FOOTBALL COMME OBJET D'ETUDE
La recherche sur les CSPF a commencé à se
développer à partir de la fin des années 90-2000. À
cette époque on a commencé à identifier les
spécificités des CSPF vis-à-vis des grandes organisations
et même des regroupements d'associations. Progressivement, ces recherches
commencent à se multiplier, se structurer et s'organiser afin de
constituer un objet de recherche.
Suite à cet accroissement des courants
théoriques ont fait leur apparition parmi lesquels l'approche
contingente, qui considère l'impossibilité de l'existence d'une
théorie unique sur les CSPF.
Il sera question dans cette section de présenter les
CSPF en évoquant l'organisation de leurs systèmes de
contrôle de gestion (1) et montrer l'évolution de la fonction de
contrôleur de gestion au sein de ces organisations et d'en mesurer la
performance (2).
1- Définition des CSPF
La convention collective nationale du sport
(CCNS) définit le sportif professionnel comme
celui dont l'activité sportive est exercée
à titre principal, elle prend tout son sens avec le Comité
National Olympique et Sportif du Cameroun (CNOSC) qui représente un Club
sportif comme étant un regroupant d'Hommes ayant pour but commun la
réalisation de performances sportives au niveau professionnel ;
l'activité sus citée peut être partielle, en cas de cumul
d'activités salariée ou fonctionnaires, mais elle doit être
principale (art. 12.1 de la CCNS) ; de là on peut dire qu'un
CSPF10 est un regroupement de personnes sous forme
d'une association ayant des buts communs et des objectifs spécifiques
liés au football. Pour mieux appréhender la notion de
contrôle de gestion dans les CSPF, nous tenterons une approche par
10 CSPF : Club Sportif Professionnel de Football
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MÉMOIRE RÉDIGÉ PAR AKOUNG DANY-ARTHUR
RÔLE DU CONTRÔLEUR DE GESTION DANS LES
CLUBS PROFESSIONNELS DE FOOTBALL EN CONTEXTE CAMEROUNAIS
les PME qui explique au mieux la vision que les dirigeants de
clubs ont pour leurs organisations ou associations.
En 1994, le GREPME11 donne du concept PME la
définition suivante :
Ø La petite taille ;
Ø La centralisation de la gestion la centralisation de la
gestion ;
Ø Une faible spécialisation une faible
spécialisation ;
Ø Des systèmes d'information interne et externe
simples ou peu organisés ;
Ø Une stratégie intuitive ou peu
formalisée.12
De ces définitions nous pouvons dire qu'il existe cinq
caractéristiques majeures qui définissent les PME à savoir
: « la taille, le rôle du dirigeant, la structure simple, le
système d'information peu développé et la prise de
décision ». Par la suite, nous développerons tous ces
éléments qui seront projetés sur les Clubs Sportifs car
leur mode de fonctionnement est sensiblement similaire.
1.1) La taille
Les CSPF se distinguent des autres formes d'organisations par
leur taille modeste. En effet, Reichmann (1988, p. 39) montre que
l'accroissement de la taille de l'organisation contribue à renforcer un
profil de contrôleur de gestion considéré comme une force
de proposition. Caractérisées par leur petite taille, cette
dernière joue un rôle important dans les différences de
pratique de contrôle de gestion utilisées au sein des CSPF.
1.2) Le rôle du dirigeant
Plusieurs chercheurs à l'instar de Lefebvre (1991)
affirment que le dirigeant a une très forte influence sur son
système de gestion. Par ailleurs, il est le plus souvent le fondateur
de
11 GREPME : Groupe de Recherche en Économie et
Gestion des PME
12 Tiré de l'article d'Olivier Torres portant
sur le rôle et l'importance de la proximité dans la
spécificité de gestion des PME.
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PROFESSIONNELS DE FOOTBALL EN CONTEXTE CAMEROUNAIS
l'organisation et a tendance à vouloir la
définir selon ses motivations et ses antécédents
personnels et professionnels (Coupal, 1994). Il joue à la fois le
rôle de directeur, manager et gestionnaire.
Selon Mintzberg (1976), les dirigeants ont exclusivement
recours à leurs jugements, intuitions et expériences pour prendre
les décisions. Ils acceptent peu de déléguer leur pouvoir
et leur responsabilité aux autres acteurs, de même ils ont peu
recours à un système d'information de gestion
formalisé.
On constate donc que le système de contrôle de
gestion dans le contexte d'un CSPF est conditionné par le
propriétaire dirigeant qui peut également déléguer
cette tâche au trésorier qui représentera ainsi les
aspirations personnelles du dirigeant.
1.3) Une structure simple
La faible spécialisation des tâches est l'une
des caractéristiques de toute organisation ou association, elle
s'accompagne généralement de l'augmentation de la taille.
Selon Mintzberg (1982), « au fur et à mesure que
la firme grossit, les niveaux organisationnels augmentent et le travail devient
plus spécialisé ».
Par ailleurs, Kalika (1987) d'après son étude
sur la structure des entreprises affirme que « plus l'entreprise est
petite, moins il y a des procédés formalises et plus les
décisions sont centralisées chez le propriétaire-
dirigeant ». Le fait que le propriétaire-dirigeant ne
délègue pas ses responsabilités aux autres acteurs a un
effet sur la structure de l'entreprise.
Les CSPF présentent une structure simple,
centralisée qui possède un nombre limité de ressources
humaines et financières.
1.4) Un système d'information peu
développé
Le système d'information des CSPF comporte deux
caractéristiques majeures à savoir un système
d'information interne peu complexe qui est souvent standard et peu
organisé et, un système d'information externe simple. Le moyen
essentiel d'information reste le contact et le
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dialogue. Les systèmes d'information et de
communication des CSPF tout comme leurs structures sont peu formalisés.
Toutefois, pour Mintzberg (1982) la communication par dialogue et par contact
direct peut être sujet à avoir une information informelle, mais
pour les dirigeants ce sont les meilleures pratiques d'exercer le
contrôle. De même, le système d'information externe dans les
CSPF est simple, il est représenté par le contact direct entre le
dirigeant et les différents acteurs de son environnement
constitué essentiellement par les joueurs, le staff technique, les
clients, les fournisseurs, et les banquiers.
1.5) La Prise de décision
La prise de décision par le dirigeant est très
rapide du fait de beaucoup de turbulences créées par son
environnement. Cette prise de décision est centralisée par le
propriétaire-dirigeant qui donne la priorité aux
différentes tâches opérationnelles ce qui empêche une
vision stratégique à moyen ou long terme. Les décisions
sont la plupart du temps prises sur le court terme. Selon une enquête
citée par Duchéneaut (1997), plus de 70% des dirigeants
préfèrent l'intuition à la prévision et la
considère comme très importante dans la prise de décision.
La fonction de décision se fait de la manière suivante :
Intuition - Décision - Action.
Un CSPF est caractérisé par une concentration
de la gestion et une centralisation de la plupart des décisions chez un
seul individu, le propriétaire dirigeant. Ce dernier tient à
effectuer toutes les taches, il délègue difficilement, sa prise
de décision s'appuie sur son intuition.
Après avoir passé en revue les
différentes spécificités des CSPF et des organisations, il
est question de savoir comment la fonction de contrôle de gestion est
exercée dans celle-ci.
2- La fonction de contrôle de gestion dans les
CSPF
Les études sur le contrôle de gestion ont
été menées par plusieurs auteurs, certains ont
analysés les spécificités des CSPF, mais les recherches
relatives au contrôle de gestion restent encore rares. Depuis quelques
années, on a vu apparaître un certain nombre de travaux portant
sur l'existence du contrôle de gestion dans le contexte des CSPF.
(Chapellier, 1997 ; Fernandez
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et al. 1996 ; Van Caillie, 2002 ; Lavigne, 2002 ; Nobre
2001). Ces différentes recherches sont néanmoins contradictoires,
certaines mettent en évidence un bon développement des outils de
contrôle dans le contexte des clubs sportifs professionnels de football,
d'autres présentent des résultats plus nuancés. Olivier
Meir et Guillaume Schier, 2008 mettent l'accent sur « les théories
et principes d'action en matière de gouvernance des associations »
en montrant ce qu'il y'a lieu de faire en matière de contrôle de
gestion dans les associations sportives ; Pierre Blaise en 2004 dans « les
associations sans but lucratif » montre l'implication du contrôle de
gestion dans ces associations à travers des théories.
La fonction contrôle de gestion est souvent sous
structurée (Fournier, 1992) elle est souvent assimilée à
la fonction comptable ou financière. Plusieurs études montrent
que, pour la plupart des dirigeants, le système de contrôle de
gestion est défini, par le système de comptabilité
conçu principalement pour rendre compte aux autorités fiscales.
Cependant on ne doit pas considérer que la fonction de contrôle de
gestion dans un CSPF n'existe pas.
Dans ce contexte particulier, elle est souvent
associée à d'autres fonctions. La position dans l'organigramme
est fonction du nombre de personnes et des services mis en place : d'une part,
ce peut être le comptable qui élabore les budgets et utilise les
techniques du contrôle, et d'autre part, c'est le dirigeant
personnellement qui souhaite coordonner et suivre les activités.
Dans les développements qui suivent, nous allons
essayer de dresser, à travers la littérature existante, un
panorama des différents outils de contrôle mis en oeuvre dans les
CSPF.
En se référant aux travaux de Moisdon (1997),
il importe de faire plusieurs distinctions. Un outil de gestion n'est pas une
règle dans la mesure où une règle peut être
informelle : elle peut être justifiée par l'expérience ou
le savoir-faire par exemple, et rester tacite alors qu'un outil de gestion sera
formalisé. Un outil de gestion est une « formalisation de
l'activité organisée ».
Alain Burlaud et Claude J. Simon, 2013 dans « Les outils
classiques du contrôle de gestion » montre comment ces outils
influencent le fonctionnement de l'organisation et l'impact qu'ils peuvent
avoir bien que différent de la finalité initiale. Dans cette
perspective, ils ont recensé une batterie d'outils de gestion
très utiles du point de vue du personnel en charge
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MÉMOIRE RÉDIGÉ PAR AKOUNG DANY-ARTHUR
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d'effectuer le contrôle de gestion. Le premier objet de
leur recherche, affirment-ils, est de montrer que de nombreux outils de gestion
existent dans les CSPF. Ces outils s'inscrivent dans la dimension instrumentale
du contrôle de gestion. Ainsi on distingue les outils de
prévision, de suivi, et d'analyse.
2.1 ) Les outils de prévision
Les outils de prévision sont
matérialisés par les plans et les budgets. Il
s'agissait de repérer la diffusion de ces outils. Les taux
élevés de réponses positives conduisent les auteurs
à s'interroger sur le degré de confiance à accorder
à ces résultats. En effet, parce que l'élaboration de
certains outils (plan de formation, plan prévisionnel de
rentabilité des investissements) est complexe, les taux de
réponses doivent, selon eux, être plus faibles. Toutefois, ils
constatent qu'il existe une relation inverse entre le degré de
complexité de l'outil et son utilisation dans l'entreprise.
2.2) Les outils de suivi
Les outils de suivi sont représentés dans
les tableaux de bord. Ce recensement permet entre autres, de
se faire une idée sur la variété des indicateurs que l'on
trouve dans un tableau de bord de dirigeant de leur poids respectif dans l'aide
à la décision. Cette étude montre que la gestion à
court terme est privilégiée tant au niveau du suivi des
indicateurs de rentabilité, de la demande, que de la production.
2.3) Les outils d'analyse
Les outils d'analyses sont matérialisés par
la comptabilité analytique, ils sont la
concrétisation de l'amendement du contrôle de gestion. La
méthode du calcul des coûts est utilisée pour remplir les
rôles traditionnels de fixation des prix et de calcul de la marge.
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Cette liste des outils recensés par Rowe et al. (1994)
a été complétée par une autre étude de ces
mêmes auteurs (Fernandez et al. 1996). Les outils recensés
à partir de cette étude sont :
Ø Pour les outils de prévision :
les plans prévisionnels des ventes, le plan prévisionnel
de production ;
Ø Pour les outils de suivi : le chiffre
d'affaires, le nombre de commandes, les délais fournisseurs, les stocks
de matières premières ;
Ø Pour les outils d'analyse : les
coûts unitaires de fabrication et les écarts sur prévision
des quantités.
Nobre (2001), à partir d'une étude
réalisée auprès de 12 clubs de football de Ligue 1, les
outils de pilotage comme le tableau de bord, la fixation d'objectifs
collectifs, la fixation d'objectifs individuels, la détermination de
résultats mensuels, la procédure budgétaire et le calcul
d'écarts, sont largement répandus.
Cet ensemble d'outils recensés forme une liste qui nous
semble assez complète. Une étude menée dans les CSPF du
Centre concernant les tableaux de bord, présente les mêmes
indicateurs déjà cités par Rowe et al, (1994). De plus,
une étude plus globale effectuée en 1987 par le Magazine Tertiel
avec les élèves de l'EDHEC, montre que les dirigeants utilisent
majoritairement les outils de comptabilité analytique, les budgets
prévisionnels à un an et les tableaux de bord, et ces outils font
l'objet d'un traitement informatisé. De même, McMahon et Holms
(1991) ont observé que les outils financiers traditionnels tels les
écarts financiers, les budgets, les systèmes de coût de
revient, sont moins présents dans les CSPF. Enfin, Chapellier (1997),
dans son article recense la majorité des outils que nous avons
présentés.
Cette liste d'outils peut donc être
considérée comme une représentation fiable des outils de
gestion dans les CSPF. Elle nous semble assez complète mais elle est
loin d'être exhaustive et n'a pas une telle vocation. D'une part, parce
que la plupart des CSPF ne disposent
pas d'une liste étendue d'outils et, d'autre part, les
besoins de ces outils ne sont pas toujours nécessaires ni
identiques13.