Inventaire de quelques vestiges coloniaux matériels dans la ville de Dschang(1907-1957)par Yannick Guerin Diffouo Universite de Dschang - Master 2014 |
VI. PROBLEMATIQUELe thème de notre recherche: « Inventaire de quelques Vestiges coloniaux matériels dans la ville de Dschang (1907-1957) » suscite de toute évidence un certain nombre de questions. La problématique qu'il interpelle est un ensemble de questionnements que nous nous posons et qui vont guider ce travail. Dès lors, la question centrale de ce sujet est celle de savoir quels sont les vestiges matériels de la colonisation allemande et française dans la ville de Dschang et à quel état ils se trouvent. De cette question centrale découle plusieurs questions subsidiaires à savoir Dans quel contexte ou encore quelles sont les raisons qui ont poussé les administrateurs coloniaux ou les colons à procéder à l'édification de tous ces éléments marquant leur présence et qui, aujourd'hui, sont devenus des legs ? Quels sont les vestiges ou les traces des présences allemande et française dans la ville de Dschang ? Ces vestiges sont-ils encore fonctionnels ou en détérioration ? Quelles sont les raisons ayant provoquées leur détérioration? VII. HYPOTHESES DE RECHERCHEL'hypothèse générale qui se dégage de notre problématique est la suivante : les occidentaux ont laissé, pendant leur règne, de nombreuses traces dans la ville de Dschang qui sont constituées de la prison de Dschang, de l'usine de traitement du quinquina, du centre climatique etc. De cette hypothèse centrale, nous avons plusieurs hypothèses secondaires à savoir : Les indices de présence coloniale étaient construits par les colons pour besoin de sécurité, de domination, de divertissement et d'évangélisation. Il est possible de trouver plusieurs traces de la présence coloniale allemande et française dans la ville de Dschang. 1Théodore Nicoué Gahibor, Sources orales et histoire africaine, Approches méthodologiques, Paris, L'Harmattan, 2011, P.28. 17 Une partie des vestiges coloniaux est en détérioration à cause d'un manque d'entretien. VIII. METHODOLOGI EDans l'ambition de mener à bien cette réflexion et rendre notre travail original. Nous avons exploité une multitude de sources. Ainsi, nous nous sommes inspiré des sources orales, iconographiques, écrites et d'internet. Pour recueillir les sources orales, nous avons commencé par l'élaboration d'un guide d'entretien, comportant une quinzaine de questions, pour orienter notre collecte d'informations ; ensuite nous avons fait plusieurs descentes sur le terrain pour recueillir les informations. Le dictaphone a été impératif dans la mesure où nous ne nous sommes pas fié au premier venu; Plus d'importance a été accordée au témoignage oculaire car « il possède une grande valeur, parce qu'il s'agit d'une donnée primaire, "immédiate", vécue, non transmise. C'est une source pour laquelle les aléas de déformation du contenu sont minimes. 1». Nous avons utilisé la méthode d'échantillonnage par choix raisonné qui consiste à tenir compte des critères comme l'âge, la profession, le rang social, le sexe pour avoir l'information. Enfin nous avons procédé à la transcription de ces données du terrain en les mettant sous la forme utilisable lors de la rédaction de notre travail. Pour compléter les données recueillies de ces entretiens, nous avons exploité les sources iconographiques et audiovisuelles. Puisque nous parlons des traces de la période coloniale dans la ville de Dschang, l'accès aux données iconographiques à l'aide d'un appareil photo numérique, a été d'une grande utilité lors de nos descentes sur le terrain. Cela nous a permis de restituer cette présence coloniale en l'appuyant d'exemples palpables. Aussi certains informateurs sont allés plus loin en nous fournissant les images prises pendant la période coloniale, ce qui nous a permis de faire des études comparatives entre les anciennes images et celles prises par nous-mêmes sur le terrain afin de mieux apprécier les ajouts ou restrictions faits au fil du 18 temps. Comme le reconnait si bien Jacques Souliliou, dans la 4e de couverture de son ouvrage : « l'image, on ne le dira jamais assez, constitue aujourd'hui un enjeu considérable en Afrique subsaharienne où souvent les témoignages architecturaux concrets du passé ont été détruits ou sont voués à une disparition prochaine1.» Pour ce qui est des sources écrites, nous avons été dans de nombreux Centres de Documentation parmi lesquels : les Bibliothèques Centrales des Universités de Dschang et de Yaoundé 1, les Bibliothèques de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Yaoundé 1 et de la Faculté de Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Dschang, la Bibliothèque de l'Alliance Franco-Camerounaise de Dschang, sans oublier celles de l'Ecole Normale Supérieure de Yaoundé et du Département d'Histoire de l'Université de Dschang, les Archives de la Sous-préfecture, de la Préfecture de Dschang, de l'IRAD, les Archives Régionales de l'Ouest, les Archives Nationales de Yaoundé, sans oublier les Archives et les Bibliothèques des particuliers2. Dans ces centres de documentation, nous nous sommes intéressés aux mémoires, aux thèses, aux ouvrages, aux revues scientifiques, aux actes de colloques. Bref, à tout ce qui, écrit, pouvait nous renseigner sur les vestiges coloniaux au Cameroun en général et dans la ville de Dschang en particulier. Pour l'analyse de ces données écrites, nous avons adopté une approche analytico-systémique, pluridisciplinaire, dialectique et d'observation. La démarche systémique est un cadre méthodologique qui permet d'analyser les choses non pas isolément, mais globalement, en tant que partie intégrante d'un ensemble dont les différentes composantes sont dans une relation de dépendance et d'influence réciproque. La pluridisciplinarité3 nous a conduit à impliquer dans notre démarche des concepts et des approches d'analyse venant des sciences connexes comme la 1 Jacques Souliliou, Douala, Un siècle en images, Paris, L'Harmattan, 1989. 2 Nous pensons ici à la riche bibliothèque du Pr. Albert-Pascal Temgoua, du Dr Célestine Fouellefak Kana et de Papa Réne Poundé. 3Lire à ce propos E. Morin, « L'interdisciplinarité », in http://perso.club-internet.fr/nicol/ciret/bulletin/b2c2.htm., consulté le 23 juin 2013 à 13h 19 sociologie, la géographie, le droit et la science politique. Les travaux des Sociologues par exemple nous ont aidés dans le cadre de l'étude des comportements ou des habitudes des populations qui rappellent la période coloniale. La géographie liée à la science politique nous a aidés dans la compréhension des stratégies coloniales de domination de l'espace (concernant le lieu propice de construction des infrastructures) en vue d'une meilleure défense des intérêts de la métropole. La critique, fondement même de la discipline historique, nous a permis de nous approcher le plus possible de la vérité historique comme le souligne Paul Harsin « une chose est considérée comme historiquement vraie lorsqu'elle a subi avec succès l'épreuve de la critique historique»1. Ainsi, le but visé par la critique historique est celui de la recherche de la vérité historique et, un fait, un témoignage, un texte n'est vrai qu'après un exercice de critique objective ; car c'est lui qui en mesure le degré d'objectivité. Toutes ces différentes méthodes d'analyse nous ont permis d'être proche de la vérité. Il est arrivé des moments de confusion où deux témoins donnaient des informations convaincantes et contradictoires sur l'auteur d'un édifice colonial. L'un, se basant sur le matériau (terre cuite) et la solidité du bâtiment et l'autre sur la date inscrite sur celui-ci. C'est sur le terrain après observation attentive et analyse du bâtiment que nous avons pu détecter la tricherie française d'appropriation de l'héritage matériel allemand. En fait, les Français une fois à Dschang, voulaient détruire tout ce qui était allemand, mais se rendirent rapidement compte de la très grande importance des bâtiments allemands dans leur administration. Ils optèrent donc pour l'inscription sur ces édifices des dates correspondant à leur période de règne. 1 Paul Harsin, Comment on écrit l'histoire, Liège, Georges Thone, 1954, p3. 20 Photo 1: Illustration d'une falsification de l'auteur d'un bâtiment colonial Source : Cliché Y.G. Diffouo, Mars 2014, Dschang Photo 2 : Une date problématique Source : Cliché Y.G. Diffouo, Mars 2014, Dschang Le bâtiment en haut (Photo 1), qui abrite les Archives Départementales, est fait en briques de terre cuite (matériau de construction allemande) et la date 1926 (présence française à Dschang) de la photo 2, prélevée sur le point noir en bas de la plaque sur le bâtiment, témoigne de l'action des Français contre la germanophilie. Nous nous sommes également appropriés et adaptés à notre champs d'action un des outils utilisés par les Conservateurs, il s'agit de la fiche technique d'inventaire (voir Annexe n°2) que nous avons utilisé pour inventorier, décrire et faire l'état de chaque infrastructure. Le meilleur traitement des données recueillies, à travers l'analyse et l'exploitation méthodiques, nous a permis de rédiger le présent travail en suivant la méthodologie de rédaction des thèses et mémoires enseignée au Département d'Histoire. Toutefois, ce travail n'a pas été fait sans difficultés. 21 |
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