§4. Relance de la guerre froide à travers le
conflit Ukrainien
Depuis ses débuts en novembre 2013, la crise
ukrainienne n'a pas faibli en intensité. Bien au contraire, elles est
allée crescendo, au point de conduire certains médias ukrainiens
à révéler aujourd'hui que les bureaux du SBU (Service de
Sécurité de l'Ukraine) à Kiev seraient occupés par
des agents de la CIA, des médias anglais à révéler
que des mercenaires
1 Tshiyembe, M., op.cit., p.30
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de la société militaire privée
américaine Academi (anciennement Blackwater) seraient présents
sur le terrain, tandis que, côté russe, les Spetsnaz forces
spéciales d'élite du GRU (Direction générale des
renseignements de l'Etat-major des forces armées russes) auraient
été dépêchées en Ukraine sur ordre du
Kremlin.
Une telle escalade est, en partie, le fruit des discours aux
effets performatifs néfastes pour tous les protagonistes. La
théorie des actes de langage est en effet ici fort utile pour comprendre
cette montée en puissance de la crise. Ainsi que l'a fort bien
décrit John Langshaw Austin dans son ouvrage How to do Things with
Words1, parler, c'est aussi agir. Ainsi, le discours en politique
équivaut à une action. Dans le cas ukrainien, la crise a
été très largement nourrie par les différents
discours, discours qui très souvent empruntent à l'argumentation
juridique. Les uns s'abritent derrière le droit international public,
les autres derrière le droit constitutionnel. Citons seulement le
Président américain dénonçant la violation du droit
international par la Russie2, tandis que le Président Poutine
dénonçait pour sa part un coup d'Etat
anticonstitutionnel3 en Ukraine. Le problème réside
dans le fait que quel que soit le locuteur, le droit ne souffre pas les doubles
discours. Si Vladimir Poutine ne peut s'abriter derrière le paravent du
respect de la Constitution, en retour, il ne peut accepter de se voir imposer
de la part des Etats-Unis un discours moralisateur sur le respect du droit
international.
Dans un tel contexte de guerre froide renaissante, plusieurs
scénarios peuvent être envisagés. Tout d'abord, le maintien
du rapport de force actuel conduit à l'impasse. Dans le pire des cas de
figure celui du recours aux sociétés militaires privées et
aux mercenaires comme en Géorgie en 2008 le conflit ne peut que
s'enliser et s'ancrer dans la durée, Vladimir Poutine ayant
montré par le passé qu'il ne reculait pas.
1 William, J., Quand dire c'est faire, Paris, éd.
du Seuil, 1970, p.15
2 Cf son discours du 17 mars 2014 : « The
referendum in Crimea was a clear violation of Ukrainian constitutions and
international Law. »
3 Entretien avec les journalistes du 4 mars 2014. In Paris
Match Hebdo, n° 0043-10, Paris, p.1
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Le recours à des sanctions économiques accrues
contre la Russie, scénario brandi par l'Union Européenne et la
communauté internationale, ne permettra pas non plus une sortie de
crise, du fait de l'interdépendance des économies
européennes et russes.
Un autre scénario envisageable peut-être le plus
utopique tout en étant paradoxalement le plus réaliste pour la
sécurité de l'Europe consisterait en la fin des doubles discours
et la mise en oeuvre d'un processus de négociation qui ne verrait
à l'instar des Tables rondes en Europe centrale dans les années
1990 que la seule participation des acteurs concernés : les
Ukrainiens.
La nécessaire réponse « interne »
à la reconstruction de l'Etat
ukrainien
Si l'escalade de la crise ukrainienne est le fruit des
discours, la crise a, quant à elle, des racines plus profondes aussi
bien internes qu'externes qui impliquent une double réponse.
Tout d'abord, au plan interne, l'Ukraine a été
ébranlée dans son caractère étatique, aussi bien au
niveau de son territoire que de son gouvernement dont la
légitimité reste auto-proclamée.
Guerre des mots, guerre des médias, Ces pressions
diverses et multiples sur les sites Internet et les médias
indépendants visent à faciliter la communication offensive du
gouvernement russe. Le ton des journaux reprend désormais
majoritairement la rhétorique officielle, faisant du gouvernement de
Kiev un pouvoir de « fascistes )) et de « banderistes )) combattant
de pacifiques « compatriotes )) russes partisans du «
fédéralisme )) dans l'Est de l'Ukraine. Le gouvernement
kiévien, soutenu par les gouvernants européens et
américains, est considéré comme l'agresseur des
populations civiles russophones. La réduction du pluralisme
médiatique rend difficile, pour la majorité de la population,
l'accès à une parole alternative sur le conflit ukrainien. Seuls
les internautes les plus avisés
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bénéficient encore des reportages
indépendants de journalistes autonomes (qui postent sur Facebook leurs
observations de terrain), consultent les sites anglophones comme celui de la
BBC ou contournent le blocage des sites d'information en utilisant directement
les adresses IP concernées. Dans ce contexte médiatique
difficile, les journalistes russes indépendants sont en péril.
Certains ont déjà préféré quitter le pays
pour s'installer à l'étranger, d'autres
réfléchissent à la possibilité de créer des
médias russes à l'étranger pour échapper aux
contrôles du pouvoir. Tous sont à la recherche de soutiens,
notamment techniques, pour contourner la censure en ligne. Il est de la
responsabilité de leurs partenaires étrangers de les aider pour
garantir en Russie même le pluralisme de l'information autour de la
crise
ukrainienne, et de la vie politique russe en
général
Au-delà des médias, il y a une autre forme de la
guerre froide qui se manifeste sur le plan économique entre le bloc
occidental et celui de l'Est.
En effet, Au cours des offensives de rebelles pro russes
L'OTAN a révélé des documents prouvant que des soldats
russes seraient en train d'opérer sur le territoire ukrainien Une
campagne d'accusation a été déclenchée contre
Russie.
Porochenko et le gouvernement ukrainien ont renchéri en
demandant de l'assistance militaire concrète aux occidentaux où
la Pologne et les pays Baltes ont soutenu cette possibilité et les
Etats-Unis n'ont pas écarté cette possibilité. Mais les
dirigeants occidentaux dont France et l'Allemagne ont pris conscience du danger
que pourrait impliquer d'intervenir militairement en Ukraine et se sont limiter
aux accusations contre Poutine et à l'adoption des sanctions
économique pour augmenter la pression sur la Russie.
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De ce qui précède, porechenko sait que tout il
ne peut gagner la guerre contre Poutine et cent après, le début
de première guerre mondiale, il n'est pas évident que quelqu'un
l'aide à gagner non plus1
Qu'à cela ne tienne le 5 septembre 2014 l'accord de
paix était signé et régime de Kiev évitait de peu
que l'ensemble de l'Est et particulièrement la portuaire de Marioupol
soit prise par le rebelles pro-russe. Ce qui aurait donné lieu à
une continuité territoire de Crimée annexé par la
Russie.
Ainsi pour s'assurer que la Russie et les rebelles pro-russes
tiennent leur promesse de cessez le feu, les occidentaux ont adopté des
sanctions économiques supplémentaire contre le régime de
Poutine et certaines personnalités ukrainiennes qu'ils présument
soutenir les séparatistes.
Ainsi, l'union européenne vise à limiter le
financement de l'économie Russ ; « six grandes entreprises de
défense et d'énergie dont les compagnies
pétrolières Rosneft et Transfeft, et la branche
pétrolière de Gazprom se voient ainsi restreindre leurs
accès aux marchés des capitaux. L'union Européenne a
également décider d'ajouter d'autres noms à la centaine
des personnalités russes et ukrainiens pro-russes objet des sanctions
ciblées gel des avoirs et interdiction de visas. De leurs
côté les Etats-Unis ont ciblé le financement et le
transfert de technologie aux géants russes du pétrole et du Gaz
»2. Si ces mesures durent un long moment, elles pourraient
miner considérablement le potentiel pétrolier et gazier russe
dont l'économie est totalement dépendante.
Mais, elles affectent également des multinationales
comme Exxon, Total qui possèdent des partenariats avec les entreprises
russes. C'est pour cette raison que ces sanctions pourraient être
levées rapidement
1 My Book, « Ukraine ; a catastrophe default
». Sur http.www://.ccr.org. consulté 14/01/2015 à 01h 20'
2 Le monde, « entrée en vigueur des
nouvelles sanctions contre Moscou » sur http//.www.lemonde.fr
consulté le 14/01/2015 à 02h 50'
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si les dirigeants occidentaux perçoivent des
progrès par rapport au plan de paix en Ukraine.
Cependant la Russie n'est pas rester le bras croisés et
a aussi adopté des sanctions économiques notamment contre
l'importation des produits agricoles venus d'Europe. Actuellement le
gouvernement russe évalue un nouveau train des sanctions contre l'union
européenne visant les importations d'automobiles d'occasion ainsi que
les produits de l'industrie légère déjà
fabriqué en Russie. « le premier ministre Russe évoquait la
possibilité de fermer l'espace aérien russe aux avions de ligne
européens Nord-américain »
Après les nouveaux accords de Minsk entre la Russie, la
France, l'Allemagne, l'Ukraine et les séparatistes pro-russes sur
proposition de la France de nouvelles sanctions au cas où cet accord de
paix serait violé.
Nous ajoutons encore cette pratique qui apparait être
négligé que nous trouvons importante. C'est le fait que la
justice américaine qui a révélé la corruption au
sein de la fédération internationale de football association
(FIFA). Nous appréhendons cet acte au terme des puissances entre la
Russie et les Etats-Unis parce que la prochaine coupe du monde devrait
être organisée en Russie, ceci explique cela.
Ces observations nous font croire à une nouvelle guerre
froide. Ceci, nous fait passer au quatrième chapitre qui traite sur les
problèmes et les perspectives du conflit ukrainien dans la relance de la
guerre froide.
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