WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Adolescence, amour et violence. prévenir la violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s


par Cindy, Zoé Chevalier, Niggeler
Haute-école de travail social de Fribourg - Suisse - Bachelor en Travail social 2022
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

7. Discussion

Ce chapitre a la finalité de reprendre les résultats analysés et de les mettre en lien avec le travail social. L'objectif est de proposer des pistes d'intervention et/ou de présenter des initiatives afin de lutter contre les violences au sein des relations amoureuses des adolescent-e-s. Pour ce faire, nous développerons ces perspectives en fonction des axes analysés:

1. La violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s

2. Les spécificités bio-psycho-sociales de la VRA

3. Le manque de visibilité

4. Les champs d'intervention de la VRA : prévention et prise en charge

7.1. Quel rôle pour les professionnel-le-s du social face à la violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s

Au terme de l'analyse, il ressort que la violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s n'est pas identique à de la violence conjugale. Les jeunes en fonction de leur genre interprètent différemment la violence subie et infligée. Les mécanismes de la violence sont majoritairement bidirectionnels comparés à ceux de la violence conjugale qui sont unidirectionnels. Pour Douai (2019), la réciprocité de la violence est en corrélation avec la période de l'adolescence, où les jeunes se cherchent et testent leurs limites et celles d'autrui. L'auteure souligne également que les adolescente-s craignent le désamour (cité dans Breton, 2019). En d'autres termes, le processus développemental des adolescent-e-s inclut de la violence, mais celle-ci peut être intensifiée, car l'expérimentation de soi et des autres peut générer une cessation d'amour et d'intérêt des pair-e-s.

Une autre raison de la violence dans les relations amoureuses est son côté pernicieux qui s'invite comme une preuve d'amour. Beaucoup d'adolescent-e-s attribuent leurs actes de violence sous le couvert de la jalousie. Grignard (2019) constate que la surveillance par le-la partenaire peut être considérée comme de la jalousie sous prétexte qu'on tienne à celui ou celle qu'on aime, mais cela peut également être le début d'un cycle de violence (cité dans Breton, 2019). La jalousie n'est pas un sentiment facile à évaluer, si l'on se réfère aux propos des adolescent-e-s (voir annexe 5). Nous constatons que la jalousie est autant indispensable à une relation amoureuse qu'inutile, car c'est le résultat d'un manque de confiance en soi.

P a g e 39 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

La peur de l'abandon, plus particulièrement la rupture, conjuguées des émotions présentes comme la jalousie sont des facteurs pouvant générer des violences dans une relation amoureuse à l'adolescence. Cela nécessite une attention de la part des parents et/ou des professionnel-le-s de ne jamais minimiser ou banaliser ce que les jeunes ressentent.

L'accompagnement en amont est indispensable pour endiguer la violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s. Taylor & coll. (2018) évoquaient l'importance pour les jeunes filles interrogées d'être entourées par des adultes de confiance. Cette personne de confiance peut s'incarner par les parents, un membre de la famille, mais également être un-e professionnel-le. Melchiori (2018) est conseiller éducatif, il prône une écoute attentive des parents, sans pour autant que ces derniers s'immiscent dans la relation amoureuse de leur enfant, cela évitera des conflits potentiels. Il conseille aux parents de recourir à de tierces personnes (conseillère ou conseiller en éducation ou psychologue) afin que le-la jeune s'exprime librement et puisse évoquer cette relation sans le risque que le parent s'identifie et lui parle de sa propre expérience (Melchiori, 2018). Si les parents ne se sentent pas assez outillés pour évoquer les relations amoureuses avec leur adolescente, ils doivent solliciter le recours d'une tierce personne ceci afin de garder une communication la plus sereine possible.

La problématique de la VRA implique de nombreux thèmes, notamment liés à des changements de société. Parmi ces normes, nous avons constaté que l'adhésion aux stéréotypes de genre participe à alimenter cette violence. Selon Spence & coll., 1991 ; Steg & Pirog-Good, 1987, les hommes emploieraient la violence pour contrôler la relation amoureuse alors que les femmes emploieraient la violence à la suite d'une perte de contrôle émotionnelle (cités dans Gagné & Lavoie, 1995). Cette analyse de l'emploi de la violence adhère par conséquent aux stéréotypes que la femme agit sous l'émotion et que l'homme doit employer la force pour contrôler sa relation amoureuse. L'adhésion aux stéréotypes de genre crée une violence supplémentaire dans la VRA, elle n'est pas générée directement par les adolescent-e-s, mais par une société qui peine à casser de nombreux préjugés.

L'adhésion aux normes socioculturelles ne facilite pas la prise en charge des victimes et des auteur-es de violences dans les relations amoureuses. Nous l'avons vu, les adolescents doivent se heurter à une double injonction - être un homme viril, dominant et fort, mais sans employer la force contre autrui et les adolescentes sont des victimes toutes désignées, surtout au niveau des violences sexuelles. Lichter et McCloskey (2004) évoquent que des études ont souligné les attitudes positives envers les rôles traditionnels liés au genre, qui est en-deçà des violences de couples et cela tant pour les victimes et que les auteur-e-s (cités dans Dosil & coll., 2020). Parmi ces rôles, on trouve celui du stéréotype que les filles doivent se trouver un homme. Parrot (1998) relève que certaines filles se sentent obligées d'avoir une relation amoureuse, qu'elles y resteront même si cette dernière est malsaine (cité dans Smith & Donnelly, 2008). Il est préférable pour certaines filles/femmes d'avoir une relation que d'être seules.

Delsinne (2019), éducatrice spécialisée, abonde dans ce sens. Pour elle, les filles ont une tendance à se mettre en danger en fréquentant des jeunes de milieux violents et/ou délinquants, car elles obtiennent de l'attention et de la protection, ce qui augmente les risques d'entretenir une relation abusive. Quant aux garçons, l'éducatrice constate qu'ils ont une fausse représentation d'une relation amoureuse, mais aussi de la femme. Ce biais se construit dans la sphère familiale, mais également par les médias (cité dans Breton, 2019).

P a g e 40 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

Pourtant, Honnis (2019), assistante sociale, constate un équilibre dans les violences commises par les garçons et les filles. Si les violences physiques (pas spécifiques à la VRA) sont commises par un plus grand nombre d'adolescents, les adolescentes sont tout aussi violentes (cité dans Breton, 2009). Les jeunes filles sont intrusives et enferment leurs pair-e-s tout autant que les jeunes hommes. En tant que travailleurs sociaux et travailleuses sociales, il est important de ne pas renforcer ces stéréotypes liés au genre. Il est également important d'évaluer régulièrement les faits de violence au sein d'un groupe d'adolescent-e-s, cela pourrait permettre de saisir les enjeux et les finalités qui s'y rattachent.

La VRA au sein de la communauté LGBTIAQ+6, mêmes enjeux, mêmes types de violences ? Si la VRA chez les adolescent-e-s est une problématique peu explorée, celle qui concerne les violences des relations amoureuses au sein de la communauté LGBTIAQ+, l'est encore moins. Violence que faire? (2011-2021) souligne que les regards et l'attention sont dirigés majoritairement vers les couples hétérosexuels, pourtant les autres types de couples sont également concernés par la violence. Le site mentionne qu'il est particulièrement important que ces personnes se sentent libres et légitimes d'oser se confier.

Ces changements sociétaux impactent l'accompagnement, il est donc nécessaire et important de se former. Cottin & Boudet (2019) ont constaté que l'une des difficultés pour les conseillères conjugales et familiales en intervention résidait dans la posture qu'elles adoptaient face à une thématique qui les devançait, car les jeunes étaient souvent plus au fait que ces dernières. Si certaines professionnelles se sentent dépassées par ces questions, il est important que tous les professionnel-le-s s'y attardent.

La votation du 26 septembre 2021, Mariage pour tous, va de facto engendrer des changements. Parmi ceux-ci, nous évoquerons à nouveau, le cadre légal des violences domestiques, qui pour rappel condamne le ou la partenaire violent-e. Toutefois, ce changement de paradigme exige de la part de tout un chacun de reconsidérer ces normes liées aux genres, en acceptant que la violence dans une relation amoureuse n'enferme pas les femmes dans le rôle de victimes et les hommes dans celui d'auteurs. Les victimes et les auteur-e-s ne devraient pas être lié-e-s à un genre, mais à une personne. Quand bien même, si un homme est victime de violence de la part d'un autre homme, ce dernier ne sera pas un homme faible, mais un homme victime; il sera une victime.

7.2. Comment comprendre et interpréter les facteurs bio-psycho-sociaux de la VRA en tant que professionnel-le-s du social?

Lors de l'analyse, il a été mis en évidence que les facteurs de risques sont majoritairement psychologiques. Cependant, ces conséquences psychiques se manifestent par des symptômes physiques sur le long terme comme des maladies cardiovasculaires, de l'hypertension, etc. De plus, la violence physique peut laisser des traces. Les symptômes physiques (hématomes, griffures ou autres) peuvent donner des indications sur d'éventuelles violences dans la relation. Il en va de même pour les symptômes psychosomatiques comme des maux de ventre et de tête et ou des crampes. Les scarifications sont aussi une indication d'un mal-être chez les adolescent-e-s. Tous ces signes doivent être considérés par les professionnel-le-s, car les maux cachent généralement des mots. Calden (2019) souligne que la violence est la manifestation d'un mal-être:

6 Lesbiennes, Gays, Bisexuel-le-s, Trans, Queers, Intersex-e-s, Assexuel-le-s et le + correspond à tous les autres.

P a g e 41 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

La violence va toujours signaler un mal-être ou une souffrance, un besoin certainement - et une impossibilité souvent - de se faire entendre, de faire entendre quelque chose; elle signale une difficulté à se situer par rapport aux autres, qui doit alerter forcément (cité dans Breton, 2019, p.121).

Pour Honnis (2019), le manque d'estime de soi est un des premiers facteurs à considérer pour les professionnel-e-s. Cela est valable tant pour les victimes qui s'assujettissent par manque de confiance en elles-eux que pour les auteur-e-s qui perpétuent la violence afin de s'attribuer une identité (cité dans Breton, 2019).

Ces violences peuvent s'expliquer également par résonance, il s'agit d'une analyse systémique. L'utilisation de la violence serait non pas la cause, mais le symptôme d'un mal plus profond. Delsinne (2019) éducatrice spécialisée, constate que les violences (de toutes formes) dans une relation amoureuse, sont dirigées envers une personne ou une situation précise, car cela remémore à l'auteur-e, un épisode douloureux ou insupportable survenu durant l'enfance. L'utilisation de cette violence permet aux auteur-e-s de pallier ce traumatisme (cité dans Breton, 2019).

Une autre hypothèse que souligne O'Keefee (1986) est que la violence psychologique est peu décelée par les adolescent-e-s, car l'estime de soi se développe principalement au moment de l'adolescence. De ce fait, cette compétence s'acquiert et elle ne permet pas encore de déceler ce qu'est la violence psychologique et de s'affirmer face aux dires dommageables de son-sa partenaire (cité dans Smith & Donnelly, 2000).

A ce jour, les recherches en neurosciences démontrent que la violence agit dans des zones spécifiques du cerveau. M. Keaser nous a exposé l'exemple du cortex cingulaire antérieur qui intervient comme une alarme neuronale lors de détresse émotionnelle et de conflits, qui réagit lors d'événements impliquant une douleur physique et/ou morale vécue par soi-même ou par une tierce personne (communication personnelle, 01 mars 2021). La docteure Kaeser atteste que les traumatismes psychiques ou physiques modifient les fonctions cérébrales liées aux émotions et aux situations stressantes (Khali, 2016). Il est possible de soigner ces traumatismes par le biais d'Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR), de thérapies cognitivo-comportementales, familiales dirigées par la communication intra-familiale et le soutien parental (Khali, 2016). Il est donc intéressant de s'intéresser aux sciences neuronales pour comprendre comment la VRA se manifeste dans le cerveau de ces jeunes. Certes, cela exige de mettre le focus sur les auteur-e-s et les victimes, mais cela permettrait d'ouvrir un champ exploratoire encore peu investigué.

Les travailleurs sociaux et travailleuses sociales ne peuvent pas tout endosser. Le choix d'évoquer certains types de thérapie, ne sous-entend pas que les professionnel-le-s du travail social doivent appliquer ces méthodes avec les jeunes qu'ils-elles accompagnent. En revanche, ils-elles doivent entreprendre les démarches auprès du réseau pluridisciplinaire. Les professionnel-le-s du travail social peuvent être amené-e-s à solliciter des suivis psychologiques et psychiatriques pour les jeunes qu'ils-elles accompagnent. De ce fait, il est intéressant d'évoquer quelques pistes d'intervention spécifiques qui sont conseillées lors de traumatismes liés à la violence.

Si la VRA chez les adolescent-e-s peut s'expliquer par un mal-être et/ou par un traumatisme enfoui, nous pouvons aussi considérer l'environnement socio-économique. Le milieu familial peut être un facteur de protection comme un facteur de risques face à la VRA. Pour rappel, nous avons évoqué qu'un-e adolescent-e victime de violence conjugale durant son enfance est plus à risque de vivre de la VRA. Il en va de même pour les enfants qui n'ont pas acquis un modèle d'attachement sécurisant.

P a g e 42 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

L'influence des pair-e-s est également à considérer comme un facteur de risques pour la VRA chez les jeunes. Les pair-e-s exercent une influence sur la consommation d'alcool et de cannabis (Hébert & coll., 2018). Il est également constaté que côtoyer des pair-e-s violent-e-s ou délinquant-e-s participe au risque de VRA (Morris & coll., 2015, cités dans Hébert & coll. 2018). Ces facteurs de risques doivent être considérés, mais attention à ne pas tomber dans le piège du déterminisme. Nous rappelons que la violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s n'est pas liée à un genre, ni à une classe sociale, ni même à une culture.

De surcroît, nous devons souligner que ces facteurs de risques sont liés à la victimisation, mais aussi à la perpétuation de la violence. Cela nécessite de la part des travailleurs sociaux et travailleuses sociales de ne pas se focaliser uniquement sur les victimes potentielles, mais de considérer également les auteur-e-s.

7.3. Comment peut-on pallier le manque de visibilité de la VRA ?

Le manque de visibilité de notre thématique est préjudiciable. Le Canada et les États-Unis possèdent des données conséquentes sur la VRA chez les jeunes. Cela permet d'établir un état de la situation assez précis (Hébert & coll., 2018). En revanche, en Europe cela n'est pas encore le cas. Dosil & coll. (2020), soulignent l'importance que les sciences sociales s'intéressent à la VRA chez les adolescent-es, car il n'y a pas suffisamment de données et il y a encore beaucoup d'incohérences. De plus, les auteur-e-s soulignent que si cette problématique est liée à de la violence conjugale, la VRA chez les adolescent-e-s ne doit pas être analysée et traitée de manière similaire.

Avant de distinguer ces deux fléaux, il est nécessaire de visibiliser cette problématique au plus grand nombre. Afin de récolter des données en suffisance, il est important de varier les méthodes de récoltes. Des questionnaires auto-reportés permettent de récolter des milliers de données, mais s'inscrivant dans un temps court et incluant quelques biais liés aux normes et attentes de la société. Une autre méthode de récolte est l'entretien semi-directif qui permet d'approfondir le thème auprès de quelques candidat-e-s. La récolte de données doit également s'instaurer dans le temps. C'est pourquoi, il est nécessaire de développer des études longitudinales. Cela permettra de mieux comprendre les mécanismes de la violence en fonction de l'âge des jeunes.

Nous pouvons également utiliser ces deux méthodes de recherches (quantitatives et qualitatives) auprès des différent-e-s professionnel-le-s évoluant auprès d'adolescent-e-s pour permettre d'analyser l'état de connaissance de ce sujet.

Comme nous le stipulions ci-dessus, de nombreux professionnel-le-s ignorent ou minimisent la problématique de la VRA et de ce fait, ils ne sont eux ou elles-mêmes pas ou peu informé-e-s à ce sujet. Afin d'agir de manière la plus efficiente possible, il serait pertinent de pouvoir informer les professionnel-le-s sur cette problématique. Un-e professionnel-le bien informé-e sera plus à même de pouvoir détecter un problème de VRA chez un-e adolescent-e. Lors d`une rencontre avec ce dernier, cette dernière le-la professionnel-le pourra ainsi lui offrir un soutien plus adéquat. Tou-te-s les professionnel-le-s qui ont un lien avec les enfants/adolescent-e-s, devraient avoir les connaissances et outils nécessaires pour aider, le cas échéant orienter, l'enfant et ou l'adolescent-e en difficulté vers un-e professionnel-le du travail social.

Le rôle des médias participe également à la visibilisation de la violence domestique, surtout lors de ces journées de sensibilisation, mais pas seulement. Récemment, un article évoquait spécifiquement la VRA chez les adolescent-e-s. L'auteure y mentionne quelques chiffres, évoque le peu de structures qui

P a g e 43 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

accueillent ces jeunes, mais surtout insiste sur le fait que cette violence était ignorée jusqu'à peu « le phénomène des violences qui s'immiscent dans les couples d'adolescents et de jeunes adultes a longtemps échappé à tous les radars» (Reybaud, 2021).

La prévention universelle doit s'intensifier. Il existe pourtant des journées internationales et nationales contre la violence comme:

· Le 2 octobre : Journée internationale de la non-violence.

· Le 20 novembre : Journée internationale des droits de l'enfant.

· Le 25 novembre : Journée internationale contre les violences faites aux femmes.

Ces journées peuvent être l'occasion d'aborder la problématique de la VRA chez les adolescent-e-s tant au niveau privé qu'au niveau institutionnel (écoles, foyers, centres d'animation). En revanche, il serait peut-être plus intéressant d'aborder une prévention par zone communautaire, comme évoqué précédemment. L'avantage de l'approche communautaire serait de cibler les lieux où les facteurs de risques sont plus importants.

Il existe pourtant des programmes de prévention (SE&SR, programme de la prévention de la violence dans les relations amoureuses - ViRAJ, Programme de prévention et de la promotion traitant de la violence dans les relations amoureuses et du harcèlement sexuel [PASSAJ, Safe Dates,...) sont indispensables, car ils participent à la visibilisation de la VRA chez les adolescent-e-s. C'est également un premier accompagnement professionnalisé qui tend à favoriser l'empowerment de ces jeunes.

7.4. La prévention de la VRA et le travail social

La prévention est l'une des missions des travailleurs sociaux et travailleuses sociales qui promeut le changement social afin de résoudre les problématiques en tenant compte « de la capacité et la libération (empowerment) des personnes afin d'améliorer leur bien-être» (Avenir social, 2010, p. 8). Afin de favoriser cette action, les professionnel-le-s du travail social ont besoin d'outils (formations, collaborations, documentations) leur permettant de promouvoir ce changement.

Lors de l'analyse de nos textes, nous constations que la thématique de la prévention qu'elle soit ciblée, spécifique ou universelle ressort dans plusieurs textes.

Greenman & Matsuda (2016) expliquent que la plupart des adultes, qu'ils-elles soient auteur-e-s ou victimes de violences graves à l'âge adulte, avaient déjà perpétré ou subi de la violence à l'adolescence (cités dans Glowacz & Courtain, 2017).

Keaser explique que les personnes victimes d'un traumatisme souffrent de modifications cérébrales fonctionnelles et que ceci engendre une moins bonne capacité à gérer certaines situations. Elles auront donc tendance à recourir à l'agression pour gérer les conflits (Khali, 2016).

Glowacz & Courtain (2017) invoquent qu'une intervention précoce pour les jeunes vivant de la violence devrait être mise en place, toutefois, elles précisent que celle-ci ne devrait pas uniquement être faite de manière répressive et mettent en garde sur le risque de stigmatisation.

Hébert & coll. (2018) mettent en avant le fait que les programmes de prévention ciblent principalement les victimes et/ou les auteur-e-s de violence, mais que si l'on espère de meilleurs résultats, il serait préférable de pouvoir effectuer des programmes de prévention ciblant un public plus large. Ils parlent également des programmes de prévention en ligne via des plateformes interactives, mais qui pourraient comporter certains risques (inconfort psychologique pendant ou après l'utilisation de la plateforme, manque de soutien direct) s'ils ne sont pas encadrés.

P a g e 44 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

Taylor & coll. (2017) parlent du programme Shifting Boundaries qui touche les préadolescents de 10 à 13 ans dans le cadre des violences sexuelles, qui aurait permis de diminuer la victimisation, mais n'aurait pas eu d'impact sur la perpétration.

Tous ces points sont très pertinents et mettent bien en avant toute la difficulté de la prévention.

Selon la prévention suisse de la criminalité, il existe plusieurs formes de prévention, soit générale en lien avec les politiques sociales, la famille qui joue un rôle central dans le développement de l'enfant, l'école qui détecte et intervient dans les relations entre les enfants, soit la prévention dans l'espace public, qui concerne notamment l'aménagement de l'espace public et la mise à disposition des professionnel-le-s pour les jeunes. Un point intéressant à relever, dans la prévention générale est la prévention précoce, qui a d'abord été menée afin de combattre la toxicomanie, mais qui aujourd'hui est utilisée pour la violence de manière plus générale.

En cherchant d'autres informations à ce sujet, Garcia & coll. (2015) expliquent que dans le cadre de la prévention, même si un âge spécifique n'a pu être établi, il est essentiel, de pouvoir mettre en place des interventions de prévention aussi rapidement que possible, afin que les enfants puissent bénéficier au mieux des interventions mises en place.

Dans le cadre de la violence au sein du couple chez l'adulte, une des premières recommandations pour lutter contre la violence est la prévention primaire. Les auteurs Guedes & Bott (2009) mentionnent la prévention primaire comme le moyen « le plus stratégique» pour mettre un terme à la violence faite aux femmes. Dans l'étude Violence envers les enfants - Concept pour une prévention globale, les auteur-e-s définissent la prévention primaire comme la manière de renforcer les ressources de protection personnelle. Ceci rejoint les propos de Glowacz & Courtain (2017) qui promeuvent l'empowerment et le développement de compétences socio-émotionnelles afin de pouvoir régler les conflits autrement qu'au travers du prisme de la violence.

A la suite de l'analyse de nos résultats, il nous paraît évident que les travailleurs sociaux et travailleuses sociales ont un rôle central à jouer dans la prévention des VRA chez les adolescent-e-s, au vu des conséquences que celle-ci peut avoir sur la santé des jeunes qui la vivent.

Comment les professionnel-le-s et les proches appréhendent ces adolescent-e-s vivant de la violence au sein de leur relation amoureuse?

L'approche des professionnel-le-s se déploie à plusieurs niveaux et de façons différentes. Il est intéressant d'observer quelques pratiques et d'analyser les impacts de celles-ci.

Au niveau microsocial, il existe des initiatives individuelles comme celle d'une assistante sociale franco-canadienne qui exploite sa propre histoire afin d'aider les jeunes vivant des violences dans leur relation amoureuse. En effet, lors d'un stage au Canada dans un centre d'aide et d'accueil mère-enfant 7 la jeune femme prend conscience qu'elle a vécu de la violence dans son adolescence, à l'âge de 16 ans (Breton, 2019). L'auteure a décidé d'exploiter ce douloureux passé afin que d'autres jeunes prennent conscience de cette violence. Le témoignage qu'elle propose dans son livre est un bon outil, car il se présente comme un journal intime, évoquant divers mécanismes de violences:

Il a commencé à venir à quelques matchs à domicile, puis à chaque match, et finalement, même durant nos déplacements. Lors des matchs, il passe son temps à regarder toutes les personnes présentes dans chaque salle et il fixe les plus jeunes pour voir s'ils me

7 La Bouée à Lac-Mégantic

P a g e 45 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

regardent. Si c'est le cas, Léo se montre très froid, distant, parfois même en colère, comme si tout était ma faute (Breton, 2019, pp. 50-51)

Breton (2019) ne se contente pas de partager son vécu, elle l'exploite et propose un cahier pédagogique et des fiches pratiques dans son ouvrage. Ce dernier contient une série de tests (Annexe 3 & 4) permettant aux jeunes de prendre conscience qu'ils-elles sont dans une relation amoureuse violente et de distinguer ce qu'est une relation saine d'une relation toxique. Toutefois, il faut souligner que ce témoignage et ces outils s'exploitent avant tout dans des situations où la violence occupe déjà une place dans la relation amoureuse.

En Suisse, il existe depuis 2011 un programme de prévention Sortir ensemble et se respecter (SE&SR) qui sensibilise la problématique de la VRA chez les jeunes et les adolescent-e-s; ce programme « cherche donc à combattre les préjugés et à mettre en place une prévention précoce des violences de couple et de leurs effets désastreux, tout en offrant une ouverture vers des relations gratifiantes» (De Puy & coll., 2013, p.153). L'association propose une formation destinée aux professionnel-le-s du travail social, de l'éducation, de l'enseignement et de la santé. Les cours sont dispensés à la Haute école de travail social de Lausanne (HETSL) sur trois jours et s'axent sur les savoirs, savoir-être et savoir-faire (Clerc & coll., 2017). Cette formation permet aux différents professionnel-le-s d'acquérir des outils et des connaissances sur la problématique de la VRA. De plus, des formations sont également proposées aux jeunes entre 13-18 ans, mais peuvent être adaptées en fonction de l'âge du public et également du contexte institutionnel. Il s'agit d'un programme de neuf modules, d'une heure et quart chacun évoquant les thèmes suivants:


·

Module 1 :

Définir ce que je veux dans une relation


·

Module 2 :

Définir les abus dans une relation


·

Module 3 :

Pourquoi les comportements abusifs


·

Module 4 :

Comment aider les ami-e-s en difficulté


·

Module 5 :

Des exemples pour aider les ami-e-s


·

Module 6 :

Ce qu'on s'imagine à propos des relations


·

Module 7 :

Les agressions sexuelles


·

Module 8 :

Partager le pouvoir et communiquer


·

Module 9 :

Mes sentiments, mes réactions

En proposant une formation dispensée directement au public cible et par l'intermédiaire des professionnel-le-s, cela augmente le potentiel d'information et de sensibilisation. Toutefois, il faut spécifier que les programmes destinés directement aux adolescent-e-s doivent être initié-e-s et mis en place par un-e professionnel-le du travail social, de la santé ou de l'enseignement. Cela souligne donc l'importance et la nécessité de diffuser la problématique de la violence dans les relations amoureuses chez les adolescent-e-s auprès des profesionnel-le-s.

La prise en charge n'est jamais aisée surtout si la violence est déjà présente. Les conseillères conjugales et familiales interrogées ont souligné que certains thèmes comme les violences sexuelles ou l'inceste sont difficiles à gérer émotionnellement et que l'accompagnement l'est également. En revanche, ces professionnelles ont souligné que certaines personnes viennent simplement les consulter pour que ces violences soient verbalisées par autrui (Cottin & Boudet, 2019).

P a g e 46 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

Au niveau mesosocial, l'environnement scolaire est important, car les adolescent-e-s le fréquentent de manière régulière. De plus, il est important de rappeler l'importance des pair-e-s. Ces relations sont essentiellement développées à l'école et au collège pour s'élargir par la suite (Juhem, 1995).

A ce jour, de plus en plus de travailleurs sociaux et travailleuses sociales ont leur place dans les écoles, ce qui semble tout à fait cohérent avec le fait de vouloir endiguer la violence dans ces lieux. Mais ont-ils-elles les outils suffisants pour travailler?

Comme nous l'avons vu, le risque de mener une prévention ciblée sur les auteur-e-s ou les victimes est que ces dernier-ères soient ensuite étiqueté-e-s et mis-es à l'écart. De ce fait, il serait préférable de faire de la prévention générale avec une meilleure formation des professionnel-le-s, afin que la détection soit plus efficiente. Ensuite, au cas par cas, de proposer des soutiens personnalisés à chaque protagoniste qu'il-elle soit victime ou auteur-e afin de l'accompagner, de l'aider à conscientiser et développer ses propres ressources pour sortir de ce cercle de la violence.

Dans cette perspective, la collaboration avec les infirmier-ères scolaires des établissements est tout à fait pertinente, car d'une part il est probable qu'elle-il puisse être la personne qui constate des stigmates de violence. D'autre part, l'infirmier-ière reste une intermédiaire de qualité quant à la prise en charge au niveau de la santé, notamment au niveau des consommations d'alcool et de cannabis. Pour rappel, la consommation de produits augmente le risque de vivre ou de commettre de la VRA. Les infirmier-ères ont un rôle non négligeable à jouer dans le cadre de la prévention(Bernèche, 2014).

Une collaboration pluridisciplinaire entre l'enseignant-e, l'infirmier-ère et la-le professionnel-le du travail social pourrait renvoyer un message clair et sécurisant aux jeunes, qu'ils-elles vivent une situation difficile ou non. Les adolescent-e-s doivent pouvoir se référer à un-e adulte, d'autant plus s'ils-elles ne peuvent pas en parler et trouver du soutien auprès de leur famille.

De ce fait, nous nous demandons si la prévention des violences, plus précisément la violence au sein du couple adolescent, mais aussi adulte, devrait être mise en place dès l'école primaire ? Si l'éducation sexuelle commence au niveau primaire, pourquoi la prévention de la violence doit-elle attendre le secondaire, sachant que les répercussions sur la santé peuvent être aussi importantes que celles en lien avec la santé sexuelle?

A ce jour, en Suisse, la prévention concernant les violences est faite dans les écoles principalement à partir du niveau secondaire. Si l'on se réfère aux recommandations expliquées plus-haut, la prévention devrait être mise en place le plus tôt possible afin d'espérer un maximum d'impact.

De plus, comme nous l'avons vu, un-e enfant vivant une problématique de violence, aura de la peine à se concentrer, aura de moins bons résultats et sera plus à risque de le répéter plus tard.

P a g e 47 | 62

Adolescence, amour et violence. Prévenir la violence au sein des relations amoureuses chez les adolescent-e-s.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand