III. Les actions entreprises face aux
difficultés
Les différentes compagnies d'assurances
déploient des efforts et multiplient diverses stratégies afin de
réduire les difficultés de recrutement auxquelles elles sont
confrontées.
Jeunes
diplômés-stagiaires
Pour les emplois de remplacement, Ethias privilégie la
candidature des juniors, en particulier ceux qui ont un diplôme de
baccalauréat en droit ou en assurances afin de leur permettre
d'acquérir une première expérience et de constituer une
cellule mobile au sein de l'entreprise. Ces jeunes sont souvent envoyés
dans différents départements pour renfort et constituent pour les
recruteurs un vivier fondamental dans lequel ils peuvent facilement trouver des
candidats adéquats en cas de difficulté. Cette stratégie
est également déployée chez AG Insurance qui mise, elle,
sur de jeunes diplômés en informatique.
«En IT, on est une des seules sociétés qui
n'a pas de difficultés. Pourquoi? Parce qu'on a changé notre
politique il y a quelques années en misant très fortement sur les
jeunes diplômés, en n'embauchant que les jeunes
diplômés et en disant "ok, on va faire l'investissement, on va les
former, on va les faire évoluer", plutôt que d'ouvrir un poste en
It et parfois d'attendre un an avant d'avoir quelqu'un qui se démarque.
Ça a été un changement de mentalité au sein du
département IT, ça change complètement la manière
de travailler et donc maintenant ça fait quatre ou cinq ans qu'on
embauche entre quinze et vingt diplômés par an».
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
Les quatre compagnies d'assurances accueillent chaque
année des étudiants pour des stages académiques. Chez AG
Insurance et Ethias, ce sont des étudiants toutes filières
confondues. Belfius en accueille en finance et en actuariat. Quant à
Axa, un programme de stagiaires actuaires a été mis en place.
Pour les recruteurs, l'accueil de stagiaires constitue un moyen efficace de
créer une réserve de candidatures.
Présence sur les campus-job
days
Toutes les compagnies d'assurances soutiennent que la
participation aux jobs days leur permet d'être visible et d'avoir un
contact privilégié avec des étudiants
considérés comme collaborateurs potentiels. A l'exception de
Belfius, qui y est moins présente, faute de temps et de personnes, les
autres y participent activement. Axa invite néanmoins à bien les
choisir, car même s'ils ne sont pas toujours payants, c'est toute une
journée ou une demi-journée de travail qui leur est
consacrée. En plus de ces jobs days, le business d'AG Insurance donne
des cours d'assurances techniques aux bacheliers en finance et assurance dans
quelques hautes écoles en Belgique.
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«Il faut être présent dans les écoles
; plus nous sommes présents, plus les gens gardent notre image. Il faut
faire connaitre et positionner la marque. Avant, c'était le poste qu'on
mettait en avant, aujourd'hui, c'est la société. Il faut montrer
que c'est une société stable, qu'il y a des
opportunités».
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
Médias sociaux-site
internet-visibilité
Les différents médias sociaux mobilisés
par les recruteurs sont notamment LinkedIn et Facebook. A l'exception de
Belfius, au moins un de ces médias intervient dans le processus de
recrutement des autres compagnies d'assurances.
«A partir du mois d'octobre, on va commencer à
travailler avec les réseaux sociaux; le service de la communication va
nous aider pour reprendre une plus grande visibilité. On n'est que deux
personnes pour les recrutements et donc, c'est un peu juste ; on ne peut pas
s'occuper de la communication, on a besoin d'un support à ce
niveau-là».
Extrait d'entretien, recruteur chez Belfius.
Ethias utilise spécialement LinkedIn pour débaucher
les candidats, car selon les recruteurs, il faut aller chercher les profils
rares qui ne vont pas postuler d'eux-mêmes.
«On essaie d'aller sur LinkedIn, parce qu'on sait qu'ils ne
vont pas postuler spontanément, ils sont déjà rares, donc
ils ne vont être super ouverts aux marchés».
Extrait d'entretien, recruteur chez Ethias.
AG Insurance et Axa utilisent également LinkedIn pour
publier les offres d'emploi et pour rechercher des candidats. Ils encouragent
tous les deux leurs collaborateurs à partager les différentes
offres sur les médias sociaux pour qu'elles puissent atteindre un large
panel de candidats potentiels.
«On demande aux travailleurs de republier les annonces et
ça arrive petit à petit, on organise des réunions pour
montrer aux travailleurs comment utiliser ces réseaux. On leur demande
de faire un share, un like. Les jeunes connaissent mais les
plus de quarante ans, il faut leur dire qu'il faut aller».
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
Le recruteur de AG Insurance a soulevé que les
réseaux sociaux permettent non seulement de publier des postes vacants
mais aussi de faire de la publicité afin de rendre l'entreprise visible
et attrayante. Chez eux, les collaborateurs représentent des
ambassadeurs à qui il faut donner la parole; la société
les sensibilise et les incite à parler de l'entreprise, à publier
des events..., et ce à travers des réunions et des vidéos
sur YouTube.
Le site carrière des entreprises joue un rôle
fondamental dans le recrutement. Les recruteurs soutiennent qu'il
représente le c anal privilégié de publication des offres
d'emploi. AG Insurance a
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évoqué qu'il représente également le
canal de communication de l'identité visuelle de l'entreprise. Toutes
les compagnies d'assurances en possèdent un.
Incitants financiers
Au niveau de la rémunération, il y a une grille
salariale prévue par la convention collective du travail du secteur.
Cependant, chaque compagnie essaie de se démarquer en offrant un peu
plus aux candidats.
«Au niveau de la rémunération, il y a un
barème du secteur mais le barème d'AG est supérieur.
Pourquoi ? C'est un choix. Pour toutes les sociétés d'assurances,
je pense que le barème c'est le minimum».
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
Ethias n'offre pas de voiture de société, par
exemple, mais elle essaie de compenser par des primes mensuelles. Les
responsables sont également en train de réfléchir afin de
mettre sur pied un «plan cafétéria». Axa envisage la
même chose à partir du 1er octobre prochain.
«Package, voiture, ce sont des choses pour lesquelles on
cherche des solutions. Parfois, on compense la voiture par du package, on
essaie de trouver des solutions originales, comme par exemples des primes
mensuelles qu'on ajoute au package, des trucs réactifs. De façon
proactive, on travaille avec la société Hudson, qui offre des
tests informatiques mais qui travaille au niveau de la stratégie
compensation and benefit, qui essaie de revoir notre système de
rémunération, de manière plus flexible avec des
incentives, des sortes de «plans cafétéria», des
choses à la carte».
Extrait d'entretien, recruteur chez Ethias.
Selon Axa et Belfius, il n'y a pas une énorme
différence au niveau de la rémunération car chaque
entreprise essaie de s'aligner aux autres.
«Au niveau du package salarial, c'est fort
général, parallèle avec les autres assurances
(13ème mois, chèques repas, transports en commun qui sont
remboursés...). Souvent, on est dans la même marge que les autres
acteurs sur le marché, il n'y a pas une énorme différence
au niveau du package».
Extrait d'entretien, recruteur chez Belfius.
Rôle des recruteurs
AG Insurance et Ethias ont soulevé les exigences des
managers comme un des moteurs des difficultés de recrutement. Ethias a
évoqué également l'imprécision de ceux-ci
dès le départ concernant le profil recherché. Les deux
entreprises mettent en place des mesures destinées à
répondre à ces deux problèmes. Ces mesures consistent
notamment à discuter avec les managers et à les amener à
revoir leurs exigences quant aux compétences des candidats.
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«Les business partners essaient de travailler avec des
managers pour qu'ils essaient de bien formuler leurs besoins. Nous avons aussi
une fiche de profil au niveau du recrutement que les managers remplissent pour
must have, c'est-à-dire qu'ils mentionnent les
compétences que les candidats doivent avoir. Nous travaillons à
ce que ces compétences soient réduites, tout le monde ne peut pas
tout avoir».
Extrait d'entretien, recruteur chez Ethias.
«Quand on reçoit l'appel du manager qui nous dit
qu'il veut ouvrir un nouveau poste, on prend toujours le temps d'aller chez lui
pour en discuter, pour lui demander ce qu'il recherche. En tant que recruteur,
on voit ce qui se passe à l'extérieur, sur le marché de
l'emploi. Le rôle du recruteur, c'est d'être transparent et de dire
que le mouton à cinq pattes est rare ; c'est de dire que ce qu'on
recherche n'est pas réaliste, qu'il y a des barèmes salariaux et
qu'il faut se plier à ce que l'on trouve sur le marché.
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
Le recruteur d'AG Insurance a également affirmé
conscientiser les managers sur la nécessité de miser sur les
talents en interne, en investissant en formation et coaching au lieu de laisser
un poste ouvert pendant un an ou deux. Une anticipation peut être aussi
une solution idéale à proposer aux managers, selon AG
Insurance.
«On a un poste ouvert pour le moment, qui est en fait une
anticipation d'une pension. La personne va partir en pension l'année
prochaine, on est déjà un an en avance. Le management a dit :
"ok, on va commencer petit à petit à chercher et si on peut avoir
quelqu'un pour la fin d'année on le prend. On a encore six mois
l'année prochaine; qu'il y ait un doublon et comme ça la personne
pourra être formée". Voilà, c'est un exemple de poste
difficile où on prend le temps et pour lequel le management est assez
strict sur les compétences recherchées».
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
Actions spécifiques
Diverses autres actions sont déployées par les
compagnies d'assurances afin d'attirer les talents. La première
s'inscrit dans une vision de flexibilité et d'autonomie des
travailleurs. Ainsi, chez Ethias et Axa il y a le projet de New World Of
Work (NWOW), qui est un projet en cours. AG Insurance et Belfius offrent
déjà aux employés la possibilité de faire du
télétravail un à deux jours/semaine.
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«Nous sommes en plein dans le NWOW ; toute personne a le
droit de travailler un ou deux jours à la maison, Axa a prévu
tout ce qu'il faut pour travailler à la maison (ordinateur, casque
spécial, etc.). La moitié des travailleurs en marketing et toutes
les personnes d'assurances-vie sont déjà depuis six mois dans ce
système-là. Les ressources humaines commencent le 04/05. Axa
compte déménager car dans le NWOW il n'y a pas que le
télétravail mais il y a également le Flex Desk,
c'est-à-dire que tout le monde se met ou il veut en arrivant au
boulot».
Extrait d'entretien, recruteur chez Axa.
«Le petit quelque chose qu'on offre c'est qu'on est
très ouvert au travail à domicile ; deux jours par semaines les
gens peuvent travailler chez eux, ça donne quand même une certaine
flexibilité sur le marché puis qu'il n'y a pas encore
énormément d'entreprises qui le font»
Extrait d'entretien, recruteur chez Belfius.
La deuxième action entreprise par Axa et Ethias permet
de nouer des liens avec les personnes possédant les profils difficiles
à recruter. Ainsi, Axa a donné ses bâtiments l'année
dernière pour une journée sur les data science
organisée par le président de la communauté belge de
data sciences. C'est une communauté très importante, un des
profils difficiles à trouver pour Axa. Selon le recruteur, cette
journée a permis de créer des contacts privilégiés
avec cette communauté et de renforcer les liens et la
crédibilité d'Axa auprès de cette communauté.
Ethias, elle, organise souvent des journées qui réunissent les
professionnels en actuariat et les étudiants en mathématiques.
«Pour les profils rares, on a organisé des
journées en entreprise ici, chez nous. Les gens viennent discuter de
leur métier pour essayer de créer des envies de parcours chez les
jeunes mathématiciens. Ces journées donnent l'envie aux gens de
faire l'actuariat et après, ils nous reviennent parce qu'ils ont Ethias
en tête en premier lieu».
Extrait d'entretien, recruteur chez Ethias.
La dernière stratégie qu'adoptent les compagnies
d'assurances consiste à recourir aux cabinets externes et aux chasseurs
de têtes en cas de difficulté. Elles avouent que c'est leur
dernier recours, qu'elles se tournent vers eux quand toutes leurs recherches
demeurent infructueuses.
«Parfois, on a tout essayé et il n'y a pas
beaucoup de candidatures qui sont rentrées. Parfois, le niveau est assez
élevé ou on sait très bien que le profil va se retrouver
auprès de la concurrence, donc c'est plus facile pour un bureau externe.
Mais c'est plutôt la dernière solution, on a tout essayé et
rien trouvé».
Extrait d'entretien, recruteur chez AG Insurance.
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