Chapitre I : Revue bibliographique
Pour une meilleure compréhension du sujet, une revue de
données déjà existantes a été faite. Cette
phase consistait à faire des recherches sur internet et de consulter des
documents portant sur différents sujets relatifs à la
thématique étudiée. Il s'agit des revues scientifiques,
des rapports, des conventions, des plans de gestion et des travaux
scientifiques portant sur les AMP et les activités de restauration des
écosystèmes dégradés dans le monde en
général et au Sénégal en particulier. Ces
recherches nous ont conduits aux structures telles que la Direction des Aires
Marines Communautaires Protégées, l'AMP de Saint-Louis, le
Conseil Local de Pêche Artisanale de Saint-Louis, le Service
Régional des Pêches et de la Surveillance Maritime de Saint-Louis,
combinées avec les informations découlant de nos enquêtes
et expériences sur le terrain pour une meilleure compréhension du
sujet. La lecture des différents documents nous a permis de prendre
davantage connaissance avec les concepts ci-dessous.
DEFINITION DE CONCEPTS ET ANALYSE CRITIQUE DE LA
LITTERATURE
Aire Protégée
Selon l'UICN (2007), une aire
protégée est : « un espace géographique clairement
défini, reconnu, consacré et géré par tout moyen
efficace, juridique ou autres, afin d'assurer à long terme la
conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques
et les valeurs culturelles qui lui sont associés».
L'aire protégée désigne tout type
d'espace dédié à la protection de la nature, qu'il soit
réglementé par un Etat, un privé ou géré de
manière collective (Universalis, 2016). Selon la Convention
africaine sur la conservation de la nature et des ressources
naturelles, une aire protégée est « une aire
contenant des systèmes naturels, en grande partie non modifiés,
gérés aux fins d'assurer la protection et le maintien à
long terme de la diversité biologique, tout en garantissant la
durabilité des fonctions et produits naturels nécessaires au
bien-être de la communauté. »
Aire marine protégée
Cette nouvelle définition générale d'une
aire protégée par l'UICN s'applique aux AMP dans les zones
marines (Dudley, 2008). Bien qu'elle ait perdu sa référence
spécifique à l'environnement marin, elle garantit une
démarcation plus claire entre les sites orientés vers la
conservation et ceux dont la raison d'être première est une
utilisation extractive, c'est-à-dire les zones de gestion de la
pêche.
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Elle n'empêche pas l'inclusion des zones
adéquates de protection de la pêche, mais celles-ci doivent
respecter la nouvelle définition pour être acceptées comme
AMP par la Commission Mondiale des Aires Marines Protégées de
l'UICN (CMAP-Marine).
Cependant, la notion d'aire marine protégée est
plus perceptible avec la définition de la Convention sur la
Diversité Biologique (2004). Selon cette Convention, une aire marine
protégée renvoie à : « toute zone située
à l'intérieur ou à proximité du milieu marin, avec
ses eaux sus-jacentes, la faune et la flore associées et les
éléments historiques et culturels qui s'y trouvent, qui a
été mise en réserve par une loi ou d'autres dispositions
utiles, y compris la coutume, dans le but d'accorder à la
diversité biologique, marine ou côtière, un degré de
protection plus élevé que celui dont bénéficie le
milieu environnant » Stratégie nationale pour les AMP du
Sénégal (2013).
Selon l'Ifremer (2010), « Une Aire Marine
Protégée (AMP) est un espace délimité en mer pour
lequel un objectif de protection de l'environnement à long terme a
été défini. Pour atteindre cet objectif, des mesures de
gestion sont mises en oeuvre : suivi scientifique, programme d'actions, chartes
de bonne conduite, protection du domaine public maritime,
réglementations, surveillance, information du public... »
Cette définition n'est pas pour autant satisfaisante
dans la mesure où elle fait plus allusion à la protection de
l'environnement qu'au développement visé à travers les
AMP. C'est pourquoi, dans le cadre de cette étude, nous adoptons la
définition proposée par le décret de création des
cinq (5) premières AMP du Sénégal. Ce dernier stipule dans
son rapport de présentation que les AMP constituent un avantage certain
pour la conservation de la structure, du fonctionnement et de la
diversité des écosystèmes ; de leur reconstruction en cas
de dégradation ; l'amélioration du rendement de la Pêche et
des retombées sociales et économiques pour les communautés
locales.
La restauration
La restauration écologique est une action
intentionnelle qui initie ou accélère l'autoréparation
d'un écosystème qui a été dégradé,
endommagé ou détruit, en respectant sa santé, son
intégrité et sa gestion durable (Aronson & al.,
2004). Une restauration peut ainsi être passive, lorsque les forces de
dégradation sont réduites, permettant aux processus naturels de
récupération de diriger la restauration, ou active, lorsque non
seulement les forces de dégradation sont réduites ou
arrêtées, mais que le cours de la restauration est dirigé
par des interventions humaines (Lake, 2001). On parle de restauration
écologique indifféremment pour des écosystèmes
naturels et des écosystèmes semi-naturels (ou culturels).
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Ces derniers étant des habitats abritant des
espèces natives et à colonisation spontanée, mais
dépendant d'une méthode de gestion traditionnelle (Westhoff,
1983). La restauration des écosystèmes est donc devenue
essentielle pour offrir aux écosystèmes dégradés
des avantages significatifs, sous la forme de la conservation de la
diversité biologique, de l'atténuation des changements
climatiques et de l'adaptation à leurs effets, et de la lutte contre la
désertification. Les biens et services fournis grâce à la
restauration des écosystèmes peuvent ainsi soutenir les moyens
d'existence, contribuer à l'éradication de la pauvreté et
améliorer la sécurité alimentaire, ce qui profite aux
groupes les plus pauvres et les plus vulnérables. La restauration des
écosystèmes peut et doit être une composante essentielle
des programmes de conservation et de développement durable dans le
monde. La restauration des écosystèmes est aussi précieuse
de par sa capacité inhérente à offrir aux populations une
occasion de réparer les dommages écologiques, mais aussi
d'améliorer la condition humaine. Les avantages de la restauration en
termes de conservation sont évidents. En revanche, très souvent
et de façon moins apparente mais tout aussi importante la restauration
des écosystèmes renouvelle les opportunités
économiques, rajeunit les pratiques culturelles traditionnelles et
recentre les aspirations des femmes et hommes de communautés locales.
(UICN, 2012)
L'écosystème
Le dictionnaire environnement définit
l'écosystème comme étant l'association d'une
communauté d'espèces vivantes et d'un environnement physique qui
fournit l'eau, l'air et les autres éléments dont elles ont besoin
pour vivre. C'est également l'ensemble des êtres vivants (faune et
flore) et des éléments non-vivants (eau, air, matières
solides), aux nombreuses interactions d'un milieu naturel (forêt, champ).
L'écosystème se caractérise essentiellement par des
relations d'ordre bio physico-chimique. On parle d'écosystème
aquatique, d'écosystème montagnard, etc.
Ecosystèmes dégradés
De nombreux écosystèmes de la planète ont
subi une profonde dégradation, avec des incidences négatives sur
la diversité biologique et les moyens d'existence des populations. Selon
des estimations générales, 30% de la couverture forestière
originale a été transformée pour d'autres utilisations, et
20% supplémentaires est dégradée (UICN, 2012). De plus en
plus de personnes prennent désormais conscience qu'il sera impossible de
conserver la diversité biologique de la Terre si nous ne
protégeons que les aires naturelles existantes. De nombreuses personnes
dépendent aujourd'hui de ce qui est devenu des écosystèmes
dégradés pour subvenir à leurs besoins.
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Les récifs artificiels
La pluralité de définitions relatives aux
récifs artificiels souligne le caractère transversal de notre
objet d'étude. En effet, la compréhension du sujet implique une
approche globale et transversale, d'où l'utilité de se
référer à des disciplines telles que la biologie,
l'océanographie, la géographie et l'économie qui
contribuent à enrichir la connaissance sur les récifs
artificiels. Si l'on se reporte à la définition
générale du dictionnaire Larousse, le mot récif est un nom
masculin qui signifie « rocher ou groupe de rochers à fleur d'eau,
généralement au voisinage des côtes ». Le terme
artificiel est synonyme de « produit par le travail de l'Homme et non par
la nature ». Complété par l'adjectif qualificatif «
artificiel », le récif artificiel correspond à une
reconstitution, une imitation élaborée dans un but de
préservation, de protection du milieu marin. Du point de vue de
l'océanologie un récif artificiel se définit comme «
tout matériau ou matière placée
délibérément dans un secteur de l'environnement marin
où cette structure ne peut exister dans des circonstances naturelles
afin d'assurer la protection, la régénération, la
concentration ou l'augmentation des populations marines vivantes ou pour
l'usage récréatif du secteur » (Claudet, 2006). Les Nations
Unies (F.A.O, 1995) définissent les récifs artificiels comme un
« outil de protection du littoral et d'amélioration de la
productivité ». Ils ont dès lors proposé dans le
cadre des projets de GIZC un complément de mesures de gestion, comme les
aires marines protégées, pour maintenir et développer la
pêche côtière (Claudet & al., 2004). En 1986,
la F.A.O définissait ainsi les récifs artificiels : « Les
récifs artificiels sont des structures, des installations ou des
constructions fabriquées par l'Homme pour plusieurs objectifs ». En
1989, lors du colloque d'Ancône, la F.A.O caractérise les
récifs artificiels de « construction humaine immergée dans
l'objectif d'accroître la productivité du milieu et/ou
protéger des zones spécifiques du fond marin ». Il est
important de souligner que les textes européens en vigueur s'appuient
sur cette définition du récif artificiel, tout en soulignant
l'intérêt de développer les biocénoses à
partir du biotope créé par le récif, alors
considéré comme « une construction fixe ou mobile dont le
rôle est de protéger et favoriser le développement de la
faune et de la flore aquatiques » (Commission Européenne 2006). En
2008, la thèse de Sylvain Pioch en géographie appliquée
à l'aménagement des fonds marins réalise une
synthèse des multiples définitions du récif artificiel, et
proposa la définition suivante : « un récif artificiel
correspond à toute construction humaine immergée
intégrée à l'écosystème dont l'objectif de
conception est de protéger et de développer la faune et la flore
aquatiques ».
Le concept de récif artificiel comme aménagement
des fonds côtiers est très ancien. Il est issu d'une approche
empirique de la mer.
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De fait, les pêcheurs japonais identifièrent des
lieux de pêches privilégiés aux abords des récifs,
d'épaves de bateaux. Suite à ce constat, ils furent les premiers
à immerger volontairement des épaves afin d'augmenter
l'importance de leur pêche. La littérature japonaise
témoigne dès le XVIIème siècle de la
présence d'aménagements côtiers dédiés
à l'accueil des poissons. Le récif correspond à « une
formation rocheuse constituant un substrat dur, se développant depuis le
fond de la mer vers la surface, à plus ou moins grande distance de la
côte ». De forme, de taille et de complexité variables, les
récifs naturels modifient l'environnement hydrologique, en particulier
la circulation de l'eau, parfois sur des distances considérables. Les
récifs naturels les plus riches sont formés de roches d'origine
corallienne. Le concept de récif artificiel est également
assimilé à « une structure immergée placée
délibérément sur le fond pour mimer des
caractéristiques des zones naturelles » (Guillou, 2009). Le
mimétisme des récifs artificiels avec les récifs naturels
riches en espèces marines a favorisé l'émergence de
multiples morphologies et substrats pour s'adapter au mieux aux besoins de
l'environnement marin. L'architecture du récif artificiel est
conçue pour une ou des espèces dites « cibles » dans un
but de préservation ou de commercialisation. L'origine des
matériaux employés pour la création de ces structures est
extrêmement variée : béton, acier, pierre, bois,
mâchefers, pneumatiques, plastiques... Depuis quelques années les
matériaux utilisés pour la création des récifs
artificiels ont suscité le débat entre les gestionnaires de
l'espace littoral et la communauté scientifique quant à leur
« inertie » dans le temps. La question fondamentale de l'immersion en
mer de matériaux est de savoir si le rôle de leur immersion est de
constituer un habitat au sens écologique, ou s'il constitue simplement
un déchet que l'on élimine ?
La mangrove
Au sens large du mot, la mangrove est définie comme
étant l'ensemble des formations végétales arborescentes ou
buissonnantes qui colonisent les atterrissements intertidaux marins ou fluviaux
des côtes tropicales dont l'espèce dominante est le
palétuvier (Marius, 1985). Le terme mangrove peut aussi bien
désigner la formation végétale d'un
écosystème littoral caractérisé par la production
et le stockage d'une biomasse aérienne lui donnant un aspect de
forêt. L'écosystème de mangrove a la particularité
de pouvoir se développer dans un milieu soumis à d'énormes
variations au cours du temps, rythmé par les marées et les crues
sur des sols sursaturés d'eau, manquant d'oxygène et
salés. La mangrove est aussi dépendante de plusieurs facteurs :
la sécheresse, la gestion des grands barrages et aménagements sur
le fleuve Sénégal et la dynamique urbaine (ADC, 2005).
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La biodiversité de la mangrove
La mangrove forme une mosaïque d'habitats terrestre et
aquatique interdépendants, qui abritent une multitude de
crustacés, de poissons, d'oiseaux et de mammifères. Tous tirent
profit de l'abondante matière organique piégée dans les
sédiments des vasières, ou issue de la transformation par des
bactéries et champignons, des débris végétaux des
palétuviers.
Le périophtalme (Periophthalmus
barbarus) côtoie de nombreux juvéniles de poissons qui
trouvent, dans la mangrove, un abri pour grandir à l'abri des
prédateurs, ainsi que toute la nourriture nécessaire à
leur croissance. Encore appelé quatre yeux, ce poisson peut voir
à la fois sous l'eau et dans l'air, car son oeil est divisé en
deux parties. Sa vision aérienne lui permet d'étendre son
alimentation aux insectes volants.
Le crabe violoniste (Uca tangeri),
qui doit son nom à l'hypertrophie d'une de ses pinces chez le
mâle, creuse ses terriers dans la vase des mangroves. En aérant
ainsi le sol, il devient ainsi un acteur essentiel de la survie des
palétuviers.
L'huître des palétuviers
(Crossostrea gigas) se fixe aux racines échasses et
est transformée et consommée au Sénégal.
Les oiseaux : les mangroves
côtières constituent des reposoirs pour les hérons,
aigrettes et ibis qui y font également leurs nids à l'abri de
toute activité humaine. A l'aide de leurs longs becs, ils fouillent la
vase à la recherche de crustacés, mollusques et petits poissons,
qu'ils partagent avec un nombre de voyageurs au long cheminement.
L'impact
Le dictionnaire de l'environnement et développement
(2016) définit l'impact environnemental comme étant toute
modification de l'environnement, négatif ou bénéfique,
résultant totalement ou partiellement des activités, produits ou
services d'un organisme.
La biodiversité
La diversité biologique ou biodiversité,
représente l'ensemble des espèces vivantes présentes sur
la Terre (plantes, animaux, micro-organismes, etc.), les communautés
formées par ces espèces et les habitats dans lesquels ils vivent.
La Convention sur la diversité biologique (CDB)
définie de façon formelle la biodiversité dans son Article
2 comme étant la "variabilité des organismes vivants de toute
origine, y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres,
marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes
écologiques dont ils font partie; cela comprend la diversité au
sein des espèces, et entre les espèces et ainsi que celle des
écosystèmes".
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Le Dictionnaire de l'Environnement (2011) clarifie davantage
cette notion en précisant que « la biodiversité est un terme
qui désigne la diversité du monde vivant à tous les
niveaux, diversité des milieux (écosystèmes),
diversité des espèces, diversité génétique
au sein d'une même espèce. Ce point de vue est partagé par
E.O. Wilson, père de la sociobiologie (1986), qui affirme lui aussi que
« la biodiversité est considérée à 5 niveaux :
celui des écosystèmes, des espèces, des populations, des
individus et des gènes. Mais sur le terrain, le deuxième niveau
est clairement le plus accessible et relève directement des
compétences naturalistes ». Cette dernière précision
donne un sens plus proche à notre propre entendement de la notion de
biodiversité, à travers ce présent travail de recherche.
En effet, dans le cadre de cette recherche, nous mettrons l'accent, chaque fois
qu'on évoque la biodiversité, sur les espèces et
accessoirement sur leurs habitats (écosystèmes).
La biodiversité marine et
côtière
La biodiversité marine et côtière est
l'ensemble de la diversité biologique propre aux océans, aux
côtes ou en dépendant très directement.
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