MASTER RECHERCHE EN DROIT
Option : Théorie et pluralisme
juridiques
Jouissance des terres et garantie
Mémoire présenté et soutenu
publiquement le 28 septembre 2021 pour l'obtention du Master Recherche en
Droit
Par
NDEODEME JULES
Titulaire d'une Licence en droit privé
Matricule : 20J0033N
Sous la direction de :
Monsieur le Professeur Pierre-Etienne
KENFACK
Agrégé des Facultés de droit
Professeur à l'Université de Yaoundé II
Année académique 2020 -
2021
AVERTISSEMENT
L'Université de Yaoundé II n'entend donner
aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans ce
mémoire. Ces opinions doivent être considérées comme
propres à leur auteur.
DEDICACE
A
Mes deux grandes familles,
celle de Papa Pascal BALDENA
etcelle de feu Papa GUISSATA
REMERCIEMENTS
Les mots sur cette page, ou même tous autres, ne peuvent
suffire à exprimer ma gratitude au Professeur Pierre - Etienne KENFACK.
Ses précieux enseignements, conseils et orientations ont permis de faire
de l'intitulé de ce mémoire un passionnant sujet de recherche et
un projet de vie.
J'exprime mes vifs remerciements à tous mes enseignants
de tous les cycles et de tous les niveaux.
Ma famille, mon soutien inconditionnel et ma source de
motivation. Je remercie, sans pouvoir exhaustivement citer, Papa Pascal, Mama
Bernadette, Mama Deved, Papa André, Mama Jeannette, Père Julien,
Oncle Badai.
Merci à vous mes amis, connaissances et camarades pour
vos divers accompagnements et encouragements. Vos prières portent leurs
fruits, je vous en remercie infiniment. Merci aux Avocats du Cabinet ABDOUL
BAGUI & Associés pour leur soutien et constants encouragements.
Merci à tous ceux qui l'ont relu. Toi ATEBA qui a été
brutalement arraché à la vie quelques temps avant
l'achèvement de ce travail que tu devrais relire, merci d'avoir
été très encourageant.
Seigneur Dieu, Toi qui fait toute chose en Ton temps et selon
Ton plan, merci mille fois pour Tes bénédictions multiples dans
ma vie.
RESUME
La propriété est considérée comme
le droit de jouir et de disposer d'une chose. Ces deux composantes de la
propriété peuvent survivre détachée l'une de
l'autre. Le droit de disposer constitue l'élément principal de la
propriété alors que le droit de jouissance peut lui être
autonome, bien qu'il ne s'agisse pas de son accessoire. La
propriété s'utilise comme objet de garantie de remboursement des
crédits. Il y a lieu de savoir si la jouissance des terres
particulièrement, peut aussi servir de garantie de remboursement des
crédits ? Lorsqu'elle constitue un droit réel
aliénable et saisissable, la jouissance des terres peut être
utilisée comme garantie de remboursement. Le bail emphytéotique,
le bail à construction, le droit de superficie et certains droits
réels dits innomés sont des démembrements du droit de
propriété pouvant constituer l'assiette de l'hypothèque.
Divers droits réels de jouissance sur les terres domaniales, s'agissant
des baux dans le domaine national ou le domaine privé de l'Etat, des
concessions provisoires, des autorisations ou concessions d'occupation ou
d'exploitation du domaine public artificiel déclassé et
même des droits des occupants et exploitants du domaine national avant le
05 août 1974, peuvent également constituer l'assiette de cette
garantie. L'hypothèque d'un droit réel de jouissance des terres
est indistinctement identifiée à l'hypothèque de
l'immeuble. La première a tout de même ses caractéristiques
propres tenant aussi bien à la nature de son assiette, distincte de
l'immeuble et du droit de propriété sur l'immeuble, qu'à
la créance qu'elle garantit. L'identification indistincte de
l'hypothèque d'un droit réel de jouissance des terres à
l'hypothèque de l'immeuble conduit à ce que l'ensemble, sinon
l'essentiel, des modalités de constitution et des effets de la
dernière lui soit appliqué. Ce recours aux règles
régissant l'hypothèque de l'immeuble voile pourtant certaines
particularités des droits réels de jouissance des terres et aussi
l'originalité de leur utilisation comme assiette d'une garantie. En
effet, le droit positif tente de lever ledit voile sans véritablement
s'y consacrer. Quelques règles spécifiques éparses
s'inspirant des caractéristiques des droits réels de jouissance
des terres sont prévues mais tout de même, il serait judicieux de
procéder à une conceptualisation desdits droits de jouissance et
d'organiser un régime spécifique à leur hypothèque
par la suite, toute chose devant amener la grande majorité à y
faire recours, les terres se faisant rares et les propriétaires moins
enclins à les disposer.
Mots clés : Droits réels
de jouissance des terres, hypothèque de jouissance des terres,
hypothèque de l'immeuble.
ABSTRACT
Ownership is seen as the right to enjoy and dispose of
something. These two components of ownership can survive separately. The right
of disposal is the main element of ownership, whereas the right of enjoyment
may be independent, although it is not one of its accessory. Property is used
as collateral for credit repayment. The question is whether the enjoyment of
land, in particular, can also be used as collateral for repayment of loans.
When it constitutes a real right that can be alienated and seized, the
enjoyment of the land can be used as security for repayment. Long leases,
building leases, building rights and unnamed real rights are dismemberments of
the right of ownership that can form the basis of a mortgage. Various real
rights of enjoyment over state-owned land, such as leases in the national
domain or the private domain of the State, provisional concessions,
authorizations or concessions to occupy or exploit a declassified artificial
public domain and even the rights of occupants and exploiters of the national
domain prior to 5th August 1974, may also constitute bases of this guarantee.
The mortgage of a real right of enjoyment of land is indistinctly identified
with the mortgage of the immovable. However, the former has its own
characteristics, both in terms of the nature of its basis, which is distinct
from the immovable and the right of ownership over the immovable, and in terms
of the claim that it secures. The indistinct identification of the mortgage of
a real right of enjoyment of land with the mortgage of the immovable leads to a
situation where all, if not most, of the procedures for the creation and
effects of the latter are applied to it. However,the recourse to the rules
governing mortgages on immovable propertiesdoes obscure special features of
rights in rem in respect of the enjoyment of land and also the originality of
using them as basis of a security interest. Indeed, positive law tries to lift
the said veil without really focusing on it. A few scattered specific rules
inspired by the characteristics of real rights of enjoyment of land are
provided for. However, it would be advisable to conceptualize the rights of
enjoyment of land and to organize a specific regime for mortgaging them.This
should lead the vast majority of people to make use of them, as land is
becoming scarce and owners are less inclined to alienate it.
Keywords: Real rights of use of land,
mortgage of use of land, mortgage of the immovable.
LISTE DES ABBREVIATIONS
Al. Alinéa
Arch. Phil. Droit Archives de Philosophie du Droit
Art. Article
AUDCG Acte Uniforme OHADA portant Droit Commercial
Général
AUPSRVE Acte Uniforme OHADA portant organisation des
Procédures
Simplifiées de Recouvrement et des Voies
d'Exécution
AUS Acte Uniforme OHADA portant organisation des
Sûretés
Bibl. Bibliothèque
Bull. Civ Bulletin Civil
Cass. Civ. Chambre Civile de la Cour de Cassation
Française
CCJA Cour Commune de Justice et d'Arbitrage
Cf. Confère
Coll. Collection
Cons Const. Conseil Constitutionnel
CS Cour Suprême du Cameroun
D. Dalloz
Dir. Sous la Direction de
Ed. Editions
JCP N Semaine Juridique Edition Notariale
JO Journal Officiel
LGDJ Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence
LPA Les Petites Affiches
Mél. Mélanges en l'honneur de
n° Numéro
Obs. Observations
OHADA Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires
Ohadata Banque de données de l'OHADA
p. Page
préf. Préface
PUA Presses Universitaires d'Afrique
PUAM Presses Universitaires d'Aix-Marseille
PUF Presses Universitaire de France
REDI Revue Européenne et de Droit
International
Rev. Loyers Revue des Loyers
RJ Com Revue de Jurisprudence Commerciale
RTD Civ. Revue Trimestrielle de Droit Civil
S. Sirey
s. Suivants
t. Tome
th. Thèse
v. Voir
Vol. Volume
SOMMAIRE
INTRODUCTION
GENERALE...................................................................1
PREMIERE PARTIE : LA POSSIBILITE DECLAREE DE
RECOURIR A LA JOUISSANCE DES TERRES COMME
GARANTIE........................................11
CHAPITRE I : L'IDENTIFICATION DES DROITS REELS DE
JOUISSANCE DES TERRES SUSCEPTIBLES DE
GARANTIE......................................................14
SECTION I : LES DEMEMBREMENTS DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE
CONFERANT JOUISSANCE ADMIS COMME OBJET DE GARANTIE..................15
SECTION II : LES DROITS REELS DE JOUISSANCE DES TERRES
DOMANIALES SUSCEPTIBLES DE
GARANTIE..................................................................23
CHAPITRE II : LA NATURE JURIDIQUE DE LA GARANTIE PORTANT
SUR LA JOUISSANCE DES TERRES : L'HYPOTHEQUE
...............................................31
SECTION I : L'IDENTIFICATION DE LA GARANTIE AU MOYEN DES
DROITS DE JOUISSANCE DES TERRES COMME
HYPOTHEQUE.......................................32
SECTION II : LES CARACTERISTIQUES DE L'HYPOTHEQUE DE LA
JOUISSANCE DES
TERRES..........................................................................................39
DEUXIEME PARTIE : UNE POSSIBILITE INCONSISTANTE
QUANT AUXMODALITES D'UTILISATION DE LADITE JOUISSANCE COMME
GARANTIE..........................................................................................48
CHAPITRE I : L'INCONSISTANCE PAR LE RECOURS DEMESURE AUX
REGLES DU REGIME DE L'HYPOTHEQUE DE
L'IMMEUBLE.......................................51
SECTION I : LE RECOURS AUX REGLES DE CONSTITUTION DE
L'HYPOTHEQUE DE
L'IMMEUBLE....................................................................................52
SECTION II : LE RECOURS AUX REGLES RELATIVES AUX EFFETS
DE L'HYPOTHEQUE DE
L'IMMEUBLE.............................................................59
CHAPITRE II : L'INSTITUTION D'UN REGIME SPECIFIQUE A
L'HYPOTHEQUE DE LA JOUISSANCE DES TERRES COMME SOLUTION
ENVISAGEABLE................65
SECTION I : UNE NECESSITE PARTIELLEMENT PRISE EN COMPTE
PAR LES
TEXTES................................................................................................66
SECTION II : UNE PRISE EN COMPTE A PARFAIRE POUR
INSUFFISANCES ET
INADAPTATIONS...................................................................................73
CONCLUSION
GENERALE......................................................................83
INTRODUCTION GENERALE
Un auteur affirme avec conviction que
« l'évolution du monde des affaires et le
développement économique ne peuvent s'effectuer aisément
que si des opérateurs économiques ont la possibilité et la
facilité d'accès aux crédits »1(*). Toute économie doit sa
croissance à la disponibilité du crédit et à son
usage. En effet, « le crédit est indispensable dans tous
les rouages de la vie économique, de la production à la
consommation»2(*).
Lorsque les entrepreneurs, investisseurs, producteurs et consommateurs n'ont
pas respectivement de fonds nécessaires à la mise en oeuvre de
leurs projets, à la réalisation de leur production et à la
satisfaction de leur besoin de consommation, ce qui est le cas pour la
majorité d'entre eux, ils recourent aux possibilités de
financement offertes par les établissements de crédits ou
mêmes par des fournisseurs et autres personnes impliquées dans la
vie des affaires.
Le crédit qui vient de credere (croire) se
définit comme le « soutien financier qui consiste en une
opération par laquelle une personne met ou fait mettre une somme
d'argent à la disposition d'une autre personne en raison de la confiance
qu'elle lui fait »3(*). La simple confiance, sans objectivité sur la
situation de celui qui fait la demande de crédit, n'est pas de nature
à déterminer l'offre de crédit, s'il ne s'agit pas d'un
don. Et un don suppose la cession d'un bien ou d'une somme d'argent sans
attente de remboursement. Il ne peut donc s'assimiler à un
crédit. Pour Max WEBER, le « crédit» au sens large
du terme [est] toute cession de droits de disposer de quelques biens
matériels que ce soit contre la promesse future d'une cession
équivalente de droits »4(*). La technique du crédit s'analyse en une
sorte d'échange « d'un droit de disposer de valeurs
matérielles ou monétaires, présentement non disponibles
mais disponibles en abondance dans l'avenir, contre un droit de disposition
disponible mais non destiné à l'usage de l'emprunteur
»5(*). Le
crédit participe de la mise à disposition de certains moyens en
vue d'atteindre certains objectifs ou de satisfaire des intérêts
déterminés, moyens sans lesquels ces objectifs ne seront jamais
atteints, ou peut-être seront-ils atteints tardivement. Pour
éviter que l'atteinte des objectifs ou la satisfaction des
intérêts soit improbable ou même impossible, tous peuvent
recourir au crédit en fonction de leurs besoins et de leur
possibilité de rembourser, cette dernière est la condition
essentielle de consentement au crédit. Les gouvernements encouragent
leurs citoyens à recourir aux crédits, de même qu'ils y
font recours également pour leur fonctionnement et pour la
réalisation de leurs programmes politiques.
La place primordiale du crédit dans le
développement des économies et des affaires est perceptible
à travers des rapports comme ceux établis par les organismes
financiers comme la Banque Mondiale. Cet organisme établit chaque
année des rapports appelés Doing Business6(*). Ces rapportssont les
résultats d'enquêtes et analyses prenant en compte divers aspects
de la vie des affaires. Il s'agit du classement des pays en terme d'ouverture
et de rentabilitédes investissements et donc des économies
favorables au développement des affaires. Le Cameroun occupe le
167e rang sur 190 pays dans le classement mondialDoing
Business2020. Ce classement met un accent particulier sur le facteur
financement7(*).
Le financement ou le crédit est intimement lié
au remboursement qui doit intervenir à l'échéance,
l'instant d'exigibilité de la créance. Le remboursement se
réalise de manière conditionnée puisque la
solvabilité du débiteur8(*) est le facteur déterminant. Dans les contextes
socio-économiques de sous-développement comme en Afrique
subsaharienne et au Cameroun particulièrement, les conditions
d'accès au crédit peuvent se trouver mieux organisées
alors que les modalités devant conduire au remboursement du même
crédit sont comme quasiment sous-organisées. Pour
bénéficier d'un crédit, il faut pouvoir rassurer le
financier sur les réelles capacités de rembourser9(*) et pour ça, des garanties
sont prévues. Selon le Lexique des Termes Juridiques10(*) la garantie peut être
l' « obligation mise à la charge d'un contractant
destinée à assurer la jouissance paisible de fait et de droit de
la chose remise à l'autre partie, alors même que le trouble ne
résulte pas de son fait ». Egalement, la garantie s'entend
comme ensemble des « moyens juridiques permettant de garantir le
créancier contre le risque d'insolvabilité du débiteur ;
en ce sens, il s'agit du synonyme de
sûreté. » La sûreté est bien moins
qu'une garantie dans la mesure où certaines garanties ne constituent pas
des sûretés alors que toutes les sûretés sont des
garanties. C'est précisément la définition du Vocabulaire
Juridique11(*) qui
explicite cette notion de garantie. Il la définit en effet comme :
« tout mécanisme qui prémunit une personne contre
une perte pécuniaire [...] c'est en réalité un
terme générique doté d'un sens d'évocation
employé seul et chargé de sens de précision associé
à d'autres ». Il rappelle que la garantie est parfois
synonyme de sûreté12(*), dans son sens strict, « mais une
sûreté n'est qu'une espèce de garantie ».
Sur la relation entre la garantie et la sûreté,
un auteur établit que la garantie est une notion fonctionnelle,
englobant la sûreté, et cette dernière n'est qu'une notion
conceptuelle13(*). Il est
plus approprié de retenir la garantie dans son sens strict qui
s'assimile à la sûreté telle que définie ci-avant.
La garantie peut donc s'entendre comme le mécanisme consistant
à affecter un bien ou un ensemble de biens, une propriété
ou tout un patrimoine, et éventuellementun droit de jouissance, à
la satisfaction du droit d'un créancier à être
remboursé. En effet, en vue du remboursement des crédits, le
droit de gage général14(*)est une garantie15(*) bien qu'il ne puisse malheureusement pas toujours
suffire à asseoir la conviction du financier sur la solvabilité
de son débiteur16(*) à l'exigibilité de la créance.
Dans la mesure où le droit de gage général ne
représente pas une garantie suffisante au remboursement, les chances
d'accès au crédit s'amenuisent considérablement.
D'ailleurs, « le seul droit de gage général ne permet
[...] pas au créancier de se prémunir contre
l'insolvabilité future du débiteur.»17(*)En plus du droit de gage
général, le droit a donc dû prévoir des garanties
offrant plus de sécurité au financier en vue de son remboursement
le moment venu. Les garanties de remboursement des créances sont
contenues dans divers textes communautaires18(*) et dispositions éparses, des lois19(*) et règlements20(*), et certaines techniques
adoptées par les établissements de crédits21(*) et les prêteurs n'en
constituent pas moins des garanties de recouvrement, peut-être moins
fiables mais tout de même utilisées. Il s'établit que
l'entrepreneur ou même toute autre personne nécessitant du
crédit a une panoplie de droits auxquels il peut faire recours pour
garantir le remboursement du crédit dont il a besoin. Initialement, le
code civil organisait les garanties autour des biens mais aussi des personnes
qui se portaient garantes du remboursement du crédit octroyé
à une autre personne. Les garanties sont dites personnelles pour
renvoyer à
l' « action supplémentaire »
d'une tierce personne à la garantie du remboursement au créancier
d'une dette contractée par une autre personne. Les garanties sont dites
réelles22(*) pour
établir qu'elles sont constituées sur des choses sur lesquelles
peuvent porter des droits réels c'est-à-dire des droits portant
directement sur la chose et procurant à son titulaire tout ou partie de
l'utilité de cette chose23(*). Ces biens sont classés en deux groupes, les
meubles et les immeubles. Il y a notamment d'un côté les meubles
par nature, par anticipation et par détermination de la loi, et de
l'autre côté il y a les immeubles par nature, par destination et
par l'objet auquel ils s'appliquent. Sur les meubles sont notamment
constitués le gage, le nantissement, le droit de rétention, les
privilèges généraux et spéciaux. Sur les immeubles
étaient constitués l'hypothèque et
l'antichrèse24(*)
en plus des privilèges généraux accordés à
certains créanciers sur les immeubles de leurs débiteurs.
Les garanties réelles ont connu une certaine
évolution et aujourd'hui, elles portent aussi bien sur les biens que sur
le droit de propriété25(*) d'une personne sur des biens déterminés
ou simplement déterminables. Ce qui fonde la spécificité
des nouvelles garanties ainsi inventées ou
réutilisées26(*) et portant sur la propriété, ce sont
les modalités de leurs réalisations27(*). Les garanties classiques sont
réalisées difficilement puisque très souvent les biens
objet des garanties n'appartiennent pas aux créanciers et ceux-ci
doivent vendre lesdits biens de leurs débiteurs ou peut-être
demander que la propriété leur en soit attribuée.
Pourtant, dans le cadre des propriétés garanties, les biens
appartiennent aux créanciers - même si cela n'est pas souvent
accompagné de la possession et ou de la jouissance du bien - ou
même, ils possèdent le bien et en jouit bien que la
propriété dudit bien ait été cédée et
ils ont les garanties qu'offrent, en plus, les actions pétitoires et
possessoires auxquelles ils ont la possibilité de faire recours, le cas
échéant.
Ainsi donc, un bien peut être utilisé comme
garantie, la propriété du même bien peut également
être utilisée à cette fin. Souvent, dans le cadre des
propriétés garanties ou même dans le simple exercice des
prérogatives conférées sur les terres par le droit de
propriété ou la loi, un tiers peut bénéficier du
droit de jouissance.
La jouissance est une notion juridique qui dérive de
jouir et en latin, il s'agit de `gaudere'. Selon le Doyen Cornu, la
jouissance peut s'entendre d'une part, comme des
« bénéfices et avantages divers attachés
à la possession d'un bien ou d'un patrimoine ». D'autre
part, la jouissance est entendue comme « l'usage (usus, droit de
se servir personnellement de la chose) jusqu'à désigner parfois
une espèce particulière d'usufruit (jouissance légale des
parents), mais s'oppose toujours à la disposition du capital
frugifère(la chose objet de jouissance) »28(*). La jouissance peut
être définie comme « l'utilisation d'une chose
(usus) et le droit de percevoir les fruits d'une chose, de les conserver ou de
les consommer (fructus) »29(*). Puisque le droit de propriété30(*) offre trois attributs que sont
l'usus, le fructus et l'abusus, la jouissance c'est
la réunion de l'usus et du fructus. Tout de
même, l'un comme l'autre peut exclusivement constituer la jouissance. Il
n'est pas exclu par ailleurs que la jouissance se fasse en vertu d'aucun droit,
c'est la jouissance de fait. Peu importe, il s'agit de la jouissance des terres
lorsque des biens immeubles sont concernés.
La terre peut être assimilée au mot
« terrain » qui dérive de la même racine.
L'adjectif terrain31(*)
dérive du latin terrenum ou terrenus, ce qui est
formé de terre. Abstraitement, terrain renvoie à l'idée
d'étendue, de limites. Il s'agit du « synonyme de champ ou
de domaine d'application » ou même du « lieu
auquel se circonscrit un débat (terrain de discussion) ou un accord
(terrain d'entente) »32(*). Concrètement, c'est « une
parcelle de terre, portion de territoire ». La terre emprunte la
définition concrète du terrain, c'est les parties ou portions du
globe33(*), c'est aussi
l'étendue du territoire d'un Etat, d'une région.
« Jouissance des terres »comme
expression, au regard des définitions ci-avant retenues, s'entend
comme l'usage par habitation ou par exercice d'activités
économiques diverses sur desterres et le droit de percevoir ainsi que de
disposer des fruits issus de cet usage des terres. La jouissance par
habitation consiste en l'érection des constructions en vue d'y habiter
ou même la prise de possession des constructions déjà
érigées et leur éventuelle amélioration pour y
habiter. La jouissance des terres sert à une activité
économique à partir du moment où les terres et
constructions érigées sont louées ou sous louées et
utilisées dans le cadre d'activités professionnelles civiles,
artisanales, industrielles et commerciales diverses. Les conventions ouvrant
droit à jouissance déterminent en bien des cas la nature de la
jouissance dont bénéficie le titulaire, toujours est-il que
l'utilité économique de la jouissance est conséquente.
La jouissance des terres qui est un droit exercé par
une personne sur des terres peut être cessible ou non. La jouissance des
terres peut découler de l'exercice des attributs
sus-évoqués du droit de propriété sur des terres
que de la simple possession ou plus encore d'une jouissance de fait qui peut
même être réprimée. Un auteur explique à ce
propos que : «au Cameroun, deux types de prérogatives sont
reconnues et protégées au profit des personnes et
communautés sur les terres : la propriété et la
possession.»34(*) Alors que la propriété ne pose pas de
difficulté sérieuse35(*) puisque c'est la situation
presqu'idéale36(*)
à laquelle tous doivent parvenir, il n'en est pas de même de la
possession. « La possession est la prérogative de fait
reconnue aux personnes et communautés qui, sans titre, occupent
paisiblement un espace du domaine national, en y édifiant leurs maisons,
plantations ou en y exerçant des activités
d'élevage. »37(*)Mais puisque la possession d'une chose ne
confère pas en elle-même un droit absolu comme la
propriété, il y a incontestablement un souci à
n'être que possesseur. Pire lorsque dans le contexte camerounais, la
propriété immobilière ne peut pas s'acquérir par la
prescription et que le titre foncier est la certification officielle de la
propriété immobilière38(*).
Il est important de signaler que la jouissance des terres peut
être de fait, c'est la simple possession sans aucun titre, une jouissance
de pur fait. Il est hasardeux de croire aussi que toute possession est
illégale puisque même sans titre, il peut être reconnu un
véritable droit réel à certains occupants et exploitants
du domaine national, ceux d'avant 05 août 1974 en occurrence. Sur ce
même domaine national, il peut être reconnu des droits réels
de jouissance à travers la concession provisoire et les baux. Dans ces
cas, il ne s'agit plus de la jouissance sans titre puisqu'un acte constate
toujours telle jouissance. Sur d'autres terres domaniales, certains droits
réels peuvent aussi être constitués. Il s'agit du droit
d'occupation et d'exploitation du domaine public artificiel
déclassé et des divers baux considérés comme droits
réels de jouissance sur le domaine privé de l'Etat lui-même
et de ses démembrements. En vertu de ces divers droits, les titulaires
réalisent des impenses. Ce sont des investissements qui
améliorent l'état des terres ou des constructions, installations
et ouvrages érigés sur des terres. Elles constituent des
plus-values d'une valeur économique certaine.
Les démembrements du droit de propriété
quant à eux sont de véritable droits réels et
confèrent, pour certains, un droit de jouissance. Il s'agit des droits
de l'usufruitier et des droits conférés dans le cadre des droit
d'usage et d'habitation, de superficie, des baux emphytéotique, à
construction et sont davantage admis divers droits réels de jouissance
spéciale dits innomés39(*). Les modalités de jouissance sont les
mêmes, elles consistent en la possession en vue de tirer des terres
diverses utilités économiques des constructions et
investissements réalisés par le cédant ou le cessionnaire
lui-même.
La jouissance des terres peut ainsi représenterune
prérogative, un droit conféré par la loi ou un
règlement, par une décision de justice ou par une convention, la
propriété est également une prérogative, un
droit40(*).Toutefois, la
propriété confère une prérogative absolue qui
recouvre sans conteste le droit de jouissance. Par ailleurs, la
propriété peut servir de garantie, c'est très ancien. Et
même cette garantie connait un régime consolidé par les
caractères absolu, définitif et perpétuel du droit de
propriété. Ces caractères ne sont pas tous reconnus aux
droits de jouissance des terres. La préoccupation est de connaître
si la jouissance des terres résultant de la propriété ou
de la simple possession peut servir de garantie. La jouissance des terres de
fait est impossible à constituer l'assiette d'une garantie pour le
simple fait de ne pas résulter d'un titre et donc de ne pas être
un droit véritablement établi ou conféré par un
texte. Pour le cas de la jouissance des terres exercéeen vertu d'un
texte de droit quelconque ou d'une convention des parties, la réponse ne
peut être aussi radicale et la question suivante se pose
réellement : la jouissance des terres de droit peut-elle servir
de garantie de remboursement des crédits ?
L'intérêt de répondre à cette
question découle de ce qu'elle permet de déterminer et
d'évaluer les droits de jouissance des terres pouvant servir de garantie
et les modalités suivant lesquelles cette garantie peut être
constituée et mise en oeuvre. Il a été relevé
ci-haut le lien étroit entre le crédit et la garantie. Bien
avant, dans une perspective socio-économique, ont été
montrés la place et le rôle des financements c'est-à-dire
du crédit sur l'évolution et la croissance des économies
ainsi que les répercussions sur les ambitions d'émergence des
nations. En effet, dans des contextes propres aux pays en voie de
développement comme au Cameroun et en Afrique globalement, le besoin de
crédit est primordial mais les crédits ne sont pas suffisamment
accessibles pour la majorité des populations du fait de leur niveau
d'insolvabilité très élevé41(*) pour certains et pour
défaut d'immeubles à proposer comme garantie pour d'autres,
l'hypothèque étant la garantie favorite. La possibilité de
varier et de diversifier l'assiette des biens et droits qu'ils offrent en
garantie au remboursement des crédits auxquels ils prétendent
améliore nettement leur chance.
L'étude de la jouissance des terres et garantie
s'attèle à montrer comment la jouissance des terres de droit
comme l'usage par habitation ou par exercice d'activités
économiques sur des terres et le droit de percevoir ainsi que de
disposer des fruits issus de cet usage des terres peut servir comme outil
aidant à prémunir un créancier contre une perte
financière qui surviendrait du fait de l'insolvabilité de son
débiteur qui bénéficie pourtant de certains droits de
jouissance des terres. L'idée est donc de ressortir dans quelles mesures
un créancier peut obtenir, de son débiteur qui jouit de droit
d'une terre, ladite jouissance pour assurer le recouvrement de sa
créance.
Pour trouverdes réponses à la question de
recherche posée, ont été utilisées, d'une part,
l'exégèse42(*) qui a servi pour étudier, analyser et
expliquer les textes internationaux et communautaires, législatifs et
règlementaires, les jurisprudences des diverses juridictions et les
travaux doctrinaux auxquels recours ont été faits aussi bien pour
expliquer les textes que pour explorer les solutions déjà
proposées et s'en inspirer. D'autre part, la méthode de la libre
recherche scientifique43(*) a été utilisée pour proposer des
solutions et faire des constructions juridiques à partir des logiques et
raisonnements établis en science juridique.
Le recours à ces méthodes ont permis de parvenir
au résultat selon lequel les droits réels de jouissance des
terres sont divers et tous ne sont pas susceptibles de faire l'objet de
garantie. Cette garantie s'identifie comme hypothèque. Cette
identification à la « mère des garanties »
fait transposer à la garantie portant sur les droits réels de
jouissance des terres l'essentiel des règles qui la constitue et qui
régissent ses effets. Les modalités d'utilisation des droits
réels de jouissance sont donc quasiment celles de l'hypothèque de
l'immeuble. A l'analyse, cette assimilation est un handicap à
l'utilisation desdits droits qui ne représentent simplement que des
utilités sur des terres. Des spécificités
déjà prises en compte doivent s'étendre et amener à
constituer une véritable garantie avec un régime
spécifique. Il y a donc une possibilité déclarée de
recourir à la jouissance des terres comme garantie (Première
partie). Tenant aux modalités d'utilisation de cette jouissance comme
garantie, ladite possibilité se révèle inconsistante
(Deuxième partie).Ceci par l'emprunt aux règles de
l'hypothèque, empruntfait quelques fois de manière insuffisante
et inadaptée d'où la nécessité de lui organiser un
régime juridique propre.La possibilité d'utiliser la jouissance
des terres comme objet de garantie est donc à recadrer.
PREMIERE PARTIE : LA
POSSIBILITE DECLAREE DE RECOURIR A LA JOUISSANCE DES TERRES COMME
GARANTIE
L'assiette des garanties peut être constituée par
les divers biens qui forment le patrimoine44(*) de toute personne physique ou morale selon telle
possibilité déclarée par le droit positif. Divers objets
et biens se développent et se créent du fait de la fulgurante
évolution scientifique et technologique depuis le XIXe siècle.
Selon qu'ils sont meubles pour la plupart, les biens fruits des avancées
technologiques et scientifiques entrent dans la catégorie des biens
meubles déjà déterminés pour faire objet des
garanties selon les modalités propres à ceux-là. Certains
de ces biens meubles sont incorporels45(*), ces derniers ont fait émerger la garantie de
nantissement. Tous les biens meubles comme immeubles, corporels comme
incorporels confèrent en réalité deux principales
prérogatives. L'une est celle de jouir du bien constituée de
l'usus et du fructusou parfois de l'un des deux seulement et
l'autre est celle de le disposer46(*), il s'agit de l'abusus.
Pour les immeubles, le droit de jouir est ce qu'il convient
d'appeler lajouissance des terres. Cette dernière s'analyse
beaucoup plus comme une approche fonctionnelle que conceptuelle du
mécanisme qui consiste à prendre possession des terres, de
les utiliser pour des besoins d'habitation ou pour des besoins
économiques comme le commerce, l'industrie, l'agriculture,
l'artisanat,...et d'en percevoir les fruits. Certaines formes de
jouissance des terres pourraient revêtir la nature d'un droit de
créance parce que ladite jouissance neserait que la contrepartie
d'une convention synallagmatique mise à la charge du propriétaire
de l'immeuble ou de celui qui en assure la garde47(*). D'autres formes de jouissance
par contre relèveraient de la nature des droits réels,
la jouissance dans ce cadre confère quelques attributs du droit de
propriété.
La jouissance des terres sous ses deux formes, droit de
créance comme droit réel, amène à poser la question
de savoir si elle peut constituer une garantie au remboursement d'un
crédit. Les garanties portent généralement sur les droits
réels, ce qui exclut les droits personnels de l'assiette des garanties.
Bien que les garanties portent sur les droits réels, il se pourrait que
tous les droits réels ne puissent pas être admis pour ce faire.
Les uns sont souvent soumis à condition et sont temporaires. Mais la
temporalité ne constitue forcément pas un obstacle à la
formation des garanties. Certains sont en effet inaliénables et donc
insaisissables. Les biens ayant de tels caractères ne peuvent être
utiles à un créancier puisqu'il ne pourra jamais les
réaliser et se faire payer, c'est dire que l'objectif de la garantie ne
pourra être atteint.
Ainsi, la possibilité d'utiliser un droit réel
de jouissance des terres comme garantie nécessite que les uns,
aliénables, saisissables et procurant une
utilité économique certaine, soient distingués des
autres qui sont inaliénables et insaisissables, procurant une
utilité économique certes mais sans intérêt pour un
prêteur qui ne peut les réaliser et assurer le remboursement du
crédit qu'il a consenti. Dans cette partie, il convient au
préalable d'identifier les droits réels de jouissance des terres
susceptibles de garantie (Chapitre 1). Ceci avec pour but d'entrevoir leurs
caractéristiques et donc de déterminer la nature juridique de
ladite garantie dont ils peuvent être l'assiette (Chapitre 2).
CHAPITRE 1 :
L'IDENTIFICATION DES DROITS REELS DE JOUISSANCE DES TERRES SUSCEPTIBLES DE
GARANTIE
Un droit réel, jus in re en latin, est un
droit qui porte directement sur une chose et procure à son titulaire
tout ou partie de l'utilité économique de cette chose48(*). Le droit réel
est très souvent opposé au droit de créance
considéré comme un droit personnel en vertu duquel une
personne nommée créancier peut exiger d'une autre nommée
débiteur l'accomplissement d'une prestation de donner, de faire ou de ne
pas faire49(*). Pourtant,
il reste admis de nos jours que les frontières entre les deux notions
deviennent de plus en plus floues du fait qu'il y a des droits mixtes comme les
obligations dites réelles50(*). Et même, les droits réputés pour
être personnels, comme les baux, empruntent plutôt beaucoup aux
caractères des droits réels51(*), si certains ne sont pas expressément
considérés comme tels52(*). La question qui se dégage en rapport avec la
garantie est celle de savoir si tous les droits réels sont donc
susceptibles de constituer garantie. Pour le droit réel par excellence
qu'est le droit de propriété, la question ne se pose
guère.53(*)
S'agissant des autres droits réels qui procurent une
utilité économique particulière à leurs titulaires,
la question reste posée. Ceci dans la mesure où sur une seule et
même chose, les droits appartiennent à deux ou plusieurs
personnes. C'est dire qu'une seule chose se trouve dans des patrimoines
distincts à traversle mécanisme de distribution des
prérogatives de propriété, selon les proportions
prévues par la loi, décidées en justice ou plutôt
convenues entre les parties. Comme évoqué ci-haut, les droits sur
la chose consistent soit dans le droit de jouir comme simple usage ou de
percevoir les fruits, soit dans le droit de disposer.
Le titulaire du droit de disposer54(*) est propriétaire et
dans ce cas, il est considéré que l'objet lui appartient et il le
met en garantie comme tout propriétaire. Le titulaire du droit de jouir
par contre tire simplement une utilité d'une chose appartenant à
autrui. Cette utilité, et non pas des moindres, représente une
valeur qui peut servir de base à la constitution d'une garantie, son
droit ne pouvant être en concurrence avec celui du propriétaire.
Mais les rapports entre les deux peuvent ne pas faire admettre la constitution
des garanties, l'aliénabilité étant la condition des
garanties. Les droits réels de jouissance des terres admis comme objet
de garantie sont quelques démembrements du droit de
propriété (Section 1) non frappés de condition
d'inaliénabilité. Au Cameroun, une forme particulière de
reconnaissance des droits réels sur les terres s'est
développée, il s'agit des droits en vertu des concessions,
autorisations et des baux sur les domaines. Ces droits réels de
jouissance des terres peuvent également faire l'objet de garantie, ce
sont des droits réels spéciaux (Section 2) quelques fois sujets
à condition.
SECTION 1 : LES
DEMEMBREMENTS DE LA PROPRIETE IMMOBILIERE CONFERANT JOUISSANCE ADMIS COMME
OBJET DE GARANTIE
La jouissance des terres s'envisage dans le cadre de cette
étude hors du cadre de jouissance propre à une personne sur des
terres objet de son droit de propriété. Le propriétaire ne
peut constituer en son nom un droit réel distinct de son droit de
propriété et l'affecter exclusivement à la garantie sauf
si cela est envisagé dans le cadre de création des
sociétés avec apport en nature du droit de jouissance. Dans ce
dernier cas, le droit réel de jouissance entre dans un patrimoine
distinct, celui de la société en question, et il peut constituer
un objet de garantie. Les droits réels sont donc réputés
pour faire objet de garantie mais pas tous. La condition pour faire objet de
garantie est que le droit réel doit être dans le commerce
c'est-à-dire aliénable et saisissable55(*). Pourtant, tous les
démembrements du droit de propriété accordant jouissance
sur les terres ne sont pas aliénables ou plutôt ils ne sont
aliénables que sous conditions. Il en est ainsi du droit d'usage et
d'habitation56(*) et
même de l'usufruit57(*) qui sont accordés en considération de
la personne qui en bénéficie et de ses besoins. Les servitudes
également ne sont pas susceptibles de garantie puisqu'elles sont des
services fonciers conférés en fonction de la nature et des
dispositions géographiques de certains fonds de terres desquels elles ne
peuvent être séparées. A contrario, certains baux
(Paragraphe 1) sont susceptibles de garantie à côté
d'autres démembrements déterminés du droit de
propriété (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les
baux, droits réels susceptibles de garantie
Le bail est un contrat de louage par lequel l'une des
parties appelée bailleur s'engage, moyennant un prix que l'autre partie
appelée preneur s'oblige à payer, à procurer à
celle-ci, pendant un certain temps, la jouissance d'une chose mobilière
ou immobilière58(*). A partir de cette définition, il
s'évince que le bail est considéré plus comme un droit
personnel qu'un droit réel. La question de l'admission du bail comme
droit réel se trouve donc âprement discuté et fait l'objet
de beaucoup d'écrits59(*). La relation qu'il implique semble être double.
La première relation est celle du preneur et du
bailleur, entre les deux il y a obligation de l'un envers l'autre, il s'agit
là d'un droit personnel. La seconde relation est toute autre,
c'est celle du preneur avec la chose louée. Le preneur a sur la chose
qui lui est louée un droit réel. Portant sur les terres,
la valeur économique de ce droit peut ne pas être suffisante pour
constituer garantie si ledit bail est de très courte durée et
fondé sur un système de loyers qui rémunère
exactement la valeur de la jouissance. Ceci pour la raison que ce bail ne peut
pas susciter la confiance d'un prêteur encore que le montant des loyers
à payer ne permettra pas forcément de procurer au
créancier la valeur dont il entend recouvrer. Mais il y a des baux
donnant droit réel de jouissance sur les terres pendant de très
longue durée en plus de représenter une valeur économique
forte, ils ne sont pas dépouillés de la temporalité mais
ils en viennent à pouvoir susciter confiance de la part du
créancier bénéficiaire. Il s'agit du bail
emphytéotique (A) et du bail à construction (B), qu'ils soient
des baux civils ou à usage professionnel60(*).
A. Le bail
emphytéotique
Le bail emphytéotique61(*) est un bail par lequel un propriétaire
concède la jouissance d'un immeuble pour une durée de 18 à
99 ans, moyennant une redevance annuelle modique appelée canon
emphytéotique et sous l'obligation de planter ou
d'améliorer l'immeuble loué, à un preneur
nommé emphytéote qui acquiert le droit réel
d'emphytéose62(*).
Il est clair à partir de cette définition que le
droit reconnu à l'emphytéote est un droit réel63(*), conféré
à une personne par le propriétaire sur ses terres. La
particularité de ce droit est qu'il est toujours de longue durée,
ce qui a l'avantage de constituer pour un prêteur, même pour celui
qui a consenti un prêt à long terme à l'emphytéote,
un droit qu'il pourra réaliser en cas de défaillance de celui-ci,
le débiteur de sa créance ou la caution, à
l'exigibilité de la créance et ainsi se faire payer par
préférence.
Il y a à distinguer le bail emphytéotique du
bail ordinaire puisque ce dernier est conclu pour une durée plus courte
avec des loyers de valeur élevée64(*). Le bénéfice est pourtant le
même, il s'agit de la jouissance des terres. En effet, les deux
défauts, relevés ci-avant, à mettre au passif du bail
ordinaire fait qu'il soit difficile de l'admettre comme droit réel
susceptible de garantie65(*). Dans certains cas, les baux ordinaires sont
intransmissibles et conclus avec la condition de ne pas pouvoir faire l'objet
de garantie. Ils n'autorisent pas la conclusion des baux par le preneur
à d'autres personnes sur les mêmes terres. C'est l'interdiction de
la sous-location. Contrairement aux baux ordinaires, les baux
emphytéotiques sont naturellement admis pour faire l'objet de
garantie66(*).
L'usufruit présente quelques caractères
semblables avec le bail emphytéotique, la réelle distinction
étant sur le point de ce que l'usufruit n'est pas toujours transmissible
et donc ne peut pas toujours faire l'objet de garantie. Les deux droits
confèrent le droit d'usage et le droit de percevoir les fruits des
terres, qu'ils soient naturels, civils ou même industriels. L'usufruit
résulte très souvent d'un contrat conclu intuitupersonae
ou même plutôt d'une disposition légale67(*). A son sujet, la doctrine
admet volontiers qu'elleest« peu pratiquée à cause
de la fragilité du gage qui s'éteint avec ce droit
temporaire. »68(*) L'usufruit est un droit réel de jouissance
à caractère viager et il reste admis que le simple fait de voir
ce droit disparaître aussitôt après le décès
du débiteur, jamais prévisible, n'est d'aucun secours à un
créancier qui croyait s'en prévaloir pour le paiement de sa
créance, même après le décès du
débiteur.
Le bail emphytéotique fort de sa longue
durée69(*) et de sa
valeur économique considérable se place donc comme un droit
réel de jouissance des terres pouvant incontestablement faire l'objet de
garantie70(*). Cette forme
de droit réel était à ses origines
considérée comme spécifique au domaine de l'agriculture,
c'est pour cela que s'est développée le mécanisme de bail
à construction qui a les mêmes caractères.
B. Le bail à
construction
Le bail à construction est un bail de longue
durée allant de 18 à 99 ans, qui, conférant au preneur un
droit réel immobilier, avec faculté de céder,
hypothéquer ou apporter ce droit en société, l'oblige
à édifier sur le terrain loué des constructions,
moyennant, en tout ou partie, la remise au bailleur des édifices et,
s'il est stipulé, un loyer révisable.71(*)
Ce qui a été dit pour le bail
emphytéotique est valable pour le bail à construction. Ainsi
donc, il s'agit tout aussi d'un droit réel de jouissance des terres
susceptible de garantie. Le preneur à bail a le droit de mettre en
garantie ses droits sur les terres qui lui sont données. Il est
considéré comme véritable propriétaire pendant la
longue durée de son bail72(*). Il est évident qu'avec la possibilité
de sous louer les constructions, la valeur économique qui se
dégage est considérable, ce qui peut notamment susciter confiance
de la part du prêteur de fonds.
Le droit réel de jouissance des terres qu'est le bail
à construction constitue avec le bail emphytéotique d'excellents
droits de jouissance à affecter à la garantie de remboursement.
Tout de même, ils ne sont pas les seuls démembrements du droit de
propriété ayant ces propriétés
économiques utilisables aux fins de garantie. D'autres
mécanismes comme le droit de superficie et les droits de jouissance
spéciale, en pleine reconnaissance et développement, peuvent
aussi constituer l'assiette des garanties.
Paragraphe 2 : Les
autres démembrements du droit de propriété susceptibles de
garantie
Le développement et la surpopulation des villes
conduisent à l'édification des habitations très denses
obligeant le recours à des techniques juridiques spécifiques
conférant des droits de jouissance particuliers73(*). C'est le cas du droit de
superficie (A). Il n'est pas qu'utilisé dans les milieux urbains pour
les constructions et ouvrages mais également dans les milieux ruraux
pour les plantations et cultures pouvant être faites sur des terres
appartenant à des tiers.
Avec la liberté contractuelle, il reste consacré
que des droits réels de jouissance spéciale sur les immeubles (B)
sont davantage imaginés. Ces droits s'apparentent à des droits
d'usage et parfois se rapprochent bien plus du droit d'usufruit ou même
encore du droit de superficie et des servitudes. Leur particularité est
que suivant les stipulations contractuelles qui les fondent, ils sont
aliénables et peuvent de ce fait faire l'objet de garantie.
A. Le droit de
superficie comme objet de garantie
Le droit de superficie74(*) est un droit réel qu'un propriétaire
appelé superficiaire exerce sur la surface d'un fonds, dont le
dessous ou tréfonds appartient à un autre propriétaire
appelé tréfoncier75(*). Au regard de son étendue76(*), il peut être
constaté que la qualification de propriétaire pour
désigner le superficiaire est quelque peu trompeuse, bien que la
doctrine et la jurisprudence tendent à facilement l'admettre77(*). La propriété
dont il s'agit est celle des constructions, des plantations, des ouvrages et de
quelques oeuvres établis sur la surface considérée. La
conséquence du fait de désigner comme propriétaire est
d'admettre que les prérogatives du superficiaire sont des
prérogatives de jouissance. Mais par-dessus tout, il reste
acquis qu'il a un droit aliénable, c'est un droit de disposer,
non pas de la propriété de tout l'immeuble ou des terres mais
seulement des ouvrages, constructions, plantations et toutes oeuvres qu'il aura
érigés. En France, le droit de superficie peut s'acquérir
par prescription comme la propriété des terres78(*) elle-même.
Dans le cadre des rapports sur la superficie, il n'y a donc
pas deux propriétaires des terres, il n'y en a qu'un seul, c'est le
tréfoncier. Sur ses terres, notamment sur le sol ou à une
certaine hauteur du sol, une personne appelée superficiaire qualifiable
de « jouisseur » exerce certaines prérogatives
semblables à celles d'un propriétaire. Le droit de superficie est
perpétuel et donc très rarement encadré dans le
temps. Le droit de superficie peut être accordé à plusieurs
personnes sous formes de volumes, chacune ayant son droit superficiaire pour un
volume déterminé, il s'agit de ce qui est appelé
volumes de propriété79(*). Les volumes de propriété se
distinguent de la copropriété en ce que le sous-sol et le sol et
certains volumes particuliers déterminent les droits des superficiaires
alors que la copropriété vise des lots constitués souvent
d'appartements et ne concernent jamais la division des prérogatives sur
le sol ou le sous-sol80(*). La qualification de volumes de
propriété pour qualifier une catégorie particulière
des droits de superficie recèle toujours une part de tromperie pour la
raison qu'elle vise à dire du titulaire du droit de superficie qu'il est
un propriétaire. Son droit peut être perpétuel et ses
prérogatives semblables à celles d'un propriétaire mais il
n'est pas un copropriétaire81(*), raison pour laquelle il ne peut être
désigné propriétaire82(*).
Le titulaire du droit de superficie bénéficie de
larges droits qu'il devient donc assimilable à un propriétaire,
ceci fait que son droit soit saisissable et d'une valeur économique
considérable. Mais à bien surestimer les prérogatives du
titulaire du droit de superficie d'autres aspects de ce droit peuvent s'en
trouver occulter pour au moins deux raisons :
- L'acte de constitution du droit de superficie peut contenir
une clause d'inaliénabilité, ce peut être la
volonté des parties. Mais bien plus, il peut s'agir d'un droit
révocable, ce qui le rend précaire, ce serait en vertu d'une
clause contractuelle.
- Le droit de superficie peut être
limité dans l'espace. C'est dire que bien que le
propriétaire tréfoncier dispose de larges terres, le droit du
superficiaire ne peut porter que sur une partie de ces terres.
Toutefois, le droit de superficie représente, en bien
de proportions,une utilité83(*) sur laquelle un créancier peut constituer un
droit de préférence pour se faire payer en priorité en cas
de réalisation mais simplement à condition que le droit de
superficie ne soit pas excessivement limité dans le temps et dans
l'espace et qu'il ne soit pas facilement révocable et frappé
d'inaliénabilité. Il en découle que les droits
réels de jouissance constitués sur les terres sont fonction des
stipulations contractuelles qui les constituent. C'est la résultante du
développement récent du droit de jouissance spéciale que
reconnait la Cour de Cassation française qui fonde sa décision
sur des dispositions relatives à la liberté contractuelle, en
vigueur au Cameroun.
B. Les droits réels
de jouissance innomés objet de garantie
Il s'agit des droits réels non pas
nommés84(*)
c'est-à-dire contenus dans un texte législatif ou
règlementaire mais plutôt innomés85(*) et donc créés
par des conventions conclues par le propriétaire avec un tiers pour
concéder à ce dernier un droit de jouissance que la jurisprudence
et la doctrine s'accordent à appeler « droit de jouissance
spéciale86(*) ». Il peut s'agir d'un simple droit d'usage
qui confère à son titulaire une certaine utilité
économique.Cependant, ce droit d'usage est dépouillé des
limites imposées par le code civil contenues aux articles 625 à
636. Quelques fois, le droit de jouissance spéciale prend le visage d'un
droit d'usufruit, pourtant, c'est un droit d'usufruit sans ses
caractéristiques principales disposées également dans le
code civil aux articles 578 à 624.
A travers le visa de l'article 1134 du code civil par la Cour
de Cassation, il se conclut que les droits réels de jouissance
spéciale sont des véritables créations des parties, pourvu
que les règles d'ordre public soient respectées. A titre
illustratif, pour la constitution de ces droits, et notamment pour ceux portant
sur les terres, la condition de validité des conventions sur les
immeubles étant le recours à un Notaire, il ne sera pas admis
qu'ils soient constitués par des actes sous-seing privé.
Les parties au contrat fondant le droit réel de
jouissance spéciale peuvent librement convenir de ce que ce droit
confère les mêmes prérogatives qu'un droit d'usufruit ou
même comme un droit d'usage et d'habitation mais tout en rendant ces
droits aliénables et donc susceptibles d'être objet
de garantie. C'est dire que les contrats peuvent être conclus
intuitu personae, ce qui ne peut donner lieu à constitution de
garantie. A contrario, les droits réels de jouissance peuvent être
concédés avec possibilité d'aliénation87(*) par le titulaire.
En bref, lorsqu'un droit réel de jouissance
spéciale extrait du droit de jouissance générale du
propriétaire est concédé sans réserve, il est
susceptible de faire l'objet de garantie. De même s'en trouve les autres
droits réels de jouissance que sont le droit de superficie, le bail
emphytéotique et le bail à construction. Tous ces droits
réels sont des démembrements du droit de propriété.
Toutefois, sans droit de propriété encore moins sans
bénéfice d'un de ses démembrements, l'exploitation et la
jouissance de certaines terres ne sont-ellespas possibles ? Cela est
envisagé au Cameroun dans les ordonnances fixant le régime
foncier88(*) et
domanial89(*). En effet,
des droits réels peuvent être constitués sur les terres
domaniales appropriées ou gérées par l'Etat. Les droits
réels de jouissances des terres susceptibles de garantie
procèdent souventdes conventions et actes ou situations de fait, portant
sur les domaines, et reconnus par l'Etat comme tels.
SECTION 2 : LES DROITS
REELS DE JOUISSANCE DES TERRES DOMANIALES SUSCEPTIBLES DE GARANTIE
En Afrique, au moment de la pénétration
occidentale, les vastes terres étaient considérées comme
vacantes et sans maîtres90(*). La conclusion était que les droits de
propriété n'étaient pas constitués sur elles. Au
Cameroun, depuis un peu plus d'une douzaine d'années après
l'indépendance, pour constituer les droits de propriété
sur des terres du domaine national où les titres n'ont jamais
été délivrés, il faut passer par la voie de
l'immatriculation directe pour les terres occupées et exploitées
avant le 04 août 1974 sinon la voie de l'immatriculation indirecte comme
bénéfice d'une concession définitive s'impose. Cette
concession est précédée d'une concession provisoire, droit
de jouissance temporaire. Au terme de la concession provisoire survientla
concession définitive et souvent le bail emphytéotique. Ces
droits réels sur le domaine national sont susceptibles de garantie
(Paragraphe 2).
Les droits réels de jouissance peuvent être
consacrés au profit des particuliers sur les autres domaines que sont le
domaine privé de l'Etat et de ses démembrements et sur le domaine
public artificielaprès déclassement et incorporation dans le
domaine privé de l'Etat. Pour le domaine public artificiel, les
autorisations ou concessions d'occupation temporaire remplissent quelques
caractères des droits réels qui sont seuls susceptibles de
garantie. Pour les terres du domaine privé de l'Etat proprement dit,
comme droits de jouissance, des baux ordinaires et emphytéotiques
peuvent être accordés aux particuliers91(*). Ainsi comme objet de
garantie, il y a aussi des droits de jouissance dans le domaine public et dans
le domaine privé de l'Etat (Paragraphe 1).
Paragraphe 1 : Les
droits réelsde jouissance dans les domaines public et privé de
l'Etat susceptibles de garantie
Le domaine public est une partie du patrimoine des personnes
publiques soumise à un régime juridique de droit administratif
très protecteur ; les biens classés dans cette catégorie
sont, tant qu'ils y demeurent, imprescriptibles et inaliénables et donc
insaisissables. La sortie d'un bien du domaine public résulte d'une
procédure dite de déclassement92(*). Le déclassement est la
procédure administrative qui consiste à retrancher un bien de la
catégorie de biens du domaine public artificiel afin de le classer dans
le domaine privé de l'Etat. Le déclassement mène, au
profit des particuliers, à l'autorisation d'occupation ou d'exploitation
temporaire du domaine public qui peut être traité comme
conférant un droit réel de jouissance susceptible de garantie
(A). Cette qualification donnée à ce droit réel de
jouissance portant sur des terres autrefois dans le domaine public conduit
à dire que, même étant admis dans le domaine privé
de l'Etat, un bien du domaine public a un statut particulier. Ceci est d'autant
plus vrai que ledit bien n'épouse pas l'une quelconque des
modalités de gestion du domaine privé de l'Etat, des baux (B) en
l'occurrence qui sont des droits réels aussi susceptibles de constituer
l'assiette d'une garantie.
A. L'autorisation
d'occupation temporaire du domaine public artificiel : droit réel
de jouissance susceptible de garantie
Le domaine public est vaste et supporte de nombreuses
activités publiques ou privées propices à la vie locale.
Ce patrimoine peut être valorisé économiquement et donc
représenter une source de revenu. Pour concilier les différents
usages et intérêts, leur mise à disposition et exploitation
requièrent une parfaite organisation. C'est pourquoi, même si le
domaine public est réputé « inaliénable et
insaisissable », il est possible d'accorder un droit d'usage
temporaire à une personne privée et de définir les
modalités d'utilisation et de gestion de ces lieux au travers d'une
convention ou d'un acte administratifs d'autorisation d'occupation ou
d'exploitation temporaire93(*).
L'autorisation d'occupation ou d'exploitation temporaire du
domaine public permet au titulaire d'occuper le domaine public ou de l'utiliser
de manière privative, c'est-à-dire dans des conditions
dépassant le droit d'usage qui appartient à tous94(*). Il y a des occupations
mineures du domaine public, c'est le cas de l'occupation des voies publiques
par les véhicules pour des parkings publics ou privés lorsqu'ils
sont autorisés par des permis de stationnement95(*). Ces occupations ne peuvent
pas en elles-mêmes constituer des droits réels susceptibles de
garantie. Les droits réels de jouissance des terres du domaine public
artificiel pouvant faire l'objet de garantie sont des terres visées par
des projets d'investissements et qui nécessitent le déclassement
en vue de l'incorporation au domaine privé de l'Etat. Le
déclassement et l'incorporation sont le résultat d'un
décret présidentiel96(*), ce qui démontre l'importance de l'acte mais
également la valeur économique de l'autorisation pour son
titulaire qui bénéficie en ce sens d'un droit réel
utilisable comme assiette de garantie97(*). Les droits réels portent sur les
constructions, les ouvrages et les installations érigés sur
lesdites terres du domaine public ainsi déclassées98(*).
Il reste en ce sens acquis que même sur le domaine
public artificiel, des droits réels peuvent être constitués
au profit des particuliers. Ceux-ci peuvent à leur tour les utiliser
pour bénéficier des facilités de crédit. La
contrepartie à payer pour bénéficier de ces autorisations
est de peu de valeur puisque ce qui est payée c'est une redevance et
jamais la valeur de la jouissance. Le canon emphytéotique payé
par l'emphytéote pour bénéficier du bail de longue
durée s'apparente à cette redevance. Tel bail est envisageable
dans le domaine privé de l'Etat et dans le domaine national.
B. Les baux sur les
terres domaniales susceptibles de garantie
L'une des modalités phares de gestion du domaine
privé de l'Etat ainsi que du domaine privé des autres personnes
morales publiques (collectivités territoriales
décentralisées, établissements publics, entreprises
publiques,...) est le bail emphytéotique99(*) calqué sur le modèle envisagé en
droit privé et donc contenu dans la loi de 1902 évoqué
plus haut. Le bail emphytéotique constitue également une
modalité de gestion du domaine national100(*). En effet, la conclusion du
bail emphytéotique est de droit lorsque le bénéficiaire
d'une concession provisoire arrivée à terme est un
étranger. Il n'est pas exclu que même pour un national l'option de
transformer la concession provisoire en concession définitive soit
rejetée pour être substituée par celle de la transformation
en bail emphytéotique.
La concession définitive mène à la
délivrance d'un titre foncier qui consacre le droit de
propriété définitif de son bénéficiaire. Par
contre, le bail emphytéotique représente un simple droit
réel de jouissance sur des terres déterminées avec parfois
de larges prérogatives101(*). Il s'agit d'un droit aliénable et
saisissable comme déjà démontré, ceci permet
à l'emphytéote de mettre le en garantie102(*). La durée du bail
emphytéotique sur les domaines est comprise entre 18 et 99 ans. Il
s'agit d'une durée relativement longue qui peut donc inspirer la
confiance du prêteur et servir de garantie au remboursement de son
crédit.
Le décret n°3450/PM du 11 août 2015
introduit une disposition contradictoire avec une disposition du décret
fixant les modalités de gestion du domaine privé de l'Etat. La
disposition est la suivante : « le bail sur un terrain
domanial confère au preneur un droit réel notamment susceptible
d'hypothèque. » Le décret fixant les
modalités de gestion du domaine privé de l'Etat exclut la
possibilité d'utiliser le bail ordinaire sur le domaine privé de
l'Etat comme objet de garantie103(*). La première disposition
évoquée étant récente et spécialement
consacrée à l'organisation des garanties sur les droits de
jouissance des terres domaniales, il pourrait être admis que le bail
ordinaire est un droit susceptible d'être cédé et donc de
faire l'objet d'une garantie. La question est donc entière de savoir si
une jouissance conférée par un bail ordinaire même sur des
terres domaniales peut être valablement utilisée comme objet de
garantie. Il serait difficile pour la raison qu'il est trop précaire et
trop temporaire. L'argument favorable à telle possibilité est le
fait que les loyers des terres domaniales sont très souvent des sommes
modiques et le preneur a la possibilité de sous-louer et donc de
spéculer. C'est sur la plus-value ainsi réalisable que peut se
justifier le recours à la garantie au moyen de la jouissance
conférée par le bail ordinaire sur des terres domaniales.
En bref, il faut conclure que l'autorisation d'occupation ou
d'exploitation temporaire du domaine public déclassé et les baux
domaniaux sont des droits réels de jouissance des terres susceptibles de
garantie parce qu'ils sont, d'une part, des droits réels, et d'autre
part, parce qu'il s'agit des droits procurant une utilité
économique considérable à leur titulaire, ce qui permet
notamment à leurs créanciers d'y fonder confiance et de faire
constituer leur droit de préférence sur leur valeur pour se faire
payer, en cas de défaillance du débiteur au moment de
l'exigibilité de la créance.
L'admission de la possibilité de constituer ce droit de
préférence sur les prérogatives de jouissance des terres
des domaines témoigne d'une certaine volonté d'élargir la
catégorie des biens constituant l'assiette des garanties. En
conséquence, c'est aussi la volonté de favoriser le recours au
crédit et de faire de chaque valeur économique admise dans le
patrimoine du débiteur, un bien qui pourra servir son
intérêt puisque le crédit qu'il est amené à
bénéficier est de son intérêt puis de celui de la
société toute entière. Il a de ce fait été
constaté aussi que la jouissance accordée à certaines
personnes sur le domaine national constitue également une valeur
économique incontestablement considérable dans le patrimoine de
son bénéficiaire, c'est la raison pour laquelle des droits
réels sont conférés sur cette jouissance en vue de
constituer assiette aux garanties.
Paragraphe 2 : Les
droits réels de jouissance sur le domaine national susceptibles de
garantie
Le domaine national est constitué des terres qui ne
sont pas classées dans le domaine public ou privé de l'Etat et de
ses démembrements ainsi que de celles qui n'ont pas fait l'objet d'une
appropriation ayant menée à la délivrance d'un titre
foncier. Les modalités de gestion de ce domaine sont l'affectation aux
personnes publiques, le bail et la concession104(*). Le bail emphytéotique comme assiette de
garantie a été vu précédemment.
S'agissant de la concession, elle est une technique par
laquelle l'Etat reconnait aux particuliers à travers un acte
administratif déterminé105(*) un droit de jouissance voire un droit de
propriété sur des terres. Les modalités de gestion du
domaine national qui l'instituent ne la définit pas mais en explique
amplement le mécanisme. Comme évoqué ci-haut, la
concession est double. Elle est définitive lorsqu'elle
mène directement à la reconnaissance d'un droit de
propriété définitif au profit du
bénéficiaire. Mais avant la concession définitive,
l'aspirant à la propriété des terres doit d'abord
bénéficier d'une concession provisoire qui lui permet de mettre
en valeur et faire des investissements sur lesdites terres. La concession
provisoire constitue une technique conférant un droit réel de
jouissance des terres susceptible de garantie (A) pendant sa durée.
Cette voie menant à la propriété définitive
constitue la voie de l'immatriculation indirecte. La voie de l'immatriculation
directe est offerte aux occupants et exploitants du domaine national avant le
05 août 1974. Avant l'immatriculation, leur droit est un droit
réel de jouissance des terres susceptible de garantie (B).
A. La concession
provisoire : droit susceptible de garantie
La concession provisoire est « octroyée
pour des projets de développement entrant dans le cadre des options
économiques, sociales ou culturelles de la nation106(*) ». Au
regard de cette disposition, il est clair que les investissements pour lesquels
les concessions provisoires sont octroyées ne sont pas limités.
Et notamment, les terres pouvant être accordées en concessions
provisoires peuvent servir aussi bien pour des besoins d'usage et d'habitation
des familles que pour des besoins commerciaux et économiques de toute
catégorie.
Les concessions provisoires constituent aujourd'hui la
principale voie d'accès à la propriété
immobilière sur les vastes terres du domaine national. 15% à
peine des terres occupées au Cameroun étant immatriculées,
la voie de la concession provisoire qui s'impose aux occupants et exploitants
du domaine national devient une technique majeure de reconnaissance des droits
réels107(*).
En effet, lorsque les terres concernées par la demande
de concession provisoire sont de moins de 50 hectares, la concession est
attribuée par arrêté du Ministre en charge des Domaines.
Lorsqu'il s'agit plutôt des terres dépassant la superficie sus
évoquée, l'attribution est faite par un Décret du
Président de la République. Dans tous les cas, un cahier des
charges détermine les droits et les obligations du concessionnaire.
La concession prend fin à l'expiration du délai
de 5 ans pour lequel elle est attribuée et exceptionnellement à
l'expiration du délai de renouvellement. Le décès du
titulaire met fin à la concession lorsque ses héritiers n'ont pas
demandé la cession à leur profit du droit de jouissance dont
bénéficiait le de cujus. Le non-respect des obligations
contenues dans le cahier des charges, l'aliénation sans le consentement
de l'administration, la mise sous procédure collective en cas de
cessation de paiements ainsi que la concession définitive sont d'autres
modes d'extinction du droit de jouissance que constitue la concession
provisoire.
Il s'évince de ce qui précède que la
concession provisoire est très précaire puisqu'elle ne dure que
cinq (05) ans et exceptionnellement plus. Mais elle constitue un droit
réel aliénable, sous quelques conditions, d'où son
admission comme susceptible d'être objet de garantie. Elle peut
même être un objet de garantie efficace pour des crédits de
court terme et de faible valeur. La concession provisoire est
érigée en droit réel susceptible de garantie aux termes de
l'article 18 alinéa 2 du décret sus évoqué fixant
les modalités de gestion du domaine national. Les dispositions dudit
article sont reprises par le décret n°2015/3580/PM du 11 août
2015 en son article 21. Toujours sur le domaine national, un autre droit
réel de jouissance est admis, pourtant aucun titre ne le constate. Il
s'agit d'une prérogative légale qui reconnait la jouissance
à certaines personnes et leur permet d'obtenir un titre foncier en vertu
de leur simple jouissance.
B. Le droit réel
de jouissance des occupants et exploitants des dépendances du domaine
national au 4 août 1974
L'article 17 de l'ordonnance fixant le régime foncier
dispose ainsi : « Les dépendances du domaine national
sont attribuées par voie de concession, bail ou affectation dans des
conditions déterminées par décret.
Toutefois, les collectivités coutumières,
leurs membres ou toute autre personne de nationalité camerounaise qui,
à la date d'entrée en vigueur de la présente ordonnance,
occupent ou exploitent paisiblement des dépendances de la
première catégorie prévue à l'article 15,
continueront à les occuper ou à les exploiter. Ils pourront sur
leur demande obtenir des titres de propriété conformément
aux dispositions du décret prévues à l'article
7. »
L'article 15 évoqué dans cette disposition est
relatif à la catégorisation du domaine national en deux
dépendances, la première est celle occupée ou
exploitée alors que la seconde est libre de toute occupation. Les terres
concernées par le deuxième alinéa de l'article 17
sus-cité sont donc les terres exploitées ou occupées
à l'entrée en vigueur de l'ordonnance fixant le régime
foncier. Il est clair qu'au profit desdites collectivités et personnes,
un droit réel de jouissance est reconnu. Un droit de jouissance qui plus
est susceptible d'être transformé en droit de
propriété à la simple demande de l'occupant ou de
l'exploitant.
Le droit dont sont titulaire les exploitants et occupants du
domaine national avant le 05 août 1974 est susceptible de garantie et
notamment d'hypothèque. Au moment de constituer cette
hypothèque, le Notaire doit requérir l'immatriculation des terres
occupées et exploitées au profit de la personne qui les occupent
et exploitent et entend donc les mettre en garantie. Ainsi, l'ordonnance fixant
le régime foncier a consacré un droit réel de jouissance
prêt à se transformer en droit de propriété lorsque
l'occupant ou l'exploitant demande l'immatriculation.
L'admission de ce droit de jouissance comme pouvant faire
l'objet de l'hypothèque est juste pour au moins deux raisons. La
première raison tient au fait que le droit de jouissance ainsi
consacré n'est en lui-même que temporaire, la difficulté
propre à une personne de procéder à cette conversion ne
doit donc pas occulter le fait que son occupation et son exploitation valent
d'importants investissements ou plutôt le fait que la
disponibilité du crédit permettrait lesdits investissements. Il
n'est pas faux que la reine des garanties étant l'hypothèque, un
immeuble ou des terres immatriculées lui seront demandés pour
l'octroi dudit crédit. Avec la possibilité d'utiliser un simple
droit de jouissance, les diligences nécessaires peuvent être
faites et le crédit octroyé.
Le domaine national regorge, au regard de ce qui
précède, l'essentiel des droits de jouissance des terres
susceptibles d'être mis en garantie de remboursement des crédits.
Les divers baux, la concession provisoire et les droits des exploitants ou
occupants du domaine national avant le 05 août 1974 sont les droits dont
bénéficient la grande majorité des camerounais.
En conclusion, quelques démembrements du droit de
propriété conférant jouissance des terres et
présentant préalablement des caractères
d'aliénabilité et de saisissabilité peuvent constituer
l'assiette d'une garantie de remboursement des crédits. Il en est de
même des droits réels que le législateur a bien voulu
conférer dans les terres des domaines à travers les
mécanismes sus évoqués. Le territoire camerounais est
largement constitué du domaine national, c'est la raison pour laquelle
les droits de jouissance conférés à ceux qui l'exploite
mènent majoritairement à l'acquisition de la
propriété. C'est le cas des droits des exploitants et occupants
du domaine national avant le 05 août 1974. Leur droit de jouissance doit
au préalable être transformé en droit de
propriété et les terres occupées ou exploitées
peuvent être hypothéquées. La nature de la garantie portant
sur ce droit est identifiée ; il s'agit de l'hypothèque.
Portant également sur les terres, la question se pose de savoir si les
autres droits réels de jouissance entrent-ils également dans
l'assiette de l'hypothèque.
CHAPITRE 2 : LA NATURE
JURIDIQUE DE LA GARANTIE PORTANT SUR LA JOUISSANCE DES TERRES :
L'HYPOTHEQUE
La nature juridique d'une institution renvoie à ce
« qui définit cette institution ; ce qui est de son
essence et de sa substance. C'est l'ensemble des critères distinctifs
qui constituent cette chose en une notion juridique108(*) ». La
nature juridique permet de déterminer le régime juridique de la
chose ou de la situation à appréhender. S'agissant des garanties
de remboursements des crédits, leur nature juridique s'identifie dans la
catégorie des droits réels dits accessoires ou de second
degré. Les droits réels accessoires sont des droits
attachés aux créances mais portant sur des biens
déterminés. Selon la distinction établit par GOUBEAUX, les
droits réels accessoires sont des accessoires non pas par production
mais simplement des accessoires par affectation109(*). Les bénéfices
de ces droits sont distincts des bénéfices des droits
réels principaux que sont l'usage, la jouissance et la disposition.
Selon le mécanisme du droit réel accessoire, « le
droit réel est vidé de sa substance matérielle ; il n'en
reste que les attributs juridiques - droits de préférence et
parfois de suite -, offerts au créancier afin de garantir son
droit110(*)».
L'unique raison de son existence est la créance garantie avec laquelle
elle disparait ou plutôt qu'elle permet de réaliser111(*), ce qui participe de ce
qu'un auteur appelle le « droit de disposer du bien d'autrui pour
son propre compte112(*). »
La catégorie des droits réels accessoires,
offrant le droit de préférence et un droit de suite en plus pour
certains, compte plusieurs garanties. Il y a des garanties mobilières
qui portent sur des biens meubles et des garanties immobilières portant
sur les immeubles. Il y a une catégorie des garanties qui portent sur
tous les biens qu'ils soient meubles ou immeubles. Ainsi, tous les biens du
débiteur, meubles comme immeubles,sont considérés comme
affectés en garantie de certaines créances113(*). La nature de droit
réel accessoire est tout de même discutée aux garanties de
cette catégorie (privilèges généraux), pour
défaut de droit de suite notamment.Certains auteurs s'accordent à
lui reconnaître cette nature seulement lorsqu'il s'agit de certains
privilèges accordant droit de suite ; c'est le cas du
privilège du bailleur.114(*) Les privilèges généraux sont
des traits d'union entre les biens meubles et les immeubles. Les garanties
portant spécialement sur ces derniers sont limitées et
strictement encadrées. D'ailleurs, c'est en droit français qu'il
est possible d'en recenser deux, exception faite des propriétés
garanties. Il y a notamment le gage immobilier, sorte de gage sur immeuble avec
dépossession du constituant. Puis il y a l'hypothèque115(*).
Comme évoqué ci-haut, la question se pose de
savoir si les droits réels de jouissance des terres comme droits
réels immobiliers constituent l'assiette de l'hypothèque ?
Ainsi donc, il s'agit de savoir s'il faudrait considérer une
hypothèque des droits de jouissance des terres. La garantie portant sur
la jouissance des terres s'identifie comme hypothèque (Section 1).
Pourtant, il est possible d'identifier des caractéristiques propres
à l'hypothèque des droits de jouissance des terres (Section 2),
ce qui pourrait faire de cette dernière une hypothèque
particulière.
SECTION 1 :
L'IDENTIFICATION DE LA GARANTIE AU MOYEN DES DROITS DE JOUISSANCE DES TERRES
COMME HYPOTHEQUE
L'hypothèque est définie comme droit
réel sur un immeuble affecté à l'acquittement d'une
obligation.116(*)
Plus largement, selon le Doyen CORNU, l'hypothèque est une
« sûreté réelle immobilière
constituée sans la dépossession du débiteur, par une
convention, la loi ou une décision de justice, et en vertu de laquelle
le créancier qui a procédé à l'inscription
hypothécaire a la faculté, en tant qu'il est investi d'un droit
réel accessoire garantissant sa créance, de faire vendre
l'immeuble grevé en quelques mains qu'il se trouve (droit de suite) et
d'être payé par préférence sur le prix (droit de
préférence)117(*). » Cette définition est non
seulement précise mais résume clairement tout le mécanisme
qu'est l'hypothèque. Identifier la garantie des droits de jouissance des
terres à l'hypothèque amène à se rendre à
l'évidence que l'objet commun est la terre (Paragraphe 1). Le
législateur en voulant opérer cette identification envisage pour
la garantie des droits de jouissance des terres les caractéristiques de
l'hypothèque (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 :
L'identification comme hypothèque au moyen de l'objet des deux
garanties
Les textes qui fondent118(*) les divers droits réels de jouissance des
terres évoqués plus haut postulent que l'hypothèque est la
garantie dont lesdits droits peuvent être l'assiette. L'assiette est la
« base matérielle sur laquelle porte un droit et qui
concourt à délimiter concrètement
celui-ci.»119(*)C'est aussi la « base
économique, valeur de référence qui sert au calcul d'un
droit ou d'une obligation (dette, cotisation).»120(*) La distinction de l'assiette
et de l'objet ne tient pas à grande chose. L'objet est en effet la
« chose matérielle, tangible ». L'objet renvoie
à la chose ou la matière et l'assiette renvoie de sa part
à la valeur.
Lorsque l'hypothèque porte sur l'immeuble ou sur le
droit de jouissance de l'immeuble ou des terres, l'objet est commun, c'est la
terre et donc l'immeuble. La propriété garantie porte sur les
terres et le gage immobilier porte sur le même objet. L'objet d'une
garantie est la chose matérielle sur laquelle il porte
directement.121(*) Cet
objet peut ne pas être divisé en valeur et dans ce cas, il se
confond avec l'assiette.
En effet, la communauté d'objet pour de
l'hypothèque lorsqu'elle porte sur l'immeuble entier et lorsqu'elle
porte sur un droit de jouissance des terres ne signifie pas unité des
droits concernés ni des valeurs économiques à
prétendre. Il faudrait envisager l'hypothèque comme portant sur
l'immeuble et donc, pour ce cas, ce qui est visé c'est l'immeuble tout
entier (A) et toute sa valeur, les droits de jouir et de disposer de
l'immeuble. L'hypothèque portant sur les droits de jouissance des terres
a une assiette claire et distincte, c'est le droit de jouissance de l'immeuble
ou des terres (B).
A. L'immeuble comme
assiette de l'hypothèque de l'immeuble
L'hypothèque porte généralement sur tout
l'immeuble et ses accessoires par production.122(*) Ce n'est pas la propriété de
l'immeuble qui est mise en garantie sinon il s'agirait d'une
propriété garantie. C'est l'immeuble tout entier comme un bien et
non comme le droit sur le bien. Certainement la distinction de la mise de la
propriété de l'immeuble en garantie suivant les techniques de
propriété retenue ou cédée, de la mise de
l'immeuble en garantie démontre bien que l'immeuble est susceptible de
divisions. Cette division est-elle économique ou juridique ?
Assurément, une telle division est difficile à clairement situer
en droit des biens. La division est tout au moins triple : l'immeuble
qui est le bien est distingué de la
propriété de l'immeuble qui est un droit et la
propriété elle-même peut être distinguée
du droit de jouissance de l'immeuble qui peut être un de ses
démembrements. C'est la conséquence de la distinction des
choses et des biens ainsi que des biens et des
droits123(*).
Ainsi divisé, l'immeuble peut être
envisagé pour faire l'objet de trois garanties distinctes.
L'hypothèque de l'immeuble, la
propriété-garantie de l'immeuble et la
jouissance-garantie de l'immeuble. L'objet de l'hypothèque qui
est l'immeuble et principalement sa valeur se distingue des autres de
manière plus claire au moment de sa réalisation. En effet, au
moment de la réalisation de l'hypothèque, l'attribution de la
propriété de l'immeuble au créancier n'est qu'une option
et jamais un automatisme. Cette attribution est automatique lorsqu'il s'agit de
la propriété garantie124(*).
Egalement, en réalisant l'hypothèque par la voie
de la saisie immobilière une solution exceptionnelle est avancée,
celle énoncée à l'article 265 de l'AUPSRVE qui dispose
ainsi : « Si le débiteur justifie que le revenu net
libre de ses immeubles pendant deux années suffit pour le paiement de la
dette en capital, frais et intérêts, et s'il en offre la
délégation au créancier, la poursuite peut être
suspendue suivant la procédure prévue à l'article
précédent. » Par ce mécanisme, le
débiteur peut affecter ses loyers au paiement de sa dette, il peut en
être de même pour un agriculteur qui justifie que ses cultures sur
ses propriétés terriennes hypothéquées peuvent
suffire à payer la créance au bout de deux
années125(*).
Il se dégage que lorsque l'immeuble est mis en
hypothèque, toutes les prérogatives et valeurs économiques
de l'immeuble sont mises à contribution pour assurer la mission de
désintéressement du créancier. A contrario, lorsque
l'objet de garantie est la propriété, seule cette
propriété désintéressera le créancier.
Lorsqu'il s'agit du gage immobilier, c'est la dépossession de l'immeuble
qui est opérée et les fruits sont affectés au
désintéressement du créancier. L'assiette de
l'hypothèque portant sur la jouissance des terres est à cette
suite distincte de celle de l'hypothèque portant sur l'immeuble.
B. Le droit de
jouissance des terres comme assiette de l'hypothèque du droit de
jouissance des terres
L'assiette de la garantie portant sur la jouissance des terres
est l'un quelconque des droits réels de jouissance des terres retenu
ci-haut. Ces droits se recensent parmi les démembrements du droit de
propriété. Ils se recensent également en tant que droits
réels accordés sur certaines terres domaniales.
Dans l'ensemble, il s'agit du bail à construction et du
bail emphytéotique aussi bien sur les propriétés
terriennes privées que sur le domaine national et sur le domaine
privé de l'Etat. Il s'agit d'autres démembrements du droit de
propriété que sont le droit de superficie et les droits de
jouissance spéciale innomés c'est-à-dire
conventionnellement stipulés et concédant la cessibilité
desdits droits. Il s'agit aussi des droits du titulaire de l'autorisation
d'occupation ou d'exploitation du domaine public artificiel
déclassé et de ceux du concessionnaire provisoire et des preneurs
à bail des dépendances du domaine national.
Chacun des droits réels évoqués ci-avant
confère à son titulaire une utilité et une valeur
économique déterminable en argent. Cette utilité et cette
valeur économiques sont affectées à titre accessoire
(comme assiette) à la garantie de remboursement. Le
mécanisme par lequel les droits de jouissance des terres sont
affectés à la garantie de remboursement est appelée
hypothèque tout comme celui de l'affection des terres. Ainsi, il se
détermine que la garantie portant sur la jouissance des terres et
l'hypothèque n'ont pas qu'une communauté d'objet, bien que les
droits donnés en garantie soient différents dans les deux cas,
elles ont aussi une communauté de nature juridique. Il s'agit de
l'hypothèque, ses caractéristiques seront
déterminées.Tout de même, il convient de signaler qu'elle a
un régime juridique dont les déclinaisons peuvent être
difficilement conciliables avec les caractéristiques des droits de
jouissance des terres.
Paragraphe 2 : Les
caractéristiques communes à l'hypothèque de l'immeuble et
à l'hypothèque des droits de jouissance des terres
L'hypothèque est accessoire126(*) à la créance
qu'elle garantit127(*),
c'est une caractéristique commune à toutes les garanties,
à l'exception de celles personnelles comme la garantie autonome et la
contre garantie. Il ne sera pas revenu sur cette caractéristique.
D'autres caractéristiques des garanties sont : l'indivisibilité
et la spécialité128(*) (B). Cette dernière est très souvent
avancée pour être un élément distinctif de
l'hypothèque129(*) puisqu'elle l'a originellement inspiré. En
distinguant l'hypothèque de l'autre garantie qu'est le gage immobilier
retenu en France, il se manifeste que la non dépossession (A) du
constituant constitue également sa caractéristique. La non
dépossession130(*) est souvent envisagée par certains auteurs
comme effet de l'hypothèque131(*) et cela n'est pas faux. En effet, elle n'est pas
exclue comme caractéristique de l'hypothèque, elle participe donc
de sa nature juridique.
A- L'hypothèque, une
garantie sans dépossession du constituant
Une garantie sans dépossession est une garantie
constituée sans que le débiteur ne soit privé de la
détention matérielle et de l'usage du bien qui en est
l'objet132(*).
Cette définition n'envisage la dépossession que pour le cas d'une
garantie constituée par le débiteur lui-même. Le
« débiteur » doit dans ce cas être
entendu comme le constituant, ce dernier est très souvent le
véritable débiteur de l'obligation principale. Mais le
« débiteur » peut aussi être un
tiers, une caution réelle par exemple, cette dernière est la
débitrice de l'obligation du premier en cas de sa défaillance,
c'est donc le « débiteur par
accessoire. »
La dépossession était la caractéristique
principale du gage dans le code civil. Dans l'espace OHADA, l'avènement
de l'AUS en 1997 a fait maintenir cette caractéristique du gage mais la
réforme de décembre 2010 l'abandonne. En France, cet abandon est
intervenu dans le cadre de la réforme du droit des sûretés
par l'ordonnance du 23 mars 2006. Le gage immobilier reste à nos jours
l'exemple topique de la sûreté avec dépossession133(*). Son avantage est
d'opérer, directement au profit du créancier, possession d'un
immeuble déterminé sur lequel, en percevant les loyers ou en
jouissant d'une manière quelconque, il assure directement le
remboursement du crédit qu'il a consenti134(*).
En droit OHADA, cette option n'a pas été
retenue, il en est que seule l'hypothèque est admise sur les immeubles
et les autres droits réels immobiliers. Dans le cadre de
l'hypothèque, la dépossession est remplacée par la
publicité dont l'importance n'est plus à démontrer. Pour
AYNES et CROCQ, l'hypothèque et la publicité forment un
« couple nécessaire »135(*). La non dépossession
du débiteur de ses terres et des droits réels immobiliers lui
permet d'épuiser son crédit sur l'immeuble, il n'est pas faux que
même étant mis en gage (cas du gage immobilier notamment), le
débiteur peut également hypothéquer son immeuble. La
différence entre les deux garanties est que la dépossession dans
le cadre du gage136(*)
permet directement le remboursement de la créance alors que
l'hypothèque ne peut être réalisée qu'en cas de
défaillance du débiteur et certainement à un moment
lointain de la constitution.
Ce que laisse observer le mécanisme de gage
immobilier137(*) est le
fait que c'est la jouissance des terres qui est affectée à la
garantie de la créance138(*) et ce dès sa constitution. Cette garantie
n'épuise pas l'immeuble puisque le créancier est tenu de le
restituer en cas de complet paiement de sa créance. L'hypothèque
de la jouissance des terres adopte les techniques de l'une et de l'autre
garantie immobilière prévues par le code civil français,
mais elle n'a pas été conçue dans le sens de constituer
une troisième. C'est pourquoi les autres caractéristiques de
l'hypothèque de droit commun lui demeurent acquises.
B- L'indivisibilité
et la spécialité de l'hypothèque
L'indivisibilité et la spécialité de
l'hypothèque sont admises pour protéger le créancier et le
débiteur, l'un contre l'autre, et les tiers à cette
relation.L'indivisibilité désigne l'état de
ce qui ne peut être divisé et doit être envisagé dans
son ensemble139(*).
L'hypothèque est indivisible par nature et subsiste totalement sur
les immeubles affectés jusqu'à complet paiement et malgré
la survenance d'une succession140(*). Sont concernés par l'indivisibilité,
l'assiette de la garantie c'est-à-dire l'immeuble ou les droits
réels immobiliers et aussi la créance garantie.
L'assiette est indivisible dans la mesure où tous les
immeubles ou les droits réels immobiliers affectés à la
garantie de la créance répondent de la totalité de cette
créance. Dans ce cas, l'un quelconque des immeubles ou des droits
immobiliers contenus dans l'assiette peut être réalisé sans
opposition141(*) du
constituant ou même de ses ayants droit.
La créance garantie est indivisible à double
sens142(*), passivement
et activement. De manière passive, les héritiers du
constituant sont tenus au désintéressement du créancier.
Et notamment, lorsque l'un quelconque d'entre eux a
bénéficié de l'immeuble hypothéqué dans sa
part successorale, l'hypothèque sera réalisée sur cet
immeuble. Ledit héritier pourra se retourner contre ses
cohéritiers pour le surplus payé sur la dette, qu'il a
lui-même héritée. De manière active, les
héritiers du créancier et l'un quelconque d'entre eux a le droit
de poursuivre la réalisation de l'hypothèque constituée au
profit du de cujus dont il est l'ayant droit.
Comme l'indivisibilité, de même, la
spécialité de l'hypothèque tient
doublement143(*)
c'est-à-dire quant à l'assiette de la garantie et quant
à la créance garantie. L'assiette de la garantie est
l'immeuble ou un droit réel immobilier. Cette assiette doit être
déterminée dans l'acte de constitution de l'hypothèque ou
tout au moins, cette assiette doit être déterminable. La
spécialité de la créance garantie144(*) est perçue dans le
sens où elle doit également être déterminée
ou tout au moins déterminable145(*).
Il y a une forte tendance à la relativisation de la
spécialité de l'assiette de l'hypothèque146(*) et certains
annonçaient en France son déclin147(*) avant de la voir être
maintenue par la réforme. Cette relativisation est aujourd'hui ce qui
fait admettre l'hypothèque des biens immeubles à venir148(*) prévue en trois cas
à l'article 203 de l'AUS149(*). D'ailleurs pour un auteur, la survivance du
principe de spécialité n'a pas été perçue
comme d'un avantage certain au système civiliste150(*). Pour l'auteur c'est la
conséquence du fait que le principe de spécialité a
été mal exploité depuis son adoption dans le code civil en
1804151(*).
D'après DAUCHEZ, la mauvaise exploitation dont s'agit tient au fait que
la doctrine et la jurisprudence associaient l'hypothèque au droit des
biens et au droit des obligations desquels il faut plutôt l'envisager
comme séparée et la rattacher au droit de gage
général qu'elle surabonde152(*).
L'objet sur lequel porte l'ensemble des garanties
immobilières est le même, c'est la terre, un bien immeuble. Mais
chaque garantie a une assiette qui lui est propre, c'est la valeur directement
affectée au bénéfice d'un créancier pour être
remboursé en cas de défaillance du débiteur. Pour
l'hypothèque connuegénéralement,son assiette est
constituée par l'immeuble ou les terres avec toutes ses valeurs. C'est
très peu connu que cette hypothèque peut aussi avoir pour
assiette des droits réels dits de jouissance des terres. Il a
été vu que c'est dans le sillage de la spécialité
que les droits réels immobiliers dont font partie également les
droits de jouissance des terres ont été prévus. C'est dire
en effet que ces droits et la garantie portant sur eux revêtent une
spécialité. Cette spécialité de la garantie ne peut
être révélée qu'à travers ses
caractéristiques.
SECTION 2 : LES
CARACTERISTIQUES DE L'HYPOTHEQUE DE LA JOUISSANCE DES TERRES
Lorsque l'hypothèque porte sur des droits réels
immobiliers et ceux conférant particulièrement droit de
jouissance, la nue-propriété exclue, ses caractéristiques
peuventêtre changées. Le cas échéant, en plus des
caractéristiques évoquées ci-haut, d'autres
caractéristiques peuvent s'ajouter.
Les droits réels de jouissance sur les terres
confèrent au profit de leurs titulaires un bénéfice
économique généré pendant un temps
déterminé. C'est sur ce bénéfice qu'est
placée la confiance du prêteur qui pourra assurer le remboursement
de sa créance au moyen de l'appropriation dudit bénéfice
économique. Très souvent, sa créance est née
à l'occasion de l'acquisition desdits droits réels de jouissance
des terres. Il semble être envisagé que la garantie au moyen de la
jouissance des terres participe de la reconnaissance au profit du
créancier d'une préférence attachée à sa
créance parce cette créance a permis l'exercice du droit de
jouissance par le débiteur qui constitue un enrichissement.
Ainsi, cet enrichissement doit pouvoir assurer le paiement de l'obligation dont
il est la conséquence directe153(*).
Les caractéristiques propres à
l'hypothèque de la jouissance des terres à envisager tiennent
d'une part à la nature de l'objet de la garantie (Paragraphe 1) qui est
donc nécessairement la jouissance des terres même.D'autre part,
les caractéristiques à relever tiennent à l'obligation
dont la garantie (Paragraphe 2) est l'accessoire.
Paragraphe 1 : Les
caractères tenant à la nature de l'objet donné en
garantie
Excepté le droit de superficie qui peut être
perpétuel, les autres droits réels de jouissance des
terres ne revêtent pas ledit caractère. Ce sont des droits
temporaire et précaire. Ainsi, la garantie a un caractère
temporaire et précaire (A). Ce sont des défauts qui affectent la
garantie constituée par le moyen desdits droits pour donc la rendre
limitée (B).
A- Caractère
temporaire et précaire
Un droit de jouissance est généralement
temporaire et précaire.
Le temporaire est ce qui n'a pas vocation à
l'éternité ou à la perpétuité. Le droit de
propriété est l'exemple de droit perpétuel, il ne se
prescrit pas par le non usage et survit à la mort de son titulaire,
c'est-dire qu'il est transmissible. Mais le droit de propriété
n'est pas le seul droit transmissible. D'ailleurs, sans la condition de
transmissibilité, aucun droit réel de jouissance des terres ne
peut constituer l'assiette d'une hypothèque. L'avantage avec
l'utilisation de l'immeuble comme bien ou de la propriété du bien
comme garantie est le fait qu'il n'est pas soumis à la condition de
temporalité que connaissent certains droits réels de jouissance
des terres.
Le bail emphytéotique comme le bail à
construction sont des droits temporaires bien qu'étant souvent de
très longue durée. L'autorisation d'occupation ou d'exploitation
du domaine public artificiel déclassé154(*) comme la concession
provisoire sont également temporaires. Le droit des occupants et
exploitants du domaine national avant le 05 août 1974 n'est pas
temporaire, c'est certainement parce qu'il s'agit d'un droit de
quasi-propriété immobilière155(*) puisque l'immatriculation
conduit à transformer le droit de jouissance en droit de
propriété complet c'est-à-dire perpétuel et
absolu.
Le droit de superficie est très souvent un droit
perpétuel aussi, mais il est possible qu'il soit constitué
à travers un contrat de bail à construction ou à travers
un contrat de bail emphytéotique156(*). Clairement donc le droit de superficie est un droit
qui peut découler d'autres droits réels157(*). Il peut même
être la résultante d'un contrat de jouissance innomé. Dans
cette dernière catégorie de droits, on trouve plusieurs droits
réels hybrides et mixtes empruntant aux caractères des uns et des
autres droits réels nommés. La condition pour que ces droits
puissent être admis comme objet de garantie est la libre
cessibilité qui doit être convenue ou déterminée
implicitement. Il demeure que les droits réels de jouissance des terres
sont des droits temporaires et de même en est donc la garantie dont ils
peuvent constituer l'assiette.
La précarité est le caractère de
ce qui est librement révocable au gré du maître d'une chose
(administration158(*),
propriétaire)159(*). Cette définition sied directement au droit
de jouissance des terres. D'ailleurs l'exemple que donne le Vocabulaire est la
précarité d'une occupation, il est entendu que la jouissance des
terres est une occupation. De ce fait donc, le caractère précaire
de la garantie tient à ce que le droit sur lequel elle porte
étant une concession, il est susceptible d'être restitué
à son véritable propriétaire à tout moment. Ceci
est possible lorsque le terme n'est pas certain160(*) ou lorsque les obligations
du titulaire du droit de jouissance ne sont pas remplies, entre autres le cas
des droits réels concédés sur les terres domaniales. La
précarité ne doit pas être exagérée car
lorsque la révocation du droit de jouissance est abusive,
l'indemnité compensatoire d'éviction devient de plein droit
l'assiette de la garantie161(*).
L'hypothèque de jouissance des terres est
considérablement entachée des caractères propres à
la jouissance des terres dont les plus remarquables sont le caractère
temporaire et le caractère précaire. La conséquence est
que l'hypothèque de la jouissance des terres, tout comme la jouissance
des terres elle-même, est limitée.
B- Caractère
limité
Les droits du titulaire du droit réel de jouissance des
terres ne sont pas absolus. Le terme absolu ne s'entend pas ici dans le sens de
l'opposabilité puisque tout droit réel est opposable à
tous162(*).
L'absolu désigne ce qui n'est pas limité163(*). Relativement au droit
réel de jouissance des terres, il y a une limitation qui peut être
matérielle mais nécessairement juridique.
La limitation matérielle est relative au fait
qu'un droit de jouissance peut porter sur une partie physique
déterminée de l'immeuble et peut aussi porter sur une partie de
l'utilité économique que procure les terres sur lesquelles le
droit de jouissance est concédé. A titre illustratif, le
superficiaire est matériellement limité à la superficie
qui lui est concédée. Concernant les droits réels sur les
terres domaniales, les limitations matérielles sont souvent contenues
dans le cahier des charges. Lorsque les terres objet de jouissance
relèvent du domaine public artificiel, la limitation est même
souvent large. En outre, il n'est pas exclu que le droit de jouissance porte
sur toutes les terres du concédant. Dans ce cas, il y a tout au moins
une limitation juridique.
La limitation juridique est relative au fait que
lorsqu'un droit réel de jouissance des terres est reconnu à un
tiers, il y a une division juridique de l'immeuble ou simplement de sa
propriété. Très souvent, la division est
opérée entre le droit de disposer et le droit d'user et de jouir.
Le droit réel de jouissance consiste au bénéfice du droit
d'user et / ou de jouir alors qu'il y a une autre personne titulaire du droit
de disposer. Le droit de disposer recouvre l'abusus qui constitue le droit
absolu sur la chose. Ce droit est tout de même affaibli par le
caractère réel du droit dont bénéficie le titulaire
de la jouissance. En outre, pour le cas des droits innomés, la
limitation juridique peut être floue en l'absence de stipulations claires
et précises. Souvent, « la jouissance est restreinte,
délimitée, spécifique. »164(*)
Le droit réel de jouissance des terres étant
toujours limité, de manière juridique au moins,
l'hypothèque de la jouissance des terres se trouve limitée. Elle
est limitée à la partie des terres concernée, à la
partie de l'utilité économique des terres concernée et
également au droit réel de jouissance déterminé. Le
fait que le droit réel de jouissance soit limité ne permet pas
forcément de mesurer l'étendue de l'assiette de la garantie. Bien
qu'elle soit déterminée, sa valeur peut être trompeuse. En
ce cas, le créancier peut arriver à mettre sa confiance en un
droit qui ne pourra véritablement pas participer à sa
satisfaction le moment venu.
La nature du droit réel de jouissance est peut
être limitée dans sa matière mais toujours limitée
sur le plan juridique. La précarité et la temporalité de
ce droit auxquelles il faut ajouter son caractère limité, sont
hérités par l'hypothèque de la jouissance des terres. Ces
caractéristiques font véritablement de ladite garantie une
particularité. Il existe quelques autres caractéristiques qu'il
est possible de recenser en rapport avec la créance garantie.
Paragraphe 2 : Les
caractères tenant à l'obligation garantie
L'hypothèque de la jouissance des terres est
constituée pour assurer le paiement d'une obligation principale. Il
s'agit d'une créance. Une créance est une obligation
considérée du côté actif, par opposition à
dette. C'est un droit personnel en vertu duquel une personne nommée
créancier peut exiger d'une autre nommée débiteur
l'accomplissement d'une prestation de donner, de faire ou de ne pas faire
quelque chose165(*). L'hypothèque est intimement liée
à l'obligation qu'elle garantit puisqu'il s'agit d'un droit réel
accessoire c'est-à-dire un droit qui suit le sort du principal qui est
la créance. Naturellement donc, la garantie est accessoire à la
créance garantie (A). Tout de même, la question se pose de savoir
si l'hypothèque de la jouissance des terres est vraiment
accessoire à l'obligation qu'elle garantit. L'institution de
cette hypothèque sur les droits réels de jouissance des terres
domaniales fait observer un mécanisme nouveau, c'est celui d'une
spécialité de la créance garantie par l'hypothèque
de la jouissance des terres (B).
A- Le caractère
accessoire des garanties aux créances garanties
Que ce soit l'accessoire par production ou plutôt
l'accessoire par affectation166(*), le sort d'un accessoire est bien rarement autonome
à l'égard du principal. L'accessoire est défini comme ce
qui est lié à un élément principal, mais
distinct et placé sous la dépendance de celui-ci, soit qu'il le
complète, soit qu'il n'existe que par lui167(*). La théorie de
l'accessoire met donc en lumière deux éléments, l'un
principal et l'autre accessoire. Le mécanisme de l'accessoire reconnu
aux garanties des créances par la jouissance des terres est le
même.
En effet, il y a une créance mise au passif du
débiteur qui a bénéficié d'un crédit. Le
débiteur est tenu de payer. Le créancier titulaire de la
créance a contre le débiteur ce qui est appelé un
droit de gage général168(*). Ce droit lui permet de saisir n'importe lequel
des biens de son débiteur pour se faire rembourser de la valeur exacte
de sa créance169(*). La multitude des créanciers à la
solde du débiteur peut mettre le créancier en mal, il peut
réaliser un bien et ne rien recevoir du produit de sa réalisation
ou plutôt recevoir une part infirme de ladite réalisation. C'est
ainsi que les garanties viennent avec un attribut particulier pour leurs
bénéficiaires. Il s'agit du droit de
préférence. Tant qu'un bien sur lequel un créancier a
un droit de préférence est réalisé, ledit
créancier utilise son droit de préférence pour être
payé en priorité à d'autres créanciers qui n'ont
pas une préférence mieux classée. C'est par ce droit de
préférence ajouté au droit de gage général
qu'un auteur préfère reconnaître la
spécialité de l'hypothèque170(*) et donc des garanties de
manière générale.
Le droit réel accessoire que constitue la garantie
n'existe que par la créance principale. Le caractère accessoire
de la garantie a notamment deux sens. Dans le premier sens, il signifie que
tous les effets de la créance sont reportés sur la garantie. Ces
effets sont ressentis à la transmission, à l'extinction et
à l'opposabilité des exceptions propres à la
créance garantie. Dans le second sens, il signifie que la valeur de la
garantie ne peut pas être supérieure à la créance en
principal, intérêts et frais. C'est la mise en oeuvre du
principe qui postule le non enrichissement du créancier et le non
appauvrissement du débiteur du fait des garanties. En clair, les
garanties sont en principe celles qui s'ajoutent au rapport d'obligation, elles
n'en sont jamais la conséquence171(*). C'est pour cette raison qu'elles sont des droits
réels accessoires alors que le droit de gage général a
d'ailleurs une nature difficile à déterminer. « Le
droit de gage général n'est pas un droit patrimonial ; il est
inclassable : il n'est ni un bien, ni une obligation. Il est le lien entre les
biens et les obligations du débiteur : la contrainte sociale.172(*) »
Par nature, l'hypothèque contribue à
réaliser cette contrainte sociale au moyen de son attachement à
une créance déterminée, avec des bénéfices
particuliers que sont le droit de préférence et le droit de
suite, créance dont l'hypothèque suivra les modalités et
mouvements éventuels. Est-il possible d'envisager une limitation des
créances pouvant être garanties par l'hypothèque ? Le droit
de gage général bénéficie à toute
créance sans distinction. La question ci-avant amène à
savoir si l'hypothèque est susceptible d'être constituée
pour n'importe quelle créance que ce soit. Il est constatable qu'il y a
une sorte d'exclusion de certaines créances de l'assiette de
l'hypothèque des droits de jouissance des terres
déterminés.
B- L'exclusion de certaines
créances de l'assiette de l'hypothèque de certains droits de
jouissance des terres
En principe, toute garantie peut être constituée
pour assurer le paiement de quelque créance que ce soit. Dans ce sens,
le droit positif peut prévoir des garanties légales,
c'est-à-dire découlant des dispositions législatives et
règlementaires, pour certaines créances particulières.
Les garanties légales sont constituées avec ou
sans l'accord des parties. Il s'agit généralement des
privilèges généraux173(*) et spéciaux174(*). Il peut s'agir aussi des hypothèques
légales175(*).
Peut être ajouté à celles-ci des garanties qui
résultent des décisions de justice176(*). C'est le cas des
hypothèques judiciaires177(*). L'ensemble des garanties forcées
confèrent, sans convention des parties, un droit de
préférence au créancier. Il s'agit souvent pour ces
garanties forcées d'attribuer une préférence qui
surpassent le rang des garanties conventionnelles178(*).
Le cas des hypothèques forcées est
différent des privilèges puisque les premières ne prennent
rang qu'à leur inscription ordonnée d'ailleurs par
décision de justice. L'hypothèque de la jouissance des terres
domaniales, en vertu de la concession provisoire et d'une autorisation
d'occupation ou d'exploitation du domaine public artificiel de manière
spécifique, emprunte à ce mécanisme qui consiste à
constituer l'hypothèque sur la base d'un texte juridique.
L'hypothèque sur lesdites formes de jouissance n'est admise qu'au profit
des établissements de crédit ou aux emprunteurs dont la
créance est née en vue de la mise en oeuvre des investissements
relatifs179(*) auxdites
jouissances. Concrètement, la créance et la jouissance des terres
doivent avoir un lien de connexité.
Il s'établit qu'il s'agit d'hypothèques
légales dont la constitution peut impliquer l'administration180(*) mais aussi la
justice181(*) si les
parties n'ont pas convenue de telle garantie. En dehors de ces créances,
aucune garantie n'est possible au profit d'autres créanciers182(*). La spécialité
de la créance à garantir par l'hypothèque de la jouissance
des terres serait en effet un prolongement du caractère limité de
la jouissance des terres, s'il n'en est vraiment pas une conséquence.
En bref, les caractéristiques de l'hypothèque de
la jouissance des terres sont empruntées aux caractéristiques de
la jouissance des terres elle-même. Cette dernière est temporaire,
précaire et limitée. Toutes les garanties sont instituées
pour renforcer le droit de gage général du créancier,
c'est la marque de leur caractère accessoire. Pour certaines
hypothèques portant sur des droits réels de jouissance
particuliers, la créance à garantir est spécifiquement
désignée sous peine de nullité de la garantie
constituée.
En conclusion, le bail emphytéotique, le bail à
construction, le droit de superficie et les droits réels de jouissance
dit innomés constituent des démembrements du droit de
propriété qui peuvent valablement servir d'assiette à une
garantie. Dans les terres domaniales, divers droits de jouissance peuvent
être reconnus. Il s'agit des baux, des concessions provisoires, des
autorisations d'occupation ou d'exploitation du domaine public artificiel
déclassé et des droits des occupants ou exploitants du domaine
national avant le 05 août 1974. Ces droits sont aussi susceptibles de
garantie. En général, les garanties sont celles nommées
c'est-à-dire déterminées par les textes législatifs
et règlementaires, elles ne se créent pas par la volonté
des parties. Un auteur affirmait à juste titre, en justifiant cette
option, qu'« en matière de sureté, la
liberté de création des droits réels n'aurait pas la
même signification, puisque, à la limite, elle impliquerait que la
convention des parties confère au créancier
bénéficiaire de la sûreté un droit inédit de
nuire aux créanciers chirographaires. »183(*) D'ailleurs, le
créancier bénéficiaire est toujours en position dominante
dans la conclusion des conventions de garanties. Il n'est pas admis d'instituer
une garantie par convention des parties. Relativement aux droits de jouissance
des terres, leur garantie est identifiée comme hypothèque. C'est
donc l'hypothèque des droits réels de jouissance des terres ou
plus simplement l'hypothèque de jouissance des terres. Celle-ci emprunte
à l'hypothèque de l'immeuble ses caractéristiques et en
plus, elle a des caractéristiques qui lui sont spécifiques.
Celles qui lui sont spécifiques tiennent aux caractères
précaire, temporaire et limité des droits de jouissance
eux-mêmes, à la spécialité de la créance
à garantir par certains d'entre lesdits droits. L'hypothèque
portant sur ces droits emprunte de même à l'hypothèque de
l'immeuble son régime tant dans ses règles de constitution que
dans ses effets.
DEUXIEME PARTIE : UNE
POSSIBILITE INCONSISTANTEQUANT AUX MODALITES D'UTILISATION DE LADITE
JOUISSANCE COMME GARANTIE
Lorsque la nature juridique d'une garantie est
identifiée, par la suite, il est logique de s'intéresser à
son régime juridique. Il y a généralement deux cas :
soit il existe un régime juridique propre à ladite garantie, soit
ledit régime juridique s'identifie à celui d'autres garanties. En
théorie générale du droit, le régime désigne
un système de règles, considéré comme un tout,
soit en tant qu'il regroupe l'ensemble des règles relatives à une
matière, soit en raison de la finalité à laquelle sont
ordonnées les règles184(*). Le régime est un corps cohérent de
règles185(*). C'est l'ensemble des règles applicable
à une notion186(*).
Le régime juridique des garanties regroupe les diverses
règlesqui concourent à sa constitution et donc permettent de lui
produire des effets et celles qui organisent lesdits effets. Celui de
l'hypothèque de la jouissance des terres emprunte beaucoup à
celui de l'hypothèque de l'immeuble d'où l'emprunt même de
la dénomination. Ainsi, il se pose la question de savoir si les
règles régissant l'hypothèque de l'immeuble peuvent
être textuellement reproduites et considérées comme
régissant effectivement l'hypothèque de la jouissance des
terres ?
A observer les assiettes des deux garanties, ainsi que les
modalités d'exercice des droits respectifs, il se dessine que telle
question amène à une réponse nuancée. Bien que
l'objet immeuble soit au coeur des deux garanties, il serait convenable que le
régime juridique de l'hypothèque de l'immeuble constitue le
régime général dont pourrait se détacher
l'hypothèque de la jouissance des terres. Il a en effet
été vu plus haut que la nature juridique de la jouissance des
terres et ses caractéristiques se distinguent respectivement quelque peu
de celle de l'immeuble et de celles de l'hypothèque portant sur ce
dernier. Un recours tous azimuts aux règles du régime juridique
de l'hypothèque de l'immeuble peut ne pas être d'une
utilité pratique.
Envisagée indistinctement par l'Acte Uniforme OHADA
portant organisation des sûretés (de même en France dans le
code civil), l'hypothèque de la jouissance des terres aurait un
régime commun et presqu'uniforme avec l'hypothèque de l'immeuble.
Malgré les spécificités qu'on pourrait trouver à la
première. Pourtant, l'hypothèque de jouissance des terres
pourrait être une forme spéciale d'hypothèque qui, bien que
portant également sur les composantes juridiques et matérielles
des immeubles et devant connaître certaines des règles de
l'hypothèque des immeubles, elle doit pouvoir s'en distinguer sur des
points déterminés, vu que l'immeuble avec tous ses attributs
n'est pas concerné. A la vérité, le législateur a,
en partie, compris une telle nécessité, d'où
l'édiction de quelques règles particulières et
spécifiques à l'hypothèque de la jouissance des terres. En
effet, les règles spécifiques relevées ne suffiraient pas
à lui organiser un régime intelligible et convenable à son
assiette et pouvant par-dessus tout la rendre visible et surtout pratiquement
utilisée sinon efficace.
D'une part, il convient de relever que la possibilité
d'utiliser des droits de jouissance des terres comme objet de
l'hypothèque est complétée par le recours aux
règles du régime de l'hypothèque de l'immeuble (Chapitre
1) dans ses modalités de constitution et ses effets.D'autre part, il y a
lieu d'observer que ladite possibilité est quelque peu biaisée et
peut en certains cas être compromise par le recours plus ou moins
réfléchi auxdites règles.D'où
l'intérêt de relever la nécessité d'un régime
spécifique à l'hypothèque lorsqu'elle porte sur lesdits
droits de jouissance des terres (Chapitre 2).
CHAPITRE 1 :
L'INCONSISTANCE PAR LE RECOURS DEMESURE AUX REGLES DU REGIME DE L'HYPOTHEQUE DE
L'IMMEUBLE
L'hypothèque de l'immeuble porte sur un bien qui
inspire suffisamment confiance. Elle a aussi un régime mieux
organisé que d'autres garanties. Tout ceci concourt à faire
d'elle la préférence des prêteurs. C'est donc la garantie
favorite parce que l'immeuble a une valeur économique facilement
déterminable et également, l'immeuble est fixe. Peu à peu
les préférences changent mais dans des pays comme le Cameroun, il
est difficile de solliciter du crédit sans brandir un titre foncier en
vue de constituer sur celui-ci une garantie de remboursement au profit du
fournisseur du crédit. Les biens meubles auraient moins de valeur sinon
ils seraient considérés comme volatiles et suffisamment pas
maîtrisables. La confiance est ce que recherche le prêteur. Il ne
peut la placer en ce qui ne lui est pas contrôlable. Même le droit
de suite conféré à toutes les garanties n'est pas
rassurant quant il s'agit d'un meuble. Les terres qui sont des immeubles
constituent en tout cas les meilleurs moyens de garantie à travers
l'hypothèque.
Quelles sont ainsi les règles de l'hypothèque de
l'immeuble ? Toute garantie a un instant de constitution, un temps de vie
et une fin. L'hypothèque, quel que soit le mode de constitution,
obéit à un régime presque uniforme. Le mode de
constitution est triple. L'hypothèque est constituée soit par un
acte des parties, généralement reçu par un Notaire, soit
par une disposition de la loi, reconnue par une décision de justice,
soit fondamentalement par une décision de justice elle-même.
Le temps de vie de l'hypothèque est
caractérisé par la non dépossession du constituant et la
mise à sa charge de l'obligation de non dépréciation de la
valeur de l'immeuble. Cette dépréciation est en principe
envisagée aussi bien matériellement187(*) que juridiquement188(*). Le non- respect peut
précipiter l'exigibilité de la créance et ainsi provoquer
la réalisation de la garantie. Le temps de vie peut être
impacté par les modifications qui surviennent relativement à la
créance, il s'agirait de la diminution de sa valeur et d'autres effets
comme des mouvements de transmission.La fin de l'hypothèque est
marquée par la réalisation de l'hypothèque qui peut
être évitée lorsque des causes propres ou
extérieures à la créance permettent l'extinction de
l'hypothèque.Toutes ces modalités régissent-elles
l'hypothèque de la jouissance des terres ? Sur des
éléments majeurs, les deux formes d'hypothèque peuvent
être régies par les mêmes règles. En
conséquence, il faut considérer que les règles de
constitution de l'hypothèque de l'immeuble s'appliquent à
l'hypothèque de la jouissance des terres (Section 1). Il en est de
même des règles relatives aux effets et aux modes de transmission
et d'extinction (Section 2).
SECTION 1 : LE RECOURS
AUXREGLES DE CONSTITUTION DE L'HYPOTHEQUE D'IMMEUBLE
La constitution désigne principalement
« soit un corps de règles (la Constitution d'un
État), soit le texte qui les consacre, soit une opération ou un
acte juridique établissant une situation, soit le document écrit
qui constate cet acte189(*) ». Envisagée comme une
opération ou un acte juridique établissant une situation, la
constitution, de l'hypothèque, est le point marquant l'existence de la
garantie. Les modes de constitution de l'hypothèque de l'immeuble sont
les mêmes pour l'hypothèque de la jouissance des terres
(Paragraphe 1). Quel que soit le mode de constitution, l'hypothèque doit
être inscrite. Les règles de publicité (Paragraphe 2)
doivent donc être vues par la suite.
Paragraphe 1 : les
modes de constitution de l'hypothèque
L'hypothèque comme droit réel de second
degré tire sa source de quelques fondements (A). Lesdits fondements
prennent tous en compte certaines règles pour incontestablement valoir
constitution de l'hypothèque (B)
A. Les fondements de
constitution
Un fondement représente le motif juridique, la base
légale, ou le moyen de justification190(*) d'une situation ou d'un
droit. L'hypothèque est un droit réel accessoire qui doit trouver
sa justification dans un acte juridique spécifique. La base juridique
peut être soit uneconvention, soit une
disposition légale, soit enfin une décision de
justice.
L'hypothèque par voie de convention est dite
hypothèque conventionnelle. Elle est le fruit d'un
« contrat conclu entre le créancier qui
bénéficie de la garantie et le constituant qui la concède
sur un ou plusieurs de ses immeubles191(*) ». La voie ordinaire de constitution
de l'hypothèque est le contrat. Les règles régissant les
exigences à respecter pour former cette hypothèque est reprise
pour d'autres types. En effet, « à quelques nuances
près, l'inscription et les effets de l'hypothèque conventionnelle
forment un droit commun à toutes les sûretés
immobilières. »192(*) C'est sans doute la raison pour laquelle elle ne
peut manquer d'être reprise comme mode de constitution de
l'hypothèque de la jouissance des terres.
L'hypothèque peut par ailleurs être
constituée de manière forcée c'est-à-dire en
dehors de toute convention des parties et donc soit en vertu d'une loi,
soit en vertu d'une décision de justice193(*). Pour le premier cas,
il s'agit de l'hypothèque dite légale. L'hypothèque
judiciaire constitue le second cas.
L'hypothèque peut être constituée avec
pour base la loi sur les garanties et par d'autres lois. Dans la zone OHADA, il
y a l'hypothèque légale de la masse des
créanciers194(*),
l'hypothèque légale du vendeur, de l'échangiste et du
copartageant,elle bénéficie aussi à celui qui fournit des
deniers pour l'acquisition d'un immeuble vendu, échangé ou
copartagé195(*),
l'hypothèque légale des architectes, entrepreneurs et autres
personnes employées pour édifier, réparer ou reconstruire
des bâtiments ainsi que ceux fournissant des deniers pour payer ces
professionnels196(*). Dans les législations nationales, on
peut aussi trouver l'hypothèque légale du conjoint sur
l'immeuble de son époux et l'hypothèque légale du
mineur sur l'immeuble de son tuteur.
En effet, soit ces hypothèques sont conventionnellement
constituées par les parties, soit le créancier saisit la
juridiction compétente pour ordonner la prise d'inscription de
l'hypothèque indiquée. Sans doute, lorsque l'assiette de la
garantie est un droit réel de jouissance des terres, la loi n'exclut pas
que ces hypothèques légales soient constituées sur ledit
droit, pourvu que les mêmes conditions soient réunies.
En outre, l'hypothèque judiciaire est celle
constituée par une décision de justice hors des cas
d'hypothèques légales ci-avant énumérées,
pour garantir des créances diverses197(*). La juridiction compétente du lieu de
situation de l'immeuble apprécie l'opportunité de constitution de
l'hypothèque à la requête du créancier. Il n'est pas
interdit que la juridiction compétente ordonne la prise d'inscription
hypothécaire sur un droit réel de jouissance des terres.
Tous les modes de constitution de l'hypothèque de
l'immeuble sont admis pour constituer des hypothèques portant sur les
droits de jouissance des terres. Il y a ainsi l'hypothèque
conventionnelle, l'hypothèque légale et l'hypothèque
judiciaire de jouissance des terres. Il reste que l'hypothèque ne se
constitue pas sans observation préalable de certaines exigences.
B. Les règles de
constitution
Les règles relatives à l'hypothèque
conventionnelle dominent les autres modes de constitution de
l'hypothèque. L'hypothèque conventionnelle reposant sur un
contrat, ce dernier doit en réalité obéir à des
conditions de fond et de forme sous peine de nullité ou parfois
d'inopposabilité.
Les règles de fond sont relatives aux
parties impliquées dans le contrat, en l'occurrence dans la convention
d'hypothèque, à l'objet ou plus précisément
à l'assiette de l'hypothèque et à la créance
garantie.
Relativement au constituant, il peut être le
débiteur lui-même ou un tiers qui s'est par ailleurs
porté caution et a de ce fait indiqué ou non un bien immeuble que
le créancier accepte pour garantir son remboursement. Peu importe la
qualité de débiteur constituant ou de tiers constituant (caution
hypothécaire), le constituant doit, en tout état de cause,
être propriétaire de l'immeuble donné en garantie. Pour le
cas d'un droit réel de jouissance des terres, le constituant doit
être titulaire du droit réel de jouissance sur lequel il entend
concéder un droit de second degré. Les terres ou les droits de
jouissance d'autrui ne peuvent pas être hypothéquées.
Certains tempéraments sont relatifs aux personnes
copropriétaires ou en indivision. Il y a également le cas des
droits soumis à conditions, résolutions et rescisions.
L'hypothèque portant sur ces divers droits suit les mouvements possibles
et aléas que connaitront ceux-ci.
En réalité, l'hypothèque comporte un
risque d'aliénation future. Constituée telle garantie est un acte
grave198(*), ce qui
nécessite que la condition de capacité à
aliéner soit pleinement réunie. Il s'agit de la
majorité de 21 ans révolus au Cameroun et de non existence de
cause d'incapacité pour les majeurs. Pour certaines personnes, il
leur est exigé unpouvoird'aliénation. Il en est ainsi
pour les dirigeants des sociétés, les époux en situation
de communauté de biens et les tuteurs et curateurs respectivement pour
les mineurs et majeurs protégés.
Relativement à l'assiette de
l'hypothèque, pour l'immeuble, l'assiette est notamment l'immeuble
envisagé comme un tout, il doit être déterminé ou
déterminable. L'AUS prévoit que les droits réels
immobiliers peuvent constituer l'assiette de l'hypothèque. Il s'agit
d'un point de distinction, une distinctionrarement faite par ledit Acte.
Relativement à la créance garantie,
elle doit être présente ou future et déterminée ou
déterminable. Tout comme l'assiette de la garantie, le principe de
spécialité199(*) domine la créance garantie.
Particulièrement à l'hypothèque de la jouissance des
terres, la spécialité de la créance garantie est
renforcée200(*)
comme évoquée dans la première partie.
Les règles de forme en matière
hypothécaire se résument à la soumission de tous actes y
relatifs, participant à sa constitution, à l'instrumentation
par un Notaire201(*). Exception faite notamment des décisions de
justice reconnaissant les hypothèques légales ou plutôt
celles autorisant la prise d'inscriptionhypothécaire à la
requête du créancier. La condition est exigée tant pour
l'hypothèque de l'immeuble que pour l'hypothèque de la jouissance
des terres. Le recours à cet officiel ministériel peut ne pas
être forcément envisageable pour cette dernière comme il
sera développé plus bas. En tout cas, l'hypothèque est un
contrat solennel202(*).
De manière commune à l'hypothèque de
l'immeuble et à l'hypothèque de la jouissance des terres, il y a
lieu de relever les modes de constitution et un important nombre de
règles gouvernant leur formation. Cette communauté de
régime s'étend jusqu'aux règles organisant la
publicité.
Paragraphe 2 : les
règles de publicité des deux formes d'hypothèques
Avec la publicité, l'hypothèque fait un
« couple nécessaire. »203(*) La publicité renvoie
au caractère de ce qui est public204(*). L'hypothèque s'intègre dans le cadre
global de la publicité foncière. Cette dernière est l'
« ensemble des règles destinées à faire
connaître aux tiers intéressés la situation juridique des
immeubles par le moyen d'un fichier immobilier et la publicité des
privilèges, des hypothèques et des autres droits portant sur ces
immeubles. » Au regard de cette définition de la
publicité foncière, l'hypothèque de la jouissance des
terres ne peut pas être envisagée autrement. C'est la raison pour
laquelle, tout comme l'hypothèque de l'immeuble, le titre constatant le
droit (A) est une exigence pour l'hypothèque de la jouissance des
terres. C'est à la condition de l'existence du titre qu'il devient
possible de constituer la garantie et de la soumettre au régime de
l'inscription hypothécaire (B).
A. Le titre constatant le
droit
Un titre est un écrit en vue de constater un acte
juridique ou un acte matériel pouvant produire des effets
juridiques.205(*)
Cette définition est large et commun à tous les droits.
Relativement aux droits portant sur les immeubles, le titre les constatant est
le titre foncier, considéré comme la certification officielle
de la propriété immobilière206(*). A la vérité,
même cette définition contenue dans une disposition
règlementaire ne renseigne pas suffisamment sur le titre foncier. En
effet, au Cameroun, un titre foncier peut être délivré
même lorsque le titulaire n'est pas propriétaire, mais seulement
à celui qui bénéficie d'une concession provisoire sur les
dépendances du domaine national207(*). Même pour cette concession et pour d'autres
droits réels sur les terres domaniales, un registre spécial
semblable au Livre foncier est prévu pour recevoir les actes ou
conventions y relatifs208(*).
La situation des démembrements du droit de
propriété immobilière conférantest traitée
simultanément avec la propriété puisque leur constitution
oblige à leur immatriculation209(*), c'est-à-dire leur inscription au livre
foncier copie duquel est le titre foncier pour l'immeuble concerné. De
manière claire, un droit réel quelconque portant sur des terres
ne peut pas faire l'objet d'hypothèque lorsqu'il n'est pas susceptible
d'être inscrit dans un registre de la conservation foncière. La
condition de publicité est une exigence pour rendre opposable le droit
accessoire dont il s'agit210(*). L'opposabilité est l'aptitude d'un
droit, d'un acte, d'une situation de droit ou de fait à faire sentir ses
effets à l'égard des tiers non en soumettant ces tiers aux
obligations directement nées de ces éléments, mais en les
forçant à reconnaître l'existence des faits, droits et
actes dits opposables, à les respecter comme des éléments
de l'ordre juridique et en subir les effets, sous réserve de leur
opposition lorsque la loi leur en ouvre droit211(*).
Concernant les droits sur les immeubles, droit de
propriété et ses démembrements ou droits de jouissance
quelconque et l'ensemble des droits accessoires y établis,
l'opposabilité a pour objet de donner effet au droit de
préférence et au droit de suite. L'hypothèque en tant que
droit réel accessoire« dépend ainsi
étroitement de l'organisation de la publicité foncière ;
pas seulement, la publicité des hypothèques, mais celle de
l'ensemble des droits réels immobiliers. »212(*)Lapublicité
foncière réserve une place aux droits réels de jouissance
des terres.D'ailleurs le régime de l'inscription hypothécaire
s'en trouve très strictement encadré.
B. Le régime de
l'inscription hypothécaire
Le régime de l'inscription des hypothèques prend
en compte les conditions de publicité, ses effets puis la fin de la
publicité.
Les conditions de publicité se résument à
quelques formalités. Puisqu'il y va de l'intérêt
du créancier hypothécaire, l'initiative d'inscrire
l'hypothèque lui appartient. Dans la pratique, lorsque
l'hypothèque résulte d'une convention passée par devant
Notaire, ce dernier a très souvent la charge d'établir deux
bordereaux contenant un certain nombre de mentions utiles aux tiers. Il s'agit
de la désignation des parties, des immeubles ou des droits réels
de jouissance grevés, l'indication de la créance garantie avec
mention du capital et de l'intérêt ainsi que du montant garanti.
Le bordereau et la convention d'hypothèque transmis au Conservateur
foncier lui permettent de procéder à l'inscription. Par
l'accomplissement de cette formalité, l'hypothèque devient
opposable aux tiers (le droit de suite du créancier acquiert
force) qui peuvent s'informer à propos en demandant l'état
hypothécaire de l'immeuble au Conservateur. Aussi,
l'inscription est attributive de rang. Il s'agit de l'enjeu principal
des garanties puisque le rang vaudra au moment du partage des deniers (ce sera
la mise en oeuvre du droit de préférence). Les créanciers
hypothécaires sont désintéressés suivant
l'ancienneté de leur inscription hypothécaire.
L'inscription hypothécaire a une durée de
trente ans. Lorsqu'elle n'est pas renouvelée avant
l'écoulement de cette durée, l'inscription devient
caduque, c'est-à-dire l'hypothèque devient inopposable
aux tiers. L'inscription peut tout de même être
différée de 90 jours lorsque l'hypothèque garantit un
prêt à court terme. Par contre, l'inscription n'est pas
possible à partir de la publication de l'aliénation de
l'immeuble, de la publication du commandement valant saisie immobilière,
de l'ouverture d'une procédure collective et du décès du
débiteur dans le cas où la succession est vacante ou
acceptée seulement à concurrence de l'actif. Lorsque
l'hypothèque est judiciaire, l'inscription comporte deux
étapes. Une inscription provisoire est prise à la
requête du créancier et lorsque la juridiction compétente
fait droit à telle requête213(*). Lorsque la créance est reconnue par la
juridiction statuant sur le fond, le créancier doit procéder
à une inscription définitive dans le délai de 6
mois suivant telle reconnaissance.
Relativement aux droits réels de jouissance des terres,
l'inscription de l'hypothèque n'est pas possible lorsque le droit
réel de jouissance dont il s'agit n'a lui-même pas
été inscrit. C'est la mise en oeuvre de l'effet
relatif214(*) qui
traduit l'idée selon laquelle il ne peut être inscrit un droit
réel accessoire sur un droit réel principal inexistant ou tout au
moins inopposable. Cette solution fait suite à l'exigence du titre
constatant le droit réel de jouissance. Lorsque ce droit a
été inscrit ou plutôt lorsque le titre foncier est
délivré au titulaire de la concession provisoire et que
l'hypothèque portant sur ces divers droits est inscrite, l'inscription
produit ses effets d'opposabilité aux tiers acquéreurs, aux
autres créanciers hypothécaires et même aux
créanciers chirographaires. Ces effets sont mis en oeuvre au moment de
la réalisation de l'hypothèque.
En outre, l'inscription permet de déterminer les
créances garanties. Très souvent, le principal de la
créance garantie a des accessoires tels que les intérêts et
les frais. Ceux échus avant l'inscription sont entièrement
garantis alors pour l'avenir, seuls ceux des trois dernières
années précédant la réalisation de
l'hypothèque sont garantis.
En dehors du cas de péremption de
l'inscription qui survient lorsque l'inscription n'est pas
renouvelée avant le délai de trente ans215(*), l'inscription peut
également être radiée volontairement lorsque la
créance est éteinte, lorsque le créancier
renonce à l'hypothèque et enfin en cas de purge. Si
le créancier refuse de procéder à la radiation
malgré des raisons pour ce faire, la juridiction compétente,
saisie, peut ordonner ladite radiation216(*).
Toutes ces règles de formation et de publicité
sont acquises à l'hypothèque de la jouissance des terres aussi
bien de manière implicite lorsque les textes particuliers, sans les
modifier ou prévoir des règles spécifiques, ne les
évoquent pas, que de manière expresse217(*) à travers des
dispositions de portée générale. Le régime de
constitution des deux formes d'hypothèque est presque unique
malgré la distinction de l'assiette. Cette unicité se poursuit en
ce qui concerne le régime des effets et les modes de transmission et
d'extinction.
SECTION 2 : LE RECOURS
AUX REGLES RELATIVES AUX EFFETS DE L'HYPOTHEQUE DE L'IMMEUBLE
Les effets de l'hypothèque de l'immeuble comme de la
majorité des garanties réelles sont organisés à
travers les rapports entre le créancier, le débiteur et/ou le
constituant et d'autres personnes intéressées. Ces rapports sont
établis entre les créanciers hypothécaires, entre les
créanciers hypothécaires et les créanciers chirographaires
et enfin entre les créanciers hypothécaires et les tiers. Les
effets principaux de l'hypothèque avant l'exigibilité de la
créance sont la non dépossession du constituant et la non
dépréciation de la valeur de l'immeuble par lui. De ce fait, le
créancier a la possibilité non seulement d'exercer ses droits de
jouissance mais aussi en certains cas, il peut exercer son droit de disposer.
Toutefois, il existe des prohibitions légales, judiciaires ou
conventionnellesau pouvoir de jouissance ou de disposer.A titre illustratif, le
propriétaire d'un immeuble hypothéqué ne peut pas
conclureun bail de longue durée, il est donc difficile d'envisager la
constitution d'autres droits réels de jouissance.
En cas d'exigibilité de la créance suivant le
terme convenu ou d'exigibilité survenue de manière
anticipée en cas de détérioration ou de destruction de
l'immeuble218(*),
l'hypothèque comme droit réel accessoire a des effets drastiques
pour le constituant. Ces effets sont-ils les mêmes lorsqu'il s'agit de
l'hypothèque de la jouissance des terres ? C'est la question
à se poser. En dehors de quelques cas qui seront
déterminés dans le prochain chapitre au titre des
spécificités de l'hypothèque de la jouissance des terres,
il convient de relever que les effets de l'hypothèque de l'immeuble
constituent vraisemblablement les effets généraux (Paragraphe 1).
Les deux formes d'hypothèques confèrent des droits, ces droits
ont le même sort que tous les autres c'est dire qu'ils peuvent être
transmis ou plutôt ils peuvent s'éteindre (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : les
effets de l'hypothèque à sa réalisation
Les effets sont communs aux deux hypothèques aussi bien
à la réalisation (A) c'est-à-dire dans la relation entre
le créancier et le constituant,qu'entre les diverses personnes
impliquées ou intéressées (B).
A- La réalisation de
l'hypothèque
La réalisation est le moment qui marque la mise en
oeuvre d'une garantie. Assurément, elle survient lorsque le
débiteur ou le constituant est défaillant dans sa promesse de
rembourser. C'est donc l'effet principal entre le créancier et le
constituant à la défaillance de ce dernier. En effet, la
réalisation est un terme pratique désignant
l'opération financière consistant à vendre un bien pour
pouvoir disposer des fonds provenant de la vente219(*). Cette
définition envisage la réalisation dans l'une de ses
modalités. Plus explicitement, la réalisation est la satisfaction
du créancier c'est-à-dire le paiement de la créance
qui lui est due220(*) par le moyen de la garantie affectée,
à un certain moment dans le passé, à ladite satisfaction
en cas de défaillance du constituant dans sa promesse de rembourser le
crédit. Dans ce cas, peu importe la modalité qui mène
à telle satisfaction.
Avec la réforme du droit des sûretés OHADA
en 2010, la réalisation de l'hypothèque se fait à travers
plusieurs options offertes au créancier221(*). Il y a notamment
l'attribution de l'immeuble au créancier par voie de convention à
travers le pacte commissoire222(*) et par voie de décision de justice223(*). L'attribution, qu'elle soit
conventionnelle ou judiciaire, elle est toujours précédée
par une expertise qui détermine la valeur de l'immeuble. Lorsque ladite
valeur dépasse le montant de la créance garantie, le surplus doit
être reversé au constituant ou plutôt aux autres
créanciers. Lorsque l'immeuble constitue la résidence principale
du constituant, la voie de l'attribution n'est pas admise. Dans le sens de
cette prohibition,lorsque le droit de jouissance qu'exerce le constituant lui a
permis d'ériger des constructions constituant sa résidence,
l'attribution serait impossible.
L'autre voie qui est ancienne est celle de la saisie
immobilière224(*) dont l'issue probable est l'adjudication
(c'est-à-dire la vente) de l'immeuble. La saisie immobilière est
un mode forcé et assurément le plus complexe en matière de
réalisation des garanties. La clause de voie parée qui
permettrait au créancier de vendre amiablement le bien
hypothéquée est interdite. Qu'il s'agisse de l'immeuble ou du
droit réel de jouissance des terres, l'une ou l'autre option est offerte
au créancier qui peut s'en servir. Le droit de réaliser vise un
bien hypothéqué qui, au moment où il est utilisé,
peut se trouver dans le patrimoine du constituant ou pas. D'ailleurs, d'autres
personnes peuvent avoir des droits sur le même bien. Il s'agit de
certains effets envisagés entre le créancier et des personnes
autres que le constituant. Lesdits effets sont également communs
à l'hypothèque de l'immeuble et à l'hypothèque de
jouissance.
B- les effets entre les
personnes impliquées
Les effets sont différents entre le créancier
poursuivant et les autres créanciers et les créanciers
hypothécaires et les tiers qui sont très souvent
acquéreurs.
Les effets entre le créancier hypothécaire et
d'autres créanciers permettent de mettre en oeuvre le droit de
préférence puisque tout l'objet de la garantie est
d'éviter des concurrences dans le paiement, sinon de primer son
bénéficiaire à d'autres créanciers,
considération faite des droits de préférence
antérieurs éventuels. Pratiquement, l'option d'attribution
conventionnelle ou juridictionnelle sera préférée par le
créancier qui veut éviter toute concurrence225(*). Mais lorsqu'il y a saisie
immobilière ou lorsqu'il y a un surplus à reverser aux autres
créanciers, les divers droits de préférence sont mis en
oeuvre. Ainsi, les créanciers hypothécaires sont
désintéressés par ordre d'inscription de leur
hypothèque. Cette règle de préférence est reprise
en matière d'hypothèque portant sur les droits réels de
jouissance des terres domaniales226(*).Cette reprise est sans doute pour le cas de
l'hypothèque d'autres droits réels de jouissance des terres.
A l'égard des tiers, l'effet principal est le droit
de suite227(*)
conféré aux créanciers hypothécaires, ces derniers
ne pourront être limités que par les effets de la
purge228(*),
voie offerte aux tiers pour les désintéresser. En pratique, les
effets du droit de suite sont anticipés par le tiers acquéreur.
Aucun droit de suite ne peut être dirigé contre lui lorsque
l'hypothèque n'a pas été inscrite avant l'acquisition par
ledit tiers. Lorsque ce dernier acquiert l'immeuble ou le droit réel de
jouissance, en connaissance de l'inscription hypothécaire, le recours
à un Notaire étant obligatoire au Cameroun pour telle
transaction229(*), ledit
Notaire l'avisera du risque (de double paiement) que comporte ladite
acquisition sans purge des éventuels droits hypothécaires et
charges.
Les attributs de l'hypothèque se partagent et
concernent soit les rapports entre les créanciers (droit de
préférence), soit les rapports entre les créanciers et les
tiers (droit de suite). Il s'agit des règles de droit commun en
matière de garantie réelle, peu importe qu'il s'agisse d'une
hypothèque de l'immeuble ou d'une hypothèque d'un droit
réel de jouissance des terres ou des garanties portant sur les meubles.
Les règles relatives aux modes de transmission et d'extinction admises
pour l'hypothèque de l'immeuble peuvent pareillement être reprises
pour l'hypothèque d'un droit réel de jouissance des terres.
Paragraphe 2 : les
modes de transmission et d'extinction communs aux deux hypothèques
Etant des droits accessoires, les hypothèques sont
tenues par le principal qu'elles suivent. Le principal c'est la créance
ou simplement l'obligation du débiteur. Lorsque la cause de la garantie
est transmise, la garantie est également transmise, lorsque la cause est
éteinte, celle-là est tout aussi éteinte. Toutefois, il
n'est pas exclu que par elles-mêmes les hypothèques fassent
l'objet de transmission ou d'extinction. Il est possible d'envisager les modes
de transmission des hypothèques (A) d'une part et d'autre part, relever
leurs modes d'extinction (B).
A- La
transmission
L'opération de transmission de la garantie de toute
hypothèque est envisageable ainsi : « le
créancier peut transférer la garantie hypothécaire soit
à un tiers en cas de transmission de la créance
hypothécaire, soit à un créancier hypothécaire en
cas de transmission de l'hypothèque sans la
créance. »230(*)Pour le premier cas, il s'agit de la transmission
àtitre accessoire. Les mouvements de transmission de
l'obligation principale garantie sont répercutés de
manière automatique sur l'hypothèque.Il s'agit des cas
dedécès du créancier qui opère
transmission de la créance à ses ayants droit et donc les
hypothèques avec. Il y a aussi la subrogation à la
créance qui survient lorsque le tiers acquéreur
désintéresse un créancier, au moment où ce dernier
exerce son droit de suite au moyen d'une sommation de payer ou de
délaisser. En effet, la subrogation peut être le fait du
créancier lorsqu'il reçoit le paiement d'une autre personne que
le débiteur ou du débiteur lorsqu'il emprunte une somme afin de
payer sa dette231(*). La
cession de la créance, à quelque titre que ce
soit, emporte cession de la garantie qui lui est affectée. Lorsqu'une
saisie attribution des créances est pratiquée,
le saisissant bénéficie également des garanties
affectées aux créances ainsi saisies.
Pour le second cas de transmission, elle est
opérée à titre principal. Il n'en est rien de
l'obligation principale, seule la garantie est transmise232(*).La subrogation
à l'hypothèque233(*) et la cession
d'antériorité234(*) sont les mécanismes les plus envisageables.
Il reste par ailleurs possible qu'une hypothèque rechargeable
soit transmise en cas de cession de l'immeuble sur lequel elle a
été constituée. Cette forme d'hypothèque n'est pas
retenue par l'AUS.
Ces règles de transmission s'appliquent tant à
l'hypothèque de l'immeuble qu'à l'hypothèque de la
jouissance des terres. Les mêmes paramètres guident leur
extinction.
B- L'extinction
L'extinction des hypothèques s'opèrent à
titre accessoire en suivant le sort de la créance
garantie235(*) ou
à titre principal. Pour ce dernier mode, la cause d'extinction
est propre aux hypothèques elles-mêmes.
A titre accessoire, lorsqu'il y a paiement de la
créance236(*),
l'hypothèque est éteinte pour défaut d'objet. Lorsqu'il y
acompensation entre les créances détenues par les
parties l'une au profit de l'autre, la créance garantie s'éteint
et les hypothèques s'en trouvent tout aussi éteintes. De
même, il y a extinction de l'hypothèque lorsque la créance
s'éteint par la voie de confusion de la personne du
créancier et du débiteur ou du constituant hypothécaire.
Et enfin, la prescription de la créance éteint
automatiquement la garantie y attachée.
A titre principal, les hypothèques peuvent
également s'éteindre. Lorsque le créancier
renonce à l'hypothèque, celle-ci s'éteint. La
purge de l'immeuble de ses hypothèques opère extinction
de ces dernières. Lorsque l'hypothèque est consentie pour
des créances futures, le constituant peut la résilier
unilatéralement. L'extinction peut être partielle
à travers le report sur l'indemnité
d'assurance237(*)
en cas de destruction de l'immeuble, il s'agira des constructions, des
installations et des ouvrages de caractère immobilier qui constituent
l'objet de la jouissance des terres.
L'essentiel des règles régissant
l'hypothèque de l'immeuble, de sa constitution aux effets qu'elle
produit ainsi qu'aux modes de sa transmission et de son extinction, est repris
pour constituer le régime juridique de l'hypothèque de la
jouissance des terres. Il convient tout de même d'évaluer cette
reprise de l'ensemble desdites règles en prenant conscience de la nature
particulière des droits réels de jouissance des terres. Il se
dégage en réalité une nécessité d'instituer
un régime spécifique de l'hypothèque desdits droits, non
pas forcément en ignorant l'essentiel des règles de
l'hypothèque de l'immeuble mais en mettant l'accent sur ce qui
distinguent les deux assiettes concernées, et ainsi pouvoir focaliser
par la suite l'attention sur l'utilisabilité effective et efficace de
l'hypothèque au moyen du droit de jouissance des terres.
CHAPITRE 2 :
L'INSTITUTION D'UN REGIME SPECIFIQUE A L'HYPOTHEQUE DE LA JOUISSANCE DES TERRES
COMME SOLUTION ENVISAGEABLE
En science juridique, il est important de concevoir ou
d'aborder chaque chose selon ses caractéristiques et
spécificités, et donc suivant sa révélation comme
phénomène juridique238(*). C'est ce que tente de faire le législateur
OHADA en évoquant quelques faisceaux de principes et règles
relatifs à l'hypothèque lorsqu'elle porte sur des droits
réels de jouissance des terres. Le décret du Premier Ministre du
11 août 2015 relatif aux garanties et suretés sur les baux et
concessions domaniaux fait de même puisqu'il évoque quelques
dispositions relatives à la nature particulière des terres
domaniales et des droits susceptibles d'être reconnus sur lesdites
terres. Les dispositions dudit décret augurent en ses débuts une
volonté d'évocation de manière exhaustive des
règles s'appliquant à l'hypothèque de jouissance. Elles
finissent curieusement par faire un renvoi aux dispositions
générales de l'hypothèque.
Le renvoi à l'hypothèque portant
sur l'immeuble se révèle parfois inapproprié
relativement à la constitution de l'hypothèque de jouissance des
terres et souvent excessif quant aux effets que la dernièreest
susceptible de produire. Lesdits renvois traduisent une assimilation, parfois
excessive, entre l'immeuble et les droits réels de jouissance
susceptibles d'être constitués sur ledit immeuble. Pratiquement,
cette assimilation ne peut être vraie, tant il provoque l'inutilisation
de la jouissance des terres comme objet de garantie. Cette inutilisation
découle de l'organisation du régime de ladite garantie, ce qui
pourrait traduire son inutilité.
A la vérité, les droits de jouissance des terres
sont en pleine expansion. Les terres se font rares, sinon les
propriétaires sont moins disposer à concéder
complètement leur propriété. Davantage, des droits
réels de jouissance seront constitués et l'acquisition de la
propriété sera de moins en moins envisagée. Tout
cecipourra provoquer, de plus en plus, le besoin de recourir aux garanties au
moyen desdits droits réels de jouissance. Déjà, la
nécessité de constituer garantie au moyen de ces droits s'est
faitsentir et l'institution de la possibilité de reconnaissance des
droits réels de jouissance sur les terres domaniales a constitué
une réponse.
Relativement à la garantie, lorsqu'elle porte sur la
jouissance des terres, il y a lieu de se demander si ses
spécificités sont réellement prises en compte. A l'analyse
des textes qui l'abordent, il en découle que les règles qui
régissent l'hypothèque portant sur les droits de jouissance des
terres ont quelque peu pris en compte la nécessité de
déterminerles spécificités propres aux droits réels
de jouissance des terres (Section 1). Cependant, une analyse rigoureuse de
l'appréhension par lesdits textes,aussi bien du concept de jouissance
des terres que de l'organisation du régime
« adapté » à l'hypothèque de
jouissance des terres, révèle que la prise en compte est
insuffisante voire inadaptée en certains cas (Section 2).
SECTION 1 : UNE
NECESSITE PARTIELLEMENT PRISE EN COMPTE PAR LES TEXTES
La prise en compte de la nature particulière des droits
réels de jouissance des terres et de la garantie susceptible
d'être constituée est perceptible, dans le droit positif, à
travers quelques règles de constitution (Paragraphe 1) et aussi à
travers les effets et modes de transmission et d'extinction de ladite garantie
(Paragraphe 2) qu'il évoque.
Paragraphe 1 : les
règles spécifiques de constitution à l'hypothèque
de la jouissance des terres
Un droit réel de jouissance des terres est un droit
particulier pour au moins deux raisons. La première raison est que ledit
droit est soit un démembrement du droit de propriété et
donc ne recouvre pas l'ensemble des prérogatives du propriétaire,
soit c'est une simple prérogative de jouissance reconnue par
l'Administration dans les domaines. Comme vu ci-haut, il y a
dédoublement de la nature des droits de jouissance des terres. Ce
dédoublement est susceptible d'amener à envisager leur
hypothèque en fonction de la nature réelle de la jouissance
considérée. Le résultat pourrait être, à la
suite de la distinction de l'hypothèque de l'immeuble de
l'hypothèque de jouissance comme développé dans le cadre
de ce travail, la distinction aussi de l'hypothèque de jouissance des
terres conférée en vertu d'un droit démembré de
l'hypothèque de jouissance des terres conférée en vertu
d'un droit réel reconnu sur les terres domaniales par une loi ou un
règlement. La dernière distinction, bien que pertinente et
fondamentale pour une parfaite appréhension de la jouissance des terres
comme garantie, ne serait pas vue dans ses détails.
La seconde raison est qu'un droit de jouissance est un droit
limité dans le temps comme il a été
développé plus haut. Cette nature particulière est prise
en compte par le législateur OHADA et l'autorité
règlementaire du 11 août 2015. C'est ainsi qu'ils ont prévu
des règles spécifiques à la formation de
l'hypothèque portant sur les droits réels de jouissance des
terres (A) et aussi des règles spécifiques à la
publicité de ladite hypothèque (B).
A. Les règles
spécifiques relatives à la formation
Les conditions de formation des hypothèques sont de
forme et de fond.
Sur le plan de la forme, le recours au Notaire pour
l'instrumentation de l'hypothèque conventionnelle demeure, il ne s'agit
donc pas d'une condition spécifique à l'hypothèque de la
jouissance des terres. En matière de forme, sa spécificité
tient au fait que dans sa formation, lorsqu'il s'agit d'une concession
provisoire sur le domaine national, en plus du recours au Notaire, le Ministre
des Domaines et la commission de crédit sont mises à contribution
pour l'établissement du titre foncier au profit du concessionnaire et
l'inscription de l'hypothèque par la suite239(*). Ainsi donc, il ne sera pas
constitué d'hypothèque sur la concession provisoire lorsque le
Ministre n'est pas saisi par le créancier qui doit avoir eu l'avis
favorable de la commission de crédit.
Sur le plan dufond, la qualité de constituant,
la nature de l'assiette de la garantie ainsi que la nature de la créance
garantie comportent quelques distinctions par rapport à
l'hypothèque des terres.Le constituant doit être le
titulaire du droit réel de jouissance des terres donné en
garantie. Lorsqu'il s'agit d'un droit réel démembrement de la
propriété, le titulaire dudit droit240(*) doit l'avoir inscrit au
Livre foncier. C'est dire que lorsque le droit réel de
démembrement n'est pas inscrit, il n'est pas susceptible de garantie
puisque le droit du titulaire n'est pas public. Ainsi, à la
propriété reconnue au Livre foncier et visée par
l'hypothèque de l'immeuble, la titularité du droit de jouissance
démembré inscrit au Livre foncier est exigée de celui qui
donne ce droit en garantie et non le propriétaire. S'agissant des droits
réels constitués sur les terres domaniales, c'est le
concessionnaire du domaine national241(*), le permissionnaire ou l'occupant du domaine public
artificiel déclassé242(*) et le preneur à bail243(*) qui ne peuvent que mettre
leurs droits244(*) en
garantie et jamais l'administration qui leur ont concédé lesdits
droits de jouissance.Les mêmes dispositions qui évoquent la
qualité de ceux pouvant mettre leurs droits de jouissance en garantie
évoquent notamment les droits susceptibles de telle garantie. Il s'agit
de ceux déterminés dans la première partie.
Par rapport à la créance, il a
été développé ci-haut que deux règles sont
applicables. Pour l'hypothèque portant sur les droits réels de
jouissance résultats du démembrement du droit de
propriété, ils peuvent garantir toute créance. L'AUS ne
prévoit pas de conditions restrictives245(*). En revanche, l'autorité règlementaire
du 11 août 2015246(*) exige l'exclusivité de certaines
créances pour être garanties par les droits réels de
jouissance des terres domaniales. Ces restrictions peuvent même aller
à déterminer la qualité des créanciers247(*) ou nécessiter
l'agrément de l'Administration pour la partie au profit de laquelle la
garantie est consentie248(*). Exception faite des droits du preneur à bail
des terres du domaine national249(*) qui peut mettre son droit en garantie de toute
créance.
Au regard de ce qui précède, des
spécificités sont reconnues pour modifier le régime de
l'hypothèque de l'immeuble lorsqu'il s'agit de former une
hypothèque portant sur la jouissance des terres. Pour
l'hypothèque portant sur certains droits réels de jouissance des
terres domaniales, en raison de l'exclusivité des créances
à garantir, il s'agit plus exactement d'une hypothèque
« légale » qui peut être conclue par les
parties pour éviter le recours au juge et parfois à
l'Administration. C'est donc une hypothèque légale dont le
rôle de l'Administration sur certains points se substitue,
curieusement250(*),
à celui joué habituellement par le juge. Il y a aussi des
spécificités tenant au régime de publicité
lorsqu'il s'agit de l'hypothèque de jouissance des terres.
B. Les règles
spécifiques relatives au régime de publicité
La condition d'obtention d'un titre foncier au profit du
concessionnaire du domaine national et la condition d'inscription des droits
réels de jouissance démembrements du droit de
propriété relèvent des conditions mêmes de formation
de l'hypothèque. Ces conditions sont exigées en vue de rendre
possible l'inscription hypothécaire. En effet, il n'est possible
d'inscrire l'hypothèque que lorsque le droit sur lequel elle porte est
public.
De manière spécifique aux droits de jouissance
des terres domaniales, l'autorité règlementaire du 11 août
2015 a institué auprès du Conservateur foncier un registre
spécial « en vue de l'enregistrement des concessions ou
des baux domaniaux, ainsi que des divers droits, actes, titres ou transactions
qui leur sont attachés »251(*) pour rendre lesdits droits
opposables aux tiers. Il se dégage donc que lorsqu'il faudra inscrire
une hypothèque sur un droit de jouissance de cette nature, c'est dans ce
registre spécial et nécessairement à la marge de chaque
droit enregistré que l'inscription sera faite. L'impossibilité
d'établir un titre foncier au profit d'un preneur à bail des
terres domaniales est donc clairement supplée par la création
dudit registre dans lequel l'enregistrement mène à la
délivrance d'un certificat.
Après l'institution de ce registre spécial, il
reste curieux que l'autorité règlementaire du 11 août 2015
prévoit la possibilité d'établir un titre foncier au
profit du concessionnaire provisoire. Le droit de jouissance de ce dernier est
de durée très courte et bien plus, c'est un droit
nécessairement enregistré au registre institué.
L'inscription de l'hypothèque pourra être faite dans ledit
registre où la concession provisoire a déjà
été enregistrée tout comme d'autres droits réels de
jouissance susceptibles de garantie. Si par contre le titre provisoire est
délivré pour anticiper l'établissement du titre
définitif en cas de concession définitive, il reste vrai que la
concession provisoire ne mène pas toujours à la concession
définitive. Lorsque le bail emphytéotique est consenti par
l'administration au profit d'un particulier qui était concessionnaire,
le titre foncier provisoire préalablement délivré devra
être retiré, ce qui rend donc sans utilité la condition
d'établissement du titre foncier pour une concession provisoire. Cette
utilité pourra être reconnue si le passage de la concession
provisoire à la concession définitive opère
également et automatiquement passage de l'hypothèque de
jouissance des terres à l'hypothèque de l'immeuble, chose encore
non prévue en l'état.
En effet, le seul cas qui nécessite vraiment
l'établissement d'un titre foncier est la situation de l'occupant ou de
l'exploitant d'une dépendance du domaine national d'avant le 05
août 1974252(*).
D'ailleurs, le titre à délivrer dans ce cas est un titre foncier
définitif, ce qui permet de passer d'un droit de jouissance au moment de
la préconisation de l'hypothèque à un droit de
propriété au moment de sa formation.
Le régime de publicité de l'hypothèque
portant sur les droits réels de jouissance des terres connait des
spécificités. Lorsqu'il s'agit d'un droit démembré,
l'inscription est faite au livre foncier sur le titre foncier dont la
propriété a été démembrée. Le
législateur OHADA253(*) exige que le propriétaire de l'immeuble dont
le droit de propriété a été démembré
reçoive notification de l'inscription de ladite hypothèque,
à peine d'inopposabilité au bailleur qui peut d'ailleurs faire
annuler la réalisation de ladite hypothèque254(*). Lorsque par contre, il
s'agit des droits sur les terres domaniales, un registre spécial
enregistrant ces droits est institué. Dans ce registre spécial
doit également être inscrite l'hypothèque. L'inscription
devient caduque avec l'extinction de l'hypothèque qui peut survenir
lorsque le terme du droit de jouissance arrive.
Aussi bien les spécificités prévues pour
la formation de l'hypothèque de la jouissance des terres que pour sa
publicité, toutes participent de l'intention de faire produire à
ladite hypothèque les effets d'une véritable garantie.
Paragraphe 2 : les
règles spécifiques relatives aux effets de l'hypothèque
spéciale
Tout comme l'hypothèque de l'immeuble,
l'hypothèque de jouissance des terres est une garantie qui n'emporte pas
dépossession de son constituant tant que la créance garantie
n'est pas échue. Ainsi, les titulaires des droits de jouissance des
terres ne sont pas dépossédés de leur jouissance. Cette
unicité du régime qui prévaut avant l'exigibilité
de la créance n'est pas envisageable lorsque la créance devient
exigible. Il s'observe quelques effets spécifiques à
l'hypothèque de la jouissance des terres lors de sa réalisation
(A) et de même en ses modes de transmission et d'extinction (B).
A- Les effets
spécifiques à la réalisation
La réalisation d'une hypothèque constitue sa
mise en oeuvre, elle fait suite à l'exigibilité de la
créance et à la défaillance du débiteur dans le
paiement de ladite créance. La réalisation de l'hypothèque
de droit commun passe par l'attribution conventionnelle, l'attribution
judiciaire et la saisie immobilière. Pour l'hypothèque de la
jouissance des terres, il est bien possible que l'un ou l'autre de ces modes de
réalisation soit adopté255(*) comme déjà évoqué.
Comme spécificité de la réalisation de
l'hypothèque de la jouissance des terres envisagée par les
textes, il y a laréalisation par voie administrativequi
consiste en la possibilité donnée au créancier de
faire substituer son débiteur défaillant dans la
réalisation des investissements objet de son droit de
jouissance256(*).
Ceci rend la réalisation de l'hypothèque de la jouissance des
terres complexe puisque l'Administration a un droit de regard sur la
qualité du bénéficiaire de ladite réalisation.
Par ailleurs, le droit de jouissance étant
précaire, la personne auteure de la rupture abusive de la jouissance des
terres se trouve très souvent condamner à indemniser le
bénéficiaire de la jouissance. Les droits du
créancier hypothécaire se reporteront automatiquement sur cette
indemnité. C'est le cas de la résiliation par
l'administration257(*) ou même par le propriétaire
pour le cas des droits de jouissance résultant du démembrement de
la propriété immobilière.
Le droit de jouissance consiste souvent en des constructions,
plantations, ouvrages et installations divers, les droits du créancier
hypothécaire peuvent également être reportés sur les
produits de ces matériaux lorsque le terme du droit de jouissance n'est
pas arrivé. En cas d'arrivée du terme avant la réalisation
de l'hypothèque, les droits du titulaire de la jouissance et
l'hypothèque s'éteignent. Les produits reviennent à
l'Administration pour les droits acquis sur le domaine public artificiel
déclassé258(*). Le cahier des charges y relatif peut prévoir
une autre solution, de même que le propriétaire et le titulaire du
droit de jouissance peuvent convenir des solutions allant à
concéder au dernier les produits des ouvrages, constructions et
installations qui ont servi à l'exercice du droit de jouissance.
Malgré ces évocations, il reste possible
d'observer des insuffisances et inadaptations dans la réalisation de
l'hypothèque de la jouissance des terres puisqu'elle parait ne pas
être efficacement envisagée, très peu de textes
législatifs et règlementaires l'envisagent vraiment. A contrario,
la transmission et l'extinction de l'hypothèque de la jouissance des
terres semblent quelque peu mieux abordées.
B- Les modes
spécifiques de transmission et d'extinction
Les spécificités de la transmission et de
l'extinction de l'hypothèque de la jouissance des terres sont
très rattachées aux caractéristiques des droits de
jouissance des terres eux-mêmes. Ce sont des droits soumis à
condition, ce sont des droits temporaires, précaires et limités.
Ils ne peuvent être facilement transférés mais ils
s'éteignent plus facilement.
La spécificité de latransmissiondu
droit hypothécaire constitué sur une jouissance des terres se
déduit de la possibilité donnée au créancier de
substituer un tiers au débiteur occupant ou exploitant, du domaine
public artificiel déclassé, défaillant. En effet, il
s'agit d'un transfert de droit et de l'hypothèque qui le grève.
Ce transfert pourrait constituer à la fois une modalité de
réalisation comme déjà vu mais également un mode
d'extinction de puisque le tiers peut être amené à
désintéresser directement les créanciers et donc purger
son droit de jouissance de toutes charges.
Lorsqu'il s'agit de l'hypothèque de certains droits de
jouissance des terres domaniales dontl'hypothèque n'est permise qu'en
considération du lien de la créance garantie avec la jouissance,
il reste difficile d'envisager sa transmission par voie de cession
d'hypothèque, sauf lorsque ladite créance remplit la
condition d'existence de lien de connexité avec la jouissance dont le
droit est l'assiette de la garantie.
Le caractère temporaire et même
précaire de la jouissance des terres conduit aussi à la
temporalité et à la précarité de
l'hypothèque259(*), c'est dire que l'hypothèque
s'éteint aussitôt que s'éteint le droit sur lequel elle
porte. En effet,ledit droit peut disparaître à tout moment
même avant l'expiration de la durée fixée.
L'hypothèque reste donc tributaire des mouvements d'extinction qui
guettent, à tout moment, les divers droits réels de jouissance
des terres. A contrario, pour l'hypothèque de l'immeuble, la
propriété étant perpétuelle, l'extinction par
caducité du droitne peut pas être envisagée, sauf pour les
cas où l'immeuble est affecté de certaines conditions conduisant
à l'extinction sans produire ses effets260(*). Il ne doit pas être
perdu de vue qu'une extinction abusive du droit réel par le
propriétaire ou l'administration donne droit à indemnisation.
Cette indemnisation devient l'assiette de la garantie.
La destruction, la dégradation ou la perte des
investissements réalisés sur les terres objet de jouissance
peuvent également constituer des évènements qui
éteignent la garantie sauf lorsque des investissements sont à
nouveau réalisés et permettraient dans ce cas la substitution
desdits investissements à ceux antérieurs. Il s'agirait ainsi des
droits flottants. Comme déjà signalé,
l'hypothèque se reportera sur l'indemnité d'assurance y
relative261(*).
La jouissance des terres a des caractéristiques
déterminées qui ont rendu nécessaire leur prise en compte
dans l'organisation du régime de la garantie dont elle peut constituer
l'assiette. Au moment de sa formation, sont pris en compte la qualité de
titulaire du droit réel de jouissance et non pas celle de
propriétaire des terres. Pour la publicité, il y a l'institution
d'un registre spécial d'enregistrement des droits de jouissance des
terres et l'inscription hypothécaire devient à cet effet
possible. Des effets supplémentaires à ceux de
l'hypothèque de l'immeuble peuvent être envisagés pour
l'hypothèque de la jouissance des terres, tout comme ses modes de
transmission et d'extinction. La revue de toutes ces règles peut amener
à conclure que le régime de l'hypothèque de la jouissance
des terres est suffisamment organisé. Mais en réalité, il
n'en est pas grande chose, il y a d'insuffisances et inadaptations multiples
que le législateur gagnerait à aborder en vue de l'adaptation du
droit des biens aux réalités relatives à la
propriété, à la possession et aux formes de jouissance
d'une part. D'autre part, il faudrait aussi adapter le droit des garanties
à ses propres réalités et aux évolutions du droit
des biens déjà évoqué.
SECTION 2 : UNE PRISE
EN COMPTE A PARFAIRE POUR INSUFFISANCES ET INADAPTIONS
Le droit positif présente une situation qui voudrait
convaincre du fait que la nature particulière de la jouissance des
terres par rapport à la propriété de l'immeuble a
été prise en compte, et ceci surtout en certaines des
règles organisant le régime de l'hypothèque portant sur
ladite jouissance. Cette prise en compte est-elle suffisante ou même
adaptée ? C'est la question qui se pose. En effet, une garantie
doit être effective puis être éventuellement efficace pour
enfin espérer être idéale. La condition
d'effectivité tient au texte262(*) qui organise la garantie c'est-à-dire
à sa vocation à être réellement appliqué en
société263(*). La condition d'efficacité tient
à l'aptitude d'un régime juridique à produire le
résultat pour lequel elle a été conçue264(*). L'efficacité de la
garantie vise à donner au créancier la certitude d'être
payée à l'échéance si le débiteur ne
s'exécute pas. L'idéalisme en matière de garantie
recherche sa pleine efficacité, ce qui est très difficile
à atteindre265(*). Des auteurs suggèrent des
qualités266(*)
pour évaluer l'efficacité des garanties. Il convient ainsi
d'évaluer l'hypothèque de la jouissance des terres à
l'aune de ces qualités, ce qui revient à questionner sa
fonctionnalité. Mais bien avant, il faut évaluer la
conceptualisation de l'assiette de la garantie et de la garantie
elle-même. Cette conceptualisation détermine l'effectivité
et mieux l'efficacité à espérer. Il s'évince en
réalité d'une part, qu'il y a un problème de
conceptualisation de l'hypothèque de la jouissance des terres à
résoudre (Paragraphe 1). D'autre part, après une adéquate
conceptualisation, la fonctionnalité de l'hypothèque de
jouissance des terres qui recèle aujourd'hui certaines insuffisances et
inadaptations (Paragraphe 2) ne devrait pas être compromise.
Paragraphe 1 : Le
problème de conceptualisation de l'hypothèque de la jouissance
des terres et sa résolution
La conceptualisation est « mise au
service d'un système d'interprétation général dont
les termes prennent leur signification les uns par les autres (chacun
étant plus ou moins compris comme une métaphore ou une
approximation du réel)267(*). » En science juridique, elle vise
à fixer dans l'absolu la signification de chaque fait dont on
reconnaît qu'il constitue un fait juridique268(*). La jouissance des terres
est très souvent le résultat d'un acte juridique, dans sa
matérialité, elle constitue donc un phénomène
juridique. Il y a dans ce sens la consécration des droits réels
de jouissance des terres, mais cette appréhension est faite de
manière superficielle par le droit positif.
La communauté de l'objet sur lequel porte
l'hypothèque de l'immeuble et celle de la jouissance des terres conduit
peut-être à l'indistinction de leurs régimes, mais il a
été développé à la première partie
que l'assiette diffère. L'une porte sur des droits réels de
jouissance alors que l'autre porte sur l'immeuble. Cette distinction de
l'assiette aurait dû conduire à distinguer leurs régimes,
chose qui n'en est pas ainsi en l'état. Ceci démontre que la
conceptualisation de l'assiette de l'hypothèque de la jouissance des
terres recèle des failles (A). Celles-ci ont facilement permis
l'organisation insuffisante du régime de ladite hypothèque, non
sans permettre la transposition des règles qui lui sont
inadaptées (B).
A- Les failles de la
conceptualisation de l'assiette de la garantie
Dans l'esprit du législateur OHADA et de
l'autorité règlementaire du 11 août 2015, un droit
conférant jouissance des terres, qui est en réalité une
simple prérogative de jouir des terres, est
considéré plutôt comme s'il s'agissait d'une
prérogative presqu'assimilable à la propriété
desdites terres. C'est une suite aux idées qui ont présidé
à l'adoption du code civil en 1804. A cette époque, concéder un droit de jouissance des terres était
extrêmement encadré. Cela n'était possible que dans le
cadre des divers usufruits et droits d'usage et d'habitation reconnus à
certaines personnes uniquement en considération de leur statut ou de
leur rapport avec le propriétaire terrien. Etaient par ailleurs
envisagées les servitudes qui ne sont en réalité que des
droits accessoires aux terres parce que intimement liés à leur
utilisation. Bien qu'organisé à cette époque, le louage
n'épousait véritablement pas la philosophie des droits
réels. D'ailleurs ledit louage était envisagé dans le
sillage des contrats spéciaux. C'est près d'un siècle
après, en 1902 notamment, que le bail emphytéotique est connu et
tout le vingtième siècle a par la suite fait développer
d'autres droits réels de jouissance des terres qui sont de nos jours
admis pour constituer l'assiette de l'hypothèque.
Un droit réel de jouissance des terres est, soit un
démembrement du droit de propriété des terres, soit une
prérogative accordée et reconnue dans les domaines par
l'Administration. A cause de l'assimilation de la propriété et
des droits de jouissance pouvant être concédés, les
derniers ne sont que très rarement évoqués dans l'AUS et
très peu utilisés dans la pratique. Ils ne sont en effet
évoqués qu'au moment de la constitution de la garantie. Ils sont
évoqués comme des droits sur lesquels l'hypothèque est
susceptible de porter et très rarement évoqués à
d'autres étapes de l'organisation du régime de
l'hypothèque269(*).
En effet, l'assimilation excessive de l'immeuble et
de la propriété de l'immeuble aux droits réels de
jouissance pouvant être constitués sur le même immeuble
occulte véritablement ces derniers. Ceci est vrai pour la simple raison
que ses caractéristiques ne sont pas suffisamment perceptibles encore
moins étudiées270(*). D'ailleurs, ils semblent être quelque peu
négligés par le droit positif271(*). En effet, de nos jours et beaucoup plus pour
l'avenir, des baux de longue durée272(*) ou des droits réels de jouissance des terres
innomés seront davantage consentis, et moins la cession entière
de l'immeuble sera faite. Puisque ces droits constituent des
éléments du patrimoine de leurs titulaires, ils doivent
également pouvoir facilement leur ouvrir droit à garantir le
remboursement des crédits auxquels ils prétendent pour les mettre
en valeur ou pour d'autres investissements.
Il se précise donc que l'assimilation
complète de l'immeuble aux droits réels immobiliers divers
et spécifiquement à ceux conférant jouissance rend
difficile l'utilisation de ces derniers comme assiette de l'hypothèque.
Il est vrai que pour un seul droit de propriété, plusieurs droits
réels de jouissance pourront être constitués et quels
qu'ils soient, le seul droit de propriété leur tiendra
prééminence. Relativement à la garantie, pour changer la
tendance, il est souhaitable de considérer les droits réels de
jouissance des immeubles tels qu'ils sont. L'idée est de s'inscrire
dans la philosophie de ceux qui préconisent une réforme du droit
des biens273(*).
Cette réforme serait grande si elle viendrait à consacrer un
titre entièrement dédié aux droits de jouissance des
terres à côté du droit de propriété
immobilière. Cette conceptualisation déclinée en une
appréhension singulière des droits de jouissance par le
législateur permettra de mieux conceptualiser leur garantie.
B- La conceptualisation de
l'hypothèque de la jouissance des terres
La garantie portant sur la jouissance des terres étant
envisagée non pas séparément mais plutôt
indistinctement de l'hypothèque de droit commun, il en découle
qu'un simple copiage est fait des rigidités ainsi que des
éventuelles faiblesses de la dernière. L'assiette est
pourtant distincte. La jouissance des terres, caractérisée
souvent en « peines et soins » ou
« impenses » pour désigner les cultures,
constructions et améliorations apportées aux terres, est
distincte de l'immeuble ou des terres et des droits de propriété
sur elles. Les impenses constituaient autrefois l'assiette du nantissement. La
nature de la garantie portant sur la jouissance des terres a été
appréhendée différemment par le premier AUS de 1997, avec
un léger changement lors de la révision de 2010. Il y a à
espérerun plus grand changement lors de la prochaine révision.
Il y a nécessité d'envisager de
manière formelle c'est-à-dire prévoir dans
l'Acte uniforme OHADA organisant les sûretés un titre ou chapitre
ou même une section relative à la garantie ou l'hypothèque
de jouissance des terres avec des modes de constitution et de
réalisation plus souple.Il s'agira d'adopter des modes visant
clairement l'objectif d'efficacité,c'est-à-dire amener le
créancier à accepter telle hypothèque pour garantir le
remboursement de son crédit. Ceci permettrait de parvenir à une
situation où les crédits seront offerts aux titulaires des droits
de jouissance parce qu'il sera reconnu auxdits droits leurs réelles
valeurs économiques capitalisables.
Il est perceptible du décret du 11 août 2015
qu'il y a un renvoi, excessif, aux dispositions sur
l'hypothèque générale c'est-à-dire de l'immeuble.
Cette technique de renvoi n'est pas du tout admissible pour
l'intelligibilité et l'efficacité d'un régime
juridique274(*), d'une
garantie de surcroit. L'autorité décrétale qui avait bien
la possibilité de déroger auxdites règles et de
créer celles adaptées à l'hypothèque de la
jouissance des terres dans les domaines a plutôt fait autre chose. De
même, le législateur OHADA qui a choisi de n'évoquer que la
possibilité de constitution d'une hypothèque portant sur les
droits réels de jouissance des terres peut décider de
séparer cette hypothèque de celle de l'immeuble et lui organiser
un régime propre. L'OHADA a fait pareil avec les différentes
sous-catégories de gages ou de nantissements275(*). D'ailleurs, cela participe
de la vie et l'évolution des garanties en
général276(*). En tout si la réorganisation de cette
hypothèque arrivait vraiment, elle éviterait des écueils
et distorsions observés dans la pratique et que la CCJA est aujourd'hui
obligée de corriger277(*).
La réformation conceptuelle de la jouissance
des terres qui constitue l'assiette de l'hypothèque spéciale et
la réformation conceptuelle de l'hypothèque spéciale
elle-même doivent s'accompagner d'une réformation fonctionnelle
c'est-à-dire d'une réorganisation et d'une optimisation de son
régime en envisageant une mise en oeuvre fonctionnellement
adéquate.
Paragraphe 2 : Les
insuffisances et inadaptations fonctionnelles de l'hypothèque de
jouissance des terres
Des difficultés de constitution et de mise en oeuvre de
la garantie des droits de jouissance démembrements du droit de
propriété et sur les terres domaniales se révèlent
en pratique. Au regard d'une part de la simple transposition ou du recours
presqu'automatique au régime de l'hypothèque de l'immeuble et
d'autre part des caractéristiques propres à la jouissance des
terres, des insuffisances et inadaptations se ressentent tant dans la
constitution (A) que dans les effets (B) de leur hypothèque. Ce qui
appelle en quelque sorte à une véritable réforme.
A- La réforme des
règles de constitution de l'hypothèque
spéciale
L'approche fonctionnelle d'une garantie est de
s'intéresserà son fonctionnement pour l'atteinte de l'objectif
pour lequel elle est constituée. C'est celui de déterminer un
créancier à offrir du crédit. Par la confiance qu'il a en
son débiteur et la garantie que ce dernier propose. Ledit
créancier sait qu'en cas de défaillance de son débiteur,
l'objet donné en garantie, réalisé, permettra de le
désintéresser. Pour cela donc, de manière pratique, le
créancier se posera tant de questions sur les différentes
garanties qu'offrent le prétendant au crédit.
La constitution de l'hypothèque de la jouissance des
terresest couteuse comme l'hypothèque des terres.La première en
est devenu dépourvue de visibilité, encore moins
d'effectivité278(*).Les qualités à prendre en compte en
vue d'une adéquate constitution des garanties279(*)en général et
de l'hypothèque de jouissance des terres peuvent être
organisées de la manière suivante :
- Constitution simple et sans dépossession. La
loi doit permettre la constitution rapide, simple et peu onéreuse d'une
sûreté sans priver le débiteur de l'usage des biens
grevés. Il n'en est pas ainsi par exemple de l'adoption des
règles de constitution de l'hypothèque de jouissance des terres.
Ses règles de constitution sont rigides. Un sous-seing
privé régulièrement enregistré et
publié suffirait à la constituer et la constater. La chose
étant qu'en en cas de réalisation, ce qui serait
aliéné, ce ne serait pas l'immeuble mais simplement une
prérogative sur celui-ci, cédée par le propriétaire
ou l'Administration.
- Faiblesse du coût.Le coût de la
constitution de la sûreté doit être faible. La constitution
par voie de Notaire n'est pas de nature à rendre aisée cette
constitution. Les Notaires ont des barèmes d'honoraires et frais d'acte
hors de portée pour la grande majorité, pourtant cette
majorité doit être encouragée à obtenir du
crédit et à offrir leur droit de jouissance en garantie.
- Une garantie doit pouvoir porter sur toutes
catégories de biens, garantir toutes catégories de dettes et
être constituées entre toutes personnes. Pour
l'hypothèque de la jouissance des terres, s'il est vrai qu'il en est
ainsi pour certains droits réels de jouissance des terres, pour d'autres
ce n'est pas le cas280(*).
- Relativement à la publicité, il a
été vu qu'elle a bien été prise en compte à
travers l'inscription des droits réels démembrements de
propriété et l'inscription de l'hypothèque à leur
suite ainsi que la création du registre spécial aux baux et
concessions sur les terres domaniales. L'exigence y relative est qu'il doit
être un système efficace qui contient des renseignements
toujours mis à jour et facilement accessible aux usagers.
- L'autonomie de la volonté doit aussi ne pas
être négligée en matière de garantie.Les
parties doivent autant que possible être laissées libres d'adapter
la sûreté aux besoins particuliers de leur transaction. Doit
simplement être évité l'abus aux dépens de la partie
qui serait faible. Les textes sur la consommation doivent prendre en compte la
situation des consommateurs de crédit en s'attardant de plus en plus sur
les mesures de protection appropriées.
Les insuffisances et inadaptations fonctionnelles tenant
à la constitution de l'hypothèque de la jouissance des terres
étant relevées, des suggestions étant également
faites, celles tenant aux effets de ladite hypothèque doivent
également être évoquées.
B- Repenser les effets de
l'hypothèque de jouissance des terres à partir de quelques
principes
Relativement aux effets des garanties de manière
générale, les principes suivants peuvent être
observés :
- Le recouvrement de la créance doit être
opéré sur les biens donnés en garantie.En cas de
non-paiement de la dette garantie, le titulaire du droit garanti doit
être à mesure de réaliser les biens donnés en
garantie et d'affecter le produit de la vente au recouvrement de sa
créance en priorité par rapport aux autres créanciers. Il
y a lieu de relever, relativement à ce point que concernant les droits
réels de jouissance des terres, la réalisation peut être
quelque peu hypothétique. Mais l'assurance qu'il y a à recourir
auxdits droits est que leur résiliation abusive peut mener à
l'indemnisation de leur titulaire et par ricochet du bénéficiaire
de la garantie.
- L'exécution de la mesure à laquelle
mène la garantie doit porter sur son assiette.Les procédures
d'exécution de la garantie doivent permettre une réalisation
rapide des biens grevés à la valeur du marché. Sur ce
point, il y a lieu d'évoquer trois idées intéressantes
à ne pas négliger pour une éventuelle organisation d'un
régime spécifique de l'hypothèque de jouissance.
La première idée est en rapport avec la
saisie immobilière281(*) qui est une procédure longue imaginée
pour adjuger l'immeuble. Cette voie d'exécution est couteuseet difficile
à l'utilisation pour l'hypothèque de la jouissance des
terres282(*). Pour la
rendre utilisable comme voie de réalisation de cette dernière,
elle doit être réorganisée en empruntant quelques
règles de la saisie vente283(*). Certes, la saisie vente concerne les meubles mais
l'application des règles concernant les meubles aux immeubles n'est pas
nouveau puisque c'est le cas en matière de saisie des récoltes
sur pieds.
La deuxième idée est en rapport avec la
saisie des récoltes sur pieds284(*) qui est une mesure d'exécution forcée
qui n'est véritablement pas précédée de
possibilité de conclusion de garantie. En effet, il pourrait être
donné aux parties et nécessairement au titulaire du droit de
jouissanced'avoir un crédit de court terme ou même de long
terme285(*) et de
proposer comme garantie ses droits et fruits générés sur
les terres objet de sa jouissance. A la réalisation de telle garantie,
le créancier hypothécaire recourra à la procédure
de saisie des récoltes sur pied, ou mieux, il exercera simplement son
droit de préférence si la procédure est engagée par
un autre créancier. Son droit de suite pourra également
être mis à contribution en cas de vente frauduleuse desdites
récoltes, la publicité instituée devra beaucoup servira
à la sécurisation des droits du bénéficiaire de la
garantie.
La troisième idée est relative à la
mesure évoquée à l'article 265 de l'AUPSRVE qui
prévoit clairement, lorsqu'il y a saisie immobilière, la
possibilité pour le débiteur d'offrir les fruits de son immeuble
pendant deux années à son créancier pour
éviter la vente dudit immeuble. A travers cette mesure, il peut
être imaginé un mode spécifique de réalisation de
l'hypothèque de la jouissance des terres. Il consistera pour le
créancier à se faire attribuer conventionnellement ou
judiciairement le droit aux fruits de l'immeuble pendant une durée
pouvant couvrir sa créance. Mieux il pourra réorganiser le
système de génération des fruits, en investissant, pour
accélérer son remboursement.
- L'efficacité de la garantie en cas
d'insolvabilité dépend généralement des
dispositions sur les procédures collectives. La garantie doit
rester efficace et susceptible d'exécution en cas de faillite ou
d'insolvabilité du débiteur sur les biens duquel la
sûreté a été constituée. Le décret du
11 août 2015 prévoit la substitution, après proposition du
créancier, du débiteur occupant ou exploitant du domaine public
artificiel déclassé. Cette préconisation vise visiblement
à assurer l'efficacité de la garantie en cas
d'insolvabilité du débiteur. Mais pour l'hypothèque
portant sur d'autres droits de jouissance, les créanciers connaissent
les restrictions et blocages prévus par les procédures
collectives.
De manière fonctionnelle, il peut également
être envisagé le passage de l'hypothèque de jouissance des
terres à l'hypothèque de l'immeuble ou même à une
autre hypothèque de jouissance. Ceci est envisageable pour une
hypothèque portant sur une concession provisoire. Lorsque la concession
provisoire devient une concession définitive, l'hypothèque de
jouissance s'éteint alors qu'il peut être envisagé que
l'hypothèque de jouissance se transforme automatiquement en
hypothèque de l'immeuble. Certes le créancier
intéressé pourra bénéficier de l'hypothèque
légale du fournisseur de denier mais la constitution de cette
dernière oblige à une procédure judiciaire qui peut
être évitée. Par ailleurs, le titulaire d'un droit de
superficie ou des baux peut devenir propriétaire des terres et donc il y
a confusion du droit de propriété et du droit de jouissance,
pareille confusion éteint les droits réels de jouissance et leurs
garanties avec. Pourtant, ces évènements doivent être pris
en compte dans l'organisation du régime de l'hypothèque de
jouissance des terres.
L'utilisation de la jouissance des terres comme garantie passe
par une organisation cohérente et adéquate de l'ensemble des
droits qui confèrent ladite jouissance et aussi de ladite garantie. La
possibilité de réelle mise en oeuvre de cette garantie doit
être analysée ; c'est la question de sa fonctionnalité
tant dans la formation que dans les effets. Ceci nécessite au
préalable une révision des règles relatives à
l'assiette concernée. Il s'agit d'une révision qui
considère la jouissance des terres telle quelle et qui lui
conçoit une garantie adaptée à ses conditions d'obtention
et d'exercice. Ces nécessités considérées, elles
s'uniront à celles déjà prévues par le droit
positif et qui s'avèrent fort utiles à l'effectivité et
l'efficacité de l'hypothèque de jouissance comme
déjà développé ci-haut. Bref, il peut être
organisé un régime juridique spécifique à
l'hypothèque de jouissance et ce régime peut, avec beaucoup
d'intérêts et de manière mesurée, s'inspirer de
quelques-unes de celles de l'hypothèque de l'immeuble et au besoin de
certaines règles éparses qui organisent les mesures
d'exécution forcée.
CONCLUSION GENERALE
A la question de savoir si la jouissance des terres de droit
peut-elle servir de garantie de remboursements des crédits, la
réponse après analyse est que certains droits de jouissance des
terres sont insusceptibles de servir de garantie alors que d'autres sont
susceptibles suivant des conditions précises. Les modalités de
leur utilisation sont celles prévues pour l'immeuble à travers le
régime de l'hypothèque. C'est un régime insuffisamment
adapté à leur utilisation, d'où la conclusion qu'il s'agit
d'une possibilité inconsistante c'est-à-dire à repenser et
à recadrer en l'état.
Les droits pouvant constituer l'assiette des garanties sont
généralement des droits réels aliénables et
saisissables, pourtant certains droits de jouissance sont accordés
en considération de la personne du bénéficiaire (usufruit
du conjoint survivant ou usufruit des père et mère sur les biens
des enfants par exemple) ou de ses nécessités (droit d'usage et
d'habitation ou les servitudes par exemple). Ceux-ci sont inutilisables comme
assiette de garantie pour leurs caractères inaliénable
et insaisissable.
Pour ceux des droits de jouissance des terres admis pour
servir d'assiette de garantie, ils sont de deux groupes.D'un côté,
il y a les démembrements du droit de propriété. Hormis
ceux qui sont affectés de condition d'inaliénabilité et de
saisissabilité, les démembrements du droit de
propriété pouvant être utilisés comme garantie
sont : le bail emphytéotique, le bail à construction, le
droit de superficie et les droits réels de jouissance innomés. Le
bail emphytéotique comme le bail à construction sont des baux de
très longue durée. Le droit de superficie leur est semblable avec
ceci de particulier qu'il s'agit d'un droit de jouissance
perpétuel. Ces droits confèrent à leurs titulaires de
tirer des terres qui leur sont données en jouissance des utilités
économiques énormes à travers les constructions,
installations, ouvrages et cultures. Ces « peines et
soins »ou« impenses » produisent des revenus qui
peuvent déterminer un prêteur à s'en prévaloir comme
garantie. Il y a divers droits réels de jouissance innomés. Un
propriétaire peut les accorder à des tiers sur sa
propriété en vertu de la liberté contractuelle. Les droits
innomés ne s'identifient à aucun droit réel nommé,
ils empruntent aux caractéristiques des uns et des autres
démembrements du droit de propriété.
De l'autre côté, il y a des droits réels
reconnus sur les terres domaniales. Dans sa mission de gestion des vastes
terres constituées par le domaine national majoritairement et par le
domaine privé de l'Etat ainsi que le domaine public, l'Administration
peut reconnaitre des droits, parfois réels aux particuliers. Elle peut
concéder des baux emphytéotiques sur le domaine national et sur
le domaine privé de l'Etat. Dans ce dernier domaine, le bail ordinaire
peut être conclu au profit des particuliers par l'Administration
propriétaire. La concession provisoire peut être autorisée
dans le domaine national. Les droits reconnus dans ces cadres peuvent
être mis en garantie. Sur les dépendances du domaine national, aux
exploitants et occupants d'avant 5 août 1974 ont été
reconnus de véritables droits de jouissance qui peuvent servir de base
à la constitution d'une garantie. Mais pratiquement, ces derniers droits
de jouissance doivent être transformés en droit de
propriété. Dans le domaine public, des droits susceptibles de
garantie peuvent être reconnus aux concessionnaires et titulaires
d'autorisations d'occupation ou d'exploitation après la procédure
de déclassement.
Les droits réels de jouissance des terres sont
envisagés par les textes pour constituer l'assiette de
l'hypothèque, garantie généralement connue pour
grever les terres. La garantie de jouissance des terres adopte donc les
caractéristiques de l'hypothèque des terres que sont
l'accessoire, l'indivisibilité, la spécialité et la
non-dépossession du constituant avant l'échéance de la
créance garantie. Mais l'hypothèque d'un droit de jouissance a
ses caractéristiques propres car ledit droit est
lui-mêmetemporaire, précaire et
limité souvent matériellement mais toujours
juridiquement, par les droits du propriétaire et les prérogatives
de l'Administration. Il y a en outre des caractères tenant à la
créance garantie car certains droits de jouissance des terres ne sont
pas susceptibles de garantir toutes créances, les droits
conférés par l'autorisation d'occupation ou d'exploitation du
domaine public déclassé ainsi que les droits des concessionnaires
provisoires ne peuvent garantir que des créances nées
exclusivement à l'occasion de la jouissance.
Les modalités d'utilisation des droits réels de
jouissance des terres comme garantie s'adossent sur celles de
l'hypothèque concernant les terres. Les fondements de constitution que
sont la convention, la loi et la décision de justice sont retenus et les
règles de constitution, allant des conditions de fond et de forme aux
règles de publicité, sont donc les mêmes. Ainsi, le recours
au Notaire est exigé pour la validité de la constitution. Le
constituant doit être capable et titulaire du droit de disposer des
droits mis en garantie, le pouvoir de disposer est exigé en certains
cas. Les droits mis en garantie ainsi que les créances garanties doivent
être déterminés ou tout au moins déterminables
suivant le principe de spécialité. La publicité de la
garantie qui se caractérise par l'inscription est exigée et de
même cette formalité est précédée de la
publicité préalable des droits constituant l'assiette de la
garantie.
Les effets de l'hypothèque de l'immeuble avant et
après l'échéance de la créance garantie sont
également transposés à l'hypothèque de la
jouissance des terres. La voie de l'attribution conventionnelle ou judiciaire
peut être envisageable et la saisie immobilière n'est pas exclue
pour la réalisation. Entre les créanciers, les droits de
préférence des uns et des autres sont exercés et le tiers
acquéreur ne peut échapper au droit de suite des
créanciers hypothécaires. L'hypothèque d'un droit de
jouissance se transmet et s'éteint suivant les mêmes modes que
l'hypothèque de l'immeuble c'est-à-dire à titre accessoire
avec les différents mouvements de la créance et à titre
principal suivant les aléas propres à la garantie.
La transposition des règles de l'hypothèque de
l'immeuble à l'hypothèque de jouissance des terres semble ne pas
déterminer les créanciers à y recourir pour garantir le
remboursement de leurs crédits. L'hypothèque de jouissance n'est
pas visible et intelligible bien que la jouissance des terres représente
une valeur importante utilisable comme garantie. Il y a une difficulté
de conceptualisation des droits de jouissance des terres. Il est
inadapté de considérer indistinctement l'immeuble et les
utilités dont il est possible de tirer de l'immeuble en vertu d'un droit
de jouissance. Le législateur en a peut-être conscience puisqu'il
organise quelques règles spécifiques à l'hypothèque
lorsqu'elle porte sur les droits de jouissance des terres. Il en est ainsi de
l'évocation des titulaires des droits de jouissance pour constituer la
garantie et non de la qualité de propriétaire des terres dont
jouissance. Ce dernier doit en tout cas être notifié de
l'inscription de l'hypothèque du droit de jouissance de ses terres. Pour
les droits dans les domaines, le rôle de l'Administration dans la
constitution de leur garantie est renforcé. Un registre spécial
est prévu pour la publicité des droits de jouissance des terres
domaniales et pour recevoir les inscriptions des garanties dont ils peuvent
être l'assiette. L'Administration intervient quelques fois lorsqu'il
s'agit de réaliser les droits de jouissance des terres domaniales.
Au demeurant, il se trouve nécessaire d'organiser un
régime juridique propre à l'hypothèque de
jouissance des terres. Ledit régime peut bien emprunter à
certaines règles précises et déterminées de
l'hypothèque de l'immeuble. La distinction de l'assiette, l'immeuble
pour l'une et la jouissance pour l'autre, amène à penser d'autres
règles déjà préconisées dans le cadre du
gage immobilier et d'autres en matière de voies d'exécution qui
sont les voies de réalisation de certaines garanties. C'est le cas de la
saisie des récoltes sur pieds qui n'est précédée
d'aucune garantie et de la mesure de cession des revenus de l'immeuble
préconisée pour suspendre voire mettre un terme à la
procédure de saisie immobilière. Il est envisageable de partir
d'une conceptualisation des droits de jouissance des terres ainsi que de
l'hypothèque lorsqu'elle porte sur ces droits pour qu'elle soit
utilisable, fonctionnelle et véritablement utilisée.
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES ET MANUELS
BARRAUD (B.),La recherche juridique - Sciences et
pensées du droit,Paris, L'Harmattan, coll. Logiques juridiques,
2016, 556p.
DRUFFIN-BRICCA (S.), L'essentiel de l'introduction
générale au droit, 15e éd, Clamecy,
Gualino, 2019-2020, 161p.
KOUASSIGAN (G.), L'homme et la terre. Droits fonciers
coutumiers et droit de propriété en Afrique Occidentale,
Paris, Ed. BERGER LEVRAULT, 1966, 289p.
LIZ ALDEN (W.), A qui appartient cette terre. Le statut de
la propriété foncière coutumière au Cameroun,
Londres, Ed Fenton, 2011, 215p.
MALAURIE (Ph.) et AYNES (L.), Droit civil, Droit
dessûretés, par AYNES (L) et CROCQ (P), 14e
éd, Paris, LGDJ, 2020, 759p.
MALAURIE (Ph.) et AYNES (L.), Droit civil, Introduction au
droit, par MALAURIE (Ph.) et MORVAN (P.),6e éd, Paris,
LGDJ, 2016, 677p.
POUGOUE (P-G) (Sous la Direction de), Encyclopédie
du droit OHADA, Porto-Novo, Lamy, 2011, 2174p.
TERRE (F.) et SIMLER (Ph.), Droit civil. Les biens,
9e éd, Paris, Dalloz, 2014, 873p.
THESES ET MEMOIRES
BENMESSAOUD (S.), Les garanties des crédits bancaires.
Etude comparée, Mémoire de Magister, Université d'ORAN,
2013, 257p.
DOLS-MAGNEVILLE (M.), La réalisation des
sûretés réelles, Thèse, Université de
Toulouse 1 Capitole, 2013, 577p.
JAOUL (M.), La notion de fruits : étude de
droit privé, Thèse, Université de Toulouse 1,
2015.
JUILLET (Ch.), Les accessoires de la créance,
préf. Ch. LARROUMET, coll. de thèses, t. 37, Defrénois,
2009 ;
KALIEU ELONGO (Y. R.),Les garanties conventionnelles du
fournisseur de crédit en droit camerounais, Thèse,
Montpellier I. 1995, 361p.
KUATE MEGNE (M.L.), La place de la possession dans le droit
foncier camerounais, Mémoire de maîtrise de droit privé,
Yaoundé, 1989 ;
LOTTI (B.),Le droit de disposer du bien d'autrui pour son
propre compte: contribution à la distinction de la
propriété et des droits réels.Thèse,
Université de Paris-Sud XI, 1999, 519p.
NEMTCHENKO (D.), Le droit des sûretés au
prisme de la faute. Contribution à l'analyse de la notion de
sûreté, Thèse, Université de Montpellier, 2017,
568p.
ROLAIN (M.),Les limitations au droit de
propriété en matière immobilière,
Thèse, Université Nice Sophia Antipolis, 2015, 595p.
SOCKENG (R.), La place de la terre dans le processus de
développement économique du Cameroun, mémoire de
maîtrise, Université de Yaoundé, 1986.
TCHAPMEGNI (R.), Le contentieux de la
propriété foncière au Cameroun, Thèse,
Université de Nantes, 2008, 532p.
ARTICLES ET RAPPORTS
COTULA (L.) et GIEDRE JOKUBAUSKAITE, Investissements
fonciers, redevabilité et cadre légal : Leçons de
l'Afrique de l'Ouest, Rapport de recherche IIED, Londres, 2016, 64p.
CROCQ (P.), «L'évolution des garanties de
paiement: de la diversité à l'unité», in
Mélanges Mouly, Litec, 1998, t. 2 pp. 317.
DURRY (G.), « Hypothèque et assurance »,
RJ com. 1982, pp. 27-36
EISENMANN (C.), « Quelques problèmes de
méthodologie des définitions et des classifications en science
juridique », Arch. Phil. Drt, 1966, pp.11-26
EMERICH (Y.), « La nature juridique des
suretés réelles en droit civiliste et en common law »,
RJT, 94, 2010, pp.99-139
FOKO (A.), « Bail commercial / Bail à usage
professionnel », in Encyclopédie du droit OHADA,
Porto - Novo, Lamy, 2011, pp. 400-439.
FRENETTE (F.) « De l'hypothèque :
réalité du droit et métamorphose de l'objet »,
Cahiers de droit, 39 (4), pp.803 - 822.
GAUDEMET (Y.), « Hypothèque et domaine des
personnes publiques », D. Aff. 1996, 33. (1649)
GINOSSAR (S.)« Pour une meilleure définition
du droit réel et du droit personnel », RTD civ, 1962.
Groupe de la BANQUE MONDIALE, Une politique foncière
pour la croissance et la lutte contre la pauvreté, Rapport d'Etude,
Editions ESKA, 2005.
JOURDAIN (P.), «Quelques réflexions sur la notion
de garantie en droit privé», Mélanges Malinvaud, Litec,
2007.
KENFACK (P-E), NGUIFFO (S.) et NKUINTCHUA (T.),
Investissements fonciers, redevabilité et cadre légal :
Leçons du Cameroun, Rapport de recherche IIED, Londres, 2016,
32p.
KENFACK (P-E.) « L'effectivité des
dispositions des lois contraires au droit. Réflexions à partir
des lois foncières et de travail au Cameroun », in
L'Effectivité du droit. De l'aptitude du droit objectif à la
satisfaction de l'intérêt particulier. Mél. Professeur
François ANOUKAHA, Paris, L'Harmattan, 2021, pp.87-97
KUATE TAMEGHE (S. S.), « L'efficacité des
sûretés judiciaires dans le droit issu de l'OHADA »,
Revue de droit africain, n°42, avril-juin 2007.
MIENDJIEM (I. L.), « Régime
général des sûretés », in
Encyclopédie du droit OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, pp.
1480-1508
MINKOA SHE (A.), « Privilèges »,
in Encyclopédie du droit OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, pp.
1413-1424
NGUIFFO (S.), KENFACK (P-E) et MBALLA (N.), Les droits
fonciers et les peuples des forêts d'Afrique. Perspectives historiques,
juridiques et anthropologiques, Londres, 2009, 32p.
NOREAU (P.), « L'épistémologie de la
pensée juridique : de l'étrangeté... à la recherche
de soi. » Les Cahiers de droit, 52(3-4), 2011.
TCHAPMEGNI (R.) (Sous la direction de), la
problématique de la propriété foncière au
Cameroun, Actes de la Conférence sur le foncier, Mbalmayo, 2005,
143p.
TCHOU BAYO (J.P.), « Saisie-Vente », in
Encyclopédie du droit OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011,
pp.1770-1804.
LES TEXTES ET AUTRES
SOURCES
Traité de l'OHADA du 17 octobre 1993 signé
à Port - Louis et modifié le 17 octobre 2008 à
Québec ;
Acte Uniforme portant droit commercial général
adopté le 15 décembre 2010 ;
Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures
simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution adopté le 10 avril 1998 ;
Acte Uniforme OHADA portant organisation des
sûretés adopté le 15 décembre 2010 ;
Code civil applicable au Cameroun ;
Code civil applicable en France ;
Loi du 25 juin 1902 relative au bail
emphytéotique ;
La loi n°2009/010 du 10 juillet 2009 régissant la
location accession à la propriété
immobilière ;
La loi n°2010/020 du 21 décembre 2010 portant
organisation du crédit-bail au Cameroun ;
Loi n°2019/019 du 24 décembre 2019 fixant
certaines règles relatives à l'activité de crédit
dans les secteurs bancaire et de la micro finance au Cameroun ;
Ordonnance n°74-1 du 06 juillet 1974 fixant le
régime foncier modifié par la loi n°80-21 du 14 juillet 1980
et par la loi n°83/19 du 26 novembre 1983 ;
Ordonnance n°74-2 du 06 juillet 1974 fixant le
régime domanial ;
Décret n°76/165 du 27 avril 1976 fixant les
conditions d'obtention du titre foncier modifié et
complété par le décret n°90/1482 du 09 novembre 1990
et par le décret n°2005/481 du 16 décembre 2015 ;
Décret n°76/166 du 27 avril 1976 fixant les
modalités de gestion du domaine national ;
Décret n°76/167 du 27 avril 1976 fixant les
modalités de gestion du domaine privé de l'Etat modifié
par le décret n°77-339 du 03 octobre 1977 et par le décret
n°90/1980 du 9 novembre 1990 ;
Décret n°2015/3580/PM du 11 août 2015 fixant
les modalités d'enregistrement et le régime des garanties et
sûretés applicables aux concessions et aux baux domaniaux.
TABLE DES MATIERES
AVERTISSEMENT
i
DEDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
RESUME
iv
ABSTRACT
v
LISTE DES ABBREVIATIONS
vi
SOMMAIRE
viii
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : LA POSSIBILITE DECLAREE DE
RECOURIR A LA JOUISSANCE DES TERRES COMME GARANTIE
11
CHAPITRE 1 : L'IDENTIFICATION DES DROITS REELS
DE JOUISSANCE DES TERRES SUSCEPTIBLES DE GARANTIE
14
SECTION 1 : LES DEMEMBREMENTS DE LA
PROPRIETE IMMOBILIERE CONFERANT JOUISSANCE ADMIS COMME OBJET DE GARANTIE
15
Paragraphe 1 : Les baux, droits réels
susceptibles de garantie
16
A. Le bail emphytéotique
17
B. Le bail à construction
18
Paragraphe 2 : Les autres démembrements
du droit de propriété susceptibles de garantie
19
A. Le droit de superficie comme objet de
garantie
19
B. Les droits réels de jouissance
innomés objet de garantie
21
SECTION 2 : LES DROITS REELS DE JOUISSANCE DES
TERRES DOMANIALES SUSCEPTIBLES DE GARANTIE
23
Paragraphe 1 : Les droits réels de
jouissance dans les domaines public et privé de l'Etat susceptibles de
garantie
23
A. L'autorisation d'occupation temporaire du
domaine public artificiel : droit réel de jouissance susceptible de
garantie
24
B. Les baux sur les terres
domaniales susceptibles de garantie
25
Paragraphe 2 : Les droits réels de
jouissance sur le domaine national susceptibles de garantie
27
A. La concession provisoire : droit
susceptible de garantie
28
B. Le droit réel de jouissance des
occupants et exploitants des dépendances du domaine national au 4
août 1974
29
CHAPITRE 2 : LA NATURE JURIDIQUE DE LA GARANTIE
PORTANT SUR LA JOUISSANCE DES TERRES : L'HYPOTHEQUE
31
SECTION 1 : L'IDENTIFICATION DE LA
GARANTIE AU MOYEN DES DROITS DE JOUISSANCE DES TERRES COMME HYPOTHEQUE
32
Paragraphe 1 : L'identification comme
hypothèque au moyen de l'objet des deux garanties
33
A. L'immeuble comme assiette de
l'hypothèque de l'immeuble
33
B. Le droit de jouissance des terres comme
assiette de l'hypothèque du droit de jouissance des terres
35
Paragraphe 2 : Les caractéristiques
communes à l'hypothèque de l'immeuble et à
l'hypothèque des droits de jouissance des terres
35
A- L'hypothèque, une garantie sans
dépossession du constituant
36
B- L'indivisibilité et la
spécialité de l'hypothèque
37
SECTION 2 : LES CARACTERISTIQUES DE
L'HYPOTHEQUE DE LA JOUISSANCE DES TERRES
39
Paragraphe 1 : Les caractères tenant
à la nature de l'objet donné en garantie
40
A- Caractère temporaire et
précaire
40
B- Caractère limité
42
Paragraphe 2 : Les caractères tenant
à l'obligation garantie
43
A- Le caractère accessoire des
garanties aux créances garanties
43
B- L'exclusion de certaines créances
de l'assiette de l'hypothèque de certains droits de jouissance des
terres
45
DEUXIEME PARTIE : UNE POSSIBILITE INCONSISTANTE
QUANT AUX MODALITES D'UTILISATION DE LADITE JOUISSANCE COMME GARANTIE
48
CHAPITRE 1 : L'INCONSISTANCE PAR LE RECOURS
DEMESURE AUX REGLES DU REGIME DE L'HYPOTHEQUE DE L'IMMEUBLE
51
SECTION 1 : LE RECOURS AUX REGLES DE
CONSTITUTION DE L'HYPOTHEQUE D'IMMEUBLE
52
Paragraphe 1 : les modes de constitution de
l'hypothèque
52
A. Les fondements de constitution
52
B. Les règles de constitution
54
Paragraphe 2 : les règles de
publicité des deux formes d'hypothèques
56
A. Le titre constatant le droit
56
B. Le régime de l'inscription
hypothécaire
57
SECTION 2 : LE RECOURS AUX REGLES RELATIVES AUX
EFFETS DE L'HYPOTHEQUE DE L'IMMEUBLE
59
Paragraphe 1 : les effets de
l'hypothèque à sa réalisation
60
A- La réalisation de
l'hypothèque
60
B- les effets entre les personnes
impliquées
61
Paragraphe 2 : les modes de transmission et
d'extinction communs aux deux hypothèques
62
A- La transmission
63
B- L'extinction
63
CHAPITRE 2 : L'INSTITUTION D'UN REGIME
SPECIFIQUE A L'HYPOTHEQUE DE LA JOUISSANCE DES TERRES COMME SOLUTION
ENVISAGEABLE
65
SECTION 1 : UNE NECESSITE PARTIELLEMENT PRISE
EN COMPTE PAR LES TEXTES
66
Paragraphe 1 : les règles
spécifiques de constitution à l'hypothèque de la
jouissance des terres
66
A. Les règles spécifiques
relatives à la formation
67
B. Les règles spécifiques
relatives au régime de publicité
68
Paragraphe 2 : les règles
spécifiques relatives aux effets de l'hypothèque
spéciale
70
A- Les effets spécifiques à la
réalisation
70
B- Les modes spécifiques de
transmission et d'extinction
71
SECTION 2 : UNE PRISE EN COMPTE A PARFAIRE POUR
INSUFFISANCES ET INADAPTIONS
73
Paragraphe 1 : Le problème de
conceptualisation de l'hypothèque de la jouissance des terres et sa
résolution
74
A- Les failles de la conceptualisation de
l'assiette de la garantie
75
B- La conceptualisation de
l'hypothèque de la jouissance des terres
77
Paragraphe 2 : Les insuffisances et
inadaptations fonctionnelles de l'hypothèque de jouissance des
terres
78
A- La réforme des règles de
constitution de l'hypothèque spéciale
78
B- Repenser les effets de l'hypothèque
de jouissance des terres à partir de quelques principes
80
CONCLUSION GENERALE
83
BIBLIOGRAPHIE
86
I. OUVRAGES ET MANUELS
86
II. THESES ET MEMOIRES
86
III. ARTICLES ET RAPPORTS
87
IV. LES TEXTES ET AUTRES SOURCES
89
TABLE DES MATIERES
90
* 1 S. BENMESSAOUD, Les
garanties des crédits bancaires. Etude comparée, Mémoire
de Magister, Université d'ORAN, 2013, p.1
* 2 PH. MALAURIE et L. AYNES,
Droit civil. Les Sûretés, par L. AYNES et P. CROCQ,
14e éd, Paris, LGDJ, 2020, n°1.
* 3G. CORNU (Sous la Direction
de), Vocabulaire Juridique, 11e éd, Paris, PUF,
2016, p.286
* 4 M. WEBER, Economie et
Société, Tome 1 Les catégories de la sociologie,
trad. J. CHAVY, PLON, 1995, p. 125
* 5 Idem.
* 6 Le classement est
disponible à l'adresse internet suivante :
www.doingbusiness.org. Le
profil de l'économie camerounaise et le rapport Doing Business
2020 concernant exclusivement le Cameroun peuvent être
téléchargés à ladite adresse internet.
* 7 Il s'agit de l'indice
Doing Business n°5 : Getting credit (l'accès au
crédit), Movable collateral laws and credit information systems (le
droit des sûretés réelles et l'accès à
l'information sur le crédit sont les éléments
analysés et évalués). Pour cet indice le Cameroun a un
point de 60 sur 100 et est classé 80e.
* 8 C'est l'indice Doing
Businessn°10 : Resolving insolvency (le règlement des
questions d'insolvabilité) ; Time, cost, outcome and recovery rate for a
commercial insolvency and the strength of the legal framework for insolvency
(le temps, le coût, le résultat et le taux de remboursement pour
une insolvabilité résultant du cours des affaires et la vigueur
du cadre légal contre l'insolvabilité sont les
éléments analysés et évalués). Ce rapport
établit que la solvabilité du débiteur au Cameroun est
hautement problématique. En effet, le Cameroun a un point de 36,6 sur
100 et occupe le 129e rang. Ceci préfigure de la souplesse
des mesures de garantie mises en place ou peut-être même du manque
de prise en compte des diverses potentialités du débiteur pouvant
conduire à l'apurement de son passif.
* 9 Relativement aux mesures
d'évaluation de la capacité de remboursement des emprunteurs, la
loi n°2019/019 du 24 décembre 2019 fixant certaines règles
relatives à l'activité de crédit dans les secteurs
bancaire et de la micro finance au Cameroun énumèrent quelques
pièces et documents que ceux-ci doivent fournir en vue de conclure la
convention de crédit. Ces pièces et documents sont de
manière de non exhaustive indiquées à l'article 4
alinéa 2 de ladite loi.
* 10S. GUINCHARD et Th.
DEBARD, Lexique des Termes Juridiques, op. cit. pp.1020-1021.
* 11G. CORNU, op. cit.
pp.486-488.
* 12 La sûreté
elle-même se définit en effet comme « l'affectation
à la satisfaction du créancier d'un bien, d'un ensemble de biens
ou d'un patrimoine, par l'adjonction aux droits résultant normalement
pour lui du contrat de base, d'un droit d'agir, accessoire de son droit de
créance, qui améliore sa situation juridique en remédiant
aux insuffisances de son droit de gage général, sans être
pour autant une source de profit, et dont la mise en oeuvre satisfait le
créancier en éteignant la créance en tout ou partie,
directement ou indirectement. ». P. CROCQ,
Propriété et garantie, Thèse, Université
de Paris II, LGDJ, 1995, n°282.
* 13 P. CROCQ,
Propriété et garantie, op. cit. n°287.
* 14 C'est le sens des
articles 2092 et 2093 du code civil et de l'article 28 de l'Acte Uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement
des créances et des voies d'exécution. Le droit de gage
général est la prérogative qui appartient à tout
créancier et qui lui permet, en cas d'exigibilité de sa dette et
en cas de non-paiement volontaire et spontané de sa créance par
le débiteur, de saisir les biens de son débiteur et de les vendre
pour se faire payer sur le prix de ceux-ci.
* 15C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, Thèse, Université de Toulouse, 2013,
n°94. L'auteur explique que l'ancien droit français ne connaissait
pas le droit de gage général mais le prévoyait dans
l'hypothèque générale. C'était donc une
hypothèque qui recouvrait l'attribut du droit de gage
général. L'avènement du code civil en 1804 consacre le
droit de gage général distinctement de l'hypothèque.
* 16 Il en est ainsi parce
que le droit de gage général n'offre pas aux créanciers
les avantages reconnus aux sûretés. Ces avantages sont notamment
le droit de suite et le droit de préférence. Le droit de suite
permet à un créancier de suivre le bien affecté à
la garantie de sa créance en quelques mains qu'il pourrait se trouver au
moment de réaliser sa garantie, en cas de non remboursement par le
débiteur. Le droit de préférence de sa part permet au
créancier bénéficiaire de se faire payer en
priorité sur le prix du bien objet de son droit de
préférence avant les créanciers chirographaires, non
bénéficiaires dudit droit de préférence.
* 17 Ph. MALAURIE et L.
AYNES,Droit Civil. Les Sûretés, op. cit, n°4
* 18 L'Acte Uniforme OHADA
portant organisation des Sûretés principalement mais il y a des
garanties dans le domaine maritime et aérien qui ne sont pas
concernées par ce texte.
* 19 Initialement, le code
civil organisait les suretés et c'est toujours le cas en France. Tout de
même avec l'avènement de l'OHADA, certaines dispositions relatives
aux garanties subsistent. Il s'agit par exemple de la compensation (article
1289), de l'action directe considérée d'ailleurs comme une
sûreté, de l'action paulienne, de l'exception
d'inexécution, de la résolution pour inexécution, de la
solidarité passive (article 1200) qui peut parfois être
utilisée comme sûreté personnelle, de l'obligation in
solidum. Et même, certaines dispositions du code civil relatives aux
privilèges, hypothèques et aux sûretés de
manière générale restent en vigueur puisque les
différents actes uniformes n'ont pas adoptées des dispositions
les abrogeant.
* 20 Comme texte
règlementaire important dans le domaine, il y a le Décret
n°2015/3580/PM du 11 août 2015 fixant les modalités
d'enregistrement et le régime des garanties et sûretés
applicables aux concessions et aux baux domaniaux.
* 21 J. GATSI, droit des
biens et des sûretés dans l'espace OHADA, Limbé,
Presses Universitaires Libres, 2012, p.9. Les traitant des
« dérives de la pratique », l'auteur relève
que les établissements de crédits ont notamment recours aux
techniques de « domiciliation des traitements et salaires, clause
de fidélité, procuration irrévocable de vente par devant
notaire, délégation de pouvoir, etc. »Les
assurances crédits et les fonds de garanties des crédits
constituent également des garanties spécifiques. S. BENMESSAOUD,
« Les garanties des crédits bancaires », op.cit.
p.5
* 22 CH. GIJSBERS, «
Quel avenir pour les sûretés réelles ? », in
L'avenir du droit des biens, colloque Lille 7 mars 2014,2016, LGDJ, p.
131. Cet auteur conteste la qualification de sûreté réelle
puisque la sûreté ne porte pas sur la chose mais simplement sur la
valeur de la chose, contrairement au droit réel qui porte directement
sur la chose.
* 23G. CORNU (Sous la
Direction de), op. cit.,p.718 ;
* 24D'après le
Vocabulaire Juridique (G. CORNU, op. cit. p.68), l'antichrèse provient
du latin antichresis. Elle se définit comme une
« sûreté immobilière conventionnelle avec
dépossession (dont le pendant, sur les meubles corporels, est le gage
avec dépossession) » Plus précisément,
c'est une « convention d'affectation d'un immeuble à la
garantie d'une obligation en vertu de laquelle le créancier, investi de
la possession et de la jouissance de l'immeuble et tenu de pourvoir à la
conservation et à l'entretien de celui-ci, en perçoit les fruits
à charge de les imputer sur les intérêts (et
subsidiairement) le capital de la dette, et peut, sans en perdre la possession
le donner à bail à un tiers ou au débiteur lui-même,
lequel, en aucun cas, ne peut réclamer la restitution de l'immeuble
avant l'entier acquittement de la dette. »
Cette sûreté qui est une sorte de gage immobilier
avec dépossession et jouissance de l'immeuble mis en gage n'existe plus
en droit des sûretés des Etats parties à l'OHADA, l'acte
uniforme y relatif ne l'ayant pas prévu. Elle demeure en droit
français, elle est régie par les dispositions des articles 2387
à 2392 du code civil.
* 25 P. CROCQ, op.cit.
n°282. Avec ses travaux, l'auteur a pu démontrer que les
propriétés peuvent constituer aussi des garanties de
remboursement des crédits, elles sont utilisées aujourd'hui dans
le cadre des sûretés suivantes : la propriété
retenue à titre de garantie, de la propriété
cédée à titre de garantie, de la fiducie autrement
désigné transfert fiduciaire de créance à titre de
garantie. Le crédit-bail constitue aussi une sorte de
propriété-garantie,...
* 26 Le transfert fiduciaire
de somme d'argent est une sûreté ayant existé autrefois
mais abandonné pendant plusieurs siècles.
* 27 M. DOLS-MAGNEVILLE,
la réalisation des sûretés réelles,
Thèse, Université de Toulouse 1 Capitole, 2013, 577p.
* 28 G. CORNU (Sous la
direction de), Vocabulaire Juridique, op. cit., P.580
* 29S. GUINCHARD et Th.
DEBARD (Sous la direction de), Lexique des Termes Juridiques, op.
cit., p.1181
* 30 L'article 544 du code
civil dispose à ce sujet que : « La
propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la
manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage
prohibé par les lois ou par les règlements. »
* 31 S. GUINCHARD et Th. DEBARD
(Sous la direction de), Lexique des Termes Juridiques, op. cit.,
p.1021
* 32Idem
* 33 Dictionnaire de
l'Académie Française, consulté en ligne à l'adresse
www.ebooksfrance.com
* 34 P-E KENFACK,
« les indemnisations : une question de fonds », in
le Plus de Repères. Revue d'analyse et d'enquête,
n°001, juin 2014, p.6
* 35 Exception faite des
contentieux qui naissent dans les cas de vente à plusieurs personnes et
qui se multiplient ces jours. Voir à ce propos C. LANG,
« terrains acquis, litiges conquis », in le Plus de
Repères, op. cit. p.7. Le développement de cet auteur
renseigne qu'autant la possession que la propriété posent de
problèmes et donnent lieu à des contentieux de diverse nature
entre les protagonistes.
* 36 Presqu'idéale
parce que la propriété des terres reconnue par l'obtention d'un
titre foncier ne met vraiment pas à l'abri des problèmes et
contentieux. R. TCHAPMEGNI, La problématique de la
propriété foncière au Cameroun, Actes de la
Conférence sur le foncier, Mbalmayo, 2005, 143p.
* 37 P-E KENFACK,
« les indemnisations : une question de fonds », in
le Plus de Repères, op. cit. p.6
* 38Article 1er
alinéa 1 du Décret n°76-165 du 27 avril 1976 fixant les
conditions d'obtention du titre foncier au Cameroun.
* 39 L. D'AVOUT et B.
MALLET-BRICOUT, « La liberté de création des droits
réels aujourd'hui. » Recueil Dalloz, 2013, n°1
* 40 Bien que la jouissance
et la propriété soient des droits, il ne s'agit nullement des
mêmes droits. Le droit de propriété est un droit
réel complet alors que la jouissance est parfois un droit réel
démembrement du droit de propriété, en tout cas, elle
n'est jamais assimilable à cette dernière.
* 41 Rapport Doing
Business 2020, indice n°10 sus-évoqué.
* 42 MALAURIE Ph. et AYNES
L., Droit civil. Introduction au droit, par MALAURIE Ph. et MORVAN P.,
6eéd, Paris, LGDJ, 2016, n°134. B. BARRAUD, La
recherche juridique - Sciences et pensées du droit, L'Harmattan,
coll. Logiques juridiques, 2016, 556p.
* 43F. GENY,
Méthodes d'interprétation et sources en droit privé
positif, Essai critique (Xavier Magnon), t. 2, 2eéd,
LGDJ, 1919, pp. 74-93. C'est dans cet ouvrage que François GENY a
développé une méthode de recherche et de réflexion
sur le droit, qui se distingue de la méthode exégétique
arcboutée sur le droit positif, elle ne se confine non plus dans la
spéculation et la stipulation, ni dans la métaphysique juridique.
C'est cette méthode objective basée sur de l'empirisme qu'il a
été utile de s'en servir.
* 44MALAURIE Ph. et AYNES L.,
Droit civil, Introduction au droit,op. cit, n°73
* 45 F. ZENATI,
« Pour une rénovation de la théorie de la
propriété », RTD Civ 1993, pp. 307 et
s. ;R. M. RAMPELBERG, « Pérennité et
évolution des resincorporales après le droit
romain », Arch. Phil. Droit, t. 43, 1999.
* 46 C'est ce qui ressort de
la définition de la propriété contenue à l'article
544 du code civil applicable au Cameroun qui dispose ainsi :
« La propriété est le droit de jouir et disposer
des choses de la manière la plus absolue pourvu qu'on n'en fasse pas un
usage prohibé par les lois ou par les
règlements. »
* 47 C'est le fait
d'appréhender le seul rapport entre le propriétaire et son
cocontractant qui amène à telle considération. Le rapport
de la personne à la chose est direct, il s'agit d'un droit
réel.
* 48G. CORNU (Sous la
direction de), Vocabulaire Juridique, op. cit., p.873
* 49 Idem, p.285
* 50 SCAPEL, La notion
d'obligation réelle, PUAM, 2002
* 51 J.-B. SEUBE, « Le
droit des biens hors le Code civil », Les Petites Affiches, 15
juin 2005, n° 118.4.
* 52 Des auteurs
français évoquent notamment à ce sujet ce qui suit :
« certains textes confèrent expressément au preneur
un droit réel : tel est le cas du bail emphytéotique, du bail
à construction, du bail à réhabilitation, mais aussi du
bail à domaine congéable, du bail à complant, de la
concession d'exploitation d'une mine ou de la concession
immobilière. »TERRE F. et SIMLER Ph., Droit civil.
Les biens, 9e éd, Paris, Dalloz, 2014, n°928
* 53 Non seulement la
propriété elle-même peut être utilisée comme
garantie à travers les mécanismes de réserve ou de cession
de propriété mais également à travers celui du
crédit-bail. Aussi, la chose sur laquelle porte le droit de
propriété peut elle-même être objet de garantie
(l'hypothèque porte sur l'immeuble, le gage sur les meubles corporels,
le nantissement sur les meubles incorporels,...) et les formes variées
de propriété comme la copropriété sont objet de
garantie.
* 54 Le
nu-propriétaire, le tréfoncier ou le bailleur.
* 55 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit , n°665
* 56 Articles 625 à
636 du code civil applicable au Cameroun.
* 57 Articles 578 à
624 du code civil applicable au Cameroun. Il est largement admis que l'usufruit
des terres peut être susceptible d'hypothèque mais il s'agit de
l'usufruit créé par la volonté de l'homme et non de
l'usufruit légal parce que la loi confère ce droit simplement en
considération des relations entre le propriétaire et
l'usufruitier ce qui le rend insusceptible de passer d'une main
déterminée à une autre.
* 58 Cette définition
tirée du vocabulaire juridique est empruntée à l'article
1709 du code civil applicable au Cameroun.
* 59 Le bail est au coeur de
la distinction entre droit réel et droit personnel mais en
réalité il a plutôt plus contribué à les
rapprocher. M. PLANIOL, Traité de droit civil, 1e
éd, t 1, n°2158 et s. MICHAS, Le droit réel
considéré comme une obligation passive universelle,
thèse, Paris, 1990. F. HAGE-CHAHINE, in Essai d'une nouvelle
classification des droits privés, RTD Civ. 1982, pp. 705
s.
* 60 Le bail à usage
professionnel est substitué à l'ancien bail commercial. Il est
organisé aux articles 101 et suivants de l'AUDCG révisé le
15 décembre 2010. La qualification de bail commercial ou
désormais de bail à usage professionnel ne fait pas de cette
convention une à distinguer du bail emphytéotique et du bail
à construction qui peuvent être tous deux commerciaux et civils.A.
FOKO, « Bail commercial / Bail à usage
professionnel », in Encyclopédie du droit OHADA,
Porto - Novo, Lamy, 2011, pp. 400-439
* 61 C'est un
mécanisme consacré par une loi du 25 juin 1902.
* 62 G. CORNU (Sous la
direction de), Vocabulaire Juridique, op. cit. pp.118 et 396
* 63 Sa nature de droit
réel ne fait l'objet d'aucune spéculation. V. B. BOCCARA, Du bail
emphytéotique, REDI 1964, p.448
* 64 VIATTE, « Du
bail emphytéotique et de sa distinction du bail ordinaire à
longue durée », Rev. Loyers, 1973, p. 302.
* 65 TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens, 9e éd, Paris, Dalloz, 2014,
n°928
* 66Article 1er de
la loi du 25 juin 1902 sus-évoqué.
* 67 Cas de l'usufruit du
conjoint survivant sur les biens de la succession de l'époux
décédé (article 767 du code civil applicable au Cameroun)
ou de l'usufruit des père et mère sur certains biens de leurs
enfants décédés(article 754 du code civil applicable au
Cameroun)
* 68 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit , n°665
* 69 Ce temps faisait que
l'emphytéote soit vu comme le véritable propriétaire alors
qu'il n'a qu'un droit de jouissance. TERRE F. et SIMLER Ph., Droit civil.
Les biens,op. cit. n°928
* 70 Cass. Civ,
3e 12 mars 1970 et 13 mai 1998.
* 71G. CORNU (Sous la
direction de), Vocabulaire Juridique, op. cit. p.117
* 72TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit. n°936
* 73TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit. n°948
* 74 F. DUMONT, La
nature juridique du droit de superficie, Thèse, Lyon III, 2001.
* 75TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit. n°946
* 76TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit, n°936. « Il peut
porter sur toute la surface du sol et sur tous les objets établis sur le
sol, seul le sous-sol échappant à son emprise ; il peut
aussi ne porter que sur les objets se trouvant à la surface du sol,
voire seulement sur quelques-uns d'entre eux, tels que les constructions, les
plantations ou même certains arbres isolés. Il peut encore
être détaché du sol, en profondeur ou en altitude et prend
alors la forme d'un volume de propriété. »
* 77 J-P. BERTREL,
« L'accession artificielle immobilière. Contribution à
la définition de la notion juridique de droit de superficie »,
RTD Civ 1994, p. 737
La Cour Suprême du Cameroun reconnait telle
possibilité de constitution de droit conférant lesdites
prérogatives. Elle considère que le propriétaire du sol
n'est pas nécessairement le propriétaire des plantations se
trouvant au-dessus du sol. Arrêt n°16/L du 26 nov. 1984 serie 2,
n°29, pp.403-406
* 78TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit. n°951
* 79TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit. n°948. J. LAFOND,
« Volumes et propriétés », JCP N,
2007, p. 1246.
* 80 V. D. SIZAIRE,
« Division en volumes et copropriété des immeubles
bâtis », JCP, 1988, I, p. 3367
* 81 Il s'agit d'une simple
superposition de droits réels. TERRE F. et SIMLER Ph., Droit civil.
Les biens, op. cit. n°948
* 82 A ce sujet, le conseil
constitutionnel français décide que le droit de superficie est
une menace à la protection constitutionnelle due à la
propriété car cette dernière est seule susceptible
d'être perpétuelle et donc de durée indéfinie. Cons.
Const. n°94-346, DC 21 juil. 1994, RTD Civ 1995, p. 656, obs.
ZENATI, JO 23 juil. 1994, 10635.
* 83 Qui doit être
conséquente et déterminer le créancier à s'en
prévaloir le moment venu.
* 84 Les droits réels
sur les terres nommés sont notamment le droit de
propriété, le droit d'usufruit, le droit d'usage et d'habitation,
le bail emphytéotique, le bail à construction, les servitudes et
tous les droits réels clairement désignés comme tels par
une loi ou un règlement,...
* 85 DRUFFIN-BRICCA S.,
L'essentiel de l'introduction générale au droit,
15e éd, Clamecy, Gualino, 2019-2020, p.107
* 86 Cour de cassation,
chambre des requêtes, 13 février 1834, dans l'arrêt
CAQUELARD, ladite Cour énonçait déjà ce qui
suit : « (...) les articles 544, 546 et 552 du Code civil sont
déclaratifs du droit commun, relativement à la nature et aux
effets de la propriété, mais ne sont pas prohibitifs ; que ni ces
articles, ni aucune autre loi n'excluent les diverses modifications et
décompositions dont le droit ordinaire de propriété est
susceptible... ».
Ce droit de jouissance a véritablement pris ses marques
à la suite de la décision de la 3e Chambre de la Cour
de cassation du 31 octobre 2012 (Maison de Poésie, n° 11-16304,
Bull. civ. III n°159). Cet arrêt adopte les motifs ci-après,
après avoir visé les articles 544 et 1134 du code civil :
« Attendu qu'il résulte de ces textes que le
propriétaire peut consentir, sous réserve des règles
d'ordre public, un droit réel conférant le bénéfice
d'une jouissance spéciale de son bien »
Les auteurs suivants et bien d'autres ont abondamment
écrits sur le sujet : L. D'AVOUT et B. MALLET-BRICOUT,
« La liberté de création des droits réels
aujourd'hui. » Recueil Dalloz 2013 p.53 ; J. L.BERGEL,
« Droits réels de jouissance et valorisation des
biens... », inMél. J.-L. MOURALIS, PUAM, 2011, p. 19
; M. JULIENNE et J. DUBARRY « Précisions sur le droit de jouissance
spéciale », note sous arrêt Cour de cassation, 3ème
civ., 28 janvier 2015, Sté ERDF, n°14-10013, Bull. civ. III
n°13.
* 87 L. D'AVOUT et B.
MALLET-BRICOUT, « La liberté de création des droits
réels aujourd'hui. » op. cit. n°16
* 88 Ordonnance n°74/1
du 6 juillet 1974 fixant le régime foncier modifié par
l'ordonnance n°77-1 du 10 janvier 1977 et les lois n°s 80-21 du 14
juillet 1980 et 83-19 du 26 novembre 1983.
* 89 Ordonnance n°74-2
du 6 juillet 1974 modifiée par l'ordonnance n°77/2 du 10 janvier
1977 fixant le régime domanial.
* 90G. KOUASSIGAN,
L'homme et la terre. Droits fonciers coutumiers et droit de
propriété en Afrique Occidentale, Paris, Ed. BERGER
LEVRAULT, 1966, 289p.
* 91 Article 20
alinéa 1 (4°) du décret n°76-167 du 27 avril 1976
fixant les modalités de gestion du domaine privé de l'Etat.
* 92 G. CORNU (Sous la
direction de), Vocabulaire Juridique, op. cit. p.306
* 93 CEREMA, Fiches
outils. Valoriser le domaine public, 2020. Vu sur
www.cerema.fr le 08 juin 2021.
* 94Idem.
* 95 L'article 9 de
l'ordonnance fixant le régime domanial évoque telle
prérogative qui peut être accordée sur le domaine
public.
TERRE F. et SIMLER Ph., Droit civil. Les biens,op.
cit. n°954
* 96 Articles 10 et suivants
du décret du 11 aout 2015 sus évoqué.
* 97 Article 13 et 14 du
décret ci-avant. L'article 14 énonce notamment ce qui suit :
« Les droits, ouvrages, constructions et installations de
caractère immobilier ne peuvent être cédés ou
transmis dans le cadre des mutations entre vifs ou de fusion, absorption ou de
scission de société, pour la durée de validité du
titre restant à courir, y compris dans le cas de réalisation de
la sûreté portant sur lesdits droits et biens dans les cas
prévus aux troisième et quatrième alinéas du
présent article, qu'a une personne agréée par
l'autorité compétente, en vue d'une utilisation compatible avec
l'affectation du domaine public occupe. »
* 98TERRE F. et SIMLER Ph.,
Droit civil. Les biens,op. cit. n°954
* 99 M. H. PERO, AUGUEREAU
HUE et B. DELORME, « Le bail emphytéotique des personnes
publiques : clauses et conséquences », JCP N
2013, p. 1119.
* 100 Article 17 de
l'ordonnance fixant le régime foncier.
* 101« La
doctrine administrative en France reconnaît aux titulaires du droit
réel en vertu du bail emphytéotique la qualité de
propriétaires des constructions ou installations par eux
réalisés, de sorte que ce droit réel doit être
assimilé au droit de superficie. » F. TERRE et Ph.
SIMLER, Droit civil. Les biens,op. cit. p.846
* 102 Article 23 du
décret fixant les modalités de gestion du domaine privé de
l'Etat.
* 103 Article 20 du
décret du 27 avril 1976.
* 104 Article 17 de
l'ordonnance fixant le régime foncier.
* 105 Un
arrêté du Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires
Foncières lorsqu'il s'agit de moins de 50 hectares ou un décret
du Président de la République lorsque la superficie est de plus
de 50 hectares.
* 106 Article 2 du
décret n°76-166 du 27 avril 1976 fixant les modalités de
gestion du domaine national.
* 107 A lire l'article 4 du
décret suscité, il peut en être conclu que seules les
terres non occupées ou exploitées peuvent faire l'objet de
concession provisoire. Il y a lieu d'envisager que l'occupation et
l'exploitation dont il s'agit ne peuvent pas valoir dans le sens où il
s'agit des terres vierges. En réalité, ce texte vise à
écarter de l'assiette de la concession provisoire les terres
déjà immatriculées au profit de l'Etat ou des particuliers
et celles ayant été mises en valeur avant le 4 août 1974.
Sont également exclus les terres relevant du domaine public.
* 108 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.679
* 109 G. GOUBEAUX, La
règle de l'accessoire en droit privé, LGDJ, Bibl. de droit
privé, t. 93, 1969, n°23. Au sens de l'auteur, il semblerait que
l'on ne puisse pas dire qu'une garantie soit un accessoire par production, car
dans l'accessoire par production, le principal participe à la structure
de l'accessoire, ce dont ne fait pas un droit réel accessoire.
* 110Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°400
* 111J. GATSI, droit
des biens et des sûretés dans l'espace OHADA, op. cit.
p.28
* 112 B. LOTTI, Le
droit de disposer du bien d'autrui pour son propre compte, Thèse,
Université de Paris Sud XI, 1999, 519p.
* 113 L'article 180 de
l'AUS détermine ces privilèges généraux et leur
régime.
* 114Ce dernier a un droit
de suite en cas d'enlèvement des biens du locataire sans son
consentement. MINKOA SHE A., « Privilèges », in
Encyclopédie du droit OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, pp.
1413-1424
* 115Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°630
* 116G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.515
* 117Idem
* 118 Article
1er de la loi sur le bail emphytéotique, décret fixant
les modalités de gestion du domaine national, décret fixant les
modalités de gestion du domaine privé de l'Etat, décret du
11 août 2015.
* 119 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.130
* 120Idem
* 121G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit.p.701
* 122G. GOUBEAUX, La
règle de l'accessoire en droit privé, op. cit. n°23.
* 123 F. TERRE et Ph. SIMLER,
Droit civil. Les biens, op. cit. p.2
* 124Ph. MALAURIE et L. AYNES,
Droit civil. Les sûretés,p. cit, n°750 et s. ;
P. CROCQ, Propriété et garantie, op.cit.
* 125 Cette solution peut
être envisageable puisque l'article 265 AUPSRVE citée ne vise pas
directement les loyers mais simplement le revenu de l'immeuble, il s'agirait
donc de ses fruits, naturels, civils ou industriels.
* 126Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°400
* 127 Y. R. KALIEU ELONGO,
« Hypothèque », in Encyclopédie du droit
OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, n°2
* 128Y. R. KALIEU ELONGO,
« Hypothèque », op. cit. n°7
* 129 C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des
sûretésréelles, op. cit. n°6
* 130 La remise du titre
foncier n'est en rien signe d'une dépossession.
* 131Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°414
* 132G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.344
* 133 Article 2387 du code
civil français.
* 134 Article 2389 du code
civil français.
* 135Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°631
* 136 G. PIETTE, « La
possession en droit des sûretés », Dr. et patr. nov. 2013, p.
58 s.
* 137 M. MIGNOT, « La
nature juridique du gage immobilier », LPA, 4 déc. 2014,
n° 242, p. 7.
* 138Ph. MALAURIE et L.
AYNES,Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°499
* 139S. GUINCHARD et Th.
DEBARD (Sous la direction de), Lexique des Termes Juridiques, op. cit.
p. 1117
* 140 Article 193 de
l'AUS
* 141Y. R. KALIEU ELONGO,
« Hypothèque », op. cit. n°8
* 142Y. R. KALIEU ELONGO,
« Hypothèque », op. cit. n°8
* 143Y. R. KALIEU ELONGO,
« Hypothèque », op. cit. n°10
* 144C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, op. cit. n°43
* 145 Il s'agit d'une
énonciation de l'article 204 de l'AUS. Un auteur admet que cette
énonciation qui se rapproche de l'hypothèque rechargeable serait
à même de rendre attractif l'hypothèque en droit OHADA.
BRIZOU BI M, « L'attractivité du nouveau droit OHADA des
hypothèques », Droit et patrimoine, n°197,
novembre 2010, p.86
* 146 L'avènement de
l'hypothèque rechargeable en France participe de cette relativisation
puisque l'hypothèque rechargeable est constituée sans que la
créance ne soit véritablement déterminée.
* 147 P. CROCQ, « Le
principe de spécialité des sûretés réelles :
chronique d'un déclin annoncé », Droit et
patrimoine, avril 2001, p. 63
* 148 S. TANAGHO, «
L'hypothèque des biens à venir », RTD Civ. 1970, p.
441, n°1.
* 149 Cet article
énonce ce qui suit : « ...L'hypothèque peut
être consentie sur des immeubles à venir dans les cas et
conditions ci-après :
1°) Celui qui ne possède pas d'immeubles
présents et libres ou qui n'en possède pas en quantité
suffisante pour la sûreté de la créance peut consentir que
chacun de ceux qu'il acquerra par la suite sera affecté au paiement de
celle-ci au fur et à mesure de leur acquisition ;
2°) Celui dont l'immeuble présent assujetti
à l'hypothèque a péri ou subi des dégradations
telles qu'il est devenu insuffisant pour la sûreté de la
créance le peut pareillement, sans préjudice du droit pour le
créancier de poursuivre dès à présent son
remboursement ;
3°) Celui qui possède un droit réel lui
permettant de construire à son profit sur le fonds d'autrui, sur le
domaine public ou sur le domaine national peut hypothéquer les
bâtiments et ouvrages dont la construction est commencée ou
simplement projetée ; en cas de destruction de ceux-ci,
l'hypothèque est reportée de plein droit sur les nouvelles
constructions édifiées au même
emplacement. »
* 150 C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, op. cit. n°6
* 151 C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, op. cit. Résumé.
* 152 C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, op. cit. n°13 et 14. Quelques lignes après
l'auteur écrit ceci : « Bien qu'elle
(l'hypothèque) ne participe pas à atteindre le même but que
l'obligation et qu'elle ne soit que l'accessoire du droit de gage
général, elle ne peut s'en détacher »
n°34
* 153 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°601
* 154 Article 14
alinéa 5 du décret du 11 août 2015.
* 155I. L. MIENDJIEM,
La situation des occupants du domaine national, Thèse,
Université de Yaoundé 2, 2008, Résumé.
* 156F. TERRE et Ph.
SIMLER, Droit civil. Les biens,op. cit. n°950
* 157 Idem
* 158 En vertu de l'article
10 de l'ordonnance fixant le régime domanial, l'Administration des
Domaines a notamment un droit de reprise. L'article 8 du décret fixant
les modalités de gestion du domaine national évoque la fin de la
concession provisoire en cas de faillite du concessionnaire ou de mise de la
société concessionnaire sous procédure collective.
* 159 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.786
* 160 Cas des droits
réels viagers.
* 161 Article 13
alinéa 1 du décret du 11 août 2015.
* 162 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.5
* 163 Idem.
* 164L D'AVOUT et B.
MALLET-BRICOUT, « La liberté de création des droits
réels aujourd'hui. » Recueil Dalloz, 2013, n°16
* 165G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.285
* 166G. GOUBEAUX, La
règle de l'accessoire en droit privé, op. cit. n°23
* 167G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.11
* 168 Article 2093 du code
civil applicable au Cameroun.
* 169I. L. MENDJIEM,
« Régime général des
sûretés », in Encyclopédie de l'OHADA,
Porto Novo, Lamy, 2011, n°8
* 170C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, op. cit. n°94
* 171I. L. MENDJIEM,
« Régime général des
sûretés », op. cit. n°23
* 172C. DAUCHEZ, Le
principe de spécialité en droit des sûretés
réelles, op. cit. n°83
* 173 Articles 179 à
181 de l'AUS.
* 174 Articles 182 à
189 de l'AUS.
* 175 Parmi les
hypothèques légales reconnues en droit OHADA aux articles 210
à 212 on a :
- L'hypothèque légale du vendeur d'immeuble, du
copartageant ou de l'échangiste ;
- L'hypothèque légale des architectes et
entrepreneurs ;
- L'hypothèque légale de la masse des
créanciers en cas de mise sous procédure collective.
* 176S. S. KUATE TAMEGHE,
« L'efficacité des sûretés judiciaires dans le
droit issu de l'OHADA », Revue de droit africain, n°42,
avril-juin 2007.
* 177 Article 231 de
l'AUS.
* 178 Cas des
privilèges généraux.
* 179 Article 21 du
décret du 11 août 2015.
* 180 L'article 21 sus
évoqué énonce ce qui suit : « lorsqu'un
crédit bancaire est sollicité en vue de la mise en valeur d'une
concession provisoire sur le domaine national, le titre foncier peut être
accordé immédiatement au concessionnaire. Dans ce cas,
l'organisme de crédit doit saisir à cet effet le Ministre
chargé des Domaines qui requiert le Conservateur foncier
territorialement compétent pour établir un tel titre avec
inscription à la même date et aux frais du
bénéficiaire, d'une hypothèque au profit de l'organisme de
crédit et de la clause résolutoire au profit de
l'Etat. »
* 181 L'article 14
alinéa 3 du décret du 11 août 2015 dispose ce qui
suit : « les droits, ouvrages, constructions et
installations ne peuvent être hypothéqués que pour garantir
les emprunts contractés par le titulaire de l'autorisation en vue de
financer la réalisation, la modification ou l'extension des ouvrages,
constructions et installations de caractère immobilier situés sur
la dépendance domaniale occupée. »
L'hypothèque instituée ici est l'hypothèque légale
reconnue à ceux qui fournissent les deniers pour l'acquisition des biens
de caractère immobilier prévue à l'article 211
alinéa 3 de l'AUS. La disposition du décret camerounais institue
une hypothèque à constituer par les conventions des parties ou
nécessairement par une décision de justice en vertu de l'article
de l'Acte Uniforme ci-avant mentionné.
* 182 Article 14
alinéa 4 du décret sus-évoqué. Il y est ainsi
disposé : « les créanciers chirographaires
autres que ceux dont la créance est née de l'exécution des
travaux ne peuvent pratiquer des mesures conservatoires ou des mesures
d'exécution forcée sur les droits et biens mentionnés au
présent article. »
* 183L. d'Avout et B.
Mallet-Bricout, « La liberté de création des droits
réels aujourd'hui. » Recueil Dalloz, 2013, n°24.
Facilité de consentir les propriétés sûretés
puisqu'elles découlent des conventions des parties.
* 184G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.879
* 185Idem
* 186S. GUINCHARD et Th.
DEBARD, Lexique des Termes Juridiques, op. cit.p.1739
* 187 Le débiteur
doit garder l'immeuble dans l'état dans lequel l'immeuble est
hypothéqué. Les détériorations sont
prohibées mais les améliorations sont vivement
encouragées. F. FRENETTE,« De l'hypothèque :
réalité du droit et métamorphose de
l'objet. »Les Cahiers de droit, 39(4), 1998, pp.803-822
* 188 La
dépréciation juridique est le cas où le constituant
concède un droit réel à un tiers, ce droit n'étant
pas la propriété.
* 189G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.251
* 190Idem p.469
* 191Y. R. KALIEU ELONGO,
« Hypothèque », op. cit. n°12
* 192Ph. MALAURIE et L.
AYNES,Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°660
* 193 Article 209 de
l'AUS
* 194 Article 210 de
l'AUS
* 195 Article 211 de
l'AUS
* 196 Article 212 de
l'AUS
* 197 Article 213 et
suivants de l'AUS
* 198Ph. MALAURIE et L. AYNES,
Droit civil. Les sûretés,op. cit, n°669
* 199 Ce principe impose la
désignation propre de l'immeuble hypothéqué et de la
créance garantie.Ph. MALAURIE et L. AYNES, Droit civil. Les
sûretés, op. cit, n°662.
Ne devrait pas dans ce cas être admise
l'hypothèque portant sur un bien futur et également sur une
créance future. Pourtant, les textes prévoient tout de même
ces hypothèses. C'est le vent de recadrage du principe de
spécialité de l'hypothèque que plaide DAUCHEZ dans sa
thèse précitée.
* 200 Il s'agirait même
de l'exclusivité de certaines créances pour la garantie au moyen
de certains droits réels de jouissance.
* 201 Article 8 de
l'ordonnance fixant le régime foncier au Cameroun.
* 202 Reprise de la
condition d'instrumentation par voie notariée à l'article 23 du
décret du 11 août 2015.
* 203Ph. MALAURIE et L.
AYNES,Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°631
* 204G. CORNU, Vocabulaire
Juridique, op. cit.p.831
* 205 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.1027
* 206 Article
1er alinéa 1 du décret fixant les conditions
d'obtention du titre foncier.
* 207 Article 21 du
Décret du 11 août 2015.
* 208 Article 3 du
décret du 11 août 2015.
* 209 Article
1er alinéa 3 du décret fixant les conditions
d'obtention du titre foncier.
* 210 Idem
* 211 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.713
* 212 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés,op. cit, n°631
* 213 Article 213 et suivants
de l'AUS.
* 214Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°638
* 215 Article 196 de
l'AUS
* 216 Article 202 de
l'AUS
* 217 Articles 24 et 25 du
décret du 11 août 2015.
* 218 Article 222 de
l'AUS.
* 219 G. CORNU,
Vocabulaire Juridique, op. cit. p.854
* 220M. DOLS-MAGNEVILLE,
La réalisation des sûretés réelles, op.
cit. n°15
* 221 Idem, n°20
* 222 Article 199 de
l'AUS
* 223 Article 198 de
l'AUS
* 224 C'est une
procédure organisée aux articles 246 et suivants de l'AUPSRVE.
J. FOMETEU, « Théorie générale
des voies d'exécution », in Encyclopédie du droit
OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, pp. 2056-2087 ; P. G. POUGOUE et F.
TEPPI KOLOKO, « Saisie immobilière », in
Encyclopédie du droit OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, pp.
1642-1718.
* 225 D'ailleurs rares sont
les conventions d'hypothèques conclues avec les banques et qui
manqueraient telle option d'attribution.
* 226 Article 24
alinéa 2 du décret du 11 août 2015.
* 227 Article 223 de
l'AUS
Ph. MALAURIE et L. AYNES, Droit civil. Les
sûretés, op. cit, n°690 et s.
* 228 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°693 et
s.
* 229 Article 8 de
l'ordonnance n°74/1 du 06 juillet 1974 fixant le régime foncier.
* 230 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°695
* 231 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°696
* 232 B. MAUBRU, La
transmissibilité de l'hypothèque, thèse,
Université de Toulouse, 1974 ; H. WESTENDORF, « Le transfert de
sûretés », préf. P. CROCQ et A. PRÜM, Coll. de
thèses, tome 54, Defrénois, 2015, n° 465 s.
* 233 Cas de cession de la
garantie elle-même. Un créancier hypothécaire cède
par exemple sa garantie à un créancier chirographaire. Ph.
MALAURIE et L. AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit,
n°698
* 234 Ici, le
créancier hypothécaire cède son rang à un autre
créancier hypothécaire, le premier étant initialement
mieux classé.
* 235 Ch. JUILLET, Les
accessoires de la créance, préf. Ch. LARROUMET, coll. de
thèses, t. 37, Defrénois, 2009
* 236 Il doit s'agir d'un
paiement pur et simple sinon le paiement avec subrogation mène à
la transmission de l'hypothèque. Ph. MALAURIE et L. AYNES, Droit
civil. Les sûretés, op. cit, n°699
* 237Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°700
* 238 C. EISENMANN,
« Quelques problèmes de méthodologie des
définitions et des classifications en science juridique »,
Arch. Phil. Drt,1966, pp. 11-26.
* 239 Article 21 du
décret du 11 août 2015.
* 240 Article 195 de l'AUS.
* 241 Article 21 du
décret du 11 août 2015.
* 242 Article 17 du
décret du 11 août 2015.
* 243 Article 22 du
décret du 11 août 2015.
* 244 O. DE DAVID
BEAUREGARD-BERTHIER, « Domaine public et droits réels »,
JCP G, 1995.I.3812
* 245 Y. GAUDEMET, «
Hypothèque et domaine des personnes publiques », D. Aff. 1996, 33.
(1649)
* 246 Article 14
alinéa 3 du décret du 11 août 2015.
* 247 L'article 22
alinéa 1 exige la constitution de l'hypothèque au profit des
établissements de crédit exclusivement.
* 248 Article 14
alinéa 1 du décret du 11 août 2015. Il s'agit des droits
des concessionnaires et permissionnaires occupant ou exploitant les
dépendances du domaine public artificiel déclassé.
* 249 Article 22 du
décret du 11 août 2015.
* 250Un auteur
relève déjà que le rôle de l'Administration en
matière foncière et domaniale est prépondérante. R.
TCHAPMEGNI, Le contentieux de la propriété foncière au
Cameroun, Thèse, Université de Nantes, 2008, 532p.
Même pour des questions de droit privé donc, lorsque les domaines
sont concernés, l'Administration n'exclut pas sa
prépondérance quitte à prendre la place du juge.
* 251 Article 3 du
décret du 11 août 2015.
* 252 Article 9 et suivants
du décret fixant les conditions d'obtention du titre foncier.
* 253 Article 195 de l'AUS.
* 254 CCJA. 2e,
Arrêt n°097/2020 du 09 avril 2020.
* 255 Articles 254, 258 et
259 de l'AUPSRVE.
* 256 Article 15
alinéa 4 du décret de 2015. En ce cas, il est admis que le
débiteur est défaillant et les créanciers sont d'office
reconnus par l'administration comme bénéficiant sans autre
formalité des droits de jouissance dont bénéficiaient leur
débiteur. En proposant une personne tierce qui va jouir à la
place de leur débiteur, il s'en suit que c'est à leur profit que
ladite jouissance sera faite. Il s'agit d'un mode de réalisation
très particulier qui consiste à substituer un débiteur
à un autre bien qu'il s'agisse de la réalisation d'un droit
réel.
* 257 Article 22
alinéa 3 du décret du 11 août 2015.
* 258 Article 15
alinéa 2 et 18 alinéa 2 du décret du 11 août
2015.
* 259 Article 22
alinéa 2 du décret du 11 août 2015.
* 260 C'est le cas de
l'hypothèque d'un immeuble indivis. Lorsqu'au moment du partage le
constituant n'en est pas alloti, l'hypothèque est
considérée comme n'avoir jamais été
constituée.
* 261 G. DURRY, «
Hypothèque et assurance », RJ com. 1982, pp. 27-36
* 262P-E KENFACK,
« L'effectivité des dispositions des lois contraires au
droit : réflexions à partir des lois foncières et de
travail au Cameroun », in L'effectivité de la loi,
L'Harmattan, Paris, 2021, p.88.
* 263 Y. LEROY,
« La notion d'effectivité en droit », Droit et
société, n°79, 2011/3, pp.715 et s.
* 264P-E KENFACK,
« L'effectivité des dispositions des lois contraires au
droit : réflexions à partir des lois foncières et de
travail au Cameroun », op. cit, p.88.
* 265 Ph. MALAURIE et L.
AYNES, Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°9
* 266« Une
sûreté idéale devrait avoir quatre qualités ; elle
devrait être :
- d'une constitution simple et peu onéreuse, pour
ne pas augmenter le coût du crédit ;
- adaptée à la dette qu'elle garantit - ni
trop ni pas assez - afind'éviter l'abus de sûreté qui
gaspille le crédit du débiteur ;
- efficace, c'est-à-dire donner au créancier
la certitude d'être payé à l'échéance, si le
débiteur ne s'exécute pas ;
- d'une réalisation simple, afin d'éviter
les lenteurs et les frais inutiles. » Ph. MALAURIE et L. AYNES,
Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°8
* 267 P. NOREAU,
« L'épistémologie de la pensée juridique : de
l'étrangeté... à la recherche de soi. » Les
Cahiers de droit, 52(3-4), 2011, 695.
* 268 Idem.
* 269 Articles 195 et 204
de l'AUS.
* 270 P-E KENFACK,
« Doctrine et création du droit privé au
Cameroun », in Revue de la Recherche Juridique. Droit
prospectif, PUAM, 2005-4. L'auteur y développe que la doctrine
camerounaise peine à prendre ses marques sur des questions de
création du droit. Ainsi elle n'intervient que rarement avant le
législateur et le juge, ce qui constitue un abandon de certains aspects
de son activité d'interprétation déclinée en la
critique du droit et en sa prospection.
* 271Heureusement, la
doctrine en a pris conscience. Lesdits droits font la part belle des questions
relatives à la réforme du droit des biens en France, le
même droit des biens est en vigueur au Cameroun. W. DROSS, Droit des
biens, 2ème éd., Montchrestien, 2014 ; H.
PERINET-MARQUET (dir.), Propositions de l'Association Henri Capitant pour
une réforme du droit des biens, LexisNexis, 2009, Carré
droit. Ch. ALBIGES et Ch. HUGON (Sous la direction scientifique de),
Immeuble et droit privé. Approches transversales,
Lamy, Coll. Axe Droit, 2012.
La question foncière est l'objet de tous les
commentaires au Cameroun pour l'ineffectivité du régime foncier
et domanial pour certaines dispositions et l'inefficacité pour d'autres.
P-E KENFACK, « L'effectivité des dispositions des lois
contraires au droit : réflexions à partir des lois
foncières et de travail au Cameroun », in
L'effectivité de la loi, L'Harmattan, Paris, 2021,
pp.87-97 ; TCHAPMEGNI R. (Sous la direction de), la
problématique de la propriété foncière au
Cameroun, Actes de la Conférence sur le foncier, Mbalmayo, 2005,
143p. Disponible sur le site web
www.environnement-propriete.org./francais/documentation/doc/la-problematique-de-la-propriete-fonciere-au-cameroun.pdf
* 272 CCJA.
1ère, Arrêt n° 052/2020 du 27 février
2020.
* 273 P-E KENFACK,
« L'effectivité des dispositions des lois contraires au
droit : réflexions à partir des lois foncières et de
travail au Cameroun », op. cit. pp.87-97 ; W. DROSS, Droit
des biens, 2ème éd., op. cit. ; H. PERINET-MARQUET
(dir.), Propositions de l'Association Henri Capitant pour une
réforme du droit des biens, op. cit.. Ch. ALBIGES et Ch. HUGON
(Sous la direction scientifique de), Immeuble et droit privé.
Approches transversales, op.cit.
* 274 N. MOLFESSIS,
« le renvoi d'un texte à un autre », in Les mots
de la loi, Collection « Etudes juridiques, Economica, p.55
* 275I. L. MENDJIEM,
« Régime général des
sûretés », in Encyclopédie de l'OHADA,
Porto Novo, Lamy, 2011, pp.1480-1509
* 276 Pour MALAURIE et
CROCQ, Droit civil. Les sûretés, op. cit., n°13
« les sûretés sont aujourd'hui nombreuses et
variées. Leur évolution n'est pas achevée, car elles sont
tributaires de la vie économique, en constante mutation. Comme dans le
droit des contrats spéciaux, on assiste à une floraison de
garanties nouvelles, d'abord variété d'une sûreté
nommée, puis prenant à l'égard du modèle de plus en
plus de liberté pour acquérir un régime
spécifique. »
* 277 CCJA, 2e
ch., Arrêt n°052/2013 du 12 juin 2013. Dans cette affaire opposant
l'ex Banque Sénégalo Tunisienne (BST) devenue Groupe ATTIJARIWAFA
Bank à OUMOU SALAMATA et autres, ces parties avaient
désigné de nantissement une hypothèque portant sur un
droit de bail dont la réalisation a justement été faite
selon les règles de la saisie immobilière. La difficulté
était grande de nommer clairement une telle garantie en l'absence de
précisions claires dans l'Acte Uniforme. Le terme d'hypothèque
semblait inadapté puisque l'assiette n'était pas
constituée de l'immeuble mais d'un droit de jouissance
communément désigné impense et qui a fait l'objet de
nantissement autrefois.Sans doute, la non organisation spécifique par le
législateur OHADA d'une garantie ayant spécialement ce droit de
jouissance pour assiette a mené à cette difficulté. La
CCJA avait eu l'occasion de décider ce qui suit :
« le terme de nantissement a toujours été
utilisé dans l'ancien code de procédure civile pour
désigner une sûreté réalisée sur des impenses
ou des peines et soins ; qu'aujourd'hui il désigne une garantie
inscrite sur le droit au bail ; que le fait de mentionner sur l'acte qu'il
s'agit d'un nantissement, ne le rendait pas nul, puisque le juge a la
possibilité de restituer à l'acte sa véritable
qualification. » Le premier juge a été
notamment perdu dans les insuffisances de l'AUS relativement à cette
garantie qu'il devait particulariser.
* 278 P-E KENFACK,
« L'effectivité des dispositions des lois contraires au
droit : réflexions à partir des lois foncières et de
travail au Cameroun », op. cit, pp.87-97.
* 279 Ph. MALAURIE et L.
AYNES,Droit civil. Les sûretés, op. cit, n°8
* 280 Il s'agit des
hypothèques portant sur les droits réels de jouissance en vertu
de la concession provisoire et de l'autorisation d'occupation ou d'exploitation
du domaine public artificiel déclassé.
* 281 Article 200 et
suivants de l'AUPSRVE.
* 282 CCJA, 2e
Ch. Arrêt n°052/2013 du 12 juin 2013.
* 283 J.P TCHOU BAYO,
« Saisie-Vente », in Encyclopédie du droit
OHADA, Porto - Novo, Lamy, 2011, p.1770-1804.
* 284 Articles 147 et
suivants de l'AUPSRVE.
J.PTCHOU BAYO, « Saisie-Vente », op. cit.,
n°188-197. L'auteur donne l'explication suivante sur le bien-fondé
de l'institution de telle saisie : « En principe ces
récoltes devraient être saisies par voie de la saisie
immobilière car aux termes de l'article 520 du code civil (en vigueur au
Cameroun), elles sont les immeubles par nature en raison de leur
adhésion à la terre. Mais le législateur d'aujourd'hui
comme celui d'hier (qui avait institué la saisie-brandon que la saisie
des récoltes sur pied remplace) a voulu les soustraire de cette
procédure couteuse et lente de la saisie immobilière en faisant
d'elles des meubles par anticipation » n°188.
* 285 Cas des plantations
dont les récoltes sont cycliques : bananeraies, palmeraies,...
|