B. Un partenariat à renforcer selon un objectif de
cohérence des politiques publiques
Selon le professeur PONTIER, la notion de partenariat est
« souvent approximative » et « semble être un
pavillon couvrant toutes sortes de marchandises »137.
Ainsi, elle se confond souvent avec celle de consultation :
des organismes consultatifs sont mis en place, et regroupent toute sorte
d'acteurs, dont des représentants des collectivités
territoriales. Le Conseil national d'évaluation des normes applicables
aux collectivités territoriales et à leurs établissements
publics, dont il a été fait référence
précédemment, en est un exemple.
Pour renforcer la notion de partenariat, il faut que l'Etat et
les collectivités s'entendent sur l'objectif poursuivi. Effectivement,
selon l'Organisation pour l'Economie, la coopération et le
développement, « La décentralisation [...] crée
[...] une inégalité d'information entre les autorités
centrales et les collectivités territoriales investies de pouvoirs
budgétaires, ce qui peut entraîner des difficultés
135 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle
organisation territoriale de la République
136 Annexe au projet de loi de finances pour 2019 - Transferts
financiers de l'Etat aux collectivités territoriales, Jaune
Budgétaire
137 Jean-Marie PONTIER, « Le partenariat entre l'Etat et les
collectivités territoriales », AIDA, 2014, p. 1694
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lorsque les objectifs des autorités
diffèrent d'un niveau d'administration à l'autre, comme cela
arrive souvent. »138
Dès lors, chacun doit participer à l'effort
d'assainissement budgétaire exigé. Or, bien souvent, l'Etat a
pour objectif la satisfaction de l'intérêt général,
tandis que les collectivités territoriales souhaitent satisfaire
l'intérêt public local.
Si l'intérêt général est la somme
de tous les intérêts particuliers, l'intérêt public
local ne souffre d'aucune définition juridique explicite. Cependant, le
juge administratif semble l'entendre comme la satisfaction de toutes les
affaires locales, et des besoins de la population locale.
Cette notion a été renforcée par les
alinéas 2 et 3 de l'article 72 de la Constitution qui disposent que
« les collectivités territoriales ont vocation à prendre
les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le
mieux être mises en oeuvre à leur échelon. »
Jacques MOREAU identifie ainsi des «
intérêts locaux spécifiques, distincts des
intérêts nationaux ; la collectivité territoriale [ayant]
vocation à gérer tous ces intérêts qui lui sont
propres, dans la mesure où ils sont communs aux habitants dont la
solidarité est tenue pour légitime »139.
»141.
Le problème tient au fait que, comme le souligne le
professeur PONTIER, « il n'y pas d'égalité entre ces
intérêts »140, puisque l'objectif poursuivi
par l'Etat apparait supérieur à celui des collectivités
territoriales. D'ailleurs, dès 2005, la notion d'intérêt
public local s'est retrouvée limitée par le Conseil
constitutionnel qui a estimé « qu'il résulte de la
généralité des termes retenus par le constituant que le
choix du législateur d'attribuer une compétence à l'Etat
plutôt qu'à une collectivité territoriale ne pourrait
être remis en cause, sur le fondement de cette disposition, que s'il
était manifeste qu'eu égard à ses caractéristiques
et aux intérêts concernés, cette compétence pouvait
être mieux exercée par une collectivité
territoriale
La notion de partenariat et de collaboration entre l'Etat et
les collectivités territoriales souffre donc de cette absence de
consensus sur la nature de l'objectif à atteindre et à
poursuivre. D'après le professeur Jean-Luc BOEUF, il faut
réfléchir à des « « convergences
convergentes » entre une vision nationale et une action locale et
proposons des pistes concrètes d'action, après une
réflexion mûrie à l'ombre des expériences
européennes »142.
A ce titre, il convient de redéfinir les rôles de
l'Etat et des collectivités territoriales en matière
financière, afin de leur permettre d'exercer leur partenariat clairement
et sans ambiguïté. En effet, une transformation de leurs
rôles respectifs pourra également clarifier les compétences
de chacun, et les actions qu'ils doivent entreprendre (Section 2). Une telle
mutation serait l'occasion d'éviter les chevauchements en vue de
réaliser des économies. Elle pourrait potentiellement prendre
exemple sur les modèles européens que forment les autres pays.
138 OCDE, « Relations financières entre l'État
et les collectivités territoriales », 2003, p. 173-193.
139 Jacques MOREAU, Administration régionale,
départementale et municipale, Dalloz, 1999, 150 p.
140 Jean-Marie PONTIER, « Le partenariat entre l'Etat et les
collectivités territoriales », AIDA, 2014, p. 1694
141 Conseil constitutionnel, 7 juill. 2005, n° 2005-516 DC,
Loi de programme fixant les orientations de la politique
énergétique
142 Jean-Luc BOEUF, « L'autonomie financière des
collectivités locales existe-t-elle ? », Gestion & Finances
Publiques (n°11), 2009, p. 838
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