Gestion du risque de liquidité à la boa rdcpar Jérémie BALIBANGA SOKANE Université de GOMA - Licence 2021 |
III. LE TRAITEMENT DU RISQUE DE LIQUIDITÉ DANS BÂLE IIILes accords de Bâle I (1988) et Bâle II (2004) n'ont pas harmonisé internationalementlaréglementationdurisquedeliquidité, réglementation qui existe depuis longtemps dans certains pays comme la France (1946). Les accords de Bâle III se sont saisis de cette question et ont intégré le risque de liquidité à côté des risques de crédit, de marché et opérationnels. Le cadre d'analyse proposé dans la première partie nous permettradevoirqueBâleIIIsefocalisesurlaliquiditédefinancement en imposant des ratios internes de liquidité à respecter, ce qui néglige les interactions avec le risque de liquidité de marché dont nous avons montré l'importance. Nous présenterons ainsi dans un premier temps lesratiosdeliquiditéproposésparBâleIIIpourenproposerensuiteune évaluation qui nous conduira à formuler des propositions. Les nouveaux ratios de liquidité LCR et NSFR Le nouveau cadre réglementaire pour la surveillance de la liquidité développé par le Comité de Bâle (Bâle III) en réponse à la crise financièrerécenteviseàfortifierlarésistancedesbanquesfaceàl'émergence des chocs de liquidité. Afin d'atteindre cet objectif, il propose d'introduiredeuxratiosquis'appliquerontprogressivement,etce,pour l'ensemble des pays du G20 : le liquidity coverage ratio (LCR) et le net stable funding ratio (NSFR). Réserve d'actifs liquides 251655168Le ratio de liquidité à court terme LCR Le LCR est un ratio de liquidité à un mois dont l'objectif est de permettre aux banques de résister à des crises de liquidité idiosyncratiques et systémiques sur un horizon d'un mois. Ce ratio fait l'objet d'une période d'observation depuis 2011 dans la perspective de l'introduire en tant que norme à partir de 2015. Surunepériodedetrentejours,ilpermetdes'assurerquelesbanques détiennentsuffisammentd'actifstrèsliquidesdansleurbilanpourleur permettre de faire face à une ruée sur les dépôts ou à une baisse importante de trésorerie : Flux net à 30 jours 251656192251654144LCR= =100% Avec flux nets à 30 jours = flux décaissés - min (flux encaissés ; 75 % flux décaissés). Des précisions sur le numérateur s'imposent puisque certains de ses paramètres font l'objet de réflexions ultérieures dans notre article (cf. tableau2infra).Laréserved'actifsliquidesestcomposéederéservesde disponibilités (cash) et d'actifs liquides valorisés en situation de stress. Cette réserve contient un stock d'actifs très liquides composé d'obligations souveraines, de titres émis par des banques centrales ou des organismes publics sans risque, ainsi que de certaines obligations corporate ayant une note supérieure ou égale à AA-. Notons que les actifs de niveau 2 ne doivent pas dépasser 40 % de la réserve de liquidité et que les titres arrivant à maturité dans le mois ne sont pas pris en compte dans la réserve de liquidité puisqu'ils sont comptabilisés dans les flux encaissés au dénominateur. Au dénominateur, le régulateur a veillé à ce que les flux encaissés soient plafonnés à hauteurde75%desfluxdécaisséspours'assurerquemêmelesbanques avec des encaissements particulièrement élevés se constituent une réserve de liquidité. Par conséquent, pour obtenir un LCR supérieur à 100 %, la réserve d'actifs liquides doit être supérieure aux flux nets à trente jours. Ce qui implique que dans le cas le plus favorable, elle doit être supérieure à 25 % des décaissements.15(*) Le ratio de liquidité à long terme NSFR : Le dispositif de Bâle III prend aussi en compte le risque de liquidité à long terme. Le NSFR compare les ressources financières stables dont disposent les banques avec leurs besoins de financement stables, y compris les éléments hors-bilan. L'objectif affiché est de limiter le recours excessif à la transformation de maturités en encourageant les banques à recourir à des financements de plus long terme. Ce ratio fait l'objetd'unepérioded'observationàpartirde2012,danslaperspective de l'introduire à partir de 2018. Le principe du NSFR est le suivant : le montant de financement stable disponible doit être supérieur au montant de financement stable exigé. 16(*) Bâle III est-il sur la bonne voie ? AveclanouvelleréglementationBâleIII,lerégulateuréliminecertes une partie du risque de liquidité chez les banques, mais les solutions proposéessontproblématiquesdanslecontexteactuel,voireunesource potentielle de nouveaux problèmes à l'avenir. Tout d'abord, il est à noter que le ratio LCR vise à réduire le risque deliquiditédefinancementsansvraimenttenircomptedes interactions aveclerisquedeliquiditédemarché.Enfait,ceratioestlerapportentre la liquidité de marché (qui est, rappelons-le, une réserve externe de liquidité) et la liquidité de financement, qui retrace un besoin de financement à très court terme des banques. Certes, le régulateur contraintlesbanquesàdétenirdesactifstrèsliquidesetévite,dansune certaine mesure, la liquidation à « prix cassés » d'actifs pour faire face àunecrised'illiquiditéouàdesphénomènesdefuite« verslaqualité », c'est-à-dire, dans ces situations, vers la liquidité. Mais le ratio ne peut limiterquepartiellementlerenforcementmutueldurisquedeliquidité de marché et du risque de liquidité de financement car en situation de crise d'illiquidité, les banques qui normalement ont toutes réglementairementconstituécesréservesd'actifstrèsliquidesdoiventlesliquider en même temps, faisant brutalement chuter leur prix et donc leur contre-valeur en monnaie. Cela étant, le régulateur, à juste titre, s'est bien gardé d'introduire au numérateur le vivier de titres éligibles pouvant servir de garantie à un emprunt de liquidité sur le marché monétaire interbancaire ou auprès de la banque centrale. On sait que la réserve de liquidité banque centrale est quasi illimitée et il faut avant toutveilleràcequelesbanquessoientenmesuredetrouverlaliquidité surlemarchépouréviterdescomportementsd'aléademoralitédeleur part. Ensuite, il est clair que la composition du ratio LCR, mesure phare deBâleIIIdanslapréventiondurisquedeliquiditédesbanques,donne une place très importante aux obligations émises par les États dans les actifs considérés comme étant sans risque. Nous pouvons craindre que pour respecter ce nouveau ratio, les banques prêtent moins aux entreprises pour compenser leur détention d'obligations souveraines. Cela signifie que les banques seraient plus incitées à financer les États que l'économie.17(*) Cependant, la crise récente des dettes souveraines dans la zone euro a démontré que l'idée selon laquelle le défaut d'un emprunteur souverain de la zone euro est impossible ne tient plus. Cela conduiralesbanqueselles-mêmesàêtreplusdiscriminantesenmatière d'obligations d'État pour constituer leur réserve d'actifs liquides, certaines de ces obligations étant passées du niveau 1 au niveau 2, les plus risquées en étant exclues. Par ailleurs,beaucoupdesspécialistesvoientd'unmauvaisoeillamise en place du ratio NSFR qui remettrait en cause le métier même de la banque, à savoir la transformation des ressources à court terme en crédits à moyen et long terme, puisque ce ratio a pour objectif de contraindre les banques à utiliser des ressources stables à plus d'un an pour financer une partie considérable de leurs actifs longs, et ce, en situation de stress sur un horizon d'un an. On sait que l'une des spécificités des banques au sein des systèmes financiers, qui explique leur raison d'être, réside dans cette activité de transformation d'échéance qui ne peut avoir lieu sur les marchés financiers. Certes, cette activité ne disparaît pas, mais elle est réduite afin d'accroître la stabilité du secteur bancaire. La mise en place du NSFR pourrait donc aboutir à une augmentation des taux de crédit si les banques voulaient maintenir des marges suffisantes et, par voie de conséquence, à un ralentissement des crédits bancaires accordés à l'économie.18(*) En somme, La liquidité constitue un phénomène polymorphe et il existe différentstypesdeliquiditéetdoncderisquesassociés.Nousavonspumettre enévidence,autraversd'approchesthéoriques la notion du risque de liquidité. Nous avons ensuite analysé la prise en comptedurisquedeliquiditédanslesaccordsdeBâleIIIautraversdes nouveauxratiosLCRetNSFR.Certes,cettepriseencompteconstitue une avancée. * 15COMITÉ DE BÂLE SUR LE CONTRÔLE BANCAIRE (2010), Bâle III : dispositif international de mesure, normalisation et surveillance du risque de liquidité. * 16 IDM * 17 YOUSSEF AZZOUZI IDRISSI et PHILIPPE MADIÈS ; Risque de liquidité, définition et interaction. Page 315 * 18 IDM |
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