F, 2011, p. 646.
69
Ensuite le terme médiation doit être
distingué de l'arbitrage, dès lors qu'au terme de la
procédure d'arbitrage, l'arbitre tranche le différend soumis par
une sentence qui s'impose aux parties.
Il convient également de faire le distinguo
entre la médiation et la transaction. Cette dernière
définie au sens de l'article 2044 du Code Civil comme un contrat par
lequel les parties terminent une contestation née ou à naitre au
moyen de concessions réciproques et qui ne nécessite ainsi pas
l'intervention d'un tiers. Un lien existe néanmoins entre
médiation et transaction dès lors qu'une médiation
organisée par les parties peut donner lieu à une transaction.
Enfin la médiation est également distincte de
l'« amiable composition » par laquelle les parties demandent
au juge ou à l'arbitre de statuer en équité et qui donne
ainsi lieu à un jugement ou à une sentence ayant autorité
de chose jugée et pouvant être exécutée. L'amiable
composition est particulièrement utilisée dans l'arbitrage
international pour éviter le recours à une loi
étatique.
La médiation ainsi cernée, la médiation
fiscale n'en est pas si éloignée. C'est un processus souple et
moins couteux (Paragraphe I) qui exige du médiateur
qu'il soit neutre, indépendant, impartial et confidentiel dans ses
actions (Paragraphe II).
Paragraphe I : Un processus souple et moins couteux
La justice classique est lourde, complexe et couteuse. Or les
modes alternatifs de règlement de litiges brillent plutôt par leur
simplicité et leur accessibilité du fait de leur origine
généralement conventionnelle. La médiation fiscale a fait
sienne cette qualité, elle est un processus à la fois souple
(A) et moins couteux (B).
A. La souplesse du processus de médiation
fiscale
C'est un mode original de règlement des conflits qui
n'est pas régi par des règles de procédure
strictes135. Cela permet aux parties de concevoir un système
adapté à leurs besoins et d'encourager une attitude plus
consensuelle que contradictoire.
La médiation fiscale est particulièrement
intéressante dans des affaires complexes qui portent sur de nombreux
problèmes. La souplesse du processus permet au médiateur de
135 Voir site :
http://www. Cours-de
droit. Net, consulté le 20 avril
2019.
70
proposer des règlements à l'amiable sur les
différends, ce qui donne lieu à différentes options de
règlement qui ne sont pas limités au recours juridique.
De par son caractère conventionnel, ce processus est
plus souple que celui du procès ou de l'arbitrage ou même de la
transaction fiscale. Il n'existe pas de règles fixes de procédure
sauf quelques consignes à respecter, notamment la politesse et
l'écoute de l'autre partie.
Il convient de parler de processus plutôt que de
procédure. Car dans une procédure, le cheminement est
jalonné et règlementé. Par contre le processus est plus
souple. Dans la technique de la médiation, il ya un habillage qui veut
marquer une rupture entre ce qui est juridictionnel et la sphère du
processus de médiation. Cette rupture s'exprime notamment par
différentes réalités : les audiences deviennent des
réunions. Le médiateur oscille entre une certaine autorité
entre les parties et une certaine complicité.
La souplesse s'entend aussi de la rapidité. La
médiation fiscale est généralement plus rapide que les
recours traditionnels, notamment quant aux délais et à la
durée du processus136.
En ce qui concerne d'abord les délais, plusieurs
raisons permettent à la médiation fiscale d'être plus
rapide. Contrairement au temps requis pour la préparation et l'examen
des dossiers judiciaires en première ou seconde instance devant un
tribunal, les parties n'ont pas à se soumettre aux délais
engendrés par la procédure judiciaire qui prennent parfois
plusieurs années. Ce sont les parties elle-même qui fixent avec le
médiateur fiscal les délais. C'est donc dire qu'une
médiation fiscale peut très bien se tenir dans un délai
aussi court que quelques semaines voir même quelques jours.
Ensuite pour ce qui est de la durée du processus, cela
dépend de la complexité des points en litige. Une
médiation peut durer de quelques heures à quelques jours, voire
des semaines dans des cas très complexes.
La souplesse du processus de médiation fiscale est
ainsi démontrée. C'est une plus-value notable qui permet de
trouver facilement les solutions aux litiges fiscaux portés devant le
médiateur. Cette plus-value se manifeste encore plus à travers le
faible coût de la procédure.
136 Voir Mémoire de l'Association de Médiation
fiscale présenté à la commission d'examen sur la
fiscalité québécoise disponible sur le site http//
www.groupe.finances.gouv.qc.ca,
consulté le 25 avril 2019.
71
B. Le faible coût du processus de médiation
fiscale
Depuis des décennies, l'accessibilité à
la justice est une préoccupation constante tant des pouvoirs publics que
des acteurs du milieu judiciaire. L'inefficacité de l'appareil
judiciaire à répondre à la demande de la population est
critiquée depuis longtemps. Les coûts notamment des interminables
procédures judiciaires n'ont cessé de croitre137.
Corrélativement, la confiance du public envers l'appareil judiciaire
s'est considérablement dégradée.
Les modes alternatifs de règlement des litiges
apparaissent ainsi comme des solutions pour pallier aux lacunes du
système judiciaire. De par leurs procédures souples mais aussi
peu couteuses, elles sont mieux adaptées aux desiderata du public et
besoins des citoyens. Pour mieux cerner le faible coût du processus de la
médiation, il convient de se référer à une
étude menée en 2010 par le département thématique
de la Direction Générale des Politiques Internes, de l'Union
Européenne (UE) sur la « quantification du coût du non
recours à la médiation - analyse des données
»138. Elle a été réalisée par l'ADR
Center dont, GIUSEPPE DE PALO, Président de Alternative Dispute
Resolution (ADR) Center, ASHLEY FEASLEY et FLAVIA ORECCCHINI.
Cette étude démontre que la médiation,
dont les bénéfices ne sont pas bien connus en Europe, est
néanmoins un outil peu couteux qui fournit un accès accru
à la justice et allège les charges qui pèsent sur les
tribunaux trop surchargés. Dans le cadre de cette étude, des
experts juridiques, entreprises, avocats et chercheurs juridiques ont
été consultés dans 26 États de l'UE pour
évaluer le coût réel exclusif aux processus de
médiation139. Le principal objectif de l'étude
était de répondre à la question suivante : « quel est
le coût du non recours à une procédure en deux
étapes, d'abord la médiation, puis l'action en justice, en
Europe? »
L'étude a calculé l'impact de la
médiation sur la longueur et le coût de la résolution du
conflit en relation avec le taux estimé de réussite de la
médiation. Ce calcul a montré qu'en réalité, au
plus le taux de réussite de la médiation est élevé,
au plus la durée des procédures de résolution du conflit
est courte et au plus le temps économisé est
important140.
137 ALEXANDRE (D.), Les coûts et les délais
judiciaires de la médiation judiciaire : les discours théoriques
et pratiques sous le regard de l'analyse économique du droit,
Sherbrooke, Mémoire de maitrise en Droit, Faculté de Droit de
Sherbrooke, 2013, p. 4.
138 Voir ladite étude disponible à la Direction
Générale des Politiques du Parlement Européen,
Département Thématique C : Droits des citoyens et affaires
constitutionnelles, Affaires Juridiques, http//
www.europarl.europa.eu/studies,
2011.
139 Ibidem.
140 Ibid.
72
Les chiffres relatifs à la durée et aux
coûts liés à un taux élevé de réussite
de la médiation sont assez impressionnants dans cette étude. En
Belgique par exemple, un taux de réussite de 75% peut permettre
d'économiser 330 jours et 5 000 euros (EUR) par conflit. En Italie, un
taux de réussite de 75% permet d'économiser 860 jours à
plus de deux ans et plus de 7 000 EUR par conflit141.
En outre, il est important de noter que l'étude a
constaté que le coût moyen d'une action en justice dans l'UE
était de 10 449 EUR, tandis que le coût moyen de la
médiation était de 2 497 EUR. En conséquence, lorsque la
médiation est réussie, les citoyens européens peuvent
économiser plus de 7 500 EUR par conflit142.
Au demeurant le recours à cette étude nous a
permis de démontrer que la médiation est un processus qui permet
certes d'économiser du temps mais aussi et surtout de l'argent. Elle
exige également des qualités de neutralité,
d'indépendance, d'impartialité et son action doit être
strictement confidentielle.
Paragraphe II : De la neutralité,
indépendance, impartialité du Médiateur et de la
confidentialité de son action
Malgré la diversité des conceptions qui
s'expriment dans le champ de la médiation et malgré les
controverses d'écoles, on peut repérer dans les discours et les
pratiques des médiateurs l'affirmation d'un certain nombre de principes
fondamentaux. Ils renvoient à un ensemble de prescriptions explicites et
à des énoncés plus ou moins impératifs qui visent
à assurer une conformité des conduites professionnelles et qui
permettent d'encadrer l'action.
Ces principes demeurent généraux, car tout en
s'exprimant dans leurs déclinaisons pratiques, ils portent avant tout
sur la philosophie de l'action. Ils sont souvent déclinés dans
des codes déontologiques et constituent des référentiels
qui permettent aux médiateurs de baliser, grâce au respect de
règles jugées fondamentales, leurs pratiques de
médiation.
Dans cette perspective il importe de montrer que la
neutralité, l'indépendance et l'impartialité sont des
principes récurrents et incontournables pour circonscrire le champ du
médiateur fiscal (A) sans oublier la
confidentialité (B) qui doit guider son action.
141 Voir ladite étude disponible à la Direction
Générale des Politiques du Parlement Européen,
Département Thématique C, op. cit., 2011.
142 Ibidem.
73
A. La neutralité, l'indépendance et
l'impartialité du Médiateur fiscal
Les prescriptions déontologiques constituent un
ensemble d'indications dans lequel certaines dimensions de l'activité se
trouvent définies. Ces dimensions renvoient à des principes
fondamentaux qui permettent de distinguer la médiation des modes de
régulation voisins. En cela, les codes déontologiques participent
à la définition du concept de médiation en stabilisant par
convention ce que le médiateur doit ou ne doit pas faire. Ils
fournissent des instructions et produisent des interdictions à
l'intention des praticiens143.
Ces référentiels circonscrivent les modes
d'intervention et constituent un cadre à partir duquel est jugé
le travail du médiateur.
La médiation requiert nécessairement la
présence d'un tiers neutre, indépendant et impartial. C'est
à l'aune de ces principes que la médiation est souvent
définie dans les discours savants et professionnels et dans les codes de
déontologie. De même, l'absence ou le non-respect de ces principes
sont des indicateurs qui permettent de comparer la médiation aux autres
modes alternatifs de régulation (conciliation et arbitrage), de
dénoncer les usages abusifs de l'appellation et donc de stabiliser les
définitions les plus conventionnelles.
Par exemple, il est courant d'entendre que la médiation
se distingue de la conciliation dans la mesure où cette médiation
doit s'exercer en dehors d'un espace de soumission à un pouvoir
institutionnel. Cette absence de soumission est l'une des conditions du respect
des principes de neutralité et d'impartialité.
L'indépendance personnelle et institutionnelle sont des
préceptes transversaux que l'on retrouve de manière
récurrente dans les codes déontologiques, les manuels de
médiation et les témoignages des praticiens144. En
médiation, le tiers n'est ni juge, ni arbitre : il ne doit pas imposer
son point de vue aux parties. Son autorité se limite à les aider
à dialoguer sur les éléments du différend et
à instaurer un climat communicationnel favorable aux échanges et
à la compréhension réciproque.
Institutionnellement, cette indépendance se traduit
surtout par l'absence de tutelle d'une instance extérieure qui aurait
droit de regard et d'intervention sur la médiation. Le
médiateur
143 A titre d'exemple, l'article 13 du code
déontologique de l'association Accord, à Strasbourg. Il stipule
qu'en cas de manquement aux règles déontologiques, le bureau de
l'association pourra prononcer des sanctions à l'encontre du
médiateur. Le Centre National de la Médiation, France, se veut
encore plus précis puisqu'il prévoit la suspension de
l'agrément d'exercer et la radiation.
144 FATHI BEN (M.), « Équité,
neutralité, responsabilité. A propos des principes de la
médiation », in Négociations, 2006, n°5, p. 55.
74
ne doit donc pas exercer une activité incompatible avec
sa mission et possède le pouvoir de refuser ou d'accepter une
médiation, eu égard à sa liberté de conscience et
à la nature des relations qu'il peut entretenir avec les
médiés. Il ne doit pas « se soustraire aux règles
d'indépendance et de neutralité au moyen d'une interposition de
personnes »145. Cette posture du médiateur implique
qu'il fasse preuve de distanciation pour éviter de confondre son
rôle avec celui du plaideur.
L'indépendance personnelle et institutionnelle est une
des propriétés que le médiateur doit posséder pour
affirmer son impartialité146. Autrement dit,
l'impartialité permet de garantir une certaine neutralité du
médiateur, ce qui conduit à la distinction de ces deux
principes.
Il existe une forte proximité sémantique, voire
une synonymie entre le principe de neutralité et celui
d'impartialité; la neutralité est souvent rapportée
à l'impartialité dans les définitions des dictionnaires.
Dans les code déontologiques, l'impartialité se décline
autour de l'indépendance du médiateur par rapport aux acteurs et
aux conflits qui lui sont soumis. Pour garantir son impartialité, le
médiateur ne doit pas exercer des activités professionnelles et
extra-professionnelles incompatibles avec son travail de médiation. Par
exemple, il ne peut pas être impliqué directement ou indirectement
dans un différend entre un locataire et un bailleur s'il est
l'employé de ce dernier. Même s'il évoque sa
neutralité, les médiés pourraient remettre en cause son
impartialité.
Quant au principe de neutralité, il est commun de
rappeler qu'il vise à éviter les attitudes d'évaluation
des médiateurs à l'égard des médiés. De
manière générale, la neutralité peut se
définir comme une attitude que les médiateurs adoptent pour
éviter de prendre parti pour l'un des médiés sur les
responsabilités du différend. Il doit donc s'interroger sur son
implication et ne pas profiter de sa position pour avantager l'une des parties.
Son engagement à l'égard des médiés doit être
équilibré, dans la mesure où ses objectifs ne visent pas
à définir des responsabilités nouvelles.
La médiation, et plus spécifiquement la
médiation fiscale exigent des qualités propres qui sont la
neutralité, l'indépendance et l'impartialité du
médiateur. Mais son action doit également être
guidée par la confidentialité.
145 Article 13 du Centre National de la Médiation de
France.
146 FATHI BEN (M.), « Équité,
neutralité, responsabilité. A propos des principes de la
médiation », op. cit., p. 58.
75
B. La confidentialité comme matrice de l'action du
médiateur fiscal
La publicité est une exigence essentielle à la
clarté et la régularité des débats en
procédure judiciaire, sauf ou la loi permet qu'ils aient lieu en chambre
du conseil à huis clos.
Le principe de publicité des débats est ainsi
consacré. La publicité dans ce sens, est considéré
comme l'un des moyens destinés à assurer l'équité
de la justice, car elle permet aux justiciables d'exercer un contrôle de
la manière dont la justice est administrée. Ce faisant, elle
donne à l'Administration de la justice une certaine transparence.
L'intérêt de tous les justiciables est donc concerné par le
principe de publicité et non pas seulement celui des plaideurs dont
l'affaire est en cours.
Pourtant, ce principe qui participe directement de la
loyauté et de l'équité de la justice, ne figure pas au
titre des principes directeurs de la médiation. Bien au contraire, c'est
le principe de confidentialité qui lui est substitué. Le devoir
de confidentialité147 est traditionnellement
présenté comme l'un des principes fondamentaux de la
médiation. Sa finalité est d'assurer aux parties ainsi qu'envers
les tiers que tout ce qui sera dit sera tenu secret éventuellement
à l'égard du juge. Sous cet angle, la confidentialité
apparait alors comme un moyen destiné à contribuer au
succès des négociations aux fins de conciliation. Elle participe
de l'esprit même des modes amiables de règlement des
conflits148, car indispensable pour susciter la confiance des
parties, sinon leurs confidences. Les précisions définitionnelles
de la confidentialité étant cernées, il importe de baliser
son contenu et sa portée.
Concrètement, cette obligation emporte interdiction,
pour le médiateur, les parties comme pour les tiers, de produire ou
d'invoquer les informations dont ils prendront connaissance à l'occasion
du processus de médiation dans la suite de toute autre instance.
Plus précisément, pour les parties, cela
signifie qu'en cas d'échec de la tentative de règlement amiable
et en cas de poursuite de la procédure contentieuse, elles ne pourront
invoquer à l'appui de leurs prétentions des arguments
tirés des informations qui leurs auront été
révélées à l'occasion des pourparlers de la
médiation. Plus encore, certaines chartes de médiation,
rédigées à l'adresse des médiateurs vont
jusqu'à prévoir que l'obligation au secret s'étend
éventuellement au-delà du cadre judiciaire : ainsi le Code
d'éthique et de méthode de l'Association des Médiateurs du
Barreau de Paris dispose, en son article 8, que le médiateur est
147 CARRE (S.), « La confidentialité et les
règlements amiables des litiges », LPA, 1994, p. 45.
148 LAGARDE (X.), Droit processuel et modes alternatifs de
règlement des conflits, op. cit., p. 435.
76
tenu de respecter la confidentialité hors
médiation : « il ne peut rien en évoquer auprès
de quiconque, ni être appelé comme témoin ou en
interprétation de l'accord conclu ».
En ce qui concerne la portée de la
confidentialité, l'on pourrait croire que cette obligation ne concerne
que l'issue de la tentative de règlement amiable : tout ce qui s'y est
dit pendant ne doit pas être dévoilé après. En
vérité, il faut bien se garder d'une telle conclusion : la
confidentialité couvre la procédure de médiation dans son
entièreté, du début à la fin. Il s'ensuit que
pendant le déroulement des pourparlers, les parties comme le tiers ne
sauraient dévoiler à quiconque les informations dont ils auraient
pu prendre connaissance. Pour les parties, cela signifie ne pas dévoiler
à des tiers les propositions et informations échangées en
cours de pourparlers.
Pour le médiateur, cela signifie, en cas d'entretiens
séparés, ne pas divulguer à une partie ce que l'autre lui
aurait confié si cette dernière ne lui a pas donné une
autorisation explicite en ce sens.
Sur ce dernier point, l'on citera une nouvelle fois le Code
des règles d'éthique et de méthode de l'Association des
Médiateurs du Barreau de Paris, qui dispose en son article 7 que «
le médiateur respecte la confidentialité entre les parties
durant le déroulement de la médiation : en cas d'entretien
séparé avec une partie ou son conseil, il n'en communique rien
à une partie sans un accord précis et explicite ».
Les diverses dispositions relatives au devoir de
confidentialité sont donc particulièrement rigoureuses tant en ce
qui concerne le contenu que la portée de ce principe.
La médiation au sens large et celle fiscale au sens
strict compte tenu des développements supra, regorgent d'une plus-value.
De par son processus souple, moins couteux et des qualités de
neutralité, d'indépendance, d'impartialité attachée
au médiateur sans oublier la confidentialité qui s'y greffe, la
médiation fiscale est un gage de réussite de la résolution
des différends qui opposent les contribuables à l'Administration
fiscale. A présent, scrutons le modèle français de
médiation fiscale.
77
SECTION II : LE MODÈLE FRANÇAIS DE
MÉDIATION FISCALE
Il est sans doute utile d'insister de nouveau sur la
nécessité de relativiser les appellations officielles tant la
frontière entre médiation et conciliation est tenue. Le parti a
été pris de considérer que le médiateur a, par
rapport au conciliateur, un rôle plus actif et plus technique dans la
recherche d'une solution au litige. Dès lors les comités et
commissions étudiées ci-après ont été
considérés comme relevant de la médiation plutôt que
de la conciliation.
Seules deux instances se réclament explicitement de la
médiation dans le domaine de la fiscalité (Paragraphe
I). Mais un certain nombre d'autres organes existent (comités
et commissions) dont le rôle peut s'apparenter à celui d'un
médiateur (Paragraphe II).
Paragraphe I : Les organes de médiation stricto
sensu
Il existe aujourd'hui deux organes de médiation dont la
compétence couvre notamment les relations entre les contribuables et
l'administration fiscale, à savoir le médiateur de la
république (A) et le médiateur des
ministères économiques et financiers (B).
A. Le médiateur de la République
Le médiateur de la République est une
institution créée par la loi n° 73-6 du 3 janvier 1973 pour
aider les personnes qui contestent une décision ou un comportement de
l'Administration française, notamment de l'administration fiscale.
Inspiré de l'Ombudsman suédois et du commissaire parlementaire
anglais, son rôle est de dénoncer les travers de l'administration,
tels que l'illégalité ou l'inefficacité de
l'administration. Si une réclamation lui paraît fondée, il
« fait toutes les recommandations qui lui paraissent de nature
à régler les difficultés dont il est saisi et, le cas
échéant, toutes propositions tendant à améliorer le
fonctionnement de l'organisme concerné »149.
Le médiateur de la République est nommé
par le Conseil des ministres pour 6 ans non renouvelables. Ce caractère
non renouvelable est une condition de son indépendance, qui se
caractérise aussi par sa soustraction au pouvoir hiérarchique :
il ne reçoit pas d'ordre et ne peut être relevé de ses
fonctions qu'en cas d'empêchement dûment
constaté150.
Il ne peut pas être saisi directement par le
contribuable. Il est nécessairement saisi par l'intermédiaire
d'un parlementaire. Le requérant doit adresser sa réclamation
à un député ou à
149 Loi n° 73-6 du 3 janvier 1973, article 1er.
150 HUBLOT (M-L.), Les procédures de
règlement de la double imposition résultant de la correction des
prix de transferts entre entreprises associées, Thèse,
Université de Panthéon-Assas, 2014, p. 280.
78
un sénateur151, qui la transmet au
médiateur si elle lui paraît entrer dans le champ de
compétence de celui-ci et mériter son intervention. Ce rôle
de filtre confié aux membres du Parlement est
notamment destiné à éviter les saisines
abusives ou inutiles car hors de la compétence
du médiateur.
Sa compétence comprend l'activité des
administrations d'État, des collectivités locales, des
établissements publics, et les organismes chargés d'une mission
de service public. Depuis le texte de 1973, cinq lois ont étendu les
compétences du Médiateur152 mais aucune ne lui a
donné de compétence particulière en matière de
règlement des litiges résultant d'un redressement fiscal.
Il est toutefois intéressant de souligner
l'évolution de l'institution dans le sens du renforcement très
important de ses moyens d'actions. Conçu initialement comme «
une sorte d'intercesseur gracieux entre le citoyen et
l'administration...une autorité morale destinée à
convaincre plutôt qu'ordonner »153, le
médiateur s'est vu attribuer le pouvoir de « recommander
à l'organisme mis en cause toute solution permettant de régler en
équité la situation du requérant ».
Il dispose à cette fin de larges pouvoirs. Il a le
pouvoir de vérification et d'enquête : les ministres et toutes les
autorités publiques doivent lui donner communication de tout document ou
dossier concernant l'affaire sur laquelle il enquête et les agents des
services publics sont tenus de lui répondre. A défaut de
réponse satisfaisante dans les délais qu'il a fixés, il
peut rendre publiques ses recommandations. Il dispose également d'un
pouvoir disciplinaire de substitution puisqu'il peut engager une
procédure disciplinaire à l'encontre d'un agent manifestement
fautif si l'autorité compétente refuse de le sanctionner. Il a
par ailleurs la possibilité de demander la modification de la loi ou du
règlement par une proposition de réforme, au-delà des cas
individuels qui lui sont soumis, afin d'améliorer le fonctionnement
de
151 L'administré peut faire appel à n'importe
quel député ou sénateur et non aux seuls élus de sa
circonscription ou de son département.
152 A savoir, une loi du 24 décembre 1976, qui renforce
les liens avec le Parlement, précise les relations avec les
juridictions, élargit les bases de l'action en équité,
autorise la proposition de réforme législative ; une loi du 13
janvier 1989 qui renforce l'indépendance du médiateur ; la loi
d'orientation du 6 février 1992 qui permet aux personnes morales de
saisir le médiateur ; une loi du 12 avril 2000 qui autorise le
médiateur à s'autosaisir en matière de réforme,
consacre l'existence des délégués et définit leur
rôle, instaure la présentation d'un rapport annuel au Parlement et
enfin élargit la saisine du médiateur de la République
à ses homologues étrangers et au médiateur
européen, qui peuvent désormais transmettre directement au
médiateur de la République les réclamations qui leur
paraissent mériter son intervention. Cette disposition permet à
la France de s'aligner sur ses partenaires de l'Union européenne qui
prévoient tous, à l'exception de la Grande-Bretagne, ce type de
saisine entre médiateurs; enfin, l'ordonnance du 25 mars 2004 qui
prévoit que les délégués exercent leurs fonctions
à titre bénévole.
153 Déclaration de M. Pléven, garde des sceaux, JO,
déb. Ass. nat., 15 décembre 1972, pp. 6209-6210.
79
l'administration ou empêcher les situations injustes de
se reproduire. Sur ce point précis, il importe de marquer un temps
d'arrêt afin de montrer de manière pratique le rôle
joué par le Médiateur de la République en France, en
évoquant de manière exhaustive les trois propositions de
réformes formulées et les deux mesures adoptées par le
Parlement français154.
En matière fiscale, le Médiateur de la
République a formulé en 2017 trois propositions de
réforme.
En premier lieu, il s'agissait d'oeuvrer pour autoriser le
rattachement des enfants de moins de 25 ans non étudiants au foyer
fiscal des parents : les enfants majeurs célibataires sont
imposés personnellement de plein droit, sauf à demander le
rattachement au foyer fiscal de leurs parents. Ils doivent pour cela avoir
moins de 21 ans ou entre 21 et 25 ans et poursuivre des études. Le
Médiateur a proposé de supprimer la condition liée
à la poursuite des études pour ne retenir que la limite
d'âge fixée à 25 ans155.
En second lieu, améliorer le régime fiscal des
veufs avec enfants non issus du mariage avec le conjoint
décédé : l'impôt sur le revenu des personnes seules
est normalement calculé sur une part et celui des personnes
mariées sur deux parts. Par exception, les veufs ayant des enfants
à charge issus de leur mariage avec le conjoint
décédé conservent leur quotient familial. Cette
règle ne s'applique pas si les enfants ne sont pas issus du mariage avec
le conjoint décédé. Le Médiateur a proposé
de supprimer cette distinction. Cette mesure de pure équité et
dont le coût est modeste a été adoptée dans le cadre
de la loi de finances rectificative pour 2007 du 25 décembre
2007156.
En troisième lieu, rendre automatique l'application de
la technique du quotient pour certains revenus différés :
certains contribuables ayant perçu en une seule fois des revenus
différés qu'ils auraient dû déclarer sur plusieurs
années, sont susceptibles de subir un impact fiscal important du fait de
la progressivité du barème. Les effets sont
atténués par la technique dite « du quotient», mais son
application est subordonnée à une demande expresse du
contribuable. Constatant que de nombreux contribuables ignorent cette
possibilité, le Médiateur a proposé de rendre automatique
l'application du dispositif du quotient pour certains revenus
différés157.
154 Voir Médiateur Actualités du Journal du
Médiateur de la République, janvier 2008, n°33, p. 3. Site
htpps://
www.mediateur-republique.fr,
Consulté le 27 avril 2019.
155 Ibidem.
156 Ibid.
157 Ibid.
80
En matière fiscale également, certaines de ses
propositions de réformes de 2006 et 2007, ont été mises en
place en 2007 et en 2008158.
C'est le cas notamment de l'institution d'un droit à
décharge de la solidarité fiscale entre ex-conjoints : depuis
plusieurs années, le Médiateur avait constaté
l'augmentation des réclamations mettant en cause la
responsabilité solidaire des conjoints au plan fiscal, source de
situations difficiles notamment lorsque les conjoints sont
séparés, en instance de divorce ou divorcés. La loi de
finances pour 2008 a institué un droit à décharge de
responsabilité solidaire suite à la rupture de la vie commune.
L'ex-conjoint ou l'ex-partenaire d'un pacte civil de solidarité,
poursuivi en qualité de débiteur solidaire d'une dette fiscale
commune, pourra demander une répartition équitable de cette
dette. La décharge de l'obligation de paiement sera accordée en
cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et la
situation financière et patrimoniale du demandeur, à condition
qu'il ait respecté ses obligations fiscales depuis la
rupture159.
Et c'est le cas aussi de l'égalité des droits
des créanciers et des débiteurs d'aliments dans l'accès
à l'information fiscale : la loi relative à la simplification du
droit du 20 décembre 2007, a institué l'égalité des
droits entre les créanciers et les débiteurs d'aliments dans
l'accès à l'information fiscale160. Cet accès,
qui était ouvert jusqu'ici aux seuls créanciers d'aliments,
permet de consulter les listes des personnes assujetties à l'impôt
sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés
établies par les services fiscaux. A travers les plaintes que
reçoit le Médiateur de la République, il est en prise
directe avec la réalité fiscale et les débats qu'elle
suscite. Il est ainsi un observateur privilégié de la
société. Il est aussi un acteur de l'évolution de la
règlementation fiscale par sa force de proposition des
réformes.
Son approche de l'impôt est à cet égard
indissociable des mutations qui s'opèrent dans la société
et de la modernisation de l'État. Il contribue finalement à
replacer les problématiques fiscales dans le cadre plus
général de l'action publique.
158 Voir Médiateur Actualités du Journal du
Médiateur de la République, janvier 2008, n°33, p. 3. Site
htpps://
www.mediateur-republique.fr,
Consulté le 27 avril 2019.
159 Ibid.
160 Ibid.
81
Enfin, le Médiateur de la République dispose du
pouvoir d'injonction161. Il peut, en cas d'inexécution d'une
décision de justice, obliger l'administration à s'y conformer
dans un délai qu'il fixe.
Si cette injonction n'est pas suivie d'effet,
l'inexécution de la décision de justice peut faire l'objet d'un
rapport spécial, publié au Journal Officiel.
A la faveur de ces évolutions, Bruno OPPETIT soulignait
justement qu' « on s'éloigne de plus en plus d'un personnage de
bonne volonté simplement chargé de s'entremettre entre personnes
en litiges pour faciliter un accord : il serait plus exact de voir aujourd'hui
dans le médiateur une autorité investie d'un rôle
quasi-décisoire exercé dans le cadre d'une mission de
caractère éventuellement très directif
»162.
Depuis le 11 mars 2011, le médiateur de la
République a été remplacé par le Défenseur
des droits, à la suite de la révision constitutionnelle du 23
juillet 2008. Ses attributions incluent celles exercées par le
médiateur de la République, le défenseur des enfants, la
commission nationale de déontologie de la sécurité et la
Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour
l'égalité. A côté du médiateur de la
République, il ya le médiateur des ministères
économiques et financiers.
B. Le médiateur des ministères
économiques et financiers
Le médiateur des ministères économiques
et financiers a été institué par le décret n°
2002-612 du 26 avril 2002163. Il a pour mission de recevoir toutes
les réclamations individuelles des personnes physiques ou morales en cas
de litige persistant sur le fonctionnement d'un service de ces
ministères. Toutefois, il n'a pas à interférer avec une
procédure de contrôle fiscal en cours.
Il est saisi directement par l'usager ou par son conseil. Sa
saisine n'interrompt pas les délais de recours de droit commun.
Le médiateur n'est compétent que si la
réclamation qui lui est adressée a été
précédée d'une démarche préalable
auprès du service concerné et que celle-ci a fait l'objet d'un
rejet
161 HUBLOT (M-L.), Les procédures de
règlement de la double imposition résultant de la correction des
prix de transferts entre entreprises associées, Thèse,
Université de Panthéon-Assas, 2014, p. 253.
162 OPPETIT (B.), Théorie de l'arbitrage, 1998,
Paris, P.U.F, p. 58.
163 Décret n° 2002-612 du 26 avril 2002, JO 28 avril
2002, Dr.fisc.46/02 n° 910.
82
total ou partiel164. En matière fiscale, la
notion de première démarche a été
précisée165 : il peut s'agir de l'engagement du
recours hiérarchique, de l'introduction d'une réclamation. En
revanche, le dialogue contradictoire entre le contribuable et l'administration
fiscale ne peut pas constituer en lui-même la première
démarche permettant de saisir le médiateur.
La majorité des demandes de médiation concernent
les usagers de la direction générale des finances publiques,
notamment pour des litiges relatifs à l'assiette de l'impôt et
à son recouvrement166. Le médiateur a notamment
été saisi dans le cadre de l'application des conventions
fiscales. Dans une espèce, un contribuable avait été
imposé en France au titre de ses salaires perçus en France. Il
demandait la décharge de ces impositions au motif qu'il était
domicilié dans un autre État. Le médiateur a
proposé de confirmer la position de l'administration fiscale dès
lors que le contribuable ne démontrait pas avoir subi une double
imposition par la production des avis d'imposition émanant des
autorités étrangères167.
L'examen des demandes de médiation est
réalisé en droit mais aussi en équité, en toute
indépendance. Cette indépendance par rapport aux services de
l'administration est garantie par le fait que le médiateur n'est pas
sous leur autorité, que son mandat, qui dure trois ans, est
irrévocable et qu'il dispose d'un budget propre et du personnel
nécessaire à son activité168.
En pratique, le médiateur ouvre la procédure
d'instruction de la demande en saisissant d'abord le service concerné du
ministère, afin de connaître les motifs de droit et de fait qui
ont conduit à ne pas accepter la position de l'usager. Compte tenu de
tous les éléments qu'il recueille ou estime utile de se faire
communiquer par l'une ou l'autre des parties, le médiateur propose une
recommandation, qui est toujours motivée en droit ou au regard de la
situation personnelle de l'usager. Celle-ci n'a pas pour effet de lier les
parties qui restent libres de décider de s'y conformer ou
pas169. L'Administration est simplement tenue de l'informer des
suites qu'elle entend donner à cette dernière.
164 Article 3 du décret du 26 avril 2002.
165Voir Rapport 2011 du médiateur des
ministères économiques et financiers,
http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/mediateur/Rapport
2011.pdf
166 Voir Rapport 2011 du médiateur des
ministères économiques et financiers,
http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/mediateur/Rapport%202011.pdf
167 Voir Rapport 2012 du médiateur des
ministères économiques et financiers,
http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/mediateur/Rapport%202012.pdf
168 Le médiateur dispose d'un
délégué, d'un chargé de mission et de six
conseillers experts dans les domaines relevant de sa compétence. Au
moment de leur prise de fonction, ces personnes suivent une formation de
professionnalisations des médiateurs.
169 Décret n° 2002-612 du 26 avril 2002, op. cit.,
Article 5.
83
En conséquence, les décisions du
médiateur n'ont pas le caractère de décisions
administratives susceptibles de faire l'objet d'un recours par la voie
contentieuse. Elles ne peuvent pas être soumises au contrôle du
juge de l'excès de pouvoir. Ainsi, la cour administrative d'appel de
Paris a jugé, par un arrêt du 3 février 2010, qu'il
résulte des termes mêmes des dispositions instituant le
médiateur des ministères économiques et financiers, qu'il
ne dispose que du pouvoir d'émettre une proposition dénuée
de caractère contraignant à l'égard des services du
ministère lorsqu'une réclamation lui paraît fondée.
Dès lors, une lettre adressée au contribuable aux termes de
laquelle aucune recommandation n'est proposée à l'administration
ne présente pas le caractère d'une décision susceptible de
faire l'objet d'un recours contentieux170.
Si la recommandation est acceptée par les deux parties,
elle est alors mise en oeuvre par l'administration. Si en revanche, le service
concerné du ministère n'accepte pas la recommandation
proposée par le médiateur, celui-ci peut soumettre directement
l'affaire à l'appréciation de l'administration centrale, telle
que la Direction Générale des Finances Publiques. Dans le cas
où l'administration centrale maintient la position initiale sans
apporter une raison qui paraît légitime au médiateur,
celui-ci peut soumettre le litige à l'appréciation du ministre
qui tranche alors définitivement la contestation171.
Enfin, s'agissant des délais de traitement, le rapport
2012172 indique que 62% des médiations ont été
rendues dans un délai inférieur à 60
jours173.
Le recours au médiateur des ministères
économiques et financiers permet donc de mettre fin à un
différend de manière, efficace et rapide.
En dehors de ces deux organes, il existe d'autres instances
chargées d'aider les contribuables et l'Administration à
résoudre leurs différends en matière fiscale.
Paragraphe II : Les comités et commissions
fiscales
Des comités et commissions peuvent être saisis
par le contribuable français en cas de persistance d'un désaccord
avec l'Administration fiscale.
170 CAA Paris, 3 février 2010, n° 10PA00117 ; Voir
également CE 10 juillet 1981, n° 05130, Lebon, p. 303 dans un cas
qui concernait le médiateur de la République.
171 UBERTI-SORIN (S.), « Le Médiateur des
ministères économiques et financiers », 2013, Bulletin
fiscal, n°5, p. 263.
172 Voir Rapport 2012 du médiateur des ministères
économiques et financiers, op. cit.
173 Ibid.
84
Il s'agit notamment des comités de l'abus de droit
fiscal ; du contentieux fiscal, douanier et des changes (A) ;
et de la commission nationale et départementale des impôts directs
et des taxes sur le chiffre d'affaires (B) qui ont des
rôles assez spécifiques.
A. Le rôle du comité de l'abus de droit
fiscal et du contentieux fiscal, douanier et des changes
Le comité de l'abus de droit fiscal a été
créé en 1941 et réformé par la loi de finances
rectificative pour 2008174. Ce comité peut être saisi,
soit à la demande du contribuable, soit à la demande de
l'Administration fiscale lorsqu'un désaccord subsiste sur les
redressements notifiés sur le fondement de l'abus de droit. Ses membres
sont tenus au respect des règles de secret professionnel et des
obligations déontologiques leurs sont imposées175 afin
de garantir un fonctionnement impartial. Le comité rend un avis à
la suite d'un débat oral et contradictoire.
Les avis rendus par le comité de l'abus de droit fiscal
font l'objet d'un rapport annuel adressé au ministre par le
Président du comité. Si l'administration ne se conforme pas
à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du
bien-fondé du redressement dans le contentieux poursuivi devant les
tribunaux.
Le comité du contentieux fiscal douanier et des
changes176, créé en 1977, est chargé, sur
demande du ministre des finances, d'émettre un avis sur les transactions
ou remises excédant les limites de compétence des services
déconcentrés de la Direction Générale des
Impôts ou de la Direction Générale des
Douanes177. Le ministre n'est pas lié par l'avis rendu.
174 Article 1653 C et articles R 64-1 et R 64-2 du CGI
français. L'article 1653 C du Code Général des
Impôts prévoit que « Le comité prévu
à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales comprend
:
a. un conseiller d'État, président ;
b. un conseiller à la cour de cassation ;
c. un avocat ayant une compétence en droit fiscal
;
d. un conseiller maître à la Cour des comptes
;
e. un notaire ;
f. un expert-comptable ;
g. un professeur des universités,
agrégé de droit ou de sciences économiques.
Les membres du comité sont nommés par le
ministre chargé du budget sur proposition du Conseil national des
barreaux pour la personne mentionnée au c, du Conseil supérieur
du notariat pour la personne mentionnée au e et du Conseil
supérieur de l'ordre des experts-comptables pour la personne
mentionnée au f. Des suppléants sont nommés dans les
mêmes conditions .Le ministre chargé du budget désigne en
outre un ou plusieurs agents de catégorie A de la direction
générale des finances publiques pour remplir les fonctions de
rapporteur auprès du comité. »
175 Voir article 1653 D du CGI
français.
176 Article 20 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre
1977, codifié aux articles 460 et suivants du code des douanes
français.
177 Article 350-1 du code de douanes français : «
L'administration des douanes est autorisée à transiger avec
les personnes poursuivies pour infraction douanière ou pour infraction
à la législation et à la réglementation relatives
aux relations financières avec l'étranger sous réserve de
l'application des dispositions suivantes :
85
Ce comité peut aussi être consulté par le
ministre des finances sur toute question générale ou
particulière relative au contentieux fiscal. Il peut également
faire, de sa propre initiative, au ministre chargé du budget les
observations et recommandations qu'il estime utiles.
Tout assujetti au respect de la réglementation fiscale
et tout organisme représentatif de ces assujettis peut informer le
comité des difficultés rencontrées en matière
contentieuse.
Ce comité est composé, sous la présidence
d'un conseiller d'État, de conseillers d'État, de conseillers
à la Cour de cassation et de conseillers maîtres à la Cour
des comptes, choisis parmi des magistrats et des fonctionnaires en
activité ou à la retraite, ainsi que de deux personnalités
qualifiées désignées par le Président de
l'Assemblée nationale et de deux personnalités qualifiées
désignées par le Président du Sénat178.
Le Président et les membres du comité, ainsi que leurs
suppléants, sont nommés par décret pour trois ans.
Le redevable est invité à produire, dans un
délai de trente jours, les observations écrites que celui-ci juge
utile de présenter à l'appui de sa demande de transaction, ou
à présenter des observations orales à la séance
où il est convié. Les comités jouent ainsi un rôle
important dans la résolution des litiges fiscaux entre l'Administration
et les contribuables. Les Commissions ne sont pas en reste.
B. Le rôle de la Commission nationale et
départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre
d'affaires
Les Commissions nationales et
départementale179 des impôts directs et des taxes sur
le chiffre d'affaires sont largement utilisées par les contribuables
engagés dans un contentieux faisant suite à une proposition de
rectification. La Commission peut être saisie, sur demande du
contribuable ou sur l'initiative de l'administration dans les trente jours
suivant la réception de la réponse de l'administration aux
observations du contribuable. Si le contribuable demande la saisine de la
commission, l'administration doit obtempérer, à peine de vice de
forme.
La Commission n'est compétente que pour examiner des
questions de fait, à l'exclusion donc des questions de droit. L'article
L 59 A du LPF, modifié par l'article 26 de la loi de finances
rectificative pour 2004, élargit cependant la compétence de la
commission à certaines
a) lorsqu'aucune action judiciaire n'est engagée,
les transactions excédant les limites de compétence des services
extérieurs de l'administration des douanes doivent être soumises
pour avis au comité du contentieux fiscal, douanier et des changes
prévu à l'article 460 du présent code ».
178 Article 460 du code des douanes français,
modifié par la loi n°2013-1117 du 6 décembre 2013 relative
à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance
économique et financière.
179 Articles L 59 A et L 59 C du LPF du CGI français.
86
questions de droit180. Dire dans le principe que la
Commission examine les questions de fait veut tout simplement signifier que
celle-ci n'a pas la possibilité d'émettre un avis sur
l'opportunité ou non, des dispositions législatives
appliquées par l'Administration fiscale, et encore moins
évidemment sur le fondement mêmes desdites dispositions.
Cet organisme n'a la faculté d'émettre un avis
que sur : la détermination des résultats (dans la
catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, des
bénéfices non commerciaux, des bénéfices agricoles)
et des bases imposables à la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA),
suite à une vérification de comptabilité dans le cadre du
régime réel d'imposition ; le caractère anormal d'un acte
de gestion, le principe et le montant des amortissements et provisions, les
charges déductibles en matière de travaux immobiliers ; les
conditions d'application des régimes d'exonération ou
d'allègements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles ; certaines
rémunérations non déductibles pour la détermination
du résultat des entreprises industrielles ou commerciales et sur la
nature des frais généraux mentionnés sur le relevé
prévu à l'article 54 quater du CGI français et la valeur
des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des
actions ou des parts de sociétés immobilières servant de
base à la TVA. De plus pour les litiges afférents aux
sociétés qui exercent une activité industrielle ou
commerciale dont le chiffre d'affaires hors taxes excède 50 000 000 EUR
( s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des
marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou
consommer sur place ou de fournir le logement) ou 25 000 000 EUR (s'il s'agit
d'autres entreprises), c'est toujours la Commission nationale des impôts
directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui est appelée à
statuer dans les mêmes domaines et selon les mêmes conditions. Par
contre la commission n'est pas compétente pour les revenus fonciers, de
capitaux mobiliers, les plus-values des particuliers, les traitements et
salaires et les charges déductibles du revenu global181.
Par ailleurs la compétence territoriale de la
Commission est départementale. La commission départementale des
impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires compétente
est en général celle du département dans lequel le
contribuable est tenu de déposer ses déclarations. Toutefois,
tout contribuable, quelle que soit la procédure, peut demander la
saisine
180 La commission est désormais compétente pour
examiner les désaccords relatifs aux conditions d'application des
régimes d'exonération ou d'allègements en faveur des
entreprises nouvelles, des questions de fait même lorsque celles-ci
participent à la qualification juridique d'une opération ou
encore en matière d'appréciation du caractère anormal d'un
acte de gestion, du principe et du montant des amortissements et des provisions
et du caractère de charge déductible des travaux immobiliers.
181Voir Code Général des
Impôts français.
87
d'une autre Commission au nom tant de la protection de la vie
privée que de la confidentialité des affaires.
La Commission est présidée par un magistrat du
tribunal administratif et comprend deux représentants de
l'administration fiscale et trois représentants des contribuables, dont
deux sont désignés par les organisations représentatives
en raison de leurs compétences professionnelles et un qui,
désigné par l'Ordre des Experts comptables, intervient
également es qualités. Leur nombre varie en fonction de la nature
du litige. Le cas échéant, le contribuable peut demander le
remplacement d'un représentant des contribuables par celui d'un
organisme professionnel de son choix : la présence d'un professionnel
averti de la branche précise d'activité du contribuable peut
s'avérer extrêmement précieuse à éclairer
l'avis de la Commission.
La procédure devant la Commission est essentiellement
orale. Mais le contribuable peut cependant présenter un mémoire
écrit. Le Président respecte toujours le caractère
contradictoire. La Commission entend les deux parties et, lorsqu'elles se sont
exprimées, et même ont dialogué entre elles sous le
contrôle du Président, les commissaires peuvent, avec l'accord de
ce dernier, poser au contribuable ou au Service des impôts toute question
qui leur parait utile.
La Commission délibère à huis clos. En
cas de partage des voix, celle du Président est
prépondérante.
Préalablement à la mise en recouvrement de
l'imposition, l'avis motivé émis par la Commission est
notifié au contribuable par le service à l'origine du
contrôle. La Commission rend un avis qui ne lie pas l'Administration
fiscale. Mais en fait celle-ci en tient compte, ne serait-ce qu'en raison du
renversement de la charge de la preuve. L'article L 192 du LPF du CGI
français182 dispose que l'Administration supporte la charge
de la preuve quel que soit l'avis de la Commission Départementale des
Impôts, excepté le cas où la comptabilité
présente de graves irrégularités. Le contribuable dispose
par ailleurs de la faculté de déposer une réclamation
contentieuse, après la mise en recouvrement des impositions
supplémentaires.
182 Voir Code Général des Impôts
français.
CONCLUSION DU CHAPITRE II
88
89
Au terme de ce chapitre, il convient de noter que la
médiation fiscale comparée au recours traditionnel devant un
tribunal, offre de nombreux avantages. En plus d'être une démarche
commune, elle est plus rapide, souple, moins couteuse et elle favorise le
rapprochement entre les parties. Ce rapprochement permet de maintenir des
relations harmonieuses et de préserver le lien de confiance entre
l'Administration fiscale et les contribuables.
Rapide, elle l'est car les parties médiées
restent maitre du processus tant sur le fond de l'accord que sur le temps
qu'elles consacrent au processus. Contrairement à une audition devant un
tribunal, les parties n'ont pas à se soumettre aux inévitables
délais liés aux procédures judiciaires.
Plus économique, elle l'est également
contrairement aux coûts exorbitants183 des procédures
interminables de la justice classique.
De surcroit, les qualités requises du médiateur
à savoir : la neutralité, l'indépendance,
l'impartialité et la confidentialité garantissent au contribuable
l'objectivité des décisions qui seront prises.
L'expérience française des comités et des
commissions de médiation et surtout du Médiateur de la
République à l'image de l'Ombudsman suédois sont des
exemples dont il faut s'inspirer.
183 ALEXANDRE (D.), Les coûts et les délais
judiciaires de la médiation judiciaire : les discours théoriques
et pratiques sous le regard de l'analyse économique du droit,
Sherbrooke, op. cit., 2013, p. 4.
90
CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
91
Il ne fait aucun doute à ce stade de notre
démonstration que les imperfections, les limites du dispositif existant
de règlement alternatif des différends fiscaux au Cameroun sont
réelles. C'est pourquoi son extension est nécessaire à
travers l'internalisation de la conciliation et de la médiation fiscale
dans notre dispositif fiscal. La seconde partie s'est ainsi attelée
à mettre en relief leur plus-value sur le plan théorique et
l'influence du modèle français.
Deux arguments fondamentaux militent en faveur de cette
extension des modes alternatifs de règlement des litiges fiscaux.
D'abord, la conciliation et la médiation fiscale
offrent l'avantage d'être souple et peu couteuse, contradictoire et
efficace en termes de déjudiciarisation du contentieux184.
Des qualités substantielles à l'heure où l'on parle de
simplification des procédures et de la nécessité de
désengorger les prétoires.
Ensuite, il s'agit des procédures déjà
rodées qui ont fait leurs preuves ailleurs et qui ont connu et
connaissent du succès, notamment en France.
Au demeurant, dans cette seconde partie, il s'est agi de
mettre en relief la plus-value théorique, pratique de la conciliation et
de la médiation fiscale afin de plaider pour leur internalisation dans
notre législation fiscale.
184 HUBLOT (M-L.), Les procédures de
règlement de la double imposition résultant de la correction des
prix de transferts entre entreprises associées, Thèse,
Université de Panthéon-Assas, 2014, p. 277.
93
Les réformes actuelles engagées dans le
système fiscal camerounais en termes de dématérialisation,
de simplification des procédures et de sécurisation des recettes
de l'État sont essentiellement des réformes de politique fiscale
et d'administration de l'impôt. Si elles sont à saluer car elles
permettent essentiellement une mobilisation accrue des recettes de
l'État, le volet relation publique (Administration fiscale-
contribuable) n'est pas toujours bien pris en compte. Or le contribuable est
bien considéré comme la « poule aux oeufs d'or
», le partenaire incontournable et privilégié dans
l'atteinte des objectifs des recettes.
Notre système fiscal en termes de modalité de
règlement alternatif des litiges fiscaux est bâti essentiellement
autour de la transaction fiscale et de la remise gracieuse. S'il est vrai
qu'ils jugulent tout de même une bonne partie du contentieux fiscal, il
est aussi vrai que l'on peut faire encore mieux. Ce système dont la
pratique est limitée, en témoigne les statistiques froides
liées au faible volume des transactions et de remise
enregistrées, est consacrée dans notre législation fiscale
de manière restrictive. La rigueur de ses conditions et
procédures ont été mises en relief. Il s'agit notamment de
l'exigence formelle de l'écrit, du centralisme de l'autorisation de la
transaction et de l'obligation préalable du paiement du principal de
l'impôt, du choix sélectif des types d'impôts se rattachant
aux pénalités concernant la remise.
Autant de raisons qui permettent de soutenir l'idée
selon laquelle le système actuel de résolution alternatif des
litiges fiscaux est dépassé. Or le litige est et restera, les
conflits étant inhérents à la nature
humaine185. Ils auront même tendance à se
démultiplier vue la complexification de la fiscalité au fil du
temps. D'où le plaidoyer légitime de son extension, de son
enrichissement à d'autres modes novateurs.
Notre étude a permis de relever et d'explorer des
pistes nouvelles qui devraient permettre d'améliorer les relations entre
l'Administration fiscale et le contribuable, gage de pérennisation d'un
système fiscal productif et efficient.
Cette amélioration appelle à la densification
juridique du dialogue entre le Fisc et le contribuable186. Ceci est
une invite aux pouvoirs publics d'internaliser dans notre législation
fiscale la conciliation et la médiation fiscale, qui sont des
procédures souples et efficaces.
185 SIMMEL (G.), « Le conflit », op. cit., p. 14.
186 ATANGA FONGUE (R.), Contrôle
fiscal et protection du contribuable dans un contexte d'ajustement structurel :
le cas du Cameroun, Paris, l'Harmattan, 2008, p. 312.
94
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délais judiciaires de la médiation judiciaire : les discours
théoriques et pratiques sous le regard de l'analyse économique du
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IV- RAPPORTS
- Rapport 2011 du médiateur des ministères
économiques et financiers français - Rapport 2012 du
médiateur des ministères économiques et financiers
français
ANNEXES : extraits du Code
Général
des Impôts
98
99
ANNEXES 1 : Extraits du Code
Général des Impôts
SECTION II
TRANSACTIONS
Article L 125.- Sur proposition du Directeur
Général des Impôts, le ministre chargé des finances
peut autoriser, dans le cadre d'une transaction, une modération totale
ou partielle des impositions dans les deux cas suivants :
- avant la mise en recouvrement suivant une procédure de
contrôle ;
- durant toute la procédure contentieuse.
En cas d'acceptation de cette proposition de transaction par
le contribuable, celui-ci s'engage expressément :
- à ne pas introduire une réclamation
ultérieure ;
- à se désister des réclamations ou des
requêtes par lui introduites ;
- à acquitter immédiatement les droits et
pénalités restant à sa charge.
Article L 125 bis.- Lorsqu'un contribuable
demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque,
l'Administration peut, à tout moment de la procédure et
malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer la
compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les
dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou
omissions constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au
cours de l'instruction de la demande.
Article L 125 ter.- (1) Le contribuable qui
introduit une demande de transaction pendant la phase contentieuse
bénéficie d'une suspension de poursuites.
(2) L'instruction de la demande de transaction suspend la
computation des délais pour la saisine de l'autorité
supérieure en matière contentieuse ainsi que les poursuites en
recouvrement, ce, pour une période de quinze (15) jours à compter
de la réception de la demande de transaction par l'administration
fiscale.
(3) La décision de l'administration relance les
mesures de poursuites et la computation des délais.
(4) Le silence de l'administration au terme du délai
de quinze (15) jours vaut rejet de l'offre de transaction du contribuable.
100
ANNEXES 2 : Extraits du Code
Général des Impôts
SOUS-SECTION I
FORME DE LA DEMANDE
Article L 143.- Les demandes tendant à
obtenir soit une remise, soit une modération doivent être
adressées au Chef de Centre des Impôts
territorialement compétent.
Elles doivent contenir les indications nécessaires pour
identifier l'imposition en cause et être
accompagnées d'une copie de l'Avis de Mise en
Recouvrement.
Elles ne sont pas soumises au droit de timbre.
SOUS-SECTION II
DECISION DE L'ADMINISTRATION
Article L 144.- Après examen,
l'Administration notifie par écrit sa décision de remise,
modération ou
rejet.
Article L 145.- En cas de remise ou
modération, la décision est notifiée :
- par le Chef de Centre Régional des Impôts ou le
responsable de la structure chargée de la gestion de
«Grandes Entreprises» dans la limite de trente millions
(30 000 000) F CFA pour les impôts et taxes en
principal et de trente millions (30 000 000) F CFA pour les
pénalités et majorations ;
- par le Directeur Général des Impôts dans la
limite de cent millions (100 000 000) F CFA, pour les impôts et taxes en
principal et de cent millions (100 000 000) F CFA pour les
pénalités et majorations ;
- par le ministre chargé des Finances pour les
impôts et taxes en principal dont les montants sont supérieurs
à cent millions (100 000 000) F CFA ainsi que pour les
pénalités et majorations dont les montants sont supérieurs
à cent millions (100 000 000) F CFA.
Toutefois, lorsque la décision de l'autorité
compétente ne satisfait pas le demandeur, le recours hiérarchique
reste ouvert à ce dernier jusqu'au ministre chargé des
Finances.
101
ANNEXES 3 : Extraits du Code
Général des Impôts
SECTION II
AVIS DE MISE EN RECOUVREMENT
Article L 53.- (1) L'Avis de Mise en
Recouvrement constitue un titre exécutoire pour le recouvrement
forcé des impôts, droits et taxes.
(2) L'Avis de Mise en Recouvrement est établi et
notifié au contribuable lorsqu'une déclaration liquidative n'est
pas accompagnée de moyens de paiement ou suite au dépôt
d'une déclaration non liquidative, ou de la dernière pièce
de procédure dans le cas d'un contrôle.
L'Avis de Mise en Recouvrement rendu exécutoire par le
chef de Centre des Impôts territorialement compétent, est pris en
charge par le Receveur des Impôts rattaché. Le Receveur des
Impôts notifie l'Avis de Mise en Recouvrement au contribuable qui dispose
d'un délai de trente (30) jours pour acquitter sa
dette.
(3) Supprimé.
Article L 54.- Lors du paiement des
impôts, droits et taxes, une quittance est délivrée par le
Receveur des impôts. Code Général des Impôts
- Edition 2019
102
INDEX
Arbre à palabre, 34 Principe du contradictoire, 19, 54,
55
Arbitrage, 3 Principe de neutralité, 73
Amiable composition, 69 Procédure amiable, 14
Commission départementale des impôts directs
Remise gracieuse, 23, 25, 26
et des taxes sur le chiffre d'affaires, 85, 86, 87
Solidarité fiscale, 80
Commission départementale de conciliation, 58, 59
Transaction, 3, 18
Comité du contentieux fiscal et douanier, 84, 85
Transaction fiscale, 20, 21, 22, 32, 33
Conciliation, 3, 51,
Conciliateur fiscal départemental, 60, 61
Contentieux fiscal, 14
Contrat d'adhésion, 52
Litige fiscal, 4
MARL, 3
Médiation, 3, 66, 68,
Médiateur de la République, 77, 78, 79, 80
Obligation de motiver, 39, 40
Ombudsman, 68
Pouvoir disciplinaire de substitution, 78
Pouvoir d'injonction, 81
Pouvoir exorbitant, 34
Postmodernité, 2
Principe de confidentialité, 75, 76
Principe d'indépendance, 73, 74
103
TABLE DES MATIÈRES
Avertissement .i
Dédicace ii
Remerciements .iii
Sigles et abréviations .iv
Résumé v
Abstract .vi
Sommaire .vii
Introduction générale 1
I- Cadre de l'étude 2
II- Objet de l'étude 7
III- Conduite de l'étude 9
IV- Annonce du plan de rédaction .11
Première partie : La consécration
limitée des modes alternatifs de règlement
des litiges fiscaux au Cameroun 12
Introduction de la première partie 13
Introduction du chapitre I 16
Chapitre I : La conception restrictive des modes
alternatifs de règlement des
litiges fiscaux .15
Section I : La conception restrictive de la transaction fiscale
.18
Paragraphe I : La rigueur des conditions de la transaction
fiscale ..18
A. L'interdiction de la conclusion d'une transaction avant
l'émission d'un AMR
suivant une procédure de contrôle 19
B. La triple obligation tenant à l'observance
d'engagements stricts de la part du
contribuable 20
Paragraphe II : La rigueur de la procédure de transaction
fiscale 20
A. L'exigence d'un écrit 21
B. Le centralisme de l'autorisation 21
Section II : La conception restrictive de la remise gracieuse
23
Paragraphe I : La rigueur des conditions de la remise 23
A. Les conditions de forme de la remise
gracieuse 23
B. L'exclusion des pénalités relatives aux
impôts liés au chiffre d'affaires, aux impôts
collectés auprès des tiers et ceux consécutifs à
une taxation
d'office ..24
Paragraphe II : La rigueur de la procédure de la remise
gracieuse .25
A. La procédure de remise gracieuse pour les
pénalités liées aux droits
directs 26
B. La procédure de remise gracieuse pour les
pénalités liées aux droits
d'enregistrement ..26
Conclusion du chapitre I .27
Chapitre II : La pratique limitée des modes
alternatifs de règlement des litiges
fiscaux 29
Introduction du chapitre II ..30
Section I : La pratique limitée de la transaction fiscale
32
Paragraphe I : Le faible volume des dossiers de transaction
32
A. Le faible volume des dossiers de transaction reçues
32
B. Le faible taux de modération ou de transaction 33
Paragraphe II : Les raisons de la faiblesse du volume des
dossiers de transaction 33
104
Les raisons psycho-sociales
34
|
B. Les mobiles techniques
|
.35
|
|
Section II : La pratique limitée de la remise gracieuse
|
37
|
Paragraphe I : Le faible volume des dossiers de remise
|
...37
|
A. Le faible volume des dossiers de remises reçues
|
.37
|
B. Du nombre de demandes de remises traitées et
révisées
|
38
|
|
Paragraphe II : Les raisons de la faiblesse du volume des
dossiers de remise reçues
|
38
|
A. La procédure non contradictoire attachée
à la procédure de remise
gracieuse 39
B. L'absence de l'obligation de motiver les décisions
gracieuses 40
Conclusion du chapitre II 42
Conclusion de la première partie 44
Partie 2 : L'extension souhaitable des modes alternatifs
de règlement des
|
litiges fiscaux au Cameroun
|
46
|
Introduction de la seconde partie
|
.47
|
Chapitre I : La conciliation fiscale
|
49
|
Introduction du chapitre I
|
50
|
Section I : La plus-value théorique de la conciliation
fiscale
|
52
|
Paragraphe I : Une procédure souple et peu couteuse
|
52
|
A. La souplesse de la procédure de conciliation fiscale
|
52
|
B. Le faible coût de la procédure de conciliation
fiscale
|
...53
|
|
Paragraphe II : Une procédure contradictoire et efficace
|
..54
|
A. Le caractère contradictoire de la procédure de
conciliation fiscale
|
54
|
B. Le caractère efficace de la procédure de
conciliation fiscale
|
56
|
|
Section II : Le modèle français de conciliation
fiscale
|
.58
|
Paragraphe I : La commission départementale de
conciliation
|
.58
|
A. Présentation de la commission départementale de
conciliation
|
58
|
B. Fonctionnement de la commission départementale de
conciliation
|
.59
|
|
Paragraphe II : Le conciliateur fiscal départemental
|
60
|
A. La mission du conciliateur fiscal départemental
|
..60
|
B. La compétence du conciliateur fiscal
départemental
|
60
|
|
Conclusion du chapitre II
|
62
|
Chapitre II : La médiation fiscale
|
.64
|
Introduction du chapitre II
|
65
|
Section I : La plus-value théorique de la médiation
fiscale
|
.68
|
Paragraphe I : Un processus souple et moins couteux
|
.69
|
A. La souplesse du processus de médiation fiscale
|
69
|
B. Le faible coût du processus de médiation
fiscale
|
.71
|
|
Paragraphe II : De la neutralité, indépendance,
impartialité du médiateur et de la
confidentialité de son action
|
..72
|
A. La neutralité, l'indépendance et
l'impartialité du médiateur fiscal
|
73
|
B. La confidentialité comme matrice de l'action du
médiateur fiscal
|
75
|
|
Section II : Le modèle français de médiation
fiscale
|
77
|
Paragraphe II : Les organes de médiation stricto sensu
|
77
|
A. Le médiateur de la République
|
77
|
B. Le médiateur des ministères économiques
et financier
|
81
|
|
Paragraphe II : Les comités et commissions
|
83
|
A. Le rôle du comité de l'abus de droit fiscal et
du comité du contentieux fiscal,
douanier et de change 84
105
B. Le rôle de la commission nationale et
départementale des impôts directs et des taxes
|
sur le chiffre d'affaires
|
..85
|
Conclusion du chapitre II
|
88
|
Conclusion de la seconde partie
|
90
|
Conclusion générale
|
92
|
Bibliographie
|
94
|
Annexes
|
98
|
Index
|
102
|
Tables des matières
|
.103
|
106
107
|