2.1.3. Mort
Les baluba considèrent la mort comme le grand chagrin
qui puisse arriver dans la vie d'une famille. A l'issue d'un
décès, les membres de la famille fondent tous en larmes et celui
qui ne pleure ou ne coule des larmes est qualifié de sorcier ou
soupçonné d'être à la base de la mort que l'on
déplore.
Cette conception nous montre comment les baluba même
s'ils reconnaissent que la mort existe et que ses causes peuvent être
naturelles (maladie, accident, vieillesse, etc.), ils croient fermement
à un bouc émissaire qui serait derrière tout
décès, surtout celui qui survient au jeune âge. Il faut
absolument rechercher les causes ailleurs. Ils croient que Dieu qui a
donné la vie à tous ne peut en aucun cas tuer. D'où le
proverbe « wa Mvidi kafuafua, ufuafua ngua muloji ne bampakamanga
anyi bakina-bantu » pour dure que celui qui appartient à
Dieu ne meurt pas, celui qui meurt appartient aux sorciers et les
féticheurs ou les jaloux/envieux ». C'est ainsi que certaines
personnes vont jusqu'à faire des fétiches pour les rendre
invulnérables à toute mort des mains des hommes. Cette pratique
défie les ancêtres et le pratiquant finit toujours par connaitre
des conséquences fâcheuses, car ces fétiches ont des
limites.
Voilà pourquoi le deuil apporte un grand chagrin dans
les familles luba et il comporte plusieurs rituels. Le deuil est empreint des
pleurs, fait des paroles susceptibles de toucher la sensibilité du coeur
de l'assistance. Sauf pour les Chefs coutumiers, les pleurs sont
prohibés et le deuil est parfois retardé et l'enterrement se fait
en cachette.
Il est de coutume qu'après la mort d'un conjoint, le
veuf ou la veuve est tenu de porter la charge mortuaire (lufuila). On croit que
le défunt qui vient de mourir n'est pas parti, il s'attache à son
conjoint vivant qui doit observer une longue période de quarantaine avec
des habits sales (généralement de couleur noir) jusqu'au jour de
la fin de cette procédure appelée mpidi. Le conjoint
porte aussi en dessous une cache-culotte appelée Mukaya (Kukota
mukaya/ kukuata lufuila = porte la charge mortuaire). La fin de
cette procédure s'accompagne d'une grande fête au cours de
laquelle le veuf ou la veuve va faire ou simuler les premiers rapports sexuels
(Kudula mpidi qui signifie ôter la charge mortuaire) avec un membre de la
famille du défunt, généralement le jeune frère et
faire une sorte de défilé avec ses plusieurs nouveaux habits
accumulé pendant toute la période de mpidi. Cette
cérémonie est très importante dans la culture car elle
constitue une purification et une bénédiction pour ouvrir la voix
au veuf ou à la veuve de se remarier. Ici il existe une autre
cérémonie spéciale pour l'héritage
(bumpianyi), si la veuve doit être héritée par un
des frères du défunt.
Une autre scène qui montre l'attachement aux parents
décédés est la nourriture que l'on apporte aux morts.
Généralement, c'est un poulet (nzolo wa
bakishi) qu'on prépare et que l'on va déposer soit aux
cimetières soit à la bifurcation des chemins. Si le lendemain on
rentre trouver que la nourriture n'y est plus, alors on croit que les morts
sont venus les consommer. Toutefois, le nzolo wa
bakishi peut être préparé aussi dans les
circonstances thérapeutiques où l'on évoque l'intervention
des ancêtres ou des morts pour la réparation d'une grave faute
ayant engendré des conséquences à travers la famille et
même des générations (Mukiya).
Notons de nos jours, que la plupart de ces
cérémonies sont de plus en plus négligées et
même oubliées dans plusieurs milieux luba.
Par ailleurs le deuil chez les baluba suit pratiquement le
processus du deuil psychologique tel qu'énoncé par Freud(1976)
dans « Deuil et Mélancolie » et analysé
par Isabelle Delisle (1987) dans « Survivre au deuil ». Ces
auteurs par du deuil psychologique comme étant un processus
intrapsychique consécutif à une perte d'un objet d'attachement ou
d'un être cher.
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