II. Cadre théorique
Cette partie rassemble un corpus de textes scientifiques sur
lequel sera basée l'analyse de notre problématique. Elle sera
articulée autour de deux thèmes fondamentaux: le recrutement et
la marque employeur. Ces deux concepts étant particulièrement
vastes, notre objectif n'est pas de les développer d'une manière
exhaustive mais d'aborder les points essentiels qui interviendront dans
l'analyse postérieure.
A. Le recrutement
Le recrutement est un des composants essentiels de la gestion
des ressources humaines. Thomas Vilcot le considère comme étant
«le poumon de la stratégie de l'entreprise, porteur
d'oxygène, de sang neuf, pour mieux permettre le mouvement» (2013,
p. 32).
C'est un concept très vaste qui concerne, d'une part,
des candidats que les entreprises détectent et attirent par des actions
de recrutement spécifiques et, d'autre part, des collaborateurs que les
entreprises souhaitent conserver et faire évoluer. Pour Pierre-Eric
Sutter (2007), il consiste à trouver un candidat qui possède des
compétences correspondant à un poste à pourvoir.
Le recrutement est une fonction partagée au sein d'une
entreprise, affirme Yannick Fondeur (2013). Même si ce sont
généralement des membres du département des ressources
humaines qui doivent assurer son application, Fondeur souligne le fait que
d'autres personnes sont susceptibles d'intervenir dans le processus. Buyens et
al. confirment cette assertion en énonçant que «tout comme
les autres activités RH, le recrutement et la sélection de
personnel ne sont pas l'affaire d'un seul acteur» (s.d., p. 23). C'est,
selon eux, une fonction effectuée par les professionnels du recrutement
et de la sélection en collaboration avec les managers
opérationnels, des consultants externes, des collaborateurs de
l'organisation, etc.
1. Processus de recrutement
La démarche de recrutement est une activité
structurée qui se décompose généralement en
plusieurs phases successives partant de l'expression du besoin jusqu'à
l'intégration du candidat retenu. En d'autres termes, elle correspond
à un cycle qui débute par l'ouverture d'un poste et prend fin
quand un candidat adéquat exerce sa fonction de manière
satisfaisante (Buyens et al.,s.d.). Charles-Henri
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Besseyre des Horts le décortique en une suite logique
d'étapes qui se résument selon cet ordre : «demande de
recrutement, définition du poste et du profil, choix des canaux de
recrutement, choix des sources du recrutement, campagne de recrutement,
sélection des candidatures, décision d'embauche et
intégration» (1990, p. 61).
a. Demande de recrutement
C'est une notification soumise au responsable du recrutement
pour pourvoir un ou plusieurs postes vacants dans l'entreprise. Elle
émane soit d'un responsable hiérarchique directement
concerné soit d'un responsable de la GRH sur base d'une gestion
prévisionnelle des ressources humaines (Charles-Henri Besseyre des
Horts, 1990). Elle est généralement entreprise pour faire face
à un départ en pension ou prépension, à une
démission, à un licenciement ou encore à la
création d'un nouveau poste.
b. Définition du poste et profil
Elle représente, d'une part, l'élaboration
d'une liste d'exigences requises (formation, aptitudes, expérience,
personnalité) pour tenir le poste et, d'autre part, la
détermination des caractéristiques du profil du candidat en
termes de savoir, savoir-faire et savoir-être. Le recrutement est
réussi s'il y a une adéquation entre les exigences du poste et
les caractéristiques du candidat (Charles-Henri Besseyre des Horts
,1990).
c. Sources du recrutement
Elles représentent le sourcing qui est, selon
Fabienne Autier «la phase amont de recherche et d'entrée en contact
avec les candidats» (2009, p. 8). Les auteurs s'accordent sur
différents modes de sourcing qui peuvent être
groupés en deux catégories selon Charles-Henri Besseyre des Horts
(1990) : les sources internes utilisées uniquement par les entreprises
et en lien avec leurs collaborateurs actuels et les sources externes
mobilisées aussi bien par les entreprises que par les futures
recrues.
Sources internes
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Sources externes
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Promotion
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Organismes officiels, professionnels et sociaux
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Affichage interne
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CV recueillis lors des meetings dans les écoles,
universités, associations
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Cooptation ou recommandation
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Candidatures spontanées
|
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Recours à un cabinet externe, annonces sur les sites
d'emploi
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|
Annonces dans les journaux et sur les médias sociaux
|
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Au niveau de l'affichage interne, il est important de fournir
un retour aux collaborateurs dont les candidatures n'ont pas été
retenues et ce, afin d'éviter les frustrations. Comme le souligne
Charles-Henri Besseyre des Horts, le recours aux sources internes doit
être accompagné de l'information la plus complète possible,
car «il peut parfois provoquer plus de déception que de motivation
réelle pour le personnel» (1990, p. 66).
Buyens et al. (s.d) nous éclairent sur la cooptation ou
recommandation, très en vogue dans les entreprises actuellement. Leurs
études montrent que les collaborateurs sont de plus en plus
impliqués dans le recrutement en proposant activement des candidats au
sein de leur propre réseau. La cooptation représente pour les
auteurs une approche proactive du recrutement, avec de nombreux avantages. Un
bonus ou une prime symbolique est souvent octroyé aux collaborateurs
afin de les inciter à recommander des candidats. Cependant, ils
mentionnent que c'est un canal qui ne favorise pas la diversité et qui
peut engendrer une certaine frustration si le candidat présenté
par un collaborateur n'a pas été retenu.
En ce qui concerne les sources externes, des études
récentes dans des pratiques de recrutement montrent que les demandeurs
d'emploi ainsi que les recruteurs professionnels dans le besoin de personnel se
tournent de plus en plus vers internet et ce, pour des raisons de coût,
de commodité et d'efficacité (Elfi Furtmueller et al., 2011).
Alain Gavand (2013) confirme cette prédominance d'internet en
énonçant que les méthodes de recherche ont
évolué ces dix dernières années conduisant vers un
recrutement Web 1.0, basé sur les jobboards & CVthèques, et
un recrutement Web 2.0, tourné vers les réseaux sociaux (voir
infra).
d. Campagne de recrutement
Charles-Henri Besseyre des Horts la décrit comme un
moyen pour l'entreprise de «susciter des candidatures pour le poste
à pourvoir» (1990, p. 67). L'auteur la décline en
différentes phases dont les plus indispensables sont:
? l'identification par l'entreprise des candidats idéaux
pour le poste,
? la détermination du temps nécessaire qui sera
consacré à la campagne,
? la sélection des canaux adaptés en fonction du
budget alloué au recrutement
? et la rédaction du texte de l'annonce qui doit
être «alléchante, sélective et surtout inspirer
confiance» (1990, p. 68).
e. Sélection des candidats
La sélection des candidats est une tâche
délicate ; elle doit être basée sur des critères
objectifs, justes et équitables afin d'éviter la discrimination
(Agnès Ceccarelli, 2012), qui est punissable par la loi.
Différents éléments permettent aux recruteurs d'effectuer
leur sélection parmi les candidats: C.V. et lettres de motivation,
entretiens, tests de sélection, recommandations,
références auprès d'anciens
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employeurs. Certains modes de sélection sont bien
sûr plus déterminants que d'autres selon le domaine
d'activité et la fonction (Garner et Lutinier, 2006).
Le CV intervient dans la phase de présélection
et est utilisé comme support lors de l'entretien (Fabienne Autier,
2009). Il fournit généralement des informations sur l'état
civil, la formation, l'expérience et les hobbies des candidats et
représente un sésame permettant aux candidats de décrocher
un entretien avec les recruteurs. Il est souvent accompagné de la lettre
de motivation qui n'est pas obligatoire mais qui constitue un outil
indispensable pouvant jouer en faveur des candidats si elle présente des
détails percutants.
L'entretien constitue une phase très importante dans la
sélection. Selon Emmanuelle Marchal, il a la primauté sur la
multitude de repères dont disposent les recruteurs pour juger les
candidats car «il permet de puiser des indices imprévus dans
l'histoire professionnelle ou personnelle des candidats» (1999, p. 43). Il
peut se compléter par une série de tests de sélection
permettant de donner un caractère objectif à la sélection.
Agnès Ceccarelli soutient cette idée en énonçant
que «la compétence est mesurable objectivement grâce aux
résultats des tests psychotechniques, permettant l'évaluation des
candidats avec le plus de rationalité possible» (2012, p. 7).
Les travaux de Fabienne Autier (2009) permettent de mettre en
évidence quatre méthodes, qui incluent quasiment tous les
paramètres de sélection:
? Méthodes informatives
Ces méthodes sont utilisées lors des entretiens
et consistent à interroger les candidats sur des questions qui les
amènent à décrire des situations professionnelles
concrètes qui démontrent qu'ils détiennent les
compétences requises pour la fonction. Les recruteurs utilisent le CV ou
d'autres documents comme base d'investigation et peuvent parfois demander
«les coordonnées des référents professionnels que
l'entreprise pourra contacter afin de vérifier la véracité
des informations fournies et recueillir un jugement sur les compétences
et la motivation réelles de la personne» (Fabienne Autier, 2009, p.
10). Thomas Vilcot (2013) nous éclaire sur une de ces méthodes :
la méthode SAR (Situation-Action-Résultats), qui consiste
à amener le candidat à décrire une situation à
laquelle il a été confronté, les stratégies qu'il a
mises en oeuvre et les résultats tangibles qu'il a pu obtenir.
? Méthodes de mesure par tests
Elles rassemblent les tests de personnalité et
d'aptitude. Les premiers renseignent sur les qualités et défauts
du candidat et «recueillent des informations sur des comportements que le
futur salarié serait supposé mettre en oeuvre dans une situation
donnée» (Fabienne Autier, 2009, p. 10). Pour Belanger et al.
(1988), les traits de personnalité à prendre en compte sont:
introversion/extraversion, contrôle interne /externe,
dominance/soumission, confiance en soi et sociabilité. Thomas Vilcot met
l'accent sur l'utilité et la fiabilité de ces tests qui viennent
«enrichir l'entretien, servir de base à un
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échange plus complet qui gagne tant en richesse qu'en
profondeur» (2013, p. 71). Les tests d'aptitude, quant à eux,
mesurent le potentiel intellectuel des candidats de manière
générale ou celui lié à un poste particulier. Ils
permettent de mettre en évidence la compétence verbale ou la
capacité à connaître le sens des mots et de manier le
vocabulaire, la fluidité verbale ou la capacité de
générer des mots ou des phrase, l'aisance numérique ou la
capacité à calculer rapidement et sans erreur, le raisonnement
par induction, la mémoire, la rapidité de perception et la
visualisation spatiale (Belanger et al., 1988).
? Méthodes prédictives
Fabienne Autier (2009) les présente comme étant
plus couteuses et ayant un caractère non scientifique. Elles fournissent
des informations sur la personnalité du candidat et ce, en se basant sur
l'écriture (graphologie), la date de naissance (numérologie et
astrologie) ou encore les traits du visage (morphopsychologie).
? Méthodes de mise en situation
Elles permettent d'étudier les comportements effectifs
des candidats via des situations de jeux de rôle et de simulation qui se
rapprochent de la réalité de leur futur poste. Pour Fabienne
Autier (2009), certaines personnes qui apparaissent comme des moutons à
cinq pattes grâce à leur CV fabuleux peuvent se montrer
décevants sur le terrain. Ces méthodes de mise en situation sont
donc plus équitables et limiteraient, selon elle, les biais dans la
sélection des candidats. En effet, «elles donnent une bonne
indication de ce que le futur salarié fera effectivement en situation de
travail» (Fabienne Autier, 2009, p. 16).
En dehors de toutes ces méthodes, nous soulignons que
certaines entreprises tiennent également compte des compétences
orthographiques des candidats dans la sélection. Elles sont
définies par Christelle Martin Lacroix comme «la capacité
à orthographier sans faute et à utiliser correctement la
grammaire et la ponctuation» (2014, p. 3). Les travaux de l'auteure
révèlent que les fautes d'orthographes commises par un candidat
entrainent une perception négative des capacités intellectuelles
et de certains traits de caractère de celui-ci et affectent donc la
décision de rejeter ou non sa candidature.
Par ailleurs, les recruteurs soulèvent l'importance que
les candidats partagent les mêmes valeurs que leur employeur. Nous tenons
à préciser néanmoins que «les jugements basés
sur des valeurs ont une dimension arbitraire car ils se fondent sur des
caractéristiques subjectives et ne sont donc pas appropriés pour
évaluer des candidats selon un jugement légitime»
(Thévenot, 1992, cité par Agnès Ceccarelli, 2012, p.
8).
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Choix du candidat et décision
d'embauche
Selon Pierre-Eric Sutter le recrutement est pour l'entreprise
«une situation de gestion qui consiste à évaluer un ou
plusieurs individus pour un emploi au sein de l'organisation» (2007, p.
17). Ainsi, cette tâche d'évaluation pourrait mobiliser plusieurs
personnes (professionnel RH, manager direct, cabinet externe, etc.) devant
participer à l'identification des candidats se rapprochant le plus du
poste à pourvoir. Quant au choix final du candidat adéquat,
«dans la plupart des cas, c'est le line manager qui a la
décision finale. Au bout du compte, le nouveau collaborateur travaillera
dans son équipe et c'est donc à lui qu'il appartient de
décider avec qui il veut travailler ou pas» (Buyens et al., s.d, p.
25).
g. Intégration
La phase d'intégration clôture le processus de
recrutement et se révèle cruciale car elle constitue un enjeu
pour les entreprises. En effet, une nouvelle recrue qui ne se sent pas
accueillie et bien intégrée pourrait manifester l'envie de
quitter l'entreprise. Cette situation engendrerait des coûts liés
à un échec de recrutement et ternirait l'image de l'entreprise.
C'est donc tout bénéfique pour les entreprises de mettre en place
des outils adéquats afin de suivre le candidat embauché. Pour
Pierre-Eric Sutter (2007), l'intégration est une occasion pour la
nouvelle recrue de trouver sa place au sein de l'organisation et pour
l'entreprise, un moyen d'apprécier les talents du recruteur. Les travaux
de Buyens et al. révèlent les bénéfices d'une bonne
intégration ou socialisation pour les entreprises. Pour les auteurs, une
intégration optimale des candidats permet aux entreprises de
«compter à terme sur une satisfaction plus grande de leurs
collaborateurs, sur une rotation moindre au sein de leur personnel et sur une
meilleure productivité» (s.d., p. 7).
Quant au processus d'intégration, Fabienne Autier
évoque, par exemple «la désignation d'un parrain,
l'organisation de sessions d'information et de rencontre avec les cadres
dirigeants, des réunions régulières avec le
supérieur hiérarchique direct» (2009, p. 17).
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