CHAPITRE II LA SOUTENABILITE DES FINANCES PUBLIQUES
DANS LA THEORIE ECONOMIQUE
La soutenabilité des finances publiques revêt une
importance particulière dans la théorie économique et
particulièrement en matière de politique économique. Elle
est une question centrale pour les décideurs publics et suscite des
analyses foisonnantes dont il n'est pas toujours facile de discerner les enjeux
ni les conséquences pour le service public. Vu son importance, plusieurs
théories économiques sont avancées. Ainsi ce chapitre fait
le point sur les notions générales de la soutenabilité
budgétaire (I) et justifie la grille d'analyse théorique qui a
été retenue qui englobe les différentes théories
sur la soutenabilité des finances publiques et la synthèse des
différents tests empiriques menés sur la question (II)
2.1. DEFINITIONS ET NOTIONS THEORIQUES DE LA
SOUTENABILITE
La soutenabilité est une notion dérivée
de la contrainte budgétaire inter-temporelle. La soutenabilité
budgétaire englobe plusieurs éléments distincts. C'est une
notion assez large et peut être traitée à l'aide de
plusieurs mécanismes. Les points de vue ont toujours divergé
autour de cette notion. Il y' à ceux qui traitent la
soutenabilité à partir d'une logique purement budgétaire
et de solvabilité. Il y' à aussi ceux qui analysent le
problème du côté des marchés financiers et
investisseurs. Enfin, certains privilégient d'aborder la
soutenabilité en mettant en valeur les richesses de l'Etat. Nous nous
s'apercevons donc que traiter la question de la soutenabilité revient
à analyser et interpréter plusieurs facteurs susceptibles
d'améliorer ou dégrader la situation de la dette. L'essentiel est
de savoir comment exploiter les éléments favorables et comment
éviter les facteurs défavorables. D'une façon
générale, la condition de soutenabilité impose deux
égalités équivalentes et complémentaires.
Premièrement, la dette courante doit être égale à la
valeur actualisée des excédents budgétaires futurs
anticipés. Deuxièmement, l'anticipation de la valeur
actualisée de la dette est nulle sur un horizon tendant vers l'infini.
Ce qu'on doit retenir est que la soutenabilité, proprement dite, n'est
respectée que lorsque le gouvernement est en mesure de dégager
des excédents budgétaires c'est à dire après
intérêt et que la dette actualisée tend
nécessairement vers zéro. Techniquement la soutenabilité
s'exprime donc par une condition de stabilité dans un univers
déterministe, et par une propriété de stationnarité
dans un univers stochastique. De ces définitions surgit alors de
nouvelles distinctions théoriques dans la notion de la
soutenabilité.
TELIMSEIN KEM-MADJE ERICK Page 21
Soutenabilité des finances publiques dans les pays
exportateurs de pétrole de la zone Cemac : cas du
Tchad
2.1.1 La soutenabilité actuarielle vs
soutenabilité effective
A) la soutenabilité actuarielle
On dit qu'un Etat est solvable lorsque sa dette publique suit
un processus stationnaire. Cette définition implique clairement que le
gouvernement ne joue pas un jeu « à la ponzi » en
finançant intégralement les intérêts et le principal
dus aujourd'hui par de nouveaux emprunts. Par contre, elle n'est pas la mieux
placée pour évaluer la politique économique. En effet, la
propriété explicitée par cette définition
n'évite pas un accroissement sans limite de la dette. Cette
définition rejoint la condition de transversalité dans le sens
où elle suppose que le gouvernement prélève des
impôts futurs. Cette définition a été
sévèrement critiquée par Drazen et Masson (1994) en disant
que cette propriété assure la crédibilité des
politiciens théoriquement (dans la mesure où
mathématiquement c'est réalisable), mais n'assure pas la
crédibilité des politiques réellement engagées qui
vont appliquer des valeurs excessives de taux d'imposition. D'autres auteurs
ont signalé cette inadéquation à l'instar de Arthur Laffer
(1970) qui croyait à cette idée ancienne qui disait que «
trop d'impôt tue l'impôt » et qui a
élaboré sa fameuse courbe appelée « courbe de laffer
» en nommant le phénomène « l'allérgie
fiscale ». D'autres auteurs libéraux ont aussi attaqué
cette idée de taxation à l'exemple de Jean-Baptiste Say qui
disait que « un impôt exagéré détruit la base
sur laquelle il porte ». De cette perspective, nous constatons que cette
définition n'est pas tenable. C'est la raison pour laquelle une autre
définition émerge à savoir la soutenabilité
effective.
|