UNIVERSITE DE MBUJIMAYI
Fondation Cardinal J.A MALULA FACULTE DE
DROIT
LE SORT DES CONTRATS ET DES CONFLITS DE TRAVAIL EN
COURS DANS LES SOCIETES COMMERCIALES EN VOIE DE DISPARITION
KABAMBA KADIMA Fabrice
Mémoire présenté et défendu en
vue de l'obtention du grade de Licencié en Droit.
Option : Droit privé et
Judiciaire
Directeur : KABASELE KABASELE Nicolas
Professeur
Rapporteur : NTUMBA LUMBALA Charles
Assistant
Année académique 2015-2016
2
A la famille Jean-Edouard KADIMA MUTOMBO
3
REMERCIEMENTS
Nous tenons à particulièrement remercier monsieur
le professeur Nicolas KABASELE d'avoir accepté de diriger ce travail.
Nous remercions également monsieur l'assistant Charles
NTUMBA d'avoir guidé nos recherches comme rapporteur.
KABAMBA KADIMA Fabrice
4
INTRODUCTION
A l'instar d'un être humain, une société
commerciale naît, vit et meurt. Au cours de sa vie, elle regroupe en son
sein, à côté des associés, une masse d'individus
appelés travailleurs, employés ou salariés, qui sont
liés à la société, leur employeur, par un contrat
de travail.
Il peut cependant arriver que la société
disparaisse pour plusieurs causes ou se retrouve dans des difficultés
qui l'obligent d'entamer absolument une procédure devant la mener
à la disparition. La disparition de la société est
entendue ici comme un processus comprenant la dissolution de la
société et la liquidation de celle-ci. Il existe en outre une
cause de disparition de la société qui a un régime
particulier et qui nous intéresse également dans la
présente étude. Il s'agit de la procédure collective de
liquidation des biens de la société. Il se pose dès lors
des questions sur le sort des salariés employés au sein de la
société en disparition quant à leurs contrats de travail
et quant à leurs créances de salaires pendant ce processus.
De toute évidence, les travailleurs, face à leur
employeur en difficulté ou en voie de disparition, sont des
créanciers, et dans la mesure où ils constituent une des
composantes indissociables de la société et aussi à cause
du caractère alimentaire du salaire, ils ne peuvent pas être
traités comme les autres créanciers. D'où le
privilège leur reconnu par la loi.
Pendant cette période de crise, c'est-à-dire
celle de disparition de la société, le contrat de travail est
menacé et la créance salariale risque de n'être pas
versée au salarié. Comme on peut déjà s'en
apercevoir, le sort des travailleurs apparait plus ou moins fragilisé.
Notre propos est de mettre en évidence la situation particulière
des travailleurs dans cette situation.
De ce fait, les Actes uniformes OHADA relatifs aux
sociétés commerciales et aux procédures collectives
d'apurement du passif, tout en enrichissant le droit des affaires congolais,
prévoient la marche à suivre pour régler les
problèmes relatifs à la disparition de la société,
c'est-à-dire qu'ils réglementent minutieusement la dissolution et
la liquidation des sociétés commerciales. Ils prévoient
également des normes à suivre pour assurer pour assurer la
sécurité des travailleurs pendant ces différentes phases.
A titre exemplatif, le droit OHADA prévoit la nomination des organes
chargés de veiller sur les intérêts en présence et
d'assurer la bonne marche des procédures pendant la phase de disparition
de la société concernée (liquidateur, syndic,
juge-commissaire, contrôleurs, etc.).
Par ailleurs, la présente étude est
déclenchée suite à un certain nombre de
préoccupations que nous présentons de la manière suivante
:
5
- Quel est le sort des contrats de travail en cours pendant la
phase de dissolution de la société, pendant celle de la
liquidation de celle-ci ainsi que celle de la procédure collective de
liquidation des biens P
- Quel sera le sort des actions en réclamation des
créances de salaires initiées contre une société en
dissolution ou en liquidation ? En d'autres termes, vers qui les travailleurs
iront-ils pour réclamer leurs créances de salaire devant une
société déjà dissoute (mais non encore
liquidée) ou déjà liquidée P
- Comment s'effectue le traitement des créances de
salaires dans la procédure de liquidation des biens P
Compte tenu des préoccupations susmentionnées et
de notre objet d'étude, les hypothèses ci-après orientent
le raisonnement de ce travail :
? Aux termes de l'AUSCGIE (Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales et du groupement d'intérêt
économique), dans le processus de liquidation d'une
société, seul le liquidateur représente la
société pour tous les actes de cette liquidation. Il est aussi
habilité à payer les créanciers. C'est pourquoi les
travailleurs auront une action sur lui en ce qui concerne les conflits
individuels ou la réclamation des créances de salaires. Une fois
terminée la liquidation, les créanciers ne peuvent plus
s'adresser à la société elle-même, celle-ci ayant
cessé d'exister. Ils ont alors une action directe contre les
associés.
En outre, quand une société est
déjà liquidée, elle disparaît avec tout son contenu,
les contrats de travail compris. On ne peut dès lors parler de «
contrats en cours ».
? Dans les procédures collectives prévues par
l'AUPC (Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d'apurement du passif), les travailleurs ont un rôle important à
jouer dans la procédure de liquidation des biens de la
société, notamment en tant que contrôleurs. Toutefois, ils
peuvent, pendant cette procédure, être sujets au licenciement pour
motif économique à l'initiative du syndic. Il est vrai que
l'ouverture d'une procédure collective d'apurement du passif ne justifie
pas automatiquement la rupture des contrats en cours, mais c'est seul le syndic
qui conserve la faculté d'exiger ou non la continuité des
contrats en cours.
? Concernant le traitement des créances de salaires,
l'AUPC prévoit des règles bien établies pour
désintéresser les travailleurs, notamment le regroupement en
masse, l'ordre de paiement des créanciers, la prévision des
délais brefs de paiement ainsi que la protection du salaire par
l'institution du principe du privilège des salaires.
L'intérêt de ce travail serait, en premier lieu,
de montrer aux lecteurs, aux chercheurs et à tout
intéressé du droit des affaires comment le droit OHADA
réglemente le processus de la disparition de la société et
donne les
6
directives à suivre quant au traitement des
créances de salaires des travailleurs d'une société
soumise à la procédure collective de liquidation des biens.
Deuxièmement, les idées contenues dans ce
travail, tirées de la loi et de la doctrine en la matière,
peuvent aider les travailleurs employés dans des sociétés
commerciales à connaître le sort de leurs contrats de travail
à l'arrivée d'un événement susceptible d'amener ces
sociétés à la disparition et par conséquent,
à comprendre le rôle qu'ils peuvent jouer en cette matière
ainsi que les droits qu'ils peuvent exercer en cette phase de disparition.
Troisièmement enfin, il est d'une importance capitale
pour les salariés et pour le public, juriste ou non, de comprendre
comment se déroulent les opérations de dissolution et de
liquidation d'une société, ainsi que la procédure
collective de liquidation des biens.
Ce travail ne pourrait bien être réalisé
sans l'aide de certaines méthodes et techniques de recherche. C'est
pourquoi, s'agissant de méthode, nous avons recouru à celle
exégétique. Il s'agit d'une méthode juridique qui
s'élabore par référence à la loi, à la
jurisprudence et à la doctrine. Elle nous a permis d'analyser les Actes
uniformes et les lois nationales traitant le sujet et d'en ressortir, à
l'aide de la doctrine et de la jurisprudence, les principes de leur
application. Comme technique, celle documentaire a fait l'objet de notre
recours. Elle nous a permis de compléter nos informations et de
consulter différents ouvrages traitant des questions ayant trait
à notre sujet.
En ce qui concerne la délimitation du sujet, notre
champ d'investigation s'étale, sur le plan spatial, dans toute la
région OHADA en ce qui est du droit des sociétés et du
droit des procédures collectives. Quant aux points relatifs au droit du
travail, il est réduit à notre pays, la RDC. Dans le temps, nous
n'avons pas à tergiverser car nous ne partirons que de la date
d'entrée en vigueur des Actes uniformes concernés,
c'est-à-dire du 17 avril 1997 à nos jours pour l'AUSCGIE tel que
révisé en 2014 ; et du 10 avril 1998 à nos jours pour
l'AUPC.
Il sied de noter enfin que le présent travail est
subdivisé, hormis l'introduction et la conclusion, en deux grands
chapitres. Le premier est consacré aux généralités
; le second démontre l'impact de la disparition de la
société sur l'activité contractuelle.
7
CHAPITRE PREMIER
GENERALITES
La notion de la société commerciale (Section 1)
ainsi que celle du contrat et du conflit de travail (Section 2) seront
analysées dans ce premier chapitre.
SECTION I NOTION DE SOCIETE COMMERCIALE
Les sociétés commerciales ont connu depuis le
siècle dernier un développement considérable. Elles se
rencontrent de nos jours dans tous les secteurs de la vie économique
nationale et occupent toutes les phases du circuit économique (de la
production à la consommation, en passant par la distribution),
recouvrant ainsi des entreprises de toutes dimensions, depuis les
sociétés familiales jusqu'aux grands trusts internationaux qui
atteignent des tailles impressionnantes qui leur donnent un grand rayonnement
aussi bien dans leurs pays d'origine que dans le monde entier. Que faut-il donc
entendre par société commerciale au Congo, quelle est sa nature
juridique et comment fonctionne-elle ?
Pour répondre à ces questions, il est
nécessaire dans les lignes qui suivent, de définir d'abord la
société commerciale en déterminant aussi sa nature
juridique (§1), de la distinguer ensuite avec les groupements voisins
(§2) avant d'en évoquer les formes légales (§3), et
enfin, de fixer les règles pour sa constitution et son fonctionnement
(§4).
§1 DEFINITION ET NATURE JURIDIQUE
A. Définition
La société se définit
généralement comme un groupement de personnes et de biens
constitué par contrat et doté de la personnalité
juridique.1
Etymologiquement, la société évoque la
pluralité de personnes. Elle résulte avant tout d'un contrat.
C'est d'abord de cette manière que la définit l'Acte Uniforme
relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement
d'intérêt économique (AUSCGIE) à son article 4. Elle
est constituée par deux ou plusieurs personnes appelées
associés.
Selon l'ancienne conception du droit congolais,2 la
société ne pouvait être créée que par deux ou
plusieurs personnes. Mais actuellement, avec le
1 PETIT B., Droit des sociétés,
4ème édition, Litec, Paris, 2008, p. 1.
2 Article 446.1, Décret du 30 juillet 1888
portant contrats et obligations conventionnelles.
8
Droit OHADA, on admet la création d'une
société par une personne, l'associé unique
(société unipersonnelle).3
La société commerciale, telle que conçue
par l'Acte uniforme, peut donc être créée de deux
manières : elle peut résulter soit d'un contrat, soit d'un acte
unilatéral
En effet, l'article 4 de l'AUSCGIE dispose que « la
société commerciale est créée par deux ou plusieurs
personnes qui conviennent, par un contrat, d'affecter à une
activité des biens en numéraire ou en nature, dans le but de
partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui
pourra en résulter ». L'article 5 ajoute à cette
définition la précision selon laquelle la société
commerciale peut être également créée, dans les cas
prévus par l'Acte uniforme, par une seule personne,
dénommée « associé unique », par un acte
écrit. Dans ce dernier cas, la consécration légale demeure
limitée à certains types de sociétés, à
savoir la Société Anonyme (SA), la Société à
Responsabilité Limitée (SARL) et la Société par
Actions Simplifiées (SAS).4
En outre, on remarque dans les dispositions du droit OHADA
deux réalités intéressantes qui méritent
d'être soulignées. D'une part, le contrat de société
peut exister sans la personne : il est des sociétés non
immatriculées qui restent à l'état de contrat sans
acquérir la personnalité morale. Elles sont néanmoins
reconnues (Sociétés de fait et Sociétés en
participation). D'autre part, la personne peut à l'inverse exister sans
contrat : il s'agit du cas évoqué ci-haut selon lequel certaines
sociétés peuvent être aujourd'hui constituées par un
seul associé et donc sans le support d'un accord de volontés
entre coassociés. Ici la société, dès lors qu'elle
est immatriculée, n'en constitue pas moins une personne juridiquement
distincte de celle de l'associé unique. Cependant, elle n'est plus alors
un groupement de personnes mais, seulement un groupement de biens.
Il est clair de ce qui précède qu'il s'agira
dans la présente étude de la société commerciale et
non de la société civile5, car l'Acte uniforme
s'applique avant tout aux sociétés commerciales,
c'est-à-dire à celles qui ont épousé une forme
déclarée commerciale par ledit acte (Société en Nom
Collectif « SNC », Société en Commandite Simple «
SCS », Société à Responsabilité Limitée
« SARL », Société Anonyme « SA »,
Société par Actions Simplifiées « SAS ») ou qui
accomplissent à titre de profession habituelle des actes de commerce
selon l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général
(article 6).
3 Article 5, AUSCGIE.
4 OHADA, Traité et actes uniformes
commentés et annotés, 4ème édition,
Juriscope, 2012, p. 389.
5 Les sociétés civiles sont celles dont
l'objet est civil et qui n'ont pas opté pour l'une des formes
légales des sociétés commerciales. (OHADA, Traité
et actes, op.cit, p. 387).
9
B. Nature juridique
La question, classique et quelque peu académique, est
de savoir si la société revêt une nature contractuelle ou
une nature institutionnelle. Les opinions varient et sont susceptibles
d'évoluer sur la question de savoir quelle est la nature juridique de la
société. Pour certains auteurs, la société est un
contrat. L'accent est mis sur l'autonomie de la volonté des
associés dans la mesure où l'organisation juridique est choisie
par ces derniers. Pour d'autres, la société est une institution
dont l'organisation doit être décidée par la loi.
A l'état pur, ces deux visions s'opposent absolument.
Dans la conception contractuelle, la société est
créée et organisée par l'accord de volontés
librement négocié par les associés et consigné dans
les statuts. Dans la conception institutionnelle, elle est régie par un
ensemble de règles impératives inspirées d'un
intérêt supérieur : l'intérêt social
prévaut sur l'intérêt individuel des associés ; le
statut légal l'emporte sur les statuts conventionnels6. La
notion institutionnelle de la société soutient qu'une
société n'est pas qu'un contrat abandonné en tant que tel
à la volonté de ceux qui lui ont donné naissance, mais
plutôt une institution, c'est-à-dire un corps social
dépassant les volontés individuelles.
Les limites de ces deux thèses justifient le fait que
les auteurs s'accordent le plus souvent pour reconnaître les
caractères contractuel et institutionnel de la société,
puisque la société est « instituée » par un
« contrat ». Nous pensons à notre avis que la
société est à la fois un contrat et une institution. Ceci
se justifie en ce sens que la société naît d'abord par un
contrat (ou un acte unilatéral) et se voit ensuite appliquer les
règles légales instituées pour son fonctionnement. Elle
évolue donc de contrat en institution (Lors de sa constitution, c'est
l'aspect contractuel qui domine tandis que lors de son fonctionnement, c'est
l'aspect institutionnel qui l'emporte).
Il convient de noter aussi que la nature de la
société varie selon les époques (par exemple
l'époque actuelle qui se différencie de celle passée par
l'avènement de l'autorisation de la création des
sociétés unipersonnelles), selon l'objet des règles
considérées (la consécration de la Société
par actions simplifiée comme cinquième forme de la
société commerciale) et selon le type de
société.
6 PETIT B, op.cit, p.3.
10
§2 DISTINCTION AVEC LES NOTIONS ET GROUPEMENTS
VOISINS
La société ne doit pas être confondue avec
l'entreprise (A), l'association (B) et le Groupement d'Intérêt
Economique (C).
A. Société et entreprise
La société doit d'emblée être
distinguée de la notion d'entreprise, avec laquelle le langage courant
la confond trop souvent. Les deux notions ne sont pas de même nature.
L'entreprise est une notion économique qui désigne la
réunion d'un ensemble de moyens financiers, matériels et humains
organisés en vue de la production ou de la distribution de produits ou
de services.7 La société est, quant à elle, une
notion juridique impliquant en principe l'attribution de la personnalité
au groupement considéré. La société a aujourd'hui
pour fonction première d'assurer la personnification juridique de
l'entreprise : la personne morale société constitue le support de
l'identité et de l'autonomie qui font défaut à
l'entreprise individuelle.
L'entreprise, considérée en elle-même,
n'est donc pas une personne mais elle peut le devenir, spécialement en
revêtant la forme d'une société, de sorte que celle-ci
apparaît dans bien des cas comme une technique juridique mise au service
de l'entreprise.
Pour autant, les deux notions sont loin d'avoir le même
domaine : même dans les faits, société et entreprise ne
coïncident pas. D'une part, il n'est pas rare qu'une société
n'exploite aucune entreprise : certaines sociétés n'exercent pas
d'activité économique propre et n'ont d'autre objet que, par
exemple, de détenir la propriété d'un immeuble ou
d'être titulaires de participations au sein d'autres
sociétés. D'autre part, il est à l'inverse, très
fréquent qu'une entreprise ne soit pas exploitée par une
société. Il ne faut pas oublier en effet que les entreprises
individuelles sont aujourd'hui plus nombreuses que les sociétés,
même si leur poids économique est moindre : l'entreprise, qui est
alors dépourvue de personnalité juridique, appartient dans ce cas
à une personne physique, seule prise en considération par le
droit.
L'apparition des sociétés unipersonnelles a
cependant estompé la distinction opposant l'entreprise sociale
(puisqu'elle emprunte la structure juridique de la société) et
d'une entreprise individuelle (puisque cette structure est mise au service d'un
seul individu) ; c'est une entreprise individuelle exploitée sous forme
sociale.
A. Société et association
L'association est définie par la du 20 juillet 2001
comme un groupement qui ne se livre pas à des opérations
industrielles ou commerciales, si ce n'est à
7 PETIT B., op.cit, p.1 ; REINHARD Y., Droit
commercial, 3ème édition, Litec, Paris, 1993, p.
173.
11
titre accessoire, et qui ne cherche pas à procurer
à ses membres un gain matériel.8 Ce qui sépare
la société d'une association est la circonstance qu'une
association ne peut, à la différence d'une société,
se livrer à des opérations commerciales. Cela ne signifie pas
qu'il est interdit à une association de réaliser des
bénéfices, mais celle-ci ne peut pas répartir entre ses
membres les bénéfices qu'elle pourrait
réaliser.
C. Société et Groupement
d'Intérêt Economique (GIE)
Le groupement d'intérêt économique est une
institution aussi nouvelle qu'originale dans la plupart des Etats membres de
l'OHADA. Il est doté de la personnalité juridique autonome.
Cependant, bien qu'étant un être juridique autonome, ce n'est ni
une société, ni une association. C'est un instrument de
collaboration entre des entreprises préexistantes, plus simple que la
société et plus efficace que l'association.9
En effet, aux termes de l'article 869 de l'AUSCGIE, « le
groupement d'intérêt économique est celui qui a pour but
exclusif de mettre en oeuvre pour une durée déterminée,
tous les moyens propres à faciliter ou à développer
l'activité économique de ses membres ».
Les membres de ce groupement y mettent en commun des moyens de
production et développent leurs affaires plus efficacement et à
meilleur compte que s'ils étaient demeurés isolés.
L'adhésion à ce groupement permet de réaliser des
économies et certaines actions communes (actions promotionnelles,
études de marché, service de recherche ou d'assistance, etc.)
Le groupement d'intérêt économique
présente trois caractéristiques essentielles
:
- Sa vocation n'est pas de faire des
bénéfices10 (ceci ne veut pas dire qu'il ne peut pas
réaliser des bénéfices. Si des bénéfices ont
été effectués au cours d'un exercice, ils sont
répartis entre les participants selon les modalités
prévues au contrat) ;
- Il peut être constitué avec ou sans capital
;
- Sa structure est légère et malléable.
Sur le plan formel, le GIE est pour l'essentiel soumis aux
mêmes règles que la société ; mais la
différence essentielle tient à l'objet du GIE qui, contrairement
à celui de la société, se situe nécessairement dans
le prolongement d'activités économiques préexistantes.
8Article 1er, Loi n° 004/2001 du 20
juillet 2001 portant dispositions générales applicables aux
associations sans but lucratif et aux établissements d'utilité
publique, in Journal officiel de la RDC, 42ème année,
numéro spécial, 15 août 2001.
9 OHADA, Traité et actes uniformes
commentés et annotés, 4ème édition,
Juriscope, 2012, p. 635.
10 Article 870 AUSCGIE.
12
§3 CONSTITUTION ET FONCTIONNEMENT DE LA SOCIETE
Les formalités de constitution d'une
société commerciale (A) ainsi que les règles de
fonctionnement de celle-ci (B) seront résumées ici.
A. Les formalités de constitution
La constitution d'une société commerciale est
soumise à des conditions de fond cumulant celles des contrats en
général et du contrat de société en particulier
ainsi qu'à des conditions de forme exclusivement prévues pour les
sociétés commerciales.
Les formalités ou conditions de forme revêtent
une importance particulière en droit des sociétés car
elles remplissent de multiples fonctions :
- elles renseignent les associés sur leurs engagements
et, de ce fait, les protègent ;
- elles informent les tiers et leur permettent de
connaître la nature de la forme sociale empruntée, l'organisation
et le fonctionnement de celle-ci, de mesurer l'importance financière de
la société, et de cette façon, les protègent
également ;
- elles permettent aux autorités administratives,
judiciaires, fiscales et sociales de contrôler et de sanctionner
l'activité de la société en cas de leur absence ou de leur
inexactitude.
Selon les nouvelles règles des articles 100 et suivants
de l'Acte uniforme, on distingue désormais trois phases dans la
création des sociétés commerciales :
- une première phase de préparation (ou de
fondation) correspondant à celle où la société
n'est pas encore constituée11 ;
- une deuxième phase, centrale et décisive,
correspondant à la constitution de la société
matérialisée par la signature des statuts12
;
- et la troisième phase correspondant à
l'acquisition de la personnalité juridique grâce à
l'immatriculation13 (articles 97 à 99 et 101 al 2
AUSCGIE).
Durant les phases 1 et 2, ce sont les fondateurs qui sont
chargés de conduire les opérations, c'est-à-dire les
personnes qui participent activement aux opérations conduisant à
la constitution de la société. Leur rôle commence
dès les premières opérations ou l'accomplissement des
premiers actes de constitution. Il prend fin dès que les statuts ont
été signés par tous les associés ou
l'associé unique.14 A partir de la signature des statuts les
dirigeants sociaux se
11 Art 100 AUSCGIE.
12 Art 101 al 1.
13 OHADA, Traités et actes, op.cit, p.
389.
14 Art 102 AUSCGIE.
13
substituent aux fondateurs. Ils agissent au nom de la
société constituée et non encore immatriculée.
L'établissement ou l'adoption des statuts(1),
l'immatriculation(2) et les formalités de publicité(3) sont les
grandes étapes de constitution de la société qui
méritent d'être évoquées dans les lignes qui
suivent. Aussi est-il vrai que l'irrégularité commise dans
l'accomplissement des formalités de constitution d'une
société entraîne des sanctions prévues par l'Acte
uniforme (4).
1. L'établissement des statuts
Les statuts constituent soit le contrat de
société en cas de pluralité d'associés, soit l'acte
de déclaration unilatérale de volonté d'une seule personne
en cas d'associé unique.15 Il peu être
rédigé en forme d'un acte notarié ou de tout acte offrant
des garanties d'authenticité dans l'Etat du siège de la
société, déposé avec reconnaissance
d'écritures et de signatures par toutes les parties au rang des minutes
d'un notaire.16
Aux termes de l'article 13 AUSCGIE, les statuts
énoncent un certain nombre de mentions destinés à
renseigner sur :
- la forme de société, sa dénomination,
son siège, sa durée, l'identité des apporteurs en
numéraire et en nature, le montant ou la valeur des apports et la valeur
des titres sociaux remis en contrepartie de chaque apport ;
- l'identité des bénéficiaires des
avantages particuliers et la nature de ceux-ci ;
- le montant du capital social, le nombre et la valeur des
titres sociaux émis, en distinguant le cas échéant, les
différentes catégories des titres créées
;
- les stipulations sur la répartition du
résultat, sur la constitution des réserves sur la
répartition du boni de liquidation ;
- les modalités de fonctionnement.
Il est à noter que ces mentions sont obligatoires.
L'article 2 de l'AUSCGIE dispose que toutes les dispositions de l'Acte uniforme
sont d'ordre public, sauf quand il est expressément stipulé le
contraire.
2. L'immatriculation
Toute société doit être
immatriculée au RCCM sauf la société en
participation.17Ce sont les dirigeants sociaux nommés par les
statuts ou
15 Art 12 AUSCGIE.
16 Art 10 AUSCGIE.
17 Art 97 AUSCGIE.
14
l'Assemblée Générale constitutive qui
sont chargés de procéder à cette formalité
puisqu'ils ont pris désormais la place de fondateurs.18
L'immatriculation ne peut être demandée et
obtenue que si l'on produit et dépose au greffe une déclaration
de régularité et de conformité. Cette déclaration
est rédigée et signée par les fondateurs et les premiers
membres des organes de gestion, d'administration et de direction relatant
toutes les opérations en vue de constituer régulièrement
la société et par laquelle ils affirment que cette constitution a
été réalisée en conformité de l'Acte
uniforme.19 La même disposition est applicable en cas de
modification des statuts.20
En effet, l'immatriculation se fait conformément aux
dispositions régissant le RCCM contenues dans l'Acte uniforme portant
sur le droit commercial général (articles 29 et suivants).
Quid des effets de l'immatriculation P
- l'immatriculation confère la personnalité
juridique à la société commerciale. Avant son
immatriculation, l'existence de la société n'est pas opposable
aux tiers ; néanmoins, ceux-ci peuvent s'en
prévaloir.21
- Les rapports entre les associés sont régis par
le contrat de société et par les règles
générales des contrats et des obligations entre la date de la
constitution et celle de l'immatriculation de la société.
Il est à remarquer de ce qui précède que
l'énoncé de la règle relative à la
personnalité juridique amène à se poser la question de
savoir quelle est la situation juridique de la société et des
associés avant l'immatriculation.
Néanmoins, l'on sait qu'il peut exister des engagements
que la société a pris avant l'immatriculation, voire même
avant sa constitution. Il y a dès lors moyen de se situer, si les
engagements ont été pris soit avant la constitution de la
société, soit avant l'immatriculation de la
société.
? Engagements pris avant la constitution de la
société
Ces engagements ont été pris par les fondateurs.
Ils doivent être portés à la connaissance des
associés avant la signature des statuts ou lors de l'assemblée
constitutive.22 Ils doivent être décrits dans un
état intitulé « état des actes et engagements
accomplis pour le compte de la société en formation » avec
indication, pour chacun d'eux, de la nature et de la portée des
obligations qu'ils comportent. Dans les sociétés sans
assemblée constitutives, cet état est annexé
18 Art 104 AUSCGIE.
19 Art 73 AUSCGIE.
20 Art 76 AUSCGIE.
21 Art 101 AUSCGIE.
22 Art 106 AUSCGIE.
15
aux statuts ; la signature des statuts et de cet état
emporte reprise par la société de ces
engagements.23
Les actes et engagements repris par la société
régulièrement constituée et immatriculée sont
réputés avoir été contractés dès
l'origine.24
? Engagements pris avant
l'immatriculation
Les associés peuvent, dans les statuts ou par acte
séparé, donner mandat à un ou plusieurs dirigeants sociaux
de prendre des engagements pour le compte de la société
constituée mais non encore immatriculée. L'immatriculation
emporte reprise par la société de ces engagements.25
Au cas où ils ne seraient pas repris, ces engagements sont
inopposables à la société et les personnes qui les ont
souscrits sont tenues solidairement et indéfiniment des obligations
qu'ils comportent.
3. Formalités de publicité
Les formalités de publicité sont
effectuées à la diligence et sous la responsabilité des
représentants légaux des sociétés.26
Après l'immatriculation, la société doit
passer par les formalités de publicité. Pour ce faire, dans un
délai de quinze jours suivant l'immatriculation, un avis est
inséré dans un journal habilité à recevoir les
annonces légales pour publication.27
L'avis est signé par le notaire qui a reçu le
contrat de société ou par les fondateurs. Il contient les
énonciations suivantes :
- La raison ou la dénomination sociale de la
société, suivie, le cas échéant,
de son sigle ;
- la forme de la société ;
- le montant du capital social ;
- l'adresse du siège social ;
- l'objet social indiqué sommairement ;
- le montant des apports en numéraire ;
- la description sommaire et l'évaluation des apports en
nature ;
- les noms, prénoms usuels et domicile des associés
tenus indéfiniment
des dettes sociales ;
- les noms, prénoms usuels et domiciles des premiers
dirigeants et des
premiers commissaires aux comptes ;
- les références du dépôt au greffe
des pièces de constitution ;
- les références de l'immatriculation au RCCM ;
23 Art 107 AUSCGIE.
24 Art 110 AUSCGIE.
25 Art 111 AUSCGIE.
26 Art. 259 al. 1er .
27 Art 261 et 262 AUSCGIE.
16
- le cas échéant, la date effective ou
prévue du commencement d'activité.
4. Sanctions d'irrégularité
Non seulement les formalités de constitution d'une
société commerciale sont nombreuses mais encore elles sont
complexes. Il n'est donc pas rare que les fondateurs ou les premiers dirigeants
omettent une formalité ou commettent une irrégularité dans
l'accomplissement de l'une d'elles.
L'irrégularité commise dans l'accomplissement
des formalités sus évoquées entraîne des sanctions,
notamment la nullité de la société et la
responsabilité des auteurs de
l'irrégularité.28
a) La nullité de la
société
Le régime de la nullité des
sociétés déroge sur de nombreux points à celui du
droit commun. On s'en rendra aisément compte sur trois
éléments qui sont : les causes de nullité, l'action en
régularisation et les effets de la nullité.
? Les causes de nullité
L'article 242 AUSCGIE pose le principe selon lequel la
nullité de la société ou de tous actes, décisions
ou délibérations modifiants les statuts ne peut résulter
que :
- d'une disposition expresse de l'Acte uniforme ;
- des textes régissant la nullité des contrats
en général et du contrat de société en particulier
(ex : vices du consentement, incapacité, objet illicite, défaut
d'apports, etc.)
Par ailleurs, certains vices de fond ou de forme ne peuvent
pas entrainer la nullité. Il s'agit de(s) :
- L'énonciation incomplète des mentions devant
figurer dans les statuts ;
- Vices du consentement ou l'incapacité qui ne peuvent
menacer de nullité que la société en participation, la SNC
et la SCS. Dans les SA et les SARL, ils ne peuvent constituer des causes de
nullité que si l'incapacité atteint tous les associés
fondateurs.29
- Formalités de publicité, sauf dans les SNC et
SCS où elles sont requises à peine de
nullité.30
Il faut noter que le tribunal a la faculté de ne pas
prononcer la nullité si aucune fraude n'est constatée. Il peut
donc prononcer la régularisation.
28 Voir les articles 242 à 256 AUSCGIE.
29 Art. 243 AUSCGIE.
30 Art. 245 AUSCGIE
17
? L'action en régularisation
Afin d'éviter la nullité dans les cas où
elle est encourue, l'acte uniforme prévoit et organise la
régularisation de plusieurs vices.
Il ressort de la lecture de l'article 247 AUSCGIE que le
tribunal saisi d'une action en nullité peut, même d'office, fixer
un délai pour permettre de couvrir la nullité. Il ne peut pas
prononcer la nullité moins de mois après la date de l'exploit
introductif d'instance. Si une assemblée est nécessaire pour
régulariser le vice, le tribunal accorde, par un jugement, le
délai indispensable pour que les associés puissent prendre une
décision. Si, à l'expiration du délai accordé,
aucune décision n'est prise, le tribunal statue à la demande de
la partie la plus diligente.
? Les effets de la nullité
Lorsque la nullité de la société est
prononcée, elle met fin, sans rétroactivité, à
l'exécution du contrat de société. Il est donc
procédé à la dissolution de la société et,
pour ce qui est des sociétés pluripersonnelles, à leur
liquidation.31Concernant les sociétés unipersonnelles,
il n'est pas procédé à leur liquidation puisque ce n'est
pas nécessaire. En effet, la question de la répartition d'un boni
entre associés ne se pose pas. Quant aux créanciers, ils ne
craignent rien dans la mesure où l'on passe d'un patrimoine
d'affectation au patrimoine général et universel de
l'associé
b) La responsabilité des fondateurs ou dirigeants
auteurs de l'irrégularité
L'Acte uniforme prévoit et organise la
responsabilité civile et pénale des fondateurs et des dirigeants
qui auront été les auteurs d'omissions ou d'erreurs dans
l'accomplissement des formalités de constitution des
sociétés.
? La responsabilité civile
La responsabilité éclate ici en deux
hypothèses, selon qu'il y a eu nullité ou non.
- Si la nullité a été prononcée,
les associés et les dirigeants auxquels la nullité est imputable
peuvent être déclarés solidairement responsables du dommage
résultant pour les tiers de l'annulation de la
société.32La disparition de la cause de nullité
ne fait pas obstacle à l'exercice de l'action en responsabilité
tendant à la réparation du préjudice causé par le
vice dont la société était entachée. Cette action
se prescrit toutefois par 3 ans à compter du jour où la
nullité a été découverte.
- En dehors de toute nullité, les articles 75 à
80 AUSCGIE organisent la responsabilité des fondateurs et des premiers
organes de gestion. Ceux-ci
31 Art. 253 AUSCGIE.
32 Art. 256 AUSCGIE. Voy. également les
articles 316 pour la SARL, 413 et 738 pour la SA.
18
sont solidairement responsables du préjudice
causé soit par le défaut d'une mention obligatoire dans les
statuts, soit par l'omission ou l'accomplissement irrégulier d'une
formalité prescrite pour la constitution d'une société. En
cas de modification des statuts, les membres des organes de gestion,
d'administration et de direction alors en fonction encourent la même
responsabilité. L'action en responsabilité se prescrit par 5 ans
à compter du jour de l'immatriculation ou de la publicité de
l'acte modifiant les statuts.
? La responsabilité pénale
L'AUSCGIE contient des dispositions pénales
définissant les éléments constitutifs des infractions et
non les sanctions. Ces infractions sont réparties selon qu'elles sont
commises relativement à telle ou telle phase de la vie de la
société (constitution, gérance, administration et
direction, assemblées générales, modifications du capital,
contrôle des sociétés, dissolution, liquidation, appel
public à l'épargne, etc.)33
Les infractions concernant la constitution de la
société sont décrites par les articles 886 à 888 de
l'AUSCGIE. Il s'agit entre autres des faits suivants :
- Le fait pour les fondateurs ou les dirigeants
d'émettre des actions lorsque l'immatriculation est obtenue en fraude ou
que la société est irrégulièrement
constituée ;
- Le fait d'affirmer sincères et véritables, par
l'établissement de la déclaration notariée de souscription
et de versement ou du certificat du dépositaire, des souscriptions que
l'on sait fictives ou de déclarer qu'ont été
définitivement versés des fonds non mis à la disposition
de la société ;
- Le fait de provoquer des suscriptions ou des versements en
publiant les noms des personnes désignées contrairement à
la vérité comme étant ou devant être
attachées à la société à un titre quelconque
;
- Le fait d'attribuer à un apport en nature une
évaluation supérieure à sa valeur réelle ;
- Le fait de négocier des actions d'apport avant
l'expiration du délai pendant lequel elles ne sont pas
négociables, etc.
B. Le fonctionnement de la société
Comme l'être humain, l'être moral
société est doté d'organes qui sont nécessaires
à sa vie. Ces organes sont appelés « organes sociaux ».
En d'autres termes, ce sont les organes sociaux qui font fonctionner les
sociétés commerciales. Ces organes sont les associés, les
dirigeants et les commissaires aux comptes. Il faut ajouter également
à cette liste les salariés, ces derniers étant
33 Art. 886 à 905 AUSCGIE.
19
des cocontractants et des créanciers de la personne
morale société, qui en constituent une composante non
négligeable.
1. Les associés
Le terme associé est pris ici dans son sens le plus
large. Il inclut par conséquent tous les titulaires de droits sociaux
(parts ou actions) attribués en contrepartie d'un apport et
détenus soit par l'apporteur initial, soit par un ayant cause de
celui-ci.
Si les associés figurent parmi les
éléments moteurs des organes sociaux, c'est principalement en
raison des décisions collectives qu'ils peuvent prendre pour la marche
de la société.34 Les associés peuvent nommer
des dirigeants ou des gérants dans la société, tout comme
ils peuvent exercer eux-mêmes ces fonctions.
En effet, les associés doivent pouvoir donner leur
opinion sur l'orientation générale de la société,
exercer leurs droits d'associés, notamment celui de contrôler et
de critiquer la gestion des dirigeants.35 Les associés
doivent, pour l'expression de leurs droits, se regrouper au sein des
assemblées. L'assemblée des associés est ainsi
considérée comme l'instance suprême de la
société. Tout associé a droit de participer aux
décisions collectives.36
2. Les dirigeants sociaux
Il s'agit de toutes les personnes physiques ou morales
investies, individuellement ou collégialement selon les cas, de l'un ou
au moins des trois pouvoirs suivants : le pouvoir de représentation
externe qui fait du dirigeant le porte parole de la société dans
ses rapports avec les tiers37, le pouvoir de direction interne qui
le place au sommet de la hiérarchie sociale ; enfin, le pouvoir de
contrôle qui l'érige en censeur des actes accomplis par d'autres
organes. Ils détiennent souvent la majorité du capital du
groupement et n'agissent qu'en qualité de mandataire au nom et pour le
compte de la personne morale. Cette dernière, elle seule, exerce la
fonction de propriétaire, d'employeur et de contractant.38
La mission du dirigeant consiste donc, exception faite du cas
des sociétés unipersonnelles, à représenter la
collectivité des associés qui exprime la volonté du
groupement.
En effet, les pouvoirs accordés à ces dirigeants
ne sont pas absolus. Des clauses statutaires peuvent les limiter, notamment
interdire de passer certains actes d'une gravité exceptionnelle, ou
imposer l'autorisation préalable des
34 PETIT B., op.cit, p. 49.
35 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
425.
36 Art 125 à 136 AUSCGIE.
37 Art. 121 et 122 AUSCGIE.
38 REINHARD Y., Droit commercial,
3ème édition, Litec, Paris, 1993, p. 181.
20
associés ou d'un organe de contrôle. Aussi, ils
ne jouissent pas de la pérennité de leurs fonctions : la
révocation de son mandat peut être prononcée par la
collectivité des associés ou par décision judiciaire.
Les actes accomplis de façon inopportune ou
malhonnête par le dirigeant social ne sont pas sanctionnés par la
nullité mais par sa responsabilité personnelle. La
société peut mettre en cause la responsabilité (civile ou
pénale) de ce dirigeant dans les conditions des articles 889 et suivants
de l'Acte uniforme.
Selon les réglementations particulières à
chaque type de société, les associés peuvent nommer des
gérants comme organes de gestion de la
société.39 Ces gérants peuvent être
associés ou non, personnes physiques ou morales40. Ils ont le
pouvoir de représenter la société et d'accomplir tous les
actes entrant dans l'objet social. Leur rémunération est
fixée par les associés.
3. Les commissaires aux comptes
Les commissaires aux comptes sont des organes de
contrôle dont peut se doter une société pour assurer son
fonctionnement, surtout en ce qui concerne ses ressources financières et
sa comptabilité.
En effet, les commissionnaires aux comptes sont des
professionnels chargés aux termes de la loi du contrôle des
sociétés commerciales. Ils sont seuls habilités à
exercer la mission de contrôle légal des comptes.41
La mission du commissaire aux comptes consiste en l'examen des
états financiers de la société en vue de donner une
opinion motivée sur leur régularité, leur
sincérité et leur concordance. Le commissaire aux comptes a pour
rôle permanent de vérifier les valeurs et les documents comptables
et d'en contrôler la conformité aux règles en vigueur. En
d'autres termes, il s'agit d'un examen qui a pour finalité de
vérifier que les règles et les principes qui président
à l'élaboration des états financiers sont respectés
et que ceux-ci présentent une image fidèle du patrimoine et du
résultat de la société. Ce contrôle est aussi
effectué dans un souci de protection du patrimoine de la
société même si l'objectif principal n'est pas de
déterminer les fraudes. Cependant, ces vérifications doivent
exclure toute immixtion dans la gestion. Leur finalité se limite
à la certification des comptes.
Aux termes de l'article 710 AUSCGIE, « le commissaire aux
comptes certifie que les comptes annuels sont réguliers et
sincères et donne une image fidèle du résultat des
opérations de l'exercice écoulé ainsi que de la situation
financière et du patrimoine de la société à la fin
de cet exercice (...) »
39 Art. 276 à 282 pour la SNC, Art. 323
à 332 pour la SARL (AUSCGIE).
40 Dans la SARL, la gérance ne peut pas
être confiée à une personne morale (Art. 323 AUSCGIE).
41 ALISSOUTIN O.K., Principe, objectifs et
pratique du commissariat aux comptes : cas du « Carder Atlantique
Littoral », CESAG, 2004, p. 7.
21
La nomination d'un commissaire aux comptes est obligatoire
dans les sociétés anonymes42contrairement aux SARL
où leur nomination est subordonnée à certaines conditions.
Pour les SARL ne remplissant pas les conditions de l'article 376 AUSCGIE, la
nomination d'un commissaire aux comptes est facultative. En ce qui concerne les
autres formes de société, le droit OHADA n'a pas prévu
l'intervention du commissaire aux comptes. Toutefois, celui-ci peut intervenir
dans un cadre autre que légal pour une mission bien
déterminée.43
Il sied de noter que les dirigeants des sociétés
dans lesquelles il est exigé un commissaire aux comptes et qui de
mauvaise foi auront omis d'en désigner concourent une sanction
pénale selon l'article 897 AUSCGIE. De son coté, l'article 697
cite les incompatibilités liées à la profession de
commissionnaire aux comptes dans les sociétés anonymes.
3. Les salariés
Les salariés constituent une composante essentielle de
l'entreprise considérée en tant que collectivité humaine.
Ce sont des cocontractants et des créanciers de la personne morale
société.
La société doit être un cadre de la
protection de l'emploi, tout comme celui de l'expression de
l'intérêt des salariés et de la mise en place des instances
représentatives du personnel. La relation de travail entre la
société et ses salariés est régie par les
conventions individuelles et collectives ainsi que par les usages
d'entreprises.
Le salarié est donc lié à la
société (son employeur) par un contrat de travail. Ce dernier
détermine la tâche lui confiée et sa
rémunération. L'activité salariée est
exercée sous la dépendance de l'entrepreneur et le lien de
subordination qui en résulte permet de distinguer le salariat des
fonctions accomplies par un professionnel indépendant (agent commercial,
commissionnaire ou courtier). Il est à remarquer que l'absence du
travailleur au sein d'une société est inconcevable car
étant un frein ou un obstacle à la réalisation du but de
la société.
En effet, comme dit ci-haut, le salarié, dans l'analyse
traditionnelle, est essentiellement un créancier de la
société (vue sous l'angle de l'entreprise). Mais on ne saurait
faire abstraction du fait que ce n'est qu'en cas de disparition de la
société, ou de difficultés financières importantes,
qu'une situation particulière est faite aux salariés et que la
créance de salaire fait l'objet d'un traitement privilégié
Cette évolution s'insère dans un courant de pensée
traditionnel, qui ne considère le salarié que comme un
créancier. A en croire Yves REINHARD, cette analyse est manifestement
insuffisante. C'est pourquoi le droit des procédures collectives associe
aujourd'hui étroitement les salariés au
42 Art. 694 AUSCGIE.
43 ALISSOUTIN O.K., op.cit., p. 12.
22
déroulement de la procédure : cette nouvelle
solution annonce un changement de cap.44
De ce qui précède, il est évident que, du
fait que le personnel salarié est partie intégrante de
l'entreprise dans laquelle il travaille, il devient un partenaire de cette
entreprise. L'article 80 du Code du travail précise en effet que «
lorsqu'il y a substitution d'employeur, notamment par cession, succession,
fusion, transformation de fonds, mise en société, tous les
contrats de travail en cours au jour de la substitution subsistent entre le
nouvel employeur et le personnel ». Cette disposition justifie
l'occupation d'une place de choix dans cette matière : le principe
civiliste de l'effet relatif des contrats se trouve écarté et
affirmée l'appartenance du salarié à l'entreprise.
Les groupements de salariés peuvent conclure des
accords collectifs de travail, et les syndicats de salariés sont, par
l'intermédiaire des accords et convention collectifs, à l'origine
de la création du droit du travail.45Les organisations
syndicales de salariés représentatives au plan national ou local
sont habilitées à conclure ces accords et ces conventions qui
peuvent avoir pour champ d'application une branche d'activité et traiter
de l'ensemble des conditions d'emploi, de travail et de garanties sociales.
La présence des salariés au sein de la
société se trouve prolongée de deux façons : par
l'existence d'institutions collectives et par la reconnaissance de droits
individuels. Pour ce qui est des institutions collectives, il faut noter que la
participation des salariés à la vie de la société
est une exigence de la gestion moderne : elle permet aux salariés de
s'organiser et de faire mieux entendre leurs revendications ; elle donne
à l'entreprise les moyens d'utiliser au mieux les compétences et
les avis de ses employés.
Par les institutions collectives, nous voyons la
représentation du personnel et la représentation syndicale.
a) La représentation du personnel
L'élection d'une délégation du personnel
est obligatoire dans toutes les sociétés.46 Les
délégués, élus par les salariés, sont
chargés de présenter à l'employeur toutes les
réclamations individuelles ou collectives portant sur l'application du
droit social dans l'entreprise et de saisir éventuellement l'inspection
du travail. Ils doivent être consultés par l'employeur sur les
horaires de travail, sur les critères généraux en
matière d'embauchage, de licenciement et de transfert des travailleurs,
sur les systèmes de rémunération et de prime,
etc.47
44 REINHARD Y., op.cit, p. 184.
45 Idem.
46 Art. 255, Code du travail.
47 Art. 259, Code du travail.
23
b) La représentation syndicale
L'article 237 du code du travail définit par renvoi
à l'article230 du même code un syndicat comme étant toute
organisation professionnelle constituée en vue de la défense et
le développement des intérêts professionnels des
travailleurs ainsi que le progrès social, économique et moral de
leurs membres.
Les sections syndicales sont donc créées
à l'initiative des syndicats représentatifs et ont pour mission
de représenter leurs adhérents. Elles ne sont pas
mandatées par la collectivité des salariés mais par les
seuls adhérents du syndicat dont elles sont l'émanation.
§4 CLASSIFICATION DES SOCIETES
La classification des sociétés paraît plus
complexe. Pour raison de simplicité, nous avons retenu une
classification fondée d'une part sur le régime juridique
applicable aux différentes sociétés (A), et d'autre part
sur les formes légales des sociétés commerciales.
A. Classification fondée sur le
régime juridique 1. Sociétés civiles et
sociétés commerciales
La mise en oeuvre de la distinction à ce niveau repose
sur deux critères, à savoir la forme (c'est-à-dire la
structure juridique du groupement) et l'objet (c'est-à-dire
l'activité exercée par le groupement).
En fait, on pourrait estimer qu'une société est
civile lorsque son objet est civil, et elle est commerciale lorsque son objet
est un acte de commerce.
Cependant, aux termes de l'article 6 AUSCGIE, le
caractère commercial d'une société est
déterminé par sa forme ou par son objet. La commercialité
d'une société par l'objet suppose que la société
accomplit, conformément aux articles 2 et 3 (définition du
commerçant et énumération des actes de commerce) de l'Acte
uniforme portant sur le droit commercial général, des actes de
commerce et en fait sa profession habituelle. La commercialité par la
forme est acquise lorsque la société, quelque soit son objet,
adopte l'une des formes légales prévues par l'Acte
uniforme.48
Une société est civile lorsque non seulement
elle n'a pas opté pour l'une des formes légales, mais aussi
lorsque son objet est civil.49
48 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
391.
49 Idem, p. 387.
24
2. Sociétés de personnes et
sociétés de capitaux
Les sociétés de personnes, dont l'exemple type
est la SNC, reposent sur la confiance qu'inspire la personne de chaque
associé et présente par la suite quatre caractéristiques
principales : la société trouve sa source dans un contrat
marqué d'un fort intuitu personae (c'est-à-dire que les
associés forment ce type de société en
considération de leurs personnes, parce qu'ils se connaissent et se font
mutuellement confiance) ; elle est en principe dissoute par le
décès ou l'incapacité d'un associé ; chaque
associé est titulaire de parts d'intérêt qu'il ne peut
céder à un tiers qu'avec l'accord de ses coassociés ;
chaque associé répond des dettes de la société sur
l'ensemble de son patrimoine personnel (responsabilité
illimitée). Aussi, tous les associés ont ici la qualité de
commerçant.
Les sociétés de capitaux, par contre, dont
l'exemple type est la SA, reposent sur l'argent que chacun accepte de mettre
dans l'affaire. Les qualités de la personne s'effacent derrière
sa contribution financière, de sorte que non seulement l'intuitu
personae disparait, mais aussi la société survit au
décès ou à l'incapacité de l'un de ses membres.
L'associé (appelé actionnaire) est titulaire non de parts, mais
d'actions librement négociables. Il ne répond pas, au-delà
de son apport, des dettes pesant sur la société
(responsabilité limitée).
En outre, dans les sociétés de capitaux, les
actionnaires sont souvent inconnus du public et s'ignorent de fois
eux-mêmes du fait que leur personnalité ne compte pas.
3. Sociétés personnifiées et
sociétés non personnifiées
La distinction entre sociétés
personnifiées et sociétés non personnifiées permet
d'opposer celles que leur immatriculation au Registre du commerce et du
crédit mobilier (RCCM) rend aptes à agir par elles-mêmes
sur la scène juridique à celles qui, faute d'immatriculation, ne
constituent qu'une organisation conventionnelle des rapports entre
associés.
L'Acte uniforme soumet aujourd'hui à un régime
identique deux types de sociétés dépourvues de
personnalité : les sociétés en participation et les
sociétés de fait (ou créées de fait). Les deux
situations, pourtant, méritent d'être distinguées. La
société en participation est une société qui a
été créée sciemment par des associés qui ont
eu et exprimé l'intention de la faire fonctionner dans l'avenir ;
simplement, les associés sont convenus que cette société
ne serait pas immatriculée et serait en conséquence
dépourvue de personnalité juridique.50
La société créée de fait est, en
revanche, une société dont on découvre après coup,
pour les besoins de la solution d'un litige ou de règlement de certains
intérêts, qu'elle a fonctionné dans le passé, sur le
fondement d'une
50 Art 854 AUSCGIE
25
volonté qui n'a pas été formellement
exprimée et dont on peut même douter qu'elle ait jamais
existé : la société est dans ce cas subie plus que voulue
et le contrat de société est supposé plus qu'il n'est
établi.51
? La Société en participation
L'Acte uniforme réglemente cette forme de
société. Il s'agit d'une société occulte par nature
: chaque associé contracte en son nom personnel et est seul
engagé à l'égard des tiers. Mais si un associé en
participation révèle l'existence de la société,
celle-ci devient ostensible et les tiers peuvent s'en prévaloir.52
C'est une société transparente régie essentiellement
par la volonté des parties. Ainsi les associés conviennent
librement de sa durée, de son objet, des conditions de son
fonctionnement, des droits des associés et de la fin de la
société.53
Cependant, quelques particularités méritent de
retenir l'attention en ce qui concerne le fonctionnement de la
société. Il s'agit surtout des rapports entre associés,
entre ceux-ci et les tiers, la sécurité des uns et des autres
devant être assurée.
Pratiquement, la Société en participation peut,
par la souplesse et la discrétion qu'elle autorise, se prêter aux
utilisations les plus diverses. Cela peut être des banquiers ou des
coproducteurs qui se groupent pour financer une entreprise ou une
réalisation industrielle ou artistique ; cela peut être aussi des
entreprises qui unissent leurs efforts pour concevoir et réaliser un
ouvrage ou se livrer à un investissement d'utilité commune,
etc.
- Constitution :
Sur le fond, la constitution de la société en
participation obéit au droit commun du contrat de société,
auquel renvoie l'article 446.1 du code des contrats et des obligations. D'une
part, la société doit compter au moins deux associés et
d'autre part, les participants doivent faire des apports qui, cependant, se
présentent ici de manière particulière. Il n'est pas
question en effet de transférer la propriété des biens
à la société qui n'a ni personnalité, ni capital,
ni patrimoine. Les associés restent seuls propriétaires de ces
biens qui sont seulement mis à la disposition de la participation,
à moins qu'ils ne conviennent d'en faire l'objet d'une indivision ou que
l'un des associés soit, à l'égard des tiers,
propriétaire de tout ou partie des biens qu'il acquiert en vue de la
réalisation de l'objet social.54 Sur la forme, aucune
condition n'est exigée, mais un acte écrit est ordinairement
établi. Il n'est pas, en revanche, nécessaire à la preuve,
la société pouvant être prouvée par tous
moyens.55
51 PETIT B., op.cit, p. 99.
52 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
630.
53 Art 855 AUSCGIE
54 Art 858 AUSCGIE.
55 Art 854 al 2 AUSCGIE.
26
- Fonctionnement :
Les rapports entre associés sont en principe
abandonnés à la liberté contractuelle, à
défaut d'organisation conventionnelle, ils sont régis par les
dispositions applicables aux SNC.56 Les rapports avec les tiers
passent en principe par l'intermédiaire de l'un des associés ou
du gérant désigné par eux. Celui-ci, cependant, n'est
investi d'aucun pouvoir de représentation : il contracte en son nom
personnel et est seul engagé à l'égard des tiers.57
Ce n'est donc que de manière indirecte et par l'effet du contrat
qui les lie que les autres participants subissent les conséquences des
actes accomplis.
Par exception, un lien direct d'obligation peut se nouer dans
trois hypothèses. Il en est ainsi tout d'abord en cas de
révélation de la participation, c'est-à-dire lorsque les
participants ont agi en qualité d'associés au vu et au su des
tiers : chacun de ceux ayant personnellement agi est alors tenu des actes
accomplis par les autres, solidairement. La même obligation se retrouve
ensuite à la charge de l'associé qui, par son immixtion dans la
gestion, a laissé croire au cocontractant qu'il s'engageait
personnellement à son égard et dont il est prouvé que
l'engagement a tourné à son profit .58 Il sied de
noter enfin que les éléments d'identification de cette
société sont inutiles puisque à l'égard des tiers,
la société est censée ne pas avoir d'existence juridique
et n'a pas de patrimoine propre.59
? La société de
fait60
L'Acte uniforme définit les hypothèses de
société de fait de la manière suivante :
- Lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales se
comportent comme des associés sans avoir constitué entre elles
l'une des sociétés reconnues par l'Acte uniforme61
;
- Lorsqu'une société reconnue par l'Acte
uniforme est constituée au mépris des formalités
légales62;
- Lorsqu'une société constituée n'est pas
reconnue par l'Acte uniforme (une société qui n'épouse
aucune des formes sociales consacrées par l'Acte uniforme) ;
- Lorsqu'une société est constituée sans
acte écrit et ne peut par conséquent être
immatriculée.63
56 Art 856 AUSCGIE.
57 Art 861 AUSCGIE.
58 Art 856 al 4 AUSCGIE
59 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
631.
60 Par « Société de fait », il
faut entendre « société créée de fait »,
même si l'expression « société de fait » est
stricto sensu employée pour désigner une société
annulée, sans rétroactivité, pour cause
d'irrégularité (OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
634 et 420 ; PETIT B., op.cit, p. 102).
61 Art 864 AUSCGIE.
62 Art 865 AUSCGIE.
27
Cette diversité de situations montre bien que le
problème majeur des sociétés créées de fait
est celui de leur existence. Malgré les difficultés de preuve,
une telle société peut toujours être prouvée, comme
celle en participation, par tout moyen64, même dans les
rapports entre associés. Cette règle facilite
considérablement la tâche des intéressés. La
jurisprudence, en outre, accepte d'aller au delà de cette
facilité de preuve en autorisant les tiers à se prévaloir
de la simple apparence d'une société créée de fait,
appréciée globalement et sans qu'il soit nécessaire de
démontrer l'existence effective de différents
éléments constitutifs du contrat de
société.65 Il faut donc établir que les
personnes en cause se sont comportées comme des associés de fait
au vu et au su des tiers.66
Ainsi établie, la société
créée de fait se voit appliquer les règles de la
SNC.67 En réalité, il n'est pas question dans ces
sociétés des règles de fonctionnement car le plus souvent,
les associés ignorent même qu'ils sont en société.
Tantôt, la mise à jour de la société
créée de fait permet de sauvegarder les intérêts des
associés eux-mêmes ou plutôt de l'un d'entre eux, en
l'autorisant à réclamer sa part du profit issu de l'oeuvre
commune ; tantôt les intérêts des tiers qui pourront, sous
certaines conditions, réclamer leur paiement aux différents
membres de la société afin d'engager leur responsabilité
le plus largement possible (le fournisseur pourra ainsi s'adresser non
seulement à l'entrepreneur avec lequel il a traité, mais aussi
à celui qui s'est comporté, en fait, comme l'associé de ce
dernier).68
B. Classification fondée sur les formes
légales des sociétés commerciales
L'Acte uniforme prévoit cinq formes de
sociétés commerciales, à savoir la société
en nom collectif, la société en commandite simple, la
société à responsabilité limitée, la
société anonyme et la société par actions
simplifiée.
1. La Société en Nom Collectif (SNC)
La Société en Nom Collectif et une
société commerciale par la forme regroupant des associés
qui ont tous la qualité de commerçant et qui répondent
indéfiniment et solidairement des dettes sociales.69
Traditionnellement, la SNC a pour vertu principale de
permettre à des commerçants personnes physiques d'unir leurs
efforts au sein d'une structure
63 Art 115 AUSCGIE.
64 Art 861 AUSCGIE.
65 En tout état de cause, la preuve de la
société de fait exige la réunion des
éléments indispensables que sont : les apports réciproques
de biens ou d'activités, une intention nette des parties de s'associer
en vue d'une opération commerciale, et enfin l'intention de participer
également aux bénéfices et aux pertes. (Cour
Suprême du Cameroun, Arrêt n° 85/CC du 7 juin 1973, in
Revue camerounaise de Droit n° 9, p. 62.)
66 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
634.
67 Art 868 AUSCGIE.
68 PETIT B., op.cit, p. 103.
69 Art 270 AUSCGIE.
28
souple et fermée. Elle constitue la
société de personne par excellence, qui est librement
organisée par ses membres et scellée par une confiance
génératrice d'un intuitu personae qui interdit en principe aux
tiers d'y prendre pied.70 Elle est la plus commerciale des
sociétés commerciales et la mieux adaptée aux petites et
moyennes entreprises.71
La constitution de la SNC ne présente que très
peu d'originalité par rapport au régime du droit commun des
sociétés, et spécialement des sociétés de
personnes. La principale spécificité tient à la
capacité : tous les associés doivent nécessairement
remplir les conditions nécessaires à l'acquisition de la
qualité de commerçant, ce qui exclut notamment, outre les mineurs
et les majeurs incapables, les personnes frappées d'interdiction ou
d'incompatibilité, voire, dans une certaine mesure, les
étrangers.
Il existe des règles spécifiques à cette
forme de société : la société doit compter au moins
deux associés, ceux-ci peuvent effectuer des apports en industrie, aucun
capital minimal n'est exigé, la présence d'un commissaire au
compte est facultative.
2. La Société en Commandite Simple (SCS)
La société en commandite simple, peu
utilisée en pratique, est une société commerciale par la
forme qui présente une double spécificité juridique. Elle
est tout d'abord une société hybride qui n'entre que
partiellement dans la catégorie des sociétés à
risque illimité. Elle regroupe en effet deux catégories
d'associés : d'une pat les commandités qui ont le statut
d'associés en nom, qui sont personnellement commerçants et qui
sont obligés indéfiniment et solidairement aux dettes sociales ;
et d'autre part les commanditaires, bailleurs de fonds, pour qui le risque est
limité au montant de leurs apports.72
Seuls les commandités gèrent la
société.73 La considération de la personne des
commanditaires est moins importante que celle des commandités. Raison
pour laquelle la cessibilité de leurs parts sociales est plus facile et
la société peut en principe continuer malgré leur
décès.
Pour la constitution de la SCS, les associés doivent
être au moins deux : un commandité et un commanditaire, les
commanditaires devant remplir les conditions nécessaires à
l'acquisition de la qualité de commerçant. En revanche, la
situation de commanditaire est ouverte même aux incapables dûment
représentés.74
En ce qui concerne le capital, aucun minimum n'est
exigé. Il faut noter enfin que la principale différence entre
associés commandités et associés
70 PETIT B., op.cit, p. 110.
71 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
468.
72 Art 293 AUSCGIE.
73 Art 298 AUSCGIE.
74 PETIT B., op.cit, p. 116.
29
commanditaires est relative à l'obligation aux dettes
sociales, qui pèse sur les premiers et épargne les seconds.
3. La Société à Responsabilité
Limitée (SARL)
La SARL est une société commerciale par la
forme constituée par un ou plusieurs associés qui ne sont
responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs
apports.75
La SARL a l'avantage de permettre à ses
associés de se livrer à une exploitation commerciale sans prendre
personnellement la qualité de commerçant. Cette
société peut être constituée par une personne
physique ou morale. Elle peut donc être soit pluripersonnelle, soit
unipersonnelle.
L'étude des règles de constitution,
d'organisation, de fonctionnement et de dissolution de la SARL laisse
apparaître que celle-ci emprunte comme par la passé ses
caractéristiques à la fois aux sociétés de
personnes et aux sociétés de capitaux. Par assimilation aux
premières, la société est fondée sur l'intuitu
personae et dès lors, la personne de l'associé est
prépondérante. En outre, le capital de la société
est divisé en parts sociales en principe cessibles dans des conditions
strictement énumérées par la loi. Enfin, la gestion de la
société est confiée à un
gérant.76
Par assimilation aux sociétés des capitaux, la
SARL se rapproche à ces dernières sur plusieurs points : les
associés n'ont pas la qualité de commerçant ; ils ne sont
responsables du passif social qu'à concurrence de leurs apports ; la
survenance d'un événement atteignant personnellement un
associé tel que le décès, la faillite ou
l'incapacité est, en principe, sans effet sur la
société.77
Tel qu'on peut le remarquer, point n'est besoin de rappeler
que la SARL paraît être une société hybride par
nature, du point de vue fonctionnement en général, car on y
trouve des aspects des sociétés des personnes et ceux des
sociétés des capitaux. Aussi faudra-t-il noter la fixation par la
loi d'un capital social minimum (Un million de francs CFA).78
4. La Société Anonyme (SA)
L'article 385 AUSCGIE définit la SA comme une «
société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des
dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits des
actionnaires sont représentés par des actions ».
Cet article ajoute une précision selon laquelle la
société anonyme peut ne comprendre qu'un seul actionnaire.
75 Art 309 AUSCGIE.
76 OHADA, Traité et actes, op.cit, p.
481.
77 Idem.
78 Art 311 AUSCGIE.
30
A en croire Bruno PETIT, il s'agit en fait d'une
société de capitaux et d'une société par actions
qui se sépare de la SARL sur deux point : d'une part, elle est
composée d'actionnaires dont la personnalité importe peu ;
d'autre part, les titres émis en représentation de son capital
sont en principe librement négociables.79
D'une manière générale, la SA
présente un certain nombre de traits caractéristiques
:
- c'est une société à risque
limité : les actionnaires ne supportent les pertes sociales qu'à
concurrence de leurs apports ;
- c'est une société de capitaux : le capital
apporté compte plus que la personne qui l'apporte, et en ce sens,
l'actionnaire s'efface derrière l'action ;
- c'est une société par actions : elle
émet des valeurs mobilières qui comprennent des titres
nécessaires au financement de leurs activités (actions et
obligations)80 ;
- cette société peut être
constituée par un seul associé (appelé actionnaire)
;
- un capital social minimum est fixé.81
5. La Société par Actions Simplifiée
(SAS)
Aux termes de l'article 853-1 AUSCGIE, « la
société par actions simplifiée est une
société instituée par un ou plusieurs associés et
dont les statuts prévoient librement l'organisation et le fonctionnement
de la société sous réserve des règles
impératives du présent livre. Les associes de la
société par actions simplifiée ne sont responsables des
dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et leurs droits sont
représentés par des actions ».
La SAS présente trois caractéristiques essentielles
:
- elle est une société par actions distincte de
la SA, mais dont le régime est a priori défini par renvoi aux
règles applicables à celle-ci. Elle est soumise à des
règles de fonctionnement très souples ;
- de très importantes dérogations sont ou
peuvent être apportées à ces règles puisque
l'organisation de la SAS est pour l'essentiel abandonnée à la
liberté contractuelle et donc à l'imagination des
rédacteurs des statuts. Elle offre donc aux associés une grande
liberté d'organisation ;
- c'est une société pouvant être
instituée par une seule personne ;
- les associés ont une responsabilité
limitée.
79 PETIT B., op.cit, p. 154.
80 Les actions sont émises à l'occasion
d'un apport fait à la société et confèrent à
leur titulaire un droit d'associé, tandis que les obligations sont
émises à l'occasion d'un prêt consenti à la
société et confèrent à leur titulaire un simple
droit de créance à l'encontre de celle-ci.
81 Art 387 AUSCGIE.
31
De toute évidence, la grande souplesse d'organisation
et de fonctionnement de la SAS constitue son principal avantage, puisqu'elle
peut facilement s'adapter aux souhaits des associés fondateurs. Il faut
noter que la plupart des règles concernant les sociétés
anonymes sont applicables à la SAS, à l'exception des articles
énumérés par l'article 853-3 AUSCGIE ; et ceci dans la
mesure où ces règles sont compatibles avec les dispositions
particulières à la SAS prévues par le livre 4-2 de
l'AUSCGIE.82
En outre, à la différence de la SA, la SAS reste
privée de la faculté de faire publiquement appel à
l'épargne.83
L'addition en janvier 2014 des caractéristiques de la
SAS à l'Acte uniforme fait de cette dernière une
société à part, qui a tout pour séduire les milieux
économiques et dont l'existence est en elle-même porteuse de
subversion : qu'on s'en réjouisse ou qu'on le déplore, elle
apparaît comme le moyen légal d'éluder bon nombre des
règles applicables aux autres formes sociales et spécialement
à la SA.
SECTION II NOTION DE CONTRAT ET DE CONFLIT DE
TRAVAIL
Au cours de cette section nous allons d'abord définir
le contrat de travail, fixer les éléments qui le
caractérisent, évoquer les parties qui y interviennent et le
distinguer d'autres types des contrats qui lui sont voisins (§1), avant
d'expliciter la notion de conflit de travail (§2). Il est en outre
très important de préciser la compréhension du terme
« contrat en cours » (§3).
§ 1 CONTRAT DE TRAVAIL
A. Définition
A en croire Micheline JAMOULLE, le contrat de
travail est un contrat par lequel le travailleur s'engage contre
rémunération à fournir un travail dans un état de
subordination vis-à-vis de l'employeur.84
CAMERLYNCK et LYON CAEN définissent de leur part le
contrat de travail en ces termes : « Le contrat de travail s'analyse comme
la convention par laquelle une personne s'engage à mettre son
activité à la disposition d'une autre, sous la subordination de
laquelle elle se place, moyennant une
rémunération.85
82 Art 853-3 AUSCGIE
83 Art 853-4 AUSCGIE.
84 JAMOULLE M., Le contrat de travail, Tome 1,
FDESSL, Liège, 1982, p. 137.
85 CAMERLYNCK G.H et LYON-CAEN G., Droit du
travail, Dalloz, Paris, 1976, p. 76.
32
Quant à la loi congolaise en matière du travail,
notamment la loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant code du Travail,
le contrat de travail est toute convention, écrite ou verbale, par
laquelle une personne, le travailleur, s'engage à fournir à une
autre personne, l'employeur, un travail manuel ou autre sous la direction et
l'autorité directe ou indirecte de celui-ci et moyennant
rémunération (Article 7 point c).
B. Eléments caractéristiques
Des définitions évoquées supra
découlent trois éléments caractéristiques d'un
contrat de travail qui méritent d'être brièvement
analysés. Il s'agit du lien de subordination, de la prestation de
travail et de la rémunération.
1. Le lien de subordination
Le contrat de travail constitue un mécanisme
débouchant sur une situation d'inégalité, sur une position
de subordination. A la différence du travailleur indépendant, le
salarié accepte de se placer sous l'autorité de son
employeur.86 La subordination implique un pouvoir de direction
accordé à l'employeur. Corrélativement, elle suppose que
le travailleur soit tenu d'obéir aux ordres qui émanent
directement ou indirectement de son contractant.87
Il sied donc de noter que la subordination est
l'élément essentiel du contrat de travail, qui différencie
les salariés des travailleurs indépendants. Cependant, cette
subordination ne porte pas atteinte à l'indépendance du
travailleur sur le plan technique ou professionnel.
2. La prestation de travail
Il s'agit de l'activité qu'un salarié s'engage
à fournir. La tâche que s'engage à fournir le
salarié peut revêtir les formes les plus diverses, être
physique, intellectuelle ou même artistique ; elle peut émaner
d'un manoeuvre, d'un comptable ou d'un ingénieur, etc.
L'engagement essentiel du salarié réside dans
une obligation de faire, dans l'exigence d'un comportement. La prestation doit
être personnelle et librement consentie, c'est-à-dire qu'elle doit
être exécutée par le travailleur lui-même.
Il faut donc noter ici que n'importe quelle activité,
quelle que soit sa nature, peut donner lieu à un contrat de travail,
pourvu qu'il s'agisse d'un comportement licite.88
86 CAMERLYNCK G.H et LYON-CAEN G., op.cit, p.
77.
87 JAMOULLE M., op.cit, p. 147.
88 Idem, p. 140.
33
3. La rémunération
Dans les rapports entre les deux parties, l'obligation
essentielle de l'employeur réside dans le paiement d'une
rémunération ou d'un salaire, déclarée constituer
la contrepartie de la prestation de travail. Le contrat de travail est un
contrat à titre onéreux. Le salaire constitue donc le prix du
travail.
C. Les parties au contrat de travail
Il s'agit de l'employeur d'une part, et du travailleur d'autre
part.
1. L'employeur
L'employeur est toute personne physique ou morale, de droit
public ou privé, qui utilise les services d'un ou de plusieurs
travailleurs en vertu d'un contrat de travail (Article 7 point b, Code
du travail).
Le mot employeur revêt d'un sens plural ou plutôt
large. Il peut désigner à la fois le chef d'entreprise, les
dirigeants, l'employeur initial ou l'employeur substitué. Si le
travailleur est tenu d'exécuter personnellement son travail, l'employeur
peut se substituer par d'autres personnes. C'est pour cette raison que la
substitution d'un employeur ne met pas fin aux contrats de travail
en cours.89
2. Le travailleur
L'article 7 point a du code du travail définit
le travailleur comme toute personne physique, en âge de contracter, quels
que soient son sexe, son état civil et sa nationalité, qui s'est
engagée à mettre son activité professionnelle, moyennant
rémunération, sous la direction et l'autorité d'une
personne physique ou morale, publique ou privée, dans les liens d'un
contrat de travail.
Le mot travailleur a plusieurs synonymes : salarié,
ouvrier ou employé.
D. Distinction entre contrat de travail et contrats
voisins
Après avoir cerné la notion du contrat de
travail, il est possible de déterminer la situation qu'il occupe dans
l'ensemble du champ contractuel et d'établir les relations de
distinction, d'incompatibilité ou de cumul qu'il peut entretenir avec
les autres contrats.
1. Contrat de travail et contrat d'entreprise
Seule l'absence d'une subordination
personnelle et constante distingue le contrat d'entreprise de celui du travail.
Il en résulte que l'objet du contrat d'entreprise doit être
directement recherché dans le travail déterminé que
l'entrepreneur s'engage à exécuter librement et non pas dans une
force de travail dirigée par le contractant.
89 Article 80, Code du travail.
34
Le contrat d'entreprise, tout en ignorant le pouvoir
d'organisation globale que possède l'employeur vis-à-vis du
salarié, s'accommode de directives générales
données par le maître de l'ouvrage ainsi que d'instructions quant
à la nature et à l'étendue des travaux
contractuels.90
Il sied de noter que contrairement au contrat de travail,
l'entrepreneur reste indépendant dans l'exécution de son travail.
Il n'est pas en lien de subordination.
2. Contrat de travail et contrat de
société
Le contrat de société se caractérise par
deux éléments : la mise en commun d'apports
réalisée par deux ou plusieurs personnes dans un esprit de lucre
et la participation de ces personnes aux pertes. A ces éléments
s'ajoute traditionnellement l'affectio societatis, qui est l'intention
de collaborer de manière active, égalitaire et
intéressée. En principe, comme de tels éléments ne
sont pas présents dans le contrat de travail, la distinction
s'opère aisément.
3. Contrat de travail et contrat de mandat
Des liens ont toujours existé entre
contrat de travail et contrat de mandat. Selon la doctrine traditionnelle, le
mandat doit se distinguer du contrat de travail par l'objet contractuel : le
mandat concerne de façon essentielle, l'accomplissement d'actes
juridiques, alors que le contrat de travail ne permet qu'une activité
matérielle, qu'elle soit de caractère intellectuel ou
manuel91
Si le mandataire est indépendant dans
l'exécution de son mandat, le travailleur, lui, est sous le lien de
subordination. De plus, le mandant peut retirer à tout moment le mandat
confié, mais l'employeur ne peut pas licencier le travailleur à
tout moment et sans motif.
4. Contrat de travail et professions libérales
On ne le dira jamais assez, dans le contrat de travail, il y
a lien de subordination, tandis que dans les professions libérales, le
professionnel est indépendant.
5. Contrat de travail et contrats d'apprentissage, de
stage et de formation professionnelle
L'apprenti, tout comme le stagiaire, est dans un lien de
subordination avec son maître. Mais, d'une manière
générale, le but des formateurs est de faciliter l'insertion
professionnelle des apprentis et d'assurer la formation pratique du stagiaire.
Aussi, la rémunération, élément
caractéristique du contrat
90 JAMOULLE M., op.cit, p. 194.
91 CLESSE J., Congé et contrat de
travail, Collection scientifique de la faculté de Droit de
Liège, Liège, 1992, p. 69.
35
de travail, peut faire défaut ici. C'est pourquoi, le
contrat de stage n'est pas un contrat de travail.
§2 CONFLITS DE TRAVAIL
Les conflits existent toujours dans les entreprises. Ils sont
inévitables entre les patrons et les salariés pour autant que
d'une part l'appétit de chacun des deux camps est plus ou moins
insatiable, alors que les moyens de les satisfaire sont nécessairement
limités et d'autre part, il est fatal que certains commandent et
d'autres obéissent. Cette loi de la vie sociale soulève par
elle-même dans l'organisation complexe de toute société
industrielle, des oppositions d'intérêt que l'on peut rendre
tolérables, mais qu'il n'est jamais possible d'éliminer
totalement.92 Ces conflits peuvent être collectifs ou
individuels.
A. Litiges individuels de travail
1. Notions
Si l'on en croit MUKADI BONYI, l'exécution d'un
contrat de travail conclu entre l'employeur et le travailleur peut se
dérouler sans heurt depuis la date de la conclusion jusqu'au moment
où le travailleur prend sa retraite. Mais il n'est pas rare que cette
exécution soit émaillée d'incidents qui affectent la
carrière du travailleur. On assiste dans ce cas à la naissance
des litiges individuels de travail.93
Le litige individuel est un conflit survenant entre un
travailleur et son employeur à l'occasion de l'application de la
réglementation du travail. Au sens large, le litige individuel oppose un
ou plusieurs travailleurs à l'employeur au sujet du respect pour ce
dernier d'une disposition légale ou conventionnelle dont la violation
est sanctionnée par les tribunaux spécialisés en
matière du travail.
Il sied de noter que le fait générateur d'un
litige individuel n'est rien d'autre que la divergence des points de vue entre
l'employeur et le travailleur concernant les conditions du travail.
2. Règlement
L'article 298 du code du travail prescrit que les litiges
individuels ne sont pas recevables devant le Tribunal du Travail s'ils n'ont
été préalablement soumis à la procédure de
conciliation, à l'initiative de l'une des parties, devant l'Inspecteur
du Travail du ressort.
92 MUKADI BONYI, Droit du travail, CRDS,
Bruxelles, 2OO8, p. 603.
93 Idem, p. 633.
36
Cette disposition montre que le règlement des litiges
individuels suppose tout d'abord le respect préalable d'une phase
administrative et ensuite, en cas d'échec de la première phase,
l'initiation d'une phase judiciaire.
a) La phase administrative ou la conciliation
préalable
Cette phase se déroule devant l'inspecteur du travail
suivant un certain nombre des modalités. Elle revêt deux
caractères : obligatoire et préalable.
Avant de saisir le Tribunal compétent, la partie qui
prend l'initiative doit saisir d'abord l'inspecteur du travail en lui adressant
une plainte conformément à la loi. L'inspecteur du travail
convoque la partie adverse pour procéder à l'échange de
vue sur l'objet du litige et pour vérifier si les parties sont
disposées à se concilier.94 Cette phase est
sanctionnée par un procès verbal (PV) de conciliation ou de
non-conciliation.
Lorsque les parties se mettent d'accord, il sera
dressé un PV de conciliation. Par contre, si elles ne se mettent pas
d'accord, l'inspecteur dresse un PV de non conciliation. Si l'une des parties
n'a pas répondu à la convocation de l'inspecteur du travail, il
est dressé un PV de carence valant PV de non conciliation. C'est ce PV
de non conciliation qui ouvre la voie à la phase judiciaire.
b) La phase judiciaire
En cas d'échec de la phase administrative, le litige
peut être soumis au Tribunal du Travail.95 Le Tribunal ne peut
être saisi que si la procédure de conciliation a été
sanctionnée par un PV de non conciliation et le cas
échéant, par un PV de carence.
B. Conflit collectif de travail
1. Notions
Est réputé conflit collectif du travail, tout
conflit survenu entre un ou plusieurs employeurs d'une part, et un certain
nombre de membres de leur personnel d'autre part, portant sur les conditions de
travail, lorsqu'il est de nature à compromettre la bonne marche de
l'entreprise ou la paix sociale.96
Le moins que l'on puisse dire est que les conflits collectifs
touchent aux intérêts d'un groupe des travailleurs au sujet des
conditions du travail, et que ce conflit est susceptible de provoquer de
l'imbroglio au sein de l'entreprise.
94 Article 300, Code du Travail.
95 Article 302, Code du Travail.
96 Article 303, Code du Travail.
37
2. Règlement
Le conflit collectif du travail peut être
réglé soit par négociation entre parties, soit par
l'intervention d'un tiers ou d`une décision de justice. La loi
prévoit deux procédures de règlement de ce conflit,
à savoir la procédure conventionnelle et la procédure
légale.
a) La procédure
conventionnelle97
Elle comporte deux étapes : la conciliation et
l'arbitrage. ? La conciliation
A ce niveau les travailleurs représentés et
l'employeur se mettent autour d'une table pour tenter de trouver un terrain
d'entente. Cette procédure est menée par les parties
elles-mêmes sans le concours de l'inspecteur du travail.
A l'issue de la conciliation, soit un compromis a
été trouvé, soit un désaccord a eu lieu. Dans tous
les deux cas, un PV doit être dressé. S'il s'agit d'un accord, la
conciliation est réglée. Mais s'il s'agit d'un désaccord,
le conflit sera soumis à l'arbitrage, avec le PV de non conciliation.
? L'arbitrage
L'arbitre est choisi par accord entre parties ou selon les
modalités prévues dans la convention collective.98
L'arbitre désigné ne statue que sur ce qui est prévu
dans le PV de non conciliation. La sentence arbitrale doit être
motivée et s'impose aux parties. En cas d'échec à cette
étape, les parties sont obligées de recourir à la
procédure légale.
b) La procédure
légale99
Cette procédure comporte également deux
étapes : la conciliation devant l'inspecteur du travail ainsi que la
médiation.
? La conciliation devant l'inspecteur du
travail
Cette conciliation est menée à ce niveau par
l'inspecteur du travail, saisi par la partie diligente ou d'office dès
qu'il a connaissance de ces conflits. Comme toute conciliation, il y a deux
issues possibles : accord ou désaccord. En cas de non conciliation,
totale ou partielle, le conflit est obligatoirement soumis à la
procédure de médiation. A cet effet, l'inspecteur du travail doit
soumettre le dossier à qui de droit.
97 Articles 304 à 306, Code du Travail
98 La convention collective est un accord écrit
relatif aux conditions et aux relations de travail conclu entre un ou plusieurs
employeurs ou syndicats d'employeurs et un ou plusieurs syndicats des
travailleurs (Articles 272 à 296, Code du Travail).
99 Articles 307 à 315, Code du Travail.
38
? La médiation
L'inspecteur du travail transmet dès lors le dossier
dans les 48 heures au Gouverneur de province lorsqu'un ou plusieurs
établissements situés dans une seule province sont
concernés, ou au Ministre du travail lorsque plusieurs
établissements d'une même entreprise ou plusieurs entreprises
situées dans plusieurs provinces sont concernés.
L'autorité saisie constitue une commission
spéciale de médiation, dont la composition doit être
bipartite et présidée par le président du Tribunal de paix
du ressort ou son délégué. Le président est
assisté par un assesseur employeur et un assesseur travailleur,
désignés par leurs organisations professionnelles, lesquels
doivent être étrangers à l'établissement
concerné.
A l'issue de la médiation, un PV est établi et
signé par les membres de la commission et les parties
représentées, et cela en cas d'accord. S'il s'agit de
désaccord, la commission formule des recommandations motivées,
lesquelles sont immédiatement communiquées aux parties. A leur
tour les parties ont sept jours francs pour réagir à ces
recommandations.
Si le désaccord persiste, les conflits seront
portés devant les tribunaux du travail.
Ce qui précède était une procédure
pacifique de règlement des conflits collectifs de travail. Il arrive
souvent que les conflits ne soient pas réglés à l'amiable,
et on recourt généralement à des solutions non pacifiques,
telles que la grève (cessation collective et concertée du travail
par le personnel de l'entreprise)100 et le lock-out (mesure de
fermeture temporaire de l'entreprise décidée par l'employeur
à l'occasion d'un conflit collectif de travail)101.
§3 CONTRAT EN COURS
La notion de contrat en cours, même si elle implique une
certaine référence aux effets du contrat, n'a pas fait l'objet
d'une définition explicite de la part du législateur. Même
dans les matières où il y est expressément fait
référence, elle n'est pas définie. Par exemple, l'article
80 du Code du Travail se contente de faire uniquement référence
au « contrat de travail en cours » sans en donner ni les conditions,
ni une signification détaillée.
On sait, malgré tout, conformément au droit
commun et comme le révèle à juste titre un
auteur102, que la condition qu'un contrat soit en cours exige la
réunion de deux critères cumulatifs. Le contrat doit, d'abord,
être en cours d'existence (A), puis, en cours d'exécution (B).
100 Article 315, Code du travail.
101 CAMERLYNCK G.H et LYON-CAEN G., op.cit, p. 684.
102 JOUFFIN V.E., Le sort des contrats en cours dans les
entreprises soumises à une procédure collective, LGDJ, Paris,
1998, p. 137.
39
A. Un contrat en cours d'existence
La question de la détermination de ce qu'est un contrat
en cours d'existence est d'une importance capitale au regard de la place et du
rôle du contrat dans le processus de la disparition d'une
société. Pour être en cours d'existence, le rapport
contractuel doit réunir deux caractéristiques. Il doit d'abord
exister et ce, antérieurement à l'opération de disparition
concernée (Dissolution, liquidation ou procédure collective de
liquidation des biens). Le contrat doit, en outre, n'avoir pas pris fin
à la date de la réalisation définitive de
l'opération.
Le contrat en cours d'existence, c'est donc le contrat en
vigueur au jour de l'opération menant à la disparition de la
société (l'employeur), dès lors qu'il réunit tous
les critères nécessaires à sa validité. Lorsqu'un
contrat est frappé d'une résiliation, résolution ou
annulation, et ce, avant que la société n'entre dans la
procédure tendant à sa disparition, il est évident qu'il
n'est plus en cours. Il en est de même dans l'hypothèse où
un contrat à durée indéterminée fait l'objet d'une
dénonciation régulière.
B. Un contrat en cours d'exécution
De façon générale, on
peut entendre par contrat en cours d'exécution, le contrat dont
l'exécution n'est pas achevée103à la date de la
décision soit de dissolution, soit liquidation, soit encore de la
procédure collective de liquidation des biens.
Il se pose dès lors la question de savoir si un contrat
en suspension104 au jour de l'ouverture de l'opération menant
à la disparition de la société peut être
considéré comme étant en cours d'exécution.
Il faut dire, en effet, qu'on confond souvent, en pratique, le
contrat suspendu et le contrat éteint. Le contrat est éteint
lorsqu'il a définitivement cessé de produire ses effets. C'est un
contrat qui n'existe plus. Or, il n'en est rien de tout ceci lorsqu'il s'agit
du contrat suspendu. Ce dernier constitue un rapport de droit non encore
dissout. Un tel événement est, en général, la
résultante d'une impossibilité d'exécution provisoire,
c'est-à-dire en quelque sorte d'une perturbation momentanée
affectant la relation contractuelle.105
De toute évidence, un contrat suspendu, étant
différent d'un contrat éteint, doit être
considéré comme en cours d'exécution. Il faut
établir que
103 ALBORTCHIRE A., Le sort des contrats dans les
opérations de fusion et de scission de sociétés
commerciales, Thèse, Université d'Auvergne - Clermont-Ferrand
I, 2005, p. 111.
104 Un contrat suspendu est celui dont l'exécution des
prestations est provisoirement mise en veille. Le lexique des termes juridiques
définit la suspension comme une interruption momentanée des
effets du contrat sans qu'il y ait rupture. Par exemple la grève, la
maladie, la maternité et les congés suspendent le contrat de
travail (Lexique des termes juridiques, 13ème
éd., Dalloz, 2001, p. 531).
105 ALBORTCHIRE A., op.cit, p. 114.
40
lorsque disparaitront les causes de sa suspension, ses effets
réapparaitront. Ce qui impliquera réapparition des obligations
des parties.
Il sied de noter en définitive que tout contrat de
travail, dès lors qu'il comporte encore quelques obligations, doit
être appréhendé comme étant en cours. L'essentiel
est que son objet ne soit pas totalement réalisé ou que son terme
ne soit pas arrivé. Le fait qu'une seule des parties (employeur ou
travailleur) demeure tenue de certaines obligations suffit à
considérer que ledit contrat reste en cours d'exécution.
CHAPITRE DEUXIEME
IMPACT DE LA DISPARITION DE LA SOCIETE
SUR L'ACTIVITE CONTRACTUELLE
La vie d'une société sous-entend toujours des
personnes employées pour faciliter la marche et l'accomplissement des
objectifs de cette société. Ces personnes sont employées
sous un contrat de travail. Aussi, il est plus ou moins fréquent que
l'on assiste à des conflits naissant de ce contrat, suite à des
oppositions d'intérêts et des points de vue rencontrées
dans la vie sociale ou professionnelle, ainsi qu'à
l'inégalité observée dans les relations entre les deux
parties au contrat (travailleur et employeur).
Les causes de ces conflits peuvent être par exemple la
réclamation des arriérés de salaire, la réclamation
du décompte final en cas de résiliation, de cessation ou
d'expiration du contrat de travail, les contestations naissant du licenciement,
la démission du travailleur, la réclamation des indemnités
de fin de contrat avant l'échéance convenue, etc.
En effet, l'activité contractuelle peut être
menacée ou plutôt confrontée à certains
problèmes parmi lesquels la disparition de la société qui
nous préoccupe ici. Cette disparition ne survient pas d'un coup mais
c'est tout un processus. Les étapes de cette disparition peuvent
être la dissolution, la liquidation ou encore la procédure
collective de liquidation des biens si elle a été
prononcée. Le souci majeur de ce chapitre est de déterminer le
sort du contrat de travail lorsque la société débute le
processus de sa disparition. Aussi sera-t-il question de savoir comment les
conflits de travail, tournant surtout sur la réclamation des
créances des salaires, seront résolus.
C'est pourquoi les lignes qui suivent s'efforceront de situer
le sort des travailleurs ainsi que celui de l'activité contractuelle en
général, d'abord dans la phase de dissolution de la
société (section 1), ensuite dans la phase de liquidation de
celle-ci (section 2) et enfin dans la procédure collective de
41
liquidation des biens, si ce cas particulier a
été prononcé comme cause de disparition de la
société (section3).
SECTION 1 LA DISSOLUTION DE LA SOCIETE
Pour qu'une société disparaisse, il faut tout
à la fois que l'acte juridique créateur du groupement cesse de
produire ses effets et que le groupement lui-même cesse d'exister sur la
scène juridique : à la résiliation du contrat vient
s'ajouter la dissolution de la personne morale
société.106 Cependant, aux termes de l'article 201 de
l'AUSCGIE, la personnalité morale de la société subsiste
lors de la dissolution pour les besoins de la liquidation et jusqu'à la
clôture de celle-ci.
Pour mieux comprendre l'impact que peut avoir la dissolution
de la société sur les contrats et les conflits de travail en
cours, il est nécessaire de saisir au préalable la notion
même de dissolution y compris ses causes (§1) avant de parler des
effets de cette dernière sur la société elle-même
ainsi que sur les travailleurs (§2).
§1 NOTION DE DISSOLUTION
A. Définition
L'acte uniforme ne définit pas expressément la
dissolution, mais limite à en donner les causes. C'est pourquoi le
recours à la doctrine s'avère très nécessaire pour
permettre une claire compréhension.
D'après Alioune DIEYE, la dissolution est l'acte qui
constate ou prononce la disparition de l'être social et qui
entraîne la liquidation du patrimoine de la
société.107
Quant à Joseph ISSA-SAYEGH, la dissolution est le
dénouement du lien juridique qui unissait les
associés.108
D'une manière générale, toute la doctrine
en la matière s'accorde à donner à la dissolution le sens
d'une décision des associés ou de la justice qui prononce ou
constate la fin de la société et ordonne la liquidation de
celle-ci.
Lorsque les associés conviennent de mettre fin à
l'activité de la société de leur plein gré, on
parle de la dissolution volontaire. Mais lorsque la décision de
dissolution est prononcée par le juge, soit à la demande d'un
associé, de tout autre intéressé ; soit d'office, on parle
de la dissolution judiciaire.
106 PETIT B., op.cit, p. 39.
107 DIEYE A., Le régime juridique des
sociétés commerciales et du GTE dans l'espace OHADA,
4ème édition, Cabinet AZIZ DIEYE, 2014, p. 108.
108ISSA-SAYEGH J., « Présentation des
dispositions sur la dissolution et la liquidation des sociétés
commerciales »,
Ohada.com, Ohadata D-06-15, p.
2.
42
Plusieurs raisons peuvent justifier la dissolution
entraînant en principe la disparition de la personne morale de la
société.
B. Causes
Il existe des causes de dissolution communes à toutes
les sociétés ainsi que celles particulières à
chaque forme de société.
I. Causes communes
L'article 200 AUSCGIE énumère sept causes
générales de dissolution applicables à toutes les
sociétés. Il s'agit de :
- L'expiration de la durée ;
- La réalisation ou l'extinction de l'objet ;
- L'annulation du contrat de société
;
- La décision des associés aux conditions
prévues pour modifier les
statuts ;
- La dissolution anticipée prononcée par la
juridiction compétente, à la
demande d'un associé pour justes motifs, notamment en
cas
d'inexécution de ses obligations par un associé ou
de mésentente entre
associés empêchant le fonctionnement normal de la
société ;
- L'effet d'un jugement prononçant la liquidation des
biens de la société ;
- Toute autre cause prévue par les statuts.
Il faut noter que certaines de ces causes sont de plein droit
(1°et 2°) ; d'autres sont volontaires (4°et 7°) ; et
d'autres encore sont forcées ou accidentelles (3°,5° et
6°).
1°) L'expiration de la durée
La société a toujours été
constituée pour une durée, et en droit OHADA, la durée
maximale est de 99 ans.109 Il va donc de soi que lorsque la
société est constituée pour une durée moindre (5
ans par exemple), elle puisse prendre fin à l'expiration de ce
délai.
Aux termes de l'article 200-1° de l'AUSCGIE, la
société prend fin « par l'expiration du temps pour lequel
elle a été constituée », c'est-à-dire
lorsqu'elle arrive au terme de sa durée statutaire. L'arrivée du
terme constitue donc une cause de plein droit de la société ;
c'est ce qui ressort de l'article 30 de l'AUSCGIE. Il s'agit, à en
croire Bruno PETIT, d'une dissolution automatique et irrémédiable
qui peut se révéler des plus inopportunes.110 C'est
pourquoi il est possible, sinon de revenir en arrière, du moins de
prévenir l'événement en décidant à l'avance
d'une augmentation de la durée de la société. Cette
109 Art. 28 AUSCGIE. 110PETIT B., op.cit., p.
40.
43
augmentation ne peut résulter que d'une décision
expresse (et en principe unanime) des associés, appelée «
prorogation ».
En effet, un an au moins avant la date d'expiration de la
société, les associés doivent être consultés
à l'effet de décider si la société doit être
prorogée.111 Cette consultation est faite à
l'initiative des dirigeants qui encourent une responsabilité s'ils
omettent de le faire et causent ainsi un préjudice.112 A
défaut de consultation par les dirigeants, tout associé peut
obtenir en justice la désignation d'un mandataire chargé de
provoquer cette consultation.113
Si les associés n'ont pas augmenté la
durée de vie de la société, au moins un an avant
l'arrivée du terme, par une décision prise à
l'unanimité, celle-ci sera dissoute de plein
droit.114Cependant, si la société continue quand
même de fonctionner alors qu'elle devrait être fermée, elle
sera considérée comme une « société de fait
» et ne sera plus dotée de la personnalité juridique. Seuls
les statuts continueront à s'appliquer entre les associés, comme
un contrat ordinaire.
Le caractère irréversible de la dissolution
conséquente à l'expiration de la durée peut avoir de
graves conséquences, juridiques et fiscales, et il est donc important de
prendre suffisamment tôt les dispositions nécessaires lorsqu'il y
a lieu de poursuivre l'existence de la société au-delà de
son terme prévu, en décidant sa prorogation.
Cette prorogation ne peut intervenir qu'avant que la
dissolution ne soit consommée, c'est-à-dire au plus tard, la
veille du jour de l'expiration de la durée.115Au-delà,
il serait nécessaire de procéder à la création
d'une nouvelle société appelée à poursuivre les
activités de la précédente.
L'article 32 AUSCGIE dispose que la société peut
être prorogée une ou plusieurs fois. Cela signifie en d'autres
termes qu'il est possible que la durée d'une société soit
successivement augmentée (par périodes maximum de 99 ans), sans
limitation particulière. En principe, une décision de prorogation
peut intervenir à tout moment, alors même que la durée en
cours serait éloignée de son terme.116Toutefois, et
bien que l'Acte uniforme ne le précise pas explicitement, la
décision de prorogation ne devrait intervenir qu'à l'approche de
la date prévue pour l'expiration de la durée de la
société. On n' aperçoit pas, a priori,
l'intérêt qu'il y aurait à prendre une telle
décision prématurément.
La prorogation implique donc, aux termes de l'article 33
AUSCGIE, une modification ou un complément à apporte à
l'article des statuts relatif à la durée. En conséquence,
cette décision requiert le respect des conditions
111 Art. 35 AUSCGIE.
112 OHADA, Traité et actes, op.cit., p. 399.
113 Art. 36 AUSCGIE.
114 Art. 30 AUSCGIE.
115 OHADA, Doit des sociétés commerciales et du
GIE, commentaires, Edicef, Paris, 1998, p. 10.
116 Idem, p. 11.
44
prévues pour les décisions extraordinaires, et
la décision spécifique à la modification des statuts
requiert la forme authentique (acte notarié ou acte sous-seing
privé déposé au rang des minutes d'un
notaire117).
En pratique, l'article des statuts relatifs à la
durée devrait, après modification, laisser subsister l'indication
de la durée initiale et comporter celle de la date et de la durée
de la prorogation, de façon à bien la distinguer d'une simple
modification de la durée.
2°) La réalisation ou l'extinction de l'objet
social
Ces deux hypothèses ne sont pas identiques. Il y a
réalisation de l'objet social lorsque la ou les opérations pour
lesquelles la société s'est constituée sont
définitivement achevées.118 La réalisation de
l'objet est un événement heureux, puisque la
société a atteint l'objectif qui lui avait été
fixé : le chantier est achevé, l'immeuble est construit, le
marché est exécuté, etc. La réalisation de l'objet
est donc la situation dans laquelle les statuts ont été
rédigés de façon à ce que l'activité pour
laquelle a été constituée la société puisse
être terminée : c'est ce qu'on appelle une société
de mission.
Il sied de noter que cette réalisation ne joue
qu'exceptionnellement car elle suppose que les associés n'ont entendu se
lier que pour la réalisation d'un programme précis et
limité dans le temps.
Quant à l'extinction de l'objet, c'est au contraire un
événement malheureux puisque la société est
empêchée de poursuivre son activité.119Cette
dernière est devenue impossible matériellement ou juridiquement.
L'objet est éteint lorsqu'il ne peut plus être atteint pour des
raisons extérieures à la volonté des associés. En
d'autres termes, l'extinction de l'objet social est le cas où la raison
d'être de la société prend fin. Par exemple, l'annulation
du brevet pour lequel la société était constituée,
le retrait d'une autorisation administrative d'exploiter une mine,
l'activité est frappée d'interdiction, une société
constituée pour gérer un immeuble qui disparaît dans un
sinistre, l'objet d'une société devient illicite, etc.
La situation est par conséquent différente en
cas de simple cessation d'activité non motivée par la disparition
de l'objet : la société n'est pas ipso facto dissoute ; elle
devient une société en sommeil ou « société
coquille » prête à reprendre du service en cas de
nécessité. En d'autres termes, une cessation temporaire
d'activité suppose une reprise possible si les circonstances changent ;
elle s'accompagne habituellement d'une décision collective de «
mise en sommeil ».120La pratique révèle de
nombreuses sociétés qui sont des coquilles vides n'ayant aucune
activité mais prêtes à reprendre une activité
nouvelle, et
117 Idem.
118 ISSA-SAYEGH J., dissolution et liquidation, op.cit.,
p. 1.
119 PETIT B, op.cit., p. 40.
120 OHADA, Droit des sociétés, op.cit., p.
61.
45
dans certains pays, notamment les paradis fiscaux, il y a un
véritable marché de coquilles vides.121
De ce qui précède, il faut noter que les deux
hypothèses susmentionnées sont cependant très proches.
Dans les deux cas, la poursuite de l'objet statutaire devient impossible et la
société n'a donc plus de raison d'exister. Une telle situation,
en fait, suppose que l'objet de la société ait été
précisément et étroitement défini dans ses statuts,
ce qui est très inhabituel. Dans les deux cas également, il
s'agit d'une dissolution automatique et irrémédiable qui peut se
révéler aussi inopportune. Il est néanmoins possible,
comme dans l'hypothèse de la durée, de prévenir la
dissolution en procédant à la modification appropriée des
statuts.
Objectivement enfin, la société qui n'a plus
d'objet devrait pouvoir être dissoute de plein droit mais encore
faudrait-il que la cessation d'activité revête un caractère
définitif. Il est cependant vrai que le fait que l'objet social soit
souvent bien défini de manière très large fait qu'il est
rare de voir dans la pratique des sociétés dont l'objet social
aurait complètement disparu. En d'autres termes, les statuts
définissent généralement l'objet social de façon
suffisamment étendue pour que la société ait toujours une
possibilité d'activité.
3°) L'annulation du contrat de
société
De toute évidence, l'efficacité
d'une législation est assurée par les sanctions. Il arrive de
fois dans l'AUSCGIE que le législateur précise que la violation
d'une disposition est sanctionnée par la nullité. En
général, les nullités des sociétés sont
envisagées sous deux angles : celles consécutives aux
irrégularités de constitution et celles relatives aux
délibérations des sociétés. La nullité de la
société ainsi que celle des actes sociaux sont soumises à
un même régime juridique.
Les cas de nullité sont très limités. Les
principes sont clairement posés par les articles 242 al. 1, 244 et 245
AUSCGIE. En effet, la nullité d'une société ou de tous
actes, décisions ou délibérations modifiant les statuts ne
peut résulter que d'une disposition expresse de l'Acte uniforme. La
nullité de la société (SARL et SA) pour vice de
consentement ou incapacité d'un associé ne peut être
prononcée à moins que cette cause de nullité atteigne tous
les associés fondateurs.122 La nullité de tous actes,
décisions ou délibérations ne modifiant pas les statuts de
la société ne peut résulter que d'une disposition
impérative de l'Acte uniforme.123La nullité peut
toutefois résulter aussi bien des dispositions régissant les
contrats en général que celles qui intéressent le contrat
de société en particulier.
121DIEYE A, op.cit, p. 108. 122Art.
243 AUSCGIE. 123Art. 244 AUSCGIE.
46
En effet, l'article 253 AUSCGIE dispose que « lorsque la
nullité de la société est prononcée, elle met fin,
sans rétroactivité, à l'exécution du contrat. Il
est procédé à sa dissolution et, pour ce qui concerne les
sociétés pluripersonnelles, à leur liquidation ».
L'application de cette mesure suppose que la
société ait été constituée en vue de
commettre les faits incriminés ou qu'elle ait été
détournée de son objet à cette fin.124Le
contrat de société peut être annulé pour non respect
des conditions de fond ou de formation d'un contrat (sauf l'hypothèse de
l'article 243), pour l'émission des titres sociaux négociables
par des sociétés autres qu'une SA125, pour une fusion,
scission ou apport partiel d'actif constitué sans déclaration de
conformité126, pour le non respect des formalités de
publicité dans les SCS et les SNC127 , etc.
La non rétroactivité de l'annulation de la
société est fondée de la théorie de la
société de fait. Celle-ci est une exception remarquable au droit
commun des nullités. Pour le passé, la société a
fonctionné comme une société de fait et les actes qu'elle
a conclus ne sauraient être remis en cause. Dès lors, la
nullité ne vaut que pour l'avenir ; elle ne produit que les effets d'une
dissolution.128
Les tiers qui ont cru à l'apparence de la
société peuvent demander l'exécution des engagements pris
par les dirigeants, et il est clairement précisé que « ni la
société, ni les associés ne peuvent se prévaloir
d'une nullité à l'égard des tiers de bonne foi
».129Les tiers de bonne foi sont ceux qui ont cru à
l'apparence de la régularité de la
société.130Il faut noter en outre que les
associés dont le comportement est à l'origine de l'annulation
engagent leur responsabilité civile.131
Il n'en reste pas moins vrai que quand la nullité est
encourue, l'Acte uniforme met à l'action un certain nombre d'obstacle :
la prescription de l'action très courte (3 ans conformément
à l'article 251), et surtout la préférence pour la
régularisation (l'article 60 en cas de réunion des parts en une
seule main, les articles 246 et suivants qui traitent de l'obstacle à la
régularisation en général).
Enfin, les conséquences de la nullité sont
très atténuées, la théorie de la
société de fait étant consacrée par la loi.
124 PETIT B., op.cit, p. 41.
125 Art. 58 AUSCGIE.
126 Art. 198 AUSCGIE.
127 Art. 245 AUSCGIE.
128 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 462.
129Art. 255 AUSCGIE.
130 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 462.
131 Art. 256 AUSCGIE.
47
4°) La décision des associés aux
conditions prévues pour modifier les statuts
A tout moment de la vie de la société, les
associés peuvent décider à l'amiable de mettre un terme
à la société en votant en Assemblée
Générale, sa dissolution anticipée. Cette dissolution
conventionnelle est prise à la majorité qualifiée et dans
les conditions prévues pour la modification des statuts. Cette
décision des de modification est prise pour quelque cause que ce soit,
même si elle n'est prévue ni par la loi, ni par les statuts. Elle
est aussi prise quel que soit le moment, même avant le terme s'il s'agit
d'une société à durée
déterminée.'32
Il y a lieu de noter que pour une SNC, il faut
l'unanimité, pour une SARL les associés représentant 3/4
du capital social, et pour une SA les actionnaires représentant 2/3 du
capital social.'33
En outre, il va sans dire que la décision de
dissolution peut être prise à titre principal ou à titre
incident (acceptation d'une fusion ou d'une scission, transformation de la
société en une forme telle que la personnalité morale ne
peut être maintenue, etc.).
5°) La dissolution judiciaire pour justes motifs
L'article 200, 5° autorise tout associé à
demander en justice la dissolution « pour justes motifs, notamment en cas
d'inexécution de ses obligations par un associé ou de
mésentente entre les associés empêchant le fonctionnement
normal de la société ». Cette dissolution repose en effet la
double constatation de la disparition de l'affectio societatis et de
l'inaptitude de la société à remplir sa fonction
économique d'organisation d'entreprise.
En d'autres termes, la dissolution judiciaire d'une
société nécessite la réunion de deux conditions
cumulatives : une mésentente grave entre les associés et une
paralysie du fonctionnement de la société.'34
Les justes motifs mentionnés par le texte sont
présentés comme des exemples et la liste n'est donc pas
limitative. Le texte peut également renvoyer à d'autres
circonstances déduites de l'emploi du terme « notamment ». Il
reviendra alors au juge d'apprécier la demande de l'associé en
fonction de l'intérêt social pour en déduire le juste
motif. Cependant en pratique, la demande est le plus souvent fondée sur
la mésentente entre associés. Celle-ci doit, pour conduire
à la dissolution, être suffisamment grave pour rendre
132 ISSA-SAYEGH J., Dissolution et liquidation, op.cit, p.
2.
133 DIEYE A., op.cit, p. 109.
134 « (...) Attendu que pour prononcer la dissolution
anticipée de la société, l'arrêt relève qu'il
existe entre M. Nicolas Y. et Mme X une très grave
mésintelligence ; qu'il relève encore que le comportement fautif
de la gérante, qui a agi dans son intérêt propre et dans
celui de son époux en profitant de la majorité des voix que
représentaient leurs parts respectives, ne permet pas de poursuivre
l'exploitation sociale ; attendu qu'en se déterminant ainsi, par des
motifs impropres à caractériser la paralysie du fonctionnement de
la société, la Cour d'appel n'a pas donné de base
légale à sa décision. »( Cass. Comm, 19 mars 2013,
Pourvoi n° 12-15.283 ; OHADA, Code bleu, 3ème
édition, Juriafrica, 2014, p.199).
48
impossible la poursuite de la collaboration. Elle doit
surtout, comme dit ci-haut, entraîner la paralysie du fonctionnement de
la société.'35
Sans nul doute, l'action en dissolution est attribuée
par le texte aux seuls associés. Cette qualité est donc
nécessaire et suffisante : elle doit, en principe, être
refusée notamment aux créanciers et aux salariés de la
société. La jurisprudence considère qu'il s'agit d'une
action d'ordre public à laquelle les associés ne sauraient
renoncer par avance, par une clause des statuts notamment.'36
La demande de l'associé doit être de bonne foi ;
et un associé ou actionnaire ne peut se prévaloir de la cause de
dissolution qu'il a lui-même créée. Dans certains cas les
tribunaux n'hésitent pas à condamner le demandeur de mauvaise foi
et en sus à lui demander de payer les
dommages-intérêts.'37
L'inexécution par un associé de ses obligations
peut s'illustrer à titre exemplatif par le défaut pour un
associé de réaliser l'apport promis si celui-ci est important
pour la vie de la société.
En effet, l'associé mécontent qui souhaite
obtenir la dissolution d'une société commerciale doit rapporter
la preuve de la mésentente entre associés empêchant le
fonctionnement normal de ladite société.'38Aussi,
celui qui entend solliciter la dissolution anticipée de la
société ne doit pas avoir provoqué la mésentente
sur laquelle il s'appuie pour la demander.'39
Il se pose dès lors une question, vu ce qui
précède : est-il possible d'exclure l'associé à
l'origine de la mésentente P
Il y a, à en croire Alioune DIEYE, une profonde
controverse sur l'existence d'un fondement légal à l'exclusion
d'un associé contestataire. L'associé a en principe un droit
intangible de faire partie de la société. Pourtant le courant
majoritaire estime aujourd'hui que lorsque les fondateurs ont prévu une
clause prévoyant l'exclusion, l'associé pourra être exclu,
mais si et seulement si les causes d'exclusion sont retenues.'40
C'est ainsi que, dans le cas d'espèce, un
associé, monsieur BOKOUM a, suite aux nombreuses difficultés
rencontrées avec son associé principal,
135 DIEYE A., op.cit, p. 109; OHADA, Droit des
sociétés, op.cit, p. 61.
136 PETIT B., op.cit, p. 41.
137 DIEYE A., op.cit, p. 110.
138 (...) L'associé mécontent ne rapporte pas la
preuve d'une mésentente entre associés empêchant le
fonctionnement normal de la société ; qu'il s'ensuit qu'en
faisant droit à la demande de dissolution, sans déterminer en
quoi les allégations du requérant sont fondées, la Cour
d'appel de Kayes a insuffisamment motivé sa décision et
privé celle-ci de base légale. » (CCJA, Arrêt n°
039/2008 du 17 juillet 2008, Aff. Abdoulaye BALDE et autres c/ Boubacar
Alphodio BAH, Juridata n° J039-07/2008 ; OHADA, Code bleu, op.cit,
p. 198).
139 Cour d'appel d'Abidjan, Arrêt n° 1048 du 20
juillet 2001 ; Société S.I Flor Tropiques c/ M. Jean Luc
DELAURNEY,
Ohada.com/Ohadata J-04-103.
140 DIEYE A., op.cit, p. 110.
49
informé ses coactionnaires de son intention ferme et
définitive de mettre fin à la société anonyme
qu'ils ont créée. Il intente alors une action en dissolution et
en liquidation des biens de ladite société, en saisissant le TGI
de Bobo-Dioulasso (Burkina Faso) le 23 février 2007, et la
décision prononçant la dissolution et la liquidation a
été rendue en sa faveur le 06 juin 2007. Les autres actionnaires
en Assemblée Générale convoquée le 19 mars 2007,
ont déchu monsieur BOKOUM de sa qualité d'associé,
l'accusant d'être à l'origine de la mésentente, surtout que
ce dernier n'avait pas été associé à ladite
assemblée, et ont décidé de lui restituer la valeur
nominale de ses actions sans son consentement.
Ses coactionnaires défendeurs avaient également
soulevé les exceptions de nullité de l'acte d'assignation et la
fin de non recevoir tirée, selon eux, du défaut de qualité
de monsieur BOKOUM avant la décision, lesquelles exceptions on
été rejetées par le tribunal.
Contre ce jugement, les défendeurs interjetaient appel.
La cour d'appel de Bobo-Dioulasso a confirmé le jugement du premier
degré en motivant qu'à la date du 23 février 2007,
monsieur BOKOUM était toujours associé et que
l'AGE141, fut-elle régulièrement convoquée le
19 mars 2007, ne peut pas rétroactivement le déchoir de sa
qualité d'associé.142
6°) Dissolution par l'effet d'un jugement ordonnant
la liquidation des biens
La liquidation des biens prévue par l'Acte uniforme
portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif
(AUPC) constitue une cause de dissolution de la société
commerciale.
En effet, les procédures collectives sont des
procédures judiciaires ouvertes lorsque le commerçant personne
physique ou personne morale de droit privé est en état de
cessation des paiements ou connaît des sérieuses
difficultés financières, dans la but d'assurer le paiement des
créanciers et, dans la mesure du possible, le sauvetage de l'entreprise
ou la société et, par voie de conséquence, de
l'activité et des emplois.143
Ces procédures sont au nombre de trois, notamment le
règlement préventif, le redressement judiciaire et la liquidation
des biens. Les deux premières ne visent pas la dissolution de la
société mais constituent plutôt, d'une part, à
éviter ou prévenir la cessation des paiements (règlement
préventif) et d'autre part, à sauvegarder la
société dans la mesure du possible malgré la cessation des
paiements, tout en assurant un traitement par sauvetage (redressement
judiciaire). C'est pourquoi seule la liquidation des biens est retenue ici
comme cause de dissolution car entraînant la disparition pure et simple
de la société.
141 Assemblée Générale extraordinaire.
142 Cour d'appel de Bobo-Dioulasso, Chambre commerciale,
Arrêt n° 10/09 du 10 juin 2009 ; UTB, SAWADOGO KOMYABA et autres c/
BOKOUM SAMBA Amadou ;
Ohada.com/Ohadata J-10-117.
143 SAWADOGO F.M, Commentaires de l'Acte uniforme portant
organisation des procédures collectives d'apurement du passif,
Juriscope, 2012, p. 1127.
50
Dès qu'une société est en cessation des
paiements, il n'est plus à démontrer que l'affectio societatis de
certains associés fait défaut pour faire prononcer la
dissolution.'44
Etant donné l'importance de la procédure
collective de liquidation des biens dans la présente étude, nous
avons prévu d'analyser en long et en large cette matière dans la
troisième section de ce chapitre.
7°) Toute autre cause prévue par les
statuts
Les associés peuvent prévoir dans les statuts
d'autres causes de dissolution. Ceci leur permet d'envisager contractuellement
des cause de dissolution non prévues par la loi ou de rendre plus
sévères celles qui existent. Par exemple la possibilité de
demander la dissolution au bout d'un délai inférieur à
celui de la durée de la société, le décès
d'un associé, la modification de la situation juridique d'un
associé, trois exercices consécutifs déficitaires ou la
baisse continue du résultat, le changement de nationalité,
etc.
De tout ce qui précède, il sied de noter que
cette liste des causes n'est pas exhaustive.'45 Certaines autres
causes peuvent être retenues : accumulation des pertes sans espoir de
retour à meilleur fortune, impossibilité de trouver de nouveaux
dirigeants, variation des capitaux propres, etc. Il a même
été jugé que l'abandon par le gérant d'une SARL de
ses fonctions statutaires constitue un manquement à ses obligations
d'associé, lequel justifie la dissolution de la
société.'46
Les causes communes de dissolution des sociétés
sont relativement classiques. Il faut également noter que la
réunion de toutes les parts ou actions en une seule main n'est plus une
cause de dissolution de plein droit de la société. La
société d'un seul associé ayant été
consacrée dans certaines hypothèses,'47cette cause
n'est plus valable que pour les SNC et les SCS qui deviendraient a posteriori
unipersonnelles. Il faudrait alors dans ce cas parler de réunion de
toutes les parts en une seule main. Dans ce cas, la dissolution ne peut
intervenir que par décision de justice lorsque la situation n'a pas
été régularisée dans le délai d'un an, ou 18
mois si le tribunal a accordé un délai supplémentaire pour
la régularisation.'48
144 Tribunal de première instance de Niamey, Jugement
civil n° 027 du 20 janvier 1999 ; MOUTARI MACAM SOULEY c/ SEEF Niger ;
Ohada.com/ Ohadata J-04-74.
145 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 450.
146 TPI Abidjan, Jugement n° 80 du 12 avril 2001, NIAYE AIME
DESSEROUIN FERNANDE c/ Nicole GOMES épouse Lemaître ; Ecodroit,
n° 10, avril 2002, p. 79 (Ohada.com/ Ohadata J-02- 96.)
147 Art. 309 AUSCGIE pour la SARL, Art. 385 AUSCGIE pour la
SA.
148 Art. 60 AUSCGIE.
51
II. Causes particulières
Les dispositions générales consacrant les causes
de dissolution de la société doivent être
complétées par les dispositions particulières propres
à chaque type de société.
1°) Fin de la Société en Nom Collectif
Dans la SNC, l'intuitu personae est tel que l'existence
même de la société est nécessairement remise en
cause par la disparition de la confiance entre associés. Aussi, le
décès d'un associé entraîne de plein droit la
dissolution de la société sauf à faire figurer dans les
statuts une clause de continuation faisant échec à la
dissolution.149
La SNC est également dissoute lorsque l'un de ses
associés est, en raison de son insolvabilité, de son
incompétence, de sa malhonnêteté ou de son
incapacité, frappé d'une inaptitude constatée ou
prononcée par décision de justice.150
En effet, la SNC subit l'influence des
événements qui atteignent personnellement ses associés.
Ceci est une des manifestations de l'intuitu personae de ce type de
société. En ce sens tout changement dans la condition juridique
de l'associé doit être considéré : le
décès, un jugement de liquidation des biens ou de faillite
frappant un associé, l'incapacité ou l'interdiction qui
l'atteindrait. Il faut y ajouter la révocation du gérant
statutaire associé.151
Pour éviter de telles causes de dissolution dues
à un seul associé, deux solutions sont envisageables : soit les
autres associés décident dès la survenance de
l'événement de continuer la société, soit ils
insèrent dans les statuts une clause appropriée à cet
effet.152
Lorsque la société se poursuit notamment avec
les héritiers du défunt associé, un problème
particulier se pose dans le cas où un ou plusieurs héritiers
seraient mineurs non émancipés et incapables d'exercer le
commerce. L'article 290 al. 2 et 3 préconise une solution satisfaisante
dans la mesure où elle aboutit
149Art. 290 AUSCGIE : « La SNC prend fin par
le décès d'un associé. Toutefois, les statuts peuvent
prévoir que la société continuera soit entre les
associés survivants, soit entre les associés survivants et les
héritiers ou successeurs de l'associé décédé
avec ou sans l'agrément des associés.
S'il est prévu que la société continuera
avec les seuls associés survivants, ou si ces derniers n'agréent
que certains d'entre eux, les associés survivants doivent racheter aux
héritiers ou successeurs de l'associé décédé
ou à ceux qui n'ont pas été agréés, leurs
parts sociales.
En cas de continuation et si l'un ou plusieurs des
héritiers ou successeurs de l'associé décédé
sont mineurs non émancipés, ceux-ci ne répondent des
dettes sociales qu'à concurrence des parts de la succession de leur
auteur.
En outre, la société doit être
transformée dans le délai d'un an, à compter du
décès, en société en commandite dont le mineur
devient commanditaire. A défaut, elle est dissoute ».
150 Art. 291 AUSCGIE.
151 Art. 279 AUSCGIE
152 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 475.
52
à la limitation de la responsabilité de ce
dernier. Celui-ci ne répond alors des dettes sociales qu'à
concurrence des parts de la succession de son auteur.
2°) Fin de la Société en Commandite Simple
Aux termes de l'article 308 AUSCGIE, la société
continue malgré le décès d'un associé
commanditaire. S'il est stipulé que malgré le décès
de l'un des associés commandités, la société
continue avec ses héritiers, ceux-ci deviennent associés
commanditaires lorsqu'ils sont mineurs non émancipés.
Si l'associé décédé était
seul associé commandité et si ses héritiers sont alors
mineurs non émancipés, il doit être procédé
à son remplacement par un nouvel associé commandité ou
à la transformation de la société dans un délai
d'un an à compter du décès.
Il se pose cependant une question sur la nouvelle forme de
société à choisir en cas de transformation. Il n'en reste
pas moins vrai que la forme de la SNC doit être déjà et
catégoriquement exclue car l'héritier, qui est ici mineur non
émancipé ne peut être commerçant. Il ne pourra par
conséquent pas faire partie d'une telle société. Mais le
choix des autres formes de société reste envisageable (SARL ou
SA)153
3°) Fin de la Société à
Responsabilité Limitée La SARL prend fin :
- En cas de réduction du capital en dessous du minimum
légal154;
- Sur décision des actionnaires, en cas de perte de la
moitié du capital social.155
Dès que cette situation se présente, l'article
371 fait obligation au gérant ou au commissaire aux comptes de
consulter, dans les quatre mois qui suivent l'approbation des comptes ayant
fait apparaître cette perte, les associés sur l'opportunité
de prononcer la dissolution anticipée de la société.
Il est à noter que lorsque les capitaux propres
dépassent le montant du capital social, c'est un signe de
prospérité ; l'excédent provient alors de la mise en
réserve des bénéfices antérieurs. Par contre, si la
société se retrouve entrain de « manger » son capital,
il y a manifestement des difficultés
financières.156
La solution consiste à consulter les associés
sur l'opportunité de dissoudre la société ou de la
continuer. Dans ce dernier cas, il y a obligation de reconstituer les capitaux
propres ou de réduire le capital social.157Les dirigeants
153 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 480.
154 Art. 368 et 369 AUSCGIE.
155 Art. 371 AUSCGIE.
156 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 504
157 Art. 372 AUSCGIE.
53
sociaux qui omettent de convoquer l'AGE pour ladite
consultation encourent des sanctions pénales.158
Il sied de noter que l'interdiction d'un associé, sa
faillite ou son incapacité, et même le décès d'un
associé, ne peuvent causer la dissolution de la SARL.159Donc
malgré `intuitu personae de la société, les
événements qui atteignent personnellement les associés
n'entrainent pas, en principe, la fin de la société.
40) Fin de la Société
Anonyme
La SA prend fin sur décision des actionnaires en cas de
perte de la moitié du capital. Dans ce cas, les administrateurs sont
tenus de convoquer une AGE statuant sur la dissolution éventuelle de la
société dans les quatre mois suivant le moment où la perte
a été ou aurait dû être
constatée.160
Si cette mesure n'est pas prise, tout intéressé
peut demander en justice la dissolution de la
société.161Aux termes de l'article 668 AUSCGIE, la
juridiction compétente saisie d'une demande de dissolution peut accorder
à la société un délai maximale de six mois pour
régulariser la situation. Elle ne peut prononcer la dissolution si, au
jour où elle statue sur le fond, cette régularisation a eu
lieu.
50) Fin de la Société par Actions
Simplifiée
L'Acte uniforme n'a pas expressément
énoncé les causes particulières à la dissolution de
la SAS. Ceci se justifie en ce sens que le fonctionnement de la SAS est pour
l'essentiel abandonné à l'imagination des rédacteurs des
statuts (fondateurs) suite à une large liberté d'organisation
laissée à ces derniers par le législateur.
Néanmoins, sur base de l'article 853-3 AUSCGIE, les
règles concernant les sociétés anonymes (à
l'exception de certains articles spécifiques) sont applicables à
la SAS, dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions
particulières prévues dans le livre de l'AUSCGIE relatif à
la SAS (Livre 4-2).
D'où, nous déduisons que la SAS devra en
principe prendre fin pour la même cause particulière que la SA,
sauf disposition statutaire contraire.
158 Art. 901 AUSCGIE.
159 Art. 384 AUSCGIE.
160 Art. 664 AUSCGIE.
161 Art. 667 AUSCGIE.
54
§2 EFFETS DE LA DISSOLUTION
Ces effets sont à dénicher sur la
société elle-même (A), sur les tiers (B), ainsi que sur les
travailleurs (C).
A. Sur la société
- La dissolution met fin à l'activité officielle
de la société, mais maintient sa personnalité morale pour
les besoins de la liquidation ;
- La décision de dissolution de la
société doit faire l'objet de différentes
formalités de publicité afin qu'elle puisse être opposable
aux tiers. En effet, l'article 202 AUSCGIE dispose que la dissolution est
publiée par un avis dans un journal habilité à recevoir
les annonces légales du lieu du siège social, par
dépôt au greffe des actes ou procès verbaux décidant
ou constatant la dissolution et par la modification de l'inscription au
RCCM.
- La dissolution de la société pluripersonnelle
entraîne de plein droit sa mise en liquidation.'62La
société conserve ainsi sa dénomination sociale mais cette
dernière doit être suivie de la mention «
Société en liquidation ». Tous les actes et documents
émanant de la société et destinés aux tiers doivent
faire figurer cette mention ainsi que le nom du liquidateur.'63
- La société conserve un patrimoine propre qui
demeure réservé aux créanciers sociaux. Elle peut conclure
certains contrats (par exemple le renouvellement d'un bail). La dissolution de
la société n'entraîne pas automatiquement la
résiliation des baux des immeubles utilisés pour son
activité sociale, y compris les locaux d'habitation dépendant de
ces immeubles.'64
- La dissolution de la société ne met pas fin
aux fonctions du commissaire aux comptes.'65
- Concernant la société unipersonnelle, la
dissolution entraîne la transmission universelle du patrimoine de la
société à l'associé unique, sans qu'il y ait lieu
à la liquidation.'66
- Quant aux associés, ils perdent la qualité de
représentants de la société dès le prononcé
de la dissolution. Ils ne peuvent pas, même à l'unanimité,
décider de ne pas procéder à la liquidation et au partage
de la société. Faute d'avoir nommé un liquidateur, les
associés sont sans qualité pour agir en recouvrement d'une
créance de la société sur un tiers.'67
162 Art. 201 al. 2 AUSCGIE.
163 Art. 204 al. 2 AUSCGIE.
164 DIEYE A., op.cit, p. 113.
165 Art. 225 AUSCGIE.
166 Art. 201 al. 4 AUSCGIE.
167 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 452.
55
B. Sur les tiers
- Aux termes de l'alinéa premier de l'article 201
AUSCGIE, la dissolution n'a d'effet à l'égard des tiers
qu'à compter de sa publication au RCCM.
- En cas de la dissolution d'une société
unipersonnelle, les créanciers peuvent faire opposition à cette
dissolution devant la juridiction compétente, dans le délai de
trente jours à compter de la publication de celle-ci. Le tribunal
rejette l'opposition ou ordonne soit le remboursement des créances, soit
la constitution des garanties si la société en offre et si elles
sont jugées suffisantes. La transmission du patrimoine n'est
réalisée et il n'y a disparition de la société
qu'à l'issue du délai d'opposition ou, le cas
échéant, lorsque l'opposition a été rejetée
ou que le remboursement des créances a été effectué
ou les garanties constituées.168
C. Sur les travailleurs
Lors de l'avènement de la dissolution, il y a en
principe cessation du contrat de travail par voie de conséquence. Cette
cessation est faite à l'initiative de l'employeur. C'est ce qu'on
appelle licenciement.
En effet, sur base de l'alinéa 1er de
l'article 62 du Code du travail, cette mesure ne peut être prise par
l'employeur que pour un motif valable. Ce motif peut être fondé
sur les nécessités du fonctionnement de l'entreprise ou sur les
raisons économiques. Il est donc clair que le cas de dissolution dont il
est question ici est un motif de valable fondé sur les raisons
économiques, au cas où aucune opération conséquente
de restructuration n'est envisagée (fusion, scission, etc.).
De ce fait, soit l'employeur peut procéder au
licenciement des travailleurs en cas de dissolution naturelle ou volontaire ou
bien laisser cette tâche au liquidateur choisi pour ce faire, soit le
juge peut nommer un liquidateur en cas de dissolution judiciaire.
Dès l'instant où la dissolution a
été prononcée, la liquidation s'impose. Désormais,
seul le liquidateur est habilité à représenter la
société.169Il est également chargé de
payer les créanciers. Les travailleurs, en tant que créanciers
privilégiés de la société, pourront donc avoir une
action sur le liquidateur pour être désintéressés et
pour la résolution des conflits éventuels
(réclamations).
Il sied de noter de ce qui précède
qu'après la dissolution de la société, le contrat de
travail devra en principe s'arrêter à cause de la quasi
inexistence de la société. Cependant, certains contrats peuvent
continuer sous la reconduction du liquidateur ou la proposition de l'employeur
s'il est estimé nécessaire d'achever les activités de la
liquidation. Cependant, la situation sera toute autre si la dissolution a
été faite pour une restructuration conséquente de la
société
168 Art. 201 al. 4 AUSCGIE.
169 Art. 230 AUSCGIE.
56
(fusion ou scission). Dans ce cas le contrat de travail
continuera suivant la règle de la substitution d'employeur prévue
par l'article 80 du code du travail.
SECTION II LA LIQUIDATION DE LA SOCIETE
On ne le dira jamais assez, la dissolution de la
société pluripersonnelle entraîne de plein droit sa mise en
liquidation. En d'autres termes, la liquidation de la société
s'impose dès l'instant où la dissolution a été
prononcée.
Il est vrai que qu'une société a normalement une
grande durée de vie. Elle survit généralement aux
personnes physiques qui l'ont créée. Mais la dissolution, comme
vu précédemment, est le terme de l'existence sociale. Les liens
qui unissent les associés (tout comme ceux qui unissent l'employeur et
le travailleur) se dénouent et la personnalité morale
disparaît. Par conséquent, le patrimoine social n'a plus de
titulaire ; il faut alors le liquider, payer les créanciers et partager
le solde entre les associés. Aussi, face à cet avènement,
les salariés se posent des questions sur le sort de leurs contrats de
travail en cours.
Longtemps gouvernée en grande partie par des principes
jurisprudentiels en RDC, la liquidation fait désormais l'objet d'une
réglementation détaillée, applicable à toutes les
sociétés commerciales, laquelle réglementation est
prévue par le droit OHADA.
C'est pourquoi, dans les lignes qui suivent, nous allons
saisir la notion même de liquidation (§1), fixer le rôle du
liquidateur dans cette étape (§2), et enfin démontrer les
effets de la liquidation à l'égard de la société
ainsi qu'à l'égard des travailleurs (§3).
§1 NOTION DE LIQUIDATION
La liquidation s'entend de l'ensemble des opérations,
postérieures à la dissolution, dont l'objet est de
procéder au règlement du passif social et à la
réalisation de l'actif social, en vue de déterminer la part
revenant aux associés dans le reliquat éventuel.170
Elle est la suite logique et inéluctable de la dissolution, qui doit
être distinguée de la liquidation faisant suite à la
cessation des paiements de la société.171
Liquider une société consiste donc à la
conduire de sa dissolution à sa fin absolue, en réalisant l'actif
social, c'est-à-dire en transformant en fonds liquides tout ce qui peut
être réalisé parmi les valeurs actives, en réglant
le passif et en répartissant entre les associés l'excédent
éventuel.
En effet, l'accomplissement des opérations de
liquidation, qui peuvent être longues et complexes, implique la
participation de la société dissoute, dont
170 PETIT B, op.cit, p. 43.
171 Art. 203 al. 3 AUSCGIE.
57
la survivance est, par conséquent, nécessaire.
C'est pourquoi l'Acte uniforme pose le principe selon lequel « la
personnalité morale de la société subsiste pour les
besoins de la liquidation et jusqu'à la publication de la clôture
de celle-ci »172
La règle sus évoquée se présente
cependant sous un double aspect. D'une part, la personnalité morale
subsiste : le patrimoine social reste distinct de celui des associés ;
la société continue à agir par l'intermédiaire d'un
représentant, qui est désormais le liquidateur. D'autre part, la
personnalité ne subsiste que pour les besoins de la liquidation : il
s'agit par conséquent, à en croire Bruno PETIT, d'une
personnalité atténuée ou, plus exactement, d'une
capacité de jouissance réduite, ce qui se traduit
concrètement (mais de manière un peu floue) par l'interdiction
d'entreprendre des opérations nouvelles.173 Ceci veut dire
que la société ne peut conclure des nouveaux contrats. Force est
de constater qu'il s'agit on ne peut plus d'une fiction juridique : la
société est artificiellement maintenue en vie pour régler
ses dernières affaires.
De toute évidence, malgré le caractère
complexe de la procédure de la liquidation, celle-ci est
réglementée avec beaucoup de minutie par le législateur.
Lorsque la liquidation est réglée par les statuts ou
décidée par les associés en nommant eux-mêmes un
liquidateur, on parle de la liquidation à l'amiable ou statutaire. Par
contre, lorsque le liquidateur est désigné par décision de
justice, on parle de la liquidation judiciaire.
§2 INTERVENTION DU LIQUIDATEUR
Comme dit supra, l'intervention du liquidateur peut se
dérouler dans deux cas selon qu'il s'agit de la liquidation à
l'amiable ou de la liquidation judiciaire. En pratique, la liquidation est
souvent réglée par les statuts sous réserve des
dispositions d'ordre public contenues dans l'Acte uniforme.
A. Nomination
Lorsque la liquidation est décidée par les
associés, un ou plusieurs liquidateurs sont
nommés174 :
- Dans les SNC, à l'unanimité des associés
;
- Dans les SCS, à l'unanimité des
commandités et à la majorité en capital des commanditaires
;
- Dans les SARL, à la majorité en capital des
associés ;
- Dans les SA, aux conditions de quorum et de majorité
prévues pour les assemblées générales
extraordinaires.
En effet, le liquidateur peut être choisi parmi les
associés ou les tiers. Il peut aussi être une personne morale.
Sauf disposition contraire à l'acte de nomination, si plusieurs
liquidateurs ont été nommés, ils peuvent exercer leurs
172 Art. 205 AUSCGIE.
173 PETIT B., op.cit, p.43.
174 Art. 206 AUSCGIE.
58
fonctions séparément. Toutefois, ils
établissent et présentent un rapport commun. Si les
associés n'ont pu nommer un liquidateur, celui-ci est
désigné par décision de justice à la demande de
tout intéressé.175
Aux termes de l'article 211 AUSCGIE, le liquidateur peut
être révoqué et remplacé selon les mêmes que
celles prévues pour sa nomination. Toutefois, tout associé peut
demander en justice la révocation du liquidateur si cette est
fondée sur des motifs légitimes.
En ce qui concerne la durée du mandat du liquidateur,
celle-ci ne peut excéder trois ans, renouvelables par décision de
justice.176Quant à sa rémunération, elle est
fixée par la décision des associés ou du tribunal qui
le
nomme.177
Il ressort de la lecture de l'article 212 AUSCGIE que la
nomination et la révocation du liquidateur ne sont opposables aux tiers
qu'à compter de la publication de l'acte de nomination de celui-ci. Ni
la société, ni les tiers ne peuvent se prévaloir d'une
irrégularité dans la nomination ou dans la révocation du
liquidateur, dès lors que celle-ci a été
régulièrement publiée.
Par ailleurs, tout liquidateur qui ne respecte pas ses
obligations telles qu'énoncées par l'Acte uniforme encourt des
sanctions pénales prévues aux articles 902 et suivants de
l'AUSCGIE.
B. Déroulement des opérations de
liquidation
L'AUSCGIE en son article 230 dispose que le liquidateur
représente la société qu'il engage pour tous les actes de
la liquidation. Il est investi des pouvoirs les plus étendus pour
réaliser l'actif, même à l'amiable. Les restrictions
à ces pouvoirs, résultant des statuts ou de l'acte de nomination,
ne sont pas opposables aux tiers. Cependant, il faut noter que ces pouvoirs ne
sont pas pour autant illimités.
C'est pourquoi, les articles 213 et suivants de l'AUSCGIE
posent quelques limites notamment en ce qui concerne les cessions d'actifs, qui
ne peuvent pas être faites à certaines personnes sous
réserve de sanctions pénales.178
Les opérations de liquidation incombent à titre
principal au liquidateur mais les associés peuvent faire valoir un
certain nombre des droits. L'article 233 AUSCGIE l'oblige de convoquer, selon
les modalités prévues par les statuts, au moins une fois par an
et dans les six mois de la clôture de l'exercice, l'assemblée des
associés qui statue sur les états financiers de synthèse
annuels, donne les autorisations nécessaires et, le cas
échéant, renouvelle le mandat du commissaires aux comptes.
175 Art. 207 à 209 AUSCGIE.
176 Art. 227 AUSCGIE.
177 Art. 210 AUSCGIE.
178 Art. 904 al. 2 AUSCGIE.
59
De toute évidence, l'article précité vise
à maintenir, au profit des associés et pendant toute la
période de liquidation, le même exercice du droit d'information et
de contrôle sur les opérations et les comptes et les comptes de la
société que celui qu'ils avaient avant la dissolution de la
société, par le moyen de l'Assemblée
Générale Ordinaire (AGO) annuelle. Donc les associés se
réunissent en assemblée chaque année, dans les mêmes
conditions qu'ils l'étaient avant la liquidation : même
délai pour les AGO, même compétence.179
Pendant le déroulement des opérations de
liquidations, le liquidateur est tenu d'un certain nombre d'obligations
:
1°) Elaboration d'un rapport sur la situation
financière et d'un plan de
liquidation
Dans les six mois de sa nomination, le liquidateur convoque
l'assemblée des associés à laquelle il fait rapport sur la
situation active et passive de la société, sur la poursuite des
opérations de liquidation, le délai nécessaire pour les
terminer et demande, le cas échéant, toutes autorisations qui
pourraient être nécessaires.180
Le délai dans lequel le liquidateur fait son rapport
peut être porté à douze mois, sur sa demande, par
décision de justice.181
2°) Etablissement de l'inventaire des biens sociaux
Le liquidateur, dans les trois mois de la clôture de
chaque exercice, établit les états financiers de synthèse
annuels au vu de l'inventaire qu'il a dressé des divers
éléments de l'actif et du passif existant à cette date et
un rapport écrit par lequel il rend compte des opérations de la
liquidation au cours de l'exercice écoulé.182
3°) Etablissement, en cours de liquidation, des
comptes de chaque exercice et convocation de l'assemblée
générale annuelle
Sauf dispense accordée par le président de la
juridiction compétente statuant à bref délai, le
liquidateur convoque, selon les modalités prévues par les
statuts, au moins une fois par an et dans les six mois de la clôture de
l'exercice, l'assemblée des associés qui statue sur les
états financiers de synthèse annuels, donne les autorisations
nécessaires et le cas échéant, renouvelle le mandat du
commissaire aux comptes.183
179 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 70.
180 Art. 228 al. 1 AUSCGIE.
181 Art. 228 al. 3 AUSCGIE.
182 Art. 232 AUSCGIE.
183 Art. 233 AUSCGIE.
60
4°) Désintéressement des créanciers
Il ressort de la lecture de l'article 231 que le liquidateur
est habilité à payer les créanciers et à repartir
entre les associés le solde disponible.
Toute décision de répartition des fonds est
publiée dans le journal officiel. La décision est notifiée
individuellement aux titulaires des titres nominatifs.184Les sommes
affectées aux répartitions sont déposées, dans le
délai de 15 jours à compter de la décision de
répartition, sur un compte en banque.185
5°) Réalisation de l'actif et répartition du
boni de liquidation
Aux termes de l'article 230 AUSCGIE, le liquidateur est
investi des pouvoirs les plus étendus pour réaliser l'actif de la
société, sous réserve des limites posées par les
articles 213 et suivants. En effet, certaines opérations entrent dans la
compétence exclusive des assemblées, notamment pour la cession
globale de l'actif de la société dissoute ou l'apport de celui-ci
à une autre société par voie de fusion. Le liquidateur
devra y être autorisé par une décision de
l'Assemblée Générale (AG). Cette AG délibère
selon les conditions nécessaires pour la modification des
statuts.186
En outre, il est interdit au liquidateur de céder des
actifs sociaux à lui-même, à des proches ou à toute
personne à laquelle il est intéressé (ses employés,
leurs conjoints, ascendants ou descendants).187
Le liquidateur procède aussi à la distribution
du reliquat ou boni de liquidation aux associés après avoir
préservé les droits des créanciers de la
société. S'il y a des biens mobiliers appartenant aux
associés, bien que l'Acte uniforme ne le précise pas, le
liquidateur doit les restituer à leurs propriétaires, qui les ont
apportés en jouissance.188
Selon la disposition de l'article 237 AUSCGIE, le partage des
capitaux propres subsistant après remboursement du nominal des actions
ou des parts sociales est effectué entre les associés dans les
mêmes proportions que leur participation au capital social.
En droit français, les éléments d'actif
subsistant après liquidation sont, du fait de la disparition de la
personne morale, considérés comme la copropriété
indivise des anciens associés. Les règles de l'indivision peuvent
donc être applicables en la matière : le partage, le maintien dans
l'indivision ou même l'attribution préférentielle de
certains biens peuvent être sollicités par les associés. Le
partage peut aussi se faire par reprise des apports (qui s'effectuent en
valeur, y compris sur les apports en nature). Les associés peuvent
cependant
184 Art. 238 AUSCGIE.
185 Art. 239 AUSCGIE.
186 Art. 215 AUSCGIE.
187 Art. 214 AUSCGIE.
188 ISSA-SAYEGH J., Dissolution et liquidation, op.cit, p.
11.
61
décider que certains biens soient attribués
à certains associés. A défaut d'une telle stipulation et
si le bien apporté se retrouve en nature dans la masse à
partager, l'apporteur peut demander que ce bien lui soit attribué,
à charge de soulte s'il y a lieu.189
C. Clôture de la liquidation
La clôture de la liquidation doit intervenir dans un
délai de 3 ans à compter de la dissolution de la
société. A défaut, le Ministère public ou tout
intéressé peut saisir la juridiction compétente du ressort
afin qu'il soit procédé à la liquidation de la
société ou, si celle-ci a commencé, à son
achèvement.190
Les associés sont convoqués dès lors pour
statuer sur les comptes définitifs, sur le quitus de la gestion du
liquidateur et la décharge de son mandat et pour constater la
clôture de la liquidation.
Les comptes définitifs établis par le
liquidateur sont déposés au greffe du tribunal de commerce en
annexe au RCCM. Il y est joint, soit la décision de l'assemblée
des associés statuant sur les comptes de la liquidation, le quitus de la
gestion du liquidateur et la décharge de son mandat, soit, à
défaut, la décision de justice.191
Enfin, pour justifier l'accomplissement des formalités
prévues pour la clôture de la liquidation, le liquidateur demande
la radiation de la société au RCCM dans le délai d'un mois
à compter de la publication de la clôture de la
liquidation.192
§3 EFFETS DE LA LIQUIDATION
La liquidation produit effectivement des effets à
l'égard de la société désormais disparue (A) ainsi
qu'à l'égard des créanciers de la société y
compris les travailleurs qui étaient autrefois employés dans
cette société sous un contrat de travail.
A. A l' égard de la société
A la clôture de la liquidation
(radiation au RCCM), la personnalité de la société
s'éteint définitivement et irréversiblement. Lorsqu'il n'y
a pas de liquidation en raison de la transmission universelle du patrimoine
social à un associé unique, la disparition de la
société unipersonnelle n'intervient qu'après que les tiers
aient été en mesure de faire valoir leurs droits ou de faire
régler
189 PETIT B., op.cit, pp. 44-45.
190 Art. 216 AUSCGIE.
191 Art. 217 à 219 AUSCGIE.
192 Art. 220 AUSCGIE.
62
leurs créances, et ce dans les conditions
prévues au dernier alinéa de l'article 201.193
B. A l' égard des créanciers
Une fois terminée la liquidation, les créanciers
(y compris les travailleurs) ne peuvent plus s'adresser à la
société elle-même, celle-ci ayant cessé d'exister.
Ils ont alors une action directe contre les associés et subissent le
concours des créanciers personnels des
associés.194L'Acte uniforme n'a pas précisé si
les poursuites se feront sur base de la responsabilité limitée ou
non des associés.
Il est clair que le contrat de travail ne peut naturellement
plus exister car la société, qui lui a donné vie, ne vit
plus elle-même. On ne peut donc pas concevoir la notion de « contrat
de travail en cours » pour une société déjà
liquidée. En d'autres termes, après la clôture de la
liquidation, il n'y a pas de « contrat en cours », car tout est
censé être déjà réglé. En plus, la
société est même déjà radiée au
RCCM.
SECTION III LA PROCEDURE COLLECTIVE DE LIQUIDATION
DES BIENS
Nous recourons à l'étude de cette
procédure pour quatre raisons principales :
- Premièrement, parce que la liquidation des biens
d'une société ordonnée par le tribunal est une cause de
disparition ou de dissolution commune à toutes les
sociétés commerciales ;
- Deuxièmement, parce que cette cause de dissolution a
une réglementation particulière et appropriée, à
savoir l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d'apurement du passif (AUPC) ;
- Troisièmement ; parce qu'il est nécessaire de
démontrer à ce niveau particulier, tout comme aux autres phases
déjà vues, le sort des contrats et des conflits de travail en
cours ;
- Quatrièmement enfin, parce que la
compréhension du déroulement de cette procédure, du
rôle que peuvent jouer les travailleurs à cette étape ainsi
que de leurs droits nous aidera à enrichir et à approfondir la
présente étude.
D'une manière générale, la liquidation
des biens fait partie des procédures collectives d'apurement du passif
prévues par le droit OHADA. En effet, il s'agit des procédures
judiciaires ouvertes lorsque le commerçant
193 OHADA, Droit des sociétés commerciales,
op.cit, p. 62.
194 OHADA, Traité et actes, op.cit, p. 451.
63
personne physique ou personne morale de droit privé est
en état de cessation des paiements'95 ou connait des
sérieuses difficultés financières, dans le but d'assurer
le paiement des créanciers et, dans la mesure du possible, le sauvetage
de l'entreprise, de son activité et des emplois.
Classiquement, ces procédures collectives poursuivent
trois objectifs. D'abord, elles visent à protéger les
créanciers impayés et à assurer leur
désintéressement dans les meilleures conditions possibles,
d'où le rôle relativement important des créanciers dans le
dénouement de la procédure et la discipline collective qui
s'applique à tous les créanciers. Ensuite, elles visent à
punir et éliminer le commerçant qui n'honore pas ses engagements.
Cet aspect n'est pas à négliger lorsque l'on considère le
caractère dissuasif de la punition ainsi que sa contribution à la
moralisation du milieu des affaires et au paiement des créanciers (cas
de la faillite personnelle et de la banqueroute). Enfin, les procédures
collectives doivent permettre la sauvegarde des entreprises redressables,
même au prix d'une certaine entorse au droit des
créanciers.'96
Quant aux caractéristiques de ces procédures
collectives, il sied d'en retenir principalement trois :
- L'aspect collectif : les créanciers sont
regroupés et soumis à un ensemble de règles
destinés à les discipliner afin que leur paiement se fasse dans
l'égalité et la justice.
- L'aspect conflictuel : un conflit
d'intérêt existe, d'une part entre les créanciers et le
débiteur ou la société, d'autre part, à
l'intérieur du groupe des créanciers entre les créanciers
chirographaires, les créanciers munis de sûretés et les
créanciers pouvant se prévaloir de préférence, en
l'occurrence le droit de propriété.
- L'intervention judiciaire : cette intervention est
essentielle dans le domaine des procédures collectives. Elle est
destinée à protéger les intérêts en
présence et à assurer l'efficacité et la moralité
des procédures.
L'Acte uniforme portant organisation des procédures
collectives d'apurement du passif (AUPC) prévoit trois procédures
:
- Le règlement préventif avant la cessation des
paiements qui constitue l'une des pièces maîtresses de la
prévention destinée à éviter la cessation des
paiements au moyen d'un concordat préventif'97
;
- Le redressement judiciaire après la cessation des
paiements, qui est destinée à la sauvegarde de la
société en visant à la fois son sauvetage et l'apurement
de son passif au moyen d'un concordat de redressement'98 ;
195 La cessation des paiements est la situation où le
débiteur ne peut faire face à son passif exigible avec son actif
disponible (Art. 25 AUPC)
196 SAWADOGO F.M, « Commentaires sur l'AUPC », in
OHADA, Traité et actes uniformes commentés et
annotés, Juriscope, 2012, pp. 1121-1302.
197 Art. 2- 1 AUPC.
198 Art. 2- 2 AUPC.
199 Art. 2- 3 AUPC.
200 Art. 3 AUPC.
64
- La liquidation des biens, après la cessation des
paiements, qui a pour objet la réalisation de l'actif et qui implique la
liquidation de la société au profit des
créanciers.199
C'est cette dernière procédure qui nous
intéressera ici pour les besoins de la présente étude,
étant donné que c'est elle seule qui implique la disparition de
la société. C'est pourquoi, dans les lignes qui suivent, il sera
question de déterminer les conditions d'ouverture de la liquidation des
biens et d'établir les modalités de son exécution
(§1), de saisir le rôle des travailleurs dans la mise en oeuvre de
cette procédure (§2). En outre, la présence des travailleurs
au sein de la société à cette phase délicate pousse
à réfléchir sur la place de l'activité
contractuelle dans cette procédure ainsi que sur les modalités
prévues pour le traitement des créances de salaires (§
3).
§1 CONDITIONS D'OUVERTURE ET
MODALITES D'EXECUTION
En vertu de l'article 33 AUPC, la liquidation des biens peut
être ouverte soit immédiatement lorsque la société
n'a pas d'espoir de se redresser, le débiteur n'ayant pas proposé
un concordat sérieux ou qu'elle a cessé toute activité,
soit à l'issue d'une période d'observation.
Nous verrons que dès le prononcé du jugement
d'ouverture de la liquidation des biens, le tribunal nomme des organes de la
procédure, qui sont des mandataires chargés de conduire et
d'acheminer cette procédure.
A. Conditions d'ouverture
Il faut savoir avant tout qu'à côté des
conditions de forme que nous allons évoquer ci-dessous pour l'ouverture
de la liquidation des biens, il existe aussi des conditions de fonds, notamment
la cessation des paiements et la juridiction compétente. En effet, les
personnes physiques ou morales visées dans cette procédure ne
peuvent être déclarées en liquidation des biens que si
elles sont en état de cessation des paiements. Aussi, la juridiction
compétente en cette matière n'est autre que celle
compétente en matière commerciale, en l'occurrence le tribunal de
commerce.200
Quant aux conditions de forme, il faut parler de la saisine du
tribunal, de la décision même provenant de ce tribunal ainsi que
des effets du jugement de liquidation des biens.
65
1°) La saisine du tribunal
Elle peut se faire soit par le débiteur, soit par un
créancier, ou même d'office par le juge.
a) Saisine par le débiteur
Le débiteur en état de cessation des paiements
doit en faire la déclaration au tribunal dans les 30 jours de cette
cessation, aux fins d'obtenir l'ouverture de la procédure de liquidation
des biens, le cas échéant.201
En effet, l'article 25 AUPC donne une définition
légale de la cessation des paiements et apporte des précisions
relatives à la saisine de la juridiction compétente par le
débiteur. La cessation des paiements découle de la comparaison
entre l'actif disponible et le passif exigible. L'actif disponible est la
trésorerie de la société. Il comprend les sommes dont la
société peut disposer immédiatement soit parce qu'elles
sont liquides, soit parce que leur conversion en liquide est possible à
tout moment et sans délai. Le passif exigible est reflété
par les éléments de la cessation des paiements ouverte (non
paiement d'une dette certaine, liquide et exigible) ou de la cessation des
paiements déguisée (maintien du service de caisse par des
expédients).202
Aux termes de l'article 26 AUPC, la déclaration ci-haut
mentionnée doit être accompagnée des pièces et
documents exigés pour ce faire. Il s'agit entre autres des
éléments suivants :
- Un extrait d'immatriculation au RCCM ;
- Les états financiers de synthèse comprenant
notamment le bilan, le compte de résultat, un tableau financier des
ressources et des emplois ; - Un état de la
trésorerie ;
- L'état chiffré des créances et des
dettes avec indication du nom et du domicile des créanciers et des
débiteurs ;
- Le nombre des travailleurs et le montant des salaires et des
charges salariales impayés ;
- Les noms et adresses des représentants du personnel
;
- La liste des membres solidairement responsables des dettes
de la société avec indication de leurs noms et domiciles ainsi
que les noms et adresses de ses dirigeants.
La pertinence de ces documents ne paraît pas discutable
dans la perspective de l'apurement du passif de la société.
Cependant, il semble difficile de les réunir toutes, et cela pourrait
retarder la déclaration, ce qui serait dommageable. C'est pourquoi
l'Acte uniforme a prévu au dernier alinéa de l'article 26 une
hypothèse, conçue comme une exception et qui pourrait se
révéler très fréquente. Cet alinéa
prévoit en effet que, dans le cas où l'un des
201 Art. 25 AUPC.
202 SAWADOGO FM, op.cit, p. 1172.
66
documents cités supra ne peut être fourni ou ne
peut l'être qu'incomplètement, la déclaration reste
possible mais doit indiquer les motifs de cet empêchement.
b) Saisine par un créancier
Tout créancier, quelle que soit la nature et
l'importance de sa créance, peut demander l'ouverture d'une
procédure collective contre son débiteur, pourvu que cette
créance soit certaine, liquide et exigible. Pour ce faire, l'assignation
du créancier doit préciser la nature et le montant de sa
créance et viser le titre sur lequel elle se fonde.203
Les caractères certain, liquide et exigible de la
créance signifient que l'ouverture d'une procédure collective ne
peut être fondée sur des créances contestables et que les
créances elles-mêmes doivent attestées par des
pièces justificatives.
En l'espèce, sur appel interjeté contre un
jugement du tribunal régional de Dakar du 14 février 2007 ayant
refusé d'ouvrir une procédure collective de liquidation des biens
contre la société A4 CENTER, sur assignation d'un de ses
créanciers pour non paiement de sa créance, la Cour d'appel de
Dakar confirme le jugement entrepris pour les motifs selon lesquels «
l'appelant n'a pas produit de titres exécutoires, les créances
alléguées résultent de documents unilatéraux ne
comportant pas la signature du débiteur et non certifiés par une
autorité légalement habile ; et il s'y ajoute que les
chèques ne sont également pas émis par la
société A4 CENTER ; elles ne sont donc pas certaines.
»204
L'une des causes de demande par le créancier de la
procédure collective de liquidation des biens contre son débiteur
est le fait que toutes les poursuites en paiement du créancier sont
demeurées vaines. En l'espèce, le jugement du TPI de Libreville
du 12 mars 2001 a ouvert une procédure de liquidation des biens contre
la société OGAR à la demande d'un des ses
créanciers du fait que la société a cessé toute
activité depuis plus d'un an et ses dirigeants ont quitté le
Gabon ; ce qui a fait que toutes les poursuites en paiement soit
demeurées vaines.205
Il faut noter en outre que l'alinéa 3 de l'article 28
AUPC laisse au débiteur assigné la possibilité de faire la
déclaration et la proposition de concordat dans le délai d'un
mois de l'assignation.
c) Saisine d'office
Aux termes de l'article 29 AUPC, la juridiction
compétente peut se saisir d'office, notamment sur base des informations
fournies par le
203 Art. 28 AUPC.
204 Cour d'appel de Dakar, Chambre civile et commerciale,
Arrêt n° 192 du 18 février 2010, Mr X c/
Société A4 CENTER, OHADA, Actes uniformes commentés et
annotés, Juriscope, p. 1177.
205 TPI de Libreville, Jugement n° 11/2000-2001 du 12
mars 2001, Mr X c/ Société OGAR ; OHADA, Traité et
actes uniformes commentés et annotés, p. 1176.
67
représentant du Ministère public, les
commissaires aux comptes, les associés ou les institutions
représentatives du personnel qui lui indiquent les faits de nature
à motiver cette saisine.
Le président du tribunal fait convoquer le
débiteur, par les soins du greffier, par acte extrajudiciaire, à
comparaître devant la juridiction compétente siégeant en
audience non publique.
Si le débiteur comparaît, le président
l'informe des faits de nature à motiver la saisine d'office et
reçoit ses observations. Si le débiteur reconnaît
être en cessation des paiements ou en difficulté ou si le
président acquiert l'intime conviction qu'il est dans une telle
situation, ce dernier lui accorde un délai de 30 jours pour faire la
déclaration et la proposition de concordat. Passé ce
délai, le tribunal statue en audience publique.
Si le débiteur ne comparaît pas, il en est pris
acte et la juridiction compétente statue à la première
audience publique utile.
De ce qui précède, l'on note que les cas de
saisine d'office sont en pratique très rares. Les enquêtes pouvant
être faites par des organes ou des individus chargés d'informer le
tribunal paraissent inadéquates. Il serait mieux pour les tribunaux de
commerce de la RDC d'organiser, à l'instar des tribunaux de commerce
belges, un service d'enquêtes commerciales dont l'utilité est
évidente pour la saisine d'office.206
B. Modalités d'exécution 1°)
La décision du tribunal
Il ressort de la lecture de l'article 32 AUPC qu'avant de
prononcer l'ouverture d'une liquidation des biens, le tribunal peut
désigner un juge du siège ou toute personne qu'il estime
qualifiée pour recueillir tous renseignements sur la situation du
débiteur, ses agissements et ses propositions concordataires et en faire
rapport.
A cet égard, on remarque que quel que soit le mode de
saisine, le tribunal ne peut rendre de décision avant 30 jours à
compter de sa saisine. Si le tribunal constate la cessation des paiements dans
le chef du débiteur, il doit prononcer la liquidation des biens
après avoir constaté que le débiteur ne peut pas ou ne
peut plus proposer un concordat sérieux de redressement
judiciaire.207Il peut aussi prononcer cette liquidation à
tout moment au cours de la procédure de redressement judiciaire si le
débiteur ne respecte pas ses propositions contenues dans le
concordat.
206 DUPLAT J.L, « Les services des enquêtes
commerciales des tribunaux de commerce » ; in L'entreprise en
difficulté, Editions Jeune Barreau, 1981, pp. 45-76.
207 Art. 33 AUPC.
68
Le concordat sérieux, à en croire le professeur
Filiga Michel SAWADOGO, est celui qui, tout en préservant et en
favorisant l'assainissement de l'entreprise, assure le paiement des
créanciers dans des conditions acceptables. Il doit donc comporter d'une
part des mesures de redressement de la société et un plan de
paiement des créanciers théoriquement satisfaisants, et d'autre
part des garanties d'exécution des engagements que contient la
proposition de concordat.208
Le tribunal, dans la décision d'ouverture de la
liquidation des biens, nomme certaines personnes devant agir comme organes de
la liquidation, à savoir le juge commissaire, un à trois syndics,
et le cas échéant, des contrôleurs.
a) Le juge commissaire
Il est nommé parmi les juges de la juridiction,
à l'exclusion de son président sauf en cas de juge unique. Il
veille au déroulement rapide de la procédure et aux
intérêts en présence. C'est lui qui nomme les
contrôleurs, lesquels sont choisis parmi les créanciers, sans que
leur nombre puisse excéder trois.209Ces derniers assistent le
juge-commissaire dans sa mission de surveillance du déroulement de la
procédure.
b) Le syndic
Il paraît comme l'acteur central dans la
procédure de liquidation des biens. C'est lui seul qui exécute
les opérations de liquidation pendant que les autres sont là pour
assurer le contrôle. Il est généralement choisi sur une
liste des spécialistes arrêtée par la Cour
d'appel.210
Sa mission est essentielle quant au déroulement
diligent et au bon aboutissement de la procédure collective. Il a
l'obligation de rendre compte de sa mission au juge-commissaire selon une
périodicité définie par ce dernier.211 Le
syndic peut représenter la masse des créanciers, le tribunal en
tant que mandataire de justice et, le cas échéant, le
débiteur. L'on remarque que dans ces conditions, un conflit de fonctions
peut se produire.
En effet, les alinéas 2 et 3 de l'article 53 AUPC
énoncent que le jugement qui prononce la liquidation des biens entraine
corrélativement le dessaisissement des pouvoirs du débiteur au
profit du syndic qui sera chargé de représenter les droits et
actions concernant le patrimoine du débiteur dessaisi pendant toute la
durée de la procédure collective. Lorsque le débiteur est
une personne physique, l'application ne pose pas de difficulté dans la
mesure où le débiteur est simplement remplacé par le
syndic.
208 SAWADOGO FM, op.cit, p. 1183.
209 Art. 48 AUPC.
210 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1193.
211 Art. 43 al. 4 AUPC.
69
En revanche, le débiteur conserve ses droits propres,
tels que les droits de recours contre les décisions, qu'il pourra
exercer lui-même. Mais lorsque le débiteur est une personne
morale, le problème est tout autre. La société
débitrice dissoute est donc dessaisie et à travers elle, les
dirigeants sociaux et le conseil d'administration.
Cependant, en vertu du principe posé selon lequel la
personnalité morale de la société subsiste pour les
besoins de la liquidation, la société dispose encore des droits
encore des droits propres, notamment le droit de faire appel du jugement
ouvrant ou prononçant la liquidation des biens, ou faire appel des
décisions du juge commissaire.
Toute la problématique est alors celle de savoir qui
est habilité à représenter la société dans
ses diverses actions. En d'autres termes, comment pallier ce vide
législatif occasionné par la cessation des pouvoirs des
dirigeants sociaux dès le prononcé du jugement de liquidation des
biens contre la société P
Maître Bérenger Yves MEUKE, un auteur, a
tenté d'apporter une solution à ce problème (laquelle
solution nous paraît logique), en soutenant qu' « il est
indispensable de remplacer les organes sociaux dessaisis et de nommer aux
côtés du syndic un représentant de la société
qui sera chargé de représenter les intérêts propres
de la société débitrice (un liquidateur
sociétaire), car, d'une part le syndic est incompétent pour
exercer les droits propres de la débitrice et par conséquent il
ne doit pas représenter celle-ci dans les actions en justice à
engager dans cette procédure.
Etant chargé de représenter les
créanciers, on pourrait se retrouver face à un conflit
d'intérêts entre les droits des créanciers et ceux propres
à la débitrice. D'autre part, les organes sociaux sont eux aussi
incompétents pour représenter la débitrice puisqu'ils ont
perdu tous pouvoirs dès le prononcé du jugement confirmant la
liquidation des biens ».212
Il est à noter en outre qu'un jugement
prononçant la liquidation des biens est toujours susceptible
d'appel.213Ce jugement doit être mentionné au RCCM et
publié dans un journal d'annonces légales.214Ceci
traduit la nécessité pour le jugement d'ouverture de faire
l'objet d'une publicité afin d'informer les créanciers et les
personnes qui ont traité ou qui voudraient traiter avec le
débiteur. La publicité est habituelle et est
considérée comme justifiée dès lors que la
société est en état de cessation des paiements.
212 MEUKE B.Y., « Qui représente la
société en liquidation des biens dans l'espace OHADA ? »,
Ohada.com/ Ohadata D-08-16, pp. 1-6.
213 Art. 33 al. 5 AUPC.
214 Art. 36 AUPC.
70
2°) Effets du jugement de liquidation des
biens
a) A l' égard du débiteur
· Dessaisissement : Désormais, le
débiteur est dessaisi de la gestion, de l'administration et de la
disposition de son patrimoine. L'accomplissement de ces actes est confié
au syndic. La liquidation des biens d'une société d'une
société entraine de plein droit sa dissolution.
b) A l'égard des créanciers
· Regroupement en une masse : Ne peuvent
participer à la procédure collective que les créanciers
réunis en une masse représentée par le syndic qui est seul
à pouvoir agir en son nom et l'engager.215Ne font partie de
la masse que les créanciers dont la créance est née
antérieurement à la date du jugement d'ouverture de la
procédure.
En plus du regroupement en une masse, le jugement de
liquidation des biens produit les effets suivants, communs à tous les
créanciers :
- Il arrête le cours des inscriptions de toutes les
sûretés216;
- Il emporte, au profit de la masse, une hypothèque
forcée217;
- Il suspend ou interdit toutes les poursuites
individuelles218, sauf les actions en nullité en et en
résolution, ou encore les actions tendant uniquement à la
reconnaissance d'un droit de créance ou de propriété si ce
droit leur est contesté par le syndic après production ;
- Il rend exigibles les dettes à termes à
l'égard du débiteur219 ;
- Il arrête, à l'égard de la masse, le
cours des intérêts des dettes à termes220. Le
fondement psychologique de cette règle de l'arrêt du cours des
intérêts est qu'il n'est pas raisonnable de réclamer les
intérêts là où le recouvrement du capital est
compromis. Au plan technique, cette règle permet de fixer
définitivement le montant de passif.221
- Il oblige tous les créanciers de produire, sous peine
de forclusion, leurs titres de créance auprès du syndic et se
soumettre à la procédure de vérification222.
Cette procédure de vérification aboutit à
l'établissement d'un état qui est déposé au greffe,
notifié à chaque créancier et publié dans un
journal d'annonces légales. La décision du syndic est soit
l'acceptation (partielle ou totale) de la créance, soit le rejet de
celle-ci. Cette décision peut être soit confirmée ou
infirmée par le juge-commissaire, soit contestée par le
créancier devant le tribunal.
215 Art. 72 AUPC.
216 Art. 73 AUPC.
217 Art. 74 AUPC.
218 Art. 75 AUPC. 219Art. 76 AUPC.
220 Art. 77 AUPC.
221 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1220.
222 Art. 78 à 90 AUPC
71
Au bout du compte, il faut noter que tant que la
procédure de liquidation des biens n'est pas close, l'activité de
la société peut continuer. Cette poursuite d'activité peut
présenter quelques avantages : elle procure des revenus et conserve la
valeur du fonds. Mais elle présente le danger, si elle est
déficitaire, d'aggraver le passif au détriment des
créanciers. Le législateur la soumet donc à un
régime particulier.
En effet, la continuation de l'exploitation doit être
autorisée par le tribunal, pour les seuls besoins de la liquidation,
pour une durée de 3 mois, si l'intérêt public ou celui des
créanciers n'est pas mis en péril. Au bout de 3 mois,
l'exploitation cesse ; elle peut être reconduite une ou plusieurs fois
sans pouvoir dépasser un an sauf décision spécialement
motivée du tribunal pour des motifs exceptionnels ; et de ce fait, le
syndic doit, tous les trois mois, communiquer le résultat de
l'exploitation.223
3°) Solution de la liquidation des biens
Dès que la liquidation des biens est prononcée,
les créanciers sont en état d'union.224L'union est
l'état des créanciers groupés pour faire valoir leurs
droits. Le syndic, après avoir accompli les mesures de la période
préparatoire (vérification du passif, inventaire de l'actif,
etc.), remet le rapport au juge-commissaire qui l'autorise à
procéder à la réalisation de l'actif et à
l'apurement du passif.
a) La réalisation de
l'actif225
La réalisation de l'actif constitue la question la plus
importante que pose la liquidation des biens.
? Biens meubles : Le syndic poursuit seul la vente
des biens meubles de la société, le recouvrement des
créances et le règlement des dettes. Les créances à
long terme peuvent faire l'objet de cessions afin de ne pas retarder les
opérations de liquidation dans les conditions prévues pour les
compromis et les transactions. Les deniers provenant de ces opérations
sont versés sur un compte spécial sur lequel aucune opposition
n'est recevable.
? Biens immeubles : En principe, les ventes
d'immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie
immobilière. C'est le juge-commissaire qui détermine les
conditions essentielles et les modalités de la vente (vente sur saisie
immobilière, vente par adjudication amiable ou vente de gré
à gré). Si, dans le délai de trois mois suivant le
jugement de liquidation des biens, le syndic n'a entrepris aucune
procédure de
223 Art. 112 à 117 AUPC.
224 Art. 146 AUPC.
225 Art. 147 à 163 AUPC.
72
réalisation d'immeuble, les créanciers
hypothécaires et les créanciers munis d'un privilège
général peuvent exercer ou reprendre leur droit de poursuite
individuelle à charge d'en rendre compte au syndic.
b) L'apurement du passif226
Il s'agit du paiement des créanciers. Pour ce faire,
le juge-commissaire ordonne la répartition des deniers entre les
créanciers et le syndic adresse à chaque créancier un
chèque correspondant à son dividende, lequel chèque est
tiré sur le compte ouvert spécialement à cet effet dans un
établissement bancaire ou postal ou au Trésor public.
Le montant de l'actif est repartie entre tous les
créanciers dont la créance est vérifiée et admise,
déduction faite des frais et dépens de la procédure et des
éventuels secours accordés au débiteur et à sa
famille.
Les deniers provenant de la réalisation des immeubles
et des meubles sont repartis entre les créanciers sur base d'un
classement établi par la loi (Articles 166 et 167 AUPC). C'est ce
même classement qui est prévu par les articles 225 et 226 de
l'Acte uniforme sur les sûretés (AUS). Concernant l'application de
ces dispositions, il faut savoir que les créanciers d'un rang
supérieur doivent être intégralement payés avant les
créanciers du rang suivant et ainsi de suite.
c) La clôture de la liquidation des biens
Lorsque les opérations de liquidation des biens sont
terminées, le syndic en rend compte au juge-commissaire, qui dresse un
procès-verbal (PV) constatant la fin des
opérations.227Le PV est ensuite communiqué au Tribunal
qui prononce la clôture de la liquidation des biens et tranche, par la
même occasion, les contestations éventuelles.
L'union est donc dissoute de plein droit et les
créanciers recouvrent l'exercice individuel de leurs actions. La
décision de clôture est publiée au Journal officiel ainsi
qu'au RCCM, par les soins du greffier, après en avoir adressé un
extrait au représentant du Ministère public.228
Si les fonds manquent pour entreprendre ou terminer les
opérations de la liquidation des biens, le tribunal peut, sur le rapport
du juge-commissaire, à quelque époque que ce soit, prononcer,
à la demande de tout intéressé ou même d'office, la
clôture des opérations pour insuffisance d'actif.229
La clôture des opérations pour insuffisance
d'actif est, à en croire le professeur SAWADOGO, le mode de
clôture le plus fréquent, statistiquement
226 Art. 164 à 169 AUPC.
227 Art. 170 AUPC.
228 Art. 172 AUPC.
229 Art. 173 AUPC.
73
parlant.230Il y a insuffisance d'actif lorsqu'il
n'y a pas d'actif du tout231 ou lorsque les frais de
réalisation de l'actif excèdent les recettes attendues. Un tel
mode de clôture s'explique aisément : la procédure tend
à un paiement, ne serait-ce que partiel. S'il n'y a aucune perspective,
il est logique l'on y mette fin, d'autant plus que la poursuite de la
procédure dans ce cas ne peut que gonfler inutilement le passif. De ce
point de vue, la clôture pour insuffisance d'actif apparaît comme
un raccourci ou un diminutif de l'union.
§2 ROLE DES TRAVAILLEURS DANS LA MISE EN OEUVRE
DE LA PROCEDURE DE LIQUIDATION DES BIENS
On ne le dira jamais assez ; les travailleurs, face à
leur employeur en difficulté, sont des créanciers et devraient
être traités, a priori, comme les autres créanciers de la
société. Mais il ne peut en être ainsi pour deux raisons
:
- En premier lieu, ils font partie de l'entreprise et
constituent une de ses composantes indissociables : l'élément
humain, à côté de l'élément économique
qui est l'activité.232
- En outre, le salaire est une ressource dont la nature
alimentaire est absolument incontestable.
Ces raisons font que le traitement des travailleurs ne peut
être absolument identique à celui des autres créanciers,
fournisseurs de biens, de services ou de crédits qui ont accordé
leur confiance à la société en difficulté ou en
voie de disparition. La participation de l'élément humain
à la constitution et à la vie de la société vue
dans la dimension économique de l'entreprise implique l'information des
employés, voire leur consultation sur les questions vitales. La
sécurité de l'emploi et la garantie des revenus salariaux doivent
être également prises en compte.233Ce sont là
les idées fortes qui devraient imprégner le traitement des
travailleurs dans les sociétés en difficulté ou en voie de
disparition.
Le sort des travailleurs apparaît, à ce niveau,
plus ou moins fragilisé selon les chances de redresser ou non la
société. Aussi, il se pose, en pratique, un problème pour
l'employeur ou le syndic concernant le choix à faire entre
230 SAWADOGO F.M, op.cit, p. 1271.
231 Tribunal de Commerce de Bamako, Jugement n° 179 du 26
avril 2006, Société AIR-MALI S.A., OHADA, Traité et
actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, p.
1272. On y relève ce qui suit : « Attendu qu'aux termes du rapport
du juge-commissaire daté de mars 2006, la poursuite des
opérations de liquidation des biens de la société AIR-MALI
SA est rendue impossible en raison de l'insuffisance d'actif ; que se fondant
sur le rapport du liquidateur désigné en la personne de TIECORO
DIAKITE, le juge-commissaire a relevé que les opérations de
réalisation sont terminées et qu'il n'existe plus aucun actif
disponible ; qu'il échet en conséquence de procéder
à la clôture pour insuffisance d'actif de la présente
affaire en application de l'article 173 de l'AUPC ».
232 CATALA N., L'entreprise, Dalloz, Paris, 1980, p.
19.
233 ISSA-SAYEGH J., « Le sort des travailleurs dans les
entreprises en difficulté », Ohada.com/ Ohadata D-09-41, p.
1.
234 Art. 169 AUPC.
74
l'obligation de licenciement et l'obligation de reclassement
à l'endroit de tel ou tel autre salarié.
Le code du travail congolais reste silencieux sur le point de
savoir quel rôle les travailleurs peuvent jouer dans cette phase.
Néanmoins, à en croire le professeur ISSA-SAYEGH, les codes de la
plupart des Etats parties de l'OHADA relèvent que les travailleurs ont,
dans la liste de leurs prérogatives, pour mission de communiquer
à l'employeur toute suggestion utile tendant à
l'amélioration de l'organisation et du rendement de l'entreprise ; ce
qui est loin de la possibilité de se joindre à lui pour
diagnostiquer les maux de la gestion de l'entreprise, de sa solvabilité,
de sa politique commerciale passée ou à venir, etc.
A. Rôle des travailleurs dans le
déclenchement de la procédure
En principe, cette procédure est
déclenchée, soit par le débiteur au moyen d'une
déclaration au tribunal compétent, soit par assignation des
créanciers non payés, soit d'office par le tribunal.
Il est clair de ce qui précède qu'en cas
d'absence de toute initiative de leur employeur auprès du tribunal, on
peut parfaitement concevoir et admettre que les salaires impayés des
travailleurs de la société justifient une assignation en
cessation des paiements ou constituent une information suffisamment
inquiétante sur la santé de la société pour
être portée à la connaissance du parquet ou du tribunal
compétent pour une saisine d'office de la juridiction, à
condition, bien entendu, qu'il s'agisse de créances certaines, liquides
et exigibles.
B. Rôle des travailleurs dans le
déroulement de la procédure
Les travailleurs peuvent jouer un rôle
actif et efficace dans le déroulement de cette procédure en tant
que contrôleurs. Certes, la désignation des contrôleurs est
facultative pour le juge-commissaire mais elle est obligatoire si la demande en
est faite par des créanciers représentant au moins la
moitié des créances, ce qui peut être le cas, assez
souvent, de la seule masse salariale impayée. Dans ce cas, trois
contrôleurs doivent être nommés, choisis respectivement
parmi les créanciers munis des sûretés réelles
spéciales mobilières ou immobilières, les
représentants du personnel et les créanciers chirographaires.
La représentation des travailleurs dans le
contrôle de la procédure de liquidation des biens n'est pas
négligeable sur le bon déroulement de la procédure et la
protection des intérêts des créanciers. Tout cela implique
les éléments ci-après :
- Ils sont informés, chaque semestre, sur l'état de
la procédure et sur la répartition des deniers entre les
créanciers234 ;
75
- Ils peuvent saisir le tribunal d'une demande de
résolution du concordat ; - Ils participent à la
vérification des créances par le syndic235
;
- Ils sont avisés du non respect du délai de
production par les créanciers236 ;
- Ils sont informés des licenciements pour motif
économique237 ;
- Ils peuvent émettre leur avis sur la continuation de
l'activité de la société238
;
- Ils peuvent faire des réclamations contre le syndic
auprès du juge-commissaire et saisir ce dernier de toutes contestations
;
- Ils peuvent contraindre le syndic, par décision du
juge-commissaire, d'accomplir les actes nécessaires à la gestion
de la société ou d'exercer les actions en justice
nécessaires au recouvrement des créances de la
société239 ;
- Ils participent à la vérification des
créances ainsi que de la réalisation des biens
;
- Ils ont le droit de vérifier la comptabilité
et l'état de la situation présenté par le débiteur,
de demander compte au syndic des actes accomplis par lui, des recettes et des
débours.
§3 L'ACTIVITE CONTRACTUELLE FACE A LA PROCEDURE
DE LIQUIDATION DES BIENS
La question qui se pose ici est celle de savoir si
après l'ouverture de la procédure de liquidation des biens les
contrats de travail en cours s'arrêtent automatiquement ou non (A). En
outre, le point culminant de cette procédure est le
désintéressement des créanciers, et en particulier le
traitement des créances de salaires. Les principes directeurs de ce
désintéressement (B) valent la peine d'être
démontrés.
A. L'exécution des contrats en cours
La poursuite de l'activité de la société
peut être autorisée par le tribunal dans la procédure de
liquidation des biens.240 Pour ce qui est des contrats en cours au
moment de l'ouverture des procédures de liquidation des biens, leur
exécution peut toujours se poursuivre, quel que soit le mode de
continuation de l'exploitation de la société, si les besoins de
cette poursuite se font sentir.
En effet, la procédure de liquidation des biens
n'entraîne pas en soi la cessation automatique des contrats de travail
aussi longtemps que cette
235 Art. 84 et 85 AUPC.
236 Art. 36 et 37 AUPC.
237 Art. 62 al. 1er et 78 al. 2-4 Code du Travail.
238 Art. 112 et 113 AUPC.
239 Art. 40, 43 et 53 AUPC.
240 Art. 113 AUPC.
241 Cour de Cassation française, Chambre sociale, 24
mai 2000, n° 98-42.343 ; JURISDATA n° 2000002235.
76
procédure n'est pas encore
clôturée241. Elle est loin d'être un cas de force
majeure. La société doit donc poursuivre l'exécution des
contrats de travail en cours au moment de l'ouverture des procédures
collectives, que ces contrats soient à durée
déterminée ou indéterminée.
La poursuite automatique des contrats de travail dispense
même les travailleurs d'interroger l'employeur sur son intention de
poursuivre ou non les contrats de travail d'autant plus que cette poursuite est
liée à l'activité de la société.
Cependant, il peut arriver que la procédure de
liquidation des biens implique des licenciements pour motif économique.
Il sera donc logique que les salariés soient licenciés ; et ceci
par l'initiative expresse du syndic. Ces licenciements seront effectués
selon les règles du Code du Travail.
Le licenciement pour motif économique est
inévitable puisque la société est appelée à
disparaître. C'est pourquoi la procédure telle que prévue
par l'Acte uniforme s'avère plus souple et plus rapide qu'en droit
commun. En fait, nous lisons aux articles 110 et 111 AUPC ce qui suit :
? Article 110 : « Lorsque des
licenciements pour motif économique présentent caractère
urgent et indispensable, le syndic peut être autorisé à y
procéder par le juge-commissaire (...) Avant la saisine du juge
commissaire, le syndic établit l'ordre des licenciements
conformément aux dispositions du droit du travail applicable. Sont
proposés en premier lieu, les licenciements des travailleurs
présentant les moindres aptitudes professionnelles pour les emplois
maintenus et, en cas d'égalité d'aptitudes professionnelles, les
travailleurs les moins anciens dans l'entreprise, l'ancienneté
étant calculée selon les dispositions du droit du travail
applicable. En vue de recueillir leur avis et leurs suggestions, le syndic
informe, par écrit, les délégués du personnel des
mesures qu'il a l'intention de prendre en leur fournissant la liste des
travailleurs dont il envisage le licenciement et en précisant les
critères qu'il a retenus (...) ».
? Article 111 : « L'ordre des
licenciements établi par le syndic, l'avis des
délégués du personnel s'il a été
donné et la lettre de communication à l'inspection du travail
sont remis au juge commissaire.
Le juge commissaire autorise les licenciements
envisagés ou certains d'entre eux s'ils s'avèrent
nécessaires au redressement de l'entreprise, par décision
signifiée aux travailleurs dont le licenciement est autorisé et
au contrôleur représentant les travailleurs s'il en est
nommé.
La décision autorisant ou refusant les licenciements
est susceptible d'opposition dans les quinze jours de sa signification devant
la juridiction
77
ayant ouvert la procédure, laquelle doit rendre sa
décision sous quinzaine.
La décision de la juridiction compétente est
sans appel. »
L'on remarque de ce qui précède que les
dispositions de l'article 110 susmentionné reprennent les mêmes
éléments que ceux prévus à l'article 78 du Code du
Travail congolais. Aucune contradiction n'est donc à relever.
Il sied de noter en définitive que la poursuite des
contrats de travail en cours ne se conçoit aisément que si
l'exploitation de la société est continuée. Comme dit
ci-haut, aussi longtemps que l'employeur représenté par le syndic
ne prend pas l'initiative de les rompre, ces contrats se poursuivent ; mais ce
qui est sûr est qu'ils vivent leurs derniers instants parce que, une fois
que la société disparait, ils disparaitront aussi. En d'autres
termes, quand une société est en voie de disparition, les
contrats de travail en cours le sont aussi.
B. Le traitement des créances de salaire
D'une façon générale, les
créanciers d'une procédure collective d'apurement du passif sont
classés en trois catégories pour le traitement ou le paiement de
leurs créances : créanciers dans la masse, créanciers
contre la masse et créanciers hors de la masse.
? Créanciers dans la masse
Les créanciers dans la masse sont ceux dont la
créance est née avant le jugement d'ouverture de la
procédure collective d'apurement du passif. C'est à ces
créanciers que le débiteur demande, dans ses propositions
concordataires, de consentir des remises et des délais pour lui
permettre de redresser son entreprise. Ce sont eux qui recevront les dividendes
concordataires et la distribution des deniers provenant de la
réalisation des biens meubles et immeubles. Ils les recevront dans
l'ordre établi par les articles 166 et 167 AUPC.
- Article 166 : « Les deniers
provenant de la réalisation des immeubles sont distribués ainsi
:
1° aux créanciers des frais de justice
engagés pour parvenir â la réalisation du bien vendu et
â la distribution elle-même du prix ;
2° aux créanciers de salaires super
privilégiés en proportion de la valeur de l'immeuble par rapport
à l'ensemble de l'actif ;
3° aux créanciers hypothécaires et
séparatistes inscrits dans le délai légal, chacun selon le
rang de son inscription au livre foncier ;
4° aux créanciers de la masse tels que
définis par l'article 117 ;
5° aux créanciers munis d'un privilège
général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme portant
organisation des sûretés ;
6° aux créanciers chirographaires.
78
- Article 167 : « Les deniers
provenant de la réalisation des meubles sont distribués ainsi
:
1° aux créanciers des frais de justice
engagés pour parvenir à la réalisation du bien vendu et
à la distribution elle-même du prix ;
2° aux créanciers de frais engagés pour
la conservation du bien du débiteur dans l'intérêt du
créancier dont les titres sont antérieurs en date ;
3° aux créanciers de salaire super
privilégiés en proportion de la valeur du meuble par rapport
à l'ensemble de l'actif ;
4° aux créanciers garantis par un gage selon
la date de constitution du gage ;
5° aux créanciers garantis par un nantissement
ou par un privilège soumis à publicité, chacun suivant le
rang de son inscription au registre du commerce et du crédit mobilier
;
6° aux créanciers munis d'un privilège
mobilier spécial, chacun sur le meuble supportant le privilège
;
7° aux créanciers de la masse tels que
définis par l'article 117 ;
8° aux créanciers munis d'un privilège
général selon l'ordre établi par l'Acte uniforme portant
organisation des sûretés ;
9° aux créanciers chirographaires.
? Créanciers contre la masse
Ce sont les créanciers dont la créance est
née postérieurement au jugement d'ouverture de la
procédure collective. Ces créanciers, compte tenu du risque
qu'ils courent en faisant crédit à une société
déjà déclarée en cessation des paiements,
bénéficient de l'avantage de passer avant les créanciers
munis d'un privilège général et les créanciers
chirographaires.
? Créanciers hors de la masse
Il s'agit de ceux dont la créance est née d'une
activité irrégulière du débiteur soit avant le
jugement, soit après le jugement. Avant le jugement déclaratif,
le débiteur peut avoir accompli des actes anormaux ou suspects qui sont
susceptibles d'être déclarés inopposables à la masse
des créanciers.242En outre, les actes d'exploitation
accomplis postérieurement au jugement déclaratif par le
débiteur seul, c'est-à-dire sans l'assistance ou la
représentation du syndic ou dans le cadre d'une activité
continuée sans autorisation, sont déclarés inopposables
à la masse des créanciers.243
Tandis que les créanciers hors de la masse ne peuvent
absolument pas prendre part à la procédure collective dont ils
sont exclus jusqu'à sa clôture, les deux autres catégories
de créanciers demeurent dans la procédure collective
242 Art. 67 et suivants AUPC.
243 Art 11, 52 et 53 AUPC.
79
mais sont traités différemment selon qu'ils sont
considérés comme étant dans ou contre la masse. Il en est
de même des travailleurs dont nous allons rendre compte du sort de
créances dans les lignes qui suivent.
En effet, les travailleurs, tout comme les autres
créanciers d'une procédure collective, pourront être
exposés à des risques importants lors du paiement des salaires.
Mais du fait que les procédures collectives proviennent d'une
organisation légale et sont exécutées sous un
contrôle judiciaire, celles-ci offrent un cadre protecteur dans le
désintéressement de ces créanciers.
Par ailleurs, l'article 95 AUPC consacre ou plutôt
confirme le privilège des salariés en ces termes : « Les
créances résultant du contrat de travail ou du contrat
d'apprentissage sont garanties, en cas de redressement judiciaire ou de
liquidation des biens par le privilège des salaires établi pour
les causes et le montant définis par la législation du Travail et
les dispositions relatives aux sûretés. » Ce texte renvoie au
droit du Travail pour la définition des créances de salaires
protégées par le privilège et au droit des
sûretés pour le rang de ce droit de préférence.
Il nous parait plus rationnel d'exposer brièvement les
principes retenus par le droit positif pour établir le privilège
des salaires en droit commun avant d'examiner ce qu'il est dans le cadre des
procédures collectives d'apurement du passif.
1°) Principe du privilège général des
salaires
Le concept « salaire» est largement entendu dans le
droit du travail et l'article 180-3° de l'Acte uniforme portant
organisation des sûretés (AUS) ne le dément pas, dès
lors qu'il retient comme privilégiées « toutes les sommes
dues aux travailleurs et apprentis pour exécution et résiliation
de leur contrat durant la dernière année ayant
précédé le décès du débiteur, la
saisie des biens ou la décision judiciaire d'ouverture d'une
procédure collective. »
Le privilège des créances de salaire est un
privilège général, c'est-à-dire qu'il porte sur les
biens meubles et immeubles du débiteur244et
il est opposable aux autres créanciers sans qu'il soit besoin de le
publier au RCCM.
Dans le Code du travail congolais, sont
considérées comme des créances de salaire
privilégiées, toutes les sommes dues aux travailleurs, qu'il
s'agisse du salaire ou de ses accessoires (primes, indemnités,
allocations, dommages-intérêts, etc.).
En effet, le Code du travail congolais, comme ceux de tous les
Etats membres de l'OHADA, a prévu de protéger la créance
de salaire contre les
244 Art. 110 al. 2 Code du Travail.
80
saisies de créance (autrefois appelées
saisies-arrêts) en fonction de l'importance du salaire du travailleur et
de son caractère alimentaire.245
Certains Etats, dans leurs codes du travail, ont mis une
quotité incessible et insaisissable à l'abri de la concurrence
des créanciers en cas de distribution des deniers du débiteur en
en faisant un « super privilège », c'est-à-dire en le
plaçant à un rang plus avantageux que le privilège des
salaires proprement dit. C'est ce super privilège que le droit OHADA a
voulu préserver dans les textes concernés246 sans pour
autant le définir.
La RDC, contrairement à certains Etats parties de
l'OHADA, n'a pas prévu dans sa législation le concept de «
super privilège » et n'a pas fait une distinction entre une
quotité de salaire devant être la plus privilégiée
par rapport à l'autre. Elle conçoit le salaire dans son
entièreté, y compris tous ses accessoires, comme étant
privilégié.
Le fait que certains Etats reconnaissent le super
privilège et d'autres non donne l'impression d'une anomalie dans
l'application de ces textes. C'est pourquoi le point de vue du professeur
ISSA-SAYEGH (que nous épousons aussi) tend à la proposition d'un
remède envisageant soit la révision des textes concernés,
soit le comblement par un avis de la CCJA247de cette lacune. Ainsi
l'article 180 AUS pourra définir le privilège comme concernant
tous les salaires et le super privilège comme concernant la seule
quotité incessible ou insaisissable des salaires.248
2°) L'application du principe du privilège
des salaires dans la procédure
collective.
La préservation des quotités incessibles et
insaisissables des salaires apparaît comme la plus urgente tâche
à accomplir avant d'effectuer le paiement des créances des
salaires dans la masse et contre la masse.
a) Le paiement d'urgence des créances de salaires
super privilégiés
Cette règle est ainsi exprimée par l'article 96
AUPC : « Au plus tard dans les dix jours qui suivent la décision
d'ouverture et sur simple décision du juge- commissaire, le syndic paie
toutes les créances super privilégiées des travailleurs
sous déduction des acomptes déjà perçus ».
Si, au moment où le syndic entre en fonction, il trouve
des salaires impayés contenant le super privilège, il doit payer
ces créances, sous déduction des acomptes déjà
perçus sur la période concernée avant toutes autres sur
les fonds disponibles ou sur les premières rentrées de fonds. Si
c'et le syndic ou toute autre personne qui en fait l'avance, le payeur est
subrogé dans les droits
245 ISSA-SAYEGH J., Le sort des travailleurs, op.cit, p.
12.
246 Art. 225 et 226 AUS, Art. 166 et 167 AUPC.
247 Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.
248 ISSA-SAYEGH J., Le sort des travailleurs, op.cit, p.
12.
81
des travailleurs et doit être remboursé
dès la rentrée des fonds nécessaires sans qu'aucune autre
créance puisse y faire obstacle.
Il faut comprendre que ce paiement est destiné à
préserver le caractère alimentaire des salaires et la
quotité incessible et insaisissable qui lui correspond et qui peut
cruellement faire défaut aux travailleurs.
b) Le paiement des créances de salaire dans la
masse et contre la masse
Les créances de salaire « dans la masse
» sont des créances échues et exigibles avant le
jugement déclaratif de la cessation des paiements. Les travailleurs
titulaires de telles créances font partie de la masse et doivent, en
principe, concourir avec les créanciers placés dans la même
situation. Toutefois, du fait du caractère privilégié, ils
bénéficient d'une préférence dans l'ordre de
distribution des deniers établi par les articles 166 et 167 AUPC selon
que ces deniers à partager entre les créanciers proviennent de la
réalisation d'un bien immeuble ou meuble du débiteur.
Les titulaires des créances de salaire contre la masse
sont aussi dits créanciers de la masse249et font partie de la
masse. Mais l'appellation « créanciers contre la masse
» est plus conforme à l'article 117 AUPC qui définit
les créances contre la masse comme « toutes les dettes nées
régulièrement, après la décision d'ouverture, de la
continuation de l'activité et de toute activité
régulière du débiteur ou du syndic.
Il s'agit donc de toutes les créances nées
après le jugement déclaratif de cessation des paiements du
débiteur et durant la période allant jusqu'à la
clôture de la liquidation des biens, date à laquelle le
débiteur et les créanciers reprennent leur liberté.
En outre, il ne faut pas perdre de vue que certains
créanciers, dont les travailleurs, peuvent figurer dans la
procédure collective à deux titres : d'une part créanciers
dans la masse pour les salaires exigibles antérieurs au jugement
d'ouverture et d'autre part, créanciers contre la masse pour les
salaires nés après cette décision.
Après toutes les procédures ci-haut
détaillées, la liquidation des biens prend fin. Les
créanciers vont être totalement désintéressés
s'il n'y a pas insuffisance d'actif. Par la même occasion, le syndic, en
présence du débiteur, rend ses comptes au juge-commissaire qui,
par procès verbal, constate la fin des opérations. Le
procès verbal est communiqué au tribunal qui prononce la
clôture de la liquidation des biens et tranche, par la même
occasion, les contestations éventuelles. L'union est donc dissoute de
plein droit et les créanciers recouvrent l'exercice individuel de leurs
actions ; et par-dessus tout, la société disparaît
absolument.
249 Art. 166-4° et 167-7° AUPC.
82
CONCLUSION
La disparition de la société commerciale est une
réalité certaine et parfois inévitable. Sans nul doute,
cet avènement a toujours un effet, positif ou négatif, sur les
travailleurs de la société et sur leurs contrats de travail.
Pendant cette période généralement de
crise pour les travailleurs, ces derniers s'interrogent souvent sur le sort de
leurs contrats de travail et sur leurs créances de salaire, parce qu'ils
ne sont pas toujours certain de pouvoir faire valoir leurs droits, étant
donné par ailleurs que les licenciements s'avèrent
indispensables. Cependant, il est évident qu'ils sont reconnus comme
créanciers privilégiés de la société, et
bénéficient par conséquent d'une protection légale
spéciale.
Au cours de nos développements, nous avons
démontré que l'AUSCGIE et l'AUPC réglementent le
problème de disparition des sociétés et tout ce qu'elle
implique, tout en prévoyant les règles à suivre selon
qu'il s'agit de la dissolution, de la liquidation ou de la procédure
collective de liquidation des biens. Aussi, ils donnent des solutions
considérables quant au traitement des créances de salaire.
S'agissant de la dissolution, bien qu'elle entraîne la
mise en liquidation de la société, elle maintient cependant sa
personnalité morale pour les besoins de la liquidation. Les travailleurs
peuvent être licenciés pour motif économique si besoin est
; les associés de leur côté perdent le droit de
représenter la société, au profit du liquidateur,
nommé par eux-mêmes ou par le tribunal. C'est le liquidateur qui
est de payer les créanciers ; raison pour laquelle les travailleurs
pourront avoir une action sur lui pour le paiement de leur créance de
salaire.
Quant à la liquidation, cette dernière
éteint définitivement la personnalité morale de la
société. Le liquidateur reste l'acteur principal dans cette
étape et est chargé d'un bon nombre de devoirs parmi lesquels la
réalisation de l'actif de la société et le
désintéressement des créanciers. Une fois la liquidation
clôturée, et s'il existe encore des réclamations, les
travailleurs ne peuvent plus s'adresser à la société car
celle-ci n'existe plus. Ils auront dès lors une action directe contre
les associés. En outre, on ne peut parler de contrat de travail en cours
à cette étape.
Dans la procédure collective de liquidation des biens,
laquelle est conditionnée par une cessation des paiements
avérée et insurmontable, le jugement ordonnant cette liquidation
prévoit des normes à suivre pour mieux
désintéresser les créanciers. Pour ce faire, il groupe les
créanciers en état d'union et nomme des organes pouvant mener
à bien cette procédure, les associés ayant perdu le droit
d'engager la société la société. Ces organes sont
le syndic, le juge-commissaire et éventuellement les contrôleurs.
Le syndic est
83
chargé de réaliser l'actif, d'apurer le passif
et de désintéresser les créanciers suivant l'ordre des
paiements établi par la loi. Les travailleurs ont, dans cette
procédure, un grand rôle à jouer, notamment en tant que
contrôleurs. Ils bénéficient aussi du privilège
général des salaires, mais n'échappent pas au licenciement
pour motif économique initié par le syndic.
Les règles légales données semblent
parfaites pour trouver des solutions aux problèmes survenant dans cette
matière. Cependant, dans la pratique, l'insatisfaction de l'une ou de
l'autre partie est toujours au rendezvous. Il en résulte que la cause
demeure le non-respect des prescriptions légales. D'où
l'augmentation des litiges en la matière devant les cours et
tribunaux.
Qu'à cela ne tienne, le moins que l'on puisse dire est
que les travailleurs nécessitent une protection particulière
lorsque la société est en voie de disparition, étant
donné qu'ils constituent la partie économiquement faible. C'est
pourquoi, en vue d'une amélioration future de la marche des
procédures menant à la disparition de la société
sus évoquées et d'une protection efficace des
intérêts des travailleurs ainsi que ceux de la
société en disparition, nous faisons des suggestions et des
recommandations suivantes :
1. Pour la protection des droits des travailleurs congolais,
la législation congolaise en matière du travail devra
prévoir un système de garantie de salaire en cas des
procédures collectives par des organismes efficaces à l'instar de
l'AGS en France.250
2. Etant donnée la difficulté trouvée
dans la conciliation de la notion de super privilège251 avec
le droit congolais qui, non seulement ne la distingue pas du privilège,
mais aussi ne la prévoit même pas ; il est d'une importance
capitale pour le législateur OHADA d'une part d'envisager une
interprétation en la matière, et pour le législateur
congolais d'autre part d'envisager une adaptation en vue d'une application
aisée.
3. Dans la procédure de liquidation des biens, le
droit OHADA devrait prévoir la représentation de la
société en liquidation par un autre organe à
côté du syndic en vue d'éviter un conflit de fonctions dans
le chef du syndic. En effet, c'est seul le syndic qui est chargé de
représenter en même temps la masse des créanciers, le
débiteur (la société), et le tribunal. On ne voit pas
comment les
250 La loi française n°73-1194 du 27
décembre 1973 instaure un système de règlement des
créances résultant du contrat de travail en cas de
procédure collective de l'employeur. Ce régime «
d'assurance » est géré par l'association pour la
gestion du régime de garantie des créances des salariés,
appelée « AGS » (Assurance Garantie des salaires). Cet
organisme prend en charge certaines créances que l'employeur n'est pas
en mesure de régler sur les premiers fonds disponibles de l'entreprise,
après ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, de
liquidation des biens ou sous certaines conditions d'une procédure de
sauvegarde. C'est un organisme patronal fondé sur la solidarité
interprofessionnelle des employeurs et financé par leurs cotisations.
Elle garantit le paiement des sommes dues aux salariés dans les
meilleurs délais, conformément aux conditions fixées par
le code du travail français.
251 Le droit OHADA lui-même n'a ni défini cette
notion ni prévue les modalités de sa mise en pratique.
84
droits propres de la société en disparition
pourraient être mis en oeuvre et comment ses intérêts
pourraient être protégés (par exemple une action en recours
contre la décision du syndic ou du juge-commissaire). Il est donc
inconcevable que le syndic soutienne lui-même deux actions
contradictoires ou deux intérêts opposés.
4. Le droit du Travail congolais doit être revu, enrichi
et adapté à la vision du droit OHADA, notamment dans les
matières ayant trait aux procédures collectives d'apurement du
passif, car ces matières impliquent le sort et le rôle des
travailleurs face à leur débiteur en difficulté ou face
à une société menacée de disparition et ne sont
presque pas abordées par le législateur congolais en
matière du travail.
Il nous est impérieux de signaler enfin que nous
n'avons pas la prétention d'affirmer que notre étude est
complète et exhaustive. Nous osons croire qu'elle a certainement ouvert
d'autres champs de recherche qui nous compléterons.
85
BIBLIOGRAPHIE
I. TEXTES LEGAUX
1. Acte uniforme relatif au Droit des sociétés
commerciales et du GIE, in Journal officiel OHADA, n°
spécial du 04 février 2014.
2. Acte uniforme du 15 décembre 2010 portant
organisation des sûretés, in Journal officiel OHADA,
n°22 du 15 février 2011.
3. Acte uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des
procédures collectives d'apurement du passif, in Journal officiel
OHADA, n° 07 du 1er juillet 1998, p. 1 et s.
4. Loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du
travail, in Journal officiel de la RDC, 43ème
année, n° spécial du 25 octobre 2002.
II. JURISPRUDENCE
1. Cour d'appel de Dakar, chambre civile et commerciale,
Arrêt n° 192 du 18 février 2010 ; Mr X c/
société A4 CENTER, in OHADA, Traité et actes uniformes
commentés et annotés, Juriscope, 2012, p. 1117.
2. Cour d'appel de Bobo-Dioulasso, chambre commerciale,
Arrêt n° 10/09 du 10 juin 2009 ; UTB, SAWADOGO KOMYABA et autres c/
BOKOUM SAMBA Amadou ;
Ohada.com/Ohadata
J-10-117.
3. CCJA, Arrêt n° 039/2008 du 17 juillet 2008 ;
Abdoulaye BALDE et autres c/ Boubacar Alphodio BAH, in OHADA, Code bleu,
p. 198.
4. Tribunal de Commerce de Bamako, Jugement n° 179 du 26
avril 2006 ; société AIR-MALI S.A, in OHADA, Traité et
actes uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2012, p.
1272.
5. Cour d'appel d'Abidjan, Arrêt n° 1048 du 20
juillet 2001 ; Société S.I Flor Tropiques c/ M. Jean DELAURNEY ;
Ohada.com/Ohadata
J-04-103.
6. Tribunal de 1ère Instance d'Abidjan,
Jugement n° 80 du 12 avril 2001 ; NIAYE Aimé DESSEROUIN FERNANDE c/
Nicole GOMES épouse Lemaître ; in Ecodroit n° 10,
avril 2002, p. 79 (
Ohada.com/Ohadata
J-02-96).
7. Tribunal de 1ère Instance de Libreville,
Jugement n°11/2000-2001 du 12 mars 2001 ; Mr X c/ Société
OGAR, in OHADA, Traité et actes uniformes commentés et
annotés, Juriscope, p. 1176.
8. Tribunal de 1ère Instance de Niamey,
Jugement civil n° 027 du 20 janvier 1999 ; MOUTARI MACAM SOULEY c/ SEEF
Niger ;
Ohada.com/Ohadata J-0474.
9. Cour suprême du Cameroun, Arrêt n° 85 du
07 juin 1973, in Revue camerounaise de Droit, n° 09, p. 62.
86
III. DOCTRINE
1. ALBORTCHIRE A., Le sort des contrats dans les
opérations de fusion et de scission de sociétés
commerciales, Thèse, université d'Auvergne, Clermont-Ferrand
I, 2005, 437 pages.
2. ALISSOUTIN O.K., Principe, objectifs et pratique du
commissariat aux comptes : cas du « Carder Atlantique Littoral
», CESAG, 2004, 77pages.
3. CAMERLYNCK G.H et LYON CAEN G., Droit du travail,
8ème édition, Dalloz, Paris, 1976, 553 pages.
4. CATALA N., L'entreprise, Dalloz, Paris, 1980, 356
pages.
5. DIEYE A., Le régime juridique des
sociétés commerciales et du GIE dans l'espace OHADA,
4ème édition, Cabinet Aziz DIEYE, Dakar, 2014, 388
pages.
6. DUPLAT J.L, « Les services des enquêtes
commerciales des tribunaux de commerce », in L'Entreprise en
difficulté, Editions Jeune barreau, 1981, pp. 45-76.
7. ISSA-SAYEGH J., « Présentation des
dispositions sur la dissolution et la liquidation des sociétés
commerciales »,
Ohada.com/Ohadata D-06-15, pp.
113.
8. ISSA-SAYEGH J., « Le sort des travailleurs dans les
entreprises en difficulté », in Penant, n°870, pp.
46-68 (
Ohada.com/Ohadata D-09-41).
9. JAMOULLE M., Le contrat de travail, Tome 1, FDESSL,
Liège, 1982, 422 pages.
10. JOUFFIN V.E, Le sort des contrats en cours dans les
entreprises soumises à une procédure collective, LGDJ, Paris,
1995.
11. MEUKE B.Y, « Qui représente la
société en liquidation dans l'espace OHADA ? » ;
Ohada.com/Ohadata D-08-16, pp.
1-6.
12. MUKADI BONYI, Droit du travail, CRDS, Bruxelles,
2008, 741 pages.
13. OHADA, Code bleu, 3ème
édition, Juriafrica, 2014, 856 pages.
14. OHADA, Droit des sociétés commerciales
et du GIE, commentaires, Edicef, paris, 1998, 330 pages.
15. OHADA, Traité et actes uniformes
commentés et annotés, 4ème édition,
Juriscope, 2012, 1460 pages.
16. PETIT B., Droit des sociétés,
L'avenir, Bruxelles, 1960, 130 pages.
17. REINHARD Y., Droit commercial,
3ème édition, Litec, Paris, 1993, 403 pages.
18. SAWADOGO F.M, « Commentaires sur l'AUPC », in
OHADA, Traité et actes uniformes commentés et
annotés, Juriscope, 2012, pp. 1121-1302.
87
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION Erreur ! Signet non
défini.
CHAPITRE 1er GENERALITES Erreur ! Signet non
défini.
SECTION I NOTION DE SOCIETE COMMERCIALE Erreur ! Signet
non
défini.
§1 DEFINITION ET NATURE JURIDIQUE Erreur ! Signet
non défini.
A. Définition Erreur ! Signet non
défini.
B. Nature juridique Erreur ! Signet non
défini.
§2 DISTINCTION AVEC LES NOTIONS ET GROUPEMENTS VOISINS
Erreur ! Signet non défini.
A. Société et entreprise Erreur ! Signet
non défini.
B. Société et association Erreur ! Signet
non défini.
C. Société et Groupement d'Intérêt
Economique (GIE) Erreur ! Signet non défini.
§3 CONSTITUTION ET FONCTIONNEMENT DE LA SOCIETE ..
Erreur ! Signet non défini.
A. Les formalités de constitution Erreur ! Signet
non défini.
1. L'établissement des statuts Erreur ! Signet
non défini.
2. L'immatriculation Erreur ! Signet non
défini.
3. Formalités de publicité Erreur ! Signet
non défini.
4. Sanctions d'irrégularité Erreur !
Signet non défini.
B. Le fonctionnement de la société Erreur !
Signet non défini.
1. Les associés Erreur ! Signet non
défini.
2. Les dirigeants sociaux Erreur ! Signet non
défini.
3. Les commissaires aux comptes Erreur ! Signet non
défini.
3. Les salariés Erreur ! Signet non
défini.
§4 CLASSIFICATION DES SOCIETES Erreur ! Signet non
défini.
A. Classification fondée sur le régime juridique
Erreur ! Signet non défini.
1. Sociétés civiles et sociétés
commerciales Erreur ! Signet non défini.
2. Sociétés de personnes et sociétés
de capitaux Erreur ! Signet non défini.
3. Sociétés personnifiées et
sociétés non personnifiées Erreur ! Signet non
défini.
B. Classification fondée sur les formes légales des
sociétés commerciales .... Erreur ! Signet non
défini.
1. La Société en Nom Collectif (SNC) Erreur
! Signet non défini.
2.
88
La Société en Commandite Simple (SCS)
Erreur ! Signet non défini.
3. La Société à Responsabilité
Limitée (SARL) Erreur ! Signet non défini.
4. La Société Anonyme (SA) Erreur ! Signet
non défini.
5. La Société par Actions Simplifiée (SAS)
Erreur ! Signet non défini. SECTION II NOTION DE
CONTRAT ET DE CONFLIT DE TRAVAIL .. Erreur !
Signet non défini.
§ 1 CONTRAT DE TRAVAIL Erreur ! Signet non
défini.
A. Définition Erreur ! Signet non
défini.
B. Eléments caractéristiques Erreur !
Signet non défini.
C. Les parties au contrat de travail Erreur ! Signet non
défini.
D. Distinction entre contrat de travail et contrats voisins
Erreur ! Signet non défini.
§2 CONFLITS DE TRAVAIL Erreur ! Signet non
défini.
A. Litiges individuels de travail Erreur ! Signet non
défini.
B. Conflit collectif de travail Erreur ! Signet non
défini.
§3 CONTRAT EN COURS Erreur ! Signet non
défini.
A. Un contrat en cours d'existence Erreur ! Signet non
défini.
B. Un contrat en cours d'exécution Erreur !
Signet non défini. CHAPITRE 2ème IMPACT DE
LA DISPARITION DE LA SOCIETE SUR
L'ACTIVITE CONTRACTUELLE Erreur ! Signet non
défini.
SECTION 1 LA DISSOLUTION DE LA SOCIETE Erreur ! Signet
non défini.
§1 NOTION DE DISSOLUTION Erreur ! Signet non
défini.
A. Définition Erreur ! Signet non
défini.
B. Causes Erreur ! Signet non défini.
I. Causes communes Erreur ! Signet non
défini.
II. Causes particulières Erreur ! Signet non
défini.
§2 EFFETS DE LA DISSOLUTION Erreur ! Signet non
défini.
A. Sur la société Erreur ! Signet non
défini.
B. Sur les tiers Erreur ! Signet non
défini.
C. Sur les travailleurs Erreur ! Signet non
défini.
SECTION II LA LIQUIDATION DE LA SOCIETE Erreur ! Signet
non défini.
§1 NOTION DE LIQUIDATION Erreur ! Signet non
défini.
§2 INTERVENTION DU LIQUIDATEUR Erreur ! Signet non
défini.
A. Nomination Erreur ! Signet non
défini.
B.
89
Déroulement des opérations de liquidation
Erreur ! Signet non défini.
C. Clôture de la liquidation Erreur ! Signet non
défini.
§3 EFFETS DE LA LIQUIDATION Erreur ! Signet non
défini.
A. A l' égard de la société Erreur
! Signet non défini.
B. A l' égard des créanciers Erreur !
Signet non défini.
SECTION III LA PROCEDURE COLLECTIVE DE LIQUIDATION DES
BIENS
Erreur ! Signet non défini.
§1 CONDITIONS D'OUVERTURE ET MODALITES D'EXECUTION ...
Erreur ! Signet non défini.
A. Conditions d'ouverture Erreur ! Signet non
défini.
B. Modalités d'exécution Erreur ! Signet
non défini.
1°) La décision du tribunal Erreur ! Signet
non défini.
2°) Effets du jugement de liquidation des biens
Erreur ! Signet non défini.
3°) Solution de la liquidation des biens Erreur !
Signet non défini.
§2 ROLE DES TRAVAILLEURS DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA
PROCEDURE DE LIQUIDATION DES BIENS Erreur ! Signet non
défini.
A. Rôle des travailleurs dans le déclenchement de
la procédure .. Erreur ! Signet non défini.
B. Rôle des travailleurs dans le déroulement de la
procédure Erreur ! Signet non défini.
§3 L'ACTIVITE CONTRACTUELLE FACE A LA PROCEDURE DE
LIQUIDATION DES BIENS Erreur ! Signet non
défini.
A. L'exécution des contrats en cours Erreur !
Signet non défini.
B. Le traitement des créances de salaire Erreur !
Signet non défini.
1°) Principe du privilège général des
salaires Erreur ! Signet non défini.
2°) L'application du principe du privilège des
salaires dans la procédure collective.
Erreur ! Signet non défini.
CONCLUSION Erreur ! Signet non défini.
BIBLIOGRAPHIE Erreur ! Signet non
défini.
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