III.2. L'illocutoire
D'après OSHIM (2008), l'illocution découle du
principe pragmatique selon lequel : « énoncer
quelque chose, ce n'est pas seulement transférer des informations, c'est
aussi agir. »Nous nous proposons ici de décrire les actes
illocutoires dans le discours d'investiture de Félix Antoine TSHISEKEDI
TSHILOMBO. Notre description s'inscrit dans la taxinomie des actes illocutoires
de J.R. Searle.
III.2.1. Structure interne ou
sémantique des actes illocutoires dans le discours de Félix
Antoine TSHISEKEDI TSHILOMBO.
Considérant la structure interne, soit
sémantique, l'acte illocutoire est constitué d'une part, de ce
que AUSTIN et SEARLE (1972) appellent respectivement « contenu
propositionnel » et « acte propositionnel » et,
d'autre part, d'une force ou valeur illocutoire.
Ainsi, dans ce discours, on peut relever ce qui
suit :
o Actes illocutoires représentatifs
v Assertion
D'après Dubois et alii. (1994), l'assertion est le
mode de communication institué par le sujet parlant entre lui et son (ou
ses) interlocuteur (s) et consistant à faire dépendre ses
positions d'une phrase implicite « Je te dis que »
(« Je porte à ta connaissance le fait que »),
énonçant une vérité, déclarant un fait.
L'interrogation dépend de la phrase implicite « Je te demande
si » et l'impératif ou injonction de la phrase « Je
t'ordonne que. » Tel est le cas dans les énoncés
ci-dessous :
L22-23 : Le peuple congolais a fait de chacun d'entre
nous des citoyens fiers de leur histoire et dignes dans la souffrance de leur
combat quotidien.
L24-27 : A cet instant où une partie de
l'aboutissement de ce combat prend toute sa dimension historique, notre peuple,
ce vaillant peuple combatif n'a jamais perdu espoir. Notre force collective
réside dans notre attachement aux valeurs universelles de paix, d'un
Etat de droit au service de chaque citoyen.
o Actes illocutoires directifs
v Ordre
Dubois et alii. (1994), appellent
« ordre » le mode, ou le type de communication
institué par le sujet parlant entre lui et son ou (ses) interlocuteur
(s) et consistant à faire dépendre ses propositions d'une phrase
implicite « Je t'ordonne que » (=Je te donne l'ordre de
faire). L'assertion dépend de la phrase implicite « Je te dis
que » et l'interrogation de la phrase « Je te demande si.
»
Illustrons cet acte par les énoncés suivants
:
L92-95 : Nos forces de défense et de
sécurité doivent être porteuses du
dialogue entre civils et leurs différents corps de métiers. La
gestion de nos forces de défense et de sécurité
doit se faire sans la moindre discrimination ethnique ou
sociale. A compter de ce jour, elles doivent
se sentir pleinement intégrés dans la nation par leurs
actes.
Le mot « devoir » est à comprendre
ici dans le sens d'une exhortation et d'un ordre. Il est repris trois fois par
le Président, Félix Antoine TSHISEKEDI TSHILOMBO. Autrement dit,
le Chef de l'Etat exhorte les agents de sécurité de bien vouloir
faciliter la tâche de collaboration entre civils et les corps de
métiers ; et cela sans discrimination.
v Interdiction
Par rapportà l'interdiction, OSHIM ESINGA (2006) dit
que l'expression sous-entendue de cette valeur illocutoire est
« je vous interdis ». En effet, l'interdiction, c'est
l'action de défendre. C'est ce que le Président exprime à
travers cet énoncé :
L201-203 : Nous avons la forte détermination
d'éradiquer tous les groupes armés nationaux et
étrangers qui continuent à sévir cette partie de la
République, plus particulièrement à l'Est de notre
territoire.
Au regard à cet énoncé, le Chef de
l'Etat a la détermination d'éliminer toutes les forces
négatives, qui sèment la désolation au sein de la
population sur toute l'étendue de la République et, plus
singulièrement, dans la partie Est du pays. En cherchant à
éradiquer tous ces groupes armés, il interdit donc implicitement
leur existence.
o Actes expressifs
v Souhait
D'après DUBOIS et alii. (1994), le mot vient du
verbe « souhaiter » signifiant « faire des voeux
pour quelqu'un, dans une formule de compliments ou de politesse. »
En partant de cette définition, nous disons que le
terme « souhait » a comme synonyme
le « voeu. » C'est une sorte de désir que
quelque chose s'accomplisse. C'est ce que nous lisons dans les lignes
suivantes :
L196-197 : Nous souhaitons que ces
objectifs se traduisent par l'adoption d'une nouvelle loi électorale
garante de l'équité pour tous les citoyens.
L420-421 : Je souhaite impulser
une meilleure présence de notre pays dans les instances internationales,
à la hauteur de notre vocation naturelle.
Dans ces deux énoncés, il ressort clairement la
volonté du Président de la RDC, d'intégrer le pays dans
les instances internationales, tenant compte de la richesse que renferme son
sol. En plus, il entrevoit l'adoption d'une nouvelle loi électorale afin
de bien conduireson pays dans la modernisation.
v Félicitation
D'après le Petit Robert (2016), la
félicitation est « le fait de complimenter quelqu'un sur un
succès, sur un évènement heureux, sur une conduite. »
..., c'est le cas dans les passages suivants :
L70-72 : Nous saluons la
contribution de différentes Confessions religieuses de notre pays dans
la considération du processus électoral, avec une mention
particulière à l'Église Catholique dont l'Accord de Saint
Sylvestre a été déterminant.
o Actes illocutoires promissifs
v Promesse
Selon Le petit Larousse (2013), ce substantif
signifie le fait de s'engager verbalement ou par écrit à faire,
à dire et à donner quelque chose à quelqu'un. Cela
transparaît dans les phrases suivantes :
L296-298 : Nous appliquerons des mesures
urgentes de modernisation des infrastructures, d'allègement des frais
académiques, d'actualisation des programmes et d'amélioration des
conditions de vie des étudiants et enseignants.
De cet énoncé, il ressort une pluralité
d'interprétations. D'emblée, le Chef de l'Etat promet urgemment
la modernisation des infrastructures au niveau national par l'utilisation du
futur en début de cet énoncé. Il a également promis
la réduction des frais académiques et l'amélioration des
conditions de vie coûteuses des étudiants et des enseignants.
En parcourant minutieusement le discours du Président
de la République Démocratique du Congo, à l'occasion de
son investiture, on lit en filigrane les soins que le Président a pris
pour recenser les atouts du moment (éléments positifs) et les
faiblesses éventuelles (éléments négatifs) du
gouvernement après son investiture à la présidence, ce24
Janvier 2019. Ainsi, nous les relevons dans les lignes qui suivent.
Par rapport aux atouts.
Dicos Encarta électronique (2009)
définit le mot « atout » comme avantage de quelqu'un
ou de quelque chose, éléments de succès.
Dansle Petit Larousse (2013),
« atout » signifie « la chance de réussir,
soit avantage de quelqu'un ou de quelque chose ; élément de
succès. » Ce succès se laisse entrevoir dans les
lignes suivantes.
v Remerciements.
Le remerciement, c'est le fait de reconnaître un
bienfait, un service qui a été rendu. Le Président
Félix Antoine TSHISEKEDI TSHILOMBO le reconnaît à
traversles lignes suivantes :
L28-31 : Nous tenons à rendre hommage à
tous nos héros, tous nos martyrs, à nos compatriotes qui sont
tombés sur le champ d'honneur pour la cause de la démocratie et
de l'alternance. Par reconnaissance, nous vous prions de vous lever une minute
de silence en leur mémoire.
L32 : Nous vous remercions.
L448-450 : Au nom du peuple Congolais que je
représente en ma qualité du Président de la
République, Je tiens à vous réitérer toute ma
gratitude pour avoir rehaussé de votre présence cette
cérémonie d'investiture.
A travers cet énoncé, le Président
remercie une fois de plusle peuple congolais et le félicited'avoir pris
part à la cérémonie de son investiture comme
Président de la RDC.
L4-6 : Nous ne célébrons pas
la victoire d'un camp contre un autre. Nous honorons un Congo
réconcilié.
Dans cet énoncé, la réconciliation du
peuple congolais face à son destin constitue un atout pour le
développement de la République.
Par rapport aux faiblesses
Dans Le Petit Robert (2013), « une
faiblesse est un état de ce qui est faible, de ce qui est
médiocre, insuffisant. » C'est ce que le Président
souligne implicitement à travers l'énoncé :
L394-395 : Nous comptons apporter une innovation
dans le cadre de projets communs en coopérant avec tous les pays de la
région, en commençant par nos voisins.
A travers cet énoncé, il se lit l'absence d'une
coopération entre les pays voisins.
Dans ce discours, force est de constater que le
Président Félix Antoine TSHISEKEDI TSHILOMBO a exprimé ses
visées communicatives en recourant à la fois à l'explicite
et à l'implicite.
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