CONCLUSION GÉNÉRALE
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L'évaluation n'est plus seulement dans
l'amélioration de l'existant, que ce soit le produit, en termes de
correction, les stratégies de fabrication du produit en termes de
remédiation externe ou d'auto-régulation interne au sujet et
guidée de l'extérieur comme dans la cybernétique, mais une
démarche contribuant à l'auto-évaluation d'une action. On
n'est plus dans le "faire mieux" mais aussi dans le "faire autrement", la
réorientation, la régulation de divergence, du projet initial et
pas seulement du programme (Vial, 2002). L'évaluation n'est pas
seulement une démarche de sanction ou une amélioration d'une
situation, mais aussi un moyen de mieux réorienter une politique, un
programme voire une décision.
Dans cette étude que nous avions menée, nous
nous sommes intéressés à l'évaluation
préalable avec pour thématique les enjeux de l'évaluation
préalable dans un projet culturel, le cas de l'appel à
propositions du programme ACP Cultures+ (Afrique, Caraïbes, Pacifique).
Certaines questions et préoccupations annoncées
en introduction générale, puis développées tout au
long de la partie théorique, ont pu trouver des réponses.
D'autres par contre, resteront en réflexion dans la poursuite d'une
nouvelle recherche. Ce mémoire de fin d'études a eu pour objectif
d'analyser les enjeux d'une évaluation préalable d'un projet
culturel répondant aux normes et exigences d'un programme de subvention,
le cas d'appel à propositions de l'Union européenne en
partenariat avec le Secrétariat des Etats ACP.
Concevoir et soumettre une action ou un projet culturel pour
une subvention, qu'elle soit nationale ou internationale, exige de la
compétence, de la technique, une méthodologie pragmatique et la
maîtrise de l'environnement. Un savoir en plus pour mieux conduire une
action et une démarche utile pour déterminer le bien-fondé
de la structure théorique d'un projet ou d'une action en évaluant
les objectifs fixés, en mesurant les résultats et en justifiant
la finalité de l'action. Comme signifié et démontré
dans la partie théorique de ce mémoire, un projet viable et
fiable nécessite une évaluation préalable, respectant les
mécanismes de la conception en amont de toute enquête. Le
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sociologue Martucceli (2010) explique que l'évaluation
augmente l'efficacité des bonnes pratiques parce qu'elle permet de faire
émerger par comparaison des idées pragmatiques et pratiques dans
une conception respectant les normes fiables. L'efficacité d'un projet
se détermine par le processus d'évaluation que le porteur de
projet s'en approprier pour procéder à l'émergence de ces
résultats, ainsi, l'évaluation préalable reste le centre
de la réussite de l'action.
L'évaluation préalable représente pour
les porteurs de projet le fondement de la conception d'une action quel que soit
le domaine d'exercice. Savoir évaluer et mesurer une action ou un
projet, c'est déterminer les enjeux d'une éventuelle modification
ou d'une amélioration d'une situation précise. Comme nous
l'avions signifié dans la partie théorique de ce mémoire,
l'évaluation préalable d'un projet ou d'une action permet
d'éviter les erreurs avant qu'elles ne soient commises, selon Le Marec
(1996).
Dans cette recherche, j'ai axé mon travail de
mémoire sur la description et l'analyse du dispositif principal de
l'objet de l'étude : le programme ACP Cultures+ en s'appropriant du PRAG
(Pratical guide), le document descriptif du programme.
Au coeur du programme analysé, la description de
manière détaillée du dispositif en mettant l'accent sur
les normes et règles d'une proposition des porteurs de projet, pour
accéder à une subvention destinée à soutenir le
développement des industries culturelles dans les pays ACP. Les mesures
et les indicateurs présentés dans le document permettaient aux
porteurs de projet de se projeter techniquement et professionnellement dans la
conception d'un projet ou d'une action en suivant les conditions
établies. Le respect d'un cadre logique préétabli avec la
définition des objectifs, des résultats et des activités
à développer contenu dans le PRAG, définit le parcours
constructif dont devrait suivre les porteurs de projet dans la conception de
leurs propositions.
Le porteur de projet dans la conception de son action ou de
son projet, est sensé décrire et déterminer la logique
d'intervention à réaliser, définir les indicateurs
objectivement vérifiables, présenter les sources et moyens de
vérification et enfin les
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hypothèses dans une évaluation dite
préalable pour répondre de manière fiable à l'appel
à propositions et en avoir accès.
Dans le même d'ordre d'idée, nous avons
également analysé les enjeux d'une évaluation
préalable d'un projet culturel en amont de la conception en le
décryptant, question de comprendre les mécanismes emprunter ou
utiliser par des acteurs culturels de terrain avant de pouvoir soumissionner
son action ou sa proposition. Nous avons résolu de mener des
enquêtes afin de vérifier nos hypothèses de départ
et de répondre à la problématique que nous nous sommes
posées en amont. Il faut signaler que c'est à partir de la mise
en évidence des appréhensions, des doutes ou des interrogations
des porteurs de projet et de l'analyse du dispositif accordant une subvention
à des propositions de soumissionnaires que nous aller à la
rencontre acteurs de terrain.
L'objectif de notre recherche était de pouvoir
étudier les acquis, les expériences, les connaissances et les
compétences des porteurs de projet dans la conception et la soumission
d'une proposition d'action ou de projet en partant d'une évaluation
préalable. Examiner la manière dont les acteurs de terrain
appréhendent la notion d'évaluation préalable ainsi que
les règles concernant l'octroi de la subvention, et de comprendre
comment l'évaluation est menée au sein de l'organisme d'octroi de
subvention. D'autre part, il était nécessaire de vérifier
les compétences techniques des évaluateurs des propositions de
porteurs de projet, de connaître leurs compétences, leurs bagages
culturels ou artistiques, leurs décisions à l'issue de
l'évaluation des propositions. Une description et une analyse technique
ont été faites dans la partie théorique de ce
mémoire, en réponse à nos questionnements et
préoccupations de recherche.
La question en amont de cette recherche était : «
Pourquoi les porteurs de projet doutent-ils du système
d'évaluation des projets soumissionnés dans le cadre du programme
ACP Cultures+, craignant que leur projet soit rejeté ? ». Sa
finalité était de comprendre par la comparaison des discours
professionnels et techniques, et par l'analyse des données, sur les
attentes des porteurs de projet et des évaluateurs. Cette
démarche a suscité des réflexions poussées et des
raisonnements critiques pour des approches
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constructives, voire normatives. Aucune hypothèse n'a
été négligée dans la mise en forme des
données et des théories, suivant l'écriture de ce
mémoire.
Au cours de cette étude, nous avons exploré de
multiples pistes de recherche, utilisé des méthodes standards
d'enquêtes pour accéder aux données afin de constituer
notre corpus puis d'analyser les résultats recueillis. À cet
effet, l'accès au terrain été favorable du
côté Bruxelles, sachant qu'avant de recueillir et collecter les
données de l'étude, nous avons réalisé des
pré-enquêtes qui nous ont permis de mieux nous orienter dans ce
travail.
A cet effet, je suis passé par la phase questionnaire
et des entretiens semi-directifs afin de recueillir des informations, des
données en sus de la documentation obtenue par internet ainsi qu'en
bibliothèque. Si la méthode du questionnaire a permis de
pénétrer efficacement les dimensions cognitives et
réflexives des porteurs de projet ou acteurs de terrain et de
définir leurs visions face au dispositif ACP Cultures+, peu importe le
nombre de réponses obtenues, l'option entretiens physiques et
téléphoniques en revanche, dite coûteuse en temps, en
énergie et en disponibilité, s'est révélée
insatisfaisante et pas assez conséquente pour valider nos
hypothèses. Le manque de temps des acteurs de terrain et des techniciens
du programme pour répondre à nos demandent tient lieu au timing.
Certes, nous avons pu rencontrer quelques acteurs et techniciens, mais
insuffisant pour évaluer nos objectifs et nos attentes fixés en
amont.
La force de cette étude dans l'accès aux
données, c'est la pré-enquête qui nous a permis de
définie notre thématique de recherche et de bien cibler les
acteurs de terrain pour une meilleure collaboration.
L'échec des entretiens physiques et
téléphoniques, en particulier auprès des techniciens du
programme, excepté un entretien était dû à une
question de timing, sachant que nous nous y étions pris un peu tard.
Mais pour le public d'enquêtés, comme décrit dans
l'interprétation des résultats, à savoir les porteurs de
projet et les techniciens du programme, le fond de la réflexion reste le
même ; ce qui change, ce sont des pratiques
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techniques et des méthodes pragmatiques. Du coté
des techniciens du programme, dits évaluateurs, leurs apports devraient
permettre de pénétrer le milieu pour mieux comprendre leurs
positionnements et leurs déterminations dans le choix des projets. Mais
hélas, nous avons dû juste avoir recours au document principal des
directives de subvention, faute de disponibilité. Ceci nous aurait
aidés en effet à répondre à d'autres questions de
recherche et surtout à bien cibler les résultats pour une
éventuelle recherche future.
Par ailleurs, concernant notre démarche
méthodologique sur l'enquête, l'insuffisance des réponses
obtenues au questionnaire pourrait s'expliquer par la formulation des questions
qui étaient parfois longues et complexes. Nous avons bien conscience que
ces possibles longueurs ont dû décourager certains porteurs de
projet ou des techniciens du programme. Qu'à cela ne tienne, les
résultats obtenus ont pu nous aider à décrypter, à
analyser les situations et à répondre à la question de
départ. Au travers des résultats analysés des acteurs de
terrain et des techniciens du programme, se ressentent le doute dans des
réflexions, des incertitudes de la part des porteurs de projet, de
l'encouragement et de la levée des doutes de la part des techniciens du
programme. Mais ce qui les rassemble, c'est l'idée de bien
évaluer son projet ou son action dans l'espoir que ce projet ou cette
action soit subventionné.
L'objectif fixé en début de recherche
était de parvenir à préciser les inquiétudes des
porteurs de projet dans la soumission des propositions pour subvention,
d'évaluer les mécanismes d'octroi de subvention du programme, de
vérifier et d'évaluer les compétences des porteurs de
projet dans la conception des projets ou des actions culturels. Suite à
notre question de départ et à nos hypothèses posées
en amont de la recherche, des échecs ont anéanti nos efforts
durant la phase d'enquête, d'où l'impossibilité de valider
à 100 % les résultats. Mais quelques résultats obtenus
durant les enquêtes nous ont aidés à analyser le dispositif
et à apporter des approches de raisonnement dans la construction
théorique de ce mémoire.
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Les porteurs de projet, dans la conception de leurs
propositions ou de leurs actions, sont soumis au respect des conditions
préétablies, aux normes définies par les institutions
octroyant des financements, en passant par une évaluation
préalable répondant aux attentes de ces institutions. En
dépit du manque de compétences professionnelles, de l'absence de
maîtrise de la conception du cycle d'un projet selon les attentes des
institutions, les porteurs de projet sont des acteurs de terrain qui
contribuent de manière déterminée et volontaire au
développement culturel de leur environnement, en luttant contre la
pauvreté. Peu importe le projet proposé, les institutions
octroyant du financement devraient aussi tenir compte de l'action ou des
actions à mener, tout en mesurant les garanties présentées
et les objectifs de ces actions.
En analysant les questionnaires et les interviews
réalisés durant la phase d'enquête se lit entre les lignes
la volonté des porteurs de projet de proposer de bonnes actions et de
bons projets, mais au final, persiste la même réponse ou le
même reproche, « inadéquation du cadre logique,
insuffisances dans le bilan, impertinence dans l'impact du projet
»24 . Il n'en demeure pas moins que les porteurs de projet
ont du mal à s'approprier le cadre logique ou le dispositif de
manière générale. En revanche, ils ont des qualités
et de l'expérience qui leur permettent de construire des projets
susceptibles de répondre aux attentes de la population ou de
l'environnement à exercer, tout en créant de l'emploi durable.
Le chemin de l'évaluation préalable dans la
conception des projets culturels est loin de révéler toutes ses
vérités, sachant qu'un seul projet subventionné a pu
être étudié, hors l'analyse d'un projet rejeté ou
des notes d'explications de la part de l'administration contractante devrait
peut-être révéler d'autres éléments
essentiels pour notre étude.
À défaut de conclure par une réflexion
définie pour ce mémoire, notre recherche n'en garde pas moins sa
portée heuristique et pourra dans l'avenir servir de base à une
nouvelle recherche ou de réflexion pour de futures études.
24 Cf. Questionnaire du porteur de projet, AHOUNOU Moustapha
Patrice du Bénin, n° 5. Annexe.
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