Pour rappel, le libre-échange dont il est question
dans la présente étude, vise le développement des Etats
dans un espace économique (universel, régional ou sous
régional) bien déterminé. Ceci se concrétise par la
suppression des obstacles au commerce pour ainsi faciliter les échanges
des marchandises entre acteurs et opérateurs économiques
situés dans différents Etats. Il y a tout à gagner pour
les Etats dont les économies sont dynamiques. Celles-ci se verront
bénéficier d'une politique proposant des marchés plus
large favorables à un écoulement à grande échelle
des marchandises.
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152 Lepetit BAENDE, « La RDC va importer 5 millions de
tonnes de maïs de la Zambie » in Actualités, Deskeco,
Kinshasa, 2019,
www.deskeco.com,
consulté le 16 mai 2020 à 12h16.
prétendre à l'exhaustivité, les secteurs
économiques qui ont été ci-haut présentés
sont suffisamment illustratifs de l'état de santé du pays ; qui
plus est, ces données sont issues, pour la majorité, des
enquêtes et études effectuées par des organismes
internationaux habilités à la tâche.
On constate donc de toute évidence que le secteur
primaire sous-tend l'économie congolaise avec tous les enjeux qui en
découlent. Tout d'abord, l'écoulement des matières
premières et sa rentabilité sont tributaires des cours mondiaux ;
c'est-à-dire de la demande internationale. Pour preuve, nul n'ignore
sans doute les moments sombres de l'économie congolaise avec notamment
la chute du prix du cuivre dans les années 2015. Si la situation a
semblé se redresser en 2018 comme nous l'avons montré
précédemment, c'est grâce à la hausse du prix du
cuivre et du cobalt. L'état de santé économique est donc
précaire et très vulnérable au regard de cette
dépendance. Plus alarmant, la demande chinoise est la plus importante en
cette matière et la situation pandémique due au COVID-19 de 2020
ayant entrainé la fermeture des frontières et l'interruption de
certains échanges n'a pas manqué de réduire la performance
économique de la RD Congo.
L'impact positif du libre-échange est donc difficile
à envisager pour ce pays car comme souligné dans notre
hypothèse, en paraphrasant André Charles, la demande des produits
de base tels que les ressources premières a dans l'évolution du
commerce mondial, le taux le plus faible. Et donc le libre-échange n'est
pas animé par le secteur primaire, principalement, mais par la
diversification de tous les secteurs avec notamment le secteur
secondaire qui doit être capitalisé pour permettre
d'avantages d'exportations. Ce qui n'est pas de toute évidence
disponible en RD Congo ; d'où, le très faible taux d'exportation
des produits manufacturés. Les relations commerciales entre RD Congo et
Zambie sont éloquentes sur le sujet. Quoique dépendante de ses
ressources naturelles, le développement du secteur secondaire zambien a
longtemps nourri la RD Congo en toute une kyrielle de produits alimentaires
notamment : les poulets, cochons, canards, poissons frais, boites de conserves,
allumettes, huiles de cuissons, légumes, haricots, pommes de terre,
boissons gazeuses, fruits piments, farine. A ce sujet, il y a même eu le
02 octobre 2019 à Lusaka en Zambie la signature du Protocole d'accord
sur les importations du maïs de la Zambie vers la RD
Congo152.
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Ces importations de produits alimentaires ont aujourd'hui pour
effet de couper les producteurs agricoles congolais des marchés
principaux pour leurs produits, ce qui a entraîné une baisse de la
productivité agricole, la grande majorité des producteurs ayant
opté pour une stratégie d'autosuffisance, ne commercialisant que
le surplus occasionnel de leur
production153. Pourtant, la RD
Congo est en mesure de s'auto-suffire sur le plan agricole car elle
possède une réserve importante des terres arables après le
Brésil, les Etats-Unis d'Amérique, la Russie, la Chine et
l'Inde154.
Ainsi, l'important arsenal juridique que la ZLECAf, et les
communautés économiques régionales (CER) reconnues par
l'Union africaine offrent à cet Etat ne saurait servir aux
intérêts du pays quoique les protocoles de la ZLECAf contiennent
des exceptions visant à conforter les pays en difficulté pour une
meilleure intégration. Ces exceptions sont cependant limitées
dans le temps et sont accordées en attendant que l'Etat se stabilise.
Qui plus est, il sied de fustiger l'importante carence en mesures
concrètes visant à réaliser les objectifs contenus dans
l'Accord instituant la ZLECAf.
Nous épinglons ici deux objectifs
généraux (précédemment énoncés) qui
semblent non concrétisés : renforcer la
compétitivité des économies des Etats parties aux niveaux
continental et mondial et promouvoir le développement industriel
à travers la diversification et le développement
des chaînes de valeurs régionales, le développement de
l'agriculture et la sécurité alimentaire. Au-delà de
cet aspect lié à la réalisation des objectifs, il est
important de souligner le fait qu'en général, l'appartenance
à une organisation internationale engendre l'obligation de prendre part
financièrement à son fonctionnement. Ce qui veut dire, qu'autant
la RD Congo adhère à des organisations internationales, autant
elle se doit d'engager des fonds (des contingents) qui lui donnent droit
à la parole et à la décision au sein de ces
communautés internationales. Ceci, vous en conviendrez, gonfle le passif
du pays sans offrir des garanties nécessaires et concrètes en
termes d'actifs.
Ce sont donc là les principales raisons justifiant ce que
nous considérons comme étant « L'impossibilité
d'un impact du libre-échange continental » sur
l'économie de la République Démocratique du Congo.
153 Philippe LEBAILLYA, Baudouin MICHELA et Roger NTOTOC,
Quel développement agricole pour la RDC ?, ERAIFT-ULG,
Kinshasa, 2015, page 10.
154 Jean-René BOMPOLONGA, « Importation des
produits alimentaires : la RDC perd plus d'un milliard des dollars par an
», in Lephare, Kinshasa, 2011,
www.Lephareonline.net,
consulté le 16 mai 2020 à 11h36.