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0 | P age
UFR Sciences de l'Homme et de la
Société
Département des Sciences de
l'éducation
Master 1 Sciences de l'éducation -
F.O.A.D.
PLACE DE LA PÉDAGOGIE DANS LA RÉFORME
DES
ÉCOLES D'INFIRMIÈRES EN HAÏTI.
Préparé par Vernet Etienne
No
d'étudiant : 21413829
Sous la supervision de Haberey Veronique
Année académique 2014-2015
1 | P age
SOMMAIRE
Sommaire 1- 2
Sigle 2
Résumé français et anglais
3
1. Introduction 4
1.1 Problématique 5- 8
1.1.2 Questions générales et spécifiques
8
1.1.3 Objectifs 9
1.1.4 General 9
1.1.5 Spécifiques 9
1.2 Eléments théoriques et conceptuels
9
1.2.1 Approche traditionnelle 10
1.2.2 L'approche par objectifs 11
1.2.3 Le behaviorisme 12
1.2.4 Le cognitivisme 12
1.2.5 Le socio-constructivisme 13- 14
1.2.6 Apprentissage par problème (APP) 14
1.2.7 Apprentissage efficace 14- 15
1.2.8 Conclusion partielle 16
2. Approche méthodologique 16
2.1 Technique de recherche 16- 17
2.2 Critère d'inclusion et exclusion 17
2.3 Outil de collecte des données 17- 18
2.4 Éthique et confidentialité 18
2.5 Procédure de collecte des données 18
2.6 Présentation du terrain d'étude 18
3. Présentation des résultats
|
19
|
3.1-
|
Caractéristiques socio-professionnelles des sujets
|
19
|
3.2-
|
Expériences et perception de l'enseignement
|
19 - 20
|
3.3-
|
Approche et démarche pédagogique
|
20
|
3.4-
|
La préparation et plan de cours
|
20- 21
|
3.5-
|
Déroulement des cours
|
21
|
3.6-
|
Méthodes et techniques
|
21
|
3.7-
|
L'andragogie
|
21- 22
|
3.8-
|
Valeurs éducatives
|
22
|
3.9-
|
Le feedback et le respect
|
22
|
3.10-
|
Evaluation
|
22- 23
|
3.11-
|
Les problèmes
|
23
|
4. Discussion
|
24
|
4.1.Par rapport aux participants
|
24
|
4.2.Expérience dans l'enseignement
|
24
|
4.3.Les approches d'enseignement
|
24-25
|
4.4.Evaluation
|
25- 26
|
4.5.Apport de l'étude
|
26
|
4.6.Limite de l'étude
|
26- 27
|
- Conclusion
|
27- 28
|
|
- Bibliographie
|
29- 31
|
- Annexe
|
31- 33
|
Liste des sigles
MSPP Ministère de la santé
Publique et de la Population
ENIP Ecole Nationale d'Infirmières de
Port-au-Prince
RUEH Rectorat de l'Université d'Etat
d'Haiti
APP Apprentissage par problème
2 | P age
3 | P a g e
Résumé
La compétence des nouveaux étudiants
gradués en sciences infirmières en Haïti est remise en
question. Face à ce problème, le ministère de la
santé pense à la régularisation et la standardisation du
système. Cependant, pour nous, le problème se pose aussi au
niveau de la pédagogie des médecins qui enseignent dans les
écoles d'infirmières. Ainsi, avons-nous analysé cette
situation pédagogique en réalisant un entretien semi-directif
avec 10 médecins enseignants.
Les médecins enseignants utilisent la méthode
traditionnelle centrée sur eux-mêmes, sur le contenu et non sur
les étudiants. C'est l'exposé magistral qui domine l'enseignement
ne tenant compte d'aucune méthode d'apprentissage actif ou de
résolution de problème. Les médecins, sans
expérience en pédagogie, commencent à enseigner
généralement en 3è année de médecine par le
biais de leurs amis.
En conclusion, le manque de contrôle étatique de
l'exercice du métier de l'enseignant en Haïti est à prendre
en compte dans la problématique de formation en science de la
santé.
Abstract
The new graduated nurses' students in Haiti do not satisfy the
expectation of decision-makers, patients and colleagues. Addressing this issue,
the Ministry of Health attempts to modify the curriculum, acts for a better
regulation and standardization program. Therefore, this problem can be also
found at the level of the pedagogical competence of medical teachers in
nursing. This paper aims to describe the pedagogical situation of Haitian
medical teachers through a qualitative cross-sectional study based on a
semi-structured interview with 10 medical teachers.
The results show that medical teachers use traditional
methodologies and teacher-centered approach without any active methods based on
problem-posing, problem-solving and reflexive learning. Those teachers do not
have experiences with pedagogical training while teaching at nursing school
since third grade of medical school thanks to friends.
Concluding that the lack of state control upon the teaching in
Haiti is a major problem thinking about nursing school education and
training.
Keywords: medical teachers, pedagogical competence.
4 | P age
1. Introduction
Au niveau des sciences de la santé, que ce soit pour
éduquer des patients ou former des infirmières, le défi du
savoir-enseigner se fait fortement sentir et la compétence en
pédagogie devient alors préoccupante. L'efficacité
même du traitement d'un patient repose sur la qualité de la
formation reçue et la compétence des praticiens. Sauf que dans le
passé, les enseignants ne s'entendaient pas toujours sur comment
développer une pédagogie adaptée à l'enseignement
médical (Masquelet, 1997; Sournia, 1992)1. Mais, de nos
jours, l'éducation médicale, devenue une discipline
universitaire, s'intéresse à la complexité et à la
multidisciplinarité de la formation en soins infirmiers se basant sur
une pédagogie active et la résolution de problèmes (ibid
1).
En Haïti, cependant, la problématique de la
qualité de la formation des étudiants en sciences
infirmières ne se pose pas de cette manière. La dimension
pédagogique reçoit très peu d'attention par rapport aux
problèmes auxquels sont confrontés les nouveaux
diplômés sur le terrain. Haïti fait partie aujourd'hui des
pays qui font face à une des plus importantes pénuries et une des
plus mauvaises distributions des infirmières. En 2011, le
Ministère de la santé publique et de la population (MSPP)
rapporte que l'on compte 2 341 infirmières soit 23. 23 pour 100 000
habitants et 2 337 auxiliaires infirmières soit 23.17/100 000 hab. Parmi
les infirmières, plus de la moitié résident dans le
département de l'ouest2.
C'est ainsi que cette étude qualitative de type
transversal, menée au Plateau Central auprès des médecins
enseignants des différentes écoles de sciences
infirmières, vise à décrire les expériences avec la
pédagogie et les stratégies d'enseignement des
médecins.
La première partie de cette étude dresse la
problématique sur la formation des étudiants en soins infirmiers
en Haïti à partir d'une question de recherche et l'état des
connaissances actuelles sur le sujet. La deuxième partie explique la
démarche méthodologique choisie alors que la troisième
partie présente les résultats issus d'entretiens
non-structurés. Et enfin la quatrième partie interprète
les données selon la revue de littérature, présente la
conclusion et quelques perspectives de recherche.
1 In M.G. Albano et J.F. d'Ivernois, Quand
les médecins se font pédagogues, Les Cahiers pédagogiques,
N°399 - dossier «La médecine à l'école»,
http://www.cahiers-pedagogiques.com/Quand-les-medecins-se-font-pedagogues
2
www.lesruesdecassis.fr/thereserastit.htm,
consulté le 20 Mai 2013 et
www.infirmiers.com,
consulté le 20 Mai 2013/ www. mspp
5 | P a g e
1.1- Problématique
Beaucoup de médecins deviennent enseignants dans les
écoles d'infirmières parce qu'ils maitrisent une matière
quelconque dans les sciences médicales. Alors que leur formation
initiale ne prévoit pas d'exposition ni expériences dans les
approches, valeurs et méthodes prises en compte dans le processus
d'enseignement-apprentissage.
Dans de telle circonstance, Hodges qualifie l'enseignement de
traditionnel3, un apprentissage passif, c'est à dire une
pédagogie de l'éponge dans laquelle l'étudiant ne fait
qu'emmagasiner des connaissances sous forme théorique et/ou pratique.
Dans ce modèle, l'enseignement et l'apprentissage ne forment pas un
processus interactif et indissoluble (enseignement-apprentissage) mais se
manifestent comme deux phénomènes indépendants.
Mais, dans une vision contemporaine de la pédagogie
c'est-à-dire, non dans le sens commun ou étymologique où
elle désigne tantôt l'art d'enseigner ou d'amener l'enfant vers la
connaissance 4(Avanzini 1997), mais plutôt dans une
perspective scientifique décrivant les rapports entre les faits et les
relations de cause à effets dans l'éducation (Buisson 1887), les
médecins enseignants doivent aller au-delà de la transmission des
connaissances pour guider et orienter l'apprentissage. Pour ce faire, la
compétence médicale seule ne suffit pas car, un clinicien a
besoin de la pédagogie comme discipline distincte pour faciliter
l'apprentissage des étudiants (Audétat 2014). Cette double
compétence clinique et pédagogique adaptée à
l'enseignement met les étudiants au centre de l'apprentissage où
la branche pédagogique sert à définir comment planifier,
organiser, implémenter et évaluer l'enseignement-apprentissage
(Chamberland et Hivon, 2005 :11).
De nos jours, en Amérique du Nord et en Europe surtout,
les transformations au niveau de la société réagissent sur
la pratique médicale et portent les facultés des sciences
infirmières à réadapter leurs programmes de formation au
profit d'une plus grande responsabilité sociale et de la performance de
leurs diplômés. Cette importante refonte du curriculum,
annonçant de nouvelles
3 Hodges l'appelle modèle de Tea-Steeping,
traduit par Audétat (2014) par modèle du sachet de thé
parce que l'étudiant apprend par osmose.
4 In Laurent Lescouarch - Karine
Bécu-Robinault (2014). Apprentissage et didactique, [cours de Licence de
sciences de l'éducation, format pdf] disponible sur
www.cned.fr, université
de Rouen, France.
6 | P a g e
façons d'enseigner, les amène à
redéfinir le parcours de la formation des infirmières qui
consistait pendant longtemps à exposer les étudiants de
très tôt à la pratique clinique individualisée
basée sur l'apprentissage par la supervision clinique (Audétat
2014). Les exigences sur les compétences des jeunes
diplômés dépassent maintenant l'application technique des
connaissances biomédicales et incluent largement la communication et le
savoir-être à travers l'enseignement de l'éthique, et du
sens de la responsabilité professionnelle (Ibid). Ce qui exige donc
d'avoir un regard particulier non plus seulement aux contenus mais aussi
à la manière dont se fait l'enseignement au cours de la formation
clinique.
Chamberland et Hivon (2005) vont jusqu'à
considérer qu'actuellement, d'un point de vue global, les
activités de soins au cours desquelles les étudiants sont soumis
à l'apprentissage, se relèvent d'un type d'enseignement clinique
que l'on peut qualifier d'informel puisque généralement, il n'y a
pas de préparation et de planification de l'enseignement-apprentissage,
de ce qu'il faudrait clairement savoir en raison des conditions et des
intentions préétablies de transmission de savoir. Ne basant que
sur l'exposition clinique des étudiants en situation de simulation, les
médecins enseignants utilisent leur savoir pratique pour orienter
l'apprentissage en sciences infirmières.
Par ailleurs, si l'enseignement clinique, du point de vue du
savoir, du savoir-faire et du savoir-être, du sens éthique, de
responsabilité et de professionnalisme médical, semble
désormais réunir plus d'un sur une même table, bien au
contraire, la compétence pédagogique des médecins
enseignants qui s'adonnent à cette tâche ne semble nullement pas
une priorité. La tendance chez les enseignants et les facultés se
porte à négliger son importance au profit de la pratique par
laquelle certains prétendent que l'enseignement clinique peut se faire
spontanément sans besoin de préparation (Christine 2000 :3).
En Haïti, à côté du système
éducatif haïtien qui souffre d'une carence d'enseignants
qualifiés dans le domaine de l'éducation, les écoles en
sciences infirmières constituent une catégorie qui est
très touchée par l'ensemble de ces problèmes. La
compétence des nouveaux étudiants est sans cesse remise en
question de nos jours. Centrée sur la technique médicale, la
formation en connait un déficit qui est le plus souvent adressé
comme un problème au niveau du curriculum de formation (Zanmi Lasante,
FMP 2014), de la règlementation et de la standardisation de
l'enseignement, mais non du côté de la compétence
pédagogique des médecins enseignants.
7 | P a g e
Cette remise en question de la compétence des nouveaux
professionnels en sciences infirmières est souvent expliquée par
des facteurs externes et des facteurs internes. Comme facteurs externes,
nombreux sont ceux qui se plaignent du faible niveau de l'école
secondaire en Haïti qui produit des élèves avec des lacunes
ne pouvant pas se plier aux exigences de la formation supérieure et que
cela influe sur la performance académique des écoles
d'infirmières. La démotivation des étudiants, au cours de
la formation, est aussi un paramètre qui pourrait avoir un impact sur la
qualité de l'enseignement-apprentissage dans l'éducation
médicale. Car, un manque d'opportunités liées à
l'insécurité de l'emploie en Haïti, peut influencer
négativement la motivation des étudiants.
Concernant le Ministère de la santé publique et
de la population (MSPP)5, le problème se pose au niveau de la
régularisation des écoles. Lors d'une enquête menée
par le MSPP dans la zone métropolitaine, sur 54 écoles
répertoriées qui dispensent une formation en sciences
infirmières, 38 soit environ 70% de ces centres ne sont pas reconnues
par le MSPP.6
Ce problème de régulation peut avoir pour
corollaire la difficulté de standardisation de ce secteur de formation.
Vu qu'il n'est pas très bien règlementé, on ne peut se
porter garant de la qualité de la formation délivrée par
ces institutions. Cependant, dans les écoles d'infirmières qui
sont sous la tutelle de l'état, le MSPP pose le problème de la
qualité de la formation par l'adaptation d'une refonte du curriculum qui
donnera le statut d'université à l'Ecole Nationale
d'Infirmières de Port-au-Prince (ENIP) et l'intégration de
nouveaux cours portant sur la recherche, la sociologie-anthropologie, la
psychologie en instituant une 4è année d'étude alors que
c'était avant 3 années. (FMP et Zanmi Lasante, 2014).
D'un point de vue interne, l'organisation de l'admission de
ces écoles peut être aussi mise en cause selon les critères
qui ont été prédéfinis pour recevoir des
étudiants aptes à suivre un cursus en formation
supérieure. Toutefois, dans une perspective de gestion et de
planification scolaire, quand leurs directions ne mettent pas en place une
bonne infrastructure scolaire dotée d'équipement,
5 Claude Bernard Sérant, Le Nouvelliste | Publié le
: 09 janvier 2014
6 Gladimy Ibraime, Le Nouvelliste | Publié
le : 23 avril 2013. Le MSPP est un organisme étatique chargé de
règlementer le fonctionnement des institutions de formation en sciences
de la santé
8 | P a g e
logistique et confort, bibliothèque et laboratoire, et
quand un manque de supervision académique et de discipline règne,
cela aura des conséquences sur la qualité de l'enseignement et de
la compétence des futurs diplômés.
Le rectorat de l'Université d'État d'Haïti
(RUEH), quant à lui, pose un peu implicitement le problème du
côté du médecin enseignant. Cette institution ne permet pas
à un docteur en médecine, ainsi titré en Haïti en
premier cycle académique, qui est à peine diplômé,
d'enseigner. Il lui est demandé d'avoir une formation
complémentaire dans une spécialité et de s'engager
à temps plein dans l'enseignement et la recherche à partir d'une
politique que le RUEH se donne comme tache de mettre en place. Là
encore, la composante de la compétence en pédagogie, la
manière de planifier, animer et évaluer les cours ne parait pas
une préoccupation si au cours de la spécialité
médicale, il n'est pas prévu de préparer le médecin
à devenir clinicien enseignant.
Ainsi, de notre côté, pensons-nous que le
problème de la compétence des nouveaux diplômés en
sciences infirmières se pose aussi à partir de la qualité
de l'enseignement reçu, de la relation qu'ils entretenaient avec les
médecins enseignants et le rapport qu'ils développaient au
savoir. Un manque de compétence en pédagogie est susceptible de
diminuer considérablement la compréhension des étudiants
et les empêchent d'acquérir amplement le savoir professionnel pour
réussir leur vie et servir leur communauté. Voilà ce qui
nous pousse à explorer l'état de la pédagogie de
l'enseignement médical dans la ville de Hinche à partir des
questions suivantes :
1.1.1- Question générale
1- Quelle est la situation de la pédagogie de
l'enseignement médical au niveau des écoles de sciences
infirmières à Hinche? Comment les médecins enseignent-ils
?
1.1.2- Questions spécifiques
2- Quelle importance les médecins enseignants
accordent-ils à la préparation, l'animation et
l'évaluation des cours?
3- Quelles sont les stratégies qu'ils utilisent face
aux difficultés d'apprentissage des étudiants? Quelles sont les
valeurs, approches, méthodes et théories
préconisées?
4-
9 | P a g e
Quelle importance accorde-t-on à la prise en compte de
la didactique de l'enseignement-apprentissage dans la formation de doctorat et
de spécialité des médecins haïtiens?
1.1.3- Objectifs général
Comprendre le rôle et l'importance de la
compétence en pédagogie dans la formation en science de la
santé en Haïti.
1.1.4- Spécifiques
1- Décrire les stratégies d'enseignement des
médecins à travers la préparation, l'animation et
l'évaluation des cours dispensés.
2- Déterminer les compétences acquises des
médecins enseignants au cours de leurs parcours médicale.
3- Analyser la situation pédagogique au niveau des
écoles d'infirmières par rapport à l'apprentissage.
Pour cerner ce problème à Hinche, nous allons
voir ce qui a été déjà dit en termes de
théories et concepts sur l'apprentissage.
1.2 Eléments théoriques et
conceptuels
Les théories de l'apprentissage qui décrivent la
démarche pédagogique à suivre dans un cours sont
nombreuses et s'adaptent à diverses situations éducatives.
Partant de l'approche traditionnelle transmissive, à l'approche
basée sur les objectifs, aux behavioristes jusqu'à
l'apprentissage social dont le cognitivisme et le socioconstructivisme, nous
pouvons en déduire qu'elles aident à appréhender le
réel éducatif sous des angles différentes. En ce qui
concerne l'éducation médicale, celles qui décrivent la
planification, les stratégies et les valeurs, dont les principes de
10 | P a g e
l'apprentissage des adultes, et l'évaluation, - seront
développées brièvement mais suffisamment pour
présenter un cadre théorique sur la pratique pédagogique
des médecins enseignants.
1.2.1- Approche traditionnelle
Langevin et Bruneau (2000) relate qu'en général
l'enseignement linéaire est un modèle d'empreinte axé sur
l'accumulation et la transmission de savoirs. Ce modèle priorise
l'évaluation quantitative des apprenants en fin d'enseignement et
l'exposé magistral avec emphase sur le contenu. Il est fondé sur
la culture intellectuelle, les disciplines et les soins hospitaliers à
partir d'ensemble de gestes techniques où le médecin enseignant,
transmettant son propre savoir avec une démarche centrée sur la
connaissance, est un modèle infaillible de savoir à suivre et
à reproduire par l'étudiant passif (Bertrand 1998).
Cette approche qui se base sur la mémorisation, a
été remise en question au profit d'un rôle d'accompagnement
du médecin enseignant (Audétat, 2014). L'approche par objectif
est devenue alors prioritaire au niveau de l'enseignement supérieur qui
est centré sur l'étudiant actif et responsable de sa
formation.
1.2.2 L'approche par objectifs
L'approche par objectif, basée sur le behaviorisme,
devient prédominante après la 2è guerre mondiale initiant
ainsi un enseignement médical centré sur les étudiants
(Grant 2012). Sous l'influence de la pensée des travaux de B. Bloom et
al. (ibid)7, des pédagogues médicaux l'ont
adoptée pour l'évaluation des gestes de soins dans le domaine du
savoir, du savoir-faire et du savoir-être et dans la mise en place de
stratégies actives d'enseignement (Albano et Ivernois, 2002). Ainsi,
Bertrand (1998) nous décrit l'apprenant comme l'élément
primordial de l'enseignement faisant de l'interaction un pilier des
théories didactiques, psycho-cognitifs et sociocognitives (Giol, 2011).
Ceci nous ouvre la voie aux théories de l'apprentissage telles que le
behaviorisme, le cognitivisme et le socioconstructivisme.
7 R.F. Mager, F. Keller, R. Gagné.
11 | P a g e
1.2.3- Le behaviorisme
Les behavioristes8 (1920 -1950), croyant qu'il faut
apprendre à travers le renforcement, décrivent l'apprentissage
d'abord par le conditionnement de l'action humaine sous l'influence des
facteurs externes. De façon générale, le behavioriste se
porte sur l'aspect psychomoteur de l'apprentissage et les objectifs
comportementaux à définir par le renforcement comme motivation
dans un contexte varié (Gergen 1984). Ils stipulent que l'environnement
influence le comportement à travers des réponses à des
stimuli visant à renforcer l'apprenant en priorisant les objectifs
d'apprentissage pour évaluer son rendement et ses compétences.
L'importance de l'enseignement des behavioristes basé
sur les facteurs environnementaux et les habilités, a été
remise en question au profit du modèle cognitif qui a dominé
pendant longtemps la littérature de l'éducation
médicale.
1.2.4- Le cognitivisme
L'orientation cognitive de l'apprentissage peut être vue
comme un changement de l'externe à l'interne, de l'acquisition de
connaissance et d'habilités au profit de la pensée. Mettant
l'accent sur l'engagement humain dans ses expériences d'apprentissage,
elle priorise l'imitation dans la compréhension du sens comme
méthode d'apprentissage. La théorie cognitiviste (apprendre
à travers le savoir) décrit l'apprentissage comme un
élément de la pensée et de l'interprétation des
apprenants dont nous passons en revue certains tenants de ce courant.
Jean Piaget (1896-1980) a démontré l'importance
des expériences et des interactions avec l'environnement dans le cadre
de l'apprentissage avec l'idée que l'apprenant construit des structures
cognitives propres pour l'aider à comprendre. Alors que dans la
théorie de l'apprentissage expérientiel, Carl Rogers (1902-1987)
a identifié 2 types d'apprentissage:
8 Pavlov (1927) a essayé de montrer qu'avec
un stimulus, l'enseignant peut manipuler le comportement des apprenants. Mais,
Watson (1919), lui croyait qu'en utilisant la récompense et la punition,
l'enseignant peut modeler le comportement des apprenants pour répondre
aux besoins enseignés à partir de l'environnement. Ce
behaviorisme radical est renforcé par Skinner (1948) croyant que tous
les comportements humains peuvent être provoqués ou
détruits à partir des récompenses ou punitions
environnementales. Cependant, le néo-behaviorisme, remplaçant le
behaviorisme radical, considère encore que l'environnement influence
d'abord les attitudes et les sentiments.
12 | P a g e
L'apprentissage cognitif qui inclue des connaissances
académiques et l'apprentissage expérientiel incluant la
signification de connaissances appliquées à des domaines
particuliers. Cette théorie soutient que les apprenants
perçoivent et traitent l'information de façon différente
et que les enseignants doivent varier les méthodes, techniques et
activités pédagogiques9.
Cette différence s'exprime dans la théorie du
contrôle (Glasser, 1925) qui stipule que tous les êtres vivants
contrôlent leur comportement en éprouvant du plaisir
vis-à-vis d'un besoin satisfait et en souffrant du cas contraire (Grant
2012). La démotivation des étudiants à faire un devoir
peut être considéré comme n'ayant pas de rapport avec leurs
besoins fondamentaux. L'andragogie et le portfolio sont des approches
cognitivistes qui présentent l'apprentissage comme essentiellement sans
médiateur résultant de l'engagement de l'apprenant à
partir de leur propre expérience.
Alors que par la métacognition, processus de
réflexion sur la pensée, J. H. Flavel (1928) montre que
l'apprenant contribue au processus cognitif par des stratégies de
planification, de résolution de problème et d'évaluation
de l'enseignement. Cependant, par la théorie de la cognition sociale,
Bandura (1986) établit un pont entre le behaviorisme (facteurs externes)
et le cognitivisme (les facteurs internes) en proposant un modèle
d'apprentissage qui unit le personnel, le cognitif, et l'environnement pour
donner un comportement individuel appelé déterminisme
réciproque. Mais, puisque le modèle cognitif se limite aux
interactions complexes de l'apprentissage, l'attention se porte alors sur les
modèles d'apprentissage social.
1.2.5- Le socio-constructivisme
Le constructivisme met l'emphase sur la construction de
nouvelles informations par l'apprenant, l'expérience fournit par
l'enseignant et l'environnement. Le socioconstructivisme de Lev Vygotsky (1896
- 1934), stipule que chaque personne apprend de façon individuelle et
que le savoir s'acquière de par lui-même dans l'interaction
sociale. Apprendre c'est une construction personnelle et sociale de sens
provenant du vécu, des expériences et des explications. Le
processus d'apprentissage doit être actif car on apprend au fur et
à mesure par des activités sociales prises
9 Les théories du style d'apprentissage (A.
Kolb), l'intelligence multiple (H. Gardner) et le cerveau gauche et droit nous
renvoient à un même fait. L'expérience éducative
doit être orientée vers tous les styles pour toucher tous les
apprenants.
13 | P a g e
dans leur contexte. L'apprenant construit un sens à
partir des informations nouvelles en s'engageant dans l'interaction avec ses
pairs et des adultes dans l'environnement (Zone proximal de
développement) dans le processus de développement.
L'apprentissage par problème est un bon exemple de socioconstructivisme
où l'expérience elle-même produit l'apprentissage.
D'après Lescouarch et Bécu-Robinault
(2014),10 les trois théories dominantes liées à
la transmission, au conditionnement et au socioconstructivisme s'opposent dans
les techniques et situations d'apprentissage, mais partagent l'idée que
l'acquisition des connaissances n'est pas une capacité innée.
Dans la théorie de la transmission qui s'accentue sur un cumul de
savoirs, l'apprenant passif ne sait pas, alors que dans le modèle de
conditionnement, l'apprenant est peu passif et subit après chaque action
un renforcement positif ou négatif à partir des stimuli et des
réponses alors que dans le constructivisme la connaissance et
l'expérience de l'apprenant sont prises en compte et l'apprentissage est
conçu et perçu comme une réorganisation, une
restructuration de la compréhension des apprenants actifs qui
construisent leurs propres apprentissages dans l'interaction avec les autres.
Ainsi, cet apprentissage peut se faire par la cognition de l'apprenant qui se
confronte aux taches, c'est le cognitivisme où il est face à la
tâche en se faisant aider par les autres avec des guides d'apprentissage,
c'est le socio-cognitivisme.
Parallèlement, en plus des méthodes actives de
formation en groupe telles que les études de cas, les
remue-méninges, les simulations, les jeux de rôles et les
démonstrations et l'apprentissage coopératif, les
pédagogues médicaux se sont montrés très
intéressés à l'apprentissage par problème.
1.2.6- Apprentissage par problème (APP)
Le modèle de l'apprentissage par problème (APP)
qui répand beaucoup dans le monde médical (Barrows 1980) est une
méthode instructive utilisant le problème des patients dans
l'enseignement. On part de la résolution du problème pour
identifier les besoins d'apprentissage dans un processus interactif et
autodirigé. A cet effet, il en dégage trois
caractéristiques essentielles: le problème comme stimulus de
l'apprentissage, le tuteur comme facilitateur et le travail de groupe
(randomisé
10 Laurent Lescouarch - Karine Bécu-Robinault (2014),
Apprentissage et didactique, cours de Licence de sciences de
l'éducation, Université Lumière, lyon 2,
www.cned.fr
14 | P a g e
et stratifié) comme stimulus d'interaction. Les
étudiants doivent être en mesure de résoudre et de
gérer le problème interdisciplinaire et préventif,
basé sur des objectifs et des taches concrètes. Un guide
d'instruction de tâche du problème à étudier doit
être clair bien délimité dans le temps et dans un espace
attrayant adapté au développement du groupe. En définitif,
l'APP est basé sur 4 points essentiels (Dolamans et al.) : Un processus
constructif, collaboratif, contextuel et autodirigé.
L'apprentissage autodirigé implique la
responsabilité, l'autonomie et le choix individuel de l'apprenant dans
le processus cognitif qui mène vers l'accomplissement de ses objectifs.
Il prend ainsi le contrôle des taches par sa propre organisation de
travail (Grant 2012). Cependant, il y a risque dans le temps que les apprenants
s'attendent à trouver les cas dans leur pratique médicale tel
qu'ils ont été dans les cas-problèmes et deviennent un peu
stéréotypés. C'est pourquoi, souvent l'individualisation
est renforcée par les principes de l'apprentissage efficace.
1.2.7- Apprentissage efficace
Ronald et al. (2002) présentent le modèle
PARI11 regroupant quatre principes fondamentaux d'un apprentissage
efficace pour guider les cliniciens engagés dans un rôle
pédagogique : Pertinence, Actif, Rétroaction et
Individualisation. Par Pertinence, il est entendu que l'apprentissage doit
être important pour les apprenants. Alors que, actif traduit un
apprentissage qui inclue les apprenants pour faciliter l'attention et la
rétention d'informations, c'est de les convertir d'observateurs en
acteurs qui exécutent des taches en groupe ou individuel. Et la
rétroaction dit feedback, permet d'améliorer les apprenants en
décrivant leurs éventuelles erreurs et leur faire des
propositions. L'individualisation est une forme de pédagogie
différenciée qui prend en compte les différents besoins,
styles et motivations de chaque apprenant (Audétat, 2014).
Plus spécifiquement à l'éducation
médicale, Grant (2012) décrit plusieurs approches à
prendre en compte dont les principes de l'apprentissage des adultes axés
sur l'amélioration personnelle, la compétence organisationnelle
et la transformation sociale de l'individu. L'andragogie, constituant la base,
se porte sur la situation réelle de la vie des adultes par l'approche
par compétence et le
11 C'est une adaptation française de l'acronyme anglais
FAIR : feedback, activity, individualisation, relevance traduit en
français par PARI
15 | P a g e
changement de conscience basé sur l'expérience
et l'environnement dans une perspective de transformation et de
conscientisation.
L'andragogie est à la fois un art et une science de
l'éducation qui se diffère de l'enseignement des enfants sous la
base de l'indépendance des adultes qui doivent élaborer,
créer et transformer leurs croyances, sentiments, interprétations
et décisions à travers la réflexion sur le contenu. Etant
plus une description des apprenants adultes qu'une théorie, les
premières critiques ont amené Knowles à considérer
la différence avec la pédagogie au niveau de l'âge, du
contexte, de l'apprenant et du processus d'enseignement-apprentissage.
l'auteur présente une charpente du processus
d'apprentissage dans l'éducation médicale qui est la
définition des objectifs clairs et compétences visées, des
taches pertinentes comme fondement de nouvelles acquisitions de connaissances,
la pratique guidée et le feedback qui aide les apprenants à
développer des perceptions positives et efficaces par rapport aux taches
et enfin, la contribution des apprenants à l'apprentissage à
partir de leurs stratégies, objectifs et expériences
personnelles.
Cette charpente s'assoit sur la pratique réflexive qui
permet de remettre en question la manière de pratiquer. Elle initie
ainsi la pratique de l'évaluation qui est un élément
crucial dans l'enseignement. Le plus souvent sommative, elle est
utilisée pour mesurer ce que les étudiants ont appris à la
fin d'une unité de formation, et pour les promouvoir en fin
d'études (OCDE 2008). Cependant, elle revêt aussi une fonction
formative, par les évaluations interactives fréquentes des
progrès et des acquis des étudiants, qui permet de
répondre à la diversité des besoins
différenciés. L'évaluation bilan contient une
évaluation diagnostique au début du cours qui permet de juger la
pertinence des notions et l'évaluation sommative.
L'autoévaluation, l'évaluation par les pairs, l'évaluation
du cours, du milieu et de l'enseignant sont toutes fondamentales.
Enfin, toutes ces approches décrivent l'apprenant comme
étant actif, en interaction avec son environnement. Elles regardent le
contexte entier dans un environnement d'apprentissage complexe, basé sur
la solution de problèmes dans la vie quotidienne. Les valeurs, les
attitudes et les croyances des apprenants capables d'autorégulation
influencent l'apprentissage en établissant leurs propres objectifs,
leurs plans, leurs stratégies, et en évaluant leurs
progrès par l'habilité à réfléchir sur leur
pratique individuelle c'est-à-dire leur performance. Alors, la mise en
oeuvre de toutes ces théories n'est possible que si le médecin
enseignant possède une compétence en matière de
pédagogie.
16 | P a g e
Nous disons compétence, la mise en action de savoirs et
de « savoir agir ». Selon le MELS, la compétence est
ce « savoir-agir complexe qui s'actualise dans le contexte d'une
situation professionnelle concrète par l'enchaînement d'actions en
vue d'atteindre un résultat » (Ross 2012 :55).
1.2.8- Conclusion partielle
Bien que présentées souvent de façon
hiérarchique, ces théories sont cohérentes aux
modèles éducatifs. Le constructivisme est le plus
considéré depuis une décennie même si en
matière des interventions pédagogiques diverses, le modèle
de la transmission et du conditionnement s'appliquent encore à
l'école. En général, elles ne s'opposent pas, mais se
complètent. Même si elles se sont suivies dans le temps, ce n'est
pas une rupture systématique, mais d'ajouts conceptuels
complémentaires. Partant de l'objectif de formation en soins infirmiers,
la pédagogie constructiviste, nous parait être plus adaptable par
ses principes centrés sur les apprenants à partir des
connaissances et expériences déjà acquises, pour
résoudre des problèmes complexes, pertinents et réels.
2. Approche méthodologique
C'est une étude de terrain, qualitative de type
transversal descriptif et non-expérimentale menée auprès
de 10 médecins enseignants dans les écoles d'infirmières
dans la commune de Hinche qui porte sur leurs manières d'enseigner eu
regard au plan de leçon, la motivation, le renforcement, le respect, les
valeurs éducatives, la perception et la compréhension de la
transmission du savoir dans les cours dispensés. Les 10 entretiens
semi-structurés, d'une durée en moyenne de 30 minutes chacun, ont
été effectués dans un espace réservé
seulement à l'enquêteur et à l'enquêté.
2.1.Technique de recherche
Nous avons choisi l'enquête par entretien qui est une
des méthodes de recueil de données les plus largement
utilisées en sciences sociales dans la production de données
qualitatives (Blanchet et Gotman 2007). Le type semi-structuré convient
mieux à notre étude à vision exploratoire
enregistrée dans le paradigme holistico-inductive car, un questionnaire
serait trop fermé pour discuter de la situation pédagogique, et
l'entretien non directif partant d'une question initiale
17 | P a g e
servant à débattre très largement une
question dont les points de vue sont très différents ou encore un
focus group qui faciliterait la confrontation d'opinions, ne sont pas les
meilleures techniques pour cette étude car, la compétence
pédagogique est définie par un ensemble de variables
scientifiquement fondées dans l'éducation, que nous nous
proposons de vérifier chez notre groupe cible. Cette technique nous
permet de centrer le discours des médecins enseignants autour des
thèmes brièvement définis au préalable à
l'aide du guide d'entretien. Vu l'abondance des informations produites lors des
entretiens semi-directifs, les échanges verbaux ont été
enregistrés et transcrits à côté des notes prises
sur du papier (Quintin, 2012) ; (Desmet, Lescouarch, & Pourtois, 2010).
2.2 Critère d'inclusion et exclusion
Ces 10 médecins enseignants sont recrutés,
spécialistes ou généralistes, au niveau des écoles
d'infirmières dans la commune de Hinche au cours de l'année
académique 2014-2015, et doivent avoir environ un an dans
l'enseignement. Leur sélection a été faite par
randomisation sous la base d'un tirage dans les différentes
écoles, sans en tenir compte de leur Université de provenance ou
de leur spécialité. A côté de ces entretiens,
d'autres ont été moins formellement réalisés soit
sur Facebook, par courrier électronique, téléphone ou face
à face avec des médecins responsables de direction ou programme
de formation pour des organisations au Plateau central. Cette étude ne
prend en compte que les médecins enseignants, proportionnellement en
plus grand nombre dans l'enseignement médical en Haïti, dont il y a
une proposition légale du rectorat de l'Université d'État
d'Haïti qui définit les conditions les habilitant à
enseigner, décrites dans notre problématique.
2.3 Outil de collecte des données
Les données recueillies ont été
traitées au fur et à mesure par analyse des discours des
participants. Avant la passation définitive, deux essais ont
été pilotés pour en vérifier la
fidélité de l'outil et apporter certaine modification.
Au début de chaque entretien, l'étudiant
enquêteur s'est présenté en tant qu'étudiant en
master et a expliqué le fondement de l'étude, les objectifs, la
portée académique du travail, durée de l'entretien et
l'appareil d'enregistrement tout en demandant aux enquêtés de
consentir librement à leur participation ou de décliner à
la volonté de répondre à des questions ou d'être
enregistrés.
18 | P a g e
Le guide d'entretien était divisé en trois
parties : les questions d'entrée en matière, les questions de
contenu et les questions de résumé. A la fin de l'entretien,
l'enquêteur a remercié les participants, les a rappelés que
c'était confidentiel en leur disant qu'au besoin ils pourront être
appelés au téléphone pour une clarification.
Les questions étaient portées sur plusieurs
sections dont le renseignement personnel, la perception et expérience de
formation pédagogique, les approches et démarches d'enseignement
qui incluent la préparation de l'enseignement, le déroulement,
les techniques et valeurs éducatives et l'évaluation.
2.4.Éthique et confidentialité
Il a été expliqué au décanat de
l'école et aux médecins enseignants interviewés que les
données recueillies dans le cadre de cette étude n'auront
été en aucun cas révélées à personne
d'autre et que cela ne fera atteinte ni à l'institution ni à
aucun de ses membres. L'étudiant enquêteur a clairement
expliqué aux médecins enseignants que tout ce qui a
été discuté dans le cadre de l'entretien n'aura
été en aucun cas objet de diffusion et d'aucune autre forme
d'utilisation en dehors de la production du rapport de recherche et qu'ils
pouvaient s'exprimer librement dans l'anonymat et la confidentialité.
Celui-ci n'a reçu aucune facilité de quelque ordre que ce soit de
la part de l'école ou des enseignants pour éviter tout conflit
d'intérêt. Les participants ont tous librement donné leur
consentement éclairé avant de passer l'entretien.
2.5.Procédure de collecte des données
Les résultats qui sont présentés dans le
cadre de cette étude, sont tirés des entretiens
réalisés avec les médecins enseignants à partir
d'une analyse thématique de la globalité des entretiens. Le
processus suivait les étapes d'enregistrement, de codification,
transcription des entretiens, la compilation de toutes les données par
thématique, et l'analyse.
2.6.Présentation du terrain d'étude
Hinche est le chef-lieu du département de Plateau
central d'Haïti, où l'enseignement supérieur n'est pas
développé. Il y a environ une école de médecine, 3
écoles d'infirmières et 2 écoles
d'auxiliaires-infirmières. La commune mesure: 588,4 km2, et occupe 13.3%
du territoire Haitien. D'après Haïti Référence, en
2009 la population de Hinche était de 109 916
hab. et d'une densité de
186,8hab/km2.
19 | P a g e
3- Présentation des résultats
Dans le cadre de ces résultats, nous nous focalisons
sur les thèmes qui ont été le plus
répétés lors des entretiens. D'abord, nous dressons un
cadre socio-professionnel des participants avant de décrire leur
perception et expérience dans la pédagogie, leur manière
d'enseigner et la préparation du cours en détaillant un peu le
plan de cours et son déroulement en classe. Nous présentons aussi
la compréhension des médecins enseignants sur l'andragogie avant
de discuter sur l'évaluation. Enfin, nous rapportons l'ensemble des
problèmes dans l'enseignement médical qui ont été
soulevés lors des entretiens.
3.1 Caractéristiques socio-professionnelles des
sujets
Notre échantillon était ainsi reparti : 40% de
spécialistes en épidémiologie, médecine interne,
infectiologie, médecine familiale, gynécologie dont 20% de
médecins cadres travaillant au niveau de l'administration,
stratégie et gestion de programmes de santé à la Direction
Sanitaire du Centre (DSC)12, et 60% de médecins cliniciens
généralistes qui sont résidents en service social. Le
service social [est une année de travaux pratiques]
institué par l'Etat haïtien pour les professionnels de la
santé fraichement diplômés des facultés de
Médecines et des écoles des infirmières (ZL/UEH,
2014: xi). Majoritairement hommes, soit 80%, ils n'ont que très peu
été exposés à la pédagogie et aux
méthodes d'enseignement à l'exception des spécialistes qui
ont suivi des séminaires sur l'andragogie avec le MSPP, Zanmi Lasante ou
par des présentations académiques lors de leurs
résidences. Ces derniers décrivent plus aisément les
principes pédagogiques dans le cadre des cours dans les écoles en
sciences infirmières où ils enseignent
généralement.
3.2. Expériences et perception de
l'enseignement
Généralement les médecins enseignants
commencent très tôt dans l'enseignement de façon
irrégulière et informelle. Avec l'aide des amis, ils
débutent aux environs de la troisième année de
médecine, à enseigner dans les écoles de sciences
infirmières du secteur privé. Ils n'ont pas été
recrutés, évalués ni examinés par la direction.
Ainsi, certains participants soulignent : « j'ai mon amant... qui m'a
dit si vous voulez, on pourrait déposer un cv. Et bien je vais le faire
», « un de mes collègues m'a donné un cours
d'anatomie ». C'est ainsi, rentrent-ils facilement dans
12 Organe déconcentré du Ministère de la
santé publique et de la population (MSPP)
20 | P a g e
l'enseignement et accumulent des expériences en classe.
Ils croient, cependant, dans l'échange et dans le respect des
étudiants mentionnant « c'est l'échange, on donne
quelque chose et on reçoit aussi. Il y a un échange
là-dessus, toujours on apprend quelque chose des autres ». Les
raisons qui les motivent et les poussent à enseigner
généralement c'est pour « apprendre une deuxième
fois en se rappelant des notions [étudiées à la
faculté de médecine], c'est un moyen de faire de la
recherche approfondie et de partager leur savoir, le transmettre aux jeunes
qu'ils forment », « je profite de l'enseignement pour
accumuler ma connaissance » soulignent-ils. Et aussi, quand les
étudiants maitrisent et comprennent la matière enseignée
« quand je dispose les cours et après je fais une courte
évaluation et que le message est passé... Donc, les
étudiants sont satisfaits ». Croyant que l'enseignement est un
art, la maitrise de la matière clinique leur suffit pour le transmettre
aux étudiants en modélisant leurs anciens enseignants.
3.3.Approche et démarche pédagogique
Cette section explique la pédagogie le plus souvent
adoptée par les médecins enseignants à travers la
préparation et le plan de cours, le déroulement de
l'enseignement-apprentissage, les méthodes et techniques
utilisées et particulièrement l'andragogie.
3.4.La préparation et plan de cours
Les cours sont préparés à partir de
différents documents dont les référentiels de MSPP et de
l'Organisation mondiale de la santé (OMS), de l'internet, du cursus et
du syllabus du cours. La faculté donne un document d'orientation dans
lequel, les médecins enseignants puisent les notions à enseigner
dans chaque séance dont la préparation est évaluée
de quelques minutes à 6 heures dépendamment du degré de
maitrise du cours par l'enseignant, du nombre de fois qu'il l'a
déjà présenté et de l'établissement. Le plan
de cours contient : «
1- Un grand thème
2- Un sous-thème
3- Les mots-clés ou les grands points
4- Et le contenu du cours ».
Le contenu est généralement reparti en une
« introduction, une définition, physiopathologie, signes et
symptômes, causes, traitement et prévention », puis pour
certains d'autres, une section référence
21 | P a g e
bibliographique. Il y a une variation au niveau de la
préparation du plan de cours et aussi de son déroulement lors de
l'enseignement-apprentissage dans la classe.
3.5.Déroulement des cours
Les médecins enseignants commencent par saluer les
étudiants et présentent leurs plans de cours «
salutation, préparation matériel (logistique), introduction
(plan de cours), développement, question, débat, conclusion
». Certains font un rappel ou un résumé du dernier
cours, puis donnent les explications. Très peu font des séances
de remue-méninges, ils acceptent tous de prendre des questions, mais qui
doivent posées après le cours pour gérer le programme
à voir. Certains engagent des discussions et participation de l'ordre de
l'interaction enseignant-étudiant alors que généralement
les documents sont donnés à la fin du cours. Cependant, certains
peuvent prendre 2 heures à donner des notes et expliquer après.
Ils relatent aussi que les étudiants ne veulent pas toujours
participer parce qu'ils sont tout simplement habitués à copier
des notes et ils sont paresseux et aiment la facilité.
Généralement, ils présentent le cours sur power point,
mais s'il n'y a pas d'électricité, ils utilisent de la craie et
du tableau.
3.6.Méthodes et techniques
Comme matériel et technique, ils utilisent le
rétroprojecteur et l'ordinateur. Ils font du power point égal
à une méthode active comme si qu'une fois un cours est
préparé et présenté sur power point, grâce
à l'avantage audio-visuel qui leur permet de tourner une vidéo ou
d'afficher une image, ils pensent que le cours n'est plus magistral ou
traditionnel. Ils utilisent pour beaucoup d'entre eux l'exposé magistral
et la lecture expliquée, « je demande aux étudiants de
faire la lecture et s'ils ne comprennent pas quelque chose, je les explique
». A part certains qui utilisent des « cas-problèmes,
le brainstorming et le travail en groupe », toutes les autres
méthodes d'enseignement ne sont pas appliquées.
3.7.L'andragogie
Certains médecins enseignants reconnaissent les
étudiants comme des adultes qui ont de préoccupation, de
responsabilité, des objectifs fixes et qu' « il faut les
traiter comme des partenaires dans le confort et partage ». Ils
admettent qu'il y a une différence entre l'apprentissage des adultes et
celui des enfants. Ainsi, par étudiants adultes, comprennent-ils que
c'est à eux de
22 | P a g e
s'intéresser et d'étudier les notions
enseignées tout en courbant au savoir de l'enseignant car la
différence d'âge des apprenants, étant parfois plus
âgés que l'enseignant, ne leur permet de s'opposer à une
explication. Face à leurs problèmes d'attention en classe, les
médecins enseignants prennent des exemples de la vie courante pour les
éveiller.
3.8.Valeurs éducatives
L'une des premières valeurs éducatives dont font
preuve les médecins enseignant, c'est la probité intellectuelle
« si on commet des erreurs, il faut avoir la conscience de les
corriger ». Ils croient qu'il ne faut pas mentir aux
étudiants, que l'enseignement est un partage de savoirs qu'ils
apprennent eux aussi des étudiants. Cependant, vu qu'ils ne sont pas
toujours disponibles, certains sont parfois très en retard et même
absents très souvent alors que quand les étudiants arrivent en
retard, ils sont retenus à la faculté. Dans certaines
facultés même, il se développe une tendance qui consiste
à l'enseignant d'asseoir son hégémonie à partir de
l'échec des étudiants. « Autant qu'il y a
d'étudiants qui échouent c'est autant que la valeur de
l'enseignant augmente ».
3.9.Le feedback et le respect
En général, nous avons compris que la relation
entre les médecins enseignants et les étudiants est très
bonne allant au-delà des heures de cours. Cependant, non convenu aux
principes d'apprentissage des adultes, être mis à la porte pour
être arrivés en retard ou parce que le téléphone a
sonné, « si le téléphone sonne, ils sont mis
à la porte... ou au-delà de l'heure fixée, personne ne
rentre » à côté des punitions et des disciplines,
ne témoigne pas de respect vis-à-vis des étudiants
adultes. Certains enseignants corrigent les erreurs des étudiants
immédiatement sans leur donner un feedback constructif qui viserait
à les aider à améliorer leur pratique, « je les
corrige immédiatement ».
3.10. Evaluation
En général, ils organisent deux types
d'évaluation. Une évaluation cautionnée par le
décanat qui se fait en une intra et une finale sur une session et un
ensemble de questions posées sur le cours et des cas-clinique. Certains
enseignants donnent des devoirs pour évaluer les cours passés et
sont considérés comme un stimulus externe consistant à
faire gagner des notes aux étudiants qui rédigent leurs devoirs
et répondent aux questions posées par l'enseignant. Une autre
forme
23 | P a g e
d'évaluation consiste à venir sans
prévenir et à donner un examen aux étudiants alors que
d'autres enseignants organisent des séances de révision avant les
examens. Généralement, ce sont seulement les étudiants qui
sont évalués.
3.11. Les problèmes
Les participants à l'étude ont évidemment
mentionné le problème de standardisation, de régulation et
de curriculum tout comme le MSPP. Ils en voient une différence de
curriculum et d'orientation au niveau des écoles d'infirmières.
En plus de cet aspect, de façon interne à l'école, ils
posent le problème de carence ou de disponibilité d'enseignants
pour certaines matières spécialisées et de salaire
inapproprié pour les enseignants. Ils soulèvent aussi un
problème d'éthique exprimé dans les retards et absences
répétées de certains médecins enseignants et le
manque de professionnalisme des directeurs ou doyens de facultés qui
n'assoient aucune condition favorable à une bonne éducation. La
documentation sous forme de feuillet n'est pas assez riche en information
à côté de l'absence de salle de bibliothèque.
Du coté externe, ils posent aussi le problème du
faible niveau de l'éducation au secondaire d'où proviennent des
étudiants paresseux qui certaine fois ne peuvent même pas bien
lire et qui ont un retard en langue française considérable alors
que l'éducation en Haïti se fait presque totalement en
français. Tout ceci est encore compliqué à cause de la
situation socio-économique précaire de la population
haïtienne en général et particulièrement de la
population hinchoise.
Cette réalité des médecins enseignants
débutant leur carrière d'enseignant pendant qu'ils sont encore
étudiants frappe généralement les écoles
d'infirmières du secteur privé. Dans les écoles qui sont
placées sous tutelle du Ministère de la santé publique et
de la population, les médecins enseignants sont surtout des
médecins spécialistes reconnus par le Rectorat de
l'Université d'Etat D'Haïti comme enseignants. Nous avons toutefois
vu qu'à part une exposition à la pédagogie non formelle ni
académique, ces enseignants spécialistes ne font pas vraiment la
différence en matière de pédagogie et d'éthique
appliquée à l'enseignement.
Enfin, ces trouvailles présentées ici de
façon succincte sont analysées et interprétées dans
la partie suivante pour faciliter la compréhension du
phénomène de l'enseignement médical au niveau des
écoles d'infirmières.
24 | P a g e
4. Discussion
Cette discussion est basée sur une
interprétation des discours pour essayer de bien comprendre le contexte
dans lequel ils ont été produits. Ensuite, elle nous permet de
juger les retrouvailles par rapport au cadre théorique que nous avons
considéré dans cette étude.
4.1 Par rapport aux participants
En Haïti, il n'y a pas beaucoup de médecins encore
moins de spécialistes ou de femmes spécialistes. Au Plateau
Central, les ressources dans presque tous les domaines sont rares et ceux qui y
vivent, viennent généralement de la capitale pour travailler.
Normalement, dans le système de santé en Haïti, les
médecins spécialistes sont au niveau des hôpitaux
universitaires, alors qu'à Hinche, chef-lieu du département du
Centre, il y a un hôpital départemental (HD) et dans les zones
avoisinantes, il y a des centres de santé (CDS).
Les spécialistes passent, après six ans plus une
année de service social, 3 à 4 ans pour faire une
spécialité. Au cours de la résidence, ils sont un peu
exposés à des présentations et au cours de leur
expérience, ils trouvent des opportunités à suivre des
séminaires qui leur servent de modèle pédagogique.
4.2.Expérience dans l'enseignement
Les étudiants en médecine, les résidents
en service social et les généralistes sont nombreux dans
l'enseignement dans les écoles d'infirmières à Hinche. Le
plus souvent, les directeurs des écoles les recrutent informellement
sous recommandation d'amis sans généralement aucune
expérience antérieure dans l'enseignement sinon que copier le
modèle de leurs anciens enseignants à la faculté de
médecine qui, nous l'avons vu, ne sont pas toujours de médecins
enseignants avec une compétence pédagogique. Ils croient que la
maitrise de la matière suffit pour pouvoir enseigner.
4.3.Les approches d'enseignement
Nous avons compris que le plan décrit par les
médecins enseignants est basé sur le programme de l'école
et ne prend en compte le besoin ni le niveau des étudiants. Au
contraire, ils voient les étudiants comme incapables, avec un niveau
intellectuel critique. Les cours dispensés généralement de
façon traditionnelle, sont basés sur le contenu car c'est la
matière qui dirige les
25 | P a g e
enseignants sur lesquels est centré l'enseignement. La
préparation du cours est centrée sur l'enseignant car, il le fait
surtout pour approfondir son propre savoir et réviser ce qu'il savait
déjà.
L'apprentissage par problème n'a pas été
vraiment exprimé et l'andragogie n'est pas appliquée dans ses
principes fondamentaux comme pertinence, simultanéité,
participation active, confort et sécurité, encouragement et
feedback constructif. La motivation des enseignants est portée sur
l'enseignement et le développement professionnel dans la mesure
où ils enseignent pour apprendre. L'enseignement-apprentissage n'est pas
basé sur la résolution de problème ni sur la pensée
critique et réflexive.
Dans le plan de cours, les éléments comme
objectifs, méthode d'enseignement, justification, évaluation
diagnostique, travaux en petit groupe, remue-méninges, simulation,
brise-glace et surtout les taches qui devraient permettre de consolider
l'apprentissage, ne sont pas pris en compte généralement. Ils
s'orientent tout droit vers le contenu négligeant l'artifice
pédagogique. Ce qui diminue les interactions multiples entre
étudiants et étudiants.
La correction des erreurs ne suit pas le principe de la
rétroaction constructive. Pour certains, le savoir qu'ils
détiennent leur confère un statue de domination et un pouvoir
à infliger des punitions qui vont dans le sens contraire au respect de
l'apprenant adulte. Même si, cependant, dans la plupart des cas, ils
disent s'être comportés en égal avec ces étudiants
adultes.
4.4.Evaluation
Les enseignants ont une bonne perception de
l'évaluation dans le cadre de l'enseignement-apprentissage mais, ils ne
l'incluent pas réellement même dans leur plan de cours.
Peut-être n'ont-ils pas une bonne connaissance sur l'évaluation
car, ils ne le font généralement que de trois manières :
à la mi- session et l'examen final qui sont considérés
comme des évaluations sommatives, et pour certains d'entre eux des
questions lors des cours. Les autres formes d'évaluations pertinentes
telles que porte-folio, évaluation des enseignants,
autoévaluation, l'évaluation formatrice et formative et
l'évaluation par les pairs n'ont pas été
mentionnées.
Suivant notre cadre théorique, nous pouvons en conclure
que la méthode utilisée par ces enseignants est la méthode
traditionnelle. Cette méthode a été très
critiquée dans le monde de
26 | P a g e
l'éducation par toutes les autres approches par le fait
qu'elle ne permet pas un apprentissage actif basé sur des besoins
réels. Les résultats nous montrent qu'à côté
des écarts de standardisation et de régulation du système
par l'Etat, il y a encore plus de problèmes au niveau de l'enseignement
médical en confirmant notre présomption sur le manque de
compétence pédagogique. Ainsi, soulignent-ils des
problèmes d'éthiques, de logistiques, de carence d'enseignants et
de l'éducation au secondaire en Haïti.
Basé sur notre cadre théorique qui a fait
étalage de beaucoup d'avances dans le domaine de la pédagogie
dans l'éducation médicale, nous pouvons dire que ni le
cognitivisme ni le socio-cognitivisme dont l'apprentissage par problème
et l'apprentissage efficace et réflexif ne sont compris des
médecins enseignants dans notre milieu d'étude. Il y a une forme
de behaviorisme quand les enseignants posent des questions pendant le cours
pour donner des points aux étudiants ou pour la présence tout
simplement. Ceci ressemble à un stimulus externe qui conditionne les
étudiants au travail.
4.5.Apport de l'étude
Cette étude permet de poser le problème de
l'enseignement médical au niveau des écoles d'infirmières
sous l'angle de la pédagogie tout en renforçant l'idée que
la régulation et la standardisation sont véritablement des
problèmes dans ce secteur. Car, même les spécialistes,
approuvés par le RUEH comme médecins enseignants ne sont pas
forcément capables d'enseigner sinon d'exposer la connaissance
médicale. Elle prouve qu'un besoin de contrôle étatique de
la profession d'enseignant se fait fortement sentir en Haïti. Elle
contribuera ainsi à sensibiliser les acteurs du secteur médical
afin qu'ils considèrent la compétence pédagogique comme
l'une des variables à prendre en compte dans la problématique de
la formation médicale en Haïti.
4.6.Limite de l'étude
En tout premier lieu, nous avons une limite
méthodologique. La meilleure façon qu'il advient de comprendre et
d'analyser la pédagogie c'est d'observer le médecin enseignant
à l'oeuvre plusieurs fois dans une salle classe en prenant en compte
tous les acteurs dont les étudiants, les dirigeants d'école etc.
Non seulement l'entretien nous limite à mieux cerner le
phénomène, mais il est source de biais car, les haïtiens
qui, généralement n'acceptent pas qu'ils commettent des erreurs
ou qu'ils
27 | P a g e
ne font pas bien quelque chose de peur que la
société leur critique sévèrement, auraient
difficilement expliqué exactement ce qu'ils ont réellement
l'habitude de faire.
A Hinche, il n'y a pas beaucoup d'écoles
d'infirmières ni beaucoup de médecins spécialistes. Ce qui
nous limite à vérifier l'ampleur du phénomène
réellement car la proportion de résidents en service social est
élevée par rapport aux autres médecins.
5. Conclusion
Les médecins résidents en service social, non
encore licenciés, représentent une bonne partie des
médecins enseignants dans la ville de Hinche. Nous rappelons que le
service social est une structure instaurée par l'Etat haïtien
durant une année après laquelle les professionnels de la
santé reçoivent leur licence. Ces médecins enseignants
n'ont pas suivi de séminaires ou cours particuliers, ni ils n'ont
été non plus exposés réellement à une
pédagogie efficace lors de leur apprentissage.
Ils prennent du temps pour préparer les cours à
partir de plusieurs sources et accordent de l'importance à
l'évaluation. Cependant, l'animation de chaque séance à
partir d'un plan bien échafaudé respectant les
éléments d'un plan de cours n'est pas bien construite.
L'enseignement se base sur le contenu et n'engage pas l'étudiant dans
l'interaction avec ses pairs à la recherche de résolution de
problèmes et de pensée critique sur la pratique médicale.
C'est plus un ensemble de savoir médical enseigné strictement
à partir des livres qui rend les étudiants les seuls responsables
de leur apprentissage comme adulte car, les enseignants ne définissent
pas vraiment de stratégies d'apprentissage pour les aider sinon que
d'expliquer plusieurs fois en cas d'incompréhension. Ils ne mettent pas
en oeuvre d'autres stratégies d'enseignement-apprentissage que celles
qui se rapprochent de la méthode traditionnelle qui est donc le point
dominant de l'enseignement médical à Hinche.
Le manque de contrôle étatique de l'exercice du
métier d'enseignant en Haïti est la raison fondamentale de la
conversion des étudiants en médecine et voire des médecins
en enseignants. Non seulement, l'Etat n'arrive pas à réguler ni
à standardiser l'enseignement médicale au niveau
28 | P a g e
des écoles d'infirmières en matière de
curriculum, mais ne définit pas un cadre légal et
académique des enseignants.
Les retrouvailles de cette étude nous imposent une
question très pertinente : Dans quelle mesure ce manque de
compétences en pédagogie des médecins enseignants
pourrait-il affecter l'apprentissage des étudiants au niveau de la
formation en sciences de la santé? La réponse à cette
question devrait être déterminante dans toute tentative de
réforme de l'enseignement médical et même du système
de santé en Haïti.
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UNESCO Bureau Régional pour l'Education en Asie et dans le Pacifique,
2006. ISBN 92-9223-094-8, 126 pages
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http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0379772800050103?journalCode=chee20#.U1g70
VecASk LA PLANIFICATION DE L'EDUCATION: PASSE, PRESENT ET FUTUR Published
online: 06 Jul 2006 Planification scolaire
ANNEXE
1. Guide d'entretien
Guide d'entretien
|
Section 1. Renseignements personnels
|
Nom et prénom
|
1. Est-ce que vous pouvez vous présenter en
précisant surtout votre qualification et occupation?
|
Institution d'affectation
|
2. Dans quelles institutions travaillez-vous?
|
Qualification
|
|
Occupations
|
|
Section 2. Perception et expérience
|
Expérience dans
l'enseignement
|
3. Basé sur vos expériences, est ce que vous
pouvez nous dire ce qui vous parait le plus intéressant dans
l'enseignement?
|
|
|
Section 3. Approches et expériences
pédagogiques
|
Théories et modèles
|
1. Quelle est votre approche de l'enseignement? Comment vous
procédez?
|
Méthodes/techniques
|
|
Formations suivies sur la pédagogie
(Expériences)
|
2. Est-ce que vous avez déjà participé dans
des séances de formation en pédagogie? Précisez.
|
|
|
32 | P a g e
Section 4. Préparation de
l'enseignement
|
Plan de cours
|
|
1. Comment vous préparez vos cours? Temps, documents et
syllabus?
|
Objectifs et justification
|
|
|
|
|
Section 5. Déroulement du cours
|
Interaction/participation
|
|
1. Comment se déroulent d'habitude vos cours? Comment
pouvez-vous décrire les étudiants dans le cadre du cours?
|
Activités
|
|
2. Comment présentez-vous vos leçons?
|
Taches pédagogiques
|
|
|
Rappel
|
|
|
Feedback
|
|
3. En cas d'une mauvaise réponse ou pratique `un
étudiant, comment d'habitude vous réagiriez?
|
|
Section 5. Évaluation
|
|
Type d'évaluation
|
6.
|
Comment vous évaluez d'habitude les étudiants, le
cours?
|
Évaluation
|
7.
|
Que pensez-vous de l'évaluation dans le cadre de
l'enseignement-apprentissage?
|
|
Section 6. Valeurs éducatives
|
|
Perception sur l'enseignement
|
|
1. Qu'est-ce que vous pensez de l'enseignement?
|
motivation
|
|
2. Pouvez-vous nous expliquer comment vous avez commencé
à enseigner?
|
motivation
|
|
3. Quelles sont vos motivations et ou déceptions?
|
Perception sur les étudiants
|
|
4. Que pensez-vous de vos étudiants?
|
Perception personnelle
|
|
5. Comment jugez-vous votre travail?
|
|
|
6. S'il vous est demandé d'apporter certaines
modifications dans votre manière d'enseigner, quelles
seront-elles?
|
respect
|
|
7. En cas de non-respect des normes par les étudiants (ne
pas rédiger de devoir par exemple), comment réagissez-vous?
|
|
|
|
Disponibilité
|
|
8. Quelle place donnez-vous à l'activité de
l'enseignement? Temps alloué?
|
|
Résumé
|
|
|
|
|
1. D'après vous qu'est-ce qui est le plus important dans
l'enseignement?
|
|
2.
|
Si on vous demande de résumer juste en quelques mots
ce que nous venons de discuter?
|
|
3.
|
Est-ce qu'il y a un autre point que vous voulez mentionner, au
sujet duquel on n'a pas discuté?
|
|
33 | P a g e