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Etabli par :
SBAY Youssef
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
2
INTRODUCTION GENERALE
Les scandales successifs qui ont secoué le monde de la
finance et de l'économie durant les dernières décennies,
n'ont pas manqué de poser certaines interrogations, en particulier au
niveau des mécanismes juridico-économiques qui étaient
censés assurer prévention contre de tels abus et
fraudes.1
Que ce soient les falsifications des comptes, les
délits d'initiés, la certification indue des documents comptables
et financiers, le laxisme du contrôle et prévention, les erreurs
de gestion, les collusions entre dirigeants et organes d'audit etc., les
scandales financiers et économiques ont en effet défrayé
la chronique.
En effet, le développement des activités
économiques, financières, et de plus en plus
géographiquement dispersés, ont fait de la société
une entité complexe dont un suivi fiable nécessite un
contrôle permanent et en profondeur. Compte tenu de l'importance de cet
enjeu, il est indispensable qu'un dispositif de contrôle s'impose
constamment afin d'améliorer l'efficacité et le fonctionnement de
l'entreprise.2
Pivot du contrôle supposé imprimer
sincérité, transparence et information sur les situations et
comptes des entités économiques, et donc empêcher toute
escroquerie, le commissariat aux comptes s'est trouvé, entre autres
acteurs, éclaboussé par ces graves défaillances dans le
fonctionnement normal du système capitaliste.3 Les carences
constatées dans la certification des comptes, les manquements au code de
déontologie, et les pratiques illicites, à l'origine de ces
scandales, ont ainsi mis les commissaires aux comptes sous les feux de la
critique et de la vindicte publique.
La mise en place par le législateur d'un commissariat
aux comptes obligatoire repose sur l'idée de confier à des
professionnels indépendants une mission générale et
permanente de vérification des comptes et de contrôle du
fonctionnement de certaines personnes morales, en particulier les
sociétés commerciales faisant appel public à
l'épargne. 4
Il en résulte que l'étude du commissaire aux
comptes, ne peut être dissociée de celle de la
société anonyme.
1 P. Kerebel, Management des risques, Eyrolles, 2009,
p 103
2H.Nguiyen, Le contrôle interne : Mettre hors
risque l'entreprise, L'Harmattan, 1999, p 126 3P. Moulin, Agir face
à la crise financiére, PLInformatique, 2009, p 7 4M.
Davagle, La bonne gouvernance dans les ASBL, Edipro,2011, p 24
La responsabilité du commissaire aux
comptes
3
Cependant avant de devenir, le gardien de la
légalité, et le garant de la confiance, l'institution
indispensable à toute société, le commissariat aux comptes
a connu un long cheminement.1
I- L'évolution historique :
Il conviendrait donc, pour une meilleure appréhension
et compréhension de la responsabilité civile et pénale
ainsi que disciplinaire du commissaire aux comptes, objet du présent
mémoire, de placer cette profession dans son contexte historique.
Pour apprécier, l'évolution du contrôle
incombant au commissaire aux comptes, il est nécessaire, de se placer
dans une perspective extrêmement dynamique. Les principales monographies
consacrées à la question soulignent d'emblée le
caractère évolutif de la matière. De même la plupart
des écrits qu'ils traitent d'aspects généraux relatifs
à la profession ou de points concernant un aspect particulier du
contrôle légal, mentionnent de manière plus ou moins
développée les transformations permanentes caractérisant
le domaine. 2
A cet égard, une étude sur l'évolution
historique du droit des sociétés en général, et du
commissariat aux comptes en particulier s'impose.
1- Le cadre historique de la société
anonyme
Le commissariat aux comptes est une des institutions
fondamentales du droit des sociétés, tout particulièrement
des sociétés par action. La société anonyme est
l'exemple concret d'une société par action.
Il s'agit d'une société commerciale en raison de
sa forme et quelque soit son objet, elle est qualifiée
société par action, par ce que cette dernière
c'est-à-dire l'action, est titre un droit, attribué en
contrepartie, d'un apport effectué par l'associé qui est
appelé actionnaire. 3
Ainsi la réunion de ces actions forme le capital de la
société.
La société anonyme, est donc un moyen de
rassembler des capitaux, et d'associer des épargnants à la
réalisation d'une activité industrielle et commerciale, sans leur
faire courir un risque illimité.4
En réalité, ce remarquable instrument de
mobilisation des capitaux est un symbole du développement et de
l'efficience économique, industriel, et social.
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 414
2T. Granier, Le contrôle des entreprises :
evolutions et perspectives, L'Harmattan, 2007,p 143
3Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008), art 1
4R. Villenlogue, Structure et fonctionnement des
entreprises, Volume1, Les Cours de droit, 1952,p400
La responsabilité du commissaire aux
comptes
4
Autorisé à faire appel public à
l'épargne cela lui permet (société anonyme), de faire
participer un grand nombre d'actionnaires, et mobiliser des capitaux
importants. Un lien est d'ailleurs constatable entre le développement
des sociétés par actions et celui des moyennes entreprises.
Cette société anonyme, qui représente la
majorité des formes de sociétés au Maroc, constitue une
technique d'organisation assez flexible de l'entreprise puisqu'elle semble
s'adapter à toute sortes d'entreprises qu'elles soient petites ou
moyennes.1
Outre cet aspect économique, la société
anonyme, présente également un mode d'administration original.
En fait si la démocratie et la liberté sont les
fondements essentiels et nécessaires pour la réussite de tout
état. La société anonyme adopte les mêmes principes,
lorsqu'il s'agit de son régime d'administration et de
gestion.2
Dans ce contexte, le principe de séparation des
pouvoirs était respecté, à travers notamment un pouvoir
législatif, représenté par une assemblée
générale des actionnaires, en plus d'un pouvoir exécutif
représenté par le conseil d'administration qui élit le
directeur général, ou bien par le conseil de surveillance qui
nomme à son tour les membres du directoire, suivant le mode
d'administration adopté.3
Or, au début, ce régime de gestion et
d'administration de la société anonyme commençait à
présenter plusieurs défaillances, liées surtout aux abus
des dirigeants de la société, en plus de certaines
spéculations illicites.4
En fait ces dérogations, constituaient une
conséquence de l'absence d'un système de contrôle qui
aurait permis d'assurer une certaine stabilité, et
crédibilité liée au mode d'administration et de gestion de
la société anonyme. 5
Face à cette situation, qui risquait de mettre en
péril le rôle économique, et social, voire politique de la
société anonyme, et dans le souci d'assurer pour l'essentiel la
protection des intérêts des épargnants et des
créanciers, qui leur été très préjudiciables
les agissements des dirigeants de la société, qui confisquaient
les pouvoirs de décision et de contrôle, et permettait en
conséquent le triomphe d'une petite minorité de capitalistes, la
doctrine 6est
1 L. Echihabi, Guide de la transmission des
entreprises au Maroc, L'agence nationale pour la promotion de la PME, 2011
2 E. Guillemim, Economie et democratie, L'Harmattan,
2004, p 150
3A. Dumont, Le guide pratique de l'assemblée
générale et du conseil d'administration, Edipro, 2003, p60
4 Monéger. R, Le commissaire aux comptes, 1995,
p 6
5C. Rugger, Essai sur la société anonyme
: dissertation, Jules-Guillaume Fick, 1868, p 54
6J.Bours, Traité pratique de droit commercial,
Kluwer, 1998, p 530
La responsabilité du commissaire aux
comptes
5
intervenue, en remettant en cause le mécanisme de
gestion et d'administration de la société anonyme, et
réclamant la mise en place d'un organe de contrôle.
2- Le cadre historique du commissaire aux comptes :
En fait, le contrôle des premières
sociétés commerciales ne s'est pas d'abord effectué par un
organe légal de contrôle, mais il a subi, depuis son origine, une
longue évolution historique qui s'est conclue notamment par
l'institution du commissariat aux comptes.1
En France par exemple, les dirigeants de
sociétés n'ont pas cédé facilement aux
réclamations des différentes parties comme les actionnaires et
les créanciers, destinées à assurer un contrôle
effectif des comptes et une certaine crédibilité.
Ainsi la loi de 1856 relative aux sociétés en
commandite par action, institua le contrôle de la société
par un conseil de surveillance, celui- ci qui n'a rien de commun avec le
conseil de surveillance organe de direction de la société
anonyme, ne représentait pas du reste une innovation, étant
donné que ses membres étaient soigneusement choisis par les
dirigeants.2
Les membres du directoire agissaient au nom des mêmes
intérêts de ceux qui exerçaient la direction de la
société. Cependant ce système a rapidement
révélé son inefficacité pratique, raison pour
laquelle le pouvoir de contrôle a été attribué au
commissaire aux comptes.
L'institution du commissariat aux comptes, est apparue pour la
première fois en France, dans le cadre de la loi du 23 mai 1863 sur les
sociétés à responsabilité limité , qui fit
obligation, aux sociétés par actions de désigner un ou
deux commissaires, associés ou non par la suite appelés
commissaires de surveillance, ou commissaires de sociétés. Ces
derniers, qui avaient le droit selon le texte « toutes les fois qu'ils
jugent convenable dans l'intérêt social, de prendre communication
des livres, d'examiner les opérations de la société, et de
convoquer l'assemblée générale »,en
réalité n'ont pas exercé de véritable
contrôle malgré qu'il était permanent, leur intervention
était plus ou moins fictive, et consister seulement dans la
vérification du bilan et des comptes, présentés par les
administrateurs, dans le cadre d'un rapport.3
Par ailleurs, dans la loi du 24 juillet 1867,
réglementant la société anonyme, le rôle et les
exigences relatives à la désignation du commissaire aux comptes
ont connu une restriction importante, par conséquent aucune condition de
formation ni d'honorabilité n'était exigée
1V. Tsapi. , Les implications économiques,
comptables et fiscales dans le système Ohada, 2009, p 135
2SEP, Journal des économistes, Guillaumin, 1861, p 316
3L. Tripier, Commentaire sur la loi du 23 mai 1863 sur les
sociétés à responsabilité limité,1863, p
150
La responsabilité du commissaire aux
comptes
6
s'agissant de la nomination des commissaires aux comptes, le
contrôle effectué est devenu trimestriel, alors qu'il était
permanent dans le cadre de la loi précitée, d'autant plus qu'ils
étaient mal rémunérés et ne jouissaient d'aucune
indépendance.1
Cependant, devant la multiplication des abus et des scandales
financiers lors de la crise de 1929, en plus de l'inefficacité du
contrôle, l'incompétence et le manque d'indépendance du
commissaire aux comptes à l'égard des dirigeants, voire
même un déclin de la profession du commissariat aux comptes, le
législateur français promulgua un décret-loi le 8
août 1935, dans lequel, les considérations liées à
la protection des actionnaires et épargnants furent prises en compte, en
plus les incompatibilités destinées à garantir
l'indépendance du commissaire aux comptes à l'égard de la
société et de ses dirigeants furent édictées, or
malheureusement, cette bonne initiative fut mal
appliquée.2
Par la suite, la loi du 24 juillet 1966 constitue une
étape fondamentale dans l'évolution du commissariat aux comptes.
Ceux-ci sont désormais obligatoirement nommés pour une
durée de 3 ans, et ne peuvent être révoqués que pour
justes motifs.3
En effet cette loi, leur confère de larges pouvoirs
d'investigation aux commissaires aux comptes, tout en assurant leur
indépendance et leur autorité à l'égard des
dirigeants de la société .
Cependant sur le plan national, le régime légal
de la profession du commissariat aux comptes, trouve en effet sa place dans le
droit des sociétés et le plus précisément dans le
droit des sociétés anonymes.
La législation marocaine sur la société
anonyme, résultait auparavant du dahir du 11 août 1922
régissant les sociétés anonymes, qui n'a fait qu'a
appliqué à lettre la loi française de 1867, celle-ci fut
simplement et purement annexée au dit dahir. 4
L'article premier de ce dahir énonce en effet :
«Les sociétés anonymes et les
sociétés en commandite par actions ne peuvent se former que dans
les conditions prévues par la loi française du 24 Juillet 1867,
modifiée par les lois des 1er Août 1893, 16 Novembre 1903, 22
Novembre 1913 et 2 Mars 1943. Elles sont régies également par les
dispositions de la dite loi pour tout ce qui touche leur fonctionnement et leur
dissolution...»
1E. Bertin, Audit interne : enjeux et pratique
à l'international, Eyrolles, 2007, p15
2 C. Hannoun, Le contrôle des entreprises :
evlution et perspectives, L'Harmattan, 2007, p144 3D.Jongbloed, EURL
-SARL A CAPITAL VARIABLE, Jongbloed Dominique,2006, p 114
4 A.Idrissi, Le commissariat aux comptes au Maroc,
« Gestion et société » revue trimestrielle,
publiée par l'ISCAE, 1979 p 36
La responsabilité du commissaire aux
comptes
7
En vertu de ce dahir et comme c'était le cas
évidemment en France, aucune condition de compétence ou
d'incompatibilité, n'était prévue, en ce qui concerne la
nomination du commissaire aux comptes, sa mission était limitée
à la préparation d'un rapport annuel destiné à
l'assemblée des actionnaires, tandis que sa responsabilité civile
en vertu de l'article 43 du dit dahir était fixée par les
règles générales du mandat, il en résulté
qu'a cette époque, la responsabilité civile du commissaire aux
comptes était de nature contractuelle.
Cependant cette loi conservait ces imperfections, jusqu' au
1990. Bien qu'elle ne stipulait aucune restriction concernant la
nationalité du commissaire aux comptes, (marocains ou étrangers
pouvaient exercer cette activité).
Par ailleurs, le Maroc recouvre son indépendance en
1956. Des changements structurels s'ensuivent. On peut repérer trois
phases distinctes. La première s'étend jusqu'à la fin des
années 1966, son trait marquant est les conditions de nomination, et les
incompatibilités prévues à l'égard du commissaire
aux comptes, La seconde, au tournant des années 1993, correspond
à une politique d'ouverture du pays et de réforme de la
profession comptable. La troisième phase est dominée par la
modification du droit des sociétés en 1996.
Ainsi il convient de signaler, que pour la première
fois dans l'histoire de la législation marocaine sur les
sociétés, 1le décret royal portant loi n°
195-66 du 7 Rejeb 1386, 22 Octobre 1966 sur les sociétés
d'investissement, énonce des conditions pour la désignation des
commissaires aux comptes y compris des règles d'incompatibilités,
dans les sociétés d'investissement, celles-ci doivent
obligatoirement revêtir la forme de société anonyme, et
sont soumises aux dispositions du dahir de 1922, sauf sur les points où
le décret-royal du 22 Octobre 1966 a édicté des
dispositions dérogatoires au droit commun des sociétés
anonymes.
Le 8 janvier 1993, le dahir 1-92-139 vient promulguer la loi
n°15-892, réglementant la profession d'expert comptable
et instituant un ordre des experts comptables. Cette loi définit dans
son premier article l'expert comptable comme étant : « ...celui qui
fait profession habituelle de réviser, d'apprécier et d'organiser
la comptabilité des entreprises auxquels il n'est pas lié par un
contrat de travail » Mais cette loi vient surtout créer le monopole
des experts comptables, en indiquant que l'expert comptable est le seul
habilité à exercer la mission de commissaire aux
comptes.3
1 A. Midaoui, Les entreprises publiques au Maroc et
leur participation au développement, -impression Afrique-Orient, 1981, p
387
2loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
3 M. Harakat, les finances publiques et les
impératifs de la performance : le cas du Maroc, L'Harmattan, 2011, p
205
La responsabilité du commissaire aux
comptes
8
Cependant, c'est la loi n° 17-95 1relative
à la société anonyme qui révolutionne la profession
du commissaire aux comptes, en effet ce dahir a introduit une profonde mutation
destinée à la perfection de son action. Deux voies furent suivies
par le législateur à cet effet. D'une part la mission du
commissaire aux comptes d'origine contractuelle, est étendue et devient
légale et permanente, et la durée de leurs fonctions passe de 1
à 3 exercices. D'autre part au-delà du simple contrôle des
comptes, un engament personnel du commissaire sur leur régularité
et leur sincérité doit être exprimé au travers la
certification. Son indépendance est désormais assurée en
introduisant un ensemble rigoureux d'incompatibilités et
d'interdictions, sans oublier l'obligation d'inscription à liste
d'experts comptables. D'ailleurs il convient de signaler le renforcement de
tous les aspects de sa responsabilité aussi bien, civile, pénale
que disciplinaire.2
Enfin, il convient de signaler les amendements apportés
par la loi n° 20-05 sur la loi n° 17-95 relative à la
société anonyme, s'agissant du commissaire aux comptes, et qui
ont été destinées au renforcement de l'indépendance
du contrôleur légal.
II- L'importance
Au terme de cette analyse historique, de l'évolution du
commissaire aux comptes aussi bien en France qu'au Maroc, il
serait facile de déduire à l'évidence, d'un point de vue
historique, que la profession du commissariat aux comptes a connu de grandes
mutations, tant au niveau du système pris dans son ensemble qu'au niveau
spécifique des dispositifs mis en oeuvre pour assurer sa
viabilité et son efficacité. Or cette efficacité ne peut
résulter que du caractère essentiel, du contrôle
exercé par le commissaire, et qui a été souligné
lors de l'examen de l'expansion de ses missions. A l'origine et comme l'indique
son nom d'ailleurs, le commissaire aux comptes était principalement
chargé de vérifier les comptes de l'exercice.3
En effet au-delà de son utilité évidente
pour les dirigeants, le contrôle légal présente un grand
intérêt d'abord pour la société, mais
également pour ses membres, qu'ils soient des actionnaires, des
salariés, ainsi que les tiers qui peuvent consister en fournisseurs,
épargnants, clients. La nature fondamentale de contrôle tient
aussi à ses caractères. 4
Ainsi Pour réussir ses ambitions et continuer à
exister, la société doit arriver à harmoniser les
intérêts, ce qui exige un système de contrôle dont
l'objectif est de réduire l'attitude opportuniste des dirigeants.
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
2 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 18
3 M. Letaief, L'etat et les entreprises publiques en
Tunisie : Les mutations de contrôle, L'Harmattan, 1998,p 369
4 OECD, Le contrôle de la solvabilité des
compagnies d'assurance, OECD Publishing, p 49
La responsabilité du commissaire aux
comptes
9
Ce système de contrôle reste le seul moyen
permettant d'observer les actes des dirigeants, en plus il va permettre aux
différents intéressés de s'informer sur la performance de
la société et sa capacité à honorer ses
engagements. Elle constitue aussi bien pour les actionnaires que pour les
créanciers un moyen qui témoigne de la qualité de la
gestion du dirigeant et de la capacité de l'entreprise à
régler ses dettes.1
Le rôle dévolu au commissaire aux comptes est
justement de protéger la société dans son ensemble, en
certifiant les comptes et en donnant une image fidèle des entités
contrôlées. En bref, asseoir et renforcer la confiance, instaurer
la fiabilité de l'information économique et financière,
sans lesquels tout système est menacé d'écroulement.
Le commissaire aux comptes est une institution essentielle du
contrôle dans les sociétés et organismes
économiques. Il est le contrôleur des comptes. Il s'assure du
respect de la légalité. Il est le garant institutionnel des
intérêts mis en cause par la gestion des dirigeants. Il est le
membre d'une profession libérale sous tutelle
étatique.2
Ainsi le commissaire aux comptes est un organe indispensable
au droit des affaires, dont l'intérêt et l'utilité
s'apprécie à travers les finalités de ses interventions et
missions.3
La finalité première de l'intervention du
commissaire aux comptes, est de confirmer la fiabilité de l'information
que les dirigeants adressent aux actionnaires. Il n'agit pas comme un censeur
qui approuve ou condamne. Son but est de contribuer au bon fonctionnement des
mécanismes d'information et de contrôle au sein des entreprises et
par là, il se place d'abord au service de la société, Il
occupe une position centrale dans ce qu'il est convenu d'appeler le
gouvernement d'entreprise4 (également connu sous la dénomination
anglaise de « corporate governance »).5
Dans un monde complexe où les exigences d'informations
s'étendent sans cesse, le commissaire aux comptes, apporte autant que
possible la sécurité dans l'information financière
publiée par l'entreprise.
Par ailleurs, l'intervention du commissaire aux comptes,
constitue également une garantie de l'intérêt
général, en effet les comptes annuels d'une société
sont aussi destinés à des personnes qui ne sont ni ses
dirigeants, ni ses actionnaires. On pense alors aux membres
1 E. Mandzilla, La gouvernance de l'entreprise : une
approche par l'audit et le contrôle interne, L'Harmattan, 2006, p 204
2 2 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995,p 17
3 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement ou
dérive ?, Litec, 1989, p 36
4 Tsapi. V, Les implications économiques,
comptables et fiscales dans le système Ohada, 2009, p 140
5 M. Mouthieu, L'interet social en droit des
sociétés, L'Harmattan, 2009, p 263
La responsabilité du commissaire aux
comptes
10
de son personnel, aux banquiers, fournisseurs ou clients,
investisseurs et futurs partenaires ainsi qu'aux autorités publiques et
notamment fiscales.1
Tous ceux qui consultent ces comptes annuels ont droit
à la sécurité découlant de la révision des
comptes, le commissaire aux comptes ne participe pas à
l'élaboration des comptes, il peut exprimer à leur sujet
l'opinion objective d'un professionnel totalement extérieur aux
préoccupations des gestionnaires.
Conséquemment, c'est ce contrôle et
révision des comptes qui expliquent la confiance que les
différents intéressés lui accordent.2
Les commissaires aux comptes sont des professionnelles,
chargés de contrôler les comptes de la société, de
la certifier, et plus généralement de réduire toute
incertitude et de vérifier que la vie sociale se déroule dans des
conditions régulières.3
Dans l'environnement économique actuel, le
contrôle revêt une importance fondamentale pour la
société, le commissaire aux comptes, et plus largement pour les
tiers.4
Les récents scandales financiers ont d'ailleurs
clairement souligné les conséquences néfastes que
pouvaient avoir des manquements dans ce domaine.
Malgré son importance incontestée, la notion de
contrôle n'est pas uniformément
définie.
En général, le contrôle est un concept
abstrait qui peut être interprété de diverses
manières.
Il en existe donc une multitude de définitions.
Dans le vocabulaire du Doyen Cornu, on retrouve les trois sens
: vérification, maîtrise et surveillance, les deux derniers ayant
des applications particulières en droit des sociétés.
Ces deux appréhensions de la notion de contrôle
ne sont pas aussi indépendantes l'une de l'autre qu'elles peuvent le
paraître. On ne peut pas les dissocier totalement car elles peuvent
s'influencer réciproquement. Celui qui dispose du contrôle
maîtrise, c'est en principe, les actionnaires majoritaires et donc les
organes qu'ils désignent, disposent finalement du pouvoir de diriger les
affaires sociales. Ce pouvoir peut être plus ou moins absolu en fonction
de l'importance des capitaux détenus et des alliances qui peuvent
exister entre les différents actionnaires. Par ailleurs, les organes
chargés classiquement du contrôle-surveillance, sont
1 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 20
2 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive ?, Litec, 1989, p 200
3 E. Genaivre, Ethique et gouvernance d'entreprise en
France, Publibook, 2006, p 67
4 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 22
La responsabilité du commissaire aux
comptes
11
également les élus de l'assemblée
générale. Par conséquent, les organes de surveillance
émanent du cercle des contrôlaires, qui sont ceux qui finalement
dirigent la société, par le biais des organes de gestion, puisque
ce sont les actionnaires majoritaires qui vont désigner ces
organes.1
La société anonyme connait principalement deux
organes de contrôle. Il s'agit du conseil d'administration ou de
surveillance et le commissaire aux comptes.
Le conseil d'administration ou le conseil de surveillance
effectuent en réalité un exercice classique du contrôle
dont l'efficacité parait être limitée, pour deux types de
raisons liées à leur composition et au cumul de fonctions qu'ils
pratiquent .2
Tandis que s'agissant du commissaire aux comptes, celui-ci
assure un contrôle légal destiné à assurer la
fiabilité de l'information financière et par la même de
concourir à la sécurité de la vie économique et
sociale, tant pour les besoins de gestion et d'analyse interne à
l'entreprise que pour les besoins de l'ensemble des partenaires ou les tiers
intéressés par celle-ci. 3
En réalité, on peut d'ores et déjà
dire que le contrôle effectué par le commissaire aux comptes
présente différents caractères : il est global, en ce sens
qu'il n'est plus limité à celui des comptes, mais touche la
régularité des actes qui ponctuent la vie juridique de la
société, il est donc comptable financier et juridique. En plus il
est impératif, dans la mesure où les personnes morales de droit
privé, dont les sociétés anonymes, assujetties par la loi
au contrôle d'un ou de deux commissaires aux comptes ne sauraient
empêcher ces derniers de remplir leur mission, l'entrave à
l'exercice des missions étant pénalement sanctionnée.
4
Le contrôle est permanent : il découle
d'après les dispositions de l'article 166 de la loi n° 17-95
5sur la société anonyme que, le commissaire peut
intervenir à tout moment pour mener ses investigations, ainsi qu'il peut
effectuer toutes vérifications et contrôles qu'il juge opportuns,
et peut se faire communiquer sur place toutes les pièces qu'il estime
utile à l'exercice de sa mission et notamment tous contrats, livres,
documents comptables et registres de procès-verbaux.6
1 M. Letaief, L'etat et les entreprises publiques en
Tunisie : Les mutations de contrôle, L'Harmattan, 1998,p 37
2 OECD, Le contrôle de la solvabilité des
compagnies d'assurance, OECD Publishing, p 50
3 A. Diyeye, La responsabilité du commissaire
aux comptes dans L'OHADA, SPECIAL REPORT : The Certified Aquanted- 4th quarter
2005, p 2
4 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 18
5 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
6 A. Yahia, Le regime juridique des dividendes,
L'Harmattan, 2010, p 466
La responsabilité du commissaire aux
comptes
12
Enfin le contrôle doit être objectif, en ce sens,
qu'il doit préserver les intérêts de toutes les parties,
ainsi son opinion doit être indépendante et impartiale, de
manière à rechercher de façon objective la
réalité économique, sans agir dans l'intérêt
particulier de telle ou telle catégorie de personnes
intéressées : actionnaires, dirigeants, administrations
publiques.1
Cependant, compte tenu de la volonté étatique,
de préserver toute source d'investissement, le commissaire aux comptes
est devenu un contrôleur de la légalité dans les
entreprises. 2
En effet sa mission n'est plus limitée au domaine de la
comptabilité, mais désormais il doit émettre un rapport ou
il doit certifier que les états de synthèse répondent aux
qualifications légales de régularité, de
sincérité et d'image fidèle.3
Mais avant d'établir ce rapport, et en dehors de toute
immixtion, il doit s'assurer d'abord qu'il y a respect des dispositions
légales, en ce sens il doit s'assurer du principe
d'égalité entre actionnaires, révéler tout fait
délictueux auprès de l'assemblée générale,
apprécier la régularité des conventions passées
avec les dirigeants, et enfin attirer l'attention des dirigeants sur tout faits
de nature à compromettre la continuité de l'exploitation de
l'entreprise.4
Par ailleurs, il convient de signaler que le commissaire aux
comptes exerce une profession libérale, en effet ce caractère
autonome est une conséquence, qui résulte du fait qu'il demeure
avant tout un expert comptable, conformément aux dispositions des
articles 1 et 4 de la loi n° 15-89 règlement la profession
d'expertise comptable, qui prévoient que le commissariat aux comptes est
une fonction qui s'inscrit parmi les missions de l'expert comptable, et que ce
dernier exerce en dehors de tout contrat de travail, une profession
indépendante.5
Le commissaire aux comptes qui fait publiquement rapport sur
les comptes annuels confère donc une plus grande
crédibilité aux documents produits par les dirigeants de
lentreprise. Ce supplément de crédibilité
découle de sa position d'indépendance par rapport aux
gestionnaires et de la responsabilité qu'il assume en sa qualité
de professionnel. Dans un
1 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 20
2 M. Mouthieu, L'interet social en droit des
sociétés, L'Harmattan, 2009, p 52
3 J.Renard, Théorie et pratique de l'audit
interne, Eyrolles, 2010, p 80
4 S. Guérard, Regards croisés sur
l'économie mixte, L'harmattan, 2006, p 387
5 M.Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 70
La responsabilité du commissaire aux
comptes
13
tel contexte, il va de soi que la question de la
responsabilité est centrale par rapport au rôle social du
commissaire aux comptes. 1
En effet la responsabilité est la colonne
vertébrale de tout ordre juridique. Elle est une condition de la
juridicité d'un système donné.
La responsabilité est au coeur de notre droit, comme
elle est au fondement des rapports humains. 2
Le terme de responsabilité est tiré du latin
« responsus », participe passé de répondre, qui
signifie « se porter garant répondre ». La
responsabilité représente donc « l'obligation de
répondre d'un dommage devant la justice et d'en assumer les
conséquences civiles, pénales, disciplinaires... soit envers la
victime, soit envers la société... ».3
S'agissant du commissaire aux comptes, la loi 17-95
4relative à la société anonyme, et la loi
n° 15-89 5réglementant la profession d'expert comptable
ont instauré un nombre de mesures visant à assurer le
déroulement de la mission de commissariat aux comptes dans des
conditions de crédibilité et de sécurité
optimales.6
Le non respect par le commissaire aux comptes de ces mesures
pourrait être susceptible d'engager sa responsabilité. Le
commissaire aux comptes est responsable, tant à l'égard de la
société que des tiers, des conséquences dommageables des
fautes et négligences commises par lui, dans l'exercice de ses
fonctions. 7
- L'intérêt du sujet
En réalité, l'étude de la
responsabilité du commissaire aux comptes présente un
intérêt aussi bien sur le plan théorique que pratique.
Tout d'abord d'un point de vue théorique, et d'une
manière générale, aucune institution du droit n'a connu un
développement comparable à celui de la responsabilité.
Le
1 N. Gharbi, Le contrôle fiscal des prix de
transfert, L'Harmattan,2005, p 105
2 H. Watrin, De la Responsabilité civile,
thèse de doctorat, Paris, 1873, p 7
3 G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri
Capitant , PUF, p 789
4Loi 17-95 relative à la société anonyme,
promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996)
telle qu'elle a été modifiée et complétée
par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17
Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
5 loi 15-89 réglementant la profession d'expert comptable,
et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par le dahir
n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin officiel n°
4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
6M.Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 170
7 J. Barbieri, Commissariat aux comptes, GLN JOLY,
1996,p 81
La responsabilité du commissaire aux
comptes
14
grand nombre de juristes qui ont traité les
différents aspects de cette matière, et l'apport
considérable d'une jurisprudence abondante l'attestent
clairement.1
La responsabilité du commissaire aux comptes n'est
demeurée étrangère ni à cette immense
évolution ni aux différentes controverses doctrinales qui l'ont
marquée.
Conséquemment l'importance de la responsabilité
du commissaire aux comptes apparaît quant à la
réglementation que lui réserve le législateur, et quant
à la richesse des développements que lui consacre la
doctrine.2
Dans le même ordre idées il convient de
souligner, l'inflation législative qui marque le droit des affaires en
général et la profession du commissariat aux comptes en
particulier.
Par ailleurs, sur le plan doctrinal, le commissariat aux
comptes a fait l'objet de nombreux écrits, et continue à susciter
la curiosité des chercheurs concernant cette profession.3
En fait tous les traités, manuels et cours de droit des
affaires, ainsi que commercial, traitent du sujet et lui réservent une
place prépondérante dans leur développement.
Mais également des ouvrages spécialisés,
s'y intéressent à l'analyse de la responsabilité du
commissaire aux comptes, selon ses différents aspects, il convient de
citer dans ce sens, l'ouvrage d' Alain Sayag : Le commissariat aux comptes :
renforcement ou dérive, ainsi que l'ouvrage d'Augustin Robert : Les
responsabilités du commissaire aux comptes.4
Malheureusement, nous sommes obligés de constater, que
notre doctrine et notre jurisprudence sur la responsabilité du
commissaire aux comptes, ne sont pas très élaborées. Tout
au long de cette étude, nous aurons, dans la mesure du possible recours
avant tous à ces deux principes d'autorité. Mais nous devrons
également nous référer, à titre
complémentaire, aux principes qui nous sembleront les plus surs chez les
juristes de France. De plus nous ferons maintes fois appel aussi aux
arrêts des juridictions françaises, car la jurisprudence nationale
est très pauvre en la matière.
Ces emprunts à un droit extra-national se justifient
sans peine ni difficulté, puisqu'il est très clair, qu'a
l'égard de la responsabilité du commissaire aux comptes, les
articles des
1A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive ?, Litec, 1989, p 147
2 M.Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 7
3 M.Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 7 4M.Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au
Maroc, Sijelmassa,2010, p 7
La responsabilité du commissaire aux
comptes
15
textes légaux y régissant la matière,
sont à quelques modifications prêts, la reproduction des
dispositions de la législation française.
Par ailleurs, du cote pratique, le commissaire joue un
rôle prépondérant et indispensable, au sein de
l'entreprise, destiné à préserver aussi bien
l'intérêt général, que l'intérêt de la
société, des actionnaires, des salariés, ainsi que les
tiers.1
Dans le contexte actuel, force est de constater que
l'entreprise connaît de profondes mutations.
Elle est une cellule ouverte sur l'extérieur, moteur de
l'activité économique, source d'emploi.
En parallèle, et tout à fait logique, le
rôle du Commissaire aux Comptes a accompagné très
étroitement cette évolution.
La mission du Commissaire aux Comptes s'adapte aux besoins des
entreprises et de leur environnement:
Désormais, quelle que soit la taille de l'entreprise,
salariés, créanciers, pouvoirs publics sont concernés par
la vie de l'entité et manifestent une demande accrue d'informations sur
cette dernière.
Dans ce sens, le commissaire aux comptes a été
investi d'une mission générale de contrôle et d'information
devenue institutionnelle au profit non seulement des actionnaires, mais aussi
de tous les tiers concernés (créanciers, fournisseurs, banquiers,
investisseurs actuels ou potentiels, salariés) qui ont à
apprécier la situation financière de l'entité et de ce
fait, doivent pouvoir s'appuyer sur des documents comptables et financiers
fiables.2
Conséquemment c'est au coeur des réalités
économiques et sociales que les Commissaires aux Comptes peuvent prendre
l'exacte mesure de leurs responsabilités respectives.
La responsabilité qu'encourt le commissaire aux
comptes, à raison de son comportement fautif, peut être civile,
pénale, ou disciplinaire.3
C'est pourquoi, nous avons choisi de consacrer notre
étude à la responsabilité du commissaire aux comptes sous
ses divers aspects.
1 T. Brunet, Economie droit : terminale STG,
Bréal, 2006, p 113
2 A. Sakho, Les groupes de société en
Afrique, KARTHALA, 2010, p 183
3V. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux comptes : aspects
juridiques et techniques, Librairies techniques, p 271
La responsabilité du commissaire aux
comptes
16
La responsabilité civile du commissaire aux comptes
obéit à un régime légal particulier prévu et
fixé par l'article 180 de la loi n° 17-95 relative à la
société anonyme et qui dispose que : « Le ou les
commissaires aux comptes sont responsables, tant à l'égard de la
société que des tiers, des, conséquences
dommageables des fautes et négligences par eux commises dans l'exercice
de leurs fonctions.
Ils ne sont pas civilement responsables des infractions
commises par les administrateurs ou les membres du directoire ou du conseil de
surveillance sauf, si, en ayant eu connaissance lors de l'exécution de
leur mission, ils ne les ont pas révélées dans leur
rapport à l'assemblée générale. »
Il en résulte que le commissaire aux comptes, engage sa
responsabilité vis à vis de sa société et
notamment, le représentant légal à titre limitatif. De
même, les tiers à l'entreprise peuvent utilement invoquer sa mise
en cause dans certaines conditions. En plus il convient d'indiquer que sa
responsabilité revêt strictement un caractère personnel.
1
Cependant s'agissant, de la nature de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes, cette question a crée un débat
controversé au sein de la doctrine.
Toutefois, nonobstant ce débat, la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, trouve sa source
principale dans l'inexécution ou l'exécution défectueuse
de ses missions.2
En effet quelque soit la nature de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes, la mise en oeuvre de celle-ci repose sur des
conditions identiques à toute responsabilité civile : à
savoir, la faute, le dommage, et le lien de causalité.
Il y a faute, lorsque le commissaire aux comptes commet une
faute ou négligence, causant un préjudice à autrui.
Toutefois, il convient de rappeler que le commissaire aux comptes a une
obligation de moyens et non de résultat.3
S'agissant du dommage, il peut être matériel ou
moral.
Le déclenchement de l'action en responsabilité
civile, nécessite la réunion d'une troisième condition
à savoir le lien de causalité.
Par ailleurs, le droit pénal est une discipline dans
laquelle le problème de la responsabilité occupe une place
centrale.
Il nous parait utile de définir d'abord ce que recouvre
exactement la notion de responsabilité, pour ensuite déduire la
signification du concept de responsabilité pénale.
1 J.BARBIERI, Commissariat aux comptes, GLN Joly, 1996, p77
2 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 138
3 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p27
La responsabilité du commissaire aux
comptes
17
Le terme se rencontre dans de si nombreux contextes et
significations différents, tant dans la langue de tous les jours que
dans la langue juridique, qu'il y a un danger réel de confusion.
Dépouillé de toutes considérations
philosophiques ou idéologiques et spéculatives, le terme
responsabilité désigne la possibilité d'avoir à se
justifier, ... l'obligation d'avoir à répondre, ... d'assumer les
conséquences.1
On entendra alors par responsabilité
pénale2: l'obligation de subir les effets dont le droit
pénal assortit une violation de la norme pénale, ou encore
l'obligation pour quelqu'un juge responsable d'une infraction, d'en subir les
conséquences pénales, plus particulièrement les sanctions
prévues pour l'infraction.
On considérera que le fait de rendre un acte passible
d'une peine est la traduction en termes de sanctions de la
responsabilité pénale.
Il en résulte de ces précisions que la
problématique de la responsabilité pénale englobe au moins
trois ensembles de problèmes: la définition de l'infraction, qui
fait naître la responsabilité pénale, et que l'on pourrait
donc aussi appeler l'objet de la responsabilité pénale, le sujet
de la responsabilité pénale, à savoir la personne ou les
instances dont la responsabilité pénale peut être
engagée, et enfin, les effets de la responsabilité
pénale,3
à savoir les sanctions pénales.
S'agissant du commissaire aux comptes, qui demeure le sujet de
cette responsabilité pénale, celui-ci opère par
définition dans le cadre d'une personne morale, à l'égard
de laquelle, il est chargé d'une mission spécifique, or compte
tenu de la multiplication des lois pénales ou des dispositions
impératives dont la violation est sanctionnée, le risque de mise
en cause pénale s'est accrue.4
1H. Muscat, Le droit français de la
responsabilité publique face au droit européen, L'Harmattan,
2001, p 19 2 N. Ferry, Gestion juridique de l'entreprise, Pearson
Education France, 2006, p 73
3H. Bosly, Les infractions, Larcier, 2010, p 126
4J. Renard, Audit interne : ce qui fait debat, Maxima,
2003, p 70
La responsabilité du commissaire aux
comptes
18
La responsabilité pénale du commissaire aux
comptes trouve sa source dans plusieurs lois à savoir :
- La loi n° 17-95 relative à la société
anonyme1
- La loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable et instituant un ordre des experts comptables2
- Le code pénal3
Dans ce contexte, le commissaire aux comptes peut être
jugé coupable, en tant qu'auteur principal de certains délits
spécifiques liés à sa mission ou son statut, comme la
confirmation d'informations mensongères, et la violation des
incompatibilités, mais également pour des infractions de droit
commun.4
En outre le commissaire aux comptes, peut être reconnu
pénalement coupable de complicité, lorsqu'a été
démontrée son intention de s'associer à une infraction
commise par les dirigeants de la société. La complicité
suppose également la conscience par le commissaire aux comptes, au
moment ou il accomplit les faits du concours, qu'il apporte à
l'exécution des faits.5
Par ailleurs, c'est sous un troisième aspect, que la
responsabilité du commissaire aux comptes, peut être
recherchée, il s'agit de la responsabilité disciplinaire, dont le
régime légal est fixé par loi n° 15-89
régissant la profession d'expert comptable et instituant un ordre des
experts comptables.6
Le législateur a ainsi doté l'ordre des experts
comptables d'un instrument efficace, non seulement pour faire respecter les
règles de la profession, mais aussi pour réprimer les agissements
de ses membres contraires aux vertus à la fois morales et
professionnelles que sont l'honneur, la probité ou la
délicatesse. De même, en réponse aux agissements
contraires, à la déontologie de la profession, le régime
disciplinaire de l'expertise comptable prévoit des
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
2 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
3 Dahir n° 1-59-413 du 28 JOUMADA II 1382 ( 26
novembre 1962) portant approbation du texte du code pénal (BO n°
2640 bis du mercredi 5 juin 1963)
44Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 292
5 M. Ouaniche, La fraude en entreprise : Comment la
prévenir, la détecter, la combattre, Maxima, 2009, p 146
6M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc, Sijelmassa,2010,
p 170
La responsabilité du commissaire aux
comptes
19
sanctions diversifiées qui toutes de la plus faible
à la plus forte sont adaptées à la nature de
l'intérêt commun que le droit disciplinaire a pour fonction
principale de protéger. 1
Finalement, comme nous l'avons implicitement
suggéré, l'examen des trois types de responsabilités se
fera selon un schéma classique, en étudiant d'abord la
responsabilité civile (Partie 1), en cette partie initiale nous
tenterons donc d'établir dans un premier chapitre, la nature et le
fondement de cette responsabilité, il s'agit de chercher à savoir
si la responsabilité civile du commissaire aux comptes est limité
à une thèse délictuelle ou contractuelle, ou bien elle
revêt des particularités qui lui confèrent un
caractère hybride ou professionnel.
Après la détermination de la nature de la
responsabilité, nous nous intéresserons au cadre légal de
celle-ci, à savoir le fondement, en analysant, le fondement
spécial de la responsabilité civile du commissaire aux comptes,
en plus des fondements de droit commun.
Sur la base de ces fondements nous consacrerons notre
deuxième chapitre à l'analyse de la mise, en oeuvre de cette
responsabilité, à travers l'étude notamment des conditions
d'existence de la responsabilité civile du commissaire aux comptes
(faute, dommage, lien de causalité), mais également des effets de
cette responsabilité, à travers l'étude du
déclenchement de l'action civile et son extinction.
Cependant, pour plus de commodité, et vu que la
responsabilité pénale et la responsabilité disciplinaire
ont en commun leur caractère répressif, et qu'elles poursuivent
un objectif commun qui consiste à prévaloir
l'intérêt général sur l'intérêt
particulier, nous avons opté pour consacrer la deuxième partie
intitulée la responsabilité répressive, à
l'étude de ses deux aspects pénales et disciplinaires de la
responsabilité du commissaire aux comptes de manière
successive.
Ainsi dans le premier chapitre nous allons traiter de la
responsabilité pénale du commissaire aux comptes, dans lequel il
sera question de mettre en relief les différentes incriminations
susceptibles d'être reprochées au commissaire aux comptes, en tant
qu'auteur principal, qu'elles soient relatives à ses missions ou son
statut.
Mais les infractions susceptibles de lui être
reprochées en tant que complice.
En revanche notre deuxième chapitre sera
réservé à l'étude de la responsabilité
disciplinaire du commissaire aux comptes, dans lequel nous exposerons en
premier lieu les particularités de cette responsabilité, pour
ensuite traiter de ses conditions, et en dernier lieu sa mise en oeuvre.
1J. Poulpiquet, Responsabilité des notaires,
Dalloz, 2009, p 134
La responsabilité du commissaire aux
comptes
20
L'étude de la responsabilité du commissaire aux
comptes aujourd'hui, ne consiste plus, à montrer les conditions et les
effets suivant le modèle classique, mais nécessite une nouvelle
approche qui met en relief les différents aspects de cette
responsabilité.
C'est dans ce contexte que l'objet de notre étude
consistera donc à montrer qu'elles sont les spécificités
de la responsabilité du commissaire aux comptes ?
La responsabilité du commissaire aux
comptes
21
PREMIERE PARTIE LA RESPONSABILITE CIVILE DU COMMISSAIRE
AUX COMPTES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
22
La responsabilité civile du commissaire aux comptes,
qui constitue notre partie initiale, est destinée à la
réparation des dommages plutôt que vers la sanction ou la
prévention.
La responsabilité civile est définie comme
l'obligation de répondre d'une atteinte portée à un
intérêt particulier.1
Dans un sens large, la responsabilité civile
désigne l'obligation qui incombe à une personne de réparer
le dommage causé à autrui, par un certain fait qualifié de
fait générateur.2
La réparation constitue donc le fondement essentiel de
la responsabilité civile, raison pour laquelle, cette obligation de
réparation peut être qualifiée d'indemnitaire, puisque le
but essentiel de ce type de responsabilité est d'indemniser la victime,
et non pas punir le responsable.
Ce principe a été confirmé par une
définition de la responsabilité civile apportée par G.
Viney, selon laquelle « la responsabilité civile désigne
l'ensemble des règles qui obligent l'auteur d'un dommage causé
à autrui, à réparer ce préjudice en offrant
à la victime une compensation. » 3
Cependant, la responsabilité civile revêt des
caractéristiques particulières, concernant les commissaires aux
comptes, les rapports qui les lient à la société, ont
connu une évolution importante, et une incidence sur la nature de leur
responsabilité civile.4
Ainsi au fur et à mesure et avec le temps, le
régime légal des commissaires aux comptes, a connu une
évolution importante, des obligations lui auront été
imposées, avec un alourdissement de leur responsabilité, et se
sont détachés de la catégorie des mandataires des
actionnaires, donnant naissance à une nouvelle catégorie de
professionnels exerçant une mission d'intérêt
général.5
Toutefois, les conditions de la mise en cause de la
responsabilité civile, des commissaires aux comptes, sont identiques
à celles applicable à tout citoyen6
conformément aux principes de droit commun.
Afin de mieux cerner le contenu de la responsabilité
civile des commissaires aux comptes, il serait plus instructif, que nous nous
arrêtons, dans un premier temps, sur l'étude de la nature, et le
fondement de cette responsabilité (Section I), pour ensuite traiter en
deuxième temps de la mise en oeuvre de cette responsabilité.
(Section II)
1 H. Watrin, De la Responsabilité civile,
thèse de doctorat, Paris, 1873, p 7
2 A. Sourdat, Traité Général de
la responsabilité, Cosse, 1852, p 3
3 G. Viney, « Traité de droit civil,
Introduction à la responsabilité » Paris, L.G.D.J., 1995,
n° 1, p 7
4 M. Mouthieu, L'intérêt social en droit
des sociétés, L'haramattan 2009, p 126
5 C. Hannoun, Le contrôle des
entreprises : Evolution et perspectives, L'harmattan 2007, p 143
6 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'harmattan 2009, p 72
La responsabilité du commissaire aux
comptes
23
CHAPITRE I : NATURE ET BASE JURIDIQUE DE LA
RESPONSABILITE CIVILE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
La compréhension d'un concept de droit comme celui de
la responsabilité civile du commissaire aux comptes, passe
essentiellement par l'identification de sa nature, elle permet de
catégoriser le problème, puis d'établir les
différentes règles qui s'appliqueront à cette
responsabilité.1
Ainsi la détermination de la nature juridique de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, parait un
préliminaire nécessaire car avant d'entreprendre n'importe quelle
action en responsabilité, il faut pouvoir la situer soit dans le cadre,
de la responsabilité contractuelle, soit dans celui de la
responsabilité délictuelle2. Le droit de la
responsabilité civile est en effet dominé par la summa divisio
qui oppose, dans leurs domaines et leurs effets, responsabilité
contractuelle et responsabilité délictuelle.3
Par ailleurs il convient de signaler que le débat
relatif à la nature juridique de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, n'est pas limité aux thèses
contractuelle et délictuelle, mais s'intéresse également
aux particularités que revêt cette responsabilité, qu'il
s'agisse d'un caractère hybride ou professionnel.
Section I : La nature de la responsabilité civile
du commissaire aux comptes :
La responsabilité civile revêt bien des
caractéristiques particulières, s'agissant des commissaires aux
comptes. La détermination de la nature de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes, nous conduit à introduire une
distinction fondamentale, qui orientera le plan que nous suivrons
ultérieurement. 4 La nature de la responsabilité
civile est limitée à deux hypothèses qui constituent un
concours de responsabilité (§ I), soit qu'il
s'agisse d'une responsabilité civile délictuelle, sinon d'une
responsabilité civile contractuelle.5 Mais, cela
n'empêche que compte tenu de l'évolution, qu'a connue la
profession du commissariat aux comptes, aussi bien au niveau des devoirs et
normes
1 V. Blanc, La responsabilité précontractuelle,
perspective québécoise et internationale, Mémoire
présenté en vue de l'obtention de grade de maitrise en droit,
Université de Montréal, aout 2008
2J. Poulpiquet, Responsabilité des notaires,
Dalloz, 2009, p 21
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, Dalloz, 2008, p 21
4 A. Grépinet, La responsabilité du
vétérinaire, Point Vétérinaire, 1992, p 127
5 C. Mélotte, La responsabilité des
professions juridiques, Kluwer, 2006, p 25
La responsabilité du commissaire aux
comptes
24
imposées, qu'au niveau des missions exercées, la
responsabilité civile présente des particularismes marquants
(§ II), qui sont loi d'être limités au
débat contractuel et délictuel.
§I : La qualification de la responsabilité : le
concours des responsabilités
La possibilité pour une partie victime d'un dommage, de
choisir entre l'action contractuelle, ou l'action délictuelle, est au
coeur du problème dénommé assez important cumul de
responsabilités. On lui préférera le terme de concours,
puisqu'il s'agit en définitive de savoir, si une partie dispose d'une
option entre les règles de la responsabilité contractuelle ou
délictuelle. Il s'agit, tout au plus, d'un choix entre deux voies qui en
aucun cas, ne pourra conduire à un cumul des indemnités. 1
La responsabilité civile trouve sa source principale,
soit dans l'exécution, ou l'inexécution défectueuse d'un
contrat, et il s'agit alors de la responsabilité contractuelle, soit
dans une faute volontaire ou involontaire (délit civil), commise en
dehors de tout contrat, et c'est la responsabilité
délictuelle.2
Au fil du temps, différentes théories ont fait
leur apparition, chacune apportant une idée nouvelle sur la conception
juridique que l'on devrait donner à la responsabilité civile du
commissaire aux comptes.3 S'opposent ainsi deux thèses :
thèse contractuelle (A) et thèse délictuelle (B).
A) La Thèse contractuelle :
La responsabilité contractuelle est définie
comme celle qui résulte de l'inexécution d'une obligation
née d'un contrat, 4 il s'en suit que la possibilité du
recours à la responsabilité contractuelle présuppose
certaines circonstances bien définies, et la réalisation de
conditions tout à fait particulières. Affirmer en matière
de responsabilité contractuelle la nécessité de
l'existence d'un contrat, implique que par leur consentement réciproque
le commissaire aux comptes et la société se sont engagés
dans les liens d'une convention.
1 B. Dubuisson, La Responsabilité Civile :
Chronique de jurisprudence, Larcier, p 481
2 M. Florin, Les obligations et la
responsabilité juridique de l'infirmière, Heures de France, 1999,
p 118
3 A. Idrissi, Le commissariat aux comptes au Maroc,
Gestion et société, Revue trimestrielle publiée par
L'ISCAE, 1979
4 N. Ferry, Gestion juridique de l'entreprise, Pearson
Education France, 2006, p 70
La responsabilité du commissaire aux
comptes
25
En effet, il convient de signaler d'abord, que la
responsabilité civile du commissaire aux comptes était d'origine,
contractuelle, car l'ancien dahir de 1922 régissant la
société anonyme, disposait dans son article 43, que «
l'étendue et les effets de la responsabilité de la
responsabilité des commissaires aux comptes, sont
déterminés par les règles générales du
mandat. », ce dont on déduisait que la responsabilité du
commissaire aux était contractuelle. 1
Mais aujourd'hui, depuis la réforme de 1996, l'article
180 de la loi 17-95 2sur la société anonyme, ne fait
plus allusion au lien contractuel entre la société et le
commissaire aux comptes, sans pour autant préciser la nouvelle nature de
ce rapport et de la responsabilité qui peut en découler.
En fait, la théorie contractuelle, est loin de
rencontrer l'unanimité, chez les auteurs. Plusieurs sont plutôt
d'opinion, qu'il s'agit d'une responsabilité délictuelle, du
commissaire aux comptes aussi bien à l'égard de la
société qu'a l'égard des tiers. Mais cela
n'empêchent qu'il existe certains auteurs qui soutiennent encore,
l'idée de l'existence d'un contrat entre le commissaire aux comptes et
la société.3
Cette situation dincertitude par rapport à
la nature de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, a
divisé la doctrine entre deux courants, l'un favorable et l'autre
défavorable à la thèse contractuelle.
Selon l'opinion d'une partie de la doctrine4, la
responsabilité civile du commissaire aux comptes est de nature
contractuelle, comme l'est celle des experts comptables, des notaires, des
médecins, des avocats, et qu'elle est par conséquent
fondée sur contrat : louage de services ou mandat.
Dans ce sens, certains auteurs, 5font cependant
valoir que nonobstant, le caractère institutionnel de sa mission, le
commissaire aux comptes reste lié par un contrat de louage d'ouvrage
à la société, et invoquent comme arguments pour justifier
leur thèse, le libre choix du professionnel par l'entité qui le
nomme, la rémunération en honoraires librement débattus
1 A.Idrissi, Le commissariat aux comptes au Maroc,
« Gestion et société » revue trimestrielle,
publiée par l'ISCAE, 1979 p 37
2 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
3 C. Mélotte, La responsabilité des
professions juridiques, Kluwer, 2006, p 5
4 J. Poulpiquet, Responsabilité des notaires,
Dalloz, 2009, p 23
5 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, Dalloz, 2008, p 20
La responsabilité du commissaire aux
comptes
26
et le fait que selon les normes professionnelles, une lettre
de mission doit être rédigée, fixant les termes et les
conditions des interventions du commissaire aux comptes.1.
En revanche, d'autres auteurs2 estiment,
plutôt que le commissaire aux comptes se comporte souvent comme un
mandataire, et qu'il agit dans l'intérêt des actionnaires, puisque
son rapport de mission est opposable aux tiers. Ils invoquent ainsi à
l'appui de leur opinion, que puisque la relation de mandat consiste en ce qu'un
mandataire s'acquitte d'un service par le biais d'actes matériels ou
juridiques au profit du mandaté, il convient donc de vérifier si
le commissaire accomplit des actes matériels ou juridiques pour le
compte de la société et des actionnaires.
Ainsi, pour certaines de ses missions légales, il se
borne à établir un rapport descriptif et à commenter
celui-ci. Dans cette hypothèse, il n'exécute de toute
évidence qu'un acte matériel. Dans la plupart des cas par contre,
il exerce un contrôle juridico-financier quant à l'exactitude et
la fiabilité des comptes sociaux. Le jugement du commissaire aux comptes
entraine incontestablement sur ce point des conséquences juridiques,
puisque la régularité de certains actes juridiques, dépend
de son rapport (le rapport de contrôle ou le rapport relatif aux apports
en nature), il s'ensuit que le commissaire aux comptes agit comme mandataire,
et par conséquent sa responsabilité ne peut être que
contractuelle.
L'aspect contractuel de cette relation liant le commissaire
à la société, est attesté également par
l'emploi, très tenace, des termes « obligation de moyen » et
« obligation de résultat » lorsqu'il s'agit d'apprécier
l'étendue des devoirs incombant aux commissaires aux
comptes3, en outre, la thèse contractuelle est
renforcée par la mise en oeuvre de mécanismes typiquement
contractuels telle l'exception d'inexécution.
Cependant, s'agissant de la jurisprudence, elle est un peu
confuse au sujet de la nature de la responsabilité civile du commissaire
aux comptes, ainsi certains juges ont reconnu au commissaire aux comptes le
droit de suspendre sa mission en cas de non paiement des honoraires, faisant
ainsi application de l'exception d'inexécution propre au domaine
contractuel.4
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires aux comptes,
Dalloz, 2008, p 20
2 B. Tilleman, Le mandat, Kluwer, 1999,p 437
3 J. Barbieri, Commissariat aux comptes, GLN JOLY,
1996,p 73
4 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 137
La responsabilité du commissaire aux
comptes
27
Par ailleurs, il convient de signaler qu'une autre partie de
la doctrine1 ne partage pas, la même conception, et estime que
la responsabilité civile du commissaire aux comptes, ne présente
pas une nature contractuelle, ainsi que l'utilisation des concepts d'obligation
de moyen et de résultats ne fait qu'entretenir le trouble des
esprits2 et se basent sur le fait, que dans l'accomplissement de ses
devoirs officiels, le commissaire aux comptes n'aurait l'intention de
contracter envers les parties aucune autre obligation que celles
imposées par la loi et les clients n'auraient pas l'avantage de
s'engager envers lui.3
En plus puisque le commissaire aux comptes doit être
impartial, indépendant et désintéressé, dans ce cas
il cesserait de l'être si dans les missions qu'il exerce, il agissait
comme mandataire de l'une ou des parties ; un tel conflit
d'intérêt est expressément prohibé.4
Au surplus, tenter de rattacher à l'ordre contractuel, le
rapport commissaire aux comptes-société, ne saurait fournir
qu'une explication partielle de la responsabilité du commissaire aux
comptes, car si la responsabilité de celui-ci était toujours
contractuelle, il ne serait plus responsable à l'égard des tiers,
auxquels il peut causer pourtant un préjudice par sa faute, on
aboutirait donc à une explication plutôt ambiguë et
incomplète. 5
Après avoir posé ces bases essentielles à
la responsabilité contractuelle, nous nous demanderons maintenant, si la
violation des obligations légales ne doit pas déboucher
plutôt sur la responsabilité extracontractuelle ?
' J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995, p 137
2 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 274
3 M. Coipel, Droit des sociétés
commerciales, Kluwer, 2006, p 875
4 M. Letaief, L'état et les entreprises
publiques en Tunisie, L'Harmattan, 1998, p 370
5 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 273
La responsabilité du commissaire aux
comptes
28
B) La thèse délictuelle :
Dans le paragraphe précédent, nous avons
tenté d'établir, à quelles conditions précises, le
régime de responsabilité contractuelle pouvait être mis en
oeuvre, au sein de la vie professionnelle du commissaire aux comptes. Nous
voudrions essayer de déterminer maintenant, dans ce paragraphe, dans
quelles circonstances et en vertu de quelles normes, il faudrait plutôt
faire appel à la responsabilité délictuelle. Le
problème de la délimitation des domaines de la
responsabilité contractuelle et de la responsabilité
délictuelle, est l'un des plus délicats à résoudre.
1
Toutefois, on peut prendre pour acquis que le domaine de la
responsabilité délictuelle, est déjà circonscrit,
au moins indirectement, lorsqu'on a tracé les contours de la
responsabilité contractuelle, puisque toute responsabilité qui ne
tombe pas sous l'empire de la responsabilité contractuelle, est soumise
à l'ordre délictuel.
Or, il convient de signaler que l'article 180 de la loi
n°17-95 2relative à la société anonyme,
n'a pas apporté de précision sur l'aspect juridique de cette
responsabilité, mais s'est contenté d'édicter que les
commissaires aux comptes sont responsables, tant à l'égard de la
société que des tiers, des conséquences dommageables des
fautes et négligences par eux commises dans l'exercice de leurs
fonctions.
En fait le mutisme légal relatif à la question
de la nature de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, a
profité à l'assise de la théorie
institutionnelle.3
Ainsi avec le développement du concept organique du
commissariat aux comptes, le professionnel se voit attribuer légalement
une mission très étendue au sein de la société. Et
il est vrai que le commissaire aux comptes muni de larges pouvoirs et d'une
grande indépendance, échappe complètement au rapport
contractuel qui le liait, jadis à l'assemblée
générale. 4
1 Y. Avril, Responsabilité des avocats, Dalloz
,2008, p 15
2 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, Dalloz, 2008, p 18
4 D. Dahmani, Le commissariat aux comptes : etude de
droit comparé, 1966, p 256
La responsabilité du commissaire aux
comptes
29
Conséquemment, la question de la nature juridique de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes ne suscite plus de
débat, il s'agit d'une responsabilité strictement
délictuelle.1
Dans ce contexte, le courant doctrinal2 favorable
à la conception délictuelle de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, justifie sa thèse, en indiquant que
désormais, la responsabilité du commissaire aux comptes
résulte de l'inexécution des obligations fixées par la loi
et non de celles qui auraient été stipulées dans un
contrat, puisque c'est la loi, qui on l'a vu définit les règles
de son statut, pas l'assemblée générale.
Ainsi, ces auteurs3 estiment désormais, que
la question de la nature juridique de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes ne suscite plus le débat, puisqu'il n'a plus
rien du mandataire originaire, et que les règles de son statut sont
définies par la loi, et qu'en conséquent les parties ne peuvent
donc pas se placer dans le champ des conventions privées pour modifier
à leur gré le contenu et la mission du commissaire aux comptes,
d'où il s'en suit que puisque la responsabilité du commissaire
aux comptes ne peut être contractuelle, elle demeure
délictuelle.4
Par ailleurs, il convient de mettre en relief, le rôle
prééminent de la jurisprudence, en cette matière.
Néanmoins, il convient de signaler que la jurisprudence marocaine
souffre d'une pénurie dans le domaine des responsabilités du
commissaire aux comptes, raison pour laquelle il serait plus instructif de se
référer à la jurisprudence française.
Cependant, malgré la rareté de la jurisprudence
marocaine en cette matière, on a pu relever un arrêt de la cour
d'appel de commerce de Fès, qui a jugé que 5«
la responsabilité du commissaire aux comptes est fondée sur
les principes de la responsabilité délictuelle ».
Dans le même sens, la cour de cassation
française, dans un arrêt inédit, a confirmé l'aspect
délictuel de la responsabilité civile du commissaire aux comptes,
en indiquant, que l'action en responsabilité contre le commissaire
constitue une une action en responsabilité
délictuelle6. »
Mais cependant loin d'être unanime concernant la
question de la nature juridique de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, la doctrine demeure encore divisée entre
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 405
2 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 136
3 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 417
4 A. Berchiche, Commissariat aux comptes,
www.iedf.dz
5 CA de commerce, FES, 17 mars 2009,
www.adala.gov.ma
6 Com, 8 novembre 2011,
www. Legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
30
deux autres courants qui estiment plutôt que la
responsabilité civile du commissaire présente des
particularités ne pouvant être limitées à une
théorie délictuelle ou contractuelle.
§ II : Les particularités de la
responsabilité civile des commissaires aux comptes
La responsabilité civile du commissaire aux comptes,
présente certaines particularités, et spécificités
qui lui donnent en quelque sorte sa propre autonomie, et la détache du
régime classique de droit commun. 1
Cette particularité se manifeste d'une part au niveau
des obligations mises à la charge du commissaire aux comptes, et d'autre
part, au niveau des missions de contrôle qu'il est tenu d'exercer. Dans
ce contexte deux courants doctrinaux revendiquent la particularité de la
responsabilité du commissaire aux comptes mais suivant deux approches
différentes : une responsabilité a caractère hybride, et
une responsabilité a caractère professionnel.
A) Une responsabilité à caractère
hybride :
Les incertitudes relatives à la nature juridique de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, ont conduit certains
auteurs à remettre en cause la qualification de cette
responsabilité.
En effet, il semble néanmoins qu'en légalisant
le régime de la responsabilité civile du commissaire aux comptes,
aussi bien vis-à-vis de la société que des tiers, que le
législateur à octroyé a celle-ci un caractère
hybride, tantôt contractuelle, tantôt
délictuelle.2
Ainsi le droit à l'action sociale qui se justifie
uniquement, dans l'hypothèse d'un rapport contractuel, peut être
exercé aujourd'hui même dans un cadre extra
contractuel.3
En plus la jurisprudence 4et la
doctrine5 apprécient toujours la responsabilité du
commissaire aux comptes, envers la société et envers les tiers
sur le fondement des obligations de moyen et des obligations de
résultat, inhérent au lien contractuel.
1 S. Proust, Evolution de la responsabilité des
commissaires aux comptes, « Les particularités de la
responsabilité des dirigeants et des associés au
sein des structures des professionnels libéraux », Actes du
Colloque AON Professions, 15 Décembre 2011, p 12
2D. Dahmani, Le commissariat aux comptes : etude de
droit comparé, 1966, p 264
3A. Yahia, Le Régime juridique des dividendes,
L'Harmattan, 2010, p 109
4Com. 19 octobre 1999,
www.legifrance.gouv.fr
5M. Ouaniche, La fraude en entreprise : Comment la
prévenir, la détecter, la combattre, Maxima, 2009,p 145
La responsabilité du commissaire aux
comptes
31
De même encore, la faute du commissaire aux comptes
n'est plus présumée par la simple inexécution, comme le
commande la théorie contractuelle. C'est à la
société ou aux tiers d'établir la preuve de cette
faute.1
Par ailleurs, il convient de souligner que le
législateur, en légalisant le régime de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, n'apporte pas de
précision sur la nature s'il s'agit d'une responsabilité
délictuelle, ou contractuelle ni référence, quid à
laisser une marge libre d'appréciation.2
Toutefois, il est à noter que la mise en oeuvre de la
responsabilité qu'elle soit délictuelle ou contractuelle repose
sur les mêmes conditions.
Ainsi, il s'en suit que pour engager la responsabilité
du commissaire aux comptes, sur une base contractuelle pour violation d'une
obligation de moyens, il faut prouver que celui-ci n'a pas mis en oeuvre tous
les moyens dont il dispose, et qu'il ne s'est pas comporté avec prudence
et diligence, et qu'en conséquence a commis une faute, qui a
causé un dommage suite au comportement fautif du commissaire aux comptes
.Or les mêmes conditions qui viennent d'être citées
consistant en une faute, un dommage, un lien de causalité, s'imposent
pour la mise en oeuvre de la responsabilité délictuelle. Il en
résulte qu'une distinction entre la responsabilité
délictuelle et contractuelle est infondée et inutile sur le plan
pratique dans une large mesure. 3
Dans le même ordre d'idées, il est à noter
que l'incertitude relative à la nature juridique de la
responsabilité civile, en plus de la théorie dualiste ou hybride
de la responsabilité, ne caractérise pas seulement celle du
commissaire aux comptes mais concerne également la responsabilité
civile du notaire. 4
Toutefois il est à noter que la doctrine et la
jurisprudence, rejettent toute thèse étrangère au
caractère contractuel ou extracontractuelle de la responsabilité,
conséquemment, ils n'acceptent pas la thèse soutenant une
responsabilité propre au commissaire aux comptes qui sortirait des
sentiers battus de la grande théorie civile, cependant devant ce mutisme
légal, d'autre auteurs estiment plutôt que la
responsabilité du commissaire aux comptes a un caractère
plutôt professionnel.
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 421
2Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux comptes
: aspects juridiques et techniques, Librairies
techniques, p 273
3D. Dahmani, Le commissariat aux comptes : etude de
droit comparé, 1966, p 166
4 J. Poulpiquet, Responsabilité des notaires,
Dalloz, 2009, p 22
La responsabilité du commissaire aux
comptes
32
B) Une responsabilité à caractère
professionnel :
Les incertitudes caractérisant le débat relatif
à la nature juridique de la responsabilité civile du commissaire
aux comptes, ont conduit une partie de la doctrine à remettre en cause
et à rejeter dans certains cas, la distinction entre
responsabilité contractuelle et délictuelle, quid à
qualifier à cette distinction d'inopportune, et que la
responsabilité civile du commissaire aux comptes présente
certaines particularités, lui permettant de bénéficier du
caractère professionnel. 1
La responsabilité professionnelle, est une forme
particulière de la responsabilité, qui s'intéresse comme
indique son nom à la catégorie des
professionnelles.2
Elle vise surtout à préserver les
intérêts des professions libérales, par rapport au laxisme
et formalisme du régime de responsabilité civile classique.
La catégorie juridique des professionnels
libéraux est apparue avec le temps, et s'est développé
notamment avec le commerçant, mais au fur et à mesure, , elle a
commencé à s'en détacher du droit commercial, et à
prendre son autonomie.
En effet une profession est libérale lorsqu'elle
réunie les critères suivants : un exercice en toute
indépendance, à l'égard des clients, respect des
confrères, l'objet de la profession est la prestation de services
à titre personnel ou avec l'assistance de collaborateurs, et la
soumission de la profession à une déontologie
rigoureuse.3
Dans ce contexte certains auteurs4
considèrent le commissaire aux comptes, comme étant une
autorité extérieure exerçant son activité dans le
cadre d'une profession libérale rémunérée à
ce titre.
Il en résulte que le commissaire aux comptes appartient
évidemment à cette catégorie.5
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, Dalloz, 2008, p 18
2 A. Merville, Les professions libérales
exposées à de nouvelles formes de responsabilité, , «
Les particularités de la responsabilité des dirigeants et des
associés au sein des structures des professionnels libéraux
», Actes du Colloque AON Professions, 15 Décembre 2011, p 11
3 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 22
4 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 425
5 Tonye, Epargnants d'afrique, Inquietez vous ,
L'harmattan, 2009, p 82
La responsabilité du commissaire aux
comptes
33
Par leur caractère « professionnel », les
commissaires aux comptes sont soumis à des devoirs particuliers comme le
devoir d'alerte, le devoir de révélation des faits
délictueux. L'existence de ces devoirs professionnels donne à
leur responsabilité une certaine particularité.1
Ainsi, l'adaptation du régime classique de
responsabilité au caractère professionnel, demeure une
nécessité, puisque à titre d'exemple l'appréciation
de la faute se diffère lorsqu'il s'agit d'un particulier, que par
rapport à un professionnel. Il s'en suit que si pour un particulier la
faute consiste en un manquement à un devoir général de
prudence, pour le commissaire aux comptes, il y a un alourdissement de la gamme
des fautes en raison de la diligence particulière qu'il doit mettre dans
l'exercice de son activité. 2
Conséquemment, la faute professionnelle, a une nature
propre par ce qu'elle est commise par des personnes ayant des obligations
particulières dans l'exercice de leurs missions.
Dans le même ordre d'idées, la faute du
commissaire aux comptes se concrétise d'une certaine façon, elle
s'apprécie, par référence non à ce qu'aurait fait
un bon père de famille, mais à ce qu'aurait fait un bon
professionnel de sa branche dans ses missions.3
En effet la profession d'expert comptable suppose dans le
commissaire aux comptes, un homme de métier, qui doit être plus
diligent et avisé, car il est le maitre de son activité.
D'ailleurs, le commissaire aux comptes, compte tenu du
caractère d'intérêt général que revêt
sa mission, il est soumis, à de règles de comportement
spécifiques, qui le distinguent de tout profane à titre d'exemple
: l'obligation d'indépendance, et en méme temps une obligation de
silence (secret professionnel), avec une obligation de
révélation, d'où résulte le caractère
particulier de ses obligations, et de sa responsabilité.4
C'est dans ce sens qu'il est tenu d'inspirer confiance, aussi
bien aux dirigeants et actionnaires de la société, qu'au tiers,
puisque son travail consiste à donner image fidèle des
1 M. Mouthieu, L'interet social en droit des
sociétés, L'Harmattan, 2009, p 127
2 M. Coipel, Droit des sociétés
commerciales, Kluwer, 2006, p 891
3 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 275
4 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 472
La responsabilité du commissaire aux
comptes
34
comptes de la société, et par là, en cas
de trahison de cette confiance1, il doit en assumer les
conséquences.
Par ailleurs, il convient de préciser un autre
critère qui permet de caractériser la responsabilité
professionnelle d'une manière générale, et du commissaire
aux comptes en particulier à savoir l'obligation de souscription d'une
assurance de responsabilité professionnelle. 2
S'inscrit également dans le cadre des obligations
particulières, auxquelles le commissaire aux comptes demeure tenu,
l'obligation de souscription d'assurance de responsabilité
professionnelle. 3
Cette obligation a été édictée par
le législateur marocain dans le cadre de l'article 14 de la loi n°
15-89 4réglementant la profession d'expertise comptable et
qui dispose :
«Les experts comptables sont tenus, pour garantir la
responsabilité civile qu'ils peuvent encourir en raison des travaux
mentionnés à l'article premier de la présente loi, de
souscrire une police d'assurance.
A cette fin, l'expert comptable avant d'accomplir aucun
acte professionnel, est tenu de fournir à l'Ordre:
- s'il exerce à titre individuel ou en qualité
d'associer, un certificat attestant qu'il a souscrit une assurance, couvrant
tous les risques dont il peut être responsable.
- s'il exerce en qualité de salarié, un
certificat attestant que sa responsabilité est couverte par une
assurance souscrite par son employeur. »
Toutefois, il faut rappeler ici, que le commissariat aux
comptes s'inscrit parmi les missions de l'expert comptable. 5
Cette assurance couvre les conséquences
pécuniaires de la responsabilité civile encourue par les
commissaires aux comptes du fait de leurs négligences ou de leurs fautes
commises dans l'exercice de leurs missions.
1 62 VINEY (Geneviève), Responsabilité des
professionnels, Rapport de synthèse, Colloque « La
responsabilité des professionnels », Rouen, 26 et 27 janvier 2001,
Université de Rouen, Petites Affiches, 11 juillet 2001, n° 137, pp.
95-103.
2 A. Cossé, Lancez et gérez votre activité
en profession libérale, All About Knowledge, 2006, p 31
3 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 169
4 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
5 O. Mustapha, Le Commissaire au comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 70
La responsabilité du commissaire aux
comptes
35
En fait l'assurance ne couvre pas seulement un individu face
aux aléas ou aux conséquences de sa propre défaillance,
elle réalise le bien commun en conciliant les droits et la
liberté individuelle. 1
Ainsi on peut voir ici, que le manquement à une
obligation de type professionnel, donne lieu à une faute
séparable des fonctions. En effet les commissaires aux comptes sont
assujettis à l'obligation de souscrire une assurance de
responsabilité, et le défaut de cette assurance constitue un
délit prévu et réprimé, par la loi 15-89
réglementant la profession d'expert comptable.2 En outre
grâce aux assurances, l'obligation de réparations imposée
à l'assureur, est reportée, ce qui certes une garantie pour les
victimes mais se répercute d'une façon négative sur la
fonction coercitive de la responsabilité civile des commissaires aux
comptes.
Cependant bien qu'utilisant les concepts et les outils issus
de la théorie du risque, l'assurance de responsabilité civile
professionnelle, a donc pour propriété de ne pas supprimer la
faute parmi les conditions de la responsabilité. Mais au contraire elle
crée véritablement la faute professionnelle.3
Par ailleurs l'étude d'un sujet comme celui de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, doit être
replacée dans son contexte de création, à travers la
recherche de ses fondements.
1F . Chateauraynaud, La faute professionnelle : une
sociologie des conflits de responsabilité, Métailié,
1991,p 78
2 L'article 104 de la loi 15-89 règlement la
profession d'expet comptable dispose : « Est passible d'une peine de 5.000
DH à 10.000 DH toute infraction à l'article 14 de la
présente loi. »
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, Dalloz, 2008, p 122
La responsabilité du commissaire aux
comptes
36
Section II : Le fondement de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes
On entend par le fondement la base juridique qui justifie la
mise en oeuvre de la responsabilité civile.
La responsabilité civile, est fondée sur le
principe de la justice corrective, en ce sens elle vise autant que possible,
à réparer le dommage causé par le comportement fautif de
l'agent, à replacer la victime, dans la situation ou elle se trouvait si
le dommage n'avait pas eu lieu, d'où il apparaît le
caractère et le fondement indemnitaire de la responsabilité
civile d'une manière générale.1
La responsabilité civile est fondée sur deux
idées complémentaires : la réparation d'une rupture
d'égalité entre la victime et ses contemporains ; la sanction du
comportement répréhensible qui se traduit par une atteinte
à un droit que la société estime devoir
protéger.
En réalité ces deux fondements se fondent en un
seul : la responsabilité civile a pour but d'assurer la
réparation adéquate des dommages.2
Dans ce contexte la question du fondement reconnu à la
responsabilité civile est en lien avec celle de la fonction que doit
remplir ce mécanisme juridique, mais ne saurait y être
assimilé.
Il en résulte que le fondement de la
responsabilité civile du commissaire dépend de la nature de
celle-ci.3
Evidemment, le fondement de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, doit résulter de la nature de celle-ci, c'est
ce qui explique que le législateur marocain a prévu un
régime spécial de la responsabilité civile du commissaire
aux comptes prévu par l'article 180 de la loi n° 17-95
4relative à la société anonyme.
1 B . Dubuisson, La Responsabilité Civile : Chronique de
jurisprudence, Larcier, p 154
2 A. Sourdat, Traité Général de la
responsabilité, Cosse, 1852, p 77
3J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995, p 134
4Loi 17-95 relative à la société anonyme,
promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996)
telle qu'elle a été modifiée et complétée
par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17
Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
37
Ainsi l'article 180 de la loi n° 17-95, modifiée
par la loi n° 20-05 relative à la société anonyme
dispose : « Le ou les commissaires aux comptes sont responsables, tant
à l'égard de la société, que des tiers des
conséquences dommageables, des fautes et négligences par eux
commises dans l'exercice de leur fonctions.
Ils ne sont pas civilement responsables des infractions
commises par les administrateurs, les membres du directoire, ou du conseil de
surveillance sauf si en ayant eu connaissance lors de l'exercice de leur
mission, ils ne les ont pas révélées dans leur rapport
à l'assemblée générale. »
En effet l'article 180 de la loi n° 17-951,
relative à la société anonyme, constitue un fondement
spécial de cette responsabilité, car il est détaché
et présente une certaine autonomie par rapport aux principes classiques
du droit civil, mais cela n'empêche que les fondements de droit commun de
responsabilité civile prévue par le dahir des obligations et des
contrats (D.O.C) peuvent également recevoir application s'agissant du
commissaire aux comptes. 2
Dans ce contexte, la recherche des fondements de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, va permettre de mieux
la mettre en oeuvre, et de l'appliquer dans la pratique quotidienne du droit.
Ses éléments théoriques que nous déterminerons,
nous serviront de base, mais aussi de réponse aux différentes
questions qui touchent surtout la nature juridique de l'obligation de
réparation.3
Cependant compte tenu, du débat doctrinal
controversé et continu, en ce qui concerne la nature de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, et en absence d'une
conception claire par rapport à ce sujet, il convient de mettre la
lumière en premier lieu sur le fondement légal
spécial(§ I) qui prévoit le régime légal de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, pour ensuite
s'intéresser au régime de droit commun qui réglemente en
général le domaine des responsabilités(§ II).
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
2 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 137
3 E. Matringe, La reforme de la responsabilité
civile en droit suisse : modèle pour le droit français ?,
Thése de doctorat en Droit, Université de Strasbourg, 2010, p
40
La responsabilité du commissaire aux
comptes
38
§ I : Le fondement spécial :
Une série d'avancées majeures ont marqué au
Maroc, ces dix dernières années.
Pour l'essentiel, de nombreuses sociétés
publiques ont été privatisées et d'importantes concessions
de service public ont été accordées (eau,
télécommunications, notamment). Diverses perspectives
d'investissement sont envisagées.
Corrélativement, la modernisation du cadre juridique et
institutionnel a été très activement entreprise et
continue d'être au centre des préoccupations.
Dans ce sens, la législation des sociétés
commerciales au Maroc a, ces dernières années, été
adaptée afin de répondre aux défis de la mondialisation.
Les principaux textes qui dataient souvent de la période du protectorat
ont été mis à jour. Cette mise à jour a
porté essentiellement sur un certain nombre de législations
fondamentales qui idéalement devrait permettre au pays de fonctionner
dans un contexte d'investissements et de commerce ayant une vision
internationalisée.1
Il en résulte que la responsabilité civile du
commissaire aux comptes n'a pas fait l'exception, ainsi si jadis
déterminée dans son étendue et ses effets envers la
société d'après les règles générales
du mandat par l'article 43 du dahir de 1922, la responsabilité civile du
commissaire aux comptes a, aujourd'hui pour fondements les dispositions de
l'article 180 de la loi de la loi n° 17-95 2relative à
la société anonyme :
« Le ou les commissaires aux comptes sont
responsables, tant à l'égard de la société, que des
tiers des conséquences dommageables, des fautes et négligences
par eux commises dans l'exercice de leur fonctions.
Ils ne sont pas civilement responsables des infractions
commises par les administrateurs, les membres du directoire, ou du conseil de
surveillance sauf si en ayant eu connaissance lors de l'exercice de leur
mission, ils ne les ont pas révélées dans leur rapport
à l'assemblée générale. »
1 O. Mustapha, Le Commissaire au comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 8
22 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
39
Ainsi, nous pouvons déduire qu'en légalisant le
régime de la responsabilité civile du commissaire aux comptes,
dans le cadre de l'article 180 de la loi n° 17-95 1relative
à la société anonyme, indépendamment des
dispositions régissant la responsabilité civile
délictuelle (art 77) ou contractuelle ( art 261) prévues par le
dahir des obligations et des contrats, que le législateur marocain
reconnaît de manière implicite, que la responsabilité
civile du commissaire aux comptes est autonome et indépendante par
rapport à ces règles classiques, et qu'elle présente des
caractéristiques particulières relative au statut et la
profession du commissaire aux comptes qui doivent être prise en compte,
et qu'elle nécessite un régime légal spécifique.
En effet les particularités de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes, sont désormais faciles à
apprécier notamment sur la base de l'article 180 de la loi n° 17-95
relative à la société anonyme.
Dans ce sens il convient de souligner en premier lieu que le
commissaire aux comptes est cité nommément et directement dans le
cadre des articles 180 et 181 qui prévoient le régime
légal de la responsabilité civile du commissaire aux comptes.
En plus et contrairement au dahir 1922 qui disposait dans son
article 43 que l'étendue et les effets de la responsabilité du
commissaire aux comptes envers la société sont
déterminées par les règles générales du
mandat, la loi 17-95 relative à la société anonyme ne
présente aucune précision explicite à la notion du mandat,
ni à la responsabilité du mandataire, de même non plus
à la responsabilité délictuelle puisque si c'était
le cas, le législateur pouvait faire référence à
l'article 77 du dahir des obligations et des contrats.
De même, il convient de signaler que les termes
utilisés par le législateur dans le cadre de l'article 180 de la
loi n° 17-95 modifiée par la loi n° 20-05 relative à la
société anonyme, comme « faute », «
négligence », « conséquences dommageables » se
distinguent clairement des termes utilisés dans le cadre de l'article 77
du dahir des obligations et des contrats régissant la
responsabilité délictuelle, en plus le législateur
subordonne la mise en oeuvre de la responsabilité civile du commissaire
aux comptes, à la présence d'une faute professionnelle, car
conformément aux dispositions de l'article 180 loi n° 17-95
modifiée par relative à la société anonyme, le
commissaire aux comptes est responsable des fautes et des négligences
qu'il a commises dans le cadre de l'exercice de ses fonctions.
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
40
En fait, la faute professionnelle n'est pas une simple faute
ordinaire, car puisque les commissaires aux comptes, sont des professionnels,
qui exercent une mission d'intérêt général, ils sont
soumis à des devoirs spécifiques, comme par exemple : le devoir
d'indépendance, ces devoirs donnent un aperçu du modèle de
comportement que les dirigeants doivent observer. La non observation de ses
obligations constitue une faute professionnelle et engage leur
responsabilité. 1
Dans ce sens certains auteurs indiquent que la faute
susceptible d'engager la responsabilité du commissaire aux comptes doit
être constitutive d'un manquement aux obligations professionnelles. 2
Par ailleurs, le caractère spécial de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes se manifeste
également, par rapport aux destinataires de cette responsabilité,
en effet le législateur dans le cadre de l'article 180 loi n° 17-95
3relative à la société anonyme, limite les
parties à l'égard desquelles, le commissaire aux est tenu de
répondre de ses fautes et négligences.
Ainsi le commissaire aux comptes est responsable civilement
seulement face à la société et aux tiers, car
d'après la jurisprudence, même les actionnaires, ne sont pas en
mesure, d'engager une action en responsabilité civile contre lui,
lorsqu'il s'agit d'une affaire liée au fonctionnement de la
société.4
Conséquemment, il en résulte, que la
responsabilité du commissaire aux comptes n'est donc pas celle qui peut
être exigée de n'importe quelle personne, puisque si la
responsabilité délictuelle lui aurait été
applicable conformément aux dispositions de l'article 77 du dahir des
obligations et contrats, aucune limitation n'aurait été
prévue par rapport au destinataires de la responsabilité , et il
aurait été tenu de répondre de ses fautes et
négligences commises dans l'exercice de ses fonctions, non seulement
à l'égard de la société et des tiers mais
également vis-à-vis des actionnaires et les salariés, et
à l'égard de toute personne qui se sent victime de ses fautes.
1 M. Coipel, Droit des sociétés
commerciales, Kluwer, 2006, p 891
2 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 140
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
4 TPI Agadir, 10 mai 2006, cité par T. SBAA, La
responsabilité civile, pénale et disciplinaire du commissaire aux
comptes et le comportement à adopter en cas de sa mise en cause,
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme d'expert comptable,
ISCAE, nov 2007, p 114
La responsabilité du commissaire aux
comptes
41
En effet ce principe, est confirmé par A. Sayag
lorsqu'il indique que1 : « la spécificité de la
responsabilité du commissaire aux comptes est tout entière
contenue dans l'alinéa 1 er de l'article 234, lorsqu'il énonce
que « les commissaires aux comptes sont responsables (...) des
conséquences dommageables des fautes et négligences par eux
commises dans l'exercice de leurs fonctions ».
Par ailleurs, il convient de préciser que les
règles de prescription n'ont pas fait l'exception, et présente
également certaines particularités, qui permettent de les
distinguer des règles de prescription classiques prévues par le
droit commun.2
Ainsi par rapport aux règles de droit commun, et
conformément aux dispositions de l'article 387 du D.O.C, toutes les
actions naissant d'une obligation sont prescrites par 15 ans.
Or le législateur marocain prévoit dans le cadre
de la loi n° 17-95 3relative à la société
anonyme, des règles spéciales de prescription, s'agissant de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, et qui dérogent
au droit commun, et qui consistent en ce que les actions en
responsabilité contre le commissaire aux comptes, se prescrivent par
cinq ans, conformément aux dispositions de l'article 181 de la loi
n°17-95 sur la société anonyme qui énonce que :
« Les actions en responsabilité contre les
commissaires aux comptes se prescrivent par cinq ans à compter du fait
dommageable ou s'il a été dissimulé de sa
révélation. »
Au terme de cette analyse du fondement spécial de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, il convient maintenant
de s'intéresser aux fondements de droit commun qui peuvent servir
également comme base juridique de la mise en oeuvre de la
responsabilité du commissaire aux comptes.
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 425
2 O. Mustapha, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 160
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
42
§ II : Les fondements de droit commun
Tout d'abord, on entend par droit commun : l'ensemble de
règles juridiques applicables à toutes les situations qui ne sont
pas soumises à des règles spéciales ou
particulières.1
La responsabilité civile du commissaire aux comptes,
puise naturellement ses éléments, du droit commun. Le droit
commun constitue en général, la première
référence et ressource naturelle du juge, qui se voit
confronté au silence des lois spéciales, puisqu'il permet en
matière de responsabilité de compléter les dispositions
particulières qui sont mal sanctionnées, ou pour lesquelles il
n'existe pas de sanction spécifique.2
La jurisprudence fait également référence
au droit commun, lorsque rien n'est établi par les normes
spéciales. Elle trouve dans celui-ci les bases juridiques qui lui
permettent d'imposer une sanction, à un comportement qui n'a pas de
sanction légale.
En outre, le droit commun inspire aussi le législateur,
lorsqu'il convient d'attacher une sanction à un devoir de
comportement.
Dans ce contexte, il convient de s'intéresser aux
règles juridiques applicables en matière de responsabilité
contractuelle, et responsabilité délictuelle, en cas de mise en
cause du commissaire aux comptes.
En fait les deux régimes ont en commun, leur
qualité de droit résiduel : les règles qui les composent
laissent place, au droit spécial qu'elles complètent en cas de
lacune.3
D'une manière générale, la doctrine
4considère que la responsabilité civile du commissaire
aux comptes est de nature délictuelle, mais cela n'empêche que
dans certaines situations particulières la responsabilité
était et devient contractuelle, et repose par conséquent sur un
fondement contractuel.
La responsabilité contractuelle désigne
l'ensemble, des règles qui régissent l'obligation de
réparer le dommage causé à son contractant par le
débiteur, du fait de la violation de l'une de ses obligations
contractuelles.5
1
www.vosdroits.service-public.fr
2 E. Causin, Droit comptable des entreprises, Larcier,2002, p
193
3 E. Matringe, La réforme de la responsabilité en
droit suisse : modèle pour le droit français ?, Thése de
doctrorat, Université de Strasbourg, 2010, p 289
4 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement ou
dérive, Litec,1989, p 418
5 H. Watrin, De la Responsabilité civile, thèse de
doctorat, Paris, 1873, p 14
La responsabilité du commissaire aux
comptes
43
Cependant s'agissant du commissaire aux comptes, au
début du 20 éme siècle, sa responsabilité civile
était strictement de nature contractuelle, dont le fondement essentiel
réside dans l'article 43 du dahir de 1922, qui prévoyait que
l'étendue et les effets de la responsabilité du commissaire aux
comptes, envers la société, sont déterminés par les
règles générales du mandat. Cette disposition a
été confirmée a été confirmée aussi
bien par le dahir de 1984 sur les coopératives, que par le décret
de 1966 sur les sociétés d'investissement.
La règle jusque là prédominante,
était que la nomination du commissaire aux comptes, devait s'analyser en
un contrat de mandat passé entre celui-ci et les
actionnaires.1
Toutes il est à noter que les règles
générales du mandat sont édictées par les
dispositions des articles 879 et suivants du D.O.C.
Mais cependant avec les nouvelles lois sur les
sociétés anonymes, cette conception de mandat voire la
responsabilité contractuelle du commissaire aux comptes a
été remise en cause donnant ainsi naissance à de nouvelles
approches évoquant une responsabilité délictuelle, ou bien
même une responsabilité professionnelle particulière
d'après les avis de la doctrine.
Or cette remise en cause de la responsabilité
contractuelle, à l'égard du commissaire aux comptes n'est pas
absolue malgré les nouvelles dispositions, c'est ce qui ressort de la
doctrine marocaine qui envisage la possibilité d'une relation entre le
commissaire aux comptes et un client, matérialisée en principe
par une lettre de mission, qui détaille entre autre les diligences et
les responsabilités des chacune des parties. L'inexécution par le
commissaire aux comptes de l'un de ses engagements, en vertu de la lettre de
mission engage sa responsabilité contractuelle. 2
Il en résulte que le fondement contractuel
résiste contre les approches destinés à concrétiser
le caractère délictuel de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes.
Malgré la conception avancée par certains
auteurs3 qui estime que la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, est de nature contractuelle, un autre courant
doctrinal 4estime plutôt que cette responsabilité
repose sur un fondement délictuel.
La responsabilité délictuelle, désigne
l'obligation de réparation de la violation d'une obligation
extracontractuelle.1
1 M. Mazars, La responsabilité des commissaires
aux comptes, Publications Masnaoui Mazars, 1997, p 1
2 M. Amraoui, La responsabilité du commissaire
aux comptes d'une société anonyme : dans le cadre de sa mission
générale, Bulletin d'information périodique n° 114,
Juin 2002, Publications Masnaoui Mazars, p 50
3 J.BARBIERI, COMMISSARIAT AUX COMPTES, GLN Joly,
1996, p73
4 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 22
La responsabilité du commissaire aux
comptes
44
Dans ce sens, l'article 77 et 78 du D.O.C fixent le cadre
général, et constituent le fondement essentiel de cette
responsabilité.
Cependant il est à noter que les articles cités
sont le résultat de deux théories fondamentales qui gouvernent le
domaine de la responsabilité délictuelle, il s'agit dans ce sens
de la théorie classique fondée sur la faute, en plus de la
théorie du risque.
Dans ce contexte la théorie fondée sur la faute
énonce, une responsabilité basée sur la faute et qui est
appelée également une responsabilité subjective, parce
qu'elle est assise sur la seule conduite du sujet qui est l'agent du
dommage.
En revanche la théorie du risque, prévoit le
passage d'une responsabilité subjective vers une responsabilité
objective, qui ne demeure plus fondée sur une analyse du comportement de
l'agent mais elle repose plutôt sur une analyse de l'activité
matérielle et de la causalité avec le dommage.
Dans ce contexte, il est à noter que les partisans de
la thèse, qui proclame le caractère délictuel de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, se basent sur la
théorie fondée sur la faute pour justifier leur conception.
Ainsi, ils estiment que la responsabilité du
commissaire aux comptes est une responsabilité à base de faute
prouvée.2
En fait, il est à noter que le commissaire aux comptes,
demeure susceptible d'être mis en cause sur la base des articles 77 et 78
du D.O.C régissant la responsabilité délictuelle,
malgré la présence de l'article 180 de la loi n° 17-95
3sur la société anonyme.
Ainsi rien n'empêche la poursuite du commissaire aux
comptes sur la base de ces deux articles, car en premier lieu ils constituent
le cadre général de toute responsabilité, et la
référence essentielle de la jurisprudence, il s'en suit qu'en
deuxième lieu, ces articles prévoient les conditions
nécessaires à la mise en oeuvre de toute
responsabilité.4
Cependant, vu que la jurisprudence marocaine aussi bien dans
le domaine civil que pénal, voire même disciplinaire, souffre
d'une pénurie en matière des poursuites engageant la
1 A. Grepinet, La responsabilité du
veterinaire, Point Vétérinaire, 1992, p 49
2 O. Mustapha, Le Commissaire aux comptes au Maroc, Sijelmassa,
2010, p 158
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
4 Tonye, Epargnants d'afrique, Inquietez vous ,
L'harmattan, 2009, p 79
La responsabilité du commissaire aux
comptes
45
responsabilité des commissaires aux comptes, il serait
plus judicieux de se référer au droit comparé notamment
français.
En effet, il demeure important de signaler que les
juridictions françaises1, continuent à poursuivre les
commissaires aux comptes sur la base de l'article 1382 du code civil (art 77
D.O.C) qui régit la responsabilité, malgré la
présence d'un article spécial qui régit la
responsabilité du commissaire aux comptes.
Cependant la détermination des fondements est
nécessaire et essentielle, notamment lorsqu'il s'agit de la mise en
oeuvre de la responsabilité ( Chapitre II).
1 Com.,8 novembre 2011 ,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
46
CHAPITRE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA RESPONSABILITE
CIVILE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES :
La responsabilité civile du commissaire aux comptes
n'est pas simplement un concept théorique, mais une sorte de code
d'éthique, qui édicte un ensemble de règles et obligations
mises à la charge du commissaire aux comptes. 1
Les règles de la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, définissent les conditions d'existence de cette
obligation de réparation, ainsi que son étendue. Leur mise en
oeuvre permet aux victimes du comportement fautif du commissaire aux comptes,
de concrétiser leur droit à réparation, par la voie de
l'action en justice. 2
Avant d'examiner l'action en réparation, qui s'inscrit
dans le cadre des effets de cette responsabilité (2), il faut envisager
tout d'abord de traiter des conditions d'existence (1) de cette obligation de
réparation.
Section I : Les conditions d'existence de la
responsabilité :
Les conditions de la mise en oeuvre de la
responsabilité civile du commissaire aux comptes, sont identiques
à celles applicables à toute personne.3
C'est ainsi que conformément aux dispositions de
l'article 180 de la loi n°17-95 4relative à la
société anonyme, trois conditions essentielles s'imposent pour la
mise en oeuvre de la responsabilité civile à savoir :
? La faute
? Le dommage
? Le lien de causalité
Pour plus de commodité, nous procéderons à
l'étude de la faute, avant de nous
intéresser à l'étude du dommage et du lien
de causalité.
1 G.Block, C. Jassogne, M. Forges, Traité pratique de
droit commercial, Kluwer, 1990, p 524
2 BAUDOUIN, J.-L. et P. DESLAURIERS, La responsabilité
civile, CowansviIIe, Yvon Blais, 2007.p 34
3 M. Florin, Les obligations et responsabilité
juridique de l'infirmière, heures de France, 1999, p 117
4 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
47
§ I : La faute
La faute est une condition substantielle pour la mise en
oeuvre de la responsabilité civile du commissaire aux comptes
conformément aux dispositions de l'article 180 de la loi n° 17-95
1relative à la société anonyme, qui indique :
« Le ou les commissaires aux comptes sont responsables tant à
l'égard de la société que des tiers, des
conséquences dommageables, des fautes et négligences par eux
commises dans l'exercice de leur fonction. »
Il en résulte que cet article cité n'a pas
apporté de définition au concept de la faute susceptible
d'être reprochée au commissaire aux comptes, contrairement au
D.O.C, qui prévoit dans le cadre de son article 78, que la faute
désigne tout acte ou omission ayant porté atteinte aux droits
d'autrui en lui causant un dommage.
D'une manière générale, la faute
s'identifie à la transgression d'une norme, lorsqu'il existe une
disposition légale prescrivant un comportement déterminé,
sous réserve d'une erreur invincible, ou d'une autre cause
d'exonération2.
Or compte tenu de la spécificité de la fonction
du commissaire aux comptes, et la diversité des obligations qui lui y
sont imposées, et en absence d'une disposition légale,
définissant et déterminant les contours de la conception de faute
; la faute susceptible d'engager la responsabilité civile du commissaire
aux comptes, doit être une faute personnelle constitutive d'un manquement
aux obligations professionnelles.3
Les fautes susceptibles de lui être reprochées
seront aussi diverses qu'il existe des normes et règles qui y lui sont
imposées de respecter. 4Les fautes relatives à la
mission du commissaire aux comptes sont difficiles à caractériser
car elles constituent le plus souvent un simple manquement à une
obligation de prudence et vigilance, dans ce contexte, il serait plus
instructif de mettre la lumière sur, les caractères de cette
faute, ainsi que sur sa nature.5
A) Les caractères de la faute :
1 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
2 B.Dupuisson, et P. Henry, Droit de la
responsabilité : Morceaux choisis, L'harmattan, 2004, p 55
3 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 139
4 A. Diyeye, La responsabilité du commissaire
aux comptes dans L'OHADA, SPECIAL REPORT : The Certified Aquanted- 4th quarter
2005, p 2
5 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 140
La responsabilité du commissaire aux
comptes
48
Conformément aux dispositions de l'article 180 de la
loi n° 17-95, sur la société anonyme, la
responsabilité qu'encourt le commissaire aux comptes est personnelle,
puisqu'il n'est pas responsable, des fautes commises par les dirigeants de la
société, il en résulte que la faute pour qu'elle puisse
être imputée au commissaire aux comptes doit revêtir un
caractère personnel, à moins qu'il n'ait connaissance des fautes
commises par les dirigeants, et qu'il ne les a pas révélés
à l'assemblée générale, dans ce cas le
défaut de révélation, à l'assemblée
générale est constitutif de faute.1
Toutefois, il est à noter que la doctrine2
confirme, cette conception, qui consiste en ce que le commissaire aux comptes,
n'est responsable que de ses fautes personnelles, et non de celles commises par
les dirigeants de la société3, par ailleurs une
difficulté peut se rencontrer, lorsque le commissaire aux comptes fait
appel à des experts ou collaborateurs, pour l'assister dans l'exercice
de ses missions4, et commettent une faute, là, sans aucun
doute, il y a faute du commissaire aux comptes pour les avoir mal
choisi.5
Enfin, il est à noter que la faute du commissaire aux
comptes, n'a pas à être dolosive ou lourde car, en raison de son
caractère professionnel, même une faute légère
suffira à le déclarer responsable.6
B) La nature de la faute
Puisque la faute résulte de l'inexécution des
obligations, l'examen de la nature de ce comportement passe
nécessairement, par celui des obligations professionnelles fixées
par la loi, les règlements, les normes, et les usages auxquels le
commissaire aux comptes a manqué dans l'exercice de sa
mission.7
Or en raison de la diversité des obligations qui lui
incombent, il convient donc de dissocier les obligations de moyens et de
résultats qui pèsent sur lui, il s'agit de savoir si
1 D. Komzedunge, De la responsabilité du
commissaire aux comptes en droit rwandais, Bachelor's Degree en Droit, 2007,
www.memoireonline.com
2 O. Mustapha, Le Commissaire au comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 158
3 Y. Guyon, Le commissariat aux comptes, Librairies
techniques, 1971,p 276
4 La loi 17-95 stipule dans son article 167,
alinéa 2 et 3 : « Pour l'accomplissement de leurs contrôles,
les commissaires aux comptes peuvent, sous leur responsabilité, se faire
assister ou représenter par tels experts ou collaborateurs de leur
choix, qu'ils font connaître nommément à la
société. »
5 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 140
6 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux comptes :
aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 274
7 A. Diyeye, La responsabilité des
commissaires aux comptes dans l'OHADA, THE CERTIFIED ACCOUNTANT, 2005, p 51
La responsabilité du commissaire aux
comptes
49
comme tous les prestataires de services, le commissaire aux
comptes est tenu à une obligation de moyen ou de
résultat.1
D'une manière générale, l'obligation de
moyen consiste en ce que le débiteur, s'engage à mettre en oeuvre
tous les moyens dont il dispose au service d'une fin, en se comportant avec
prudence et diligence. 2
S'agissant du commissaire aux comptes, il tenu d'une
manière générale, dans le cadre de ses missions à
une obligation de moyens.3
Cette analyse se base sur le fait, que la mission du
commissaire aux comptes conformément aux dispositions de l'article 166
de la loi n° 17-95 4sur la société anonyme, est
limitée à la certification de la régularité et la
sincérité des comptes à l'exclusion de l'exactitude, ou de
résultat précis, et appelle une certaine prudence et diligence,
en plus les difficultés et les risques auxquels il est confronté
lors de l'exercice de ses fonctions confèrent aux conclusions de son
contrôle un caractère aléatoire, qui constitue le
critère généralement adopté, pour distinguer
l'obligation de moyen de celle de résultat.5
Toutefois la doctrine 6et la
jurisprudence7, confirment la conception qui consiste en ce que le
commissaire aux comptes est tenu en principe à une obligation de moyens,
sauf dans des cas particuliers, ou une obligation de résultat peut
être mise à charge. 8
Avant de s'intéresser, à la jurisprudence, il
convient de signaler que pour engager la responsabilité civile du
commissaire aux comptes, sur la base de la violation d'une obligation de moyen,
le demandeur doit prouver la faute du commissaire aux comptes, qui consiste en
ce qu'il n'a pas employé tous les moyens dont il dispose, ou bien qu'il
ne s'est pas comporté avec prudence et diligence.9
1 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 141
2 E. Causin, Droit comptable des entreprises,
Larcier,2002, p 275
3 M. Ouaniche, La fraude en entreprise : Comment la
prévenir, la détecter, la combattre, Maxima, 2009, p 145
4 4 Loi 17-95 relative à la société anonyme,
promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996)
telle qu'elle a été modifiée et complétée
par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17
Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
5 P. Beltrane, La Responsabilité civile et
pénale des commissaires aux comptes, Rapport, l'Université Paul
Cézanne- Aix-Marseille III, 2005
6 C. Gavalda, la commission des opérations de
bourse et le commissaire aux comptes, Économica, 1975, p 56
7 Com. 15 Janvier 2002,
www.legifrance.gov.fr
8 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p88
9 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux comptes : aspects
juridiques et techniques, Librairies techniques, p 274
La responsabilité du commissaire aux
comptes
50
Sur le plan jurisprudentiel, il convient de citer un
arrêt de la jurisprudence marocaine, malgré sa rareté, qui
consacre la question de l'obligation de moyen incombée au commissaire
aux comptes, en plus d'un arrêt de la jurisprudence française.
Ainsi la cour d'appel de commerce de Fès, a
indiqué dans son arrêt 1: « la doctrine et la
jurisprudence françaises en se basant sur un arrêt de la cour de
cassation française du 28 janvier 1992, ont conclu en ce que
l'obligation du commissaire aux comptes est juste une obligation de diligence
ou de moyens »
La jurisprudence française a également mis de la
lumière sur cette question en indiquant 2:« Attendu
qu'à cet égard, tant l'expert - comptable que le commissaire aux
comptes sont tenus contractuellement, chacun en ce qui le concerne, d'une
obligation de moyens, et leur responsabilité ne peut être
engagée que par la démonstration de fautes ou manquements que
n'aurait pas commis un professionnel normalement compétent
».
Par ailleurs, il est à noter que le commissaire aux
comptes, peut être tenu dans des cas particuliers à une obligation
de résultat, celle-ci consiste en ce que le débiteur s'engage
à fournir un résultat déterminé.3, en
effet dans certaines missions particulières au cours desquelles
l'aléa est trop réduit au point d'être inexistant, le
commissaire aux comptes pourrait être tenu à une obligation de
résultat, 4comme dans le cadre des missions de l'observation
des formalités liés au nombre d'actions dont chaqueactionnaire,
doit en être propriétaire.
Toutefois, il est à noter, que pour engager la
responsabilité du commissaire aux comptes, sur la base de la violation
d'une obligation de résultat, le demandeur n'a pas à prouver
à une faute, mais seulement que le résultat prévu n'a pas
été atteint par le commissaire aux comptes.5
Dans ce sens, il convient de citer un arrêt de la
jurisprudence française qui a retenu comme responsable un commissaire
aux comptes qui a omis de mentionner le contrat de travail d'un administrateur
dans son rapport spécial.
La cour de cassation française a indiqué dans ce
sens 6: « Mais attendu que, tant par motifs propres que par
ceux adoptes des premiers juges, l'arrêt retient au vu des
documents
1 CA de commerce, FES,17 mars 2009,
www.adala.gov.ma
2 TGI, Lyon, 19 déc. 1984, Bull. CNCC n°
58, p.224), P. Beltrane, La Responsabilité civile et pénale des
commissaires aux comptes, Rapport, l'Université Paul Cézanne-
Aix-Marseille III, 2005
3 O. Azziman, Le contrat, Le Fennec, 1995 p 278
4 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 144
5 J.BARBIERI, Commissariat aux comptes, GLN Joly,
1996, p75
6
Cass. Com, 2 juillet 1973,
www.legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
51
produits, que, contrairement a la prétention de
Cottet selon laquelle il n'était pas nécessaire de faire mention
du contrat litigieux dans le rapport spécial, c'est
précisément l'omission de cette formalité qui a
entraîne la déclaration de nullité de ce contrat
»
En effet, certains auteurs1 ont pris comme
référence cet arrêt, pour illustrer l'obligation de
résultat incombée au commissaire aux comptes, en indiquant que
celui-ci, n'a pas commis de faute, mais il n'a pas pu parvenir au
résultat déterminé, par conséquent sa
responsabilité civile doit être engagée.
C) Preuve et appréciation de la faute :
D'une manière générale, le commissaire
aux comptes est tenu à une obligation de moyen, ainsi
conformément aux principes de droit commun, la partie demanderesse qui
peut être la société ou les tiers désirant engager
la responsabilité du commissaire aux comptes, devra prouver que celui-ci
ne s'est pas comporté avec prudence et diligence ou bien qu'il n'a pas
usé de tous les moyens dont il dispose2, mais dans certaines
missions particulières, le commissaire aux comptes pourra être
tenu à une obligation de résultat, et dans ce cas il serait
à la charge de la partie demanderesse de prouver seulement que le
commissaire aux comptes n'est pas parvenue au résultat
demandé.3
Par ailleurs, concernant l'appréciation du comportement
fautif du commissaire aux comptes, la faute doit être
appréciée in abstracto, au regard du comportement normal
qu'aurait une personne diligente placée dans les mêmes
circonstances.4
Conséquemment, le juge doit se mettre à la place
du commissaire aux comptes, au moment des faits litigieux pour apprécier
le caractère fautif ou pas des décisions de l'organe de
contrôle, en ce sens il doit apprécier l'attitude du commissaire
aux comptes, en fonction des circonstances précises de
l'époque.5
Il est évident, que le commissaire aux comptes soit la
personne la plus apte à connaître la situation de la
société vu les pouvoirs dont il dispose et les informations qu'il
peut recueillir, raison pour laquelle, la jurisprudence pour condamner la
négligence du commissaire
1 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 144
2 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'harmattan 2009, p 72
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires aux comptes,
« Dalloz Référence », 2008,p 40
4 4 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 275
5 VINEY (Geneviève), Les conditions de la
responsabilité, 3ème édition, Paris : LGDJ 2006,
collection traité de droit civil, 1397 pages, n°410
La responsabilité du commissaire aux
comptes
52
aux comptes, procède souvent par présomption, en
indiquant que le commissaire aux comptes « aurait pu connaître
» ou « ne pouvait ignorer ».1
En plus de la faute, le dommage subi par la victime, demeure
une condition essentielle pour la mise en oeuvre de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes.
§ II : Le dommage
Conformément aux dispositions de l'article 180 de la
loi n 17-95 2relative aux sociétés anonymes : «
Le ou les commissaires aux comptes est responsable tant à
l'égard de la société, que des tiers des
conséquences dommageables, des fautes et négligences par eux
commises dans l'exercice de leur fonctions. »
En plus de la faute, le dommage demeure une condition
essentielle qui caractérise la responsabilité civile, et qui est
nécessaire pour la mise en cause du commissaire aux
comptes.3
En effet le dommage constitue une caractéristique
essentielle de la responsabilité civile, car cette condition n'est pas
exigée ni en matière de responsabilité pénale, ni
en matière de responsabilité disciplinaire. 4
Il y a dommage chaque fois qu'une personne est atteinte dans ses
intérêts.5
Cependant, pour qu'il soit sujet à réparation,
le dommage doit être l'effet d'une faute ou d'une négligence de la
part du commissaire aux comptes.
On entend par dommage tout préjudice subi par la
victime qu'il s'agit d'une atteinte matérielle ou morale.
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 41
2 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
3 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'harmattan 2009, p 72
4 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 433
5 H. Watrin, De la Responsabilité civile,
thèse de doctorat, Paris, 1873, p 25
La responsabilité du commissaire aux
comptes
53
A) La diversité des dommages :
a) Le dommage matériel :
On entend par dommage matériel toute atteinte de nature
pécuniaire qui peut être une perte éprouvée ou bien
un gain manqué.1
Ces types de dommage matériel ont été
confirmés par le législateur marocain dans le cadre de l'article
264 du D.O.C, qui dispose : « les dommages sont la perte effective que le
créancier à éprouvée, et le gain dont il a
été privé »
En effet, certes ces dispositions concernent la
responsabilité contractuelle, mais rien n'empêche l'application de
celle-ci dans le cadre de la responsabilité civile du commissaire aux
comptes, ainsi peut constituer un dommage matériel, résultant de
son comportement fautif, tout perte pécuniaire subie par la
société ou par les tiers.2
Dans le même ordre d'idées, la cour de cassation
française a retenu la responsabilité civile du commissaire aux
comptes, suite à sa négligence qui a causée la
perpétuation de malversation. 3
b) Le dommage moral :
Le dommage est moral lorsqu'il d'une atteinte extra
matériel, et qui affecte les sentiments, les principes, les
considérations, et peut prendre la forme d'une atteinte à
l'honneur, dignité, réputation, toutefois concernant le
commissaire aux comptes, le préjudice moral n'est pas assez
fréquent comme il est le cas pour le dommage matériel.
Toutefois le dommage moral, causé par le comportement
fautif du commissaire aux comptes peut consister en une atteinte à la
réputation de la société ou bien même celle d'un
dirigeant.
Dans ce sens la jurisprudence française, fait
état d'un arrêt de la cour d'appel de Versailles datant du 19
janvier 2006, qui relate la poursuite d'un commissaire aux comptes, pour avoir
révélé des infractions imaginaires, aux
intéressés, ayant causé en conséquence, atteinte
à l'honneur et la réputation du président du conseil
d'administration de la société objet de
contrôle.4
1 O. Azziman, Le contrat, Le Fennec, 1995 p 281
2 Com, 24 octobre 2000,
www.legifrance.gov.fr
3 Com, 3 décembre 2002,
www.legifrance.gov.fr
4A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 72
La responsabilité du commissaire aux
comptes
54
B) Les qualités du dommage
a) Le dommage certain :
On entend par dommage certain, la prolongation directe d'un
état de chose actuel.
Toutefois dans le cadre de la responsabilité du
commissaire aux comptes, La jurisprudence a mis le point sur plusieurs de ces
préjudices, suivant la mission du commissaire aux comptes et les
circonstances qui se présentent,
Dans ce contexte la cour de cassation française, a
censuré des commissaires aux comptes, pour une certification fautive des
comptes, ayant causé un préjudice de surcout financier, a trois
sociétés qui envisageaient, la reprise de la
société objet de la certification.1
c) La perte de chance
La perte de chance désigne un préjudice qui est
la conséquence de la disparition de la probabilité d'un
événement favorable lorsque cette chance apparait comme
suffisamment sérieuse.
La caractéristique essentielle de la perte de chance
réside dans l'aléa, qui consiste dans un doute, une incertitude
par rapport au résultat final.2
Le dommage qui consiste en la perte d'une chance, ne doit pas
être utopique, mais encore faut-il qu'il revêtît un
caractère sérieux.
Cependant, compte tenu, des caractères de la mission du
commissaire aux comptes, qui font appel à l'exactitude, à la
sincérité et à la régularité, il est tout a
fait évident que la perte de chance qui fait appel aux caractères
d'incertitude et d'aléa ne soit pas acceptée comme
préjudice, et par conséquent, ne peut faire l'objet d'une
réparation .Mais il est à noter que la jurisprudence
française a crée l'exception en la retenant comme dommage, suite
à une faute du commissaire aux comptes .
1 Com, 11 février 2003,
www. Legifrance.gov.fr
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 73
La responsabilité du commissaire aux
comptes
55
Dans ce sens, il convient de citer un arrêt de la cour
de cassation française, qui a censuré un commissaire aux comptes
pour une certification fautive, ayant causé une perte de chance à
la société.
Dans ce contexte, la cour de cassation française a
indiqué dans son arrêt 1: « Mais attendu,
d'une part, que l'arrêt retient que le commissaire aux comptes avait
certifié les comptes de la société de façon
hâtive et fautive, compte tenu d'une importante écriture de
régularisation du compte client, dont l'anormalité aurait
dû attirer son attention, alors qu'un examen sérieux, conforme aux
normes professionnelles, l'aurait conduit à formuler toutes
réserves ; que dès lors qu'il ne résultait pas de ces
appréciations et énonciations que les réserves auxquelles
auraient dû conduire les diligences omises auraient, à elles
seules, empêché la poursuite des détournements, la cour
d'appel a pu décider que le préjudice subi par la
société consistait dans la perte d'une chance de mettre fin
à ces détournements dans les meilleurs délais
».
Dans le même contexte, dans un arrêt
récent, la haute juridiction française, a censuré un
commissaire aux comptes suite à son comportement fautif, qui a
causé une perte de chance pour des tiers en indiquant 2:
« que M. A, commissaire aux comptes de la société avait
commis des fautes dans l'accomplissement de sa mission, et que ces fautes
avaient entrainé pour la société Tesdef, et M. Z une perte
de chance. »
d) Le dommage ne doit pas avoir été
réparé :
Le dommage ne doit pas faire l'objet d'une réparation,
cette exigence se justifie par le fait de vouloir éviter une double
indemnisation pour une même affaire, de telle sorte que la double
réparation ne soit pas source d'enrichissement sans cause au profit du
demandeur.
Dans ce sens, la cour de cassation française a
rejeté le pourvoi destiné à engager la
responsabilité du commissaire aux comptes, pour un dommage qui a
été déjà réparé. 3
§ III : Le lien de causalité :
Conformément aux principes généraux de la
responsabilité civile, la responsabilité du commissaire aux
comptes à l'égard de la société et les tiers, doit
obligatoirement faire ressortir une relation causale entre la faute et le
préjudice.1
1
Cass.com. 19 oct. 1999,
www.legifrance.gouv.fr
2 Com, 18 mai 2010,
www.legifrance.gov;fr
3 Com, 2 juillet 1996,
www.legifrance.gov;fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
56
Dans ce contexte il incombe au demandeur en action qu'il
s'agisse de la société ou des tiers d'apporter la preuve que le
préjudice subi est la conséquence du comportement fautif du
commissaire aux comptes, faute de quoi, en cas d'échec du demandeur
à apporter la preuve du lien de causalité, ceci pourra
entraîner l'exonération totale ou partielle du commissaire aux
comptes.2
L'établissement du lien de causalité que ce soit
relatif à son existence ou pas, constitue donc l'enjeu essentiel de la
mise en oeuvre de la responsabilité civile du commissaire aux
comptes.
Mais toutefois il se peut que malgré
l'établissement de l'existence d'une relation causale entre la faute du
commissaire aux comptes, et le dommage subi par la victime, la
responsabilité du commissaire aux comptes, ne soit pas engagée
lorsque celui-ci justifie d'une cause d'exonération.
A) Établissement du lien de causalité
:
La doctrine constate que la preuve du lien de causalité
entre le préjudice et la faute du commissaire aux comptes est
délicate à apporter.3
a) L'existence du lien de causalité :
La nécessité de l'établissement de
l'existence d'un lien de causalité, entre la faute et le
préjudice subi par la victime est « une exigence de la raison
». 4
Le lien de causalité existe lorsqu'il est
démontré que l'exécution de diligences normales aurait
permis d'éviter le dommage.
Dans ce contexte la cour de cassation française a rendu
un arrêt daté, du 4 novembre 2008, et dans lequel le lien de
causalité entre la faute du commissaire, et le préjudice subi par
la société a été établi, c'est ainsi que la
cour de cassation a indiqué dans son arrêt 5: »
« la cour d'appel, qui a procédé
à la recherche prétendument omise, visée à la
quatrième branche et ainsi caractérisé l'existence d'un
lien de causalité entre la négligence
1 A.Tonye, Epargnants d'afrique, Inquietez vous ,
L'harmattan, 2009, p 17
2 M. Amraoui, La responsabilité du commissaire
aux comptes d'une société anonyme : dans le cadre de sa mission
générale, Bulletin d'information périodique n° 114,
Juin 2002, Publications Masnaoui Mazars, p 53
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 84
4 J. Carbonnier, Droit civil : les biens, les
obligations, Presses universitaires de France,1995, p 36
5 Com, 4 nov 2008,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
57
du commissaire aux comptes dans l'exercice de sa mission
de contrôle et le préjudice subi par la société dont
elle a souverainement apprécié le montant » .
b) L'inexistence du lien de causalité
Le lien de causalité est considéré comme
inexistant lorsque la mauvaise exécution de la diligence est sans effet
déterminant ou adéquat sur la réalisation du
préjudice. 1
L'absence du lien causalité signifie
l'impossibilité de la mise en oeuvre de la responsabilité du
commissaire aux comptes, dans le même sens, la cour de cassation
française dans un, arrêt du 14 décembre 2004 n'a pas retenu
la responsabilité du commissaire aux comptes, pour absence de preuve ce
qui équivaut à un défaut du lien de causalité en
indiquant 2: « que l'arrêt relève aussi, par
d'autres motifs, d'un côté, que le protocole d'accord
accepté par M. Y... stipulait expressément que les dividendes
acquis pour l'exercice précédent la cession resteraient acquis au
vendeur et, d'un autre côté que M. Y... ne rapportait pas la
preuve de ce que des dividendes fictifs auraient été
distribués ; qu'il en résulte que M. Y... et la
société Pulsar ne pouvaient prétendre avoir subi de
préjudice du fait de la certification des comptes de l'exercice clos le
31 décembre 1993 ; d'où il suit que le moyen n'est pas
fondé ».
Cependant, il est à noter que malgré
l'établissement de l'existence du lien de causalité par la
victime, la responsabilité du commissaire aux comptes est susceptible de
ne pas être engagée, lorsque ce dernier évoque une cause
d'exonération.
B) Les causes d'exonération
En cas de sa poursuite, le commissaire aux comptes, cherchera
certainement à trouver une solution afin que sa responsabilité
civile ne soit pas engagée, ainsi il peut tenter d'établir que
d'autres faits, sont de nature à atténuer même à
supprimer les conséquences normales de cette faute, au moyen des causes
d'exonération. 3
On entend par les causes d'exonération les faits
susceptibles d'être invoqués pour pouvoir dégager sa
responsabilité, en ce sens l'exonération désigne, une
décharge totale ou partielle d'une obligation d'un devoir, ou d'une
responsabilité.
1 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 153
2 Com, 14 dec 2004, www.legifrance
3 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 282
La responsabilité du commissaire aux
comptes
58
Il s'agit de la possibilité pour le défendeur de se
dégager d'une responsabilité a priori établie, en
démontrant que son comportement n'a pas causé de dommage à
la victime.1
Dans ce contexte il convient de distinguer entre trois types, des
causes d'exonération à savoir : l'absence de faute, la faute du
tiers, et la faute de la victime.
a) L'absence de faute :
Pour pouvoir engager la responsabilité du commissaire aux
comptes, lorsqu'il s'agit d'une obligation de moyen, le demandeur doit prouver
que ce dernier ne s'est pas comporté avec prudence et diligence et n'a
pas mis en oeuvre tous les moyens appropriés.
En revanche le commissaire aux comptes doit prouver qu'il n'a
pas commis de faute, en indiquant qu'il a bien mené sa mission en ce qui
concerne de s'assurer de la régularité et la
sincérité des comptes, et qu'il a effectué un
contrôle permanent.2
Toutefois, s'inscrit également dans le cadre de l'absence
de faute, la force majeure.
En effet la force majeure comprend trois composantes
essentielles, il s'agit dans ce sens, de l'extériorité, de
l'imprévisibilité, et de l'irrésistibilité.
3
Ainsi l'événement doit être
imprévisible pour le commissaire aux comptes, de manière à
ce qu'il n'en a pas eu connaissance, car dans le cas échéant il
aurait commis une faute en laissant se réaliser un
événement qu'il savait dommageable.
En plus, elle doit être irrésistible et
extérieur, en ce sens que le commissaire aux comptes se trouve dans
l'impossibilité de faire face à un événement qui
demeure extérieur à sa volonté.4
b) La faute du tiers :
Afin de dégager sa responsabilité, le commissaire
aux comptes dispose d'une deuxième option, qui consiste en la faute du
tiers.
Ainsi pour se décharger de ses obligations et de sa
responsabilité, le commissaire aux comptes doit démontrer la
participation et l'intervention d'un tiers dans la réalisation du
préjudice.
1 A.Dumery,La faute de la victime en droit de la
responsabilité civile, L'harmattan, 2009,p 10
2 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 155
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 90
4 O. Azziman, Le contrat, Le Fennec, 1995 p 265
La responsabilité du commissaire aux
comptes
59
Toutefois cette question a été confirmée
par le législateur marocain, notamment par le biais de l'article de 180,
de la loi n° 17-95 1relative à la société
anonyme, dans lequel il a été prévu expressément
que le commissaire aux comptes « n'est tenu que de ses propres fautes.
2
c) La faute de la victime :
Enfin une troisième option, peut permettre au
commissaire aux comptes, de dégager sa responsabilité civile
lorsqu'il réussirait à démontrer un certain oxymore qui
consiste en la faute de la victime.
Appliquée au commissaire aux comptes, ce dernier doit
prouver que cette faute émane du comportement des dirigeants de la
société, ou bien des tiers étant donné que le
législateur marocain a limité les parties à l'égard
desquels, le commissaire aux comptes peut être déclaré
responsable, à la société et aux tiers,
conformément aux dispositions de l'article 180 al 1 qui dispose : «
le ou les commissaires aux comptes sont responsables tant à
l'égard de la société que des tiers... ».
Toutefois, il convient de citer dans ce sens, un arrêt
de la cour de cassation française dans lequel la responsabilité
du commissaire aux comptes n'a pu être engagée, en raison de la
faute de la société qui a été victime de
détournements.3
Après avoir traité les conditions d'existence de
la responsabilité civile du commissaire aux comptes, l'analyse ne
saurait être complète sans l'étude des effets.
1 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
2 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 156
3 Com, 14 decembre 2004,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
60
Section II : Les effets de la responsabilité
civile :
Lorsque toutes les conditions sont réunies à
savoir, la faute, le dommage et le lien de causalité, la
responsabilité civile du commissaire aux comptes peut être mise en
oeuvre. 1
Afin de faire valoir ses droits, toute partie qui se sont
lésée par les agissements du commissaire aux comptes, et qui lui
ont causé un préjudice peut agir en justice et déclencher
une action civile pour obtenir réparation2 suivant les
conditions prévues par l'article 180 de la loi n° 17-95
3relative à la société anonyme.
C'est dans ce contexte qu'il convient de mettre le point sur
les contours de l'exercice de l'action à savoir les parties en plus des
règles de compétence, pour ensuite traiter de son extinction.
1 O. Azziman, Le contrat, Le Fennec, 1995 p 270
2A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 96
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
61
§ I : l'exercice de l'action :
Avant de s'intéresser à la compétence, il
est auparavant nécessaire de savoir quelles sont les parties de cette
action.
A) Les parties à l'action :
L'action en réparation implique deux parties
substantielles : la victime en tant que demandeur, et l'auteur du dommage en
tant que défendeur.
Si le défendeur va être limité au
commissaire aux comptes, les demandeurs peuvent être
nombreux.1
Cependant conformément aux dispositions de l'article
180 de la loi n°17-95 relative à la société anonyme :
« le ou les commissaires aux comptes sont responsables tant à
l'égard de la société que des tiers des fautes et
négligences par eux commises dans l'exercice de leur mission. »
Il découle du présent article que le commissaire
aux comptes doit répondre des fautes et négligences qu'il a
commises à la société ou au tiers.
C'est dans ce contexte que les demandeurs en action civile
contre le ou les commissaires aux comptes ne peuvent être que la
société personne morale ou des tiers.2
En revanche les défendeurs sont évidemment le ou
les commissaires aux comptes. a) Le demandeur :
Conformément aux dispositions de l'article 180 de la
loi n° 17-95 3relative à la société
anonyme, la société contrôlée, et les tiers,
invoquent devant le tribunal compétent la faute du professionnel. Certes
si le commissaire aux comptes leur a causé un préjudice en
n'accomplissant pas toutes les diligences requises, dans l'exercice de sa
fonction, il supportera
1 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 158
2 O. Mustapha, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 158
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
62
en tout ou partie la charge de la réparation ; mais il
est auparavant nécessaire que les demandeurs soient reconnus comme des
ayants droits.1
- La société
Conformément aux dispositions de l'article 180 de la
loi n°17-95 relative à la société anonyme, le
commissaire aux comptes est responsable de ses fautes et négligences
à l'égard de la société.
Il en résulte que la société personne
morale, peut agir en justice contre le commissaire aux comptes qui est un
organe de contrôle obligatoire ayant pour mission de s'assurer de la
régularité et la sincérité des comptes sociaux, et
par conséquent tout manquement aux diligences et obligations auxquels il
est tenu, lui sera préjudiciable.2
La société personne morale ne peut agir en
justice que par le biais d'une personne physique, c'est dans ce sens, que c'est
le représentant légal qui agit au nom de la
société.
Le représentant légal diffère d'une
société à une autre selon son administration et ses
organes de gestion.
Il s'agit du directeur général de la
société anonyme à conseil d'administration et du
président du directoire, pour la société anonyme à
directoire et conseil de surveillance.
En revanche le représentant légal de la
société en nom collectif est le gérant.
Par ailleurs, l'une des questions qui reste ouverte est celle
de savoir si un actionnaire pourrait agir aux lieux et place des dirigeants de
droit pour pallier leur carence ou passer outre leur volonté de ne pas
agir.3
- Les actionnaires :
La réponse à la question qui consiste en ce que
l'actionnaire peut agir en justice ou pas contre le commissaire aux comptes, va
s'inscrire dans un cadre doctrinal et jurisprudentiel.
Sur le plan doctrinal, il en résulte qu'un actionnaire
peut agir en son nom propre, pour réclamer la réparation d'un
préjudice personnel, différent de celui de la
société, en d'autres termes non professionnel. 4
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 432
2 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 159
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 97
4 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 438
La responsabilité du commissaire aux
comptes
63
En revanche lorsqu'il s'agit d'une relation professionnelle,
le préjudice causé par le comportement fautif du commissaire aux
comptes, affecte l'ensemble de la société, ce qui exclut la
possibilité d'une action individuelle en
responsabilité.1
En plus l'exercice de l'action en responsabilité
civile, par un actionnaire, sera susceptible de porter atteinte aux principes
qui gouvernent la gestion de la société, notamment les
actionnaires majoritaires.2
Cependant par rapport à la jurisprudence, on citera un
jugement du tribunal de première instance, d'Agadir, qui a rejeté
l'action civile accessoire d'un actionnaire, qui a demandé à ce
qu'il soit indemnisé suite au préjudice qu'il a subi à
cause des fautes du commissaire aux comptes.
En effet le tribunal a limité les ayants droit en
réparation à la société et aux tiers.
Ainsi le tribunal a justifié sa décision en
indiquant 3: « conformément aux dispositions de
l'article 180 de la loi n° 17-95, relative à la
société anonyme, le législateur a bien
déterminé les parties qui ont droit, à demander à
ce qu'il soit indemnisées, pour le dommage causé par les fautes
ou négligences, du commissaire aux comptes.
Ainsi et en application des dispositions citées, il en
résulte que le conseil d'administration de la société
objet du contrôle, est le seul qualifié juridiquement, à
demander l'indemnis ation de la société pour les
préjudices qu'elle a subi suite aux comportements fautifs de son
commissaire aux comptes.
Il s'ensuit que l'actionnaire ne bénéficie
pas de la qualité directe et nécessaire pour se constituer partie
civile, et demander à se qu'il soit indemnisé
indépendamment de la société.
- Les tiers :
En évoquant les tiers, le législateur marocain
fait allusion surtout aux créanciers qui ont des intérêts
avec la société et dont les manquements du commissaire aux
comptes leur à
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 439
2 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 282
3 TPI Agadir, 10 mai 2006,cité par T. SBAA, La
responsabilité civile, pénale et disciplinaire du commissaire aux
comptes et le comportement à adopter en cas de sa mise en cause,
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme d'expert comptable,
ISCAE, nov 2007, p 114
La responsabilité du commissaire aux
comptes
64
porter préjudice, a titre d'exemple lorsque la
certification d'un bilan inexact, a crée une apparence trompeuse qui les
a inciter à maintenir leur relation. 1
Il peut s'agir également des créanciers
impayés de la société, et les créanciers personnels
des associés ou des membres tenus des dettes de la personne
morale.2
b) Le défendeur :
Il s'agit évidemment du ou des commissaires aux
comptes, conformément aux dispositions de l'article 180 de la loi
n° 17-95 3relative à la société anonyme
qui dispose :
« Le ou les commissaires aux comptes sont
responsables tant à l'égard de la société que des
tiers, des conséquences dommageables des fautes et négligences
par eux commises dans l'exercice de leurs fonctions.
Ils ne sont pas civilement responsables des infractions
commises par les administrateurs ou les membres du directoire ou du conseil de
surveillance sauf, si en ayant eu connaissance lors de l'exécution de
leur mission, ils ne les ont pas révélées dans leur
rapport à l'assemblée générale. »
L'identification des défendeurs à l'action
nécessite de distinguer selon que le commissaire aux compte exerce son
activité, en tant que personne physique ou personne
morale.4
- Le commissaire aux comptes personne physique :
Tout d'abord, il convient de préciser que le
commissaire aux comptes est poursuivi en matière civile, en tant
qu'expert comptable, étant donné que le commissariat aux comptes
s'inscrit parmi les missions de l'expert comptable conformément aux
dispositions de l'alinéa 3 de l'article 1de la loi n° 15-89
5réglementant la profession d'expert comptable, qui
prévoit clairement que :
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 433
2 J.Monéger, T. Granier, op.cit., p 160
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
4 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 98
5 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
65
« Est expert comptable celui qui fait profession
habituelle de réviser, d'apprécier et d'organiser les
comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas
lié par un contrat de travail, il est seul habilité à
:
... - exercer la mission de commissaire aux comptes.
».
Ainsi, dans ce cas, le commissaire aux comptes doit être
assigné personnellement.
Mais, toutefois, une difficulté se présente,
lorsque le commissaire aux comptes est une personne morale.
- Le commissaire aux comptes personne morale
La loi 15-89 1autorise les experts comptables, et
par conséquent les commissaires aux comptes, à se constituer sous
forme de société de personnes ou par actions conformément
aux dispositions des articles 7 et 8 de cette loi.
Ainsi l'article 7 dispose :
« Les experts comptables peuvent constituer des
sociétés de personnes pour l'exercice de leur profession à
la condition que tous les associés soient membres de l'Ordre des experts
comptables. »
En plus de l'article 8 de la loi 15-89 énonce :
« Les experts comptables sont admis également
à constituer pour l'exercice de leur profession, des
sociétés par actions et des sociétés à
responsabilité limitée sous les conditions suivantes...
».
Mais toutefois une difficulté se présente et
consiste en ce que la constitution d'une société de personnes,
par le commissaire aux comptes, lui confère la qualité de
commerçant, alors que l'article 16 de la loi 15-89 est bien clair en la
profession d'expert comptable, est incompatible avec tout acte de
commerce.2
Par ailleurs, il convient de signaler, que le commissaire aux
comptes exerçant sa profession sous une forme sociétaire, engage
non seulement sa responsabilité personnelle, mais également celle
de la société.3
1 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
2 O. Mustapha, Le Commissaire aux comptes au Maroc, Sijelmassa,
2010, p 75
3 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 159
La responsabilité du commissaire aux
comptes
66
B) La compétence :
On entend par compétence, la capacité d'un
tribunal, à agir d'une façon pertinente, dans une affaire
donnée, pour rendre un jugement. 1
Sous peine d'incompétence, ou de prescription, l'action
en réparation doit être intentée devant le tribunal
compétent.
Toutefois, il convient de distinguer entre deux types de
compétence : la compétence matérielle, et territoriale
a) La compétence matérielle
:
Le législateur marocain n'a pas prévu
explicitement le tribunal qui demeure compétent, pour statuer sur les
affaires mettant en cause le commissaire aux comptes, en conséquence il
demeure compétent le tribunal de première instance, qui est une
juridiction de droit commun, et bénéficie d'une compétence
générale.
Il en résulte que la compétence est en principe
civile, sauf si les fonctions de commissaire aux comptes sont exercées
par une société commerciale, auquel cas la compétence sera
commerciale, ou pourra l'être, selon que le demandeur sera lui-même
commerçant ou non. 2
b) Compétence territoriale :
Les règles de la compétence territoriale, sont
fixées par les principes de droit de commun, prévues par
l'article 27 du code de procédure civile qui dispose :
La compétence territoriale appartient au tribunal
du domicile réel ou élu du défendeur. Si celui-ci n'a pas
de domicile au Maroc, mais y possède une résidence, elle
appartient au tribunal de cette résidence. Si le défendeur n'a ni
domicile, ni résidence au Maroc, il pourra être traduit devant le
tribunal du domicile ou de la résidence du demandeur ou de l'un d'eux
s'ils sont plusieurs. S'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur peut
saisir, à son choix, le tribunal du domicile ou de la résidence
de l'un d'eux.
1 B . Dubuisson, La Responsabilité Civile :
Chronique de jurisprudence, Larcier, p 481
2 O. Mustapha, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 158
La responsabilité du commissaire aux
comptes
67
§ II : l'extinction de l'action :
La responsabilité du commissaire aux comptes peut
s'éteindre de différentes manières, il en ira ainsi par
exemple si une décision judiciaire dotée de la force de la chose
jugée a rejette une action en dommages et intérêts.
1Il est également possible que le commissaire aux comptes et
les personnes préjudiciées, que ce soit la société
qui l'a désigné ou un tiers, mettent fin a leur litige sur la
responsabilité par la conclusion d'une transaction par laquelle ils se
font des concessions réciproques. Ces modes d'extinction de la
responsabilité du commissaire aux comptes ne seront pas traites ici car
il s'agit ni plus ni moins que l'application du droit commun.2
Nous nous intéresserons donc à l'étude de
deux hypothèses essentielles : la prescription et le quitus.
A) La prescription :
La loi n° 17-95 3relative à la
société anonyme, a modifié la prescription du droit commun
en profondeur. Cette loi prévoit pour toutes les actions en
responsabilité contre les commissaires aux comptes, par le biais de
l'article 181, une prescription de 5 ans au lieu de 15 ans prévue par
l'article 387 du D.O.C.
Les règles de prescription, ont été
prévues explicitement par le législateur marocain, dans le cadre
de la loi n° 17-95 relative à la société anonyme a
travers l'article 181 qui dispose :
« Les actions en responsabilité contre les
commissaires aux comptes se prescrivent par cinq ans à compter du fait
dommageable ou s'il a été dissimulé de sa
révélation ».
Ainsi il découle des dispositions prévues par
l'article 181 que le délai de prescription est conditionné par
deux hypothèses essentielles subordonnées au fait dommageable, il
s'agit :
- Si le fait dommageable n'a pas été
dissimulé, la prescription quinquennale court à compter du fait
dommageable
1 1 C. Mélotte, La responsabilité des professions
juridiques, Kluwer, 2006, p 25
2 B . Dubuisson, La Responsabilité Civile :
Chronique de jurisprudence, Larcier, p 567
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
68
- Si le fait dommageable a été dissimulé, la
prescription quinquennale ne court qu'a compter de la révélation
du fait dommageable.
En fait, la fixation du point de départ du délai
de prescription, a créé une controverse aussi bien doctrinale,
que jurisprudentielle.1
Ainsi, il en résulte, que le critère essentiel
qui permet de distinguer entre ces deux hypothèses est la dissimulation
ou son absence.
Dans ce contexte, on entend par dissimulation, « le fait
de cacher, ce que l'on doit révéler », c'est un comportement
qui peut être constitutif de dol, de fraude, de recel, de
complicité, cet acte implique donc qu'il soit intentionnel, toutefois,
il doit être prouvé par le demandeur à l'action.
2
Or par rapport au commissaire aux comptes, la dissimulation
doit consister dans le fait ne pas révéler à
l'assemblée générale, les anomalies qu'il a
détectées dans le cadre de l'exercice de ses fonctions.
3
En revanche, à défaut de dissimulation, le
délai de prescription commence à courir a partir du moment de la
réalisation du fait dommageable, il s'agit d'une application stricte de
la loi, toutefois le jour du dépôt des certifications marque le
début du délai.4
Cependant par rapport au droit comparé, et notamment
français, il est à signaler une différence relative
à la durée du délai de prescription qui est triennal.
Ce délai de prescription qui est très court est
destiné en premier lieu, à limiter une longue période
d'incertitude, dans laquelle les commissaires aux comptes, pourraient
être exposés à une action en responsabilité
introduite par la société, ou les tiers, en plus soustraire d'un
point de vue temporel la responsabilité des commissaires aux comptes,
sert à encourager l'initiative d'entreprendre, malgré la
sévérité des responsabilités encourues.
Toutefois, pour mieux cerner cette question de prescription,
il serait plus instructif de l'illustrer par un cas de jurisprudence, notamment
française vu qu'on constate une pénurie de la jurisprudence
marocaine en ce domaine, dont la cause essentielle relève du coté
législatif, qui rend difficile toute poursuite contre le commissaire
aussi bien dans le cadre civil que pénal voire même
disciplinaire.
1 1 A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence »,2008, p 108
2 A.Tonye, Epargnants d'afrique, Inquietez vous ,
L'harmattan, 2009, p 87
33 J. Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 164
4A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 440
La responsabilité du commissaire aux
comptes
69
Dans ce contexte la cour de cassation française a rendu
un arrêt le 17 décembre 2002, dans lequel, elle a
considéré que la négligence ne peut être
assimilée à une dissimulation du fait dommageable, et en
conséquence la responsabilité du commissaire aux comptes ne peut
être retenue puisque l'action est déjà prescrite :1
« Mais attendu que l'arrêt retient que si le
fait dommageable invoqué à l'encontre de M. X... ne peut
résulter que de la certification des comptes à laquelle celui-ci
a procédé et que si l'insuffisance de diligences et de
contrôles imputés par la société appelante au
commissaire aux comptes constituerait, si elle était établie, une
faute engageant sa responsabilité, les négligences, de la nature
de celles qui sont invoquées, ne sauraient à elles seules
être regardées comme une dissimulation, laquelle implique la
volonté du commissaire aux comptes de cacher des faits dont il a
connaissance par la certification des comptes ; qu'il ajoute qu'il n'est
d'aucune façon démontré par la société
Translab que M. X... ait eu connaissance de détournements commis par le
dirigeant social, M. Y..., à son avantage ou à celui de la
société Avio ou d'irrégularités comptables qu'il
aurait dissimulées ; qu'en l'état de ces constatations et
énonciations, la cour d'appel qui a légalement justifié sa
décision, a pu statuer comme elle a fait ; d'où il suit que le
moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches »
B) Le quitus
Avant de s'intéresser à l'application du quitus
par rapport au commissaire aux comptes, il convient au début de
définir le concept pour ensuite traiter de ses effets.
Le concept de quitus relève strictement du
régime de droit de commun du mandat, et consiste en ce que le mandant
renonce au droit d'intenter une action en responsabilité civile contre
le mandataire, pour une faute que ce dernier aurait éventuellement
commise pendant l'exécution de son mandat. Toutefois il est à
noter que cette renonciation peut prendre une forme tacite ou expresse, et elle
a pour conséquence que le mandant renonce irrévocablement au
droit d'exiger des dommages intérêts de son mandataire, il en
résulte donc que le quitus est une conception de nature
contractuelle.2
1 Com, 17 decembre 2002,
www.legifrance.gov.fr
2M. Mouthieu, L'intérêt social en droit
des sociétés, L'haramattan 2009, p 126
La responsabilité du commissaire aux
comptes
70
Cependant, dans le silence de la loi n°
17-951relative à la société anonyme,
l'application des principes généraux du quitus sur le commissaire
aux comptes, signifie en conséquence la renonciation de la
société à son droit d'intenter une action en
responsabilité civile contre le commissaire aux comptes, or cette
solution a été accueillie au début par certains auteurs,
mais elle ne pouvait être maintenue, car en effet le quitus n'a d'effet
qu' a l'égard des mandataires, or le commissaire n'est plus le
mandataire de la société ni des actionnaires.2
Toutefois il convient de signaler que le quitus ne produit
également aucun effet par rapport à la relation entre le
commissaire aux comptes et les tiers.
Par ailleurs, il est à noter que même si le
quitus obéit aux règles légales, et s'inscrit dans un
cadre de mandat, il ne produit aucun effet par rapport à l'action en
responsabilité civile, c'est le cas des administrateurs des membres du
directoire et de conseil de surveillance, dont le quitus ne produit effet
à l'égard de l'action en responsabilité civile
conformément aux dispositions du deuxième alinéa de
l'article 354 qui énonce qu' : « aucune décision de
l'assemblée générale ne peut avoir pour effet
d'éteindre une action en responsabilité contre les
administrateurs, les membres du directoire ou du conseil de surveillance pour
faute commise dans l'accomplissement de leur mandat. ».
1Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
2 E. Causin, Droit comptable des entreprises, Larcier,2002, p
296
La responsabilité du commissaire aux
comptes
71
Conclusion de la première partie :
Nous avons voulu par l'examen des principes
généraux et des caractéristiques particulières de
la responsabilité civile, découvrir la répercussion et
l'incidence de celle-ci dans le domaine plus restreint de la fonction du
commissaire aux comptes.
Nous avons acquis, d'abord la conviction, que le commissaire
aux comptes doit répondre de ses faits dommageables, de commission ou
d'omission, et que sa faute sera appréciée selon le
critère du bon professionnel, et non pas le bon père de
famille.
Cette recherche nous a conduit aussi à la
détermination de la nature de cette responsabilité, il s'agit en
effet d'une responsabilité, à caractère hybride,
puisqu'elle relève aussi bien de la responsabilité
délictuelle que contractuelle, d'ailleurs des caractères
spéciaux sont à signaler
.Mais cependant, le commissaire aux comptes, exerçant
une profession libérale, et soumis aux obligations fixées par la
loi, soustrait à un droit spécial ou commun de la
responsabilité civile, il sera contraint suivant les principes de l'un
ou de l'autre régime, à la réparation de tout tort
causé. Sa responsabilité sera contractuelle ou extracontractuelle
: la première engendrée par un manquement fautif et
préjudiciable, à une obligation inhérente à un
contrat ; la seconde se rattachant à une pareille inobservation d'une
obligation préexistante indépendante de toute convention.
Mais cependant, puisque nous n'avons pas établi
l'existence d'un rapport contractuel entre le commissaire aux comptes aussi
bien avec la société qu'avec les tiers, il semble certain que
très généralement cette responsabilité sera
délictuelle.
Au terme de l'étude de l'aspect civile, de la
responsabilité du commissaire aux comptes, il est, sans conteste, d'une
souveraine importance de nous demander maintenant qu'elles seront les
caractéristiques de l'aspect pénal de sa
responsabilité.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
72
Deuxième partie
LA RESPONSABILITÉ RÉPRESSIVE
DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES :
Contrairement à la responsabilité civile qui
s'inscrit dans une logique indemnitaire, la responsabilité pénale
et disciplinaire ont en commun leur caractère répressif, en
raison de leurs effets qui consistent dans les sanctions prononcées.
Leur objectif est en effet de faire prévaloir
l'intérêt général sur l'intérêt
particulier.
Toutefois, il est certain que la responsabilité
pénale et la responsabilité disciplinaire sont différentes
l'une de l'autre : elles s'opposent en effet sur le fond, la forme et la
procédure.
Dans cette perspective, appliquée au thème de la
responsabilité du commissaire aux comptes, objet de notre étude,
la responsabilité répressive sera analyse par rapport à
deux thèmes essentiels : la responsabilité pénale
(Chapitre I) et la responsabilité disciplinaire (Chapitre II).
La responsabilité du commissaire aux
comptes
73
CHAPITRE I : LA RESPONSABILITE
PENALE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES
La responsabilité pénale est une autre forme de
responsabilité qui se distingue de la responsabilité civile.
La responsabilité pénale n'a pas pour objet, la
réparation d'un préjudice quelconque, mais a pour fonction de
ramener l'individu dans la norme fixée par l'autorité publique
représentant la société dans son ensemble1.
Si la responsabilité civile a pour objectif la
réparation du préjudice, la responsabilité pénale
en revanche cherche à punir le coupable.
Ces deux types de responsabilités se distinguent
également au niveau des effets, la responsabilité civile peut
octroyer des dommages-intérêts en guise de réparation du
préjudice, en revanche la responsabilité pénale inflige
une peine comme sanction à l'infraction commise.2
A la différence de la responsabilité civile, les
circonstances aux cours desquelles, le commissaire aux comptes dans le cadre de
son exercice professionnel, peut voir sa responsabilité pénale
engagée sont limitées. 3
Ces cas limités, sont la conséquence du principe
de légalité en droit pénal en vertu duquel : il ne peut y
avoir de poursuites sans un texte précis.
La mise en oeuvre de la responsabilité pénale
suppose le respect des principes généraux relatifs à toute
poursuite pénale à savoir :
- Le principe de la légalité des délits
et des peines : nullum crimen, nulla poena
sine lege qui exige la présence d'un texte
- Le principe de l'interprétation stricte de la loi
pénale
- Le principe de la non rétroactivité de la loi
pénale
1 N.Maccario, Gestion juridique de l'entreprise,
Pearson Education France, 2006, 279
2 J. Pagés, De la responsabilité
ministérielle, Bechet, 1818, p 48
3 F. Collasson, Le patrimoine professionnel, Presses
Univ. Limoges, 2006, p 360
La responsabilité du commissaire aux
comptes
74
Cependant s'agissant du fondement de la responsabilité
pénale du commissaire aux comptes, en effet celle-ci trouve sa source
dans plusieurs textes légaux :
- Loi 17-95 relative aux sociétés anonymes,
promulguée par le dahir n° 1-96-124
du 14 rabii II 1417 (30 août 1996), telle qu'elle a
été modifiée et complétée par la loi n°
20-05 promulguée, par le dahir n° 1-08-18 du 17 joumada I 1429 (23
mai 2008) ((Bulletin officiel n° 5640 du jeudi 19 juin 2008) ;
- Loi 15-89 réglementant la profession d'expert comptable
et instituant un ordre
des experts comptables, promulguée par le dahir n°
1-92-139 du 14 rejeb 1413 ( 8 janvier 1993) (Bulletin officiel n° 4188 du
11 chaabane 1413 \(3 février 1993\)
- Dahir n° 1-59-413 du 28 Joumada II 1382, ( 26 Novembre
1962) portant
approbation du code pénal. (BO n° 2640 bis du
mercredi 5 juin 1963)
La responsabilité pénale du commissaire aux
comptes peut se trouver engagée soit pour des infractions de droit
commun, soit en raison de délits spéciaux. 1Or compte
tenu de la diversité des infractions de droit commun et qu'ils
n'appellent des remarques particulières2, on va limiter notre
étude aux infractions propres à la qualité de commissaire
aux comptes, - qu'elles soient relatives à la mission du commissaire aux
comptes (Section I) ou à son statut professionnel (Section II),- ainsi
que la situation du commissaire aux complice d'une infraction pénale
3(Section III).
1 Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 180
2 Y. Guyon, Le commissariat aux comptes, Librairies
techniques, 1971,p 294
3 3 3 A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 124
La responsabilité du commissaire aux
comptes
75
Section I- Infractions relatives à la mission du
commissaire aux comptes
Toutes les infractions susceptibles d'être
reprochées, au commissaire aux comptes, en relation avec sa mission,
constitue des délits, voire même des délits de police,
puisque le maximum de peine prévu pour ces infractions est de 2 ans.
Il s'agit de distinguer dans ce cas, entre trois infractions :
- Délits de confirmation d'informations
mensongères
- Délits de non-révélation des faits
délictueux
- Violation du secret professionnel
§ /I : Délit de confirmation d'information
mensongère
L'obligation principale incombant au commissaire aux comptes,
est de certifier la régularité, la sincérité, et
l'image fidèle des comptes annuels. 1Il est donc le gardien
de cette sincérité, de cette régularité, juridique,
comptable et financière dont il rend compte à l'assemblée
générale annuelle dans le rapport
général.2
En faveur de cette conception de gardien de la
sincérité, et garant de confiance, le juge pénal adopte
une interprétation stricte des éléments constitutifs du
délit, sanctionnant ainsi de manière sévère le
contrôle défaillant du commissaire aux comptes, qui portent
atteinte à la crédibilité et la réputation de la
société objet de son contrôle. 3
Conformément, aux principes généraux du
droit pénal, la poursuite pour toute infraction, nécessite en ce
que cette dernière contient tous ses éléments constitutifs
à savoir :
- L'élément légal
- L'élément matériel
- L'élément moral
1 S. Guérard, Regards croisés sur
l'économie mixte, L'harmattan, 2006, p 36
2 2 P. Moulin, L'alerte en période de crise,
PLInformatique, 2005,p 25
3 N. Véron, L'information
financière en crise : comptabilité et capitalisme, Odile
Jacob, 2004, p 67
La responsabilité du commissaire aux
comptes
76
A. L'élément légal :
Cette infraction est régie par l'article 405 de la loi
n° 17-951 relative à la société anonyme,
qui dispose : « sera puni d'un emprisonnement de 6 mois à deux ans
et d'une amende de 10 000 à 100 000 dirhams ou de l'une de ces deux
peines seulement, tout commissaire aux comptes qui, soit en son nom personnel,
soit au titre d'associé dans une société de commissaire
aux comptes, aura, sciemment donné ou confirmé des informations
mensongères sur la situation de la société ... ».
Il découle des dispositions de cet article et surtout
au niveau des peines prévues, que l'infraction qui peut être
reprochée au commissaire aux comptes constitue un délit de
police, puisque conformément aux dispositions de l'article 111 du code
pénal al 3 :
« ... L'infraction que la loi punit d'une peine
d'emprisonnement dont elle fixe le maximum à deux ans ou moins de deux
ans, ou d'une amende de plus de 200 dirhams est un délit de police ...
»
B. L'élément matériel :
Conformément aux dispositions de l'article 405
précité, l'élément matériel de cette
infraction comprend deux composantes essentielles :
-Une information mensongère
- Donation ou confirmation de l'information mensongère
a) L'information mensongère :
On entend par information mensongère toute information
contraire à la réalité et à la
vérité, le législateur marocain, précise l'objet de
cette information en indiquant qu'elle doit porter sur la situation de la
société.2
Toutefois d'après la doctrine1, étant
donné que le législateur exige et précise la
qualité de commissaire aux comptes en l'absence de toute autre
qualité, il est évident que l'information doit se rapporter
à la mission du commissaire aux comptes.
1 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
2 M. Letaief, L'état et Les entreprises
publiques en Tunisie, L'Harmattan, 1998, p 367
La responsabilité du commissaire aux
comptes
77
Cependant une question se pose relative à l'objet de
l'information mensongère, à savoir la situation de la
société, en effet le manque de précision par le
législateur sous entend le terme « situation » au sens large,
à savoir financière, comptable et juridique.
Or d'après, les dispositions de l'article 166 de loi
n°17-95, 2la mission générale du commissaire aux
comptes consiste en ce que ce dernier, s'assure de la régularité
et la sincérité des comptes, ainsi les termes utilisés
(sincérité, régularité) sont abstraits et manquent
de précision, par conséquent une marge d'erreur est
acceptée, raison pour laquelle la doctrine 3estime que le
caractère mensonger doit revêtir une grande importance au point
qu'il dépasse les lignes rouges, et qu'il ne témoigne pas d'une
simple erreur, mais des fautes significatives, que sa diligence et prudence,
lui aurait permis de les détecter et dans le cas échéant
mettre des réserves ou refuser la certification. 4
Il en résulte que l'information doit relever de la
mission de contrôle du commissaire aux comptes c'est-à-dire que
les informations doivent être parvenues à sa connaissance, dans le
cadre de l'exercice de ses fonctions. L'information en question doit avoir
été apprise par le commissaire aux comptes à l'occasion de
l'exercice de sa mission de contrôle.5
S'agissant des destinataires de cette information
mensongère, on remarque que le législateur n'a pas apporté
de précision concernant ce sujet, mais toutefois les destinataires
habituels sont les dirigeants de la société, les actionnaires et
les créanciers.
b) La donation et la confirmation des informations
mensongères :
Conformément aux dispositions de l'article 405 de la
loi n° 17-95 relative à la société anonyme, est
sanctionnée toute information mensongère, donnée ou
confirmée par le commissaire aux comptes.
Le législateur marocain sanctionne la transmission
d'une information mensongère quelque soit son mode, par le biais d'une
confirmation ou donation.
1 P. Lehman, Le Referis : droit des affaires,
comptable, gestion financière, fiscal, droit communautaire, social,
gestion budgétaire, Volume 2, Maxima, 1995, p 205
2 2 Loi 17-95 relative à la société anonyme,
promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996)
telle qu'elle a été modifiée et complétée
par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17
Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
3 N. Veron, M.Autret, A.Galichon, L'information
financière en crise : comptabilité et capitalisme, Odile Jacob,
2004,p 67
4 A. Yahia, Le Régime juridique des dividendes,
L'Harmattan, 2010, p 65
5 C. Amblard , Fonds de Dotation, Wolters Kluwer
France,2010, p 114
La responsabilité du commissaire aux
comptes
78
Cette transmission est matériellement établie,
lorsque le rapport, général ou spécial selon le cas, a
donné ou confirmé le mensonge des dirigeants.1
Si le législateur marocain en évoquant le terme
donner, suppose un acte de délivrance cela n'empêche que la
transmission peut être aussi bien par action que par
omission.2
Généralement la confirmation ou la donation de
l'information mensongère se manifeste, dans le cadre d'un rapport
inexact 3présenté à l'assemblée
générale, de même la certification d'un bilan inexact sans
réserve4, s'inscrit dans le cadre des actes incriminés
par les dispositions prévues par l'article 405 de la loi n° 17-95
5relative à la société anonyme.
Dans ce contexte, la jurisprudence marocaine s'est
prononcée sur cette question par le biais d'un jugement du tribunal de
première instance d'Agadir, daté le 10 mai 2006, et dans lequel
la responsabilité pénale du commissaire aux comptes a
été retenue pour avoir commis les délits suivants :
établir sciemment une attestation relatant des faits inexacts, et la
confirmation d'informations mensongères conformément aux
dispositions des articles 366 du code pénal, et 405 de la loi n°
17-95 relative à la société anonyme.
En effet dans le cadre du délit de communication
d'informations mensongères, la responsabilité du commissaire aux
comptes a été engagée, suite à des contradictions
importantes détectées dans les rapports qu'il avait
établis et présentés à l'assemblée
générale:6
« .... et d'après la conclusion du commissaire
aux comptes dans son dernier rapport en ce qu'il a des soupçons envers
les comptes de la société, il est bien claire qu'il
n'était pas sérieux dans son premier rapport, et qu'il a
dissimulé la situation financière réelle de la
société, alors que d'après la loi 15-89, le commissaire
aux comptes est le plus habilité à se prononcer sur l'exactitude
des comptes et la situation de la société ... ».
1 Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 180
2 Crim, 2 février 2000,
www.legifrance.gouv.fr
3 Crim, 12 janvier 1981,
www.legifrance.gouv.fr
4 Crim, 8avril 1991
www.legifrance.gouv.fr,
5 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
6 TPI Agadir, 10 mai 2006,cité par T. SBAA, La
responsabilité civile, pénale et disciplinaire du commissaire aux
comptes et le comportement à adopter en cas de sa mise en cause,
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme d'expert comptable,
ISCAE, nov 2007, p 114
La responsabilité du commissaire aux
comptes
79
C) L'élément moral :
Conformément aux dispositions de l'article 405 de loi
n°17-95 relative à la société anonyme : « sera
puni d'un emprisonnement de 6 mois à deux ans et d'une amende de 10 000
à 100 000 dirhams ou de l'une de ces deux peines seulement, tout
commissaire aux comptes qui, soit en son nom personnel, soit au titre
d'associé dans une société de commissaire aux comptes,
aura, sciemment donné ou confirmé des informations
mensongères sur la situation de la société.. »
Il découle de l'emploi du terme sciemment, que
l'infraction est intentionnelle, en ce sens que le commissaire aux comptes agit
en connaissance de cause, toutefois la constitution de l'infraction
nécessite un dol général1, qui consiste en
l'intention de violer la loi en connaissance de cause, un dol spécial
n'est pas requis, il s'en suit qu'agir sciemment, ne signifie pas agir dans
l'intention de nuire.2
Toutefois il est à noter que d'après la
doctrine3, l'intention du commissaire aux comptes peut être
prouvée aussi bien par sa carence et négligence que par ses
propres aveux.
Dans le même contexte, la jurisprudence
marocaine4 a confirmé ce qui a été
avancé par la doctrine en ce que la négligence et la carence en
plus des aveux peuvent constituer des preuves de l'élément
intentionnel, en effet le tribunal de première instance d''Agadir a
indiqué dans son arrêt du 10 Mai 2006 que :
« ainsi il demeure certain d'après les motifs
cités, que le commissaire aux comptes dans le cadre de sa
vérification des comptes de la société X, qu'il n'a pas
pris le soin de vérifier et de se faire communiquer les pièces et
documents, malgré les pouvoirs qui lui sont confiés par la loi
relative aux sociétés anonymes, en plus il a limité sa
mission à donner son avis sur ce que lui est présenté
comme documents par le conseil d'administration de la société
d'après ce qu'il a avoué lui-même devant le tribunal, ce
qu'il a poussé en conséquence à donner une image non
fidèle et inexacte sur la situation de la société ...
».
1 Crim, 2 avr 1990,
www.legifrance.gouv.fr
2 Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 181
3 A. Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 454
4 4 TPI Agadir, 10 mai 2006, cité par T. SBAA, La
responsabilité civile, pénale et disciplinaire du commissaire aux
comptes et le comportement à adopter en cas de sa mise en cause,
Mémoire en vue de l'obtention du diplôme d'expert comptable,
ISCAE, nov 2007, p 114
La responsabilité du commissaire aux
comptes
80
§ /II Le défaut de révélation des
faits délictueux
Le commissaire aux comptes est un agent créateur de
confiance, c'est dans ce sens que sa mission de contrôle, pour s'assurer
de la régularité et la sincérité des comptes, est
destinée surtout en premier lieu à protéger les
intérêts de la société, des actionnaires, voire des
salariés, raison pour laquelle, le législateur marocain a mis
à la charge du commissaire aux comptes l'obligation de
révéler auprès de l'assemblée
générale les faits délictueux, qui risquent de porter
atteinte à la crédibilité, et compromettre
l'activité de l'entreprise.
Il est à noter que les dispositions prévues par
le législateur marocain en relation avec le défaut de non
révélation des faits délictueux se distinguent de celles
prévues par le législateur français, la principale
distinction réside surtout dans le destinataire de cette obligation,
ainsi le législateur marocain charge le commissaire aux comptes de
révéler les faits délictueux aux organes d'administration,
de direction ou de gestion, en revanche le législateur français
met à la charge du commissaire aux comptes l'obligation de
révéler les faits délictueux au ministère public.
1
Il convient donc pour analyser cette infraction, de traiter
ses fondements textuels, avant de s'intéresser aux autres
éléments constitutifs.
A) L'élément légal :
L'infraction du défaut de révélation des
faits délictueux est prévue par l'article 405 de loi n°
17-95 2 relative à la société anonyme : «
Sera puni d'un emprisonnement de six mois à deux ans et d'une amende de
10 000 à 100 000 dirhams ou de l'une de ces deux peines seulement, tout
commissaire aux comptes ... qui n'aura pas révélé aux
organes d'administration, de direction ou de gestion les faits lui apparaissant
délictueux dont il aura eu connaissance à l'occasion de
l'exercice de ses fonctions ... »
B) L'élément matériel :
Le délit suppose l'existence d'un ou plusieurs faits
délictueux (a), que le commissaire aux comptes s'est abstenu de
révéler aux organes d'administration et de direction3
(b).
1
C. com., art L. 823-12 2°
2 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 145
La responsabilité du commissaire aux
comptes
81
a) Le fait délictueux :
La constitution de cette infraction ne peut être
établie, sans qu'il y ait un fait délictueux.
Toutefois une question se pose sur la nature de ces faits,
car les dispositions prévues par l'article 405 manquent de
précision.
Dans le même sens, étant donné que le
commissaire aux comptes ne dispose pas d'un pouvoir d'appréciation, par
conséquent sa mission sera délicate, pour déterminer les
faits susceptibles d'être délictueux, et ensuite pour les
révéler aux organes d'administration. 1
La nature des faits délictueux, a crée un
débat controversé au sein de la doctrine, d'une part des auteurs
ont considéré, que ces faits doivent être seulement
liés à la mission du commissaire aux comptes, tel qu'elle est
prévue par la loi n° 17-95 2relative à la
société anonyme, c'est-à-dire soumis exhaustivement au
droit pénal des sociétés, 3d'autre part une
partie de la doctrine considère que ces faits ne doivent pas être
limités à la mission du commissaire aux comptes.4
En effet la doctrine a fini par considérer,
étant donné que le législateur a employé le terme
« faits délictueux », qu'il sous-entend que constitue un fait
délictueux tout fait considéré par la loi comme
susceptible de troubler l'ordre social.5
Dans le même ordre d'idées, la jurisprudence
française a indiqué que le commissaire aux comptes a l'obligation
de révéler dès qu'il en a connaissance dans le cadre de sa
mission, les irrégularités susceptibles de recevoir une
qualification pénale, même si celle-ci ne peut en l'état
être définie avec précision. 6
b) L'omission de révélation :
Conformément aux dispositions de l'article 405 de la
loi n° 17-95relative à la société anonyme, le
commissaire aux commissaire est tenu de révéler aux organes de
direction et d'administration les faits lui apparaissant délictueux dont
il aura eu connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions.
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 142
2 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
3 A. Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 459
4 B. Guillon, Méthodes et thématiques
pour la gestion des risques, L'Harmattan, 2008, p 292
5 M. Mouthieu, L'interet social en droit des
sociétés, L'Harmattan, 2009, p 264
6 Crim, 15 septembre 1999,
www.legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
82
En effet ce délit d'omission, constitue une infraction
instantanée.
Par ailleurs, il convient de signaler d'après la
jurisprudence française, que le commissaire aux comptes ne peut dans le
but d'échapper à toute poursuite se prévaloir d'une erreur
de droit1, ou bien régulariser la situation
postérieurement2.
De même, on remarque que, le législateur n'a pas
exigé de délai pour la révélation des faits
délictueux, or la jurisprudence française est intervenue
également sur cette question en indiquant, que le délai d'un moi
est jugé raisonnable. 3
C) L'élément moral :
Compte tenu de sa mission qui repose sur le contrôle et
la certification de l'exactitude des comptes sociaux, il est évident que
le commissaire aux comptes est l'organe le plus apte4 et plus
qualifié a connaitre la situation juridique économique,
financière et comptable de la société5, et par
conséquent sa carence ou son abstention de révéler les
faits délictueux auprès des organes de direction ou
d'administration témoigne systématiquement d'une volonté
non équivoque qui peut être qualifiée de mauvaise foi, mais
cependant sa responsabilité pénale ne peut être
engagée, que dés lors qu'il a eu connaissance de ces faits
délictueux. 6
La connaissance des faits demeure une condition sine qua none
pour engager la responsabilité pénale du commissaire aux comptes
7en dehors de toute présomption de connaissance ou de
mauvaise foi, en effet cette condition a été confirmée par
la jurisprudence française dans un arrêt de la cour de
cassation8 du 29 janvier 1963 : « Mais attendu qu'il ne
résulte pas de ces énonciations que le demandeur (commissaire aux
comptes) ait eu connaissance de faits délictueux a la charge des
dirigeants de la société, ni par suite, qu'il ait
été de mauvaise foi en ne signalant pas au procureur de la
république ceux qui auraient été commis ; Que, de ce chef
également, la décision n'est pas justifiée ».
1 Crim, 2 Mars 1983, ,
www.legifrance.gouv.fr
2 Crim,12 JAN 1981,
www.legifrance.gouv.fr
3 TGI, Valence, 1 février 2011,
www.oec-paris.fr/opendoc.php?iddoc=2143
4 Crim, 31 janvier 2007,
www.legifrance.gouv.fr
5 Crim, 25 février 2004,
www.legifrance.gouv.fr
6 Crim, 25 février 2009,
www.legifrance.gouv.fr
7 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 145
8 Crim, 29 janvier 1963,
www.legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
83
§ /III La violation du secret professionnel :
Si l'obligation de révéler les faits
délictueux est prévue par rapport aux organes de la
société, l'obligation relative au secret professionnel est
prévue à l'égard des tiers. 1
Cette obligation qui peut être qualifiée de
discrétion ou de se taire, 2repose sur trois fondements
essentiels et forts importants et qui consistent en l'efficacité de la
société objet du contrôle effectué par le
commissaire aux comptes, la protection des intérêts des
actionnaires et des salariés, et enfin la sécurité aussi
bien économique, financière voire social et politique. 3
L'obligation au secret professionnel, est très large et
interprétée de manière extensive.
Elle couvre toutes informations ou faits dont le commissaire
aux comptes aurait pris connaissance à l'occasion de l'exercice de ses
fonctions.4
Etant donné qu'il est un garant de confiance, le
commissaire aux comptes a l'obligation de ne pas révéler les
faits et informations dont il a eu connaissance à l'occasion de
l'exercice de ses fonctions, même si elles demeurent accessibles à
d'autre personne.5
La justification de la répression de cette violation de
discrétion repose sur un facteur subjectif et essentiel, qui consiste
dans l'affaiblissement de la confiance dans les rapports entre le commissaire
aux comptes et la société en tant que personne morale ainsi que
ses dirigeants.6
C'est la raison pour laquelle le législateur marocain a
incriminé, la violation du secret professionnel s'agissant du
commissaire aux comptes, il convient donc de mettre en relief le fondement
légal de cette infraction, ainsi que les autres éléments
constitutifs de l'infraction.
1 P. Moulin, L'alerte en période de crise,
PLInformatique, 2005,p 22
2 A. Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 472
3 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p69
4 M. Coipel, Droit des sociétés
commerciales, Kluwer, 2006, p 874
5 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 163
6 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 182
La responsabilité du commissaire aux
comptes
84
A) L'élément légal :
La violation du secret professionnel par le commissaire aux
comptes, est une infraction soumise à l'article 446 du code pénal
conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 405
de la loi n°17-95 1relative à la société
anonyme.
Dans ce sens l'article 446 du code pénal dispose :
« les médecins, chirurgiens ou officiers de santé, ainsi
que les pharmaciens, les sages-femmes ou tout autre personne
dépositaire, par état ou profession ou par fonctions permanentes
ou temporaires des secrets qu'on leur confie qui hors les cas ou la loi
les oblige ou les autorise à se porter dénonciateurs, ont
révélé ces secrets, sont punis de l'emprisonnement d'un
mois à six mois et d'une amende de mille deux cent à vingt mille
dirhams.
Toutefois, les personnes énumérées
ci-dessus n'encourent pas les peines prévues à l'alinéa
précédent :
1° Lorsque, sans y être tenues, elles
dénoncent les avortements dont elles ont eu connaissance à
l'occasion de l'exercice de leur profession ou de leurs fonctions;
2° Lorsqu'elles dénoncent aux autorités
judiciaires ou administratives compétentes les faits délictueux
et les actes de mauvais traitement ou de privations perpétrés
contre des enfants de moins de dix - huit ans ou par l'un des époux
contre l'autre ou contre une femme et dont elles ont eu connaissance à
l'occasion de l'exercice de leur profession ou de leur fonctions.
Citées en justice pour des affaires relatives aux
infractions citées ci-dessus, les dites personnes demeurent libres de
fournir leur témoignage ou non. »
Dans ce contexte, il est à noter que l'application de
l'article 446 du code pénal à l'égard du commissaire aux
comptes signifie en conséquence d'une part que le commissaire aux
comptes s'inscrit parmi les personnes dépositaires de secrets qui lui
sont confiés, et d'autre part les secrets dont le commissaire a eu
connaissance sont soumis à la protection pénale.
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
85
B) L'élément matériel :
L'élément matériel de cette infraction
comprend deux composants essentiels à
savoir :
- Un secret professionnel
- La révélation de ce secret
a) Le secret professionnel :
La notion de secret professionnel, désigne à la
fois des faits qui ne doivent pas être révélés, et
le voile que la société doit conserver pour que les informations
qu'elle détient ne soient pas connues des tiers. 1
L'information ou le fait secret désignent en principe
une confidentialité qui doit être liée à la fonction
et aux missions du commissaire aux comptes. 2Toutefois en dehors de
toute exhaustivité ou ambigüité, le secret sous entend tout
ce que le commissaire aux comptes aurait pu voir ou entendre, lire ou
comprendre, voire même déduire à l'occasion de l'exercice
de ses fonctions.3 En effet le commissaire aux comptes est tenu dans
ce contexte à un devoir de silence.4
Afin d'éviter toute confusion ou
ambigüité, le législateur marocain a essayé de
délimiter, le champ d'obligation du secret professionnel qui incombe au
commissaire aux comptes en indiquant que ce dernier est tenu au secret
professionnel par rapport aux faits, actes et renseignement dont il a eu
connaissance conformément aux dispositions de l'article 177 de la loi
n° 17-95 relative à la société anonyme qui dispose :
« Les commissaires aux comptes ainsi que leurs collaborateurs sont
astreints au secret professionnel, pour les faits actes et renseignement dont
ils ont pu avoir connaissance à raison de leurs fonctions.
»
b) La révélation du secret professionnel
:
La prohibition de la révélation ne dépend
ni du nombre, ni de la qualité des personnes auxquelles le secret est
dévoilé. 5La révélation punissable ne
suppose pas une divulgation1 ni de préjudice.
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 162
2 Crim, 20 décembre 1967,
www.legifrance.gouv.fr
3 M. Letaief, L'état et Les entreprises
publiques en Tunisie, L'Harmattan, 1998, p 370
4 F. Mananga, Les conditions de travail dans le
secteur social : approche juridique d'un exercice professionnel bien
particulier, L'haramattan, 2008, p 285
5 Crim, 16 mai 2000,
www.legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
86
Le délit est constitué même lorsque la
violation du secret bénéficie à une personne
unique.
Peu importe le mode de révélation du secret, il
peut être aussi bien écrit qu'orale.2
Mais toutefois il convient de préciser que,
l'obligation de discrétion ou de silence relative au secret
professionnel ne constitue pas un principe absolu3, puisque le
législateur marocain, prévoit certaines exceptions.
L'article 446 du code pénal appliqué au
commissaire aux comptes prévoit expressément que celui-ci est
délie de l'obligation au secret professionnel, lorsque la loi l'oblige
ou l'autorise à se porter dénonciateur.
Le commissaire aux comptes demeure également
délié de cette obligation liée au secret professionnel, en
matière de difficultés des entreprises, conformément aux
dispositions du deuxième alinéa de l'article 567 du livre V du
code de commerce qui dispose : « Il (le tribunal) peut
également entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile
sans qu'elle puisse invoquer le secret professionnel; il peut aussi
requérir l'avis de toute personne qualifiée.
C) L'élément moral :
Conformément aux dispositions de l'article 446 du code
pénal, il découle que le délit de révélation
du secret professionnel, appliqué au commissaire aux comptes, est une
infraction intentionnelle dans la mesure que c'est un dol général
qui est requis, en ce sens que le commissaire aux comptes aura procéder
à la révélation du secret professionnel en connaissance de
cause, quel qu'ait pu être son mobile.4
Toutefois il est à noter qu'un dol spécial n'est
pas exigé.5
Au terme de l'analyse des infractions relatives à la
mission du commissaire aux comptes, il convient de s'intéresser,
à une autre catégorie d'infraction relative à son
statut.
1 E. Causin, Droit comptable des entreprises,
Larcier,2002, p 318
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 162
3 M. Coipel, Droit des sociétés
commerciales, Kluwer, 2006, p 873
4 4 A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 184
5 Crim, 7 mars 1989
La responsabilité du commissaire aux
comptes
87
Section II- Infractions relatives au statut du
commissaire aux comptes :
Encadré par des instances ordinales, et soumis à
une stricte déontologie, le commissaire aux comptes peut se trouver
pénalement responsable des délits liés à son statut
professionnel et qui consistent dans :
- L'atteinte à son indépendance
- L'exercice illégal de la profession de commissaire aux
comptes
§ /I délit relatif aux incompatibilités
et à l'obligation d'indépendance du commissaire aux comptes :
Les incompatibilités mises en place par le
législateur, ont pour but d'assurer l'indépendance du commissaire
aux comptes, ce qui justifie qu'on examine préalablement
l'indépendance du commissaire aux comptes (A), avant
d'étudier les catégories d'incompatibilités (B), et les
éléments constitutifs délit relatif au violation de
celles-ci 1(C).
A) L'indépendance du commissaire aux comptes
Conformément aux dispositions de l'article 159 de la
loi n° 17-95 2relative à la société
anonyme : « il doit être désigné dans chaque
société anonyme, un ou plusieurs commissaires aux comptes
chargés d'une mission de contrôle et de suivi des comptes sociaux
dans les conditions et pour les buts déterminés par la
présente loi. »
Dans le même ordre d'idées, en plus de la mission
de contrôle et de suivi des comptes sociaux, la protection des
intérêts des actionnaires, ainsi que la crédibilité
du fonctionnement de l'entreprise, imposent l'indépendance du
commissaire aux comptes.3
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 196
2 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
3 A. Naciri, Traité de gouvernance
corporative : théories et pratiques à travers le monde,
Presses Université Laval, 2006, p 264
La responsabilité du commissaire aux
comptes
88
Dans ce sens et afin de renforcer les garanties de rigueur
dans l'exécution de sa mission, le commissaire aux comptes est tenu de
respecter les normes de comportement professionnel prévues par la loi et
la déontologie.1
Le manuel des normes professionnelles de l'ordre des experts
comptables présente une conception de la notion d'indépendance
relative au commissaire aux comptes dans le cadre de la rubrique 111 en
indiquant : « l'indépendance s'apprécie à la fois
par rapport à un comportement, et à un état d'esprit ; la
mise en cause du commissaire aux comptes ne peut de ce fait, être
systématique... »
En outre, le commissaire aux comptes est tenu d'être et
de paraître indépendant ainsi que de veiller à ne pas se
trouver dans des situations d'incompatibilité aussi bien par rapport
à sa mission que par rapport à ses collaborateurs.2
En conséquence et pour garantir l'indépendance
du commissaire aux comptes, le législateur prévoit un certain
nombre de situations qui risquent de compromettre son objectivité, et
son intégrité appelées incompatibilités, et dont
leur violation risque d'engager sa responsabilité pénale. 3
Ainsi d'après la doctrine4
l'incompatibilité désigne une impossibilité d'exercer
certaines fonctions en raison de circonstances particulières, non en
raison d'un manque radical de compétence.
Ainsi après avoir traité de la notion
d'incompatibilités d'un point de vue doctrinal, il convient de
s'intéresser aux dispositions législatives régissant ce
concept, et mettre en exergue les différentes catégories
d'incompatibilités.
La consécration du principe d'indépendance du
commissaire aux comptes, a fait l'objet aussi bien de la loi 15-89
réglementant la profession d'expert comptable, que la loi 1795,
modifiée par la loi 20-05 régissant la société
anonyme.
Ainsi l'article 16 de la loi n° 15-89 réglementant
la profession d'expert comptable et instituant un ordre d'expert comptable
dispose :
1 M. Letaief, L'état et Les entreprises
publiques en Tunisie, L'Harmattan, 1998, p 372
2 M. Coipel, Droit des sociétés
commerciales, Kluwer, 2006, p 880
3 V. Tsapi, Les implications, économiques, et
comptables dans le système Ohada, L'harmattan, 2009, p 141
4 A. Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 444
La responsabilité du commissaire aux
comptes
89
« L'exercice de la profession d'expert comptable est
incompatible avec toute activité ou tout acte de nature à porter
atteinte à l'indépendance de l'expert comptable, en particulier
avec :
- tout emploi salarié, sauf les cas prévus
à l'article 6 ci-dessus. - tout acte de commerce ou
d'intermédiaire autre que ceux qui - sont directement
liés à l'exercice de la profession.
- tout mandat de dirigeant de société à
objet commercial. - tout mandat commercial »
En outre, s'agissant de la loi sur la société
anonyme, le législateur a prévu dans le cadre de celle-ci, une
série de règles d'incompatibilités relatives à la
profession du commissariat aux comptes, énoncées dans le cadre
des articles 161 et 162 de cette loi.
Ainsi l'article 161 de la loi 17-95 1relative
à la société anonyme dispose : « Ne peuvent
être désignés comme commissaires aux comptes :
1) Les fondateurs, apporteurs en nature,
bénéficiaires d'avantages particuliers ainsi que les
administrateurs membres du conseil de surveillance ou du directoire de la
société ou l'une de ses filiales , ·
2) Les conjoints, ascendants et descendant jusqu'au 2eme
degré inclusivement des personnes visées paragraphe
précédent , ·
3) Ceux qui assurent pour les personnes visées au
paragraphe 1 ci-dessus, pour la société ou pour ses filiales
des fonctions susceptibles de porter atteinte à leur indépendance
ou reçoivent de l'une d'elles une rémunération pour les
fonctions autre que celles prévues par la présente loi
, ·
4) Les sociétés d'experts comptables dont
l'un des associés se trouve dans l'une des situations prévues
aux paragraphes précédents, ainsi que l'expert comptable
associé dans une société d'experts-comptables lorsque
celle-ci se trouve dans l'une desdites situations.
Ne peuvent être commissaires aux comptes d'une
même société, deux ou plusieurs experts-comptables qui font
partie à quelque titre que ce soit de la même
société d'expert ou d'un même cabinet.
1 1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
90
Si l'une des causes d'incompatibilités
indiquées ci-dessus indiquées survient en cours de mandat,
l'intéressé doit cesser immédiatement d'exercer ses
fonctions et en informer le conseil d'administration ou le conseil de
surveillance, au plus tard quinze jours après la survenance de cette
incompatibilité. »
En plus l'article 162 de la même loi énonce :
« Les commissaires ne peuvent être
désignés comme administrateurs, directeurs généraux
ou membres du directoire des sociétés qu'ils contrôlent
qu'après un délai minimum de 5 ans à compter de la fin de
leur de fonctions.
Ils ne peuvent, dans ce même délai, exercer
lesdites fonctions dans une société détenant 10% ou plus
du capital de la société dont ils contrôlent les
comptes.
Les personnes ayant été administrateurs,
directeurs généraux, membres du directoire d'une
société anonyme ne peuvent être désignés
commissaires aux comptes de cette société dans les cinq
années au moins après la cessation de leur fonctions .Elles ne
peuvent dans ce même délai être désignées
commissaires aux comptes dans les sociétés détenant 10% ou
plus du capital de la société dans laquelle elles
exerçaient les dites fonctions. »
Il en résulte que le commissaire aux comptes doit
être indépendant des organes de gestion et de direction pour
pouvoir exercer un jugement objectif et impartial. 1
Après la définition des incompatibilités,
il convient de distinguer dans quelles situations, elles peuvent se
présenter.
B) Les catégories d'incompatibilités
:
Conformément aux dispositions des articles 161 et 162,
de la loi 17-95 relative à la société anonyme il convient
de distinguer entre trois types de situations d'incompatibilités :
- Situations inter sociétaires et juridiques
- Situations personnelles
- Situations d'activités incompatibles
1 OCDE, Lignes directrices de l'OCDE sur la
gouvernance des assureurs, OECD Publishing, 2012, 74
La responsabilité du commissaire aux
comptes
91
a) Situations inter-sociétaires et
juridiques
Ces situations d'incompatibilités qui sont internes
à la société ou bien qui sont d'ordre juridique ont
été énoncées dans le cadre de l'article 161
alinéa 1 de la loi n°17-95 relative à la
société anonyme et qui indiquent que le commissaire aux comptes
ne peut occuper les postes suivants :
« Les fondateurs, apporteurs en nature,
bénéficiaires d'avantages particuliers ainsi que les
administrateurs membres du conseil de surveillance ou du directoire de la
société ou l'une de ses filiales ; ... »
Cette situation d'incompatibilité prévue par le
législateur, peut être justifiée en amont du fait que le
commissaire aux comptes est un agent créateur de confiance, et compte
tenu des dispositions de l'article 166 de la loi n° 17-95 relative
à la société anonyme qui prévoient que, sa mission
permanente est limitée au contrôle et de suivi des comptes
sociaux, en dehors de toute immixtion dans la gestion de la
société, en conséquence il demeure évident que le
commissaire aux comptes ne peut être juge et partie1 ,
l'impossibilité d'exercer la fonction de commissaire aux comptes en
parallèle, avec celle d'administrateur, membre du conseil de
surveillance selon le mode de gestion adopté .
En outre l'article 162 précise : « Les
commissaires ne peuvent être désignés comme
administrateurs, directeurs généraux ou membres du directoire des
sociétés qu'ils contrôlent qu'après un délai
minimum de 5 ans à compter de la fin de leur de fonctions.
Ils ne peuvent, dans ce même délai, exercer
lesdites fonctions dans une société détenant 10% ou plus
du capital de la société dont ils contrôlent les
comptes.
Les personnes ayant été administrateurs,
directeurs généraux, membres du directoire d'une
société anonyme ne peuvent être désignés
commissaires aux comptes de cette société dans les cinq
années au moins après la cessation de leur fonctions .Elles ne
peuvent dans ce même délai être désignées
commissaires aux comptes dans les sociétés détenant 10% ou
plus du capital de la société dans laquelle elles
exerçaient les dites fonctions. »
b) Situation personnelles :
Dans le même ordre idées, et afin de garantir
l'indépendance du commissaire aux comptes 2aussi bien en
apparence que dans les faits, contre toute présomption ou
circonstance
1 B. Guillon, Valoriser l'intégration du
risque, Editions L'Harmattan, 2011, p 363
2 V. Tsapi, Les implications, économiques, et
comptables dans le système Ohada, L'harmattan, 2009, p 144
La responsabilité du commissaire aux
comptes
92
particulière quel soit personnelle ou familiale de
nature à altérer son impartialité1, le
législateur marocain a prévu des dispositions de nature à
rendre impossible la désignation d'une personne au poste de commissaire
aux comptes, lorsqu'il s'agit de conjoints, ascendants et descendants jusqu'au
2e degré inclusivement des fondateurs, des apporteurs en
nature, des bénéficiaires d'avantage particulier ainsi que des
administrateurs , des membres du conseil de surveillance ou du directoire de la
société ou de l'une de ses filiales conformément aux
dispositions de l'alinéa 2 de l'article 161 de la loi n° 20-05
relative à la société anonyme.
Toutefois il est à noter la modification
apportée par la loi 20-05 sur la loi 17-95 par rapport au
deuxième alinéa de l'article 161, en vertu de laquelle ont
été supprimés les termes parents et alliés, et
remplacées par ascendants et descendants.
c) Situations financières :
L'alinéa 3 de l'article 161 précise
également que ne peuvent être désignés comme
commissaires aux comptes ceux qui reçoivent des personnes visées
à l'alinéa 1 de l'article 161 , de la société ou de
ses filiales, une rémunération quelconque à raison des
fonctions susceptibles de porter atteinte à leur indépendance.
Ainsi, seules sont autorisées les relations
financières qui s'inscrivent dans le cadre professionnel.2
L'interdiction visée par cet article couvre en
particulier les prêts ou emprunts bancaires effectués avec
l'entreprise contrôlée, même s'ils sont consentis aux
conditions normales du marché.3
Par ailleurs le fait que le commissaire aux comptes en
conservant son titre reçoit des honoraires pour des fonctions qui
portent atteinte à son indépendance et son impartialité,
constitue une incompatibilité conformément aux dispositions de
l'alinéa 3 de l'article 161 de la loi n° 20-05 relative à la
société anonyme.
Garant de confiance, le commissaire aux comptes doit
s'abstenir de recevoir toute rémunération ou honoraire de nature
à corrompre son impartialité ou son objectivité, que ce
soit d'une manière directe ou indirecte, et peu importe son montant.
4
1 P. Moulin, L'alerte en période de crise,
PLInformatique, 2005,p 18
2 2 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995, p 178
3 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p36
4 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 203
La responsabilité du commissaire aux
comptes
93
Dans le but de prévenir toute situation incompatible,
liée à la question d'honoraire, le manuel de l'ordre des experts
comptable prévoit dans le cadre de la norme numéro 20, une
obligation mis à la charge du commissaire aux comptes, destinée
à ce qu'il établit une estimation de ses honoraires dus sur la
base des informations qu'il a collectées, ainsi cette norme
énonce : « sur la base des informations collectées, le
commissaire aux comptes sera en mesure d'établir le budget de ses
honoraires, en heures et en dirhams. »
Toutefois dans le même sens, de la protection de
l'indépendance du commissaire aux comptes, le manuel des normes de
l'ordre des experts comptables prévoit dans le cadre de sa
huitième rubrique : « la part du revenu procuré à
un cabinet par une ou plusieurs mission de commissariat aux comptes
auprès d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises ne doit pas
présenter une fraction telle que son indépendance pourrait en
être affectée.
La part du revenu est appréciée en prenant
en considération l'ensemble des honoraires du cabinet résultant
de toutes ses activités. »
Cependant, afin d'assurer l'efficacité de ses
prohibitions, le législateur incrimine les faits susceptibles de
constituer des violations des incompatibilités, et prévoit les
sanctions auxquelles s'expose le commissaire aux comptes en cas de manquement
à ses obligations, par le biais de l'article 404 de la loi n° 17-95
1relative à la société anonyme.
C) Les éléments constitutifs :
Ainsi pour mieux analyser, cette infraction, il serait plus
instructif de s'intéresser à l'étude de ses
éléments constitutifs à savoir : l'élément
légal, l'élément matériel, et enfin
l'élément moral.
a) L'élément légal :
L'article 404 de la loi n°17-95 modifiée relative
à la société anonyme dispose :
« Sera punie d'un emprisonnement de un à six
mois et d'une amende de 8.000 à 40.000 dirhams, toute personne qui soit
en son nom personnel, soit au titre d'associé dans une
société de commissaires aux comptes, aura, sciemment,
accepté, exercé ou conservé les fonctions de commissaire
aux comptes nonobstant les incompatibilités légales.
»
Il en résulte d'après ces dispositions, et
surtout par l'utilisation de la formule toute personne, que peuvent être
poursuivis à titre de complice les dirigeants de la
société, qui
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
94
auraient procéder à la nomination de commissaire
aux comptes malgré l'existence
d'incompatibilités. 1
b) L'élément matériel :
Il découle d'après les dispositions
prévues par l'article 404 de la loi n° 17-95 relative à la
société anonyme que l'élément matériel de
cette infraction suppose trois composants essentiels :
L'acceptation des fonctions, L'exercice des fonctions,
La conservation des fonctions
- L'acceptation des fonctions :
L'acceptation des fonctions suppose qu'elle soit
précédée par une désignation du commissaire aux
comptes à son poste, et que ce dernier a manifesté une
réponse positive dans ce sens.2
Toutefois, l'élément matériel de cette
infraction demeure constitué, lorsqu'il s'agit d'une simple acceptation
sans qu'elle soit accompagnée d'un exercice effectif des fonctions.
En revanche on ne peut parler d'acceptation lorsqu'il s'agit
d'une simple candidature pour occuper le poste.
- L'exercice des fonctions :
L'exercice des fonctions, constitue une
matérialisation, des faits susceptibles de constituer, une violation des
incompatibilités, et peut résulter de l'accomplissement d'un seul
acte.3
Dans, le même sens, un commissaire aux comptes, a
été tenu responsable pour violation des incompatibilités
légales, lorsqu'il a exercé de manière successive, la
fonction de gérant puis de commissaire aux comptes, ainsi la cour de
cassation a indiqué 4: « qu'à l'époque
des faits il exerçait le mandat de commissaire aux comptes au sein de la
SA Japad ; qu'à l'audience de la cour, il déclare exercer encore
cette fonction ; qu'il résulte des motifs ci-
1 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 177
2 B. Guillon, Méthodes et thématiques
pour la gestion des risques, L'Harmattan, 2008, p 363
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 219
4 Crim, 20 février 2008,
www.legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
95
dessus qu'il a dans le même temps exercé la
fonction de gérant de fait de la SARL 5 en Stores, en violation de
l'incompatibilité. »
- La conservation des fonctions
La conservation des fonctions est une situation
d'incompatibilité à posteriori, qui survient lorsque le
commissaire aux comptes est en cours d'exercice de ses fonctions.
Ainsi afin d'échapper et ne pas tomber sous l'empire
d'une poursuite pénale, le commissaire aux comptes, doit procéder
à un acte positif qui consiste en ce qu'il dépose sa
démission.1
Or si le commissaire aux comptes s'abstient de déposer
sa démission, nonobstant qu'il n'exerce pas effectivement ses fonctions,
le fait matériel consistant en la conservation des fonctions demeure
constitué.
Toutefois, il est à noter que le législateur
marocain n'a pas imposé au commissaire aux comptes, un délai
relatif au dépôt de la démission.
c) L'élément moral :
L'élément moral de cette infraction est
constitué d'un dol général comme cela est indiqué
par l'emploi du législateur du terme « sciemment », ce qui
signifie que pour engager la responsabilité pénale du commissaire
aux comptes sur la base des dispositions prévues par l'article 404, il
faut prouver que celui-ci ait agit volontairement et
intentionnellement2, en acceptant, ou en exerçant, ou en
conservant ses fonctions, en connaissance de cause, c'est-à-dire en
savant bien qu'il viole les dispositions régissant les
incompatibilités. 3
§ /II L'exercice illégal de la profession de
commissaire aux comptes :
Le commissariat aux comptes s'inscrit parmi les missions de
l'expert comptable, conformément aux dispositions de l'article 1 de la
loi n° 15-89 réglementation la profession d'expert comptable.
Ainsi afin de prémunir la crédibilité de
la profession d'expert comptable en général, et la mission du
commissariat aux comptes en particulier, le législateur marocain a
procédé à
1 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p67
2 Crim,24 mai 1983,
www.legifrance.gouv.fr
3 Crim, 18 octobre 1983,
www.legifrance.gouv.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
96
l'incrimination de toute atteinte à ce titre
professionnel, lorsqu'il s'agit de l'exercice illégal à titre
d'exemple de la profession par exemple.1
L'objectif visé est la protection de la
communauté de la profession, et de ses membres. 2
Toutefois la mise en oeuvre de la responsabilité
pénale du commissaire et sa poursuite par rapport à cette
infraction, nécessite le respect des règles légales
notamment en ce qui concerne les éléments constitutifs.
A) L'élément légal :
La loi 15-89 prohibe tout exercice de la profession de
commissaire aux comptes, à défaut d'une inscription au tableau de
l'ordre des experts comptables, conformément aux dispositions de
l'article 101 de cette loi qui indique : « Quiconque, sans être
inscrit au tableau de l'Ordre des experts comptables, effectue l'une des
missions prévues par l'alinéa 1er de l'article premier
de la présente loi, est puni d'une peine d'emprisonnement de 3 mois
à 5 ans et d'une amende de 1.000 DH à 40.000 DH ou de l'une de
ces deux peines seulement. »
Toutefois, s'inscrivent également dans la poursuite
pour cette infraction et encourent les mêmes peines, les experts
comptables qui :3
« qui ayant fait l'objet d'une mesure
définitive non susceptible d'aucun recours d'interdiction temporaire en
vertu d'une décision ordinale ou judiciaire ayant acquis
l'autorité de la chose jugée, accomplissent l'un quelconque des
actes de la profession pendant la durée de l'interdiction.
- qui ayant fait l'objet d'une mesure d'interdiction
définitive en vertu d'une décision ordinale ou judiciaire devenue
définitive, accomplissent l'un quelconque des actes de La
profession.
- qui salariés, accomplissent l'un des actes de la
profession même à titre occasionnel et sans que le but lucratif en
soit établi, au profit d'une personne autre que leur employeur.
»
1 A. Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 442
2 J.BARBIERI, COMMISSARIAT AUX COMPTES, GLN Joly,
1996, p85
3 Art 102, loi 15-89 réglementant la profession
d'expert comptable, et instituant un ordre des experts
comptables,promulguée par le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8
janvier 1993), ( Bulletin officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3
février 1993).
La responsabilité du commissaire aux
comptes
97
B) L'élément matériel :
L'élément matériel de cette infraction
consiste en l'exercice de la profession de commissaire aux comptes,
malgré un défaut d'inscription à liste des experts
comptables, ou bien en cas de violation d'une décision
d'interdiction.
Tout d'abord, l'exercice de la profession du commissariat aux
comptes s'inscrit parmi les missions, de l'expert comptable conformément
aux dispositions de l'article 1 al 3 de la loi 15-89 qui dispose : «
Est expert comptable celui qui fait profession habituelle de
réviser, d'apprécier et d'organiser les comptabilités des
entreprises et organismes auxquels il n'est pas lié par un contrat de
travail, il est seul habilité à :
... - exercer la mission de commissaire aux comptes...
»
D'où, il s'en suit que la qualité d'expert
comptable, est nécessaire, et obligatoire à l'exercice de la
profession de commissaire aux comptes, et c'est la raison pour laquelle
l'exercice de la profession de commissaire aux comptes, demeure illégal,
en cas de défaut d'inscription à l'ordre des experts comptables,
ou bien en violation d'une décision d'interdiction
d'exercice.1
Toutefois, le législateur marocain afin
d'éviter, toute ambiguïté ou suspicion, concernant
l'application des articles 101 et 102, incriminant l'exercice illégal de
la profession d'expert comptable, sur la mission du commissariat du comptes a
prévu dans le cadre du dernier alinéa de l'article 102 de la loi
15-89 que :
« Pour l'application des dispositions qui
précèdent, on entend par acte de la profession, l'un quelconque
des actes définis à l'alinéa 1er de l'article
premier de la présente loi.
L'inscription au tableau de l'ordre des experts comptables,
est une obligation essentielle et fondamentale, et déontologique,
à l'image de toutes les professions, qui exigent l'inscription à
l'ordre professionnel avant tout exercice des fonctions.
Dans ce contexte cette obligation d'inscription a
été prévue par le législateur marocain aussi bien
dans le cadre de la loi n° 17-95, relative à la
société anonyme, que par la loi 15-89 réglementant la
profession d'expert comptable.
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 221
La responsabilité du commissaire aux
comptes
98
C'est dans ce contexte que l'article 160 de la loi n°
17-95 dispose : « Nul ne peut exercer les fonctions de commissaire aux
comptes, s'il n'est inscrit à l'ordre des experts comptables
».
Les commissaires aux comptes sont tenus au respect des
obligations liées à leur profession, et notamment
déontologiques, et disciplinaires, or la violation de ces obligations,
les exposent à des sanctions disciplinaires1, qui peuvent
aller jusqu'à la suspension ou bien même voire la radiation du
tableau, face à cette situation et suivant le principe de l'application
stricte de la loi, le législateur a incriminé également
l'exercice de la profession de commissaire aux comptes, lorsqu'elle a lieu en
violation d'une mesure d'interdiction. 2
Toutefois, il convient de distinguer dans ce sens, entre
mesure d'interdiction et interdiction, en effet on entend par mesure
d'interdiction toute décision par laquelle un organe va frapper le
commissaire aux comptes d'une interdiction d'exercer ses fonctions,
3tandis que les interdictions, elles ressemblent aux
incompatibilités et sont prévues par les articles 161 et 162 de
la loi 17-95 4relative à la société anonyme.
Dans le même ordre d'idées il convient de
signaler, que toute peine disciplinaire de suspension ou de radiation du
tableau devenue définitive, entraine de plein droit l'interdiction
temporaire ou définitive d'exercer.
Il en résulte que tout exercice de la profession
après que la peine disciplinaire de suspension ou de radiation du
tableau soit définitive, est soumis aux mêmes sanctions de
l'exercice illégal de la profession.
C)L'élément moral :
L'élément moral de cette infraction suppose
seulement un dol général en dehors, de tout dol spécial,
en ce sens l'intention du commissaire aux comptes consiste en l'exercice, des
fonctions malgré le défaut d'inscription à l'ordre des
experts comptables, ou en violation d'une décision d'interdiction, et en
absence de toute intention de nuire.
1 A.Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 443
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 223
3 3 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995, p 175
4 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
99
La preuve de ce comportement ne devrait pas cependant soulever
de difficultés, un commissaire aux comptes ne peut pas en effet ignorer
les mesures d'interdiction ou de suspension qui lui sont nécessairement
notifiées. 1
Section -II L'application de la complicité au
commissaire aux comptes
La complicité peut être définie comme
étant la participation au crime ou au délit d'un autre, par des
faits extrinsèques au fait principal constituant ce crime ou ce
délit, et ne constituant pas nécessairement par eux-mêmes,
aucun délit ou aucun crime puni par la loi.2
Ainsi la notion de complicité repose sur l'existence
d'une infraction principale, imputable en entier à un ou plusieurs
auteurs, mais à laquelle ont cependant participé de façon
moindre un ou plusieurs autres individus qui doivent cependant être
punis.3
Les incriminations du commissaire aux comptes en tant que
complice sont aussi variées autant que celles qui le concernent en tant
qu'auteur principal. Elles se rejoignent toutes dans les éléments
à la base de l'infraction : l'élément légal,
l'élément matériel et l'élément moral ou
intentionnel. 4
§ /I L'élément légal :
En principe, la responsabilité pénale du
commissaire aux comptes à titre de complice, est retenue sur la base de
l'article 129 du code pénal qui dispose que :
« Sont considérés comme complices d'une
infraction qualifiée crime ou délit ceux qui, sans participation
directe à cette infraction, ont :
1° Par dons, promesses, menaces, abus
d'autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables,
provoqué à cette action ou donné des instructions pour la
commettre;
2° Procuré des armes, des instruments ou tout
autre moyen qui aura servi à l'action sachant qu'ils devaient y
servir;
1A. Robert, Responsabilité des commissaires aux
comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 224
2 E. Hoorebeke, Traité de la
complicité en matière pénale : études de
législation comparée, C. Annoot-Braeckman, 1846, p 24
3 J. Alexandre, Ecrit inédit (dissertation)
en français, de 1823, sur la complicité,
précédé d'une préface de 1845, Imprimerie de J.J.
Romen, 1846, p 3
4 M. Ouaniche, La fraude en entreprise
: Comment la prévenir, la détecter, la combattre,
Maxima, 2009,p 140
La responsabilité du commissaire aux
comptes
100
3° Avec connaissance, aidé ou assisté
l'auteur ou les auteurs de l'action, dans les
faits
qui l'ont préparée ou facilitée;
4° En connaissance de leur conduite criminelle,
habituellement fourni logement, lieu de retraite ou de réunions à
un ou plusieurs malfaiteurs exerçant des brigandages ou
des
violences contre la sûreté de l'État, la
paix publique, les personnes ou les propriétés. La
complicité n'est jamais punissable en matière de contravention.
» .
Mais vu que l'acte de complicité est subsidiaire au
fait principal, il convient donc de s'intéresser également aux
fondements régissant ces actes principaux.
En effet son nombreuses, les infractions principales, pour
lesquelles la complicité de ce professionnel, pourrait être
retenues, raison pour laquelle on va se limiter à l'étude de deux
principaux délits :
L'escroquerie et la banqueroute
L'escroquerie se définie aux termes de l'article 540 du
code pénal, comme l'ensemble des manoeuvres par lesquelles, une personne
« induit astucieusement en erreur une autre personne, par des affirmations
fallacieuses, ou la dissimulation de faits vrais, ou exploite astucieusement
l'erreur ou se trouvait la personne, et la détermine ainsi à des
actes préjudiciables, à ses intérêts
pécuniaires ou à ceux d'un tiers ».
En outre, le régime légal de la banqueroute est
prévu par les dispositions des articles 721 et suivants du code de
commerce.
Ainsi l'article 721 du code de commerce prévoit que
sont reconnues coupables de la banqueroute, les personnes ayant :
1) ...Employé des moyens ruineux pour se procurer des
fonds
2) Dissimulé ou détourné tout ou partie de
l'actif du débiteur
3) Avoir frauduleusement augmenté le passif du
débiteur
La responsabilité du commissaire aux
comptes
101
4) Avoir tenu une comptabilité fictive ou faire
disparaitre des documents
comptables, de l'entreprise ou de la société ou
s'être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque la loi en fait
l'obligation. »
Dans ce contexte sont également reconnues coupables
leurs complices même s'ils n'ont pas la qualité de dirigeant de la
société.
§ /II L'élément matériel :
L'élément matériel, propre à
l'incrimination des actes du complice, est défini par l'article 129 du
code pénal. Il doit être en principe constitué par un acte
positif, mais toutefois l'omission ou l'abstention reste un sujet de
débat. 1Les actes de complicité peuvent être
antérieurs à l'infraction, ils doivent alors consister en une
provocation circonstanciée directe et individuelle, en instructions en
une fourniture de moyens ou une aide et assistance.2
Ils peuvent être aussi concomitants à
l'infraction, mais dans ce cas s'agissant nécessairement d'une aide et
assistance. 3
Cependant, par rapport au commissaire aux comptes, il est
difficile de concevoir, qu'il peut être complice par don, promesse,
menace, ordre ou abus d'autorité, il en résulte que l'aide ou
l'assistance demeurent plus fréquents pour constituer
l'élément matériel, relatif à la complicité
et susceptible de lui être reprochée.4
En matière de complicité en
général, les termes « aider » et « encourager
» sont souvent utilisés ensemble. Mais toutefois la doctrine estime
qu'elles ont un sens différent. Ainsi on entend par aider à
commettre l'infraction « assister la personne qui agit ou lui donner un
coup de main », à l'inverse, encourager est défini comme
étant le fait d'« inciter et instiguer à commettre un crime,
ou en favoriser ou provoquer la perpétration ».
5Néanmoins dans la pratique, ces termes ne sont pas
mutuellement exclusifs car ils peuvent facilement être imbriqués
dans une même affaire. Dans certains cas, il est même avancé
que l'acte d'encouragement est implicitement inclus dans celui visant à
aider la commission du crime de sorte qu'une distinction technique entre ces
deux mots semblerait indésirable pour l'instant.
1 E. Hoorebek, Traité de la complicité
en matière pénale, C. Annoot-Braeckman, 1846,p 39
2 A. Chauveau, Théorie du code pénal,
Société typographique belge, A. Wahlen, 1837,p 116
3 H. Amboulou, Traité congolais de droit
pénal et de procédure pénal, L'Harmattan, 2012, p 59
4 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 196
5 G. Levasseur, Le droit pénal appliqué,
CUJAS,1969, p 205
La responsabilité du commissaire aux
comptes
102
Cependant afin compléter l'étude de la
complicité du commissaire aux comptes dans l'infraction pénale,
nous examinerons d'un point de vue matériel, les différents cas
d'incriminations susceptibles d'engager la responsabilité pénale
du commissaire aux comptes à titre de complice notamment en ce qui
concerne l'escroquerie et la banqueroute.
- L'escroquerie
Conformément aux dispositions de l'article 540 du code
pénal, l'escroquerie consiste dans l'ensemble des manoeuvres par
lesquelles une personne « induit astucieusement en erreur une autre par
des affirmations fallacieuses, ou par la dissimulation de faits vrais, ou
exploite astucieusement l'erreur ou se trouvait une personne et la
détermine ainsi à des actes préjudiciables à ses
intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers ».
S'agissant des commissaires aux comptes, ils peuvent
être retenus comme complice d'escroquerie dans les cas suivants :
? Etablissement de faux bilans : on entend
par bilan toute présentation
d'informations chiffrées de la société.
L'établissement de faux documents comptables s'inscrit
dans le cadre des manoeuvres frauduleuses déterminantes pour extorquer
le consentement de la victime.
? Confirmation d'informations
mensongères : il peut s'agir d'une publication de
documents falsifiés ou de leur transmission
conformément aux dispositions de l'article 405 de la loi 17-95 de la
société anonyme.
Le commissaire aux comptes, étant investi par la loi
à attester la sincérité et la régularité des
informations comptables de la société, et à
délivrer toute autre attestation d'opinion, renforce, par sa signature,
la confiance des utilisateurs dans les informations ou les documents qu'il a
produits ou certifiés.
Sur le plan jurisprudentiel, il convient de citer un
arrêt de la cour de cassation française qui a retenu la
responsabilité pénale du commissaire aux comptes, à titre
de complicité1, pour avoir aidé des dirigeants d'une
société à perpétrer de l'escroquerie, la
juridiction suprême a justifié sa décision en indiquant que
: « que, connaissant l'organisation publicitaire mise en oeuvre et
ayant pleine conscience des procèdes qui permettaient de dissimuler le
véritable montant des produits nets d'exploitation et la provenance
artificielle
1 Crim. 5 juin 1975,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
103
des fonds qui justifiaient apparemment une distribution
d'intérêts a un taux élève, il savait qu'il aidait
les dirigeants de la cofragim a perpétrer une escroquerie avec appel au
public... »
Dans le même ordre d'idées, la haute juridiction
française, dans un arrêt du 31 janvier 2007, a approuvé la
condamnation d'un un expert-comptable et un commissaire aux comptes coupables
de complicité d'escroqueries commises par un dirigeant de
société.1
- La banqueroute
S'agissant de la banqueroute, conformément aux
dispositions de l'article 721 du code de commerce, sont susceptibles
d'être retenues coupables de banqueroute les personnes ayant :
- ...Employé des moyens ruineux pour se procurer des
fonds
- Dissimulé ou détourné tout ou partie de
l'actif du débiteur
- Avoir frauduleusement augmenté le passif du
débiteur
- Avoir tenu une comptabilité fictive ou faire disparaitre
des documents
comptables, de l'entreprise ou de la société ou
s'être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque la loi en fait
l'obligation. »
Toutefois sont également reconnues coupables, leurs
complices même s'ils n'ont pas la qualité de dirigeant de la
société.
La complicité du commissaire aux comptes, dans le
détournement ou la dissimulation de tout ou partie de l'actif de
l'entreprise et l'augmentation frauduleuse de son passif, entraine son
incrimination pour une comptabilité fictive ou absente et la destruction
de documents.
En effet, la participation du commissaire aux comptes, en tant
que tel, ne se matérialise qu'à travers la comptabilité du
client.
Cependant, l'étude de cette infraction à titre
de complicité à l'égard du commissaire aux comptes ne
saurait être complète, sans une illustration jurisprudentielle.
Ainsi , la cour de cassation française dans un
arrêt du 2 mars 1983, a approuvé une cour d'appel d'avoir
condamné un commissaire aux comptes pour complicité d'infraction
assimilée à une banqueroute frauduleuse, et pour
complicité de présentation et de publication de bilan faux.
1 Crim , 31 janvier 2007,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
104
Il s'en suit que la cour a jugé : 1«
Doit être déclaré coupable de complicité
d'infraction assimilée à la banqueroute frauduleuse par
détournement d'actif commis par les deux présidents du conseil
d'administration, le commissaire aux comptes qui a participé activement
à l'élaboration d'un accord attribuant à l'ancien
président démissionnaire des avantage pécuniaires sans
contrepartie.
Doit être déclaré coupable de
complicité de présentation de bilan inexact le commissaire aux
comptes qui a reconnu par deux fois à l'audience qu'il avait
passé des écritures de compensation ayant entraîné
la fausseté dudit bilan et d'avoir sciemment confirmé des
informations mensongères en certifiant la régularité et la
sincérité du bilan de l'exercice dont il connaissait la
fausseté pour avoir participé à son élaboration.
»
Une infraction ne serait constituée sans réunir
la trilogie de ses éléments constitutifs :
l'élément légal et l'élément matériel
ont été étudiés, et reste l'élément
moral à traiter.
§ /III L'élément moral :
L'élément moral de la complicité est
celui que l'on rencontre dans toutes les infractions volontaires. Il s'agit de
la conscience, au moment de la réalisation des actes matériels de
complicité, du concours apporté à la réalisation
d'une infraction par l'auteur principal.2
Ainsi pour qu'il y ait complicité par l'aide et
l'encouragement, les actes ou les paroles, doivent avoir été
donnés avec une intention coupable. Au sein de la doctrine3,
il est généralement admis que l'intention d'encourager l'auteur
réel à la perpétration de l'infraction requiert que le
complice (commissaire aux comptes) pose le geste, s'abstienne de faire quelque
chose ou donne sa parole en vue de se faire entendre et
influencer.4
En d'autres termes, le commissaire aux comptes complice, doit
non seulement avoir l'intention d'assister et d'encourager la commission du
crime par l'auteur réel mais aussi être conscient que sa conduite
est en train d'aider ou d'encourager. 5En revanche, si le
commissaire aux comptes complice, doit être au moins conscient des
circonstances nécessaires à la commission de l'infraction, la
connaissance que sa conduite constitue un crime n'est pas nécessaire.
1 Crim, 2 mars 1983, ,
www.legifrance.gov.fr
2 B. Guéninet, L'indispensable du droit
pénal, Studyrama, 2004, p 54
3 E. Lemoine, L a repression de l'indifférence
sociale en droit pénal français, L'Harmattan, 2002, p 463
4 E. Hoorebek, Traité de la complicité
en matière pénale, C. Annoot-Braeckman, 1846,p 337
5 M. Ouaniche, La fraude en entreprise : Comment la
prévenir, la détecter, la combattre, Maxima, 2009, p 146
La responsabilité du commissaire aux
comptes
105
En conséquence il n'est pas requis que le commissaire
aux comptes, ait approuvé ou désiré les
conséquences de l'infraction commise par le dirigeant.
Il n'a pas non plus besoin d'avoir des détails
relativement à la nature du crime projeté, ni de connaitre le
moment ou le lieu de sa survenance.
Au terme de l'analyse de la responsabilité
pénale du commissaire aux comptes, l'étude d'un troisième
et dernier aspect s'impose, à savoir : la responsabilité
disciplinaire.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
106
Chapitre II -La responsabilité disciplinaire du
commissaire aux comptes
La troisième voie par laquelle, la
responsabilité du commissaire aux comptes peut être
recherchée pour des actes ou omissions commis dans l'exercice de leurs
fonctions est précisément la voie disciplinaire.
La responsabilité disciplinaire concerne les
manquements d'un professionnel aux règles d'honneur, de dignité
et de déontologie de sa profession, elle a été
instituée dans le but de la protection de la profession, et ceux qui
font appel à la collaboration de ces professionnels.1
Dans ce sens l'article 24 de la loi n° 15-89
2énonce que : « l'ordre des experts comptables, a
pour objet d'assurer la sauvegarde des principes et traditions de
moralité, de dignité et de probité qui font l'honneur de
la profession d'expert comptable, et de veiller au respect par ses membres des
lois, règlements et usages qui régissent l'exercice de la
profession... »
La soumission aux règles de discipline résulte
de lapplication d'une règle d'équilibre : tout droit a
pour corollaire une obligation.
Si un professionnel accepte de se soumettre à des
obligations disciplinaires, c'est par ce qu'il a des droits, et qu'il est tenu
à les défendre.
La responsabilité disciplinaire du commissaire aux
comptes, représente la réponse du système
déontologique d'expertise comptable, aux actes et omissions illicites
commises par le commissaire aux comptes, dans l'exercice de ses
missions.3
Membre d'une profession libérale, le commissaire aux
comptes, est tenu d'honorer la confiance placée en lui.4
1A. Sayag, Le commissariat aux comptes : Renforcement
ou dérive ?, Litec,1989 p 485
2 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
3 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 325
4 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995, p 198
La responsabilité du commissaire aux
comptes
107
Ceci passe par le respect de certaines règles de
conduite fixées par la loi réglementant profession d'expert
comptable, la loi sur la société anonyme, le code des devoirs
professionnels, et les normes professionnelles publiées, ce sont ces
textes qui définissent et garantissent l'ordre interne de ce groupe
social.1
Ces règles de conduite concernent notamment, l'exercice
de la profession, ainsi que les principes de dignité de probité
et de délicatesse.2
Dans ce sens, l'article 101 de la loi n°
15-893, protège le titre de l'expert comptable en
général, et du commissaire aux comptes en particulier, en
punissant celui qui sans être inscrit au tableau de l'ordre des experts
comptables, s'attribue publiquement et sans titre la qualification du
commissaire aux comptes et effectue ses missions, d'une peine d'emprisonnement
de 3 mois à 5 ans, et d'une amende de 1000 à 40000 DH ou de l'une
de ces deux peines seulement. Ainsi que des peines disciplinaires sont
prévues pour sanctionner les manquements des commissaires aux comptes
à leurs obligations professionnelles, ou aux principes de
dignité, de probité et de délicatesse, qui font la base de
la profession.
Avant de procéder à la définition et la
détermination des composants et contours de la responsabilité
disciplinaire du commissaire aux comptes, il convient de signaler une
distinction forte importante entre l'organisation professionnelle marocaine et
française.
En effet au Maroc, les commissaires aux comptes aussi bien que
les experts comptables sont soumis à un régime professionnel
disciplinaire commun, en ce sens que le commissariat aux comptes s'inscrit
parmi les missions de l'expert comptable, conformément aux dispositions
de l'article 1 de la loi n° 15-89 réglementant la profession
comptable, et organisant un ordre des experts comptables qui dispose :
« Est expert comptable celui qui fait profession
habituelle de réviser, d'apprécier et d'organiser les
comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas
lié par un contrat de travail, il est seul habilité à
:
... - exercer la mission de commissaire aux comptes.
»
Raison pour laquelle, les commissaires aux comptes sont soumis
à l'ordre des experts comptables.
1 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 198
2 Z.Gallez, Le rôle du reviseur à
l'égard du conseil d'entreprise, Maklu, 2010, p 88
3loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
La responsabilité du commissaire aux
comptes
108
Tandis qu'en France, les régimes régissant les
commissaires aux comptes et expert comptables sont dissociés, dans ce
contexte deux ordres sont institués l'un régissant la profession
de commissaire aux comptes et l'autre la profession d'expert comptable.
Cependant, dans le cadre de cette analyse de la
responsabilité disciplinaire du commissaire aux comptes, nous nous
intéresserons en premier lieu à l'examen des
particularités de cette responsabilité, pour ensuite traiter de
sa mise en oeuvre.
Section I : Les particularités de la
responsabilité disciplinaire du commissaire aux comptes
La discipline envisagée du point de vue du commissaire
aux comptes, désigne l'ensemble des règles adoptées pour
réprimer, par des moyens et des formes de police intérieure,
particulière, toute violation des devoirs professionnels, tout oubli des
lois de l'honneur, de la délicatesse et de la diligence
nécessaires à l'exercice de cette profession.1
La dignité, le pouvoir, les droits et les
privilèges des commissaires aux comptes, ne leurs sont donnés
qu'a cause du service qu'ils doivent rendre, ainsi le devoir
général de tous les commissaires aux comptes est de rendre ce
service en s'acquittant bien de leurs fonctions, or la violation de ces
devoirs, est susceptible d'engager leur responsabilité sous un aspect
disciplinaire.2
En effet, la responsabilité disciplinaire est
définie comme une sanction des devoirs moraux, il en résulte que
la première particularité de ce type de responsabilité est
qu'elle met en exergue la morale.
Tout agissement contraire à l'honneur, à la
probité et à la dignité, même s'il ne serait pas
réprimé par des juridictions civiles ou pénales, pourra
être sanctionné par la réglementation de la profession dans
le cadre de la défense de l'honneur et l'image de
celle-ci.3
1 H. Eloy, De la responsabilité des
notaires : d'après les lois, la doctrine, la jurisprudence et
les circulaires ministérielles, Volume 2, Durand, 1863, p 390
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 328
3 H. Ramadan, le fonctionnement de la justice dans les
pays en voie de développement : cas de la Mauritanie, l'harmattan, 2011,
p 457
La responsabilité du commissaire aux
comptes
109
Cependant, pour mieux apprécier les
particularités de la responsabilité disciplinaire, il serait plus
judicieux, de procéder à une comparaison avec les autres aspects
de responsabilité notamment civile et pénale.
Il s'ensuit qu'on s'intéressera au début,
à une comparaison entre la responsabilité disciplinaire et
civile, pour ensuite distinguer entre l'aspect disciplinaire et
pénal.
§ /I La responsabilité disciplinaire et la
responsabilité civile
La responsabilité disciplinaire est totalement
différente de la responsabilité civile, aussi bien au niveau des
sujets, qu'au niveau de la nature.1
Pour le commissaire aux comptes, la responsabilité
disciplinaire relève de son appartenance à l'ordre. Il n'y a pas
de rapport avec sa responsabilité civile délictuelle ou
contractuelle.
En effet, les obligations du commissaire aux comptes, à
l'égard de l'ordre dont il dépend, ne naissent pas d'un contrat,
mais découlent plutôt de son appartenance à une profession
réglementée.2
Ainsi, la responsabilité civile a pour objet la
réparation du préjudice subi par la société ou les
tiers suite au comportement fautif du commissaire aux comptes.
Cette réparation à un caractère
indemnitaire.
En revanche la responsabilité disciplinaire a un pour
objectif, la prévention et la protection de la profession du commissaire
contre tout agissement de l'un de ses membres de nature à porter au
corps professionnel.3
La responsabilité disciplinaire a un caractère
répressif.
La responsabilité disciplinaire, ne donne pas lieu,
à des dommages-intérêts mais à des sanctions
disciplinaires, qui n'affectent ni la liberté ni le patrimoine du
professionnel, et restent limitées dans leurs effets, au seul exercice
de la profession. 4
Conséquemment, il y a une différence
fondamentale entre ces deux types de responsabilité : elles sont
strictement indépendantes l'une de l'autre.
1 P. Bouisseret, Loi de ventose rénovée,
Larcier, 2003,p 74
2 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p67
3 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive ?, Litec, 1989, p 483 4J. Poulpiquet,
Responsabilité des notaires, Dalloz, 2009, p 136
La responsabilité du commissaire aux
comptes
110
Un autre aspect de distinction se manifeste également
dans les conditions de mise en oeuvre des actions en responsabilité.
Ainsi, si en matière de responsabilité civile,
la mise en oeuvre de l'action nécessite une trilogie de conditions
:faute, dommage, lien de causalité ; dans le cadre de la
responsabilité disciplinaire une faute du commissaire aux comptes
suffit.1
Enfin il convient de souligner que l'action civile, est
strictement dissociée de l'action disciplinaire.
Ainsi il n'y a pas d'autorité de la chose jugée
au disciplinaire sur le civil et au civil sur le disciplinaire.
Un commissaire aux comptes mis hors de cause par une
juridiction disciplinaire pourra être condamné pour les même
faits, par un tribunal civil et réciproquement.
Par ailleurs, si la responsabilité disciplinaire est
nettement opposée à la responsabilité civile, elle partage
néanmoins certains caractères avec la responsabilité
pénale.2
§ /II La responsabilité disciplinaire et la
responsabilité pénale
Il existe bien des points communs entre la
responsabilité disciplinaire, et la responsabilité pénale,
ainsi un même fait peut constituer aussi bien une faute disciplinaire et
une infraction : le commissaire aux comptes qui se rend coupable d'une
violation du secret professionnel, commet à la fois un délit, et
un manquement professionnel, son acte justifie et une sanction pénale,
et une sanction disciplinaire, en plus la juridiction pénale et
l'autorité disciplinaire font parfois usage de sanctions identiques ou
analogues, tel que l'amende à titre d'exemple.3
Il convient de signaler dans ce sens un arrêt fort
important de la cour de cassation française, chambre civile dans lequel
elle a édictée un principe jurisprudentiel qui consiste en ce que
: l'affaire jugée au pénal s'impose, dans une certaine mesure aux
juridictions disciplinaires : 4
« L'autorité de la chose jugée au
pénal sur l'action disciplinaire ne s'étend qu'à ce qui a
été nécessairement jugé quant à l'existence
du fait incriminé, à sa qualification et à la
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive ?, Litec, 1989, p 485
2 C. Manaouil, la responsabilité du
médecin du travail, mémoire pour l'obtention du DEA du droit
social, 1999, p 58
3 P. Bouisseret, Loi de ventose rénovée,
Larcier, 2003,p 75
4 Civ, 18 mai 1989,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
111
culpabilité ou à l'innocence de celui
à qui ce fait est imputé. Il s'ensuit que le juge saisi de
l'action disciplinaire apprécie librement la gravité des faits
qui lui sont déférés au regard des règles
déontologiques en cause, sans être tenu de se conformer aux
appréciations portées par le juge pénal quant à la
possibilité de faire bénéficier le prévenu des
circonstances atténuantes » .
Il en résulte donc, qu'une dissociation entre le
régime disciplinaire, et la responsabilité pénale est
difficile, puisque les deux régimes de responsabilité poursuivent
des buts identiques à savoir : la punition et la
répression.1
Mais cependant, s'il y a identité d'objet entre les
deux régimes, il n'y a pas identité de
sujet.
Le droit pénal, réprime « les agissements
» de nature à créer un trouble dans la
société, alors que le droit disciplinaire réprime les
agissements de nature à créer des troubles, dans le corps
professionnel du commissariat du commissariat aux comptes. 2
Cette distinction bien qu'utile est incomplète, parce
que le commissaire aux comptes, comme tout citoyen est soumis au droit
pénal, et en outre par ce que le droit pénal a
édicté certaines infractions propres à la
déontologie du commissaire aux comptes.
C'est donc sous un autre aspect qu'il faut rechercher la
véritable distinction entre les deux régimes de
responsabilité. Elle a trait à leur nature. Dans le commissariat
aux comptes, comme ailleurs, la responsabilité pénale concerne
des infractions au droit pénal général et spécial,
tandis que la responsabilité disciplinaire du commissaire aux comptes
est mise en cause du moment qu'il a commis une faute relative à
l'exercice de ses fonctions.3
En d'autres termes la faute pénale est une «
infraction » au sens du droit pénal, la faute disciplinaire est une
faute liée à la mission du commissaire aux comptes,
c'est-à-dire un manquement aux obligations professionnelles
résultant de la nature unique du statut juridique du commissaire aux
comptes. 4
1 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p75
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 345
3 Guyon, Le commissariat aux comptes, Librairies
techniques, 1971,p 301
4 P. Ancel, Vers un droit commun disciplinaire,
Université de Saint-Etienne, 2007, p 219
La responsabilité du commissaire aux
comptes
112
Toutefois, il convient de signaler que l'action disciplinaire
est indépendante de l'action publique et de l'action civile. Il s'en
suit qu'une décision rendue sur le plan pénal au civil n'a aucune
incidence sur le sort de l'action disciplinaire.1
Cette dissociation entre ces actions est justifiée par
le fait qu'elles poursuivent des buts différents, ce qui ouvre la
possibilité d'un cumul de sanctions à l'égard du
commissaire aux comptes qui a violé les obligations prescrites par la
loi.2
Ainsi, comparée à la responsabilité
civile, qui sanctionne toute faute dés lors qu'elle provoque un
préjudice, et à la responsabilité pénale, qui
condamne des hommes pour des actes ou omissions prohibés par la loi, la
responsabilité disciplinaire n'en diffère pas substantiellement.
Pourtant, elle ne se cumule ni elle se substitue à elle, mais les
complète en
empruntant la justification de l'une et de l'autre d'où
son caractère original. 3
Il ne suffit pas donc, de déterminer les
spécificités du régime de la responsabilité
disciplinaire du commissaire aux comptes, mais encore faut-il déterminer
et mettre en exergue, les faits générateurs susceptibles
d'engager la responsabilité disciplinaire du commissaire aux comptes, en
plus des effets de cette responsabilité.
Section II- Les conditions de la responsabilité
disciplinaire :
La responsabilité disciplinaire est une
responsabilité personnelle, il ne peut y' avoir de responsabilité
pour autrui comme c'est le cas en responsabilité civile.
Le commissaire aux comptes est engagé personnellement
sur le plan disciplinaire à raison de ses manquements aux obligations
professionnelles.
En effet si en matière de responsabilité civile,
une trilogie de conditions : faute, dommage et lien de causalité est
exigée pour sa mise en oeuvre, en matière de
responsabilité disciplinaire, le seul comportement fautif est exigible.
4
Les conditions d'existence de la responsabilité
disciplinaire du commissaire aux comptes, peuvent être découvertes
à travers l'étude du fondement juridique de cette
1 A. Dardeaud, la procédure
disciplinaire dans la fonction publique : fautes, sanctions, recours,
Papyrus, 2005, p 7
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 347
3 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 484
4 J. Scotti, La responsabilité juridique du
cadre de santé, Université de Saint-Etienne, 2007, p 216
La responsabilité du commissaire aux
comptes
113
responsabilité particulière, cela conduira
à donner quelques précisions sur la notion de faute
disciplinaire, ainsi que sur l'auteur de ces infractions. 1
§ /I La faute disciplinaire :
A) La définition de la faute disciplinaire
La faute désigne la violation, imputable à son
auteur d'une norme de comportement juridiquement obligatoire.2
C'est le manquement à une obligation
déterminée.
La faute disciplinaire est la violation injustifiée
d'une obligation professionnelle. 3D'autres auteurs4
considèrent que la faute disciplinaire consiste en un manquement aux
règles de la discipline intérieure.
Ainsi la faute disciplinaire porterait atteinte, au climat de
travail, à sa réglementation, à son encadrement
nécessaire qui conditionne et constitue le garant d'un travail
sérieux et efficace dans un état d'esprit serein et
professionnel. 5
En effet la faute demeure une condition substantielle pour la
mise en oeuvre de toute responsabilité qu'elle soit civile,
pénale ou disciplinaire.
Dans ce sens, la faute disciplinaire est la conséquence
du manquement du commissaire aux comptes à ses obligations.
Il découle donc que la détermination de la faute
du commissaire aux comptes est le résultat de la détermination de
ses obligations.
Etre imputable, c'est devoir rendre compte de ses
actes6
Le commissaire aux comptes appartient à un ordre
professionnel, et toute faute ou négligence s'attachant à son
exercice professionnel, peut être constitutive d'une faute disciplinaire.
7
La faute disciplinaire exclut deux sortes de faits : les
manquements ou fautes du commissaire aux comptes qui n'ont aucune relation avec
l'exercice de ses fonctions et les
1 1 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995,p 198
2 B.Dupuisson, et P. Henry, Droit de la
responsabilité : Morceaux choisis, L'harmattan, 2004, p 55
3 J. Touati, Le motif de licenciement à la
loupe, Wolters Kluwer France, 2004,p 179
4 J. Savatier, Droit du travail, PUF, 1993, p 189
5 J. Scotti, La responsabilité juridique du
cadre de santé, Université de Saint-Etienne, 2007, p 217
6 F . Chateauraynaud, La faute professionnelle : une
sociologie des conflits de responsabilité, Métailié,
1991,p 88
7 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 346
La responsabilité du commissaire aux
comptes
114
circonstances qui n'impliquent aucune faute de sa part mais
qui touchent la qualité et l'efficacité de son service, telles
que l'incompétence ou l'incapacité d'exercer ses
fonctions.1
Dans ce contexte, il est à noter qu'une faute
disciplinaire peut être à l'origine d'une mesure disciplinaire,
mais la mesure disciplinaire demeure toujours une conséquence d'une
faute. 2
En effet la loi n° 15-89 réglementant la
profession d'expert comptable, évoque d'une manière
générale les manquements qui peuvent être reprochés
au commissaire et susceptible de constituer un comportement fautif.
Dans ce sens l'article 66 de la loi n° 15-89
3règlementant la profession d'expert comptable indique que
:
« Les conseils régionaux et le conseil
national, par voie d'appel, exercent à l'égard des experts
comptables et de leurs sociétés le pouvoir disciplinaire ordinal
pour toute faute professionnelle ou toute contravention aux dispositions
législatives et réglementaires auxquelles l'expert comptable est
soumis dans l'exercice de sa profession, notamment :
- violation des règles professionnelles, manquement
aux règles de l'honneur, de la probité et de la dignité
dans l'exercice de la profession, telles qu'elles sont notamment
édictées dans le code des devoirs professionnels.
- non respect des lois et règlements applicables
à l'expert comptable dans l'exercice de sa profession.
- atteinte aux règles ou règlements
édictés par l'Ordre, à la considération ou au
respect dus aux institutions ordinales. »
Toutefois il est à noter que le manuel des normes de
l'ordre des experts comptables considère dans le cadre de sa rubrique
n° 11 alinéa 3 que la négligence du commissaire aux comptes
ou son manquement à ses devoirs ou à l'éthique,
constituent des faits générateurs de sa responsabilité
disciplinaire.
Il découle d'après les textes cités
ci-dessus que le commissaire aux comptes demeure tenu à une
diversité d'obligations relatifs aux caractères d'honneur et de
probité,
1 M. Florin, Les obligations et la
responsabilité juridique de l'infirmière, Heures de France, 1999,
p 218 2P. Ancel, Vers un droit commun disciplinaire,
Université de Saint-Etienne, 2007, p 123
3 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
La responsabilité du commissaire aux
comptes
115
professionnels, et déontologiques et dont la violation
constituerait un comportement fautif susceptible d'engager sa
responsabilité disciplinaire ; or cette diversité d'obligations
imposées au commissaire aux comptes trouve sa justification dans la
difficulté que présente sa fonction.1
Par ailleurs, il est à noter que ne s'inscrit pas dans
le cadre de la faute disciplinaire, tout comportement ou négligence du
commissaire aux comptes, étrangers à sa fonction et ses
missions.2
Cependant, compte tenu de la diversité des obligations
auxquelles le commissaire aux comptes serait tenu, il s'ensuit
qu'évidemment, ces fautes doivent correspondre à ces obligations,
raison pour laquelle, il convient d'établir une distinction entre ces
fautes, par rapport aux obligations auxquelles le commissaire aux comptes
demeure tenu.
B) Typologie des fautes :
La définition de la faute disciplinaire telle qu'elle
est énoncée par le texte précité de l'article 66 de
la loi n° 15-893, exige une démarche de qualification,
pour assigner à tel ou tel fait son caractère. Une recherche
factuelle s'impose pour découvrir ce que recouvre réellement les
fautes liées à la violation des règles professionnelles,
ou celles liées au manquement des règles de la probité, de
l'honneur, et de la dignité.
Il s'agit donc dans le cadre de ce paragraphe de distinguer entre
:
- les fautes relatives à la violation des règles
professionnelles
- les fautes relatives au manquement des règles de la
probité, de l'honneur, et de
la dignité
a) Les fautes relatives à la violation des règles
professionnelles
D'une manière générale, la doctrine
4définit la faute disciplinaire comme le manquement aux
obligations professionnelles, cette définition a été
confirmée par la loi 15-89 qui a considéré dans le cadre
de son article 66 comme comportement fautif, « la violation des
règles professionnelles.
1 J. Wathelet, Budget, Comptabilité et
contrôle externe : des collectivités territoriales, L'Harmattan,
2000, p 378 2.Tonye, Epargnants d'afrique, Inquietez vous , L'harmattan, 2009,
p 80
3 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993
4 G. Dion, Dictionnaire canadien des relations de
travail, Presses Université Laval,1986, p 210
La responsabilité du commissaire aux
comptes
116
Dans ce contexte le commissaire aux comptes est tenu à
une diversité d'obligations ou règles prévues aussi bien
par la loi n°17-95 1relative à la société
anonyme, le code des devoirs professionnelles que par le manuel des normes de
l'ordre des experts comptables, et qui sont liées à sa profession
et sa mission, et dont leur violation est réputée comme fautive
et susceptible d'engager sa responsabilité disciplinaire.
Dans ce contexte et conformément aux dispositions de
l'alinéa 2 de l'article 13 de la loi n° 15-892 :
« Il (commissaire aux comptes) doivent observer les dispositions
législatives et réglementaires régissant leur profession
ainsi que les règlements intérieurs de l'Ordre des experts
comptables. »
D'abord le commissaire aux comptes est tenu de respecter une
obligation essentielle et nécessaire à l'exercice de la
profession à savoir l'inscription à l'ordre des experts
comptables.
Cette obligation a été consacrée aussi
bien par la loi n° 17-95 3régissant la
société anonyme, que par la loi n° 15-89 réglementant
la profession d'expert comptable, et instituant l'ordre des experts
comptables.
Ainsi l'article 160 de la loi n° 17-95 relative à
la société anonyme dispose « nul ne peut exercer les
fonctions de commissaire aux comptes s'il n'est inscrit au tableau de l'ordre
des experts comptables ».
En revanche les dispositions de l'article 101 de loi n°
15-89 règlement la profession d'expert comptable revêtent un
caractère répressif et précisent dans ce sens :
« Quiconque, sans être inscrit au tableau de
l'Ordre des experts comptables, effectue l'une des missions prévues par
l'alinéa 1er de l'article premier de la présente loi,
est puni d'une peine d'emprisonnement de 3 mois à 5 ans et d'une amende
de 1.000 DH à 40.000 DH ou de l'une de ces deux peines seulement.
»
L'inscription auprès de l'ordre des experts comptables
constitue donc une obligation mise à la charge de 'expert comptable
exerçant la profession de commissaire aux comptes,
1 Loi 17-95 relative à la société
anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30
aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et
complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir
n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19
juin 2008)
2loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
3 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
117
dont la violation constituerait un comportement fautif qui
consiste en une violation des règles professionnelles susceptible
d'engager la responsabilité disciplinaire du commissaire aux comptes
conformément aux dispositions de l'article 66 de la loi n° 15-89
régissant la profession d'expert comptable.
Parmi les règles et obligations auxquels le commissaire
aux comptes demeure également tenu de respecter, figure celle de
l'indépendance.1
Le commissaire aux comptes jouit d'une autonomie
professionnelle, relative à sa compétence et indispensable pour
exercer ses missions.2
Cette autonomie dont dispose le commissaire aux comptes ne
doit pas être cédée en contrepartie d'un travail, ou d'un
service ou d'une rémunération, de nature à causer une
altération de son aptitude à remplir pleinement sa fonction. 3
Le commissaire aux comptes est tenu de s'abstenir et dispenser
de tout acte ou situation de nature à corrompre son indépendance,
en ce sens le commissaire aux comptes ne doit pas s'immiscer dans la gestion de
la société, en plus ses fonctions doivent être en dehors de
toute situation d'incompatibilité.4
Toutefois l'immixtion dans la gestion de l'entité
contrôlée doit, pour être condamnée être
caractérisée.5
Ainsi l'incrimination des situations d'incompatibilités
prévues par l'article 161 de la loi n° 17-95 6relative
à la société anonyme, confirment la souveraineté de
l'indépendance professionnelle du commissaire aux comptes.
En fait, les autorités disciplinaires
françaises, considèrent dans ce sens, que l'exercice des
fonctions du commissaire aux comptes en violation des règles
d'incompatibilité constitue une faute disciplinaire.
Dans le même ordre d'idées le conseil
d'état français dans sa décision n° 311641 du 12
Octobre 2010, a confirmé le principe en indiquant que 1 «
celui-ci (commissaire aux
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 486
2 M. Letaief, L'état et les entreprises
publiques en Tunisie, L'Harmattan, 1998, p 228
3A. Naciri, Traité de gouvernance
corporative : théories et pratiques à travers le monde,
Presses Université Laval, 2006, p 266
4 F.Essig, En Marche pour le XXI siécle,
l'harmattan , 2006, p 400
5 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 484
6 Loi 17-95 relative à la
société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124
du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été
modifiée et complétée par la loi n° 20-05
promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai
2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
118
comptes), avait certifié les comptes de la
société Rexel sans avoir pris les dispositions utiles pour
appréhender cette situation d'incompatibilité ni tirer les
conséquences de celle-ci, le Haut Conseil du commissariat aux comptes
n'a pas entaché son appréciation d'une qualification juridique
erronée en retenant que le requérant avait commis une faute
disciplinaire... »
Le commissaire aux comptes est tenu également à
une obligation professionnelle prévue dans tous les domaines, et qui a
été consacrée par plusieurs textes, il s'agit notamment de
l'obligation au secret professionnel.2
Le respect du secret professionnel est une obligation majeure
du commissaire aux
comptes.
Le commissaire aux comptes demeure un garant de confiance, qui
doit être discret et tenir silence, à l'égard de toute
information ou fait dont il a pris connaissance à l'occasion de
l'exercice de ses fonctions.
La confiance joue en effet un rôle essentiel, tant
à l'égard de chacun qu'a l'égard de la profession tout
entière. 3
La responsabilité disciplinaire du commissaire aux
comptes peut être également retenue, lorsqu'il a omis d'informer
le chef d'entreprise des faits de nature à compromettre la
continuité de l'exploitation de l'entreprise.4
Dans le même ordre d'idées, peut constituer une
faute disciplinaire imputée au commissaire aux comptes, la non
révélation des faits délictueux dont il a eu connaissance
à l'occasion de l'exercice de ses fonctions aux organes d'administration
de direction de gestion.5
Cependant, vu que la morale, constitue une
caractéristique essentielle de la responsabilité disciplinaire du
commissaire aux comptes, il demeure évident de traiter les comportements
susceptibles de constituer une violation de celle-ci.
1CE, 12 octobre 2010,
www.legifrance.gov.fr
2 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 200
3 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 484
4 Z.Gallez, Le rôle du reviseur à
l'égard du conseil d'entreprise, Maklu, 2010, p 90
5 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 330
La responsabilité du commissaire aux
comptes
119
b) Les fautes relatives au manquement des règles de la
probité, de l'honneur, et de
la dignité
Avant de procéder à la définition des
comportements susceptibles de constituer des manquements, aux règles de
probité d'honneur et d'intégrité, ou non, il serait plus
instructif, de mettre en exergue la signification de ces concepts.
Dans ce contexte le nouveau dictionnaire universel des
synonymes de la langue française définit ces concepts1
:
La probité est une qualité qui consiste au
respect des droits d'autrui, et à rendre à chacun ce que lui
appartient.
L'intégrité consiste à ce qu'une personne
remplisse ce qu'elle doit sans que sa fidélité ne soit jamais
altérée.
L'honnêteté est une qualité qui
désigne, la pratique par une personne du bien prescrit par la morale.
L'article 66 de la loi n° 15-89
2règlementant la profession d'expert comptable, en visant les
faits contraires à l'honneur, et à la probité accomplis,
par le commissaire aux comptes élargit encore le champ d'intervention
des autorités disciplinaires. 3
Ainsi le respect de ces devoirs, demeure une obligation
essentielle à la charge du commissaire aux comptes, car sa violation ne
porte pas atteinte à la personne du commissaire aux comptes seulement,
mais elle est susceptible également de nuire à la
réputation de la profession : c'est une faute de conduite non
tolérable parce que contrevenant à une
éthique.4
En effet, les faits contraires à l'honneur ou à
la probité constituent souvent des infractions pénales. Celles-ci
sont très variées et peuvent consister dans : 5
- Le faux en écriture
- L'abus de confiance
- La fraude fiscale
- Confirmation d'informations mensongères
1 M. Guizot, Dictionnaire universel des synonymes de
la langue française, Didier, 1850, p 587
2 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
3 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 200
4 4P. Ancel, Vers un droit commun disciplinaire,
Université de Saint-Etienne, 2007, p 192
5 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 507
La responsabilité du commissaire aux
comptes
120
Cependant pour mieux apprécier, l'impact de ce type de
faute en pratique, il convient de se référer à la
jurisprudence.
Concernant la jurisprudence disciplinaire marocaine, si la
pénurie est une caractéristique essentielle, aussi bien en
matière pénale que civile, il est évident que la
jurisprudence en matière disciplinaire ne va pas faire l'exception.
La jurisprudence française n'a pas manqué
d'intervenir sur le champ de la responsabilité disciplinaire notamment
par le biais des arrêts rendues par le conseil d'état
français, malgré que les décisions rendues par les
autorités disciplinaires françaises ne sont pas publiées
en intégralité conformément aux textes qui les y
régissent.
Dans ce contexte le conseil d'état français,
dans une décision du 18 mars 1983, a retenu comme faute disciplinaire
consistant en une violation des règles, d'honneur, de probité
d'intégrité, le défaut de révélation des
faits délictueux.1
En effet au début, le commissaire aux comptes a
été poursuivi pénalement et il a été retenu
coupable, or lorsqu'il a été poursuivi devant l'autorité
disciplinaire, celle-ci a considéré que rien n'empêche que
sa responsabilité soit engagée également sur le plan
disciplinaire en indiquant :
« sur le fait que l'infraction constatée par
le juge pénal était également constitutive d'une faute
passible d'une sanction disciplinaire », et lui a infligée une
peine disciplinaire qui consiste en un avertissement.
Dans ce contexte l'autorité disciplinaire, a
considéré que la responsabilité disciplinaire du
commissaire aux comptes doit être engagée pour faute
disciplinaire, qui consiste d'après la décision de
l'autorité disciplinaire :
« les faits reprochés à M.X
présentent le caractère d'un manquement à la
probité ou à l'honneur »
Face a cette situation le commissaire aux comptes, a
demandé auprès du conseil d'état la cassation de cette
décision disciplinaire, or le conseil d'état a confirmé
cette décision disciplinaire et a rejeté les demandes du
commissaire aux comptes.
En revanche le conseil d'état dans un autre arrêt
du 2 novembre 2005, a considéré que ne peut être
réputée comme faute disciplinaire consistant en une violation des
règles d'honneur, de probité, le fait qu'un commissaire aux
comptes exerce une activité commerciale
1 CE, 18 mars 1983,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
121
a titre privé et isolé, dans ce sens le conseil a
indiqué :1
« qu'en regardant ces faits, commis en 1999, comme de
nature à entraîner dans l'esprit du public une confusion et une
interrogation sur le rôle des commissaires aux comptes et comme
étant contraires à l'honneur et à la probité et,
donc ... le Haut Conseil ne leur a pas donné une exacte qualification
juridique ».
Au terme de cette analyse de la faute disciplinaire, il s'agit
maintenant de traiter de son auteur.
§ /II L'auteur de la faute :
La responsabilité disciplinaire peut être
engagée à l'égard du commissaire aux comptes aussi bien
personne physique que morale.2
A) Commissaire aux comptes personne physique :
Le fait que le commissaire aux comptes, personne physique,
soit susceptible d'être l'auteur d'infractions disciplinaires, semble
naturel et ne soulève pas de difficulté notable.3
Toutefois, il convient de rappeler, qu'au Maroc, le
commissaire aux comptes est poursuivi en matière disciplinaire, en tant
qu'expert comptable, étant donné que le commissariat aux comptes
s'inscrit parmi les missions de l'expert comptable conformément aux
dispositions de l'alinéa 3 de l'article 1de la loi n° 15-89
4réglementant la profession d'expert comptable, qui
prévoit clairement que :
« « Est expert comptable celui qui fait
profession habituelle de réviser, d'apprécier et d'organiser les
comptabilités des entreprises et organismes auxquels il n'est pas
lié par un contrat de travail, il est seul habilité à
:
... - exercer la mission de commissaire aux comptes.
».
Tandis qu'en France les régimes disciplinaires relatifs
aux commissaires aux comtes et experts comptables, sont dissociés.
1 CE, 2 novembre 2005,
www.legifrance.gov.fr
2 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 158
3 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 201
4 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
122
B) Commissaire aux comptes personne morale :
Les textes sont clairs à ce sujet. Il en ressort que
les experts comptables, en générale, et les commissaires aux
comptes en particulier peuvent exercer leur mission, aussi bien à titre
de personne physique, qu'a titre de personne morale.
En effet la loi 15-89 autorise les experts comptables, et par
conséquent les commissaires aux comptes, à se constituer sous
forme de société de personnes ou par actions conformément
aux dispositions des articles 7 et 8 de cette loi.
Ainsi l'article 7 dispose : « Les experts comptables
peuvent constituer des sociétés de personnes pour l'exercice de
leur profession à la condition que tous les associés soient
membres de l'Ordre des experts comptables. »
En plus de l'article 8 de la loi 15-89 énonce :
« Les experts comptables sont admis également
à constituer pour l'exercice de leur profession, des
sociétés par actions et des sociétés à
responsabilité limitée sous les conditions suivantes...
».
Par ailleurs, il convient de préciser qu'en
matière disciplinaire, la responsabilité du commissaire aux
comptes personne morale, est distincte de celle du commissaire aux comptes
personne physique associé dans la société.
En effet ce principe a été confirmé par la
jurisprudence disciplinaire.
Dans ce sens le conseil d'état français a
indiqué dans sa décision du 18 mars 1983
que 1:
« Si le décret du 12 août 1969
prévoit la possibilité de poursuites disciplinaires à
l'encontre des commissaires aux comptes, "personne physique ou
société", ni la loi du 24 juillet 1966, ni le décret
susmentionné ne subordonnent les poursuites disciplinaires à
l'encontre d'un commissaire aux comptes membre d'une société,
quelle que soit la forme de celle-ci, à l'exercice de poursuites contre
la société de commissaires aux comptes elle-même.
Dès lors, l'existence d'une responsabilité, en matière
disciplinaire, des sociétés de commissaires aux comptes n'exclut,
en aucun cas, la responsabilité personnelle des membres de la
société, eux-mêmes inscrits en tant que personnes physiques
sur la liste des commissaires aux comptes. »
1 CE, 18 mars 1983,
www.legifrance.gov.fr
La responsabilité du commissaire aux
comptes
123
Dés lors, après avoir traité des
conditions de la responsabilité, l'examen de ses effets s'impose,
à travers l'étude de sa mise en oeuvre.
Section III La mise en oeuvre de la
responsabilité disciplinaire du
commissaire aux comptes
Il s'agit dans le cadre de cette étude de la mise en
oeuvre de la responsabilité disciplinaire, de s'intéresser
à la procédure disciplinaire, mais aussi des effets
répressifs qui peuvent en résulter à savoir les
sanctions.
§ /I La procédure disciplinaire :
Comme dans toute procédure qu'elle soit civile ou
pénale, il s'agit dans ce cas, de traiter de la compétence mais
également du mode de déroulement de la
procédure.1
A) La compétence :
Sont compétentes pour statuer en matière
disciplinaire : les conseils régionaux et le conseil
national.2
a) Le conseil régional :
Conformément aux dispositions de l'article 66 de la loi
n° 15-89 3réglementant la profession d'expert comptable
:
« Les conseils régionaux et le conseil
national, par voie d'appel, exercent à l'égard des experts
comptables et de leurs sociétés le pouvoir disciplinaire ordinal
pour toute faute professionnelle ou toute contravention aux dispositions
législatives et réglementaires auxquelles l'expert comptable est
soumis dans l'exercice de sa profession notamment :
- violation des règles professionnelles, manquement
aux règles de l'honneur, de la probité et de la dignité
dans l'exercice de la profession, telles qu'elles sont notamment
édictées dans le code des devoirs professionnels.
1 P. Ancel, Vers un droit commun disciplinaire,
Université de Saint-Etienne, 2007, p 198
2 2 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 44
3 3 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
124
- non respect des lois et règlements applicables
à l'expert comptable dans l'exercice de sa profession.
- atteinte aux règles ou règlements
édictés par l'Ordre, à la considération ou au
respect dus aux institutions ordinales. »
La discipline professionnelle est en première instance
toujours défendue par les conseils régionaux, Ceux-ci se
composent de 4 membres au moins et de 10 au plus, tous élus, toutefois
sont en même temps électeurs et éligibles, les experts
comptables.1
Le conseil régional comprend :
- un président.
- un vice - président.
- un secrétaire général.
- un trésorier général et des
assesseurs
Toutefois il convient de signaler que conformément aux
dispositions de l'article 53 de la loi n° 15-89 règlementant la
profession d'expert comptable, que les membres du conseil régional sont
élus pour 3 ans et sont rééligibles.
b) Le conseil national :
Le conseil national connait des appels interjetés
contre les décisions des conseils régionaux de discipline.
Le conseil national est composé conformément aux
dispositions de l'article 41 de la loi 15-89 2régissant la
profession d'expertise comptable d' :
« un président nommé par Sa
Majesté le Roi après son élection par les membres
du
conseil.
- un membre de la Chambre constitutionnelle nommé
par Sa Majesté le Roi pour remplir les fonctions de conseiller juridique
auprès du conseil national aux délibérations duquel il
prend part avec voix délibérative ;
- un premier vice-président.
1 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 44
2 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
125
- un deuxième vice-président.
- un secrétaire général.
- un trésorier général.
- 6 assesseurs,
Tous élus en son sein par le conseil national
»
B) Déroulement de la procédure :
Le déroulement de la procédure suppose le
déclenchement de l'action, il s'agit donc d'étudier de l'exercice
de l'action disciplinaire, devant le conseil régional, puis l'exercice
de celle-ci devant le conseil national. 1
a) L'exercice de l'action disciplinaire devant le conseil
régional :
Le conseil régional de discipline peut être saisi
par toute personne intéressée, par le biais d'une plainte
rapportant une faute personnelle de l'expert comptable ou de la
société et justifiant une action, disciplinaire à
son encontre, toutefois il peut être également saisi pour les
mêmes motifs soit par son président agissant d'office ou à
la demande des deux tiers 2des membres du conseil ou du
président du conseil national, soit par l'administration, un syndicat ou
une association d'experts comptables.
Cependant, lorsque le conseil régional, estime que les
faits rapportés dans la plainte sont susceptibles, de constituer une
faute imputable au commissaire aux comptes, qu'il soit personne morale ou
physique, 3il décide d'engager une action disciplinaire et
désigne un ou plusieurs de ses membres pour instruire la plainte.
Ceux-ci disposent d'un large pouvoir dans les opérations qu'ils
mènent pour pouvoir établir la réalité des faits
reprochés, et les circonstances dans lesquelles ils ont eu lieu.
Toutefois ils peuvent également provoquer des explications
écrites de la part du commissaire aux comptes.4
Dans le cadre de la garantie des droits de défense au
commissaire aux comptes, ceux-ci peuvent se faire assister à tous les
stades de la procédure disciplinaire par un confrère ou un
avocat.5
1 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 44
2 O. Mustapha, Le Commissaire au comptes au Maroc,
Sijelmassa, 2010, p 43
3 3 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995,p 203
4 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 517
5 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 336
La responsabilité du commissaire aux
comptes
126
Au terme des investigations, le ou les membres chargés
de l'instruction sont tenus de présenter dans le délai d'un mois
à compter de leur désignation, un rapport sur la base duquel, le
conseil régional, va décider soit la poursuite de l'affaire, soit
son classement son suite, et dans ce cas, le commissaire aux comptes et le
plaignant sont informés de la décision.1
Lorsque le conseil estime que les faits rapportés
constituent une infraction disciplinaire, il convoque le commissaire aux
comptes concerné, et statue après avoir recueilli ses
explications.2
Ainsi, la décision du conseil régional doit
être motivée, toutefois la délibération
nécessite la présence au moins des deux tiers.3
Cette décision est notifiée, dans les brefs
délais suivant le prononcé, au commissaire aux comptes
intéressé, et au plaignant, en plus l'administration et le
conseil national sont informés.4
Par ailleurs, concernant les vois de recours, il est à
noter, que l'appel des décisions du conseil régional est
interjeté, devant le conseil national, par le commissaire aux comptes,
le plaignant, dans le délai de 15 jours suivant la date de
notification.
L'appel est formulé, par une lettre recommandé avec
accusé de réception.
b) L'exercice de l'action disciplinaire devant le conseil
national :
Afin d'éviter toute répétition, il est
à noter, que la procédure d'instruction en appel, est identique
à celle appliquée en première instance.
Dans le délai de 8 jours suivant, l'audition du
commissaire aux comptes, le conseil national décide de statuer.
Le conseil national statuant en conseil de discipline se
compose du président, du membre de la chambre constitutionnelle et des
membres du conseil.
Il délibère valablement lorsque le
président, le membre de la chambre constitutionnelle et au moins les
deux tiers de ses membres sont présents. Il prend ses décisions
à la majorité des voix, celle du président étant
prépondérante en cas de partage égal des voix.
1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement
ou dérive, Litec,1989, p 517
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 337
3 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 44
4 J. Scotti, La responsabilité juridique du
cadre de santé, Université de Saint-Etienne, 2007, p 219
La responsabilité du commissaire aux
comptes
127
Lorsque le commissaire aux comptes incriminé est membre
du conseil de discipline, le conseil national lui substitue un membre
suppléant pour délibérer sur l'affaire en cause.
Ses décisions sont notifiées dans les dix jours
par lettre recommandée avec accusé de réception au
commissaire aux comptes concernés, ou à la société
et au plaignant. L'administration est informée de toutes
décisions disciplinaires1.
Ainsi après avoir traité de la procédure
suivie en matière disciplinaire, il convient de s'intéresser
maintenant au caractère régressif de cette responsabilité
à travers l'étude des sanctions disciplinaires.
§ /I I Les sanctions disciplinaires :
L'objet de la responsabilité disciplinaire se dissocie
de celui de la responsabilité indemnitaire : sa mise en oeuvre
débouche sur le prononcé d'une sanction dont la
sévérité est en adéquation avec la faute
commise.
La sanction prononcée ne concerne le commissaire aux
comptes que dans sa vie professionnelle.
Le principe de la légalité s'applique dans la
procédure disciplinaire. 2Les sanctions disciplinaires
à la différence des fautes qui les font naitre, sont
limitativement prévues par un texte.3
A) Types de sanctions :
Conformément aux dispositions de l'article 68 de la loi
15-89 4règlementant la profession d'expert comptable :
« Les sanctions disciplinaires sont :
- l'avertissement.
- le blâme.
- la suspension pour une durée de six (6) mois au
maximum.
- la radiation du tableau.
1 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 44
2 CE, 12 Octobre 2009,
www.legifrance.gov.fr
3 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 202
4 loi 15-89 réglementant la profession d'expert
comptable, et instituant un ordre des experts comptables,promulguée par
le dahir n° 1-92-139 du 14 Rejeb 1413,(8 janvier 1993), ( Bulletin
officiel n° 4188 du 11 chaabane 1413/( 3 février 1993)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
128
Le conseil peut également décider que
l'expert comptable fautif ne pourra se présenter à des fonctions
électives au sein de l'Ordre pour une durée de dix (10) ans.
»
Il découle d'après cet article ci-dessus, que le
législateur marocain a prévu une liste exhaustive des sanctions
disciplinaires qui peuvent être prononcées à l'égard
du commissaire aux comptes.
La sanction disciplinaire est le corollaire des obligations et
règles professionnelles, avec l'absence d'une intimidation, les
règles ne peuvent produire leur efficacité.1
En effet le législateur marocain dans le cadre de
l'article 68 de la loi 15-89 a énoncé les sanctions suivant un
ordre croissant, en commençant par l'avertissement et le blâme, il
s'agit de deux sanctions morales qui ont le caractère d'une
réprimande et n'emportent la privation d'aucun avantage.2
L'avertissement est la première sanction dans
l'échelle des peines qui peut être infligée au commissaire
aux comptes.
L'avertissement est prononcé au cours d'une
comparution, durant laquelle l'aspect solennel est recherché, afin de
bien signifier au commissaire aux comptes qu'il est frappé d'une
sanction.
Quant au blâme, il s'agit d'une sanction,
utilisée lorsque la faute commise est d'une gravité
supérieure, ou bien s'il y a récidive suite à un
avertissement. 3
Les commissaires aux comptes qui manquent aux devoirs de leur
charge, ou qui par leur conduite portent atteinte à la dignité et
la réputation de leur profession sont exposées à qui leur
soient infligées des sanctions disciplinaires plus graves qui peuvent
aller de la suspension pour une durée de 6 mois jusqu'à la
radiation du tableau.4
Afin d'apprécier, les effets, de ces sanctions, il
convient maintenant de traiter de l'exécution des sanctions.
1 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 337
2 M. Ouhannou, Le Commissaire aux comptes au Maroc,
Sijelmassa,2010, p 48
3 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux
comptes, Dalloz, 1995,p 202
4 Y. Guyon, et G. Coquerau, Le commissariat aux
comptes : aspects juridiques et techniques, Librairies techniques, p 301
La responsabilité du commissaire aux
comptes
129
B) L'exécution des sanctions :
Il doit y avoir une adéquation entre la faute commise
et la sanction choisie : elle doit être proportionnée. Les faits
pour lesquels le commissaire aux comptes est poursuivi doivent être
établis. La preuve matérielle de leur existence doit être
faite. Dans chaque affaire, le mobile, l'intention le degré de
responsabilité, la nature des missions du commissaire aux comptes
doivent être pris en considération.1
Toutefois une fois prononcée, la sanction devient
immédiatement exécutoire, après l'expiration des
délais d'appel, ou en cas d'appel à compter de la notification du
conseil national.2
Par ailleurs il convient de signaler que les sanctions
disciplinaires s'exécutent aussi bien à l'égard du
commissaire aux comptes, personne physique que morale.
Ainsi s'agissant de l'avertissement et le blâme, ils ont
à l'égard du commissaire aux comptes personne physique, qu'une
portée seulement morale.
En revanche, lorsqu'il s'agit de commissaire aux comptes
personne morale la peine du blâme et de l'avertissement peut être
assortie d'une amende de 10.000 DH à 100.000 DH perçue au profit
des oeuvres de prévoyance de l'ordre.
Or par rapport aux sanctions de suspension et de radiation de
tableau, celles-ci entrainent de plein droit pour le commissaire aux comptes
personne physique l'interdiction temporaire ou définitive d'exercer,
toutefois tout acte d'exercice de la profession, après que la peine de
suspension ou de radiation du tableau sera devenue définitive, est puni
des sanctions prévues pour l'exercice illégal de la
profession.3
Tandis que s'agissant du commissaire aux comptes personne
morale, la peine de la radiation du tableau de l'Ordre de la
société entraîne sa dissolution de plein droit et sa
liquidation conformément à ses dispositions statutaires.
Dès la liquidation achevée, les membres de la
société peuvent demander leur inscription au tableau de l'Ordre
pour y exercer soit à titre individuel, soit à titre de
salarié ou dans le cadre d'une nouvelle
société.4
1 P. Ancel, Vers un droit commun disciplinaire,
Université de Saint-Etienne, 2007, p 198
2 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 338
3 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p75 4M. Ouhannou, Le Commissaire aux
comptes au Maroc, Sijelmassa,2010, p 48
La responsabilité du commissaire aux
comptes
130
Enfin Ces décisions sont publiées au Bulletin
officiel et dans un journal d'annonces légales diffusé dans la
localité où l'intéressé exerçait sa
profession.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
131
Conclusion
Le commissariat aux comptes est aujourd'hui l'un des rouages
essentiels de la vie économique et financière, puisque selon
certains auteurs le commissaire aux comptes exerce une mission
d'intérêt général.
Ce dispositif de contrôlé peut être
considéré comme structurant l'économie et la
société, car il garantit la régularité et la
sincérité des comptes et assure aux actionnaires et au tiers la
fiabilité, la pertinence et la loyauté des informations
financières.
Toutefois il ressort clairement de ce qui
précède, qu'une lourde responsabilité incombe au
commissaire aux comptes. Cette responsabilité, il doit la prendre avec
vigilance dans tous ses aspects aussi bien indemnitaires que
répressifs.
En se conformant aux normes légales et
professionnelles, le commissaire aux comptes a peu ou pas de risque, que sa
responsabilité engagée.
Enfin, une réflexion devrait être entreprise pour
mieux déterminer la place qu'occupe le commissaire aux comptes au sein
de la société. En effet, celui-ci est en relation avec les
dirigeants, les actionnaires ou associés, le président du
tribunal de commerce.
Car de nombreuses personnes, parmi elles le commissaire aux
comptes lui-même, ne perçoivent pas toujours la difficulté
d'appréciation du contenu exact de la lourde et importante mission du
commissariat aux comptes.
132
La responsabilité du commissaire aux
comptes
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L'article 104 de la loi 15-89 règlement la profession
d'expet comptable dispose : « Est passible d'une peine de 5.000 DH
à 10.000 DH toute infraction à l'article 14 de la présente
loi. »
La loi 17-95 stipule dans son article 167, alinéa 2 et
3 : « Pour l'accomplissement de leurs contrôles, les commissaires
aux comptes peuvent, sous leur responsabilité, se faire assister ou
représenter par tels experts ou collaborateurs de leur choix, qu'ils
font connaître nommément à la société.
»
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La responsabilité du commissaire aux
comptes
139
ANNEXES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
140
Annexe 1
Arrêt de la Cour d' appel de commerce de Fès
du 17 Mars 2009
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : Responsabilité
Civile Délictuelle
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La responsabilité du commissaire aux
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142
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La responsabilité du commissaire aux
comptes
143
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144
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La responsabilité du commissaire aux
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147
Annexe 2
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 8 novembre 2011
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : Responsabilité
Civile Délictuelle
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 8 novembre 2011
N° de pourvoi: 10-20626
Non publié au bulletin
Cassation partielle
Mme Favre (président),
président
Me Blondel, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt
suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la
société Union des caves des Maures et de l'Esterel,
dénommée Union des caves de Provence (l'UCP) a acquis entre 1995
et 1996 la société des Caves des seigneurs et la
société Jean Bagnis et fils (la société Bagnis) ;
que par jugement du 18 mai 2004, l'UCP a été placée en
redressement judiciaire, procédure qui a été
étendue le 6 août 2004 aux sociétés Bagnis et Cave
des seigneurs ; que le 26 août 2004, invoquant des fautes de MM. X... et
Y..., commissaires aux comptes, l'UCP, M. Z... en qualité de
représentant des créanciers et M. A... en qualité
d'administrateur judiciaire, les ont assignés en paiement de
dommages-intérêts ; que l'instance a été poursuivie
par l'UCP, M. Z... et M. A... devenu commissaire à l'exécution du
plan ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
148
Sur le premier moyen :
Attendu que l'UCP et M. A... font grief à l'arrêt
d'avoir dit que M. A... agissant en sa qualité de commissaire à
l'exécution du plan de l'UCP n'avait pas qualité pour
réclamer condamnation au profit de la débitrice pour les fautes
contractuelles commises par les commissaires aux comptes, alors, selon le moyen
:
1°/ que la mission dévolue au commissaire aux comptes
procède de la loi, de sorte que sa responsabilité pour manquement
aux règles légales qui gouvernent son office ne peut être
que délictuelle, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que l'action
émane de l'entité contrôlée ou des tiers ; qu'en
considérant que l'action dont elle était saisie constituait
nécessairement une action en responsabilité contractuelle qui,
comme telle, ne pouvait être exercée par le commissaire à
l'exécution du plan agissant dans l'intérêt collectif des
créanciers et en reprochant à M. A..., agissant ès
qualité, de n'avoir pas formulé de demandes distinctes de celles
de l'UCP nonobstant la distinction à opérer selon elle entre
responsabilité contractuelle et responsabilité
délictuelle, la cour d'appel viole l'article L. 225-241 du code de
commerce, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble les
articles 1147 par fausse application et 1382 du code civil par refus
d'application ainsi que l'article 12 du code de procédure civile ;
2°/ que les demandes formées tant au nom de M. A...
agissant ès qualité, qu'au nom de l'UCP l'étaient
notamment sur le fondement des règles gouvernant la
responsabilité civile délictuelle ; qu'en s'estimant saisie d'une
action exclusivement fondée sur les règles gouvernant la
responsabilité contractuelle, pour en déduire que le commissaire
à l'exécution du plan, agissant dans l'intérêt
collectif des créanciers, n'était pas habile à l'exercer,
la cour d'appel méconnaît les termes du litige, violant l'article
4 du code de procédure civile ;
3°/ que les sommes recouvrées par les mandataires de
justice dans le cadre des actions en responsabilité que ceux-ci sont
habiles à exercer à l'encontre des tiers dont les agissements
fautifs ont contribué à l'aggravation du passif entrent dans le
patrimoine du débiteur pour être ensuite affectées à
l'apurement du passif, dans l'intérêt collectif des
créanciers ; qu'il s'ensuit que le fait que M. A..., agissant ès
qualité, ait poursuivi de la condamnation des commissaires aux comptes
à payer à l'UCP la somme sollicitée à titre de
dommages et intérêts n'était pas de nature à exclure
que l'action fût exercée dans l'intérêt collectif des
créanciers, lesquels avaient évocation à se
répartir le produit de l'action en responsabilité venant
accroître l'actif de leur débiteur ; qu'en décidant le
contraire, la cour d'appel viole les articles L. 621-39 et L. 621-68 du code de
commerce, dans leur rédaction applicable à la cause ;
4°/ que les deux protocoles transactionnels du 13
décembre 2004, tels qu'homologués par le jugement du tribunal de
grande instance de Draguignan du 1er avril 2005, stipulaient, comme le rappelle
d'ailleurs l'arrêt attaqué dans ses commémoratifs :
«en cas d'issue favorable de l'action en responsabilité
engagée contre les commissaires aux comptes, le produit (...) de cette
action en dommages et intérêts sera partagé, entre l'UCP,
d'une part, à concurrence d'un tiers de ce produit, et l'ensemble des
créanciers au prorata de leurs créances admises, à
concurrence de 2/3 des sommes recouvrées dans la limite de leurs
créances admises» ; qu'il
La responsabilité du commissaire aux
comptes
149
s'ensuit que le produit de l'action en responsabilité
intentée par M. Z..., agissant ès qualité, et poursuivie
par M. A..., agissant également ès qualité, avait vocation
à profiter à l'ensemble des créanciers de l'UCP, dont les
mandataires de justice étaient en charge de l'intérêt
collectif, et non point seulement à ses deux principaux
créanciers ; qu'en retenant le contraire, pour en déduire que
l'action, en tant qu'elle était poursuivie par M. A... agissant
ès qualité, ne l'était point dans l'intérêt
collectif des créanciers, la cour d'appel statue au prix d'une
dénaturation des protocoles transactionnels du 13 décembre 2004,
tels qu'homologués par une décision de justice définitive,
ce en violation des articles 1134 et 1351 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'une action tendant
à obtenir condamnation au paiement de sommes au seul profit de la
débitrice, à charge pour elle d'en reverser une partie aux
créanciers, en vertu d'une transaction à laquelle n'ont pas
participé l'ensemble des créanciers, ne peut s'analyser en une
action tendant à la défense de l'intérêt collectif
des créanciers ; que par ces seuls motifs, la cour d'appel a
légalement justifié sa décision ; que le moyen,
irrecevable en ses première et troisième branches qui s'attaquent
à des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que l'UCP fait grief à l'arrêt d'avoir
rejeté ses demandes tendant à la condamnation de MM. X... et Y...
au paiement d'une somme de 6 481 032 euros à titre de
dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que la responsabilité des commissaires aux
comptes peut être engagée, non seulement lorsqu'ils n'ont pas su
déceler des irrégularités ou anomalies qui n'auraient pas
dû échapper à leur contrôle, mais également
lorsque, les ayant découvert, ils se sont abstenus de les
dénoncer selon les formes légales ou ont néanmoins
certifié sans réserve les comptes sociaux ; qu'en
l'espèce, les appelants reprochaient, entre autres, aux commissaires aux
comptes Lechat et Y..., de n'avoir pas révélé selon les
formes légales (rapport aux assemblées générales,
refus de certification des comptes) les flux anormaux de capitaux ayant
existé entre l'UCP et ses filiales, notamment la société
Bagnis, flux parfaitement mis à jour dans les jugements d'extension de
la procédure collective du 6 août 2004, prononcée à
raison d'une confusion des patrimoines, d'où ressortaient notamment le
versement par l'UCP à ses filiales de royalties économiquement
injustifiés, ensemble la sous-facturation manifeste des vins fournis par
l'UCP à la société Bagnis ; qu'il résulte des
motifs mêmes de l'arrêt, qu'ils soient propres ou adoptés du
jugement, que les commissaires aux comptes connaissaient ces flux anormaux de
capitaux, qu'ils les avaient même signalés à plusieurs
reprises aux dirigeants, lesquels avaient persévéré en
leurs errements et que néanmoins les comptes relatifs aux exercices 2001
et 2002 avaient été certifiés sans réserve ; qu'en
retenant pourtant qu'aucune faute n'était caractérisée de
ce chef, quand l'attitude des dirigeants n'étaient pas de nature
à exonérer les commissaires aux comptes de la
responsabilité qu'ils encouraient pour ne pas avoir
révélé, selon les formes légales, les anomalies
détectées et notamment acceptées de certifier sans
réserve des comptes qui, à raison de ces flux anormaux de
capitaux, ne pouvaient par hypothèse donner une image sincère et
fidèle de la situation comptable et financière de l'UCP et de ses
filiales, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences
légales de ses propres constatations, viole les articles L. 225-235, L.
225-237 et L. 225-241 du code de commerce, dans leur rédaction
La responsabilité du commissaire aux
comptes
150
applicable à la cause ;
2°! qu'en se bornant à relever que les participations
financières entre les sociétés du groupe avaient
été signalées dans les rapports des commissaires aux
comptes concernant les conventions réglementées, sans
préciser, comme elle y était invité, si ces rapports
spéciaux mettaient en exergue les éléments de confusion
des patrimoines, tels le versement de royalties injustifiées, ensemble
les sous-facturations et surfacturations qui avaient ultérieurement
provoqué l'extension de la procédure collective pour confusion
des patrimoines, la cour d'appel ne justifie pas légalement sa
décision au regard des articles L. 225-235, L. 225-237 et L. 225-241 du
code de commerce ;
3°! que la cour d'appel n'explique nullement en quoi le
signalement fait aux seuls dirigeants sociaux, par les commissaires aux
comptes, des flux anormaux de capitaux constatés entre l'UCP et ses
filiales serait de nature, nonobstant la certification sans réserve des
comptes et l'absence de rapport idoine destinée à
l'assemblée générale, à faire conclure à
l'absence de préjudice subi du fait des manquements imputés aux
commissaires aux comptes, non seulement par les dirigeants informés,
mais également par l'UCP et ses adhérents ; que sous cet angle,
l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard des
articles L. 225-235, L. 225-237 et L. 225-241 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt relève, par motifs
adoptés, que MM. X... et Y... avaient attiré l'attention des
dirigeants et des adhérents dans leurs rapports sur les comptes des
exercices 1999 et 2000 et signalé à plusieurs reprises la
difficulté provenant de l'importance des flux financiers entre l'UCP et
ses filiales, les sociétés Bagnis Caves de seigneurs ; que, par
motifs propres, l'arrêt, après avoir relevé que les
documents versés aux débats suffisaient pour vérifier que
les commissaires aux comptes ont mené leur mission dans des conditions
normales, retient que l'alerte qu'ils ont déclenchée sur les
comptes de 1999 a été maintenue, que le président du
tribunal de grande instance de Draguignan en a été
informé, et qu'après l'amélioration des comptes en 2000 et
2001, de nouvelles pertes au premier semestre 2003 ont justifié le
déclenchement d'une autre procédure d'alerte ; que l'arrêt
retient encore que les difficultés de l'UCP résultent d'une
politique d'achat à prix élevé, d'une augmentation des
stocks, l'UCP ayant fait le choix d'acheter au-delà des apports
obligatoires et de ses besoins, et d'acquisitions à l'aide de
prêts à court terme générant des charges de
remboursement très lourdes ; qu'il retient enfin que les commissaires
aux comptes ne pouvaient s'immiscer dans ces décisions, et que les
dirigeants de l'UCP avaient conscience que la situation de l'entreprise
exigeait des mesures draconiennes ; que par ces constatations et
appréciations, dont il ressort que les commissaires aux comptes
n'avaient pas commis de faute, la cour d'appel a légalement
justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les deuxième et troisième moyens ne
seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le cinquième moyen, pris en sa seconde branche
:
La responsabilité du commissaire aux
comptes
151
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que, pour condamner in solidum l'UCP et M. A... à
payer respectivement à MM. X... et Y... la somme de 5 000 euros à
titre de dommages-intérêts en réparation du
préjudice moral causé par la présente procédure,
l'arrêt retient par motifs adoptés que l'UCP a été
reconnu mal fondée à agir en responsabilité contre les
commissaires aux comptes dans le cadre d'une action antérieure,
concomitante au rejet de sa demande en relèvement de ces mêmes
commissaires aux comptes et que cette seconde action, dont le fondement
juridique est différent mais qui repose sur les mêmes faits qui
n'avaient pas été considérés comme fautifs dans le
cadre de l'action en relèvement, a causé à MM. X... et
Y... un préjudice moral ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs impropres
à caractériser une faute de l'UCP, de M. Z... et de M. A..., de
nature à faire dégénérer en abus leur droit d'agir
en justice, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à
sa décision ;
Et sur le sixième moyen, pris en sa première
branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner in solidum l'UCP, M. Z... et M. A...,
ès qualités, à payer à M. X... la somme de 2 000
euros à titre de dommages-intérêts, en sus de la somme de 5
000 euros également accordée au titre du préjudice moral,
l'arrêt retient que les sommes allouées en première
instance à titre de dommages-intérêts seront portées
à 5 000 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans qu'aucun motif ne justifie la
condamnation au paiement de la somme de 2 000 euros, la cour d'appel a
violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les
autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la
SCEA UCP, M. Z..., représentant des créanciers et M. A... en
qualité d'administrateur au redressement judiciaire, in solidum,
à payer à M. X... la somme de 2 000 euros à titre de
dommages-intérêts en réparation du préjudice moral
causé par la présente procédure et en ce qu'il a
condamné la SCEA UCP, M. Z..., représentant des créanciers
et M. A... ès qualités, in solidum, à payer respectivement
à M. Y... et à M. X... la somme de 5 000 euros à titre de
dommages-intérêts en réparation du préjudice moral
causé par la présente procédure, l'arrêt rendu le
1er avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans
l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour
être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
autrement composée ;
Condamne MM. X... et Y... aux dépens ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
152
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les
demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général
près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis
pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt
partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du huit novembre deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la
société Union des caves de Provence et M. A..., ès
qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt partiellement
infirmatif attaqué d'avoir dit que Maître A... agissant en sa
qualité de mandataire à l'exécution du plan de l'UCP
n'avait pas qualité pour réclamer condamnation au profit de la
débitrice pour les fautes contractuelles commises par les commissaires
aux comptes ;
AUX MOTIFS QUE la procédure en responsabilité
contre les commissaires aux comptes a été introduite le 26
août 2004 par l'UCP, Maître Z... ès qualités de
représentant des créanciers et Maître A... ès
qualités d'administrateur judiciaire ; que lors de l'introduction de
l'instance, toutes les parties avaient donc qualités pour agir, L'UCP et
l'administrateur sur le fondement contractuel, le représentant des
créanciers sur le fondement quasi délictuel ; que le plan de
redressement de cette société et des sociétés
auxquelles la procédure a été étendue a
été homologué par jugement en date du 22 décembre
2004 ; que Maître A... est intervenu en qualité de commissaire
à l'exécution du plan en cours de procédure devant le
tribunal, qualité en laquelle il a également relevé appel
du jugement ; qu'après l'adoption du plan de redressement, l'article L
621-68 du code commerce indique que les actions introduites avant le jugement
qui arrête le plan, soit par l'administrateur, soit par le
représentant des créanciers sont poursuivies par le commissaire
à l'exécution du plan ; que la procédure est donc
régulière ; que l'action de Maître Z... es qualités
de représentant des créanciers, reprise par Maître A... es
qualités de commissaire à l'exécution du plan n'est donc
pas irrecevable ; que tout au plus le maintien en la cause de Maître Z...
es qualités de représentant des créanciers est inutile et
sans intérêt ; que Maître A... indique qu'il intervient aux
côtés de l'UCP pour exercer les droits des créanciers tels
qu'ils résultent des protocoles d'accord transactionnels du 13
décembre 1994 et demande la condamnation des commissaires aux comptes au
paiement de la somme de 6.481.032 € à la débitrice
assistée de son commissaire à l'exécution du plan et de
son représentant des créanciers ; qu'outre le fait qu'il n'y a
pas de demandes distinctes cependant que les responsabilités
résultant de fautes contractuelles et quasi délictuelles ne
La responsabilité du commissaire aux
comptes
153
peuvent être confondues, les pouvoirs du
représentant des créanciers et du commissaire à
l'exécution du plan à sa suite, sont limités à la
défense de l'intérêt collectif des créanciers ;
qu'une action tendant à obtenir condamnation au paiement de sommes au
profit de la seule débitrice à charge par elle d'en reverser une
partie à deux créanciers de la procédure collective,
fussent-ils des créanciers importants, en vertu d'une transaction
à laquelle n'ont pas participé l'ensemble des créanciers,
ne peut s'analyser comme une action tendant à la défense de
l'intérêt collectif des créanciers ; que Maître A...
est dépourvu de qualité pour exercer cette action qui met en
cause la responsabilité contractuelle des commissaires à
l'exécution du plan ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la mission dévolue au commissaire
aux comptes procède de la loi, de sorte que sa responsabilité
pour manquement aux règles légales qui gouvernent son office ne
peut être que délictuelle, sans qu'il y ait lieu de distinguer
selon que l'action émane de l'entité contrôlée ou
des tiers ; qu'en considérant que l'action dont elle était saisie
constituait nécessairement une action en responsabilité
contractuelle qui, comme telle, ne pouvait être exercée par le
commissaire à l'exécution du plan agissant dans
l'intérêt collectif des créanciers et en reprochant
à Maître A..., agissant ès qualité, de n'avoir pas
formulé de demandes distinctes de celles de l'UCP nonobstant la
distinction à opérer selon elle entre responsabilité
contractuelle et responsabilité délictuelle, la Cour viole
l'article L. 225 - 241 du Code de commerce, dans sa rédaction applicable
à la cause, ensemble les articles 1147 par fausse application et 1382 du
Code civil par refus d'application ainsi que l'article 12 du Code de
procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, les demandes formées tant au nom
de Maître Xavier A..., agissant ès qualité, qu'au nom de
l'UNION DES CAVES DE PROVENCE l'étaient notamment sur le fondement des
règles gouvernant la responsabilité civile délictuelle
(cf. le dispositif des dernières écritures des appelants, p. 30,
visant entre autres l'article 1382 du Code civil) ; qu'en s'estimant saisie
d'une action exclusivement fondée sur les règles gouvernant la
responsabilité contractuelle, pour en déduire que le commissaire
à l'exécution du plan, agissant dans l'intérêt
collectif des créanciers, n'était pas habile à l'exercer,
la Cour méconnait les termes du litige, violant l'article 4 du Code de
procédure civile ;
ALORS QUE, EN OUTRE, les sommes recouvrées par les
mandataires de justice dans le cadre des actions en responsabilité que
ceux-ci sont habiles à exercer à l'encontre des tiers dont les
agissements fautifs ont contribué à l'aggravation du passif
entrent dans le patrimoine du débiteur pour être ensuite
affectées à l'apurement du passif, dans l'intérêt
collectif des créanciers ; qu'il s'ensuit que le fait que Maître
A..., agissant ès qualité, ait poursuivi de la condamnation des
commissaires aux comptes à payer à l'UCP la somme
sollicitée à titre de dommages et intérêts
n'était pas de nature à exclure que l'action fût
exercée dans l'intérêt collectif des créanciers,
lesquels avaient évocation à se répartir le produit de
l'action en responsabilité venant accroître l'actif de leur
débiteur ; qu'en décidant le contraire, la Cour viole les
articles L 621 - 39 et L 621 - 68 du Code de commerce, dans leur
rédaction applicable à la cause ;
ET ALORS ENFIN QUE,, les deux protocoles transactionnels du 13
décembre 2004, tels qu'homologués par le jugement du tribunal de
grande instance de Draguignan du 1er avril
La responsabilité du commissaire aux
comptes
154
2005, stipulaient, comme le rappelle d'ailleurs l'arrêt
attaqué dans ses commémoratifs (cf arrêt attaqué p.
4 §2) : « en cas d'issue favorable de l'action en
responsabilité engagée contre les commissaires aux comptes, le
produit (...) de cette action en dommages et intérêts sera
partagé, entre l'UNION DES CAVES DE PROVENCE, d'une part, à
concurrence d'un tiers de ce produit, et l'ensemble des créanciers au
prorata de leurs créances admises, à concurrence de 2/3 des
sommes recouvrées dans la limite de leurs créances admises »
; qu'il s'ensuit que le produit de l'action en responsabilité
intentée par Maître Z..., agissant ès qualité, et
poursuivie par Maître A..., agissant également ès
qualité, avait vocation à profiter à l'ensemble des
créanciers de l'UCP, dont les mandataires de justice étaient en
charge de l'intérêt collectif, et non point seulement à ses
deux principaux créanciers ; qu'en retenant le contraire, pour en
déduire que l'action, en tant qu'elle était poursuivie par
Maître A... agissant ès qualité, ne l'était point
dans l'intérêt collectif des créanciers, la Cour statue au
prix d'une dénaturation des protocoles transactionnels du 13
décembre 2004, tels qu'homologués par une décision de
justice définitive, ce en violation des articles 1134 et 1351 du Code
civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué
d'avoir rejeté les demandes de la SCEA UNION DES CAVES DE PROVENCE
tendant à la condamnation de Messieurs X... et Y... au paiement d'une
somme de 6.481.032 € à titre de dommages et intérêts
;
AUX MOTIFS QUE l'adoption du plan a mis fin au dessaisissement de
la débitrice ; que, dès lors, la demande de l'UCP sur le
fondement de la responsabilité contractuelle est recevable ; que
l'action de l'UNION DES CAVES DE PROVENCE est nécessairement
fondée sur la responsabilité contractuelle des commissaires aux
comptes ;
ALORS QUE la responsabilité des commissaires aux comptes
pour manquement aux obligations légales qui gouvernent leur office, qui
ne sont pas édictées uniquement dans l'intérêt de
l'entité contrôlée ou de ses dirigeants, mais
également des tiers, constitue une action en responsabilité
délictuelle ; qu'il s'ensuit qu'en assignant néanmoins à
l'action dont elle était saisie à fondement contractuel, la Cour
viole, par fausse application, l'article 1147 du Code civil, et par refus
d'application l'article 1382 du même code, ensemble les articles L
225-235 et L 225-241 du Code de commerce ainsi que l'article 12 du Code de
procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué
d'avoir rejeté les demandes de la SCEA UNION DES CAVES DE PROVENCE
tendant à la condamnation de Messieurs X... et Y... au paiement d'une
somme de 6.481.032 € à titre de dommages et intérêts
;
AUX MOTIFS QUE les appelants, s'appuyant sur les conclusions d'un
rapport établi par la société FIDUCIAIRE DE COMPTABILITE
DE GESTION en date du 2 septembre 2009,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
155
reproche à Messieurs X... et Y... qui se refusent à
produire leurs dossiers de travail, d'avoir commis plusieurs erreurs dans leurs
missions de certification des comptes, et notamment de ne pas avoir
relevé différentes irrégularités, facilitant ainsi
la poursuite de la détérioration de la structure
financière de l'UNION DES CAVES DE PROVENCE et de la
société des Etablissements JEAN BAGNIS ET FILS ; que les
documents versés aux débats suffisent pour permettre à la
Cour de vérifier que les commissaires aux comptes ont mené leur
mission dans des conditions normales ; que l'expertise sollicitée est
sans intérêt pour la solution du litige dès lors qu'il est
établi par les différents audits que la
détérioration de la situation financière de l'UCP s'est
fortement détériorée entre 1996 et 1999 en raison des
pertes subies au cours des derniers exercices liées à une
politique de prix d'achat élevés ayant
généré une baisse des marges, de l'augmentation des stocks
en 1997, l'UCP ayant fait le choix d'acheter au-delà des apports
obligatoires et de ses besoins et de l'acquisition de la société
BAGNIS pour 13 millions de francs, de la CAVE DES SEIGNEURS pour 8 millions de
francs, et des CEPAGES PROVENCAUX pour 4 millions de francs
intégralement financés par des emprunts de courte durée
générant des charges de remboursement très lourdes d'une
part, et par la nécessité de financer les pertes de la filiale
BAGNIS d'autre part ; que malgré les mesures prises, la situation a
continué de se dégrader pour aboutir en 2004 à l'ouverture
de la procédure collective ; que les difficultés de l'entreprise
résultent de la politique d'expansion poursuivie par les dirigeants de
l'UCP avant l'arrivée de Messieurs X... et Y..., que l'alerte
déclenchée en 2000 et tous les avertissements concernant la
fragilité de la société qui ne disposait pas de fonds
propres suffisants et qui était incapable de les reconstituer, ne
pouvait enrayer le processus qui l'a conduite en 2004 à déposer
son bilan ; qu'il aurait fallu que les dirigeants de l'UCP parfaitement
conscients de la situation prennent les décisions drastiques, ce qui
relevait de leur pouvoir de décision dans lequel les commissaires aux
comptes ne pouvaient s'immiscer ;
ALORS QU'il appartient au commissaire aux comptes de justifier
par la production de ses dossiers de travail de l'accomplissement des
contrôles, vérifications et sondages qu'il est tenu
d'opérer dans l'exercice de sa mission ; que ces pièces,
indispensables à l'examen du bien-fondé de l'action en
responsabilité, doivent être tenues à la disposition du
juge, du moins lorsque leur production est requise par le demandeur, sauf au
juge de tirer les conséquences d'un refus de communication ; qu'il
résulte des commémoratifs de l'arrêt attaqué,
ensemble des conclusions de l'UNION DES CAVES DE PROVENCE et des pièces
de la procédure (cf. les dernières écritures des
appelants, p. 14/32, § 4 et suivants ; V. aussi l'Ordonnance de mise en
état du 21 janvier 2010 jointe aux productions) que les commissaires aux
comptes se sont obstinément refusés à communiquer leurs
dossiers de travail, nonobstant la demande qui leur en avait été
faite ; qu'en statuant comme elle le fait, sans avoir préalablement
ordonné la communication des documents sollicités, ni tiré
les conséquences du refus de communication des commissaires aux comptes,
la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard des
articles L. 225-235 à L. 225-237 et L. 225-241 du Code de commerce, dans
leur rédaction applicable à la cause, des articles 1315
alinéa 2 du Code civil et 11 alinéa 2, du Code de
procédure civile, ensemble au regard du principe de loyauté des
débats judiciaires et du principe de l'égalité des armes,
tel qu'il s'évince de l'article 6 § 1 de la Convention
européenne des droits de l'homme, dispositions légales et
conventionnelles violées.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
La responsabilité du commissaire aux
comptes
156
Il est reproché à l'arrêt attaqué
d'avoir rejeté les demandes de la SCEA UNION DES CAVES DE PROVENCE
tendant à la condamnation de Messieurs X... et Y... au paiement d'une
somme de 6.481.032 € à titre de dommages et intérêts
;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'UCP reproche aux commissaires aux
comptes de n'avoir pas refusé de certifier les comptes au vu des flux
financiers anormaux entre l'UNION DES CAVES DE PROVENCE et ses filiales ; que
les participations financières ont été signalées
dans le rapport concernant les conventions réglementées ; que les
commissaires aux comptes ont relevé et signalé à plusieurs
reprises la difficulté provenant des flux financiers entre l'UCP et ses
filiales, mais que les dirigeants ont estimé que la situation de la
société BAGNIS ne pouvait s'améliorer sans les royalties
versées par l'UCP ; que les dirigeants ont ignoré les mises en
garde, comptant sur une amélioration de la situation et prenant des
décisions dans lesquelles les commissaires aux comptes ne pouvaient
s'immiscer ; que le premier juge a justement relevé qu'aucune faute ne
pouvait être retenue à l'encontre des commissaires de ce chef ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la principale critique adressée
aux commissaires aux comptes porte sur la mission de noter
l'irrégularité ou le caractère excessif des royalties
versées par l'UCP BAGNIS chaque année et la politique de
surfacturation pratiquée par la société BAGNIS à
l'égard de l'UCP et la certification des comptes malgré la
valorisation de la participation au sein de la société BAGNIS,
dont elle était actionnaire à près de 100 %, qu'elle juge
irréaliste ; qu'il ressort des analyses de l'UCP elle-même et des
organismes extérieurs qu'elle a mandatés ; que le rachat de la
société des CAVES DES SEIGNEURS et de la société
BAGNIS ET FILS faisait partie de la politique de croissance externe de l'UCP et
qu'elle lui permettait de disposer de la propriété de marques de
vin rosé de Provence, dont une marque haut de gamme
bénéficiant d'une grande notoriété comme l'ESTANDON
; que l'organisme RESEAUDIT, mandaté pour une consultation
destinée à évaluer les chances d'une action en
réparation contre les vendeurs des titres et du fonds de commerce de la
société BAGNIS ET FILS, conclut que cet achat a été
mené par les dirigeants de l'UCP en toute connaissance de la situation
déficitaire de cette société, en redressement judiciaire
depuis 1994, dans le but de devenir propriétaire de cette marque ; que
les comptes-rendus des conseils d'administration et des conseils de
surveillance démontrent que, malgré l'alerte
déclenchée par Monsieur C... au mois de juin 1999 en raison de
l'incertitude de la situation de la société BAGNIS ET FILS et du
remboursement des avances pratiquées par l'UCP à son
égard, les administrateurs ont maintenu leur soutien et ont mis en
oeuvre une stratégie, conseillée par la société
VINI CONSULT en 2000, pour revaloriser la marque ESTANDON, dont l'exploitation
souffrait d'une image vieillissante et d'un manque de conception d'une
démarche commerciale adaptée ; que Messieurs X... et Y..., qui
avaient attiré l'attention des dirigeants et des adhérents, dans
leurs rapports sur les comptes des exercices 1999 et 2000 de l'UCP et sur les
comptes de l'exercice 2000 du groupe, sur l'incertitude concernant la
continuité de l'entreprise et averti de la dépréciation
très importante de l'actif en cas de remise en cause de cette
activité, compte tenu de la valorisation des titres de la
société BAGNIS, ont certifié sans réserve les
comptes relatifs aux exercices 2001 et 2002 ; qu'ils ont tenu compte de
l'augmentation du capital par incorporation des comptes courants
d'associés des bons résultats d'exploitation de la
société BAGNIS, ainsi que la mise en place des mesures
préconisées par l'organisme VINI CONSULT et la
société ERNST ET YOUNG pour redresser la situation
financière ; que d'ailleurs, le représentant de la banque CREDIT
AGRICOLE, qui avait demandé, au mois d'octobre 1999 des garanties sur la
situation de la
La responsabilité du commissaire aux
comptes
157
société BAGNIS et la valeur de la marque ESTANDON
se déclarait, lors du conseil de surveillance du 15 avril 2002,
satisfait des efforts entrepris, notamment par la mise en place de mesures
préconisées par la société ERNST ET YOUNG, et
déclarait que l'entreprise était fiable, malgré les
réserves exprimées par les commissaires aux comptes dans leur
rapport du 20 avril 2000 sur les comptes de 1999 ; que le montant de la
participation dans les filiales BAGNIS et CAVES DES SEIGNEURS a toutefois
été provisionnée dans le bilan de l'UCP, jusqu'en 2000
pour 4 millions de francs et en 2001 pour 2,7 millions de francs ; que cette
provision tenait compte de l'incertitude sur l'avenir de la
société BAGNIS, mais aussi du fait qu'elle fonctionnait et
représentait une valeur certaine grâce à son réseau
de vente aux cafetiers restaurateurs et aux marques de vins qu'elle
détenait, notamment l'ESTANDON ; que les participations
financières entre les deux sociétés ont été
signalées, notamment dans le rapport concernant les conventions
réglementées ; qu'elles ont été signalées
également par le Cabinet ERNST ET YOUNG dans son rapport du 17 septembre
1999 qui avait préconisé une étude juridique sur les
conditions plus favorables dont bénéficiaient les filiales par
rapport aux autres clients, notamment dans le prix de vente ; que le rapport
ERNST ET YOUNG a mis en avant la volonté de croissance externe des
dirigeants et des adhérents de l'Union et aussi la pénalisation
de l'équilibre financier provenant de cette extension et l'absence
d'orientation stratégique claire de l'Union, dont les dirigeants et les
adhérents ont eu du mal à appréhender les contraintes
liées à son statut d'entreprise de production et de distribution
; qu'il convient de déduire de ces éléments que les
commissaires aux comptes connaissaient cette difficulté, qu'ils ont
signalé à plusieurs reprises et avaient relevé la
difficulté provenant de l'importance des flux financiers entre l'UCP et
ses filiales, société BAGNIS ET FILS et CAVES DES SEIGNEURS ; que
malgré ces signalements, les dirigeants ont continué à
subvenir aux besoins de la société BAGNIS notamment, l'un d'entre
eux, qui a participé activement aux négociations concernant
l'achat de cette société en 1997, Monsieur D..., assurant
à plusieurs reprises que l'activité de la société
BAGNIS redeviendrait bénéficiaire à compter de 2000 ;
qu'il s'agit de décisions de gestion, prises en toute connaissance de la
situation de l'entreprise, dans lesquelles les commissaires aux comptes ne
devaient pas s'immiscer ; que le conseil de surveillance notait, le 27
août 2001 et le 21 janvier 2002, que la situation s'améliorait et
signalait lors de la dernière réunion citée que la
situation de la société BAGNIS ne pouvait pas s'équilibrer
sans le soutien des royalties versées par l'UCP ; que la situation de
l'UCP n'est redevenue préoccupante, selon les comptes rendus des
réunions de l'équipe dirigeante, qu'à la fin de
l'année 2002, et plus précisément au mois de mai 2003 ;
qu'il ressort des comptes-rendus des conseils d'administration et de
surveillance que, malgré le refus de Monsieur C... de certifier les
comptes, en raison des incertitudes sur la valeur de la société
BAGNIS ET FILS, l'équipe dirigeante n'a jamais douté de cette
valeur et cru à son redressement rapide jusqu'à la fin de
l'année 2002 et au début de l'année 2003, où elle a
constaté l'échec des mesures mises en oeuvre pour
améliorer la trésorerie de l'Union et le fonctionnement de la
société BAGNIS ; qu'aucune faute des commissaires aux comptes
n'est donc démontrée concernant les rapports entre l'UCP et la
société BAGNIS ; que les demandeurs ne rapportent pas la preuve
que les certifications des comptes des exercices 2001 et 2002 de l'UCP et 2000
à 2002 du groupe étaient erronées à cause d'une
négligence des commissaires aux comptes dans l'exercice de leur mission
et ont entraîné pour elle des pertes financières ; qu'il
ressort, au contraire, des pièces produites, que l'UCP a poursuivi sa
politique de croissance externe et son soutien à des
sociétés déficitaires, propriétaires de marques de
vins porteuses, en toute connaissance de cause, et que les certifications des
comptes n'ont pas faussé la conception de ses dirigeants et des
adhérents concernant la situation financière difficile
persistante de l'entreprise résultant notamment de l'insuffisance de
fonds propres et du fonds de roulement, et de l'importance des flux entre l'UCP
et ses filiales ; que la demande de réparation sera donc rejetée
;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
158
ALORS QUE, D'UNE PART, la responsabilité des commissaires
aux comptes peut être engagée, non seulement lorsqu'ils n'ont pas
su déceler des irrégularités ou anomalies qui n'auraient
pas dû échapper à leur contrôle, mais
également lorsque, les ayant découvert, ils se sont abstenus de
les dénoncer selon les formes légales ou ont néanmoins
certifié sans réserve les comptes sociaux ; qu'en
l'espèce, les appelants reprochaient, entre autres, aux commissaires aux
comptes LECHAT et Y..., de n'avoir pas révélé selon les
formes légales (rapport aux assemblées générales,
refus de certification des comptes) les flux anormaux de capitaux ayant
existé entre l'UCP et ses filiales, notamment la société
BAGNIS, flux parfaitement mis à jour dans les jugements d'extension de
la procédure collective du 6 août 2004, prononcée à
raison d'une confusion des patrimoines, d'où ressortaient notamment le
versement par l'UCP à ses filiales de royalties économiquement
injustifiés, ensemble la sous-facturation manifeste des vins fournis par
l'UCP à la société BAGNIS (cf. lesdits jugements et les
conclusions d'appel des appelants, p. 13, p. 15, p. 18, et plus
spécialement p. 20 et 21) ; qu'il résulte des motifs mêmes
de l'arrêt, qu'ils soient propres ou adoptés du jugement, que les
commissaires aux comptes connaissaient ces flux anormaux de capitaux, qu'ils
les avaient même signalés à plusieurs reprises aux
dirigeants, lesquels avaient persévéré en leurs errements
et que néanmoins les comptes relatifs aux exercices 2001 et 2002 avaient
été certifiés sans réserve ; qu'en retenant
pourtant qu'aucune faute n'était caractérisée de ce chef,
quand l'attitude des dirigeants n'étaient pas de nature à
exonérer les commissaires aux comptes de la responsabilité qu'ils
encouraient pour ne pas avoir révélé, selon les formes
légales, les anomalies détectées et notamment
acceptées de certifier sans réserve des comptes qui, à
raison de ces flux anormaux de capitaux, ne pouvaient par hypothèse
donner une image sincère et fidèle de la situation comptable et
financière de l'UCP et de ses filiales, la Cour, qui n'a pas tiré
les conséquences légales de ses propres constatations, viole les
articles L 225-235, L 225-237 et L 225-241 du Code civil, dans leur
rédaction applicable à la cause ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, en se bornant à relever que les
participations financières entre les sociétés du groupe
avaient été signalées dans les rapports des commissaires
aux comptes concernant les conventions réglementées, sans
préciser, comme elle y était invité (cf. dernières
conclusions des appelants, p. 21 § 2), si ces rapports spéciaux
mettaient en exergue les éléments de confusion des patrimoines,
tels le versement de royalties injustifiées, ensemble les
sous-facturations et surfacturations qui avaient ultérieurement
provoqué l'extension de la procédure collective pour confusion
des patrimoines, la Cour ne justifie pas légalement sa décision
au regard des articles L 225-235, L 225-237 et L 225-241 du Code civil.
ET ALORS QUE, ENFIN, la Cour n'explique nullement en quoi le
signalement fait aux seuls dirigeants sociaux, par les commissaires aux
comptes, des flux anormaux de capitaux constatés entre l'UCP et ses
filiales serait de nature, nonobstant la certification sans réserve des
comptes et l'absence de rapport idoine destinée à
l'assemblée générale, à faire conclure à
l'absence de préjudice subi du fait des manquements imputés aux
commissaires aux comptes, non seulement par les dirigeants informés,
mais également par l'UCP et ses adhérents ; que sous cet angle,
l'arrêt n'est pas légalement justifié au regard des
articles L 225-235, L 225237 et L 225-241 du Code civil.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
159
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION (en tout état de cause)
Il est reproché à l'arrêt partiellement
infirmatif attaqué d'avoir condamné in solidum la SCEA UNION DES
CAVES DE PROVENCE et ses mandataires de justice à payer respectivement
à Monsieur Y... et à Monsieur X... la somme de 5.000 €
à titre de dommages et intérêts en réparation du
préjudice moral né de la procédure judiciaire ;
AU SEUL MOTIF PROPRE QUE les sommes allouées en
première instance à titre de dommages et intérêts et
en application de l'article 700 du Code de procédure civile seront
portées à 5.000 € et 10.000 € ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES DU JUGEMENT, ce qui a
priori ne peut être en l'état d'un arrêt infirmatif de ce
chef, QUE l'UCP, qui expose dans l'historique de sa situation contenue dans
l'assignation, une suite de décisions de gestion qui a contribué
à mettre en péril la continuité de son exploitation et au
premier chef l'achat de la société BAGNIS ET FILS en 1997
à un prix surévalué, a été reconnue mal
fondée à agir en responsabilité contre ses commissaires
aux comptes pour avoir notamment omis de lui imposer un provisionnement total
de la valeur des titres de cette société ; que ce
débouté fait suite au rejet de son action concomitante en demande
de relèvement de ces mêmes commissaires aux comptes ; que cette
seconde action, dont le fondement juridique est différent mais reposait
sur les mêmes faits, qui n'avaient pas été
considérés comme fautifs, dans le cadre de l'action en
relèvement, a causé à Monsieur X... et Monsieur Y... un
préjudice moral qui sera compensé par l'octroi d'une somme de
2.000 € chacun à titre de dommages et intérêts ;
ALORS QUE, D'UNE PART, en allouant aux Commissaires aux comptes
intimés la réparation d'un prétendu préjudice moral
qui serait né de la procédure, sans caractériser la
moindre faute à l'encontre des appelants de nature à justifier
une telle condamnation, et notamment sans préciser en quoi ceux-ci
auraient fait dégénérer en abus leur droit d'ester en
justice dans le but de voir engager la responsabilité des commissaires
aux comptes auxquels ils imputaient divers manquements professionnels, la Cour
viole l'article 1382 du Code civil ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, l'abus dans l'exercice du droit
d'ester en justice, qui seul peut justifier une condamnation au paiement de
dommages et intérêts en réparation du préjudice
né de la procédure judiciaire, ne saurait s'évincer du
seul fait que les demandes ont été déclarées mal
fondées, ni même de l'échec d'une précédente
procédure fondée sur les mêmes faits, mais tendant à
d'autres fins et n'ayant pas le même fondement juridique ; qu'il s'ensuit
qu'à les supposer même adoptés par l'arrêt infirmatif
attaqué, les motifs du jugement entrepris ne sauraient restituer une
base légale à la décision au regard de l'article 1382 du
Code civil.
SIXIEME MOYEN DE CASSATION
La responsabilité du commissaire aux
comptes
160
Il est reproché à l'arrêt partiellement
infirmatif attaqué d'avoir condamné in solidum la SCEA UNION DES
CAVES DE PROVENCE, ainsi que ses mandataires de justice, Maître Z... et
Maître A..., agissant ès qualité, à payer à
Monsieur X... la somme de 2.000 € à titre de dommages et
intérêts en réparation du préjudice moral né
de la procédure judiciaire, somme qui, tel que le dispositif est
conçu, s'ajoute à la somme de 5.000 € également
allouée au titre de ce même préjudice ;
AU MOTIF PROPRE QUE les sommes allouées en première
instance à titre de dommages et intérêts seront
portées à 5.000 € ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES DU JUGEMENT, ce qui a
priori ne peut être en l'état d'un arrêt infirmatif de ce
chef, QUE l'UCP, qui expose dans l'historique de sa situation contenue dans
l'assignation, une suite de décisions de gestion qui a contribué
à mettre en péril la continuité de son exploitation et au
premier chef l'achat de la société BAGNIS ET FILS en 1997
à un prix surévalué, a été reconnue mal
fondée à agir en responsabilité contre ses commissaires
aux comptes pour avoir, notamment omis de lui imposer un provisionnement total
de la valeur des titres de cette société ; que ce
débouté fait suite au rejet de son action concomitante en demande
de relèvement de ces mêmes commissaires aux comptes ; que cette
seconde action, dont le fondement juridique est différent, mais reposait
sur les mêmes faits, qui n'avaient pas été
considérés comme fautifs, dans le cadre de l'action en
relèvement, a causé à Monsieur X... et Monsieur Y... un
préjudice moral qui sera compensé par l'octroi d'une somme de
2.000 € chacun à titre de dommages et intérêts ;
ALORS QUE, D'UNE PART, aucun motif ne vient justifier la
condamnation au paiement de la somme de 2.000 € prononcée au profit
de Monsieur X..., en sus de la somme de 5.000 € qui lui est
également accordée au titre du préjudice moral
prétendument né de la procédure, de sorte que
l'arrêt est entaché d'un défaut de motif, en violation des
articles 455 du Code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention
Européenne des droits de l'homme ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, le principe de la réparation
intégrale du dommage s'oppose à ce que le même
préjudice soit réparé deux fois ; qu'en allouant à
Monsieur X... une somme de 2.000 € à titre de dommages et
intérêts en réparation « du préjudice moral
causé par la présente procédure », qui s'ajoute
à la condamnation au paiement de la somme de 5.000 € par ailleurs
prononcée au titre de ce même préjudice moral, la Cour
viole l'article 1382 du Code civil.
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Aix-en-Provence du 1 avril 2010
La responsabilité du commissaire aux
comptes
161
Annexe 3
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 19 Octobre 1999
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : OBLIGATION DE MOYEN
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 19 octobre 1999
N° de pourvoi: 96-20687
Publié au bulletin
Cassation.
Président : M. Bézard .,
président
Rapporteur : M. Métivet., conseiller apporteur
Avocat général : M. Lafortune., avocat
général
Avocats : M. Odent, la SCP Boré et Xavier., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique :
Vu les articles 228, 229 et 234 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu, selon l?arrêt attaqué, que des
détournements ayant été commis par le comptable de la
société anonyme des Garages Voltaire entre le mois de novembre
1986 et le mois de février 1989, cette dernière a assigné
son commissaire aux comptes, M. X..., en responsabilité lui
réclamant le paiement du préjudice subi par elle du fait de ces
détournements ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
162
Attendu que pour écarter la responsabilité de M.
X..., en en ce qui concerne les détournements antérieurs au 5
juin 1987, date du dépôt de son rapport sur les comptes annuels,
l'arrêt retient que le contrôle du commissaire aux comptes s'exerce
a posteriori ;
Attendu, cependant, qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait
relevé que les constatations de l'expert invoquées dans ses
conclusions par la société des Garages Voltaire, avaient
révélé que M. X... s'était montré
négligent dans la réalisation de son programme de travail,
notamment en omettant d'analyser les procédures de contrôle
interne de l'entreprise et qu'elle énonçait que, même si le
commissaire aux comptes n'est tenu qu'à une obligation de moyens, les
éléments soulignés par l'expert permettaient de retenir
que M. X... avait d'autant plus manqué à ses obligations de soin,
d'attention et de diligence pendant la période des détournements
litigieux, que la qualité des sécurités mises en place par
la société était manifestement insuffisante et lui faisait
courir des risques particuliers, et alors que la mission du commissaire aux
comptes n'est pas limitée à un contrôle a posteriori, mais
qu'il est investi d'une mission permanente de contrôle, la cour d'appel a
violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt
rendu le 31 juillet 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.
Publication : Bulletin 1999 IV N° 179 p.
153
Décision attaquée : Cour d'appel
de Reims, du 31 juillet 1996
Titrages et résumés : SOCIETE
ANONYME - Commissaire aux comptes - Responsabilité - Faute -
Négligence dans l'analyse des procédures de contrôle
interne - Manquement à ses obligations de soins, d'attention et de
diligence - Recherche nécessaire . La mission du commissaire aux comptes
n'est pas limitée à un contrôle a posteriori ; celui-ci est
investi d'une mission permanente de contrôle. Viole les articles 228, 229
et 234 de la loi du 24 juillet 1966 la cour d'appel qui, pour écarter la
responsabilité du commissaire aux comptes pour des détournements
antérieurs au dépôt de son rapport, retient que le
contrôle de celui-ci s'exerce a posteriori, alors qu'elle avait
relevé qu'il s'était montré négligent dans
l'analyse des procédures de contrôle interne de la
société et que, tenu d'une obligation de moyens, il avait
manqué à ses obligations de soins, d'attention et de
diligence.
Textes appliqués :
· Loi 66-537 1966-07-24 art. 228, art. 229, art. 234
La responsabilité du commissaire aux
comptes
163
Annexe 3
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 15 Janvier 2002
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : OBLIGATION DE MOYEN
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 15 janvier 2002
N° de pourvoi: 98-21831
Non publié au bulletin
Rejet
Président : M. DUMAS,
président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. X...,
En cassation d'un arrêt rendu le 3 septembre 1998 par la
cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre civile, section B), au profit :
1 / de la société des Etablissements Ribatti
Sauveur, dont le siège est Quartier de Mauran, BP
La responsabilité du commissaire aux
comptes
164
21, 13131 Berre l'Etang,
2 / de M. Bernard de Saint-Rapt, demeurant Résidence
«Saint-X...», 90, avenue Gabriel Péri, 84300 Cavaillon, pris
en qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession
de la société des Etablissements Ribatti Sauveur,
3 / de la Société marseillaise de crédit,
société anonyme, dont le siège est 75, rue Paradis, 13000
Marseille,
4 / du Crédit lyonnais, société anonyme,
dont le siège est 19, boulevard des Italiens, 75002 Paris, avec agence
sis angle avenue de la Libération et avenue du Sylvanes, 13122 Berre
l'Etang,
5 / de la société Larguier, dont le siège
est 64, cours Caernot, 13309 Salon de Provence,
6 / de M. Albert Jaen, demeurant Val Saint-X..., avenue Jules
Ferry, 13100 Aix-en-Provence,
défendeurs à la cassation ;
La société Larguier, défenderesse au
pourvoi principal, a formé un pourvoi provoqué contre le
même arrêt ;
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de
son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent
arrêt ;
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de
son recours, un moyen unique de cassation, également annexé au
présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa
2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 20 novembre
2001, où étaient présents : M. Dumas, président, M.
Métivet, conseiller rapporteur, Mme Garnier, conseiller, Mme Moratille,
greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Métivet, conseiller, les
observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. X...,
de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la
Société marseillaise de crédit, de Me Odent, avocat de la
société Larguier, de la SCP Vier et Barthélémy,
avocat du Crédit lyonnais, de Me Vuitton, avocat de Me de Saint-Rapt,
les conclusions de M. Viricelle, avocat général, et après
en avoir délibéré conformément à la loi ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X...
que sur le pourvoi incident relevé par la société Larguier
;
Met, sur leur demande, hors de cause la Société
marseillaise de crédit et le Crédit lyonnais ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
165
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3
septembre 1998), que la société Etablissements Ribatti Sauveur
(la société), victime de détournements de la part de son
comptable salarié, a assigné son expert-comptable, la
société Larguier, et son commissaire aux comptes, M. X..., en
paiement de dommages-intérêts, leur reprochant des manquements
dans l'accomplissement de leur mission ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses trois
premières branches :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir
condamné à payer une certaine somme au commissaire à
l'exécution du plan de la société alors, selon le moyen
:
1 / que la mission de l'expert consiste à éclairer
le juge sur des questions de fait d'ordre technique à l'exclusion de
toute appréciation juridique ; qu'il appartient dès lors au juge
à qui sont présentées par les parties des critiques contre
les appréciations d'ordre juridique émises par l'expert, d'y
répondre et d'analyser le rapport sans pouvoir se borner à se
référer aux conclusions de l'expert ; que pour
caractériser la faute qui lui était reprochée, la cour
d'appel s'est bornée à retenir que «l'expert a estimé
devoir retenir à la charge de chacune des parties...une insuffisance
quantitative des diligences prévues par les normes concernant
l'appréciation du contrôle interne et des sondages par le
commissaire aux comptes M. X...» ; qu'en statuant de la sorte sans
procéder à une analyse des diligences accomplies par lui, de leur
conformité à celles attendues d'un professionnel normalement
diligent et de leur efficacité au regard des procédés de
dissimulation employés par l'auteur des détournements, la cour
d'appel, qui s'en est purement et simplement remis à
l'appréciation de l'expert, a violé les articles 232 et 238 du
nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'il avait rappelé, dans ses conclusions d'appel,
que l'expert avait relevé la «finesse du traitement du
détournement», ce qui expliquait «leur pérennisation et
la difficulté de les détecter» et il avait en
conséquence soutenu que les détournements ne pouvaient donc pas
être détectés dans le cadre de l'exercice normalement
diligent de sa mission de contrôle des comptes de sorte qu'aucune faute
ne pouvait lui être reprochée ; qu'en s'abstenant de
répondre à ce moyen d'autant plus pertinent qu'il était
fondé sur des observations de l'expert dont le rapport avait
été entériné sans discussion par elle, la cour
d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile
;
3 / que le préjudice constitué par les
détournements commis par un salarié de son client après le
dépôt du rapport du commissaire aux comptes peut être en
relation de causalité avec la faute caractérisée par
l'insuffisance du contrôle des comptes ; qu'il avait soutenu, dans ses
conclusions d'appel, que sa responsabilité ne pouvait être
recherchée que pour des détournements commis à partir du
fait dommageable, soit à compter du dépôt de son rapport ;
qu'en le déclarant responsable de la totalité des
détournements y compris ceux antérieurs au dépôt du
premier rapport, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil
;
Mais attendu, en premier lieu, que l'expert, ayant sans
excéder son rôle, conclu à une insuffisance quantitative
des diligences effectuées par le commissaire aux comptes,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
166
concernant l'appréciation du contrôle interne et
les sondages, la cour d'appel a pu décider, répondant par
là même en les écartant aux conclusions invoquées,
que ces insuffisances avaient contribué, pour partie, à la
réalisation du dommage en ne permettant pas de détecter les
détournements ;
Attendu, en second lieu, que la mission du commissaire aux
comptes n'est pas limitée à un contrôle a posteriori, mais
qu'il est investi d'une mission permanente de contrôle; que la cour
d'appel qui a retenu que le commissaire aux comptes n'avait pas effectué
de contrôles suffisants au regard des normes professionnelles, notamment
en ce qui concerne l'appréciation du contrôle interne de la
société, défaillant selon les constatations de l'expert, a
pu statuer comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé en ses
trois premières branches ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa
première branche :
Attendu que la société Larguier reproche à
l'arrêt de l'avoir déclarée responsable d'une partie du
préjudice subi par la société et de l'avoir
condamnée à payer une certaine somme au commissaire à
l'exécution du plan alors, selon le moyen, que la responsabilité
d'un expert-comptable ne peut être engagée qu'à la
condition que sa faute ait un lien causal avec la survenance du sinistre ; que
dans ses conclusions d'appel elle avait fait valoir que les manquements qui lui
étaient reprochés et qu'elle reconnaissait, à savoir un
défaut d'analyse de procédures et d'organisation administrative
ou de contrôle interne, étaient dénué de lien causal
avec les détournements opérés qui se seraient produits en
toute hypothèse ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce lien causal
entre les manquements invoqués et le dommage subi, ainsi qu'il lui
était demandé, la cour d'appel a privé sa décision
de base légale au regard de l'article 1147 du nouveau Code de
procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que selon le
rapport de l'expert, plusieurs vices des procédures en usage au sein de
la société avaient permis les détournements ; qu'en
retenant à la charge de l'expert comptable une insuffisance de ses
diligences concernant l'analyse des procédures administratives et de
contrôle interne de la société elle a, par là
même, caractérisé l'existence d'un lien de causalité
entre les manquements constatés et la réalisation du dommage et
légalement justifié sa décision ; d'où il suit que
le moyen n'est pas fondé en sa première branche ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa
quatrième branche :
Attendu que M. X... fait le même reproche à
l'arrêt alors, selon le moyen, qu'il avait soutenu, dans ses
écritures d'appel, que la société avait
récupéré indûment la TVA sur les factures
frauduleusement majorées par son comptable et qu'en raison de la
prescription, elle se trouvait à l'abri de toute réclamation
tendant à un remboursement à l'administration fiscale; qu'il en
déduisait que le montant du préjudice devait être
minoré en conséquence ; qu'en
La responsabilité du commissaire aux
comptes
167
énonçant «...que les contestations
émises devant la cour qui ne résultent pas de faits nouvellement
apparus auraient dû être présentées à l'expert
afin qu'il donne un avis technique à la cour», et que les calculs
de l'expert devaient être entérinés «... dès
lors qu'ils ne présentaient aucune anomalie flagrante» la cour
d'appel a violé les articles 232 et 238 du nouveau Code de
procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des pièces de la
procédure, régulièrement produites par les parties, que
l'expert avait répondu aux observations du conseil de M. X... relatif
à la récupération de la TVA par la société
sur les factures frauduleusement majorées ; que la cour d'appel
n'était pas tenue de répondre à la simple affirmation
formulée par M. X... dans ses conclusions d'appel, selon laquelle la
société serait à l'abri de toute réclamation de
l'administration fiscale à ce sujet ; d'où il suit que le moyen
n'est pas fondé en sa quatrième branche ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa
deuxième branche :
Attendu que la société Larguier fait le même
reproche à l'arrêt alors, selon le moyen, qu'il incombe au juge de
se prononcer lui-même sur les éléments de preuve soumis
à son examen même s'ils n'ont pas été
examinés préalablement par l'expert commis ; que pour rejeter son
argumentation développée à l'encontre de
l'évaluation par l'expert des préjudices invoqués par la
société, la cour d'appel a énoncé que les
contestations émises devant elle qui ne résultent pas de faits
nouvellement apparus auraient être présentées à
l'expert; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé
l'article 1353 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'expert a
répondu aux observations du conseil de la société Larguier
concernant l'évaluation du préjudice ; que le moyen, qui
n'indique pas quelle nouvelle contestation aurait été
présentée par la société Larguier dans ses
conclusions d'appel et écartée par le motif critiqué, est
inopérant ;
Et sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa
cinquième branche et le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa
troisième branche, les moyens étant réunis :
Attendu que M. X... et la société Larguier font
encore le même reproche à l'arrêt alors, selon les moyens
que dans leurs conclusions d'appel la société et le commissaire
à l'exécution du plan avaient demandé à la cour
d'appel leur condamnation au paiement des frais divers engagés par la
société par suite des détournements commis par son
comptable salarié à hauteur de la somme de 203 236 francs ;
qu'en fixant néanmoins le montant du préjudice
global en tenant compte d'une somme de 473 716 francs au titre desdits frais,
la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article
4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a énoncé, au
rappel des moyens et prétentions des
La responsabilité du commissaire aux
comptes
168
parties, que la société sollicitait la
condamnation de M. X... et de la société Larguier à lui
payer la somme de 203 236 francs correspondant aux frais engagés par
elle, n'a pas dénaturé les termes du litige ; que la prise en
compte par l'arrêt attaqué, au titre desdits frais, d'une somme de
473 716 francs, excédant ce qui était demandé, n'est
dès lors susceptible de donner ouverture qu'à la requête
prévue aux articles 463 et 464 du nouveau Code de procédure
civile, le recours en cassation se trouvant par là même exclu ;
d'où il suit que les moyens sont irrecevables ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Condamne M. X... et la société Larguier aux
dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
condamne M. X... à payer à M. de Saint-Rapt, ès
qualités, la somme de 1 800 euros, au Crédit lyonnais la somme de
725 euros et à la Société marseillaise de crédit la
somme de 750 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du quinze janvier deux mille deux.
Décision attaquée : cour d'appel
d'Aix-en-Provence (1re chambre civile, section B) du 3 septembre 1998
Titrages et résumés : SOCIETE
ANONYME - Commissaire aux comptes - Mission. SOCIETE ANONYME - Commissaire aux
comptes - Responsabilité - Définition.
Textes appliqués :
· Code civil 1147
La responsabilité du commissaire aux
comptes
169
Annexe 4
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale
2 Juillet 1973
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : OBLIGATION DE RESULTAT
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 2 juillet 1973
N° de pourvoi: 72-12039
Publié au bulletin
REJET
PDT M. MONGUILAN, président
RPR M. PORTEMER, conseiller apporteur
AV.GEN. M. ROBIN, avocat général
Demandeur
AV. MM. LYON-CAEN, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches : attendu
qu'il est reproche a l'arrêt attaque (paris, 28 février 1972)
d'avoir juge Cottet, commissaire aux comptes de la société
anonyme d'exploitation de l'hôtel continental, responsable pour moitie
des conséquences dommageables subies par tripier de loze, administrateur
et salarie de la société, en suite de la déclaration de
nullite du contrat de travail liant celui-ci a la société, et
d'avoir condamne Cottet a payer a trippier de loze diverses indemnités,
aux motifs que Cottet a fait preuve de négligence et s'est montre
imprudent en ne rédigeant pas, au moins a toutes fins, un rapport
La responsabilité du commissaire aux
comptes
170
spécial, article 40, sur le contrat litigieux, et
qu'ainsi il n'a pas apporte dans
l'accomplissement du mandat salarie de commissaire tout le soin
que lui dictaient ses connaissances et son expérience professionnelle,
que, pour évaluer le préjudice subi par trippier de loze, il
convient de retenir la totalité de la période visée par le
contrat de travail litigieux, et que trippier de loze, en ne faisant rien pour
que Cottet donne suite a sa demande de rapport spécial
accompagnée du texte dudit contrat et de la délibération
du conseil d'administration, a concouru par sa propre faute a l'entier dommage
dont il devait réparation a Cottet et qu'il doit donc en supporter la
moitie, alors, selon le pourvoi qu'en méconnaissance des règles
applicables a la responsabilité civile contractuelle et au
contrôle en la matière de la cour de cassation, la cour d'appel
n'a pas recherche si l'omission dans le rapport spécial de Cottet de la
mention du contrat de travail conclu entre la société et trippier
de loze entrainait nécessairement la nullité dudit contrat, ni
si, en l'absence de faute de Cottet, le préjudice subi par trippier de
loze ne se serait pas, malgré tout, réalise, ce qui prive son
arrêt de base légale ; Mais attendu que, tant par motifs propres
que par ceux adoptes des premiers juges, l'arrêt retient au vu des
documents produits, que, contrairement a la prétention de Cottet selon
laquelle il n'était pas nécessaire de faire mention du contrat
litigieux dans le rapport spécial, c'est précisément
l'omission de cette formalité qui a entraine la déclaration de
nullité de ce contrat ;
Qu'ayant par ailleurs relève, contrairement a
l'hypothèse formulée par le dernier grief, la faute de Cottet et
le fait que trippier de loze avait été prive en partie pour cette
raison, comme il vient d'etre dit, de l'intégralité du
bénéfice dudit contrat, la cour d'appel en a déduit les
conséquences juridiques qui s'imposaient ;
Que le moyen est donc sans fondement ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l'arrêt
rendu le 28 février 1972 par la cour d'appel de paris
Publication : bulletin des arrêts cour de
cassation chambre commerciale n. 231 p. 210
Décision attaquée : cour d'appel
paris (chambre 4 ) du 28 février 1972
La responsabilité du commissaire aux
comptes
171
Titrages et résumés : societe
anonyme - commissaire aux comptes - responsabilité - contrat de travail
d'un administrateur - mention dans le rapport special - omission - nullite du
contrat. C'est a bon droit qu'une cour d'appel declare le commissaire aux
comptes d'une societe partiellement responsable du prejudice subi par un
administrateur et salarie du fait de l'annulation de son contrat de travail,
des lors qu'elle retient, au vu des documents produits, que c'est l'omission de
la mention de ce contrat dans le rapport special des commissaires, prevu a
l'article 40 de la loi du 24 juillet 1867, qui a entraine le prononce de la
nullite du contrat et prive ainsi l'interesse de l'integralite du benefice
qu'il en aurait retire.
* societe anonyme - conseil d'administration - conventions
prevues par l'article 40 - contrat de travail passe avec un administrateur. *
contrat de travail - nullite - societe anonyme - contrat de travail d'un
administrateur - mention dans le rapport special du commissaire aux comptes -
omission. * responsabilite civile - faute - commissaire avec comptes - rapport
special - contrat de travail d'un administrateur - mention - omission.
Textes appliqués :
· Code civil 1382
· Code civil 1991
· Loi 1867-07-24 art. 40
La responsabilité du commissaire aux
comptes
172
Annexe 5
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 24 Octobre 2000
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : DOMMAGE MATERIEL
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 24 octobre 2000
N° de pourvoi: 98-10702
Publié au bulletin
Cassation partielle.
Président : M. Dumas .,
président
Rapporteur : M. Métivet., conseiller apporteur
Avocat général : M. Feuillard., avocat
général
Avocats : la SCP Boré, Xavier et Boré, la SCP Le
Bret-Desaché et Laugier., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que des
détournements ayant été commis par M. A..., son comptable
salarié de 1983 à 1990, la société anonyme Z... a
assigné la société Cabinet X..., son commissaire aux
comptes et la société Cabinet Y..., son expert-comptable, en
réparation du préjudice résultant des fautes qu'ils
avaient commises ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
173
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la société Cabinet X... reproche
à l'arrêt d'avoir dit qu'elle n'était pas fondée
à opposer la prescription partielle de la demande en
dommages-intérêts et de l'avoir condamnée à payer
une certaine somme à la société Z... alors, selon le
pourvoi, 1° que les actions en responsabilité professionnelles
contre les commissaires aux comptes se prescrivent par trois ans à
compter du fait dommageable, ou, s'il a été dissimulé, de
sa révélation ; qu'il résulte des termes de l'arrêt
attaqué que M. A... avait détourné
régulièrement chaque année des sommes appartenant à
son employeur depuis 1983 et qu'il falsifiait les comptes qui ont
néanmoins été certifiés par le commissaire aux
comptes, la société Cabinet X... ; que l'arrêt
attaqué qui a constaté que « la société Z...
n'est recevable à rechercher sa responsabilité que concernant ses
diligences postérieures au 20 août 1989 et que seuls les rapports
qu'il a établis le 1er juin 1990 et le 13 juin 1991 peuvent servir de
fondement à l'action engagée à son encontre «, ne
pouvait dès lors, sans violer les articles 235 et 247 de la loi du 24
juillet 1966, la condamner à indemniser la société Z...
des détournements commis avant l'exercice 1989 ; 2° que la faute
consistant pour le commissaire aux comptes à avoir certifié des
comptes falsifiés par un salarié qui avait effectué des
détournements n'est en relation de causalité qu'avec les
détournements ultérieurs qui n'ont pu être
empêchés par suite de l'insuffisance des contrôles ; qu'en
mettant à sa charge le préjudice constitué par la
totalité des détournements, y compris ceux commis la
première année avant l'intervention du commissaire aux comptes,
la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil
;
Mais attendu, d'une part, que le moyen qui repose sur
l'énoncé des constatations qu'aurait faites la cour d'appel,
alors qu'il ne s'agissait que du rappel des moyens des parties est irrecevable
;
Attendu, d'autre part, qu'il résulte de ses propres
écritures d'appel, que la société Cabinet X... a
été désignée en qualité de commissaire aux
comptes de la société Z... le 30 juin 1983 ; qu'en raison de la
mission permanente de contrôle dont est investi le commissaire aux
comptes, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen qui est irrecevable en sa
première branche, n'est pas
La responsabilité du commissaire aux
comptes
174
fondé en la seconde ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt a condamné la
société Cabinet Y... à payer à la
société Z... des dommages-intérêts correspondant au
montant des détournements commis de 1983 à 1990 par le comptable
de la société ;
Attendu, cependant, qu'en statuant ainsi, sans répondre
aux conclusions de la société Cabinet Y... qui soutenait que les
premiers détournements commis en 1983 ne pouvaient avoir un lien de
causalité avec la faute qui lui était reprochée dans sa
vérification de la comptabilité de la société, la
cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a pris en compte,
pour fixer les dommages-intérêts dus par la société
Cabinet Y... à la société Z..., le montant des
détournements commis en 1983 par le comptable salarié de la
société, l'arrêt rendu le 28 janvier 1997, entre les
parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, quant
à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se
trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie
devant la cour d'appel de Lyon.
Publication : Bulletin 2000 IV N° 160 p.
142
Décision attaquée : Cour d'appel
de Grenoble, du 28 janvier 1997
Titrages et résumés : 1°
CASSATION - Moyen - Moyen tiré de constatations - Constatations
n'étant qu'un rappel des moyens - Irrecevabilité.
1° Le moyen qui repose sur l'énoncé des
constatations qu'aurait faites la cour d'appel, alors qu'il ne s'agissait que
du rappel des moyens des parties, est irrecevable.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
175
2° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Applications diverses -
Commissaire aux comptes - Dommage - Réparation - Détournement
antérieur à la certification.
2° En raison de la mission permanente de contrôle
dont est investi le commissaire aux comptes, une cour d'appel a pu mettre
à la charge de celui-ci le préjudice résultant de
détournements commis par un salarié antérieurement
à la certification des comptes.
3° CASSATION - Moyen - Défaut de réponse
à conclusions - Applications diverses - Absence de réponse -
Expert-comptable - Responsabilité - Lien de causalité - Premiers
détournements non décelés - Vérification de
comptabilité.
3° Viole l'article 455 du nouveau Code de procédure
civile la cour d'appel qui condamne un expert-comptable en raison des
détournements commis par le comptable salarié de la
société, sans répondre aux conclusions de
l'expert-comptable qui soutenait que les premiers détournements ne
pouvaient avoir de lien de causalité avec la faute qui lui était
reprochée dans sa vérification de la comptabilité de la
société.
Précédents jurisprudentiels : A
RAPPROCHER : (2°). Chambre commerciale, 1999-10-19, Bulletin 1999, IV,
n° 179, p. 153 (cassation). A RAPPROCHER : (3°). Chambre civile 1,
1990-06-12, Bulletin 1990, I, n° 156, p. 111 (rejet), et l'arrêt
cité.
Textes appliqués :
· nouveau Code de procédure civile 455
La responsabilité du commissaire aux
comptes
176
Annexe 6
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 3 Décembre 2002
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : DOMMAGE MATERIEL
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 3 décembre 2002
N° de pourvoi: 01-00641
Non publié au bulletin
Cassation partielle sans renvoi
Président : M. METIVET conseiller,
président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l?arrêt suivant :
Joint les pourvois n° P 01-00.844 et T 01-00.641 qui
attaquent le même arrêt ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la
société de bourse Meeschaert Rousselle (P 01-00.844) et par la
société Deloitte Touche Tohmatsu, anciennement
dénommée De Bois DieterleT et associés BDA (T 01-00.641)
que sur les pourvois incidents relevés par la société
Bourely répartition, aux droits de laquelle se trouve la
société Comptoir commercial pharmaceutique (la
société CCP) (P 01-00.844 et T 01-00.641) ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
177
Donne acte à M. Jean-Pierre X... de ce qu'il s'est
désisté partiellement de ses pourvois en tant que dirigés
contre la société Bourely répartition et la
société de bourse Meeschaert Rousselle ;
Donne acte à la société de bourse
Meeschaert Rousselle de ce qu'elle s'est désistée partiellement
de son pourvoi en tant que dirigé contre M. X... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y...,
directeur administratif et financier la société Bourely
répartition, aux droits de laquelle se trouve la société
Comptoir commercial pharmaceutique (la société CCP), a
détourné, au moyen de chèques tirés sur les comptes
bancaires de cette société, à son profit, courant 1986,
1987 et début 1988, une certaine somme, en alimentant un compte
personnel ouvert à la société de bourse Meeschaert
Rousselle (la société de bourse) ; que les fonds ainsi
prélevés étaient comptabilisés dans un compte
d'attente de la comptabilité de la société CCP, lequel
n'enregistrait pas d'autres écritures ; que la société CCP
a assigné, d'une part, la société de bourse et, d'autre
part, la société De Bois Dieterle, actuellement
dénommée Deloitte Touche Tohmatsu, son commissaire aux comptes
(le commissaire aux comptes), en paiement de sommes correspondant aux
détournements commis à son préjudice par M. Y... ; que la
cour d'appel a imputé à faute le manque de vigilance de la
société de bourse, à compter d'octobre 1987 seulement,
pour avoir accepté trois chèques d'un montant global de 5
millions de francs, et a retenu la faute du commissaire aux comptes pour ne pas
avoir décelé à partir de cette même date les
dysfonctionnements de la nature de ceux qui avaient permis la
perpétuation des malversations de M. Y... ; qu'elle a condamné la
société de bourse et le commissaire aux comptes in solidum
à payer à la société CCP la première la
somme de deux millions cinq cent mille francs et le second la somme de cinq
millions de francs ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi
principal de la société de bourse :
Attendu que la société de bourse reproche à
l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1 / qu'en retenant tour à tour que,
bénéficiaire des chèques, elle n'était pas tenue de
vérifier la provenance des fonds, que la discordance entre le titulaire
du compte de bourse et le titulaire du compte de banque débité
imposait des mesures de vérifications concrètes et simples, que
jusqu'à un montant de 3 millions de francs, la société de
bourse pouvait accepter les chèques que lui remettait M. Y...
tirés sur le compte de la société CCP mais
qu'au-delà elle aurait dû exiger les justificatifs du consentement
de cette dernière, la cour d'appel a laissé incertain le
fondement de la responsabilité de la société de bourse et
partant de la condamnation prononcée et a privé son arrêt
de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
2 / que le paiement de tous les chèques tirés sur
le compte de la société CCP qui lui ont été remis
par M. Y... était de nature à conforter la société
de bourse dans l'idée selon laquelle la société CCP avait
donné son accord au financement de ces opérations
boursières et excluait que l'acceptation de ces chèques puisse
être considérée comme fautive ; qu'en décidant le
La responsabilité du commissaire aux
comptes
178
contraire la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code
civil ;
Mais attendu qu'en retenant, à partir d'octobre 1987
seulement, la responsabilité de la société de bourse
laquelle aurait dû, compte tenu d'une conjoncture boursière
préoccupante et du nombre de transactions, exiger des justificatifs
quant au consentement de la société CCP aux opérations
boursières ou aux droits de M. Y... sur les fonds ainsi placés,
la cour d'appel a pu décider, en l'état de ces
énonciations et constatations, que la société de bourse
avait, à compter de cette date, manqué de vigilance
caractéristique d'une faute de négligence ayant concouru au
préjudice subi par la société CCP en acceptant, en pleine
période de dépression boursière et en trois jours, trois
chèques d'un montant total de 5 millions de francs qui ont servi
à résorber le solde débiteur du compte personnel de M.
Y... ; que le moyen unique, pris en ses deux branches du pourvoi principal,
n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches,
du pourvoi incident de la société CCP dirigé contre la
société de bourse :
Attendu que la société CCP fait encore le
même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1 / que le professionnel de la finance est tenu d'un devoir de
prudence et de vigilance sur l'ouverture et le fonctionnement d'un compte
ouvert en ses livres ; qu'il résulte de ces constatations de
l'arrêt attaqué que M. Y... a ouvert dans les livres de la
société de bourse Meeschaert Rousselle un compte personnel dans
son intérêt exclusif alimenté uniquement par des
chèques qu'il tirait sur des comptes ouverts au nom de la SA CCP et ce
sans justifier du moindre mandat ; qu'en estimant néanmoins que la
société de bourse n'était responsable que des
conséquences des placements effectuées à partir du mois
d'octobre 1987 par M. Y... et non de toutes les opérations
ostensiblement irrégulières depuis l'ouverture même du
compte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences
légales de ses constatations, violant l'article 1382 du Code civil ;
2 / que la faute de la société de bourse
Meeschaert Rousselle qui a ouvert et laissé fonctionner un compte
personnel de M. Y... dans l'intérêt exclusif de ce dernier avec
des chèques CCP et donc alimenté uniquement avec des abus de
biens sociaux ostensibles, est à l'origine de l'entier préjudice
résultant de ces détournements qui n'auraient pu être
réalisés sans la faute grossière de la
société de bourse ; qu'en décidant le contraire, au regard
du dysfonctionnement interne de la société CCP et de la faute
commise par le commissaire aux comptes de cette dernière, la cour
d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'en retenant et en limitant dans le temps la
responsabilité de la société de bourse, la cour d'appel a
pu statuer comme elle a fait dès lors que les opérations
précédemment effectuées par M. Y... n'étaient pas
de nature à attirer son attention ; que le moyen unique, pris en ses
deux premières branches, du pourvoi incident n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal du commissaire aux
comptes :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
179
Attendu que le commissaire aux comptes fait aussi le même
reproche à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le
moyen, que le commissaire aux comptes a pour mission permanente, à
l'exclusion de toute immixtion dans la gestion, de vérifier les valeurs
et les documents comptables de la société ; que le contrôle
des pièces comptables en cours d'exercice, avant l'établissement
des comptes annuels ne s'impose que dans les cas où des contrôles
précédents ont montré des carences de la
société dans la tenue de sa comptabilité ou dans les
procédures de contrôle interne ; que l'arrêt attaqué,
qui relève que la société CCP disposait d'une
trésorerie pléthorique et réalisait chaque année de
très importants bénéfices, a constaté que le
commissaire aux comptes n'était pas tenu de procéder à un
examen des comptes bancaires au cours de l'exercice 1986 ; qu'en
énonçant néanmoins qu'il aurait dû demander
dès le mois de juillet 1987, soit plusieurs mois avant la clôture
de l'exercice, une situation intermédiaire laquelle aurait permis de
déceler les détournements opérés par M. Y... sans
relever l'existence de circonstances particulières justifiant la mise en
oeuvre de ce pouvoir de contrôle du commissaire aux comptes, la cour
d'appel a privé sa décision de base légale au regard de
l'article 228 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le compte d'attente
ouvert dans les livres de la société CCP, compte exceptionnel
destiné à être soldé rapidement qui enregistrait les
sommes détournées par M. Y..., aurait dû, en raison de
l'ancienneté des écritures et de l'importance des sommes
comptabilisées, attirer l'attention du commissaire aux comptes, lequel a
pour mission de contrôler à toute époque de l'année
les comptes sociaux et est investi d'une mission permanente de vérifier
les valeurs et les documents comptables de la société ; qu'il
ajoute qu'une vérification normalement effectuée et notamment la
demande de production d'une situation intermédiaire en cours d'exercice
aurait permis de découvrir les malversations ; que la cour d'appel, qui
en a déduit que le commissaire aux comptes avait manqué à
ses obligations de diligence à compter d'octobre 1987, date à
laquelle les prélèvements se sont multipliés, a
légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas
fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal du commissaire aux
comptes, pris en sa première branche :
Attendu que le commissaire aux comptes fait grief à
l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la
société Bourely répartition une somme de cinq millions de
francs, alors, selon le moyen, que la cour d'appel a constaté que la
perpétuation des placements boursiers a pour cause un dysfonctionnement
interne objectif de la société CCP découlant de la carence
des services comptables sous la direction de M. Y... ;
qu'en refusant néanmoins de tenir compte de cette faute
de la société et d'en déduire une exonération au
moins partielle de la responsabilité du commissaire aux comptes, la cour
d'appel a violé l'article 228 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Mais attendu qu'en retenant que le commissaire aux comptes,
lequel a pour mission de déceler les dysfonctionnements de la nature de
ceux qui ont permis la perpétuation des
La responsabilité du commissaire aux
comptes
180
malversations, ne peut s'en prévaloir pour
s'exonérer partiellement de sa responsabilité, la cour d'appel a
pu statuer comme elle a fait ; que le moyen, pris en sa première
branche, n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal du commissaire aux
comptes, pris en sa seconde branche :
Attendu que le commissaire aux comptes fait grief à
l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la
société Bourely répartition une somme de cinq millions de
francs avec intérêts au taux légal à compter du 13
juin 1988, alors, selon le moyen, qu'il a été assigné
devant les premiers juges à la demande de la société CCP,
pas acte du 25 juillet 1997 ; que seule la société de bourse a
été visée dans l'assignation du 13 juin 1988 ; qu'en
faisant courir les intérêts de la condamnation prononcée
contre la société Deloitte Touche Tohmatsu à compter du 13
juin 1988, la cour d'appel a violé l'article 1153 du Code civil
Mais attendu qu'en fixant à une date autre que celle de
sa décision le point de départ des intérêts, la cour
d'appel n'a fait qu'user de la faculté remise à sa
discrétion par l'article 1153-1 du Code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les quatrième et cinquième branches du pourvoi
incident de la société CCP dirigé contre la
société de bourse et sur les trois branches du moyen unique du
pourvoi incident de la société CCP dirigé contre le
commissaire aux comptes, les moyens étant réunis :
Attendu que la CCP reproche à l'arrêt d'avoir ainsi
statué, alors, selon les moyens :
1 / que les termes du litige sont fixés par les
prétentions respectives des parties ; qu'il résulte tant des
conclusions de CCP que de celles de la société de bourse
Meeschaert Rousselle et encore de celles du commissaire aux comptes que M. Y...
a perdu une somme de 12 894 000 francs provenant des fonds de la
société CCP, le solde créditeur d'un montant de 5 640
101,80 francs du compte de M. Y... ayant déjà été
déduit du montant total des détournements de M. Y...
s'étant élevé à 18 300 000 francs ; qu
en déduisant une deuxième fois du préjudice
subi par la société CCP le solde créditeur du compte de M.
Y... à la société Buisson, la cour d'appel a
dénaturé les termes du litige, violant l'article 4 du nouveau
Code de procédure civile et 1134 du Code civil ;
2 / que celui que se prétend libéré d'une
obligation doit justifier le fait qui a produit l'extinction de son obligation
; qu'en déduisant arbitrairement de l'obligation de la
société de bourse Meeschaert Rousselle à réparer le
préjudice de la société CCP une somme de 638 295,50 francs
au motif que l'issue d'une procédure de saisie arrêt sur salaires
de M. Y... n'était pas justifié, la cour d'appel a
renversé la charge de la preuve, violant l'article 1315,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
181
alinéa 2, du Code civil ;
3 / que les termes du litige sont fixés par les
prétentions respectives des parties ; qu'il résulte tant des
conclusions de la société que des conclusions concordantes de la
société De Bois Dieterle devenue Deloitte Touche Tohmatsu que le
montant des détournements de M. Y... au préjudice de la
société CCP, après récupération
auprès de la société Buisson de la somme de 5 000 000
francs, s'élevait encore à 13 300 000 francs ; qu'en
déduisant le montant de la somme récupérée
auprès de la société Buisson, la cour d'appel a
dénaturé les termes du litige, violant l'article 4 du nouveau
Code de procédure civile et 1134 du Code civil ;
4 / que celui que se prétend libéré d'une
obligation doit justifier le fait qui a produit l'extinction de son obligation
; qu'il résulte des constatations et appréciations de
l'arrêt attaqué que le commissaire aux comptes est responsable des
détournements commis au préjudice de la société CCP
; qu'en déduisant arbitrairement de l'obligation du commissaire aux
comptes à réparer ce préjudice une somme de 638 295,50
francs au motif que l'issue d'une procédure de saisie-arrêt sur
salaires de M. Y... n'était pas justifié, la cour d'appel a
renversé la charge de la preuve, violant l'article 1315, alinéa
2, du Code civil ;
5 / qu'en toute hypothèse, en déduisant
arbitrairement cette somme du préjudice subi par la
société CCP sans constater qu'elle avait effectivement pu
être recouvrer par M. Y..., la cour d'appel a privé de base
légale sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant, dans l'exercice de son pouvoir souverain,
sans dénaturation des écritures des parties et sans inversion de
la charge de la preuve, estimé que le préjudice de la
société CCP engendré par la négligence de la
société de bourse correspondait aux placements faits à
partir du mois d'octobre 1987 minorés du solde transféré
à une autre société de bourse Buisson, des montants
récupérés auprès de M. Y... ainsi que des sommes
saisies par saisie-arrêt, la cour d'appel, qui a fixé le
préjudice global de la société CCP à la somme de
cinq millions de francs, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen, pris en
ses quatrième et cinquième branches du pourvoi incident
dirigé contre la société de bourse, et le moyen unique,
pris en ses trois branches, du pourvoi incident dirigé contre le
commissaire aux comptes ne sont fondés ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche,
du pourvoi incident de la société CCP dirigé contre la
société de bourse :
Vu les articles 1382 et 1202 du Code civil ;
Attendu que pour condamner la société de bourse
à payer la somme de deux millions cinq cent mille francs, l'arrêt,
qui fixe le préjudice global de la société CCP
résultant des fautes conjuguées des deux coauteurs à cinq
millions de francs, minore de moitié la responsabilité de la
société de bourse qui lui incombe au regard de celle du
commissaire aux comptes ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
182
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que chacun des responsables
d'un même dommage doit être condamné à le
réparer en totalité, sans qu'il y ait lieu de tenir compte du
partage de responsabilité auquel il est procédé entre eux
et qui n'affecte pas l'étendue de leurs obligations envers la partie
lésée, la cour d'appel a violé les textes susvisés
;
Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627,
alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, qui permet
à la Cour de Cassation de casser sans renvoi en appliquant la
règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité la
condamnation de la société de bourse à la somme de deux
millions cinq cent mille francs, l'arrêt rendu le 17 octobre 2000, entre
les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société de bourse Meeschaert Rousselle
in solidum avec la société Deloitte Touche Tohmatsu, le
commissaire aux comptes, à payer à la société CCP
la somme de cinq millions de francs avec intérêts au taux
légal à compter du 13 juin 1988 ;
Condamne la société de bourse Meeschaert Rousselle
et la société Deloitte Touche Tohmatsu aux dépens ;
Dit que ceux afférents aux instances devant les juges du
fond seront supportés par la société de bourse Meeschaert
Rousselle et la société Deloitte Touche Tohmatsu ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général
près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis
pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt
partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par M.
le conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en son
audience publique du trois décembre deux mille deux.
Décision attaquée : cour d'appel
d'Aix-en-Provence (8e Chambre C commerciale) du 17 octobre 2000
La responsabilité du commissaire aux
comptes
183
Titrages et résumés : BOURSE DE
VALEURS - Intermédiaire - Contrat de gestion de titres -
Responsabilité - Malversation du dirigeant social du client -
Conjoncture boursière préoccupante - Acceptation de
chèques - Compte d?attente. SOCIETE ANONYME - Commissaire aux comptes -
Responsabilité - Détection de dysfonctionnement.
Textes appliqués :
· Code civil 1147, 1202 et 1382
· Loi 66-537 1966-07-24 art. 228
La responsabilité du commissaire aux
comptes
184
Annexe 7
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 11 Février 2003
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : DOMMAGE CERTAIN
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 11 février 2003
N° de pourvoi: 99-20139
Non publié au bulletin
Rejet
Président : M. DUMAS,
président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 septembre
1999), que le 13 juin 1994, M. X... et la SA KPMG Fiduciaire de France,
commissaires aux comptes de la société anonyme SPI,
société holding des sociétés du groupe
d'édition Y..., ont certifié les comptes de l'exercice clos le 31
décembre 1993 lesquels faisaient apparaître une situation nette
consolidée négative de 23,3 millions de francs ; que, selon
protocole du 10 janvier 1995, les sociétés Editions Albin Michel,
Infomedia et Maxi livres profrance se sont engagées à
procéder, directement ou par l'intermédiaire de la
société Florengeoise de Participation, à l'acquisition
d'actions de la société SPI ou à la souscription d'actions
nouvelles pour détenir à l'issue de ces opérations,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
185
directement ou par l'intermédiaire de leur holding, 75,5
% du capital de la société SPI ; qu'après audit
contradictoire des comptes consolidés de la société SPI et
expertise judiciaire réalisés après la signature du
protocole du 10 janvier 1995, il est apparu que la situation nette de la
société SPI était négative au 31 décembre
1993 de 74,77 millions de francs ; que les sociétés Editions
Albin Michel, Infomedia et Maxi livres profrance et la société en
nom collectif Florengeoise de participation dont elles étaient les
associés ont assigné les commissaires aux comptes en
réparation du préjudice résultant des fautes qu'ils
avaient commises dans la certification des comptes ; que la cour d'appel a
déclaré recevables les actions des sociétés
Editions Albin Michel, Infomedia et Maxi livres profrance, a
déclaré M. X... et la société KPMG Fiduciaire de
France responsables des conséquences financières dommageables
pour ces trois sociétés et la société Florengeoise
de participation résultant de la certification de la situation nette au
31 décembre 1993 de la société SPI et a rejeté la
demande tendant à ce que les sociétés Editions Albin
Michel, Infomedia, Maxi livres profrance et Florengeoise de participation
soient reconnues responsables de ces préjudices et avant dire droit, a
commis un expert pour évaluer le préjudice subi ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que les commissaires aux comptes font grief à
l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes tendant à
l'irrecevabilité de l'action des sociétés Editions Albin
Michel, Infomedia et Maxi livres profrance dirigées à leur
encontre alors, selon le moyen, que sauf exception prévue par la loi,
seules les personnes habilitées à représenter une personne
morale peuvent intenter une action en justice au nom de celle-ci ; qu'en
jugeant recevable l'action des sociétés Editions Albin Michel,
Infomédia et Maxi livres Profrance en ce qu'elle tendait, notamment,
à obtenir réparation du préjudice subi par la
société holding Florengeoise de participation dont elles
étaient les associées, la cour d'appel a violé les
articles 31 et 32 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que les trois
sociétés Editions Albin Michel, Infomedia et Maxi livres
profrance qui ont investi dans la reprise du «groupe» Y... au travers
de la société Florengeoise de participation, transformée
en SNC, ont un intérêt légitime et direct à agir
à l'encontre des commissaires aux comptes responsables, selon elles, du
préjudice qu'elles ont subi dans cette opération tant au travers
de leur société holding que pour leur propre compte et que le
lien de causalité entre l'investissement auquel il a été
procédé au travers de la Société Florengeoise de
participation comme prévu à l'article 2.1 du protocole du 10
janvier 1995 et l'éventuelle faute commise par les commissaires aux
comptes ne peut être valablement contesté par ces derniers ; qu'en
constatant que les trois sociétés demandaient réparation
de leur préjudice consistant dans le surcoût financier et les
pertes que la société Florengeoise de participation et à
travers elle, les trois autres sociétés sont tenues de supporter
à cause d'une opération de reprise non conforme à ce
qu'elles avaient envisagé, la cour d'appel n'a pas méconnu les
dispositions des articles 31 et 32 du Code de procédure civile ; que le
moyen n'est pas fondé en sa première branche ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
186
Attendu que les commissaires aux comptes font grief à
l'arrêt de les avoir condamnés à réparer le
préjudice subi et par le société Florengeoise de
participation et par ses trois associés alors, selon le moyen, que la
société holding Florengeoise de participation, en demandant et en
obtenant la réparation du préjudice qu'elle prétendait
avoir subi du fait de la faute des commissaires aux comptes, faisait
nécessairement disparaître le prétendu préjudice
subi par ces associés du fait de leurs investissements dans cette
société ; qu'en condamnant néanmoins les commissaires aux
comptes à réparer le préjudice subi, et par la
société Florengeoise de participation et par ses trois
associés, la cour d'appel l'a condamné réparer deux fois
le même préjudice et a ainsi violé l'article 1382 du Code
civil et le principe de la réparation intégrale ;
Mais attendu qu'en déclarant les commissaires aux comptes
responsables des conséquences financières dommageables pour les
quatre sociétés résultant de la certification des comptes
au 31 décembre 1993 de la société SPI, la cour d'appel
qui, contrairement à ce qu'il est soutenu, a ordonné une mesure
d'expertise pour déterminer le montant du préjudice subi par les
sociétés n'a pas condamné les commissaires aux comptes
à payer deux fois la même somme, l'une à la
société Florengeoise de participation, l'autre à ses
associés ; que le moyen manque en fait en sa deuxième branche
;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les commissaires aux comptes font encore le
même reproche à l'arrêt alors, selon le moyen, que
l'acquisition des parts d'une société en état de cessation
des paiements imminente est, par nature, extrêmement risquée pour
des repreneurs qui se fondent sur des comptes certifiés datant de plus
d'une année et qui sont assortis de réserves ; qu'en
l'espèce, soit les repreneurs n'avaient pas conscience du risque qu'ils
couraient en rachetant les parts d'une société en état de
cessation des paiements imminente, et en leur qualité de professionnels
du monde des affaires et de l'édition, ils ont commis une faute qui a
concouru, au moins pour partie, à la réalisation de leur
préjudice, soit ils en avaient conscience, et la cour d'appel ne pouvait
pas, alors condamner les commissaires aux comptes à réparer
l'intégralité des conséquences dommageables d'un risque
qu'ils avaient sciemment couru ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a
violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'en retenant que les sociétés
avaient pris des garanties en proportion de la situation négative au 31
décembre 1993 de la société SPI certifiées par les
commissaires aux comptes et que ces prévisions ne se sont
trouvées remises en cause que du fait de l'inexactitude des dits comptes
dûment certifiés, la cour d'appel a pu décider que les
sociétés n'avaient commis aucune faute en se fondant sur le
rapport de certification des comptes lequel demeure un élément
déterminant pour décider, dans l'urgence, d'investir dans une
société en situation financière difficile ; d'où il
suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que les commissaires aux comptes reprochent encore
à l'arrêt d'avoir rejeté leur appel en garantie à
l'encontre des consorts Y... alors, selon le moyen, que si la
société KPMG
La responsabilité du commissaire aux
comptes
187
a certifié les comptes du groupe Y... pour l'exercice
clôturé au 31 décembre 1993, comptes qui
présentaient une situation nette négative de 23,3 millions de
francs alors que celle-ci était en réalité de 74,77
millions de francs, c'est nécessairement que les comptes qui lui ont
été présentés par les consorts Y..., dirigeants du
groupe Y... étaient faux ; qu'en jugeant que ces dirigeants n'avaient
commis aucune faute identifiable envers les commissaires aux comptes, la cour
d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que les consorts Y... n'ont commis
aucune faute à l'égard des commissaires aux comptes auxquels,
connaissant parfaitement en cette qualité les sociétés du
groupe Y..., il appartenait de vérifier les déclarations et
informations données par les dirigeants de ce «groupe» et en
constatant que les commissaires aux comptes avaient disposé de tous les
éléments nécessaires à leur mission, la cour
d'appel a pu statuer comme elle a fait ; d'où il suit que le moyen n'est
pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., la société KPMG fiduciaire de
France aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par M.
Métivet, conseiller le plus ancien qui en a
délibéré, en remplacement du président, en
l'audience publique du onze février deux mille trois.
Décision attaquée : cour d'appel
de Paris (5e chambre, section A) du 8 septembre 1999
Titrages et résumés : SOCIETE
ANONYME - Commissaire aux comptes - Responsabilité - Conditions de sa
recherche et de son fondement.
Textes appliqués :
· Code civil 1147 et 1382
La responsabilité du commissaire aux
comptes
188
Annexe 9
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 19 Octobre 1999
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : PERTE DE CHANCE
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 19 octobre 1999
N° de pourvoi: 97-13446
Publié au bulletin
Rejet.
Président : M. Bézard .,
président
Rapporteur : M. Métivet., conseiller apporteur
Avocat général : Mme Piniot., avocat
général
Avocats : M. Foussard, la SCP Boré et Xavier.,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre
l'arrêt rendu le 30 juin 1994 par la cour d'appel de Paris :
Vu l'article 978 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la société Van der Have France n'a
pas, dans les cinq mois à compter du pourvoi, présenté de
moyen contre l'arrêt du 30 juin 1994 ; qu'il y a lieu de constater la
déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre cet
arrêt ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
189
Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre
l'arrêt rendu le 7 février 1997 par la cour d'appel de Paris :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7
février 1997), que M. X..., exerçant les fonctions de commissaire
aux comptes de la société à responsabilité
limitée Van der Have France (la société), a, dans son
rapport annuel daté du 18 avril 1985, certifié la
régularité et la sincérité des comptes sociaux,
alors que l'un des cogérants, M. Y..., s'était livré
à d'importants détournements ; que ces détournements se
sont poursuivis et n'ont été découverts par la
société qu'à la suite du départ de M. Y... ; que la
société a assigné le commissaire aux comptes pour obtenir
réparation du préjudice subi du fait de la certification fautive
des comptes, ayant permis la poursuite des détournements pour un montant
supplémentaire de 1 350 000 francs ;
Attendu que la société reproche à
l'arrêt d'avoir considéré que son préjudice
résidait dans la perte d'une chance et d'avoir fixé à une
certaine somme la réparation mise à la charge de M. X..., alors,
selon le pourvoi, d'une part, que le juge ne peut écarter le droit
à la réparation d'un préjudice effectivement subi, en
considérant que le préjudice réside dans une perte de
chance, qu'après avoir constaté ou mis en évidence un
aléa qui affecte le lien de causalité entre le fait
générateur de la responsabilité et le préjudice
effectivement subi ; qu'en l'espèce, les juges ne pouvaient donc
cantonner la réparation à une perte de chance qu'après
avoir constaté qu'un aléa affectait le lien de cause à
effet entre la faute imputée au commissaire aux comptes et les
détournements ; qu'en énonçant « qu'un examen
sérieux et conforme aux normes professionnelles « des comptes
« l'eût conduit à formuler toutes réserves «, la
cour d'appel a exclu l'existence d'un aléa justifiant la
réparation sur le terrain de la perte de chance ; qu'ainsi, la cour
d'appel a violé les articles 1137 et 1147 du Code civil ; et alors,
d'autre part, que dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir qu'outre le
préjudice lié aux détournements, elle avait subi un
préjudice pour avoir payé un impôt sur les
sociétés artificiellement majoré ; qu'en s'abstenant de
s'expliquer sur tous les chefs de préjudice, pour n'asseoir sa
décision que sur les détournements, la cour d'appel n'a pas
donné de base légale à sa décision au regard des
articles 1137 et 1147 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que le
commissaire aux comptes avait certifié les comptes de la
société de façon hâtive et fautive, compte tenu
d'une importante écriture de régularisation du compte client,
dont l'anormalité aurait dû attirer son attention, alors qu'un
examen sérieux, conforme aux normes professionnelles, l'aurait conduit
à formuler toutes réserves ; que dès lors qu'il ne
résultait pas de ces appréciations et énonciations que les
réserves auxquelles auraient dû conduire les diligences omises
auraient, à elles seules, empêché la poursuite des
détournements, la cour d'appel a pu décider que le
préjudice subi par la société consistait dans la perte
d'une chance de mettre fin à ces détournements dans les meilleurs
délais ;
Attendu, d'autre part, qu'en retenant que le préjudice de
la société résultant de la perte d'une chance est distinct
de celui résultant des détournements eux-mêmes et que le
commissaire aux
La responsabilité du commissaire aux
comptes
190
comptes ne saurait être tenu de rembourser les sommes
détournées ou le coût global qui en est
résulté pour la société, la cour d'appel a
légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de
ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
CONSTATE la DECHEANCE du pourvoi en ce qu'il est dirigé
contre l'arrêt du 30 juin 1994
;
REJETTE le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 7
février 1997.
Publication : Bulletin 1999 IV N° 176 p.
149
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, du 7 février 1997
Titrages et résumés : 1°
RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Applications diverses - Commissaire aux comptes
- Lien de causalité - Diligences - Omission - Détournement -
Poursuite - Imputabilité partielle - Perte d'une chance.
1° Statuant sur l'action en responsabilité
engagée par une société contre le commissaire aux comptes
qui n'avait pas signalé d'importants détournements commis par
l'un des cogérants, justifie légalement sa décision de
retenir au préjudice de la société la perte de la chance
de mettre fin aux détournements dans les meilleurs délais la cour
d'appel qui retient qu'un examen sérieux, conforme aux normes
professionnelles, aurait conduit le commissaire aux comptes à formuler
toutes réserves, dès lors qu'il ne résulte pas de ses
constatations et appréciations que les réserves auxquelles
auraient dû aboutir les diligences omises auraient à elles seules
empêché la poursuite des détournements.
2° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Applications diverses -
Commissaire aux comptes - Dommage - Réparation - Perte d'une chance -
Réparation du coût global (non).
2° Ayant retenu que le préjudice de la
société résultant de la perte d'une chance est distinct de
celui résultant des détournements eux-mêmes, la cour
d'appel justifie légalement sa décision selon laquelle le
commissaire aux comptes ne saurait être tenu de rembourser les sommes
détournées ou le coût global qui en est
résulté pour la société.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
191
Annexe 10
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale
18 Mai 2010
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : PERTE DE CHANCE
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 18 mai 2010
N° de pourvoi: 09-14281
Non publié au bulletin
Cassation partielle
Mme Favre (président),
président
SCP Gadiou et Chevallier, SCP Nicolaý, de Lanouvelle
et Hannotin, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
La responsabilité du commissaire aux
comptes
192
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt
suivant : Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. et Mme X..., M. et
Mme de Y..., M. Z... et la société Tesdef, tous actionnaires de
la société Aquitaine de Menuiserie (la société
ADM), soutenant que M. A..., commissaire aux comptes de la
société, avait commis des fautes dans l'accomplissement de sa
mission et que ces fautes avaient, d'une part, conduit la société
Tesdef et M. Z... à souscrire à une augmentation de capital
réalisée en pure perte, d'autre part, entraîné pour
eux une perte de chance de vendre la société ADM au prix qu'ils
pouvaient espérer, l'ont assigné en responsabilité ;
Sur le moyen unique, pris en ses quatrième et
cinquième branches :
Attendu que ces griefs ne seraient pas de nature à
permettre l'admission du pourvoi ; Mais sur le moyen unique, pris en sa
première branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de
dommages-intérêts relative au préjudice invoqué par
la société Tesdef et M. Z... résultant de la souscription
par eux à l'augmentation de capital de la société ADM,
réalisée en pure perte, l'arrêt retient d'abord qu'il
résulte des éléments du dossier que l'échec de la
société est du au désengagement brutal de sa banque, puis,
que la société Tesdef et M. Z... n'ont pas mis la juridiction en
mesure d'apprécier si la réaction de la banque peut être en
rapport avec la faute du commissaire aux comptes et qu'ils n'ont en
conséquence pas démontré que l'échec de la
société était lié aux fautes du commissaire aux
comptes ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait
précédemment relevé que M. A... avait commis
différentes fautes dans l'accomplissement de sa mission en certifiant
des comptes sans vérifications sérieuses de la situation
réelle de l'entreprise et que par son défaut d'information, il
n'avait pas mis la société Tesdef et M. Z... en mesure
d'apprécier cette situation et de prendre une décision
éclairée sur leur participation à une augmentation de
capital, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences
légales de ses constatations a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les
autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a infirmé le
jugement du 17 octobre 2006, rendu par le tribunal de grande instance de La
Roche-sur-Yon en ce qu'il a dit que M. A... a par ses fautes engagé sa
responsabilité envers la société Tesdef et M. Z... et
condamné in solidum M. A... et la compagnie d'assurances Covea Risks
à verser, au titre du préjudice résultant de
l'augmentation de capital consentie en pure perte, la somme de 358 455 euros
à la société Tesdef et 144 032 euros à M. Z...,
l'arrêt rendu le 4 mars 2009 par la cour d'appel de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
193
Poitiers ; remet, en conséquence sur ces points, la cause
et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel
de Poitiers autrement composée ;
Condamne M. A... et la compagnie Covéa Risks aux
dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les
condamne à payer aux demandeurs la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général
près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis
pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt
partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux
Conseils pour M. et Mme X..., M. et Mme de Y..., la société
Tesdef et M. Z....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR
débouté Monsieur et Madame Jean-Luc X..., Monsieur et Madame
Philippe de Y..., Monsieur Z... et la Société TESDEF de
l'ensemble de leurs demandes dirigées contre Monsieur A... et son
assureur, la Cie COVEA RISKS ; AUX MOTIFS QUE sur la demande relative à
l'apport en numéraires, cet apport a été
décidé au temps où les comptes de 2001 avaient
été certifiés par le commissaire aux comptes, Monsieur
A... ; que dans son rapport du 14 juin 2002, Monsieur A..., pour l'exercice
clos le 31 décembre 2001, a écrit « j'ai effectué mon
audit selon les normes de la profession, ces normes requièrent la mise
en oeuvre des diligences permettant d'obtenir l'assurance raisonnable que les
comptes annuels ne comportent pas d'anomalies significatives. Un audit consiste
à examiner par sondage les éléments probants justifiant
les données contenues dans ces comptes. Il consiste également
à apprécier les principes comptabilisés suivis et les
estimations significatives retenues par l'arrêté des comptes et
apprécier leur présentation d'ensemble. J'estime que mes
contrôles fournissent une base raisonnable à l'opinion
exprimée ci-après. Je certifie que les comptes annuels sont
réguliers et sincères et donnent une image fidèle du
résultat des opérations de l'exercice écoulé ainsi
que de la structure financière et du patrimoine de la
société en fin de l'exercice ... je n'ai pas d'observations
à formuler sur la sincérité et la concordance avec les
comptes annuels des informations données dans le rapport de gestion du
conseil d'administration et dans les documents adressés aux actionnaires
sur la situation financière et les comptes annuels » ; or des
anomalies figuraient dans ces comptes ; qu'ainsi, au compte « fournisseurs
», des règlements étaient mentionnés pour un montant
de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
194
103. 563 euros selon l'audit qui a été
réalisé suivant rapport de la Société FIDEA le 26
mai 2004 sans justificatif dont un montant de 29. 399, 61 euros au nom de
FREZOULS, cabinet d'avocats et après ajustement restant pour une somme
de 19. 252 euros ; qu'aucune question n'a été posée par le
commissaire aux comptes sur les raisons du paiement de ces honoraires et sur
l'existence de litiges nécessitant des provisions ; qu'au titre de
l'impôt sur les sociétés, il était mentionné
des émissions de chèques ; qu'il s'est avéré qu'un
certain nombre de chèques ont été émis sans
justificatif, certains au bénéfice de Monsieur B... ; qu'un
simple contrôle avec le montant réel de l'impôt aurait
permis de relever les anomalies qui se sont poursuivies sur plusieurs
années, puisque déjà le 15 octobre 1999 un chèque
de 46. 875 francs avait été encaissé par Monsieur B... ;
que Monsieur A... n'a pas contesté qu'il n'avait pas circularisé
les fournisseurs ; que dans sa note de contrôle du 10 juin 2002, il a
écrit « la circularisation n'est pas adaptée, en 1999-2000
aucun des clients circularisés n'avaient (sic) répondu. Nous
procéderons par apurement » ; que Monsieur A... aurait dû au
moins informer les dirigeants de la société des
difficultés qu'ils rencontraient dans la réalisation de sa
mission, ce qu'il n'a pas fait et en tout cas il devait formuler des
réserves ; qu'il n'avait reçu aucune mission concernant la Sarl
ADMCO, filiale de la société ADM, mais il n'a
procédé à aucun rapprochement entre les comptes des deux
sociétés, ce qui lui aurait permis de constater au titre des
charges de la première et des produits de la seconde un écart au
compte de bilan pour 2001 de 69. 778, 52 euros (audit FIDEA) ; que Monsieur
A... n'a fait aucune remarque sur le « rajeunissement du compte clients
» ; qu'il n'a émis aucune critique de la pratique de Monsieur B...
qui annulait des situations pour en réémettre de nouvelles en fin
d'année ; que pour contester les résultats de l'audit, Monsieur
A... se borne à faire valoir que le rapport est suspect au motif que
l'un des signataires est l'un des associés fondateurs de la
Société ADM et que les Sociétés ADM et ADMC - en
réalité ADMCO-ont fait l'objet d'un contrôle fiscal qui n'a
entraîné aucun redressement ; mais que Monsieur A... ne formule
aucune critique de fond sur le rapport qui remettrait en cause le travail qui a
été réalisé et n'apporte aucune preuve contraire
aux conclusions qui ont été faites ; que Monsieur A... a donc
commis des fautes dans l'accomplissement de sa mission en certifiant les
comptes sans vérifications sérieuses qui auraient mis à
jour la réelle situation de la société ; que par son
défaut d'information, il n'a pas mis la Sarl TESDEF et Monsieur Z... en
mesure d'apprécier cette situation et de prendre une décision
éclairée sur une participation à une augmentation de
capital ; mais qu'il appartient à la Sarl TESDEF et à Monsieur
Z... d'établir que ce manque d'information leur a causé un
préjudice ; qu'ils invoquent l'échec de la société
ADM ; qu'une procédure de prévention des difficultés des
entreprises a été initiée le 13 octobre 2003 et un
La responsabilité du commissaire aux
comptes
195
mandataire ad hoc a été désigné par
le Tribunal de Commerce de Bordeaux aux fins « d'étudier les
possibilités de redressement de la société et assister
l'entreprise dans l'élaboration et la mise en place des mesures de
redressement qui pourraient s'imposer » ; que le rapport a
été déposé le 26 novembre 2003 ; que le mandataire
a constaté qu'en 2002 la Société ADM qui n'avait connu
jusque là aucun souci de trésorerie s'est trouvée
confrontée à des problèmes de financement du besoin de
fonds de roulement auxquels il a été remédié par un
apport des actionnaires à concurrence de 300. 000 € et par deux
crédits de restructuration de 150. 000 € chacun mis en place par le
Crédit Lyonnais et la Fortis Banque, que la phase de consolidation des
fonds permanents se trouve alors engagée et concourt à un
équilibre de croissance ; qu'il ajoute que « singulièrement
alors que l'on aurait pu s'attendre à une participation contributive des
partenaires financiers basée sur la confiance et la transparence,
ceux-ci et principalement le Crédit Lyonnais, puis plus tard la BPSO et
la BTP, adoptent une position plus restrictive et manifestent le désir
de se désengager en réduisant les concours à cours terme
de manière conséquente, les accompagnant de mesures
contraignantes. C'est ainsi que le Crédit Lyonnais a, en juillet 2003,
alors que l'entreprise dispose d'un carnet de commandes de l'ordre de 6, 8
à 7 M euros de qualité exceptionnelle, réduit de
moitié sa ligne de financement des créances clients qu'elle
consentait jusque là faisant passer de 600. 000 à 300. 000 euros
ce concours et complète cette réduction par une notification du
solde des créances immobilisées ; que si certains
problèmes exigent des analyses et des solutions inédites, on ne
peut qu'être frappés par les conséquences de la
décision prise par le banquier principal de la société ADM
car la perfusion brutalement supprimée a conduit
irrémédiablement l'entreprise à de graves
difficultés de trésorerie ... dès lors il est
irréaliste et pratiquement impossible à l'entreprise dans la
situation financière qui est la sienne de réduire ses encours ...
sans détruire l'équilibre dans lequel elle se trouvait, maintenu
de manière courant grâce au soutien coopératif de la
banque. Les moyens financiers n'étant pas adaptés à sa
politique d'expansion de bas de bilan la Société ADM a
été très vite fragilisée par cette limitation des
concours et a été pratiquement acculée à traiter
les problèmes au quotidien » ; qu'il précisait que ses
appréciations sur la santé financière étaient
« significatives d'une situation financière saine dès 2002
» ; que le 1er avril 2004, Monsieur de Y..., président du conseil
d'administration de la Société ADM, procédait à une
déclaration de cessation des paiements ; qu'il invoquait à
l'appui les difficultés financières de la société
en raison de la rupture de concours des banques et d'une absence de
rentabilité ; qu'aux temps du rapport du mandataire et de la
déclaration de paiement les anomalies et dysfonctionnements
négligés par le commissaire aux comptes n'étaient pas
encore révélés puisqu'ils le seront par l'audit de la
La responsabilité du commissaire aux
comptes
196
Société FIDEA dans son rapport du 26 mai 2004 ;
que la société ADM se présentait dans une meilleure
situation apparente qu'elle n'était réellement ; que la Sarl
TESDEF et Monsieur Z... n'établissent par aucun moyen que la banque
aurait réduit sa participation en raison d'anomalies qu'elle aurait
été amenée à constater ; qu'ils ne
démontrent pas non plus que l'absence d'irrégularités
comptables aurait pu pallier les effets du retrait de la banque et auraient pu
permettre à la société d'éviter un
dépôt de bilan ; qu'ils ne justifient pas que les fautes du
commissaire aux comptes aient été à l'origine du manque de
trésorerie et qu'ils ne produisent aucune étude
circonstanciée sur la situation telle qu'elle aurait dû être
sans les dysfonctionnements et sur leurs répercussions sur l'état
financier de la société ; qu'ils ne mettent pas la juridiction en
position d'apprécier si la réaction de la banque peut être
en rapport avec les fautes du commissaire aux comptes ; qu'ils ne rapportent
donc pas la preuve que les fautes commises par le commissaire aux comptes ont
facilité l'échec de la société et qu'il
n'appartient pas à la juridiction de pallier la carence des parties dans
l'administration de la preuve ; que faute de lien de causalité entre ces
fautes et le préjudice invoqué, les demandes au titre de l'apport
de la Société TESDEF et Monsieur Z... doivent être
rejetées ;
ALORS QUE, D'UNE PART, la Cour d'appel a expressément
relevé que Monsieur A..., ès-qualités de commissaire aux
comptes de la Société ADM, a commis différentes fautes
dans l'accomplissement de sa mission en certifiant des comptes sans
vérifications sérieuses de la situation réelle de
l'entreprise (arrêt, p. 6, 4ème paragraphe) ; qu'elle a encore
retenu que par son défaut d'information, Monsieur A... n'a pas mis la
Société TESDEF et Monsieur Z... en mesure d'apprécier
cette situation et de prendre une décision éclairée sur
une participation à une augmentation de capital (arrêt, p. 6,
4ème paragraphe) ; qu'en relevant, pour les débouter de leurs
demandes, qu'ils n'établissent pas le lien de causalité entre les
fautes du commissaire aux comptes et le préjudice résultant de la
souscription à une augmentation de capital qui s'est
avérée ruineuse, la Cour d'appel, qui n'a manifestement pas
tiré les conséquences légales de ses propres
constatations, a violé l'article 1382 du code civil ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, la Cour d'appel a également
relevé que l'augmentation de capital avait été
décidée au vu de la certification des comptes de l'année
2001 opérée sans réserve par Monsieur A..., commissaire
aux comptes de la Société ADM (arrêt, p. 5, 4ème
paragraphe) ;
qu'en relevant, pour faire échec à la demande des
exposants, que le préjudice résultant de la souscription à
une augmentation de capital qui s'est avérée désastreuse
est sans lien avec le
La responsabilité du commissaire aux
comptes
197
comportement fautif de Monsieur A... qui a certifié les
comptes de la Société ADM sans vérification
sérieuse de sa situation réelle, la Cour d'appel, qui n'a pas
tiré les conséquences légales de ses propres constatation,
a derechef violé l'article 1382 du code civil ;
ALORS QUE, DE TROSIEME PART, en l'état des constatations
susvisées, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y
était pourtant dûment invitée (conclusions
récapitulatives d'appel des exposants, p. 28 et s.) si les
associés de la Société ADM n'auraient pas refuser de
souscrire à une augmentation de capital si Monsieur A...,
exerçant pleinement son contrôle, avait refusé de certifier
les comptes de l'année 2001, la Cour d'appel a privé sa
décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du code
civil ;
ALORS QUE, DE QUATRIEME PART, en ne recherchant pas davantage,
cependant qu'elle y était invitée (conclusions
récapitulatives d'appel des exposants, p. 28 et s.), si les
associés n'auraient pas pu prendre, en temps utile, les mesures
nécessaires au redressement de la Société ADM si le
commissaire aux comptes avait refusé de certifier les comptes de
l'année 2001, la Cour d'appel a derechef privé sa décision
de toute base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ET AUX MOTIFS QUE sur la vente des actions de la
Société ADM envisagée dès 2001 puisque c'est
à cette date qu'un mandat de vente a été donné pour
un prix de l'ordre de trois millions d'euros, ainsi qu'il a été
dit plus haut, la situation de 2001 que Monsieur A... a présentée
n'était pas exacte ; que les errements du commissaire aux comptes ont
perduré en 2002 et 2003 ; que la note de contrôle datée du
10 juin 2002 est succincte ; que selon la mention manuscrite figurant en haut
de page, elle ne parait concerner que l'exercice 2001, alors qu'elle a
été établie quelques jours avant l'assemblée
générale portant augmentation du capital social de la
Société ADM et il n'est produit aucune autre note de
contrôle en vue de cette assemblée ; que des chèques ont
été déclarés comme ayant été
émis au bénéfice du Trésor Public et d'un avocat
sans que le commissaire aux comptes ne vérifie les justificatifs ; que
Monsieur A... n'a procédé à aucune vérification des
comptes de l'exercice 2002 mais il n'a pas non plus effectué de
vérification et la société d'audit FIDEA a constaté
qu'il existait des écarts importants et des incohérences entre
les facturations et l'évaluation des encours, que n'étaient pas
justifiées d'une part les factures au titre du compte des fournisseurs
et d'autre part des créances au titre du compte clients ; que même
en retenant que Monsieur B... aurait pu commettre des malversations, Monsieur
A... ne peut pas en être tenu responsable et l'action pénale
engagée contre Monsieur B... est sans incidence sur les fautes
reprochées à Monsieur A... qui avait une mission de
contrôle, aucun sursis à statuer du fait de la situation
pénale de Monsieur B... n'a à être prononcé,
étant précisé que la décision de sursis à
statuer
La responsabilité du commissaire aux
comptes
198
étant soumise à une appréciation et pouvant
ne pas être prononcée la demande est recevable devant la Cour ;
qu'ainsi, quel qu'ait été le comportement de Monsieur B...,
Monsieur A... a manqué à son obligation de contrôle
permanent ; qu'il a laissé les associés dans l'ignorance des
incohérences et des anomalies qu'il aurait dû constater sans
même avoir à faire des recherches approfondies ; que pour
s'exonérer de toute responsabilité, Monsieur A... invoque en vain
les fautes qui auraient été commises par les associés ;
qu'ainsi il met en cause Monsieur de Y... qui ne se serait pas aperçu de
l'augmentation des charges d'assurance alors qu'il est assureur ; mais que les
chiffres réels n'ont été mis à jour que par l'audit
réalisé en 2004 alors qu'ils auraient dû être
vérifiés par le commissaire aux comptes ; qu'il est
également fait grief à Monsieur de Y... de ne pas s'être
rendu compte que la prestation de service à la Société
ADMCO, filiale de ADM, n'avait pas été comptabilisée pour
un montant de 383. 000 € ; mais que cette vérification incombait au
commissaire aux comptes et il n'était pas de l'intérêt des
associés de procéder à une augmentation fictive des
résultats ; qu'il incombait à Monsieur A... de vérifier
les travaux en cours et de contrôler les chiffres présentés
par Monsieur B... sans qu'aucune tâche de cet ordre incombe aux
associés ; qu'il n'est pas reproché à Monsieur A... une
responsabilité dans les détournements par des émissions de
chèques falsifiés mais un défaut de contrôle de ces
paiements, il ne peut donc invoquer à ce titre la faute de la banque ou
d'un dirigeant de la société ; qu'en définitive, les
carences totales de Monsieur A... dans sa mission de contrôle permanent
n'ont pas permis aux associés de connaître la réelle
situation de la Société ADM ; qu'il leur appartient
d'établir que le manquement de Monsieur A... à ses obligations
leur a fait perdre une chance de vendre la société ; que si entre
juillet 2002 et janvier 2003 le Crédit Lyonnais a reçu cinq
acquéreurs potentiellement intéressés, aucun
élément du dossier ne vient démontrer que leur
renonciation à établir ou à poursuivre les
négociations d'achat aurait eu un lien quelconque avec les agissements
ou plutôt avec le manque de diligence du commissaire aux comptes dans
l'accomplissement de sa mission ; que les dossiers dont la communication
était demandée par des acquéreurs potentiels entre
février 2002 et juin 2003 ne pouvaient faire état que de la
situation connue à l'époque soit à un moment où les
dysfonctionnements n'apparaissaient pas ; que le candidat Monsieur C... qui a
renoncé à la négociation d'un protocole d'accord en
septembre 2003 ne pouvait se fonder que sur la situation financière de
la Société ADM telle qu'elle apparaissait après la rupture
de crédit du Crédit Lyonnais et à sa suite les autres
banques ; que les associés TESDEF-BAGUR ne peuvent donc pas imputer
l'échec de la cession de leurs parts sociales au profit de Monsieur C...
en septembre 2003 aux fautes commises par Monsieur A... puisque ces fautes ne
seront connues qu'en 2004 et que le
La responsabilité du commissaire aux
comptes
199
mandataire ad hoc mentionnait dans son rapport que les
indicateurs d'alertes faisaient apparaître une situation saine sans grand
risque particulier ; que la renonciation de Monsieur C... ne peut pas avoir
été causée par des faits connus ultérieurement ;
que les associés TESDEF-BAGUR ne rapportent pas la preuve d'un lien de
causalité entre les fautes commises par Monsieur A... et la perte qu'ils
auraient subie et ce pour des motifs identiques à ceux concernant
l'apport en numéraires ;
ALORS, ENFIN, QUE la Cour d'appel a constaté qu'au titre
de l'exercice 2001, Monsieur A... a laissé les associés dans
l'ignorance des incohérences et des anomalies qu'il aurait dû
constater sans même avoir à faire des recherches approfondies
(arrêt, p. 8, 2ème paragraphe) et qu'au titre de l'année
2002, il n'avait fait aucune vérification (arrêt, p. 7,
6ème paragraphe) ; qu'en se bornant à relever que la renonciation
de Monsieur C..., cessionnaire potentiel des actions de la
Société ADM, n'a pu avoir été causée par les
manquements de Monsieur A... révélés ultérieurement
sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions
récapitulatives, p. 35 et s.), si la certification fautive des comptes
de l'exercice 2001 par Monsieur A..., associée à l'absence de
toute vérification au titre de l'année 2002, n'avaient pas fait
perdre aux associés de la Société ADM une chance de mettre
un terme au plus tôt aux malversations de Monsieur B... et, partant, de
vendre leurs actions dans les meilleures conditions financières
possibles, la Cour d'appel a derechef privé sa décision de toute
base légale au regard de l'article 1382 du code civil.
Décision attaquée : Cour d'appel
de Poitiers du 4 mars 2009
La responsabilité du commissaire aux
comptes
200
Annexe 11
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale
2 Juillet 1996
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : LE DOMMAGE NE DOIT PAS ETRE
REPARE
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 2 juillet 1996
N° de pourvoi: 94-18096
Non publié au bulletin
Rejet
Président : M. BEZARD,
président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Didier, Claude, Marie Y...,
demeurant ...,
En cassation d'un arrêt rendu le 13 mai 1994 par la cour
d'appel de Paris (25e chambre, section B), au profit :
1°/ de la société Média PA, dont le
siège est ...,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
201
2°/ de B... Eliane Celle, veuve Forêt, prise tant en
son nom personnel qu'en sa qualité d'administratrice légale de
ses enfants mineurs, demeurant ... Longnes,
3°/ de Mme Danielle A..., demeurant ...,
4°/ de Mme Sylvie D..., demeurant ...,
5°/ de M. Gérard C..., demeurant Les
Héliotropes, ...,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux
moyens de cassation annexés au présent arrêt;
LA COUR, en l'audience publique du 21 mai 1996, où
étaient présents : M. Bézard, président, M.
Poullain, conseiller rapporteur, MM. Nicot, Vigneron, Leclercq, Dumas, Gomez,
Léonnet, Canivet, conseillers, Mme Geerssen, M. Huglo, Mme Mouillard,
conseillers référendaires, Mme Piniot, avocat
général, Mme Moratille, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Poullain, les observations de
Me Bertrand, avocat de M. Y..., de la SCP Boré et Xavier, avocat de M.
C..., de Me Odent, avocat de la société Média PA et de Mme
X..., veuve Forêt, les conclusions de Mme Piniot, avocat
général, et après en avoir délibéré
conformément à la loi;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 mai
1994), que par acte du 23 janvier 1986, la société Média
PA, Mme veuve Z..., agissant pour elle-même et en qualité
d'administrateur de ses quatre enfants mineurs, Mme E... et Mme A... (les
cédants) ont cédé à M. Y... 220 des 250 parts de la
société COFIPAR, laquelle était propriétaire de
près de 80 % des actions de la société ARCO; que les
cédants avaient consenti une garantie de passif sur la base des comptes
arrêtés au 31 août 1985 et certifiés par le
commissaire aux comptes; que les comptes de la société ARCO se
sont révélés inexacts et que M. Y... a assigné les
cédants et le commissaire aux comptes pour obtenir l'annulation de la
cession et être indemnisé du préjudice subi;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, et le second
moyen, réunis :
Attendu que M. Y... fait grief au jugement d'avoir rejeté
ces demandes, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le cessionnaire de parts
sociales ne commet pas d'imprudence en se fiant au bilan qui lui est
présenté certifié sincère par le commissaire aux
comptes, professionnel dont le rôle légal est
précisément d'effectuer les vérifications
nécessaires; qu'en l'absence de toute faute rendant inexcusable l'erreur
dans laquelle il avait été volontairement induit, la cour d'appel
ne pouvait rejeter sa demande sans violer l'article 1116 du Code civil; alors,
d'autre part, que la cour d'appel admet expressément, pour
écarter la responsabilité du
La responsabilité du commissaire aux
comptes
202
commissaire aux comptes, «que l'analyse du compte clients
en août 1985 ne pouvait permettre de déceler des anomalies, sinon
l'existence de nombreux avoirs après la clôture de l'exercice; que
ces avoirs avaient été établis dans le plus grand secret,
sans que l'expert comptable n'en soit informé en temps utile» ;
qu'en le déboutant de son action en lui reprochant de ne
pas avoir effectué des vérifications dont elle constate ainsi
elle-même que, même pour un professionnel, elles ne pouvaient
aboutir à la découverte des anomalies du bilan, la cour d'appel
n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres
constatations, en violation des articles 1116 et 1382 du Code civil; alors, en
outre, que même lorsqu'elles ne déterminent pas le consentement de
l'acheteur, les manoeuvres commises par le vendeur constituent des fautes
engageant sa responsabilité civile; qu'en le déboutant non
seulement de son action en nullité mais encore de sa demande de
dommages-intérêts, la cour d'appel a violé l'article 1382
du Code civil; et, alors, enfin, que dans ses conclusions d'appel, il faisait
valoir «qu'il est inadmissible qu'un commissaire aux comptes certifie des
comptes sans réserve s'il estime que la comptabilité était
mal tenue et que les informations nécessaires n'ont pas
été données, qu'il doit au contraire faire preuve de plus
de vigilance» et reprenait les constatations de l'expert ayant
relevé que les difficultés rencontrées par le commissaire
aux comptes «auraient pu l'amener à être plus vigilant»,
«que M. C... n'a pas vu le problème de la préfacturation
d'ARCO qui est un problème majeur sur les comptes au 31 décembre
1985, (qu')il aurait dû le voir s'il était
intervenu de façon plus approfondie sur les ventes et le
poste clients», et que «M. C... n'a pas remarqué l'importance
des avoirs de septembre à décembre 1985 et a ainsi
certifié des comptes qui étaient notablement erronés,
induisant en erreur M. Y... sur la valeur exacte de la
société»; qu'en laissant sans réponse ces conclusions
propres à démontrer la faute d'imprudence et la négligence
du commissaire aux comptes qui s'était abstenu de procéder
à des vérifications que les difficultés auxquelles il
s'était heurté rendaient d'autant plus nécessaires, la
cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de
l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;
Mais attendu que, tant par motifs propres qu'adoptés,
l'arrêt relève, tout d'abord, que M. Y..., homme d'affaires averti
qui ne pouvait se méprendre sur la situation financière de la
société ARCO, était, en réalité, très
intéressé par l'acquisition de l'usine dont cette
société était propriétaire, ensuite, que les
cédants, acceptant de garantir l'actif surévalué, ont
réduit «par compensation» de 1 300 000 francs le montant de
leurs demandes au titre des paiements restant dûs; qu'ayant, au vu de ces
constatations, retenu que la remise d'un bilan comportant une
surévaluation de l'actif n'avait pas déterminé le
consentement de M. Y... et fait apparaître que le préjudice subi
par M. Y... n'avait consisté qu'en l'acceptation d'un prix excessif au
regard du bilan de référence, et avait été
réparé par la renonciation des cédants à percevoir
cette part du prix, la cour d'appel, par ces seuls motifs, a pu statuer comme
elle a fait;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être
accueillis ;
Sur les demandes présentées au titre de l'article
700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que la société Média PA et Mme
veuve Z..., d'une part, et M. C..., d'autre part, sollicitent l'allocation
d'une somme sur le fondement de ce texte;
Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir ces demandes ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
203
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y..., envers les défendeurs, aux
dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt;
Rejette les demandes formées par la société
Média PA et par Mme veuve Z..., ainsi que par M. C... sur le fondement
de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par M.
le président en son audience publique du deux juillet mil neuf cent
quatre-vingt-seize.
Décision attaquée : cour d'appel
de Paris (25e chambre, section B) du 13 mai 1994
La responsabilité du commissaire aux
comptes
204
Annexe 12
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 4 Novembre 2008
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : L'ETABLISSEMENT DU LIEN DE
CAUSALITE
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 4 novembre 2008
N° de pourvoi: 07-10152
Non publié au bulletin
Rejet
Mme Favre (président),
président
SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Nicolaý, de
Lanouvelle, Hannotin, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt
suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la
société Cabinet Yves et Philippe Coullien que sur le pourvoi
provoqué relevé par la société Cabinet Maurice ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 16
novembre 2006), que des détournements ayant été commis par
son comptable salarié, Mme Y..., la société Fonderies
d'Abilly (la société) a assigné son commissaire aux
comptes, la société Cabinet Maurice et son expert-comptable, la
société Cabinet Yves et Philippe Coullien (la
société Cabinet Coullien), en réparation de son
La responsabilité du commissaire aux
comptes
205
préjudice résultant de ces détournements
;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que la société Cabinet Yves et Philippe
Coullien fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande
formée par la société à son encontre alors, selon
le moyen :
1 / que le juge doit motiver sa décision et ne peut donc
statuer par voie d'affirmation péremptoire ; qu'en affirmant qu'il
résultait des «dossiers de travail» produits par le cabinet
Coullien que celui-ci avait souscrit à une mission de surveillance
impliquant un contrôle sur pièces des comptes annuels, sans
préciser de quelle pièce précise un tel constat se serait
évincé, ce alors que le cabinet Coullien n'a produit aucune
pièce intitulée «dossier de travail», la cour d'appel a
violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2 / que la cour d'appel a relevé qu'un «examen
rapide du compte 413 «effets en portefeuille» pour l'exercice du 1er
juin 1998 au 31 mai 1999», avait révélé un ensemble
de circonstances, tenant à la position substantiellement et
«durablement» créditrice de ce compte, à l'ampleur des
mouvements, et à l'anormalité de la régularisation dudit
compte par deux virements globaux à la fin de l'exercice, circonstances
qui, selon le juge du fond, auraient dû entraîner des
investigations complémentaires susceptibles de révéler la
fraude ou d'intimider l'employée indélicate ; qu'il ne
résulte pas de telles constatations que les investigations
complémentaires auxquelles auraient pu conduire de tels constats,
à l'issue de l'exercice susvisé, auraient été de
nature à prévenir les détournements litigieux qui, selon
les constatations mêmes de la cour d'appel, ont débuté en
1993 pour s'achever à la fin de l'exercice s'achevant le 31 mai 1999 ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien
de causalité entre le manquement relevé à l'encontre du
cabinet Coullien et le préjudice subi par la société
Fonderies d'Abilly né des détournements commis par son comptable,
de 1993 à la fin de l'exercice s'achevant le 31 mai 1999, privant ainsi
sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code
civil ;
3 / qu'en estimant que le cabinet Coullien reconnaissait dans
ses écritures avoir eu
l'obligation de contrôler «tout au long de
l'année» le compte 413 «effets à recevoir», la
cour d'appel a dénaturé par addition lesdites écritures et
violé l'article 4 du code de procédure civile ;
4 / qu'à supposer même que l'expert-comptable ait
eu l'obligation de contrôler « tout au long de l'année»
le compte «effet à recevoir», la cour d'appel, qui a
uniquement procédé à «l'examen rapide» de ce
compte pour l'exercice du 1er juin 1998 au 31 mai 1999», pour en
déduire un manquement de l'expert comptable à ses obligations, a
derechef privé sa décision de base légale au regard de
l'article 1147 du code civil en condamnant ce dernier à verser à
la société Fonderies d'Abilly la somme, en principal, de 61 720
euros au titre du préjudice subsistant au 31 mai 2003, sans
préciser quel avait été le montant exact des
détournements commis au cours de l'exercice du 1er juin 1998 au 31 mai
1999 ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
206
Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte des
conclusions de la société Cabinet Coullien que la pièce
n°1 du bordereau des pièces communiquées par celle-ci
correspondait à la déclaration de sinistre du 21 décembre
2000 à son assureur, dans laquelle elle rappelait le travail qu'elle
réalisait au sein de la société et que son dossier de
travail était communiqué au commissaire aux comptes; que la cour
d'appel, qui a procédé à l'analyse de cette pièce
pour préciser les diligences que l'expert-comptable s'était
lui-même fixées, n'encourt pas le grief du moyen ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant constaté que la
société Cabinet Coullien reconnaissait que sa mission comportait
un devoir général de conseil et d'alerte à condition
qu'elle soit en mesure de relever des anomalies flagrantes, et que le solde du
compte 413 «effets à recevoir» devait correspondre tout au
long de l'année, et en fin d'exercice, à l'ensemble des effets de
commerce en portefeuille reçus des clients et non encore arrivés
à échéance, l'arrêt retient que la
société Cabinet Coullien s'est contentée d'un état
manuscrit établi par Mme Y... donnant, globalement par
échéance ultérieure, la répartition des effets
à recevoir à la clôture de chaque exercice et ne s'est
livrée qu'à ce contrôle purement formel ; qu'il retient
encore, après un examen du compte 413 «effets en portefeuille»
pour l'exercice du 1er juin 1998 au 31 mai 1999, que l'existence de ce compte
créditeur constitue une présomption d'irrégularité
de la comptabilité, d'un tel compte ne pouvant sortir plus qu'il n'est
entré, et que le caractère insolite de la position
substantiellement et durablement créditrice du compte, l'ampleur des
mouvements, et l'anormalité de la régularisation par deux
virements globaux, auraient dû entraîner des investigations
complémentaires susceptibles de révéler la fraude ou
d'intimider l'employée indélicate, qui avait
déclaré, au cours de l'enquête de police, que le compte
litigieux ne faisait l'objet d'aucune vérification particulière ;
qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour
d'appel qui ne s'est pas bornée à déduire les manquements
de l'expert-comptable au cours de la période de son intervention dans la
société du seul examen du compte «effets à
recevoir» pour la période du 1er juin 1998 au 31 mai 1999 et qui a
caractérisé l'existence d'un lien de causalité entre les
manquements constatés et le préjudice subi par la
société dont elle a souverainement apprécié
l'étendue, a, sans dénaturer les conclusions, légalement
justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de
ses branches ;
Et sur le moyen unique du pourvoi provoqué :
Attendu que la société Cabinet Maurice fait grief
à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la
société une certaine somme à titre de
dommages-intérêts alors, selon le moyen :
1 / que le commissaire aux comptes n'est pas tenu de s'assurer
de l'exactitude des comptes et ne commet de faute que lorsqu'il n'effectue pas
les investigations inhérentes à sa mission ; qu'en affirmant que
le cabinet Maurice avait commis une faute au simple motif que le solde du
compte «effets à recevoir» représentait environ 10 % du
chiffre d'affaires de l'exercice et près de 9 % du total du bilan, sans
préciser en quoi cela aurait révélé une
incohérence des comptes, et en quoi le commissaire aux comptes aurait
omis d'effectuer des investigations inhérentes à sa mission, ce
alors que le cabinet Maurice faisait valoir, qu'il était
régulièrement
La responsabilité du commissaire aux
comptes
207
procédé à un rapprochement bancaire qui
n'avait jamais révélé d'incohérence, la cour
d'appel a privé sa décision de base légale au regard des
articles 1382 du code civil et L. 225-241 du code de commerce ;
2°! que le commissaire aux comptes n'est pas tenu de
s'assurer de l'exactitude des comptes et ne commet de faute que lorsqu'il
n'effectue pas les investigations inhérentes à sa mission ; qu'en
considérant que le cabinet Maurice avait commis une faute au simple
motif que la technique de contrôle invoquée par la constatation de
l'apurement du compte «effets à recevoir» grâce à
la vérification de la comptabilisation de ces valeurs par les banques de
l'entreprise s'était avérée illusoire, la cour d'appel a
privé sa décision de base légale regard des articles 1382
du code civil et L. 225-241 du code de commerce ;
3 / que le cabinet Maurice faisait valoir que Mme Y... avait
comptabilisé dans le compte 413, beaucoup plus de sommes qu'il n'aurait
dû y en avoir réellement, afin de ne pas avoir à
établir une liste nominative et chiffrée de ce compte ; qu'en
retenant qu'il aurait suffit au cabinet Maurice d'appliquer les recommandations
de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes sur l'observation
physique des actifs, selon lesquelles «le contrôle physique des
effets à recevoir est un moyen rapide de vérifier leur
réalité et aura lieu à la clôture de l'exercice,
souvent en même temps que l'inventaire physique des stocks», suivi
par «le rapprochement des effets remis à l'escompte avec les
confirmations reçues des banques», sans répondre à ce
moyen opérant dès lors que les dites recommandations
prévoient en outre que si les effets sont nombreux, le commissaire aux
comptes travaille par sondage à partir de la liste établie par
l'entreprise, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de
procédure civile ;
4 ! qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y avait
été invitée, si la faute de la société
Fonderies d'Abilly, qui s'était abstenue d'exercer tout contrôle
sur l'activité de Mme Y... et avait induit en erreur le commissaire aux
comptes sur les procédures de contrôle interne de la
société, n'avait pas, au regard du lien de causalité,
absorbé celle retenue à l'encontre du commissaire aux comptes
puisque celle-ci n'aurait pu être commise en l'absence de
celle-là, la cour d'appel a privé sa décision de base
légale au regard des articles 1382 du code civil et L. 225241 du code de
commerce ;
5 ! qu'à supposer que le cabinet Maurice ait commis une
faute en n'exerçant pas un contrôle physique des effets à
recevoir, il demeure que, selon les constatations même de l'arrêt,
ce contrôle devait, selon les recommandations de la Compagnie nationale
des commissaires aux comptes, avoir lieu à la clôture de
l'exercice ; qu'il en résulterait, la cour d'appel ayant
considéré que la responsabilité du commissaire aux comptes
ne pouvait être engagée que pour la période allant du 1er
juin 1997 au 31 décembre 1999, que le cabinet Maurice ne pouvait
être tenu de réparer le préjudice né des
détournements antérieurs au 31 décembre 1997 ; que,
dès lors, en condamnant le cabinet Maurice à verser une somme de
61 720 euros au titre du préjudice subsistant au 31 mai 2003, sans
préciser si ce préjudice subsistant correspondait aux
détournements opérés du 1er janvier 1998 au 31
décembre 1999, et à quelle hauteur, la cour d'appel a
privé sa décision de base légale au regard des articles
1382 du code civil et L. 225241 du code de commerce ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
208
6 / qu'en condamnant le cabinet Maurice à verser une
somme de 61 720 euros au titre du préjudice subsistant au 31 mai 2003,
sans préciser si ce préjudice subsistant correspondait aux
détournements opérés du 1er juin 1997 au 31
décembre 1999, et à quelle hauteur, la cour d'appel a
privé sa décision de base légale au regard des articles
1382 du code civil et L. 225241 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu qu'ayant énoncé que
la mission du commissaire aux comptes n'est pas limitée à un
contrôle a posteriori, dès lors que celui-ci est investi d'une
mission permanente de contrôle, l'arrêt retient que le solde du
compte «effets à recevoir» qui s'élève notamment
à 1 970 856,26 francs (300 455,06 euros) au 31 mai 1999, alors que,
compte tenu des détournements, il n'aurait dû se chiffrer
qu'à 54 480 euros, représente environ 10 % du chiffre d'affaires
de l'exercice et près de 9 % du total du bilan, ce qui aurait dû
inciter le commissaire aux comptes à se livrer à une
vérification effective du compte au lieu de se laisser orienter par la
comptable et d'entériner les chiffres qui lui étaient
présentés, que le compte «effets à recevoir»
n'est pas un simple compte de passage mais représente un actif au
même titre que les stocks et qu'en application de l'article L. 123-12 du
code de commerce, toute personne ayant la qualité de commerçant
doit contrôler par inventaire, au moins une fois tous les douze mois,
l'existence et la valeur des éléments actifs et passifs du
patrimoine de l'entreprise ; qu'il relève encore que le commissaire aux
comptes relatait dans sa lettre de fin de mission du 16 octobre 1998 qu'un
associé du cabinet s'était déplacé dans
l'entreprise le 29 mai 1998 afin «d'examiner les procédures de
l'inventaire physique de l'exercice», sans apparemment avoir
vérifié l'encours des effets de commerce encore détenus
par la société et s'être fait communiquer
ultérieurement les bordereaux des banques à l'encaissement ou
à l'escompte, la circularisation de quelques clients n'ayant pas
porté sur la fraction des créances clients déjà
réglée par des effets de commerce ; qu'il retient enfin que la
technique de contrôle invoquée par la constatation de l'apurement
du compte «effets à recevoir» grâce à la
vérification de la comptabilisation de ces valeurs par les banques de
l'entreprise apparaît particulièrement illusoire dans la mesure
où, à lire le dénouement du compte au 31 mai 1999
annoté par le commissaire aux comptes, les remises à l'escompte
ultérieures sont largement supérieures au montant des effets
à cette date ; qu'en l'état de ces constatations et
appréciations dont il résulte que la société
Cabinet Maurice, investie d'une mission permanente de contrôle, n'avait
pas procédé à des vérifications sérieuses
qui l'auraient mise à même de déceler la fraude, la cour
d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument
omise, visée à la quatrième branche et ainsi
caractérisé l'existence d'un lien de causalité entre la
négligence du commissaire aux comptes dans l'exercice de sa mission de
contrôle et le préjudice subi par la société dont
elle a souverainement apprécié le montant, a, abstraction faite
des motifs surabondants critiqués par la troisième branche,
légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen qui ne peut être
accueilli en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le
surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
209
Fait masse des dépens et les met par moitié, d'une
part à la charge de la société Cabinet Yves et Philippe
Coullien et, d'autre part, à la charge de la société
Cabinet Maurice ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les
demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du quatre novembre deux mille
huit.
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Orléans du 16 novembre 2006
La responsabilité du commissaire aux
comptes
210
Annexe 13
Arrêt de la Cour de Cassation Française :
Chambre Commerciale 14 Décembre 2004
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : LE DEFAUT DU LIEN DE
CAUSALITE
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 14 décembre 2004
N° de pourvoi: 00-20287
Non publié au bulletin
Rejet
Président : M. TRICOT,
président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Aix-en Provence, 9
juin 2000), que M. Philippe X..., président du conseil d'administration
de la société Vectral, s'est engagé, par un protocole
d'accord signé le 18 janvier 1994, à céder avec certains
autres actionnaires, membres de sa famille, à M. Bernard Y... les
actions qu'ils détenaient dans la société Vectral ; que ce
protocole précisait notamment que les dividendes acquis sur les
résultats de la période du 1er janvier au 31 décembre 1993
resteraient acquis au vendeur ; que lors d'une assemblée
générale, tenue entre la signature du protocole et la
réalisation de la cession, les actionnaires de la
société
La responsabilité du commissaire aux
comptes
211
Vectral ont approuvé la distribution de dividendes pour
un certain montant ; que postérieurement à la cession, M. Y... et
la société Pulsar, co-acquéreurs des actions de la
société Vectral, estimant que celle-ci présentait des
irrégularités relatives aux documents sociaux, ainsi qu'au regard
des dispositions légales et réglementaires et considérant
que les parties n'étaient pas d'accord sur la chose ni sur le prix, ont
assigné les consorts Z... pour les faire condamner, notamment, au
remboursement de dividendes répartis après la promesse de
cession, ainsi que du montant de l'emprunt contracté pour
procéder à l'acquisition des actions, contre restitution de
celles-ci ; qu'ils ont attrait à la procédure, la
société de commissariat aux comptes A & T Audit, dont ils ont
demandé la condamnation à des dommages-intérêts pour
les fautes commises dans l'accomplissement de sa mission de commissaire aux
comptes de la société Vectral ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... et la société Pulsar font
grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes tendant
à faire constater la nullité des assemblées
générales des 2 septembre 1992, 23 juin 1993 et 7 septembre 1994,
ainsi que le défaut de rapport de gestion aux mêmes
assemblées générales, alors, selon le moyen :
1 / qu'ils demandaient à la cour d'appel de constater la
nullité des assemblées générales des 2 septembre
1992, 23 juin 1993 et 7 septembre 1994 en raison de leur
contrariété aux dispositions d'ordre public de la loi du 24
juillet 1966 ; qu'ils en déduisaient non seulement que les dividendes
distribués aux consorts X... avaient été
irrégulièrement votés, mais encore que ces nullités
caractérisaient la violation par les cédants des engagements
souscrits dans le protocole d'accord du 18 janvier 1994 et l'acte de garantie
d'actif et de passif du 31 mars 1994, garantissant que les documents sociaux
avaient été tenus conformément aux dispositions
légales et réglementaires en vigueur et que lesdites
nullités étaient d'une gravité telle qu'elles devaient
nécessairement entraîner la nullité de la cession d'actions
elle-même ; qu'en déclarant cependant, pour refuser de les
examiner, que les moyens invoqués par M. Y... et la
société Pulsar pour démontrer la nullité des
assemblées générales litigieuses n'avaient pour objet que
de critiquer la distribution de dividendes génératrice selon eux
d'une augmentation frauduleuse du prix de cession des actions, la cour d'appel
a dénaturé ces conclusions en violation de l'article 4 du nouveau
Code de procédure civile ;
2 / qu'aucune disposition n'impose que le demandeur à
l'action soit actionnaire de la société à la date de
l'acte ou la délibération dont il poursuit l'annulation ; qu'en
se fondant dès lors sur le motif erroné que M. Y... et la
société Pulsar n'étaient pas eux-mêmes actionnaires
de la société Vectral en 1992, 1993 et 1994, pour les
débouter de leur action en annulation des assemblées
générales en cause, la cour d'appel a violé les articles
360, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966, devenu l'article L. 235-1
du Code de commerce, ensemble l'article 31 du nouveau Code de procédure
civile ;
3 / que M. Y... et la société Pulsar soutenaient
qu'ils justifiaient d'un intérêt légitime à agir
dès lors que les nullités affectant les
délibérations litigieuses étaient d'ordre public par
l'effet de la loi ; qu'ils faisaient notamment valoir que les
délibérations des 2 septembre 1992 et 7
La responsabilité du commissaire aux
comptes
212
avril 1994 ne comportaient ni rapport général ni
rapport spécial du commissaire aux comptes, ce qui entraînait leur
nullité de plein droit au regard des articles 157, alinéa 2, et
173, alinéa 1, de la loi du 24 juillet 1966 ; que dès lors, en se
bornant pour refuser d'examiner les moyens de nullités invoqués,
à affirmer de manière péremptoire que
l'intérêt à agir des exposants n'était pas
démontré, sans répondre à ces conclusions
précisément de nature à établir leur
intérêt à agir, la cour d'appel a violé l'article
455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ainsi que le soutient la première branche
du moyen, la demande de constat de la nullité des assemblées
générales litigieuses visait à faire constater que ces
nullités étaient d'une telle gravité qu'elles devaient
entraîner la nullité de la cession des parts ; que l'arrêt
retient, par un motif non critiqué, que postérieurement à
la cession des actions, la société Vectral ayant, pendant
plusieurs années, continué son activité, M. Y... ne peut
plus prétendre avoir été trompé sur les
qualités de ces titres, ce dont il se déduit que quelle que soit
la nature ou la gravité des vices allégués, affectant les
assemblées générales précédant la cession,
ceux-ci n'ont pas mis la société dans l'impossibilité
d'exploiter son activité et n'ont donc pas affecté les
qualités substantielles des actions ; qu'il en résulte que le
moyen est inopérant ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. Y... et la société Pulsar font
grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes tendant
à faire constater que la société Vectral n'était
pas en état d'être cédée et à faire annuler
en conséquence le protocole d'accord du 18 janvier 1994, les ordres de
mouvement pour 1 125 actions nominatives intervenus le 31 mars 1994 et l'acte
de garantie d'actif et de passif de la même date, alors, selon le moyen
:
1 / que dans leurs conclusions d'appel, M. Y... et la
société Pulsar avaient soutenu que la cession d'actions
litigieuse était entachée de nullité pour avoir
été réalisée par les consorts X... en violation de
l'article 13 des statuts de la société Vectral subordonnant
formellement toute cession d'actions à des tiers à une
procédure d'agrément préalable dont les modalités
étaient strictement déterminées ;
Qu'ils offraient en preuve une lettre de la
société A & T Audit, commissaire aux comptes de la
société Vectral, du 2 mai 1995 faisant état de ce qu'aucun
conseil d'administration n'avait été réuni afin
d'agréer les nouveaux actionnaires ; que dès lors en omettant de
répondre à ce moyen la cour d'appel a violé l'article 455
du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'ils faisaient valoir qu'en raison de défaut
d'agrément préalable exigé par les statuts de la
société Vectral, l'inscription en compte du transfert d'actions
réalisé le 31 mars 1994 devait être annulé ;
Qu'en délaissant également ce moyen, la cour
d'appel a de nouveau violé l'article 455 du nouveau Code de
procédure civile ;
3 / que M. Y... et la société Pulsar soutenaient
expressément, qu'à supposer même que l'agrément
eût été accordé par le conseil d'administration de
la société Vectral, il ne pouvait
La responsabilité du commissaire aux
comptes
213
produire aucun effet en raison de l'inexistence, à
compter du 23 juin 1993, de tout organe d'administration et de direction
valablement nommé ; qu'ils observaient à cet égard qu'en
violation de l'article 90 de la loi du 24 juillet 1966, les mandats des
administrateurs statutairement désignés pour une durée de
trois ans venant à expiration après le troisième exercice
social, le 31 décembre 1992, n'avaient pas été
renouvelés lors de l'assemblée générale ordinaire
d'approbation des comptes du 23 juin 1993 ; qu'en négligeant pourtant de
s'en expliquer comme l'y invitaient pourtant les conclusions, la cour d'appel a
violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que seuls la société ou les
actionnaires dont l'agrément est requis pour autoriser une cession
d'actions peuvent invoquer la nullité de la cession qui pourrait
résulter du non-respect ou de l'irrégularité de cet
agrément ; que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre
les parties dans le détail de leur argumentation, a pu statuer comme
elle a fait sans avoir à répondre aux conclusions de M. Y... et
de la société Pulsar sur ce point ; que le moyen n'est pas
fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. Y... et la société Pulsar font
grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande de condamnation
solidaire des consorts Z... à leur verser la somme de 300 000 francs
à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que
les administrateurs sont responsables individuellement ou solidairement, selon
le cas, envers la société ou envers les tiers, des violations des
statuts ; qu'en l'espèce M. Y... et la société Pulsar
soutenaient que les consorts X... avaient engagé leur
responsabilité à leur égard en violant la clause
statutaire d'agrément en cas de cession d'action à des tiers,
avec les conséquences dommageables en résultant quant à
l'inopposabilité pour eux de se prévaloir à l'égard
desdits tiers de leur qualité d'actionnaires
;
qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pourtant
de nature à démontrer le bien-fondé de l'action en
responsabilité à l'encontre des cédants, la cour d'appel a
violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que M. Y... et la société Pulsar ont
seulement fait valoir devant la cour d'appel, d'un côté, que le
non-respect d'une clause imposant l'agrément en cas de cession d'actions
à des tiers, comme toute violation des statuts, expose les dirigeants
sociaux à une action en responsabilité et, d'un autre
côté, que la cour d'appel ne pourra que prononcer l'annulation des
diverses inscriptions relatives aux titres cédés ; que la cour
d'appel qui, ainsi qu'il ressort de la réponse au moyen
précédent, n'avait pas à prononcer l'annulation des
inscriptions de cession de titres, n'était pas tenue de suivre les
parties dans le détail de leur argumentation et n'avait pas à
répondre à ces conclusions ; que le moyen ne peut être
accueilli ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que M. Y... et la société Pulsar font
grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur action
en responsabilité dirigée à l'encontre de la
société A & T Audit, commissaire aux comptes de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
214
la société Vectral lors de la cession litigieuse,
alors, selon le moyen :
1 / que les commissaire aux comptes sont responsables à
l'égard des tiers des conséquences dommageables des fautes et
négligences par eux commises dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'en
l'espèce M. Y... et la société Pulsar faisaient valoir que
la société A & T Audit avait gravement manqué à
sa mission en établissant le rapport spécial et le rapport
général pour l'exercice 1991, le 15 septembre 1992, soit
après que l'assemblée générale annuelle du 2
septembre 1992 eût approuvé les comptes ; qu'en se bornant
dès lors à énoncer que les fautes imputées à
la société A & T Audit n'étaient pas suffisamment
caractérisées, sans s'expliquer sur ce moyen de nature à
démontrer le comportement fautif du commissaire aux comptes, la cour
d'appel a privé sa décision de base légale au regard de
l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article 234 de la loi du 24 juillet
1966, devenu l'article L. 225-241 du Code de commerce ;
2 / que M. Y... et la société Pulsar soutenaient
également que la société A & T Audit avait commis une
faute de nature à engager la responsabilité en certifiant
dès le 16 février 1994 les comptes de l'exercice clos le 31
décembre 1993, alors même que ces comptes n'avaient pas encore
été arrêtés par le conseil d'administration de la
société Vectral ; qu'en s'abstenant d'expliquer en quoi pareil
manquement ne caractérisait pas suffisamment la faute du commissaire aux
comptes, la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base
légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article 234
de la loi du 24 juillet 1966, devenu l'article L. 225-241 du Code de commerce
;
3 / que M. Y... et la société Pulsar soutenaient
que les ordres de mouvement d'actions faisant suite à la cession
litigieuse avaient été enregistrés sur une
comptabilité-titre manifestement irrégulière, le registre
des mouvements de titres n'ayant été ni signé ni
paraphé, en violation de l'article 13 des statuts de la
société Vectral ; qu'ils imputaient à faute à la
société A & T Audit l'absence de toute vérification ou
contrôle sur ce point ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme ils l'y
invitaient, si cette carence ne caractérisait pas une faute du
commissaire aux comptes, la cour d'appel a privé sa décision de
base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, ensemble
l'article 234 de la loi du 24 juillet 1966, devenu l'article L. 225-241 du Code
de commerce ;
Mais attendu qu'ainsi qu'il a été dit en
réponse au premier moyen, l'arrêt retient, par un motif non
critiqué, que, postérieurement à la cession des actions la
société Vectral ayant, pendant plusieurs années,
continué son activité, M. Y... ne peut plus prétendre
avoir été trompé sur les qualités de ces titres, ce
dont il se déduit que quelles que soient la nature ou la gravité
des vices allégués affectant les assemblées
générales précédant la cession, ou les
irrégularités du registre des mouvements de titres, la
société n'a pas été mise dans
l'impossibilité d'exploiter son activité et que les
qualités substantielles des actions n'ont pas été
affectées ; que l'arrêt relève aussi, par d'autres motifs,
d'un côté, que le protocole d'accord accepté par M. Y...
stipulait expressément que les dividendes acquis pour l'exercice
précédent la cession resteraient acquis au vendeur et, d'un autre
côté que M. Y... ne rapportait pas la preuve de ce que des
dividendes fictifs auraient été distribués ; qu'il en
résulte que M. Y... et la société Pulsar ne pouvaient
prétendre avoir subi de préjudice du fait de la certification des
comptes de l'exercice clos le 31 décembre 1993 ; d'où il suit que
le moyen n'est pas fondé ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
215
Et sur le cinquième moyen :
Attendu que M. Y... et la société Pulsar font
grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande reconventionnelle en
dommages-intérêts formée à leur encontre par la
société A & T Audit et de les avoir condamnés en
conséquence au paiement de la somme de 10 000 francs à ce titre,
alors, selon le moyen, qu'en application de l'article 624 du nouveau Code de
procédure civile, la cassation à intervenir sur le
troisième moyen du chef du dispositif déboutant les exposants de
leur action en responsabilité à l'encontre de la
société A & T Audit pour manquements à sa mission de
commissaire aux comptes, entraînera, par voie de conséquence,
celle du chef de dispositif condamnant les exposants à lui verser des
dommages-intérêts en réparation du préjudice
causé par l'abus de droit d'agir commis selon la cour d'appel à
l'égard de la société A & T Audit, en raison de fautes
du commissaire aux comptes suffisant à engager se responsabilité
professionnelle, qui se trouve dans sa dépendance nécessaire ;
Mais attendu que le quatrième moyen formé contre
l'arrêt ayant été rejeté, le moyen qui invoque la
cassation par voie de conséquence est inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... et la société Pulsar aux
dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
condamne M. Y... et la société Pulsar à payer aux consorts
Z... la somme globale de 1 800 euros et à la société A
& T Audit la somme de 1 800 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du quatorze décembre deux
mille quatre.
Décision attaquée : cour d'appel
d'Aix-en-Provence (8e Chambre B commerciale) du 9 juin 2000
La responsabilité du commissaire aux
comptes
216
Annexe 14
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 14 Décembre 2004
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : LA FAUTE DE LA VICTIME
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 14 décembre 2004
N° de pourvoi: 01-02511
Non publié au bulletin
Rejet
Président : M. TRICOT,
président
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 novembre
2000), que la société Outillage RC (la société
ORC), aux droits de laquelle se trouve la société Albert Denis, a
été victime, de 1991 à 1993, de détournements de
fonds commis par Mme X..., chef-comptable ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
217
que celle-ci a été condamnée par la
juridiction pénale à réparer le préjudice subi par
la société ORC ; que cette société,
alléguant que M. Y..., commissaire aux comptes, avait manqué
à ses obligations professionnelles et ainsi permis la poursuite des
détournements, a demandé que celui-ci et son assureur, la
Mutuelle du Mans Assurances, soient condamnés à lui payer des
dommages-intérêts ;
Attendu que la société Albert Denis fait grief
à l'arrêt d'avoir rejeté ces demandes alors, selon le moyen
:
1 / que la faute de la victime ne peut exonérer
totalement le responsable du dommage qu'à la condition qu'elle constitue
la cause exclusive de ce dommage ; qu'en exonérant totalement M. Y... de
sa responsabilité au motif que la société ORC n'aurait
elle-même pas contrôlé sérieusement l'activité
de sa comptable, tout en constatant que le manquement du commissaire aux
comptes à ses obligations professionnelles avait concouru à la
survenance du dommage subi par la société ORC, la cour d'appel a
violé l'article 1382 du Code civil ;
2 / que, n'imputant pas les détournements commis en 1991
au commissaire aux comptes, elle a évalué son préjudice
imputable à ses négligences pour les années 1992 et 1993
à la somme de 2 000 000 francs sur le total des 2 494 859 francs
détournés par la comptable ;
qu'en énonçant que la société
«ne met pas la cour en mesure d'évaluer le montant de la partie des
détournements qui, selon son analyse, sont imputables à la
carence du commissaire aux comptes», la cour d'appel a violé
l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
3 / que chacun des responsables d'un même dommage doit
être condamné à le réparer en totalité sans
qu'il y ait lieu de tenir compte du partage de responsabilités qui
n'affecte que les rapports réciproques entre les responsables et non
l'étendue de leurs obligations envers la partie lésée ;
qu'après avoir reconnu la faute du commissaire aux comptes qui a permis,
au moins pour partie, les détournements commis par la comptable, la cour
d'appel ne pouvait refuser de le condamner à l'indemniser, au besoin en
deniers ou quittances, au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve des
diligences accomplies pour recouvrer sa créance sur Mme X..., coauteur
du dommage ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé ensemble les
articles 1203 et 1382 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel a retenu que
la société ORC avait, en s'abstenant d'exercer sur
l'activité de Mme X... un contrôle dont la nécessité
était apparue immédiatement après l'arrivée de
celle-ci au sein de la société, commis une faute en l'absence de
laquelle les détournements auraient été
évités, de sorte que cette faute avait, au regard du lien de
causalité, absorbé celle retenue à l'encontre du
commissaire aux comptes puisque celle-ci n'aurait pu être commise en
l'absence de celle-là ; qu'ainsi, la cour d'appel n'a ni constaté
que le manquement du commissaire aux comptes à ses obligations
professionnelles avait concouru à la production du dommage subi par la
société ORC ni, par suite, exonéré le
La responsabilité du commissaire aux
comptes
218
commissaire aux comptes d'une responsabilité dont elle a
dit que les conditions n'étaient pas réunies ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt étant
justifié par les motifs que critique vainement la première
branche, les griefs des deuxième et troisième branches
s'adressent à des motifs surabondants ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa
première branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Albert Denis aux dépens
;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
rejette la demande de M. Y... et des Mutuelles du Mans Assurances IARD ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du quatorze décembre deux
mille quatre.
Décision attaquée : cour d'appel
de Paris (1re chambre civile, section A) du 15 novembre 2000
La responsabilité du commissaire aux
comptes
219
Annexe 15
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 17 Décembre 2002
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : LA PRESCRIPTION
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 17 décembre 2002
N° de pourvoi: 99-21553
Publié au bulletin
Rejet.
M. Dumas ., président
Mme Betch., conseiller apporteur
M. Feuillard., avocat général
la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Boré, Xavier et
Boré., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET
ECONOMIQUE, a rendu l?arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
220
Attendu selon l'arrêt attaqué, (Paris 6 octobre
1999) que M. X..., commissaire aux comptes de la société Gang,
venant aux droits de la société Translab (la
société) a approuvé sans réserve les comptes des
exercices 1989 à 1992 et a refusé de certifier les comptes de
l'exercice 1993 ; que des détournements ayant été commis
par le dirigeant social, la société l'a assigné en
réparation du préjudice résultant des fautes qu'il avait
commises ; que la cour d'appel a considéré que les demandes se
rapportant aux comptes certifiés sans réserve par le commissaire
aux comptes avant le 28 décembre 1991 étaient prescrites ;
Attendu que la société Gang fait grief à
l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen :
1 / que les actions en responsabilité contre le
commissaire aux comptes se prescrivent par trois ans à compter du fait
dommageable ou s'il a été dissimulé de sa
révélation; qu'en faisant courir le délai de prescription
de l'action en responsabilité exercée par la
société Translab à l'encontre de M. X..., commissaire aux
comptes à compter de la certification pure et simple des comptes bien
que cet acte, sauf s'il contient en lui-même les erreurs commises par le
commissaire aux comptes ce qui n'a été ni allégué
ni retenu en l'espèce, participe de la dissimulation des faits
dommageables imputables au commissaire aux comptes, notamment lorsque celui-ci
omet de préciser qu'il n'a pas effectué toutes les diligences
mises à sa charge et qui auraient pu permettre la
révélation des détournements commis au préjudice de
la société, la cour d'appel a violé les articles 228, 235
et 247 de la loi du 24 juillet 1966 ;
2 / que les actions en responsabilité contre le
commissaire aux comptes se prescrivent par trois ans à compter du fait
dommageable ou s'il a été dissimulé de sa
révélation; qu'en considérant pour refuser de retarder le
délai de prescription de l'action en responsabilité contre M.
X... que la dissimulation devait être intentionnelle et que les
négligences alléguées contre M. X... n'impliquaient pas
cette volonté du commissaire aux comptes de cacher des faits dont il
avait eu connaissance par la certification des comptes, la cour d'appel a
ajouté à la loi et violé les articles 235 et 247 de la loi
du 24 juillet 1966 ;
3 / qu'en faisant courir la prescription de l'action en
responsabilité à l'encontre de M. X..., commissaire aux comptes
de la société Translab à compter de la certification des
comptes sans expliquer comment à compter de cette date, la
société Translab avait pu avoir connaissance des manquements de
M. X... à ses obligations professionnelles et en particulier de
l'omission de ce dernier à procéder aux contrôles et
vérifications des comptes qui lui incombaient et lui auraient permis de
connaître les détournements commis par le dirigeant social, la
cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard
des articles 247 et 235 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Mais attendu que l'arrêt retient que si le fait
dommageable invoqué à l'encontre de M. X... ne peut
résulter que de la certification des comptes à laquelle celui-ci
a procédé et que si l'insuffisance de diligences et de
contrôles imputés par la société appelante au
commissaire aux comptes constituerait, si elle était établie, une
faute engageant sa responsabilité, les négligences, de la nature
de celles qui sont invoquées, ne sauraient à elles seules
être
La responsabilité du commissaire aux
comptes
221
regardées comme une dissimulation, laquelle implique la
volonté du commissaire aux comptes de cacher des faits dont il a
connaissance par la certification des comptes ; qu'il ajoute qu'il n'est
d'aucune façon démontré par la société
Translab que M. X... ait eu connaissance de détournements commis par le
dirigeant social, M. Y..., à son avantage ou à celui de la
société Avio ou d'irrégularités comptables qu'il
aurait dissimulées ; qu'en l'état de ces constatations et
énonciations, la cour d'appel qui a légalement justifié sa
décision, a pu statuer comme elle a fait ; d'où il suit que le
moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gang aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,
condamne la société Gang à verser à M. X... la
somme de 1 980 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du dix-sept décembre deux
mille deux.
Publication : Bulletin 2002 IV N° 201 p.
227
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, du 6 octobre 1999
Titrages et résumés : SOCIETE
ANONYME - Commissaire aux comptes - Responsabilité - Action -
Prescription triennale - Point de départ - Fait dommageable - Fait
résultant de la certification des comptes - Nécessité .
Justifie légalement sa décision une cour d'appel qui, pour
déclarer prescrite une action en responsabilité à
l'égard d'un commissaire aux comptes, relève que le fait
dommageable invoqué à l'encontre de celui-ci ne peut
résulter que de la certification des comptes à laquelle il a
procédé, et que l'insuffisance des diligences et contrôles
alléguée, si elle était établie, constituerait une
faute engageant sa responsabilité, et retient que les négligences
de la nature de celles qui sont invoquées ne sauraient à elles
seules être regardées comme une dissimulation, laquelle implique
la volonté du commissaire aux comptes de cacher des faits dont il a
connaissance.
SOCIETE ANONYME - Commissaire aux comptes -
Responsabilité - Action - Prescription triennale - Point de
départ - Révélation du fait dommageable dissimulé -
Dissimulation - Conditions - Volonté de cacher des faits connus
La responsabilité du commissaire aux
comptes
222
Annexe 16
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 2 Février 2000
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : CONFIRMATION D?INFORMATION
MENSONGERES
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 2 février
2000
N° de pourvoi: 98-87161
Publié au bulletin
Rejet
Président : M. Gomez,
président
Rapporteur : M. Roger., conseiller apporteur
Avocat général : M. de Gouttes., avocat
général
Avocat : M. Roger., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET du pourvoi formé par :
- X... René,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre
correctionnelle, en date du 15 juillet 1998, qui, pour délivrance
d'informations mensongères et non-révélation de faits
délictueux, l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec
sursis et 20 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
223
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des
articles 233 et 457 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés
commerciales, 121-1 du Code pénal, 593 du Code de procédure
pénale, insuffisance de motifs et manque de base légale : »
en ce que la cour d'appel a déclaré René X... coupable
d'avoir donné ou confirmé des informations mensongères sur
la situation de la société Soltec et l'a condamné
pénalement ;
» aux motifs que René X... exerçait la
fonction de commissaire aux comptes de la SA Soltec ; qu'il a été
missionné spécialement pour l'exercice clos au 28 février
1990, les comptes devant être soumis à l'assemblée
générale du 10 août 1990 ; que le bilan
présenté par les dirigeants au titre de l'exercice
précité s'est révélé inexact en ce sens que
les travaux en cours ont été surestimés ceci dans le but
d'occulter les importantes difficultés financières de la
société ; qu'il ressort en effet de l'expertise de M. Y...,
déposée en septembre 1991, que le compte de l'exercice clos au 28
février 1990 relève une anticipation de produits par majoration
de taux et inscriptions de créances fictives ; que l'agent comptable a,
néanmoins, certifié ces comptes dans son rapport daté du
10 juillet 1990 ; que le prévenu ne saurait soutenir qu'il a commis des
négligences en adoptant sans les vérifier les
éléments comptables qui lui ont été fournis, ce qui
ne saurait engager sa responsabilité pénale et que l'expert n'a
pu aboutir à ses conclusions que postérieurement au bilan de
l'exercice 1991 date à laquelle les surévaluations étaient
patentes ; qu'il a lui-même relevé, et ceci ressort du rapport
spécial, que la surévaluation des créances pour travaux en
cours était de 80 000 à 100 000 francs ; que dans ces conditions
le manquement du commissaire aux comptes quant à ses investigations
dépasse la simple négligence s'agissant d'un poste comptable
comme l'a souligné l'expert, souvent discutable en cas de
difficultés ; que M. Z..., dirigeant de la société, a
également déclaré à René X... que le poste
en question était surévalué de 4 000 000 francs ; que
René X... ne saurait soutenir que ce rapport était
rédigé au 10 juillet 1990 ; qu'il ressort en effet des
déclarations de M. A... et de M. Z... que celui-ci n'a pas
été déposé lors de l'assemblée
générale du 10 août 1990 puisque de nombreux rappels
étaient nécessaires ; que ce rapport n'apparaît qu'en
novembre 1991 à l'occasion d'une transmission au procureur de la
République ; que les critiques du prévenu à l'égard
de l'expertise de M. Y... selon lesquelles l'expert a
bénéficié d'informations résultant du bilan de
l'exercice suivant sont inopérantes, le prévenu étant,
lors de l'élaboration de son rapport, dans la même situation ; que
le prévenu, au moment où il a déposé son rapport,
soit largement après le terme de l'assemblée
générale, n'était pas en situation d'y mentionner des
réserves de nature à modifier la position des actionnaires ;
qu'il a tout à fait sciemment certifié un bilan qu'il savait
faux, sa négligence n'étant en l'espèce qu'un mobile
indifférent à la constitution du délit ;
» alors que le délit prévu par l'article 547
de la loi du 24 juillet 1966 suppose que le commissaire aux comptes a sciemment
donné ou confirmé des informations mensongères sur la
situation de la société à la clôture de l'exercice
1990 ; que l'arrêt attaqué, qui constate qu'il était
mensonger d'indiquer que la surévaluation des créances pour
travaux était de 80 000 à 100 000 francs à cette date dans
la mesure où l'expert a relevé une surévaluation de
produits par majoration de taux et inscriptions de créances fictives de
3 150 000 francs, alors qu'il résulte de l'audition de l'expert que
cette situation n'a été révélée que par
l'absence de reprise des travaux comptabilisés lors de l'exercice 1990
et de facturation afférente dans les comptes de l'exercice clos au 28
février 1991, a entaché sa décision d'une insuffisance de
motifs et d'un manque de base légale ;
» qu'au surplus le délit prévu par l'article
457 de la loi du 24 juillet 1966 n'est
La responsabilité du commissaire aux
comptes
224
consommé que lorsque des informations mensongères
ont été données ou confirmées aux associés
ou à des tiers par le commissaire aux comptes dans l'exercice de ses
fonctions ; qu'en l'espèce, il ressort tant des pièces
versées au dossier que de l'arrêt attaqué que le
commissaire n'a pas déposé son rapport mais l'a transmis au
procureur de la République et à la demande de celui-ci au mois de
novembre 1991 ; qu'aucun texte ne prévoyant la faculté pour le
procureur de la République d'obtenir un tel rapport du commissaire aux
comptes, la cour d'appel, en se fondant sur cette seule transmission au
ministère public du rapport en cause, n'a pas caractérisé
l'élément matériel constitutif de l'infraction poursuivie
« ;
Attendu que, pour déclarer René X... coupable du
délit de délivrance d'informations mensongères,
l'arrêt attaqué relève que l'intéressé,
commissaire aux comptes de la société Soltec, admet s'être
aperçu d'une surévaluation des créances de 80 à 100
000 francs ; qu'en outre, il avait été informé par le
comptable et le président de la société qu'un poste
était surévalué de 4 millions de francs ; que, cependant,
il n'en a pas fait état dans un rapport antidaté, dressé
le 9 novembre 1991 à la demande de l'administrateur judiciaire de la
société Soltec, rapport ultérieurement transmis au
procureur de la République ; qu'il conclut que René X... a
sciemment certifié un bilan qu'il savait faux ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et
dès lors que l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966 n'exclut pas le
procureur de la République des destinataires des informations
mensongères, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Attendu que la peine prononcée étant
justifiée par la déclaration de culpabilité du chef
précité, il n'y a pas lieu d'examiner le second moyen qui discute
le délit de non-révélation de faits délictueux ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme
;
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin criminel 2000 N° 56
p. 152
Décision attaquée : Cour d'appel
de Metz (chambre correctionnelle), du 15 juillet 1998
Titrages et résumés : SOCIETE -
Société par actions - Société anonyme - Commissaire
aux comptes - Informations mensongères - Destinataire - Procureur de la
République. Caractérise le délit d'informations
mensongères, prévu et réprimé par l'article 457 de
la loi du 24 juillet 1966, l'arrêt qui constate diverses omissions
comptables dans un rapport établi par le commissaire aux comptes
à la demande de l'administrateur judiciaire de la société,
rapport ultérieurement transmis au procureur de la République. En
effet, l'article susmentionné n'exclut pas ce magistrat des
destinataires des informations mensongères. .
Textes appliqués :
· Loi 66-537 1966-07-24 art. 457
La responsabilité du commissaire aux
comptes
225
Annexe 17
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 12 JANVIER 1981
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : CONFIRMATION D?INFORMATION
MENSONGERES
1) BANQUEROUTE - Etat de cessation des paiements - Date -
Constatations suffisantes.
Caractérise exactement l'état de cessation des
paiements d'une société l'arrêt qui constate que la
situation financière de celle-ci se trouvait
irrémédiablement compromise, dès lors que les banques ont
refusé de continuer à lui prêter leur concours, faute par
le dirigeant de cette société de satisfaire aux conditions qui
lui avaient été imposées pour l'obtention d'un moratoire
(1).
2) BANQUEROUTE - Etat de cessation des paiements - Date - Date
antérieure de plus de 18 mois au jugement du Tribunal de commerce -
Appréciation souveraine des juges répressifs.
Aux termes de l'article 139 de la loi du 13 juillet 1967, une
condamnation pour banqueroute simple ou frauduleuse ou pour délit
assimilé à la banqueroute simple ou frauduleuse peut être
prononcée même si la cessation des paiements n'a pas
été constatée dans les conditions prévues au titre
1er de ladite loi. Le juge répressif statuant sur l'action publique
peut, dès lors et sans que sa décision puisse avoir une incidence
sur l'application par le juge civil ou commercial de l'article 29 de cette loi,
faire remonter la cessation des paiements à une date antérieure
de plus de 18 mois au prononcé du jugement déclaratif du
règlement judiciaire ou de la liquidation des biens.
3) SOCIETE - Société en général -
Bilan - Présentation de bilan inexact - Eléments constitutifs -
Mauvaise foi - Dissimulation de la véritable situation de la
société.
L'élément intentionnel du délit de
présentation de bilans inexacts résulte de la constatation par
les juges de ce que le prévenu a eu, en manipulant plusieurs postes des
bilans, le souci de faire
La responsabilité du commissaire aux
comptes
226
apparaître un résultat bénéficiaire en
vue d'éviter la révélation publique d'une situation
financière compromise (2).
4) FAUX - Faux en écritures de commerce - Rapport des
commissaires aux comptes - Date inexacte - Elément essentiel.
FAUX - Faux en écritures de commerce - Préjudice -
Rapport des commissaires aux comptes - Date inexacte.
Constitue un faux en écritures de commerce le fait pour
les commissaires aux comptes d'apposer sur un rapport une date fausse de nature
à faire croire que ce document a été mis à la
disposition des actionnaires dans le délai légal ; cette date
constituait un élément essentiel de l'acte et sa fausseté
était de nature à causer un préjudice aux actionnaires
(3).
5) SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Commissaires aux comptes - Informations
mensongères - Mauvaise foi - Constatations suffisantes.
Commettent le délit de communication d'informations
mensongères prévu et réprimé par l'article 457 de
la loi du 24 juillet 1966, les commissaires aux comptes d'une
société anonyme qui, dans un rapport mis à la disposition
des actionnaires en vue de l'assemblée générale,
approuvent un bilan qu'ils savent être inexact (4).
6) SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Commissaire aux comptes -
Non-révélation de faits délictueux - Définition.
Commettent le délit de non-dénonciation
prévu et réprimé par l'article 457 de la loi du 24 juillet
1966, les commissaires aux comptes d'une société anonyme qui
omettent de dénoncer au Procureur de la République les
délits d'abus de biens sociaux, de présentations de bilans
inexacts et les délits assimilés à la banqueroute dont ils
avaient connaissance (5).
Références :
(1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1965-01-16
Bulletin Criminel 1965 N. 4 p. 5 (IRRECEVABILITE) et les arrêts
cités. (1) (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1978-11-20
Bulletin Criminel 1978 N. 319 p. 823 (ANNULATION PARTIELLE) et les arrêts
cités. (1) (2) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1966-12-14
Bulletin Criminel
La responsabilité du commissaire aux
comptes
227
1966 N. 291 p. 678 (REJET) et les arrêts cités. (3)
(2) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1974-05-14 Bulletin Criminel
1974 N. 177 p. 452 (REJET ET AMNISTIE). (3) (2) CF. Cour de Cassation (Chambre
criminelle) 1978-11-27 Bulletin Criminel 1978 N. 331 p. 867 (REJET) et
l'arrêt cité. (3) (3) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle)
1962-04-09 Bulletin Criminel 1962 N. 175 p. 361 (CASSATION SANS RENVOI) et
l'arrêt cité. (4) (4) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle)
1980-01-14 Bulletin Criminel 1980 N. 21 p. 49 (REJET). (5) (4) CF. Cour de
Cassation (Chambre criminelle) 1968-02-08 Bulletin Criminel 1968 N. 42 p. 95
(REJET) et les arrêts cités. (6)
Texte :
STATUANT SUR LES POURVOIS FORMES PAR :
- X... PAUL,
- Y... ANDRE,
- Z... JEAN,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 9E CHAMBRE, EN DATE
DU 9 JUILLET 1979, QUI LES A CONDAMNES :
- X... PAUL, A 2 ANS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, POUR DELITS
ASSIMILES AUX BANQUEROUTES SIMPLE ET FRAUDULEUSE ET POUR INFRACTIONS A LA LOI
SUR LES SOCIETES,
- Y... ANDRE, A 15 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 5 000
FRANCS D'AMENDE,
- Z... JEAN, A 15 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 1 000
FRANCS D'AMENDE, TOUS DEUX POUR FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE, AINSI QUE POUR
DELIT D'INFORMATIONS MENSONGERES ET DEFAUT DE DENONCIATION PAR COMMISSAIRE AUX
COMPTES ;
VU LA CONNEXITE JOIGNANT LES POURVOIS ; SUR LES FAITS :
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT DONT IL
ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES, QUE X... ETAIT PRESIDENT DE LA SOCIETE
GEEP-INDUSTRIES S.A., ET GERANT DE LA SOCIETE GEEP S.A.R.L., LIEES PAR UN
CONTRAT D'ASSOCIATION EN PARTICIPATION ; QUE Y... ET Z... ETAIENT COMMISSAIRES
AUX COMPTES DE LA GEEP-INDUSTRIES ; QUE LE GROUPE, QUI AVAIT POUR OBJET LA
FABRICATION DE BATIMENTS SCOLAIRES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
228
POUR L'ETAT ET LES COLLECTIVITES LOCALES, A CONNU UNE CROISSANCE
RAPIDE, A PARTIR DE 1964, TOUT EN SOUFFRANT D'UNE INSUFFISANCE EXTREME DE
CAPITAUX PROPRES ; QUE LES PREMIERES DIFFICULTES FINANCIERES GRAVES SONT
APPARUES EN 1969 A LA SUITE D'UNE REDUCTION DES COMMANDES, QUE, LE 25 JUIN
1971, LA SOCIETE GEEP-INDUSTRIES A ETE DECLAREE EN REGLEMENT JUDICIAIRE, MESURE
QUI A ETE ETENDUE A LA GEEP S.A.R.L., LE 16 JUILLET 1971 ; QUE, LE 25 MARS
1975, L'HOMOLOGATION D'UN CONCORDAT A ETE REFUSEE PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS
QUI A ORDONNE LA LIQUIDATION DES BIENS ;
EN CET ETAT :
I - SUR LE POURVOI DE X... :
VU LE MEMOIRE PRODUIT PAR LA SOCIETE CIVILE PROFESSIONNELLE
PHILIPPE ET CLAIRE WAQUET ;
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 130, 131, 132 ET 133 DE LA
LOI DU 13 JUILLET 1967, DE L'ARTICLE 29 DE LA MEME LOI, DE L'ARTICLE 402 DU
CODE PENAL ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, EXCES DE POUVOIR,
DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PREVENU DU CHEF DE DELITS
ASSIMILES A LA BANQUEROUTE, PAR NON-DECLARATION DE LA CESSATION DES PAIEMENTS,
TENUE DE COMPTABILITE IRREGULIERE ET INCOMPLETE, EMPLOI DE MOYENS RUINEUX,
ENGAGEMENTS EXCESSIFS, PAIEMENTS PREFERENTIELS ET DETOURNEMENT D'ACTIF ;
AU MOTIF QUE LES DEUX SOCIETES DONT LE PREVENU ETAIT, DE L'UNE LE
PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, DE L'AUTRE LE GERANT, ETAIENT EN ETAT DE CESSATION
DES PAIEMENTS DEPUIS LE 30 SEPTEMBRE 1969 ;
ALORS, D'UNE PART, QUE POUR CARACTERISER LA CESSATION DES
PAIEMENTS A LA DATE RETENUE, LA COUR D'APPEL S'APPUIE SUR UNE SITUATION
FINANCIERE ANTERIEURE, SELON SES PROPRES CONSTATATIONS, DE TROIS ANNEES ;
QU'ELLE AFFIRME QU'A LA DATE RETENUE LA SITUATION
La responsabilité du commissaire aux
comptes
229
ETAIT DEFINITIVEMENT COMPROMISE ET RELEVE CEPENDANT QU'ELLE
AURAIT PU ENCORE ETRE RETABLIE ; QU'ELLE CONSTATE, APRES LA PRETENDUE CESSATION
DES PAIEMENTS, LE MAINTIEN OU LA SURVENANCE D'EVENEMENTS PROPRES A LA DENIER ;
QU'ELLE A AINSI STATUE PAR MOTIFS INSUFFISANTS ET CONTRADICTOIRES ET PRIVE SON
ARRET DE BASE LEGALE ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA DATE RETENUE EST ANTERIEURE
DE PLUS DE 18 MOIS AUX JUGEMENTS DECLARATIFS AFFERENTS AUX SOCIETES LITIGIEUSES
; QUE L'ARRET ATTAQUE A AINSI VIOLE, PAR DEFAUT D'APPLICATION, L'ARTICLE 29 DE
LA LOI DU 13 JUILLET 1967 ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER X... COUPABLE DE DELITS ASSIMILES AUX
BANQUEROUTES SIMPLE ET FRAUDULEUSE, L'ARRET ENONCE QUE LA DATE DE CESSATION DES
PAIEMENTS DES SOCIETES EN CAUSE DOIT ETRE FIXEE AU 30 SEPTEMBRE 1969, LA
SITUATION FINANCIERE DE CES ENTREPRISES ETANT ALORS DEFINITIVEMENT ET
INELUCTABLEMENT COMPROMISE, DES LORS, QU'A PARTIR DE CETTE DATE, LES BANQUES
ONT REFUSE DE CONTINUER A PRETER LEUR CONCOURS A CES SOCIETES, FAUTE PAR X...
DE SATISFAIRE AUX CONDITIONS QUI LUI AVAIENT ETE IMPOSEES POUR LA RECONDUCTION
D'UN MORATOIRE ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS SOUVERAINES, LA COUR
D'APPEL, D'UNE PART, A CARACTERISE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS SANS
ENCOURIR LES GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN ;
QUE, D'AUTRE PART, AUX TERMES DE L'ARTICLE 139 DE LA LOI DU 13
JUILLET 1967, UNE CONDAMNATION POUR BANQUEROUTE SIMPLE OU FRAUDULEUSE OU POUR
DELIT ASSIMILE A LA BANQUEROUTE SIMPLE OU FRAUDULEUSE PEUT ETRE PRONONCEE MEME
SI LA CESSATION DES PAIEMENTS N'A PAS ETE CONSTATEE DANS LES CONDITIONS PREVUES
AU TITRE IER DE LADITE LOI ; QU'IL RESULTE DE CE TEXTE QU'INDEPENDAMMENT DES
PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 29 DE CETTE LOI, QUI IMPOSE AU JUGE CIVIL OU
COMMERCIAL DE LIMITER A 18 MOIS LA PERIODE PENDANT LAQUELLE CERTAINS ACTES
POURRONT ETRE DECLARES INOPPOSABLES A LA MASSE, LE JUGE REPRESSIF PEUT, A BON
DROIT COMME IL L'A FAIT EN L'ESPECE, POUR CARACTERISER L'INFRACTION, FAIRE
REMONTER LA CESSATION DES PAIEMENTS A UNE DATE ANTERIEURE SANS QUE SA DECISION
SUR CE POINT PUISSE AVOIR UNE INCIDENCE SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 29
PRECITE :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
230
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ; SUR LE
SECOND MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU 24
JUILLET 1966 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, EXCES DE POUVOIR,
DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PREVENU DU CHEF
D'INFRACTION A LA LEGISLATION SUR LES SOCIETES PAR PRESENTATION DE BILAN
INEXACT AU TITRE DES EXERCICES 1968 ET 1969 ;
AU MOTIF QU'IL AVAIT DELIBEREMENT MAJORE LES VALEURS D'ACTIF
INCLUSES DANS LES POSTES VALEURS REALISABLES, FRAIS D'ETUDES ET TRAVAUX EN
COURS ;
ALORS, D'UNE PART, QUE LES JUGES D'APPEL NE RELEVENT PAS LE
MOINDRE FAIT SIGNIFICATIF DE LA CONNAISSANCE, PAR LE PREVENU, DE L'INEXACTITUDE
DES BILANS LITIGIEUX ; QUE, POUR CARACTERISER L'INTENTION DELICTUEUSE, ILS SE
FONDENT SEULEMENT SUR LES ACTIVITES DE TIERS, DONT LE PREVENU NE SAURAIT ETRE
RESPONSABLE, OU SUR DES FAITS ANTERIEURS OU POSTERIEURS AUX AGISSEMENTS
INCRIMINES, OU ENCORE SUR DES FAITS QUE L'ARRET ATTAQUE CONTREDIT LUI-MEME, PAR
D'AUTRES OBSERVATIONS ET CONSTATATIONS ; QUE L'ARRET ATTAQUE EST AINSI ENTACHE
DE DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE MOTIFS, ET MANQUE DE BASE LEGALE
;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'EN NE CHERCHANT PAS SI LE PREVENU AURAIT
AGI "EN VUE DE DISSIMULER LA VERITABLE SITUATION DE LA SOCIETE", SELON LES
TERMES MEMES DU TEXTE QUI FONDE LA PREVENTION, LES JUGES D'APPEL ONT PRIVE LEUR
ARRET DE BASE LEGALE ET VIOLE L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU 24 JUILLET
1966 ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER X... COUPABLE D'AVOIR SCIEMMENT
PRESENTE AUX ACTIONNAIRES DES BILANS INEXACTS, L'ARRET ENONCE QUE LES BILANS
AUX DATES DES 31 DECEMBRE 1968 ET 31 DECEMBRE 1969, PRESENTES AUX ASSEMBLEES
GENERALES D'ACTIONNAIRES LES 30 JUIN 1969
La responsabilité du commissaire aux
comptes
231
ET 23 JUIN 1970, COMPORTAIENT DES MAJORATIONS FRAUDULEUSES
D'ACTIFS, RESULTANT DE CE QUE CERTAINS POSTES QUE L'ARRET ENUMERE N'AVAIENT PAS
FAIT L'OBJET DES PROVISIONS QUI S'IMPOSAIENT ; QUE, COMPTE TENU DES BENEFICES
DEGAGES FACE AUX TRES IMPORTANTS DEFICITS EXISTANT EFFECTIVEMENT, "APPARAISSAIT
L'AMPLEUR DE MANIPULATIONS EFFECTUEES DANS LE BUT DE PARVENIR A L'INVERSION DES
RESULTATS" ; QUE LESDITES MAJORATIONS D'ACTIFS "SONT INTERVENUES DANS UNE
SITUATION DE CRISE, MALGRE LES NOMBREUSES MISES EN GARDE ET AVERTISSEMENTS
RECUS", ET QU'ELLES "PROCEDAIENT D'UNE ACTION DELIBEREE, DETERMINEE PAR LE
SOUCI DE FAIRE APPARAITRE UN RESULTAT BENEFICIAIRE, MEME MEDIOCRE, EN VUE
D'EVITER LA REVELATION PUBLIQUE D'UNE SITUATION FINANCIERE OBEREE PUIS
COMPROMISE, EN DEPIT D'UNE APPARENTE PROSPERITE" ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT, LA COUR D'APPEL A CARACTERISE, A LA
CHARGE DE X..., LA REUNION DE TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS, TANT MATERIELS
QU'INTENTIONNELS, DU DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI
DU 24 JUILLET 1966, ET A, PAR DES MOTIFS EXEMPTS D'INSUFFISANCE ET DE
CONTRADICTION, DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
II - SUR LES POURVOIS DE Y... ET DE Z... :
VU LES MEMOIRES PRODUITS ;
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
COMMUN A Y... ET Z... ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 147 ET
150 DU CODE PENAL, 168, 170, 228 ET SUIVANTS, 444 ET 445 DE LA LOI DU 24
JUILLET 1966, 135, 139, 140 ET SUIVANTS DU DECRET DU 23 MARS 1967, DE L'ARTICLE
593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810,
DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DE FAUX EN ECRITURE DE COMMERCE ;
AUX MOTIFS QUE, APRES AVOIR DELIVRE AUX ORGANES SOCIAUX UN
La responsabilité du commissaire aux
comptes
232
RAPPORT DE CERTIFICATION DES COMPTES DE L'EXERCICE 1969, LES DEUX
COMMISSAIRES AUX COMPTES LUI ONT SUBSTITUE CLANDESTINEMENT UN NOUVEAU RAPPORT
ETABLI ET SIGNE LES 22 ET 23 JUIN 1970 BIEN QUE RECEVANT LA DATE DU IER JUIN
1970 AVANT QUE CE DOCUMENT SOIT INTRODUIT PAR L'UN D'EUX DANS LE DOSSIER DE
L'ASSEMBLEE GENERALE, DANS LA MATINEE DU 23 JUIN 1970, DATE DE LA DELIBERATION
SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE SUSVISE, QUE CERTES SEUL L'AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES EST INTERVENU AU STADE DE LA SUBSTITUTION, MAIS QUE LE PREVENU S'EST
ASSOCIE DELIBEREMENT A L'ENSEMBLE DE LA MACHINATION EN SE PRETANT A
L'ETABLISSEMENT D'UN NOUVEAU RAPPORT ET NON D'UN RAPPORT COMPLEMENTAIRE, EN
FAISANT PORTER CE NOUVEAU RAPPORT AU SECOND COMMISSAIRE AUX COMPTES ET EN
S'ABSTENANT DE TOUTE COMMUNICATION ECRITE OU VERBALE AUX ACTIONNAIRES ET AUX
DIRIGEANTS SOCIAUX, QUE CERTES LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 228 DE LA LOI DU
24 JUILLET 1966 NE PREVOIENT PAS LA NECESSITE DE PORTER UNE DATE SUR LE
RAPPORT, QUE TOUTEFOIS DE LA COMBINAISON DES ARTICLES 168-170, 444 ET 445 DE LA
MEME LOI ET 135 DU DECRET DU 23 MARS 1967 QUI ORGANISENT LA MISE A DISPOSITION
DES ACTIONNAIRES DU RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX COMPTES, DECOULE LOGIQUEMENT
LA NECESSITE DE DATER UN TEL DOCUMENT EN SORTE QUE DANS LE CAS PARTICULIER, LA
DATE CONSTITUE BIEN L'UN DES ELEMENTS SUBSTANTIELS DU DOCUMENT INCRIMINE ET QUE
LES PREVENUS ONT MODIFIE FONDAMENTALEMENT LA PORTEE DU RAPPORT INITIAL QUI
CERTIFIAIT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES COMPTES EN ETABLISSANT UN SECOND
RAPPORT DANS LEQUEL ILS REFUSAIENT LEUR CERTIFICATION ;
ALORS QUE, D'UNE PART, AUCUN TEXTE N'INTERDISANT AUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES D'APPORTER UNE MODIFICATION SUBSTANTIELLE AU CONTENU DE LEUR
RAPPORT AVANT LA REUNION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES OU MEME DE
REDIGER UN NOUVEAU RAPPORT ET AUCUN TEXTE N'IMPOSANT AUX COMMISSAIRES AUX
COMPTES DE DATER LEUR RAPPORT, LES JUGES DU FOND ONT PRIVE LEUR DECISION DE
BASE LEGALE EN DECLARANT COUPABLE DE FAUX LE PREVENU QUI S'EST CONTENTE, APRES
AVOIR ETABLI UN PREMIER RAPPORT ATTESTANT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES
COMPTES SOCIAUX, DE REDIGER, LA
La responsabilité du commissaire aux
comptes
233
VEILLE DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES, UN NOUVEAU
RAPPORT DATE DU MEME JOUR QUE LE PRECEDENT ET EMETTANT DES RESERVES ET QUI A
CHARGE SON CONFRERE, EGALEMENT COMMISSAIRE AUX COMPTES, DE DONNER CONNAISSANCE
DE CE NOUVEAU RAPPORT AU COURS DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'OBLIGATION PREVUE PAR LES TEXTES
INVOQUES PAR LES JUGES DU FOND DE METTRE LE RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX
COMPTES A LA DISPOSITION DES ACTIONNAIRES, 15 JOURS AU MOINS AVANT LA REUNION
DE L'ASSEMBLEE GENERALE, PESE SEULEMENT SUR LES DIRIGEANTS SOCIAUX ET NON SUR
LES COMMISSAIRES QUI PEUVENT PARFAITEMENT DEPOSER UN NOUVEAU RAPPORT JUSQU'AU
JOUR DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
SUR LES PREMIER ET DEUXIEME MOYENS DE CASSATION PROPOSES PAR
Z..., CONTENUS DANS LE MEMOIRE ADDITIONNEL ET PRIS :
- LE PREMIER, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 150 DU CODE PENAL ;
EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE
D'UN FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE ;
AU MOTIF QU'IL RESULTE DES PROPRES DECLARATIONS DES PREVENUS
Y...ET Z..., QU'APRES AVOIR DELIVRE AUX ORGANES SOCIAUX LE RAPPORT DE
CERTIFICATION DES COMPTES DE L'EXERCICE 1969, LES DEUX COMMISSAIRES LUI ONT
SUBSTITUE CLANDESTINEMENT UN NOUVEAU RAPPORT ETABLI ET SIGNE LES 22 ET 23 JUIN
1970, BIEN QUE RECEVANT LA DATE DU 1ER JUIN 1970 AVANT D'ETRE INTRODUIT PAR
L'UN D'EUX DANS LE DOSSIER DE L'ASSEMBLEE GENERALE DANS LA MATINEE DU 23 JUIN
1970, DATE DE LA DELIBERATION SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE SUSVISE ;
ALORS QUE LE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE N'EST CONSTITUE
QU'AUTANT QU'IL Y A EU ALTERATION DE LA VERITE DANS UN ECRIT, QU'EN L'ESPECE
ACTUELLE, LES JUGES DU FOND AYANT EUX-MEMES CONSTATE QUE LE RAPPORT SUBSTITUE
PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES Z... ET Y... A LEUR PREMIER RAPPORT ETAIT
CONFORME A LA VERITE, N'ONT PU CONDAMNER CEUX-CI POUR FAUX ;
- LE DEUXIEME, DE LA VIOLATION DES ARTICLES 147 ET 150 DU CODE
PENAL, 168, 170, 228 ET SUIVANTS, 444 ET 445 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 135,
139, 140 ET SUIVANTS DU DECRET DU 23 MARS 1967, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
234
PROCEDURE PENALE ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810,
DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DE FAUX EN ECRITURE DE COMMERCE ;
AUX MOTIFS QUE, APRES AVOIR DELIVRE AUX ORGANES SOCIAUX UN
RAPPORT DE CERTIFICATION DES COMPTES DE L'EXERCICE 1969, LES DEUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES LUI ONT SUBSTITUE CLANDESTINEMENT UN NOUVEAU RAPPORT ETABLI ET
SIGNE LES 22 ET 23 JUIN 1970, BIEN QUE RECEVANT LA DATE DU 1ER JUIN 1970, AVANT
QUE CE DOCUMENT SOIT INTRODUIT PAR L'UN D'EUX DANS LE DOSSIER DE L'ASSEMBLEE
GENERALE, DANS LA MATINEE DU 23 JUIN 1970, DATE DE LA DELIBERATION SUR LES
COMPTES DE L'EXERCICE SUSVISE, QUE CERTES, SEUL L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES
EST INTERVENU AU STADE DE LA SUBSTITUTION, MAIS QUE LE PREVENU S'EST ASSOCIE
DELIBEREMENT A L'ENSEMBLE DE LA MACHINATION EN SE PRETANT A L'ETABLISSEMENT
D'UN NOUVEAU RAPPORT ET NON D'UN RAPPORT COMPLEMENTAIRE, EN FAISANT PORTER CE
NOUVEAU RAPPORT AU SECOND COMMISSAIRE AUX COMPTES ET EN S'ABSTENANT DE TOUTE
COMMUNICATION ECRITE OU VERBALE AUX ACTIONNAIRES ET AUX DIRIGEANTS SOCIAUX,
QUE, CERTES, LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 228 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 NE
PREVOIENT PAS LA NECESSITE DE PORTER UNE DATE SUR LE RAPPORT, QUE TOUTEFOIS, DE
LA COMBINAISON DES ARTICLES 168, 170, 444 ET 445 DE LA MEME LOI ET 135 DU
DECRET DU 23 MARS 1967 QUI ORGANISENT LA MISE A DISPOSITION DES ACTIONNAIRES DU
RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX COMPTES, DECOULE LOGIQUEMENT LA NECESSITE DE DATER
UN TEL DOCUMENT EN SORTE QUE, DANS LE CAS PARTICULIER LA DATE CONSTITUE BIEN
L'UN DES ELEMENTS SUBSTANTIELS DU DOCUMENT INCRIMINE ET QUE LES PREVENUS ONT
MODIFIE FONDAMENTALEMENT LA PORTEE DU RAPPORT INITIAL QUI CERTIFIAIT LA
REGULARITE ET LA SINCERITE DES COMPTES EN ETABLISSANT UN SECOND RAPPORT DANS
LEQUEL ILS REFUSAIENT LEUR CERTIFICATION ;
ALORS QUE, D'UNE PART, AUCUN TEXTE N'INTERDISANT AUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES D'APPORTER UNE MODIFICATION SUBSTANTIELLE AU CONTENU DE LEUR
RAPPORT AVANT LA REUNION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES OU MEME DE
REDIGER UN NOUVEAU
La responsabilité du commissaire aux
comptes
235
RAPPORT ET AUCUN TEXTE N'IMPOSANT AUX COMMISSAIRES AUX COMPTES DE
DATER LEUR RAPPORT, LES JUGES DU FOND ONT PRIVE LEUR DECISION DE BASE LEGALE EN
DECLARANT COUPABLE DE FAUX LE PREVENU QUI S'EST CONTENTE, APRES AVOIR ETABLI UN
PREMIER RAPPORT ATTESTANT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES COMPTES SOCIAUX, DE
REDIGER, LA VEILLE DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES, UN NOUVEAU RAPPORT
DATE DU MEME JOUR QUE LE PRECEDENT ET EMETTANT DES RESERVES ET QUI A CHARGE SON
CONFRERE, EGALEMENT COMMISSAIRE AUX COMPTES, DE DONNER CONNAISSANCE DE CE
NOUVEAU RAPPORT AU COURS DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'OBLIGATION PREVUE PAR LES TEXTES
INVOQUEE PAR LES JUGES DU FOND DE METTRE LE RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX
COMPTES A LA DISPOSITION DES ACTIONNAIRES, 15 JOURS AU MOINS AVANT LA REUNION
DE L'ASSEMBLEE GENERALE, PESE SEULEMENT SUR LES DIRIGEANTS SOCIAUX ET NON SUR
LES COMMISSAIRES QUI PEUVENT PARFAITEMENT DEPOSER UN NOUVEAU RAPPORT JUSQU'AU
JOUR DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
LES MOYENS CI-DESSUS TRANSCRITS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... ET Z..., COMMISSAIRES AUX
COMPTES, COUPABLES DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE, L'ARRET ATTAQUE CONSTATE
QUE, LE 23 JUIN 1970, PEU AVANT LA REUNION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES
ACTIONNAIRES, Z... A SUBSTITUE, A UN PRECEDENT RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX
COMPTES, UN NOUVEAU RAPPORT, ETABLI LA VEILLE, FAUSSEMENT DATE DU 1ER JUIN 1970
ET QUI CONTENAIT DES CONCLUSIONS DIFFERENTES DE CELLES DU PREMIER RAPPORT,
NOTAMMENT EN CE QU'IL COMPORTAIT DES RESERVES SUR LA REGULARITE ET LA SINCERITE
DES COMPTES QUI NE FIGURAIENT PAS DANS LE DOCUMENT INITIAL ; QUE Y..., QUI A
SIGNE AVEC Z... CE SECOND RAPPORT, S'EST ASSOCIE A CETTE MACHINATION ; QUE LES
DEUX PREVENUS ONT RECONNU LA MATERIALITE DES FAITS ;
ATTENDU QUE, POUR REJETER LES CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE,
REPRISES AU MOYEN, LA COUR D'APPEL ENONCE QUE LA DATE DU DOCUMENT CONTREFAIT
N'ETAIT PAS REELLE ET AVAIT ETE PORTEE AINSI UNIQUEMENT DANS LE DESSEIN DE
DISSIMULER LA DATE EFFECTIVE DE LA
La responsabilité du commissaire aux
comptes
236
MISE A LA DISPOSITION DES ACTIONNAIRES ; QU'ELLE CONSTITUAIT, DES
LORS, UN ELEMENT ESSENTIEL DE L'ACTE INCRIMINE DE FAUX ; QUE, MEME SI LES
ACTIONNAIRES N'AVAIENT PAS EU CONNAISSANCE DU RAPPORT "FORGE ET SCIEMMENT
REVETU D'UNE DATE FALLACIEUSE", UN PREJUDICE POUVAIT EN RESULTER POUR EUX,
"CETTE ALTERATION FAISANT PRESUMER QUE LEDIT ACTE AVAIT ETE A LEUR DISPOSITION
DANS LE DELAI DE 15 JOURS, ALORS QUE, N'EXISTANT PAS, IL NE POUVAIT LEUR AVOIR
ETE COMMUNIQUE" ; QUE LE BUT RECHERCHE PAR LES PREVENUS AVAIT ETE DE "SE
COUVRIR" EVENTUELLEMENT SI, COMME ILS LE CRAIGNAIENT, L'ETAT DE CESSATION DES
PAIEMENTS DE LA SOCIETE VENAIT A ETRE DECOUVERT ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS, LA COUR D'APPEL A
CARACTERISE, EN TOUS SES ELEMENTS CONSTITUTIFS, TANT MATERIELS
QU'INTENTIONNELS, LE DELIT DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE, DONT ELLE A
DECLARE LES DEMANDEURS COUPABLES, ET A, SANS ENCOURIR LES GRIEFS ALLEGUES AU
MOYEN, DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ; D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS NE
SAURAIENT ETRE ACCUEILLIS ;
SUR LE
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
COMMUN AUX DEUX DEMANDEURS ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES
457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 MODIFIEE PAR LA LOI DU 4 JANVIER 1967, 593 DU
CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, ET
MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DU DELIT D'INFORMATION MENSONGERE ;
AUX MOTIFS QUE LE PREVENU A, AVEC UN AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES, ETABLI UN PREMIER RAPPORT DATE DU 1ER JUIN 1970 DANS LEQUEL ILS
CERTIFIAIENT POUR LA PREMIERE FOIS EN 5 ANS SANS RESERVES LES COMPTES DE LA
SOCIETE ; QUE CEPENDANT QUELQUES JOURS PLUS TARD LES COMMISSAIRES AUX COMPTES
ETABLISSAIENT UN SECOND RAPPORT PORTANT LA MEME DATE MAIS METTANT EN RELIEF
CERTAINES IRREGULARITES ET CONSTITUANT EN FAIT UN REFUS D'APPROBATION DES
COMPTES ET DOCUMENTS, QU'IL APPARAIT DONC EN DEFINITIVE QUE LES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
237
COMMISSAIRES AUX COMPTES ETAIENT REELLEMENT PERSUADES DE
L'INEXACTITUDE DU BILAN ET QU'ILS N'ONT PAS HESITE A SE PREMUNIR CONTRE LES
CONSEQUENCES D'UNE PRECEDENTE CERTIFICATION A L'EVIDENCE INSOUTENABLE, QUE LE
PREVENU NE JUSTIFIE D'AUCUN ELEMENT PEREMPTOIRE QUI PUISSE L'EXONERER DES
CONSEQUENCES DE LA MISE A DISPOSITION DES ORGANES SOCIAUX D'UN RAPPORT QU'IL
SAVAIT CONTRAIRE A LA VERITE, SA TOTALE PASSIVITE A COMPTER DE LA REDACTION DU
SECOND RAPPORT TEMOIGNANT DE SA CONNIVENCE AVEC L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES
DANS LE PROCESSUS FRAUDULEUX DEJA DECRIT ET AUQUEL IL S'EST DELIBEREMENT
ASSOCIE ;
ALORS QUE LE FAIT QUE LE PREVENU AIT SIGNE UN PREMIER RAPPORT
APPROUVANT LES COMPTES DE L'EXERCICE 1969 SANS RESERVES, PUIS, QUELQUES JOURS
PLUS TARD, AIT REDIGE UN SECOND RAPPORT EMETTANT DES RESERVES, NE CONSTITUE PAS
LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 S'IL
N'EST PAS ETABLI QUE LE PREVENU SAVAIT QUE LE PREMIER RAPPORT PRETENDUMENT
MENSONGER SERAIT FINALEMENT LE SEUL A ETRE COMMUNIQUE A L'ASSEMBLEE GENERALE
DES ACTIONNAIRES, QUE DES LORS EN L'ESPECE OU LES PREMIERS JUGES ONT RELAXE LE
DEMANDEUR DU CHEF D'INFORMATION MENSONGERE APRES AVOIR CONSTATE QUE CE DERNIER
AVAIT LAISSE AU SECOND COMMISSAIRE AUX COMPTES LE SOIN DE DONNER CONNAISSANCE
DU SECOND RAPPORT A L'ASSEMBLEE, LA COUR NE POUVAIT DECLARER LE PREVENU
COUPABLE D'INFORMATION MENSONGERE SANS S'EXPLIQUER SUR LE FAIT QUE CE DERNIER
PR ECISAIT QUE LE SECOND RAPPORT NON MENSONGER SERAIT SOUMIS PAR SON CONFRERE A
L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES ;
SUR LE
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
PROPRE A Z... CONTENU DANS LE MEMOIRE ADDITIONNEL ET PRIS DE LA
VIOLATION DES ARTICLES 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 MODIFIEE PAR LA LOI DU
4 JANVIER 1967, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL
1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
238
EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DU DELIT D'INFORMATION MENSONGERE ;
AUX MOTIFS QUE LE PREVENU A, AVEC UN AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES, ETABLI UN PREMIER RAPPORT DATE DU 1ER JUIN 1970 DANS LEQUEL ILS
CERTIFIAIENT POUR LA PREMIERE FOIS EN 5 ANS SANS RESERVES LES COMPTES DE LA
SOCIETE ; QUE, CEPENDANT, QUELQUES JOURS PLUS TARD, LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES ETABLISSAIENT UN SECOND RAPPORT PORTANT LA MEME DATE MAIS METTANT EN
RELIEF CERTAINES IRREGULARITES ET CONSTITUANT, EN FAIT, UN REFUS D'APPROBATION
DES COMPTES ET DOCUMENTS, QU'IL APPARAIT DONC EN DEFINITIVE QUE LES
COMMISSAIRES AUX COMPTES ETAIENT REELLEMENT PERSUADES DE L'INEXACTITUDE DU
BILAN ET QU'ILS N'ONT PAS HESITE A SE PREMUNIR CONTRE LES CONSEQUENCES D'UNE
PRECEDENTE CERTIFICATION A L'EVIDENCE INSOUTENABLE, QUE LE PREVENU NE JUSTIFIE
D'AUCUN ELEMENT PEREMPTOIRE QUI PUISSE L'EXONERER DES CONSEQUENCES DE LA MISE A
DISPOSITION DES ORGANES SOCIAUX D'UN RAPPORT QU'IL SAVAIT CONTRAIRE A LA
VERITE, SA TOTALE PASSIVITE A COMPTER DE LA REDACTION DU SECOND RAPPORT
TEMOIGNANT DE SA CONNIVENCE AVEC L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES DANS LE
PROCESSUS FRAUDULEUX DEJA DECRIT ET AUQUEL IL S'EST DELIBEREMENT ASSOCIE ;
ALORS QUE LE FAIT QUE LE PREVENU AIT SIGNE UN PREMIER RAPPORT
APPROUVANT LES COMPTES DE L'EXERCICE 1969 SANS RESERVES, PUIS, QUELQUES JOURS
PLUS TARD AIT REDIGE UN SECOND RAPPORT EMETTANT DES RESERVES, NE CONSTITUE PAS
LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 S'IL
N'EST PAS ETABLI QUE LE PREVENU SAVAIT QUE LE PREMIER RAPPORT PRETENDUMENT
MENSONGER SERAIT FINALEMENT LE SEUL A ETRE COMMUNIQUE A L'ASSEMBLEE GENERALE
DES ACTIONNAIRES ;
LES MOYENS CI-DESSUS TRANSCRITS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... ET Z... COUPABLES D'AVOIR
SCIEMMENT DONNE OU CONFIRME DES INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE LA
SOCIETE, L'ARRET ENONCE QUE LES PREVENUS ONT ETABLI UN RAPPORT APPROUVANT LE
BILAN DE L'EXERCICE 1969, PRESENTE AUX ACTIONNAIRES PAR X... LE 23 JUIN 1970
QUI, BIEN QUE SOUSTRAIT AU
La responsabilité du commissaire aux
comptes
239
DERNIER MOMENT, A SERVI DE BASE AUX DELIBERATIONS DE L'ASSEMBLEE
; QUE LA PREUVE DE LA CONNAISSANCE QU'AVAIENT LES DEUX COMMISSAIRES AUX COMPTES
DES INEXACTITUDES DE CE BILAN RESSORTAIT DE LEUR SECOND RAPPORT, ANTIDATE ET
DEMEURE SECRET, QUE LES EXPERTS JUDICIAIRES ONT DECOUVERT PAR LA SUITE QUE LES
DEUX PREVENUS ONT "AGI DE CONNIVENCE DANS LE PROCESSUS FRAUDULEUX DECRIT" ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS QUI, CONTRAIREMENT A CE QUI
EST ALLEGUE AU MOYEN, CARACTERISENT L'ELEMENT CONSTITUTIF INTENTIONNEL DE LA
PREMIERE INFRACTION INSTITUEE PAR LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 457 DE LA LOI
DU 24 JUILLET 1966, RETENUE A LA CHARGE DE Y... ET DE Z..., LA COUR D'APPEL A
JUSTIFIE SA DECISION ; QU'AINSI, LES MOYENS DOIVENT ETRE REJETES ;
SUR LE
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
COMMUN AUX DEUX DEMANDEURS ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES
437 ET 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 MODIFIEE PAR LA LOI DU 4 JANVIER 1967,
DE L'ARTICLE 131 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT ET
CONTRADICTION DE MOTIFS, DEFAUT DE REPONSE A CONCLUSIONS, MANQUE DE BASE LEGALE
;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DE NON-DENONCIATION DE FAITS DELICTUEUX ;
AUX MOTIFS QUE LE PREVENU N'A PAS DENONCE LES AVANCES
IRREGULIERES CONSENTIES PAR LA DIRECTION DE LA SOCIETE A DIVERSES SCI DANS
LESQUELLES LE PDG DE LA SOCIETE DONT IL ETAIT LE COMMISSAIRE AUX COMPTES ETAIT
DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT INTERESSE ; QUE POUR TENTER DE JUSTIFIER SA
CARENCE, LE PREVENU INVOQUE ESSENTIELLEMENT LE FAIT QUE LES OPERATIONS
EFFECTUEES PAR CES SCI N'ETAIENT PAS CONTRAIRES A L'INTERET SOCIAL ET QUE LES
OPERATIONS N'AVAIENT PAS ETE FAITES DANS L'INTERET D'UN ADMINISTRATEUR, QUE
CERTES CERTAINES DES OPERATIONS LITIGIEUSES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
240
ONT INDIRECTEMENT BENEFICIE A LA SOCIETE, MAIS QU'IL EN ETAIT
DIFFEREMMENT, EU EGARD A LA SITUATION FINANCIERE OBEREE DE LA SOCIETE, DES
AVANCES UTILISEES POUR LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS A USAGE PERSONNEL OU POUR
L'AQUISITION DE TERRAINS A BATIR ; QUE, PAR AILLEURS, LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES N'ONT PAS REVELE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS INTERVENU DES LE 30
SEPTEMBRE 1969, QUE LA PRETENDUE PERMANENCE DU CREDIT BANCAIRE DURANT LA
PERIODE POSTERIEURE CORRESPONDAIT EN REALITE NON PAS AU RENOUVELLEMENT DELIBERE
ET CIRCONSTANCIE DE PRECEDENTS ENGAGEMENTS REGULIEREMENT CONTRACTES MAIS A LA
RECONDUCTION PRECAIRE D'UNE SITUATION DEBITRICE RUINEUSE DANS L'UNIQUE SOUCI
D'EVITER UN EFFONDREMENT BRUTAL ET IMMEDIAT AVEC LES CONSEQUENCES POUVANT EN
DECOULER AU REGARD DES CREANCES DU POOL BANCAIRE, QUE D'AILLEURS LES DEUX
COMMISSAIRES NE SE SONT NULLEMENT MEPRIS SUR LA SIGNIFICATION DE CES VERITABLES
SURSIS SUCCESSIFS QUE CONSTITUAIENT LES ECHEANCES MENSUELLES DE LA SOCIETE A
PARTIR DE L'AUTOMNE 1969 PUISQUE DANS LEUR RAPPORT CONTREFAIT ETABLI LE 22 JUIN
1970, ILS ONT MENTIONNE QUE "CERTAINS RISQUES SUBSISTENT", FORMULATION
INTENTIONNELLEMENT SIBYLLINE QUI TRADUIT EN REALITE LEUR CONVICTION D'UNE
SITUATION FINANCIERE COMPROMISE EN MEME TEMPS QUE LE SOUCI DE SE CONSTITUER UN
ALIBI DANS LA PERSPECTIVE D'UN EFFONDREMENT QU'ILS TENAIENT POUR INELUCTABLE
;
ET QU'ENFIN, SI LA DEROBADE UTILISEE PAR LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES DANS LEUR RAPPORT RELATIF A L'EXERCICE 1968 LES EXONERE DE L'IMPUTATION
DE CONFIRMATION D'INFORMATIONS MENSONGERES PUISQU'ILS NE SE SONT PAS AVENTURES
A CERTIFIER LA REGULARITE ET LA SINCERITE DE CE BILAN, LEUR CARENCE A LA SUITE
DE LA PRESENTATION AUX ACTIONNAIRES D'UN BILAN QU'ILS SAVAIENT INEXACT JUSTIFIE
A LEUR ENCONTRE L'IMPUTATION DE LA SECONDE INFRACTION DEFINIE PAR L'ARTICLE 457
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, DE MEME QUE LEUR CARENCE EN DEPIT DE LA
PRESENTATION AUX ACTIONNAIRES DU BILAN RELATIF A L'EXERCICE DE L'ANNEE 1969
DONT ILS AVAIENT DECELE L'INEXACTITUDE ; ALORS QUE, D'UNE PART, LA COUR QUI A
RECONNU QUE CERTAINES DES AVANCES CONSENTIES AUX SCI ETAIENT CONFORMES A
L'INTERET DE LA
La responsabilité du commissaire aux
comptes
241
SOCIETE PRETEUSE, NE POUVAIT PRETENDRE QUE D'AUTRES AVANCES
UTILISEES POUR LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS A USAGE PERSONNEL OU POUR
L'ACQUISITION DE TERRAINS A BATIR ETAIENT ETRANGERES A L'OBJET SOCIAL SANS
REPONDRE AUX CONCLUSIONS DU PREVENU QUI SOULIGNAIT QUE LES AVANCES LITIGIEUSES
AVAIENT ETE CONSENTIES AUX SCI POUR EDIFIER DES LOGEMENTS DESTINES AU PERSONNEL
DE LA SOCIETE OU POUR DIVERSIFIER L'ACTIVITE SOCIALE DE LA SOCIETE MERE APRES
LE RALENTISSEMENT DES COMMANDES DE L'ADMINISTRATION ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE LE FAIT QUE LES COMMISSAIRES AUX COMPTES
AIENT DANS PLUSIEURS RAPPORTS EXPRIME DES RESERVES CONCERNANT LES RISQUES
ENCOURUS N'IMPLIQUAIT EN RIEN QU'ILS AIENT PU AVOIR CONNAISSANCE D'UNE
PRETENDUE SITUATION DE CESSATION DES PAIEMENTS, CETTE SITUATION SANS ISSUE
ETANT D'AILLEURS A PRIORI EXCLUE PAR LA PERMANENCE DU SOUTIEN BANCAIRE ACCORDE
A LA SOCIETE JUSQU'A LA DATE DU DEPOT DU BILAN ;
ET ALORS QU'ENFIN LE FAIT POUR UN COMMISSAIRE AUX COMPTES
D'EXPRIMER DANS SON RAPPORT DES RESERVES SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE QU'IL A
POUR CHARGE DE VERIFIER N'IMPLIQUE EN RIEN QUE CE COMMISSAIRE PUISSE AVOIR
CONNAISSANCE DE L'INEXACTITUDE PRETENDUE DU BILAN ET DU CARACTERE PENALEMENT
REPREHENSIBLE DE CETTE INEXACTITUDE ;
ET SUR LE
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
PROPRE A Z... CONTENU DANS LE MEMOIRE ADDITIONNEL ET PRIS DE LA
VIOLATION DES ARTICLES 437, 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 MODIFIEE PAR LA
LOI DU 4 JANVIER 1967, DE L'ARTICLE 131 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, DE
L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DE
NON-DENONCIATION DE FAIT DELICTUEUX ;
AUX MOTIFS QUE LE DEMANDEUR SE SERAIT TOTALEMENT ABSTENU DE
DENONCER AU MINISTERE PUBLIC DES FAITS CARACTERISANT D'UNE PART L'EXISTENCE DE
PRELEVEMENTS ABUSIFS AU PROFIT DES SOCIETES CIVILES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
242
IMMOBILIERES, D'AUTRE PART L'OMISSION DE DECLARATION DE LA
CESSATION DES PAIEMENT DE GEEP-INDUSTRIES ;
ALORS, D'UNE PART, QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES NE SE REND
COUPABLE DU DELIT DE NON-REVELATION AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE FAITS
DELICTUEUX QU'A CONDITION QU'IL AIT EU CONNAISSANCE, NON SEULEMENT DES FAITS
EUX-MEMES, MAIS DE LEURS CARACTERES D'INFRACTION PENALE ; QUE LE DELIT D'ABUS
DE BIENS SOCIAUX SUPPOSE L'UTILISATION PAR UN DIRIGEANT SOCIAL DES FONDS DE LA
SOCIETE DANS UN BUT PERSONNEL ET CONTRAIRE A L'INTERET SOCIAL ; QU'IL NE
RESULTE PAS DE LA DECISION ATTAQUE QUE LE DEMANDEUR AIT EU CONNAISSANCE DE CE
QUE L'USAGE QUI A ETE FAIT DES FONDS SOCIAUX POUR LA CONSTITUTION DE LA SCI
ETAIT CONTRAIRE A L'INTERET SOCIAL ; QUE LA COUR D'APPEL DEVAIT D'AUTANT PLUS
S'EXPLIQUER SUR CE POINT QU'ELLE AVAIT ETE SAISIE PAR UN AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES DE CONCLUSIONS SUSCEPTIBLES DE BENEFICIER AU DEMANDEUR ET SOULIGNANT
QUE LES AVANCES LITIGIEUSES AVAIENT ETE CONSENTIES AUX SCI POUR EDIFIER DES
LOGEMENTS DESTINES AU PERSONNEL DE LA SOCIETE OU POUR DIVERSIFIER L'ACTIVITE
SOCIALE DE LA SOCIETE MERE APRES LE RALENTISSEMENT DES COMMANDES DE
L'ADMINISTRATION ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE SI LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT ADOPTE
LES MOTIFS DES PREMIERS JUGES, DONT IL RESULTE QUE LE DEMANDEUR AVAIT, DES LE
22 NOVEMBRE 1969, ECRIT A Y... QUE LA POSITION FINANCIERE DE GEEP-INDUSTRIES
ETAIT TRES PRECAIRE ET LUI AVAIT FAIT CONNAITRE, LE 26 MARS 1970, QUE
L'ECHEANCE DU 10 AVRIL 1970 SERAIT TRES DIFFICILE PUISQUE DES EFFETS D'UNE
VALEUR DE 10 MILLIONS DE FRANCS AVAIENT ETE REFUSES ET QUE LA SOCIETE GENERALE
S'ETAIT RETIREE DU BANCAIRE, IL NE RESULTE PAS DE CETTE CONSTATATION QUE LE
DEMANDEUR AVAIT CONNAISSANCE DE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS PUISQUE LES
PREMIERS JUGES CONSTATENT, AU CONTRAIRE, QUE LE DEMANDEUR AVAIT DEMANDE A X...
D'INTRODUIRE UNE INSTANCE EN SUSPENSION DES POURSUITES, CE QUI IMPLIQUAIT
NECESSAIREMENT QUE DANS SON ESPRIT IL N'Y AVAIT PAS DE CESSATION DE PAIEMENT,
LA SUSPENSION DES
POURSUITES NE POUVANT ETRE ORDONNEE QU'AU PROFIT D'UNE SOCIETE
QUI NE SE TROUVE PAS EN ETAT DE CESSATION DE PAIEMENT ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
243
ALORS, ENFIN, QUE LE FAIT, POUR UN COMMISSAIRE AUX COMPTES,
D'EXPRIMER DANS SON RAPPORT DES RESERVES SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE QU'IL A
POUR CHARGE DE VERIFIER, N'IMPLIQUE EN RIEN QUE CE COMMISSAIRE PUISSE AVOIR
CONNAISSANCE DE L'INEXACTITUDE PRETENDUE DU BILAN ET DU CARACTERE PENALEMENT
REPREHENSIBLE DE CETTE INEXACTITUDE ;
LES MOYENS CI-DESSUS TRANSCRITS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... ET Z... COUPABLES DE N'AVOIR PAS
DENONCE AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE LES FAITS DELICTUEUX DONT ILS ONT EU
CONNAISSANCE, L'ARRET ENONCE QUE LES PREVENUS ONT CONNU, SANS LES DENONCER,
D'UNE PART, LES AGISSEMENTS DE X... QUI CONSISTAIENT A AVOIR, APRES
CONSTITUTION DE SOCIETES CIVILES IMMOBILIERES, FAIT FAIRE, PAR LA SOCIETE
GEEP-INDUSTRIES, A PLUSIEURS DE CELLES-CI ET SANS AUTORISATION DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION, DES AVANCES DE TRESORERIE TOTALISANT 10 538 808 FRANCS,
D'AUTRE PART, L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS DES SOCIETES GEEP, ET ENFIN, LE
DELIT DE PRESENTATION DE BILANS INEXACTS, COMMIS PAR X..., TANT EN CE QUI
CONCERNE LES COMPTES DE 1968 QUE CEUX DE 1969 ;
ATTENDU QUE LES JUGES PRECISENT, D'UNE PART, POUR REPONDRE A UN
CHEF DES CONCLUSIONS DE Y... REPRIS AU MOYEN, QUE LES AVANCES DE TRESORERIE EN
CAUSE ONT ETE PARTIELLEMENT UTILISEES A LA CONSTRUCTION DU LOGEMENT PERSONNEL
DE X... ET A L'ACQUISITION DE TERRAINS SANS RAPPORT AVEC L'OBJET DES SOCIETES
GEEP ET QUE X... S'EST AINSI CONSTITUE, A L'AIDE DE FONDS SOCIAUX, UN
PATRIMOINE QUI LUI ETAIT PROPRE, D'AUTRE PART, EN CE QUI CONCERNE LA DATE DE
CESSATION DES PAIEMENTS FIXEE AU 30 SEPTEMBRE 1969, QUE LES DEUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES NE SE SONT NULLEMENT MEPRIS SUR L'ETAT DE LA SOCIETE A PARTIR DE
CETTE DATE, AINSI QU'IL RESULTE DE LA CORRESPONDANCE ECHANGEE ENTRE EUX ET DE
LEUR RAPPORT ANTIDATE ETABLI LE 22 JUIN 1970, ET ENFIN, QUE LES DEUX PREVENUS,
EN NE DENONCANT PAS LA PRESENTATION DE DEUX BILANS DONT ILS CONNAISSAIENT LE
CARACTERE INEXACT, ONT FAIT PREUVE D'UNE CARENCE COUPABLE ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT, LA COUR D'APPEL, QUI A CARACTERISE, A LA
CHARGE DE Y... ET DE Z..., COMMISSAIRES AUX COMPTES, LE DELIT DE NON-
La responsabilité du commissaire aux
comptes
244
DENONCIATION PREVU PAR L'ARTICLE 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET
1966, ET A REPONDU AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT
REGULIEREMENT SAISIE, A, SANS ENCOURIR LES GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN, DONNE UNE
BASE LEGALE A SA DECISION ; D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS DOIVENT ETRE REJETES ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ; REJETTE LES POURVOIS.
Références :
(2)
(5) (6) LOI 66-537 1966-07-24 ART. 437-2, ART. 444, ART. 445
Code pénal 402
LOI 66-537 1966-07-24 ART. 457
LOI 67-563 1967-07-13 ART. 130, ART. 131, ART. 132, ART. 133
LOI 67-563 1967-07-13 ART. 29, ART. 139
Décision attaquée : Cour d'appel Paris (Chambre 9
), 09 juillet 1979
La responsabilité du commissaire aux
comptes
245
Annexe 18
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
8 Avril 1991
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : CONFIRMATION D?INFORMATION
MENSONGERES
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 8 avril 1991
N° de pourvoi: 88-81542
Publié au bulletin
Action publique éteinte et rejet
Président :M. Tacchella, conseiller le plus
ancien faisant fonction., président
Rapporteur :M. Hecquard, conseiller apporteur
Avocat général :M. Perfetti, avocat
général
Avocats :la SCP Lesourd et Baudin, la SCP Peignot et Garreau,
avocat(s)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
246
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
ACTION PUBLIQUE ETEINTE ET REJET des pourvois formés par
:
- X... Marcelino,
- Y... Maurice,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Angers, chambre
correctionnelle, en date du 11 février 1988, qui a condamné le
premier pour présentation d'un bilan inexact à 3 mois
d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende, et le second pour
confirmation d'informations mensongères à 30 000 francs d'amende
et a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I.- Sur l'action publique à l'égard de Marcelino
X... :
Attendu que Marcelino X... est décédé le
1er juillet 1989 ;
Qu'il s'ensuit qu'à son égard l'action publique
exercée du chef de présentation d'un bilan inexact est
éteinte ;
Qu'il convient en ce qui concerne Marcelino X... d'examiner le
pourvoi au regard de l'action civile seulement ;
II.- Sur l'action publique à l'égard de Maurice
Y... et sur l'action civile exercée par les consorts E... et F... :
Vu les mémoires produits ;
Sur le moyen additionnel de cassation de X... : (sans
intérêt) ;
Sur le premier moyen de cassation de Y... : (sans
intérêt) ;
Sur le moyen unique de cassation, en faveur de X..., pris de la
violation des articles 437, 457 et 464 de la loi du 24 juillet 1966, 463 du
Code pénal et 593 du Code de procédure pénale,
défaut de motifs, manque de base légale et défaut de
réponse à conclusions :
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré le prévenu coupable d'avoir, en sa qualité
de président-directeur général de la société
E..., sciemment présenté aux actionnaires, en vue de dissimuler
la véritable situation de la société, des comptes annuels
ne
La responsabilité du commissaire aux
comptes
247
donnant pas, pour l'exercice clos le 31 mars 1983, une image
fidèle, au résultat des opérations de l'exercice, de la
situation financière et du patrimoine, à l'expiration de cette
période ;
» aux motifs que Michel Z..., chef comptable licencié
de la société E..., avait établi, courant avril et mai
1983, le bilan et le compte d'exploitation de la SA E..., pour l'exercice clos
le 31 mars 1983, lesquels faisaient apparaître un bénéfice
d'exploitation de 1 159 844 francs et que, dans le bilan présenté
à l'assemblée générale des actionnaires du 23
septembre 1983, ce bénéfice ressortait à 343 418 francs ;
que, si une partie de la différence s'expliquait par la déduction
régulière de la prime de bilan fixée à 364 000
francs, le solde correspondait à des manipulations comptables, X...
ayant demandé à Z... de jouer sur les stocks ; que X... avait
déclaré n'avoir jamais eu connaissance de ces manipulations, ni
du premier bilan établi par Z..., mais que ce premier bilan avait
été retrouvé chez X... qui l'avait qualifié de
simple « brouillon « ; que C... avait confirmé les
déclarations de Z... selon lesquelles X... avait donné des
instructions à ce dernier afin de minorer les résultats de
l'exercice en jouant sur les stocks ;
» alors, d'une part, sur l'élément
matériel de l'infraction, que, dans ses conclusions demeurées
sans réponse, X... avait fait valoir qu'il résultait des
déclarations d'Elisabeth A... » que les chiffres incriminés
étaient de la main de C... » (p. 4 in fine), et de celles de
Martine B..., que c'était C... qui lui avait demandé de rectifier
les fiches et qu'elle avait, sur les indications que celui-ci lui avait
données, gommé tout un ensemble de fiches pour diminuer le
montant quantitatif des produits et, par conséquent, leur valeur ;
qu'enfin, Mme D... avait démenti avoir été témoin
de la discussion entre Z..., C... et Mme B... au sujet des stocks ; que X...
avait aussi souligné que c'était C... qui avait la
responsabilité de la préparation des bilans
présentés aux actionnaires et notamment de celui de 1982 et que
les différences entre les valeurs des stocks, entre celui de 1983 et
ceux des années précédentes, étaient trop
importantes pour être justifiées compte tenu de la progression du
chiffre d'affaires dans le même temps ; qu'en statuant comme elle l'a
fait, sans s'expliquer sur ces moyens péremptoires des conclusions, la
cour d'appel n'a pas légalement justifié la déclaration de
culpabilité ;
» alors, d'autre part, s'agissant du projet de bilan
établi par Z... en avril-mai 1983, qualifié par lui «
brouillon «, X... avait fait valoir que le comptable n'avait tenu compte
ni de certains frais et charges tels l'impôt sur les
sociétés et les primes versées au
La responsabilité du commissaire aux
comptes
248
personnel à concurrence de 841 626 francs, ni de la
dépréciation du stock à concurrence de 348 240 francs
selon les usages en la matière (conclusions p. 7, paragraphe 6 et
suivants) ; qu'en omettant de rechercher si le surplus de la différence
entre le bénéfice arrêté dans le projet de bilan
présenté aux actionnaires ne s'expliquait pas par l'impôt
sur les sociétés et la dépréciation du stock dont
le comptable Z... et son supérieur C... auraient dû tenir compte,
la cour d'appel a derechef privé sa décision de base
légale « ;
Sur le deuxième moyen de cassation, en faveur de Y...,
pris de la violation des articles 437. 2 et 457 de la loi du 24 juillet 1966,
593 du Code de procédure pénale : » en ce que l'arrêt
attaqué a déclaré constituée l'infraction de
présentation de bilan inexact reprochée au dirigeant de la
société E..., infraction à l'occasion de laquelle le
demandeur, commissaire aux comptes, a été lui-même
prévenu et condamné pour confirmation d'informations
mensongères et non-révélation au procureur de la
République de faits délictueux ;
» aux motifs qu'il est établi par les pièces
de l'information et par les débats que Z..., alors responsable de la
comptabilité de la société E..., a établi, courant
avril et mai 1983, le bilan et le compte d'exploitation de cette
société pour l'exercice clos le 31 mars 1983, faisant
apparaître un bénéfice d'exploitation de 1 159 844 francs ;
que, dans le bilan effectivement présenté lors de
l'assemblée générale des actionnaires du 23 septembre
1983, le bénéfice ressortait à 343 418 francs ; que, si
une partie de la différence entre ces deux bénéfices
s'explique par la déduction régulière de la prime de
bilan, fixée à 364 000 francs, le solde correspond à des
manipulations comptables ;
» alors que le bénéfice d'exploitation ne
tient pas compte de certaines charges et de l'impôt sur les
sociétés, contrairement au bénéfice comptable
établi à partir du bénéfice d'exploitation,
après déduction de ces charges et de l'impôt sur les
sociétés ; qu'en comparant un bénéfice
d'exploitation de 1 159 844 francs (donnant un bénéfice comptable
de 353 283 francs après les déductions nécessaires) et un
bénéfice comptable de 343 418 francs pour en déduire que
la différence entre leurs montants respectifs laissait apparaître
l'existence de manipulations comptables, la cour d'appel n'a pas donné
de base légale à sa décision au regard des textes
susvisés « ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que
Marcelino X..., président du conseil
La responsabilité du commissaire aux
comptes
249
d'administration de la société anonyme E..., a
été poursuivi pour avoir soumis à l'approbation des
actionnaires, lors de l'assemblée générale du 23 septembre
1983, les comptes annuels de l'exercice clos le 31 mars 1983 ne
présentant pas une image fidèle du résultat des
opérations de l'exercice, de la situation financière et du
patrimoine de la société et Maurice Y..., commissaire aux
comptes, pour avoir, dans les mêmes circonstances, confirmé ces
informations mensongères ;
Attendu que, pour déclarer établie la
prévention, la cour d'appel relève que plusieurs employés
de la société, dont le chef-comptable et le responsable financier
et administratif, ont déclaré avoir reçu de X... des
instructions pour diminuer la valeur des stocks et pour soustraire les fiches
de stocks établies dans les divers secteurs d'activité de
l'entreprise et ainsi réduire les résultats
bénéficiaires apparus dans la comptabilité de la
société, qu'au domicile de X... un document sur lequel figurait
la véritable situation financière de la société a
été saisi et qu'il a été ainsi constaté que
la valeur des stocks était supérieure de 430 000 francs à
celle figurant sur le livre d'inventaire ; qu'un contrôle des services
fiscaux avait confirmé la manipulation des fiches de stocks et avait
abouti à un redressement ; qu'ainsi l'ensemble des témoignages et
des éléments recueillis au cours de l'information
établissait la réalité de la falsification des comptes de
l'entreprise qui, de ce fait, ne pouvaient donner une image fidèle des
opérations de l'exercice considéré de la situation
financière et du patrimoine de l'entreprise pendant cette période
;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations,
abstraction faite d'un motif inopérant, la Cour de Cassation est en
mesure de s'assurer que la cour d'appel a caractérisé
l'élément matériel, seul remis en cause, des infractions
dont les prévenus ont été reconnus coupables et ainsi
justifié les dommages-intérêts alloués ;
Que les moyens qui reviennent à discuter, sous couvert
d'un défaut de réponse à conclusions, d'insuffisance et de
contradiction de motifs, l'appréciation souveraine par les juges du fond
des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus ne
sauraient être accueillis ;
Sur le troisième moyen de cassation en faveur de Y...,
pris de la violation de l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966, et de
l'article 593 du Code de procédure pénale : » en ce que
l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré le demandeur
coupable des infractions reprochées, en ayant confirmé sciemment
des informations mensongères lors de l'assemblée
générale des actionnaires de la SA E... du 23 septembre 1983, et
en n'ayant pas révélé les faits délictueux
reprochés au dirigeant social, au
La responsabilité du commissaire aux
comptes
250
procureur de la République, et d'avoir en
répression condamné le demandeur à 30 000 francs d'amende
;
» aux motifs que, d'une façon générale,
les commissaires aux comptes ont pour mission permanente de certifier la
sincérité des informations données sur les comptes de la
société dans le rapport du conseil d'administration et du
directoire ; qu'ils doivent certifier, dans leur rapport à
l'assemblée générale des actionnaires, la
régularité et la sincérité de l'inventaire, du
bilan, du compte d'exploitation générale et du compte des pertes
et profits, que, garants vis-à-vis des actionnaires de la
régularité des comptes de l'entreprise, ils doivent
également révéler au procureur de la République les
faits délictueux dont ils peuvent avoir connaissance dans l'exercice de
leur mission ; que, s'il est admis que le commissaire aux comptes, dans les
sociétés bien gérées, peut limiter ses
vérifications à de simples sondages, ainsi que l'a fait Y..., il
doit cependant examiner plus soigneusement les comptes qui présentent un
aspect anormal ; qu'en l'espèce, les contrôles
réalisés sur les stocks ne se sont pas opérés dans
des conditions normales eu égard au caractère incomplet du livre
d'inventaire et à l'absence des récapitulatifs de stocks que,
dès lors, même si, selon lui, cet incident ne l'a pas
empêché d'effectuer ses diligences, Y... ne pouvait pas ne pas
établir un lien étroit entre cette situation et la
dénonciation faite dès le 25 août 1983, lendemain du terme
de sa mission, par Michel Z... faisant état de l'existence d'anomalies
comptables importantes ; en effet, cette dénonciation faite par le chef
comptable de l'entreprise, même en instance de licenciement,
présentait d'autant plus de crédibilité que
l'intéressé avait travaillé près de 20 ans en
qualité de collaborateur de Maurice Y..., connaissait parfaitement le
dossier E..., et était considéré comme un bon technicien
dans l'entreprise que par suite, et quel que soit le degré de
précision de la dénonciation verbale, ces anomalies comptables
volontaires ne pouvaient plus faire de doute dans l'esprit du commissaire aux
comptes à la réception de la lettre de Z... du 15 septembre 1983,
qui, sans ambiguïté, insistait sur les anomalies affectant le livre
d'inventaire et les valeurs d'exploitation et dénonçait
clairement l'existence de la fraude ; qu'il apparaît enfin que la lettre
du conseil de Mme E..., dont Maurice Y... a pris connaissance avant
l'assemblée générale des actionnaires du 23 septembre
1983, comportait des éléments précis sur les anomalies
dénoncées puisqu'elle visait expressément la manipulation
des stocks ;
» que dès lors, face à ces différents
indices et informations dont l'accumulation était
La responsabilité du commissaire aux
comptes
251
d'autant plus révélatrice que Y... ne pouvait
ignorer, de par son expérience professionnelle d'une part, que le poste
stock est un des plus facilement falsifiables et d'autre part, que la SA E...
avait, en 1981, fait l'objet d'un redressement fiscal pour infraction sur les
stocks et travaux en cours, le prévenu se devait de reprendre ses
opérations, d'approfondir ses vérifications alors que la fraude
pouvait encore être mise au jour avant le grattage effectué fin
septembre ; qu'il a ainsi démontré une méconnaissance de
sa mission, surprenante compte tenu de sa longue expérience
professionnelle ; que si le commissaire aux comptes n'a pas pour rôle de
se transformer en policier, il dénature sa mission en se laissant
aveugler par un excès de confiance ou de défiance
vis-à-vis des membres de l'entreprise contrôlée ; qu'en
effet, si les rapports antérieurs entre Maurice Y... et Michel Z...
ainsi que sa personnalité ont pu entamer la lucidité du
commissaire aux comptes, ce dernier restait lié par ses obligations
légales et ne les a pas respectées ; que les agissements de Y...
sont au-delà d'une simple négligence et qu'ayant eu connaissance
des anomalies affectant la comptabilité et le bilan et constituant par
là même des infractions pénales, il ne peut
prétendre n'avoir pas suffisamment été informé par
le seul fait qu'il s'est refusé à la contrôler ;
» alors que, d'une part, un commissaire aux comptes ne peut
être condamné pour les infractions de confirmation d'informations
mensongères et de non-révélation au procureur de la
République de faits délictueux que s'il est établi qu'il a
eu une connaissance précise et certaine du caractère mensonger
des informations, et des faits délictueux en cause, sa seule
négligence dans l'exercice de sa mission de vérification et de
contrôle ne pouvant à elle seule caractériser l'infraction
; que la cour d'appel, qui s'est bornée à reprocher à Y...
de n'avoir pas repris ses opérations de contrôle et approfondi ses
vérifications concernant des anomalies comptables invoquées dans
des lettres de dénonciation, sans qu'il résulte d'aucune des
énonciations de son arrêt, lesquelles se limitaient
essentiellement à reproduire les termes du réquisitoire
définitif, que le prévenu ait réellement eu connaissance
des malversations reprochées au dirigeant social, avant l'ouverture de
toute information, n'a pas caractérisé les éléments
constitutifs du délit retenu et n'a, par conséquent, pas
donné de base légale à sa décision au regard des
textes susvisés ;
» alors que, d'autre part, l'appréciation par les
juges du fond du caractère délictueux des circonstances de la
cause doit être déduite sans contradiction des faits
constatés ; qu'en relevant que « la fraude pouvait encore
être mise au jour avant le grattage
La responsabilité du commissaire aux
comptes
252
effectué fin septembre « et admettant par là
même que précisément Y... n'avait pas eu connaissance de
cette « fraude « avant l'ouverture d'une information, puis en
déclarant que ce dernier aurait confirmé sciemment des
informations mensongères et n'aurait pas révélé les
faits en cause au procureur de la République, la cour d'appel s'est
contredite et a donc violé l'article 593 du Code de procédure
pénale « ; Attendu que, pour déclarer Maurice Y... coupable
d'avoir confirmé des informations mensongères et omis de
dénoncer au Parquet des faits délictueux, la cour d'appel,
après avoir exposé les circonstances dans lesquelles les stocks
de la société avaient été
sous-évalués pour faire apparaître finalement des
bénéfices inférieurs à la réalité,
relève que le prévenu qui avait procédé à sa
mission de contrôle des comptes dans des conditions anormales avait
disposé d'un livre d'inventaire incomplet et n'avait pu obtenir
communication de l'état récapitulatif des stocks et des travaux
en cours ; qu'il avait néanmoins certifié sans réserve la
régularité des comptes annuels de la société E...
lors de l'assemblée générale des actionnaires le 23
septembre 1983 ; qu'elle ajoute que, quelques jours avant cette réunion,
Y... avait été informé par le chef comptable de la
société et le conseil de l'un des actionnaires que les comptes
étaient faux ; qu'elle conclut de ces constatations que les agissements
de Y... ne constituaient pas simplement de la négligence, que
l'intéressé avait eu connaissance des anomalies affectant la
comptabilité et le bilan de la société et qu'il ne pouvait
prétendre ne pas en avoir été informé ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et
énonciations, la cour d'appel a caractérisé sans
insuffisance ni contradiction en tous leurs éléments, notamment
intentionnel, les délits prévus et réprimés par
l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966 et a justifié sa
décision sans encourir les griefs du moyen qui ne peut ainsi
qu'être rejeté ;
Que dès lors le moyen ne peut être accueilli ;
Par ces motifs :
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
1° DECLARE l'action publique éteinte en ce qui
concerne Marcelino X... ;
2° REJETTE le pourvoi de Marcelino X... en ce qu'il a
statué sur l'action civile ; 3° REJETTE le pourvoi de Maurice
Y...
Publication : Bulletin criminel 1991 N° 166
p. 421
La responsabilité du commissaire aux
comptes
253
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Angers (chambre correctionnelle), du 11 février 1988
Titrages et résumés : 1°
CASSATION - Pourvoi - Décès du prévenu - Effet - Action
civile - Ayants droit ne figurant pas personnellement dans la cause
1° En cas de décès du prévenu au cours
de l'instance en cassation, la Cour de Cassation reste compétente pour
statuer sur le pourvoi en tant qu'il vise les condamnations civiles. La
circonstance qu'aucun des héritiers n'intervient ne peut avoir pour
conséquence de faire considérer le pourvoi comme sans objet
(1).
2° SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Comptes annuels - Présentation de
comptes annuels inexacts - Eléments constitutifs - Elément
matériel
2° La sous-évaluation des stocks pour fausser les
résultats bénéficiaires de l'entreprise constitue
l'élément matériel du délit de présentation
aux actionnaires des comptes annuels ne donnant pas, pour l'exercice
considéré, une image fidèle de la situation
financière et du patrimoine de la société
3° SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Commissaires aux comptes - Informations
mensongères - Eléments constitutifs - Elément intentionnel
- Constatations suffisantes
3° Commet le délit d'informations mensongères,
prévu et réprimé par l'article 457 de la loi du 24 juillet
1966, le commissaire aux comptes qui approuve sans réserve la
régularité des comptes annuels, alors qu'il a constaté que
le livre d'inventaire est incomplet, qu'il n'a pu obtenir l'état
récapitulatif des stocks et des travaux en cours et qu'il a
été informé par le chef-comptable de la
société ainsi que par le conseil de l'un
La responsabilité du commissaire aux
comptes
254
des actionnaires que les comptes étaient faux (2).
Précédents jurisprudentiels :
CONFER : (1°). (1) Cf. A rapprocher : Crim. 1977-1009 , Bulletin
criminel 1977, n° 310, p. 785 (action publique éteinte et
cassation), et les arrêts cités. CONFER : (3°). (2) Cf. A
rapprocher : Chambre criminelle, 1990-04-02 , Bulletin criminel 1990, n°
142, p. 377 (rejet), et les arrêts cités.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
255
Annexe 17
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
2 Avril 1990
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : CONFIRMATION D?INFORMATION
MENSONGERES
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 2 avril 1990
N° de pourvoi: 87-90729
Publié au bulletin
Rejet
Président :M. Le Gunehec,
président
Rapporteur :M. Gondre, conseiller apporteur
Avocat général :M. Lecocq, avocat
général
Avocat :la SCP Boré et Xavier, avocat(s)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
256
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET des pourvois formés par :
- X... Henri,
- Y... Pierre,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre
correctionnelle, en date du 10 juillet 1987, qui, pour informations
mensongères par commissaire aux comptes, les a condamnés chacun
à la peine de 20 000 francs d'amende.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux deux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des
articles 435, 436, 437, 446, 593 et 802 du Code de procédure
pénale ; défaut de motifs et manque de base légale :
» en ce que l'arrêt attaqué rejetant
l'exception de nullité du jugement a déclaré Y... et X...,
coupables du délit d'information mensongère ;
» aux motifs qu'il résulte des énonciations
des notes d'audience que le Tribunal a entendu les explications fournies par M.
Z... et que ces notes d'audience ne mentionnent pas si les prescriptions de
l'article 436 du Code de procédure pénale ont été
observées, ni si Z... qui ne pouvait comparaître qu'en
qualité de témoin, a prêté le serment prévu
par l'article 437 du même Code ; que ces irrégularités
n'ont toutefois pas porté atteinte aux intérêts de X... et
Y..., qui n'ont élevé, lors de cette audition, aucune
protestation de sorte que le principe du contradictoire a été
respecté ; qu'il ne résulte pas en outre péremptoirement
des énonciations du jugement que les premiers juges pour asseoir tout ou
partie de leur conviction sur la culpabilité des prévenus se sont
fondés sur les déclarations fournies à l'audience par Z...
qui n'a pas fait état d'éléments qui n'étaient pas
déjà apparus lors de l'information judiciaire (arrêt
attaqué p. 5, al. 4, 5, 6, 7, 8, 9, p. 6, al. 1) ;
» alors que le président du tribunal correctionnel ne
peut pas s'arroger le pouvoir discrétionnaire que la loi n'accorde qu'au
président de la cour d'assises d'entendre,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
257
sans prestation de serment, une personne qui n'a même pas
été citée par l'une des parties en qualité de
témoin ; qu'en rejetant néanmoins l'exception de nullité
d'ordre public, fondée sur l'excès de pouvoir commis par le
président du tribunal correctionnel au motif que cette
irrégularité n'aurait pas porté atteinte aux droits de la
défense, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
» alors que le juge ne peut rejeter l'exception de
nullité du jugement tiré du défaut de prestation de
serment d'un témoin que s'il est établi que la déposition
n'a exercé aucune influence sur la décision ; que la cour d'appel
s'est, en l'espèce, bornée à relever qu'» il ne
résulte pas péremptoirement des énonciations du jugement
« que les premiers juges ont fondé leur conviction sur les
déclarations fournies à l'audience par Z... ; qu'en omettant de
rechercher s'il était certain que cette déposition n'avait
exercé aucune influence sur le jugement, la cour d'appel a
entaché son arrêt d'une insuffisance de motifs « ;
Attendu que pour écarter l'exception reprise au moyen et
tirée d'une prétendue nullité de la procédure
suivie devant le Tribunal, la cour d'appel relève que, s'il est vrai que
les notes d'audience ne mentionnent pas que les prescriptions des articles 436
et 437 du Code de procédure pénale ont été
respectées lors de l'audition de M. Z... en qualité de
témoin, l'inobservation des formalités prévues par ces
textes n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux intérêts des
prévenus au sens de l'article 802 du Code précité,
dès lors qu'il ne résulte pas des énonciations du jugement
que les premiers juges, pour asseoir en tout ou en partie leur conviction sur
la culpabilité, se soient fondés sur les déclarations
fournies par ce témoin, lequel, au demeurant, n'a pas fait état
d'éléments qui n'étaient déjà apparus lors
de l'information judiciaire ; Attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a
donné une base légale à sa décision sans encourir
les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli
;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des
articles 457 de la loi du 24 juillet 1966 et 593 du Code de procédure
pénale ; défaut de motifs, manque de base légale :
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré X... et Y... coupables du délit d'information
mensongère par commissaire aux comptes ;
» aux motifs adoptés, d'une part, que les
éléments significatifs des comptes 1980, 1981 et 1982 figurant
sur le document d'information qui se terminait par le visa des commissaires aux
comptes, étaient faux, et que X... et Y... le savaient ; qu'en effet
ils
La responsabilité du commissaire aux
comptes
258
avaient maintenu leur certification des comptes consolidés
en dépit de l'avis des commissaires aux comptes d'UIE, une des
sociétés du groupe, selon lequel celle-ci aurait subi une perte
de 16, 4 MF au lieu d'un bénéfice de 5, 2 MF et qu'en
définitive, après une modification du mode de calcul, le
bénéfice devait être ramené à 2, 19 MF ; que
X... et Y... ont néanmoins laissé figurer dans les
éléments significatifs publiés les chiffres non
rectifiés de sorte que le bénéfice du groupe était
de 80, 54 MF et non de 77, 47 MF ; que si les recommandations de l'ordre des
experts comptables, qui admet un seuil de redressement qui ne peut
excéder 10 % du résultat net, peuvent guider en conscience les
réviseurs comptables pour affirmer le caractère significatif ou
non de leurs constatations, elles ne sauraient permettre à des
commissaires aux comptes de confirmer les informations avérées
inexactes sur les résultats d'un groupe faisant publiquement appel
à l'épargne et de tenir pour non avenues des rectifications
effectuées par d'autres commissaires aux comptes (jugement p. 11 et 12)
;
» 1° alors que l'infraction visée à
l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966 ne peut être
caractérisée que si le commissaire aux comptes a agi dans le
cadre de sa mission légale ; qu'aucun texte de loi n'impose aux
commissaires aux comptes de certifier l'exactitude des documents comptables
publiés lors de l'émission d'actions ou d'obligations ; qu'il
résulte en l'espèce des termes de l'arrêt attaqué
que Y... et X... ne sont intervenus qu'à la demande de la COB et par
conséquent hors de leur mission légale ; qu'en déclarant
néanmoins les prévenus coupables du délit prévu par
l'article 457 de la loi de 1966, la cour d'appel a violé ce texte
légal ;
» 2° alors qu'une information n'est mensongère
au sens de l'article 457 de la loi de 1966 que lorsqu'elle est d'une importance
telle qu'elle est susceptible d'induire en erreur celui auquel elle est
destinée ; que la Cour d'appel s'est, en l'espèce, bornée
à affirmer que nonobstant la marge d'erreur admise par le Conseil
national de l'ordre des experts-comptables, les commissaires avaient commis une
faute pénalement répréhensible, en confirmant des
affirmations inexactes sur les comptes du groupe, à savoir l'indication
d'un bénéfice de 80, 54 MF au lieu de 77, 47 MF ; qu'en statuant
de la sorte sans rechercher si l'inexactitude du chiffre figurant sur le
document publié excédait la marge d'erreur tolérable et
pouvait induire en erreur les éventuels souscripteurs de l'emprunt
obligataire, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une
insuffisance de motifs ;
» aux motifs adoptés, d'autre part, que les
commissaires aux comptes ont déclaré
La responsabilité du commissaire aux
comptes
259
dans la notice d'information que les procédures
employées pour l'établissement des situations au 30 juin de la
société ont été vérifiées ; que les
commissaires aux comptes ont dû reconnaître qu'un des principes de
cette procédure-l'élimination des comptes réciproques
entre société mère et filiale-n'avait pas
été respecté ; qu'ils ne pouvaient pas savoir a priori
quelle influence cette élimination aurait sur le bilan consolidé
; que pour la situation provisoire au 30 juin 1983, l'incidence de
l'élimination des opérations réciproques n'a pas
été calculée ; que les recommandations du Conseil national
de la comptabilité et du Conseil national des commissaires aux comptes
énonçaient avant la loi 3 janvier 1985 que les procédures
de consolidation comportent l'élimination des opérations internes
au groupe ; qu'il était donc abusif et mensonger d'affirmer, sans aucune
réserve, l'orthodoxie des procédures de consolidation (jugement
entrepris p. 13 et 14) ;
» 3° alors que le délit prévu par
l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966 suppose que le commissaire aux
comptes a « sciemment donné ou confirmé des informations
mensongères sur la situation de la société « ; que
l'arrêt attaqué qui constate qu'il était mensonger
d'affirmer l'orthodoxie des procédures de consolidation, ne pouvait
retenir ce fait à l'appui de sa décision sans rechercher en quoi
cette affirmation serait de nature à falsifier les comptes figurant dans
la notice d'information et, par conséquent, à donner des
informations mensongères « sur la situation de la
société « ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a
entaché sa décision d'une insuffisance de motifs ;
» 4° alors que dans leurs conclusions d'appel, X... et
Y... rappelaient qu'ils avaient seulement mentionné dans la notice
d'information que les procédures de consolidation avaient
été vérifiées et non pas certifiées ainsi
que l'indiquait sans ambiguïté la réserve figurant sur la
notice ; qu'ils en déduisaient qu'il était impossible de soutenir
qu'ils avaient donné des informations mensongères sur la
régularité de la procédure de consolidation ; que la cour
d'appel s'est bornée à relever qu'il était abusif et
mensonger d'affirmer l'orthodoxie des procédures comptables ;
» 5° alors qu'une procédure comptable n'est pas
irrégulière lorsqu'aucune règle impérative n'a
été transgressée ; que la cour d'appel a, en
l'espèce, considéré que la procédure de
consolidation qui avait été entreprise sans l'élimination
des comptes réciproques entre les sociétés était
irrégulière en se fondant sur des recommandations du conseil
national des commissaires aux comptes et du conseil national de la
comptabilité ; qu'en l'absence de règle impérative
imposant
La responsabilité du commissaire aux
comptes
260
l'élimination des comptes réciproques, la cour
d'appel ne pouvait pas considérer que l'affirmation par les commissaires
aux comptes de la vérification des procédures en consolidation
était mensongère ; qu'en décidant le contraire, la cour
d'appel a violé les textes susvisés « ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du
jugement dont il adopte les motifs que, pour déclarer Henri X... et
Pierre Y..., commissaires aux comptes de la société holding
AMREP, coupables du délit d'informations mensongères, les juges
après avoir exposé que ladite société a émis
un emprunt obligataire au vu d'une notice de présentation soumise au
visa de la Commission des opérations de bourse, faisant état de
vérifications opérées par les susnommés sur les
éléments chiffrés extraits des comptes annuels et des
comptes consolidés, relèvent que les plus significatifs de ces
comptes, tels la situation nette, le résultat d'exploitation et le
bénéfice, étaient faux ;
Qu'ils constatent que, bien que les commissaires aux comptes de
la principale filiale, l'Union industrielle et d'entreprise UIE, aient
refusé le projet de bilan faisant apparaître un
bénéfice surestimé et ne l'aient accepté
qu'après rectification, les prévenus ont maintenu leur
certification des comptes consolidés, sans consulter leurs
confrères, et fait figurer les chiffres du bilan initial dans la notice
précitée, sans mentionner la révision en baisse des
résultats de la filiale et du groupe ;
Qu'ils observent, en outre, que les intéressés, qui
ont attesté le respect des règles de consolidation, ont du
reconnaître que l'élimination des comptes réciproques entre
la société mère et ses filiales n'a pas été
effectuée, ce qui a eu pour conséquence de majorer l'actif et le
passif consolidés ;
Qu'ils ajoutent que les prévenus ne sauraient se
prévaloir des recommandations de l'ordre des experts comptables,
concernant le caractère significatif ou non d'un redressement du
résultat net, pour confirmer des informations inexactes et tenir pour
non avenues les rectifications opérées par d'autres commissaires
aux comptes ; qu'ils soulignent enfin que l'article 228 de la loi du 24 juillet
1966 ayant conféré aux commissaires aux comptes une mission
permanente de vérification, ceux-ci assument la responsabilité de
la sincérité des informations contenues dans les documents qui
leur sont soumis avant l'émission publique d'actions ou d'obligations
;
Qu'ils concluent qu'en donnant sciemment leur caution à
des comptes inexacts et à des situations financières
entachées d'irrégularité les prévenus ont commis le
délit
La responsabilité du commissaire aux
comptes
261
défini à l'article 457 de la loi susvisée
;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et
énonciations la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait
aux conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en
tous ses éléments l'infraction reprochée ;
Que, dès lors, le moyen, qui remet en question
l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et
circonstances de la cause soumis au débat contradictoire, ne peut
qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.
Publication : Bulletin criminel 1990 N° 142
p. 377
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris (chambre correctionnelle), du 10 juillet 1987
Titrages et résumés : 1°
JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Débats - Témoins - Serment -
Nécessité - Portée
1° L'omission de faire prêter serment au témoin
entendu à l'audience d'une juridiction correctionnelle ne vicie la
décision que si les juges se sont fondés sur le témoignage
recueilli (1).
1° DROITS DE LA DEFENSE - Juridictions correctionnelles -
Débats - Témoins - Serment - Nécessité -
Portée 2° SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Commissaire aux comptes - Informations
mensongères - Eléments constitutifs - Constatations
suffisantes
2° Caractérise le délit d'informations
mensongères, prévu et réprimé par l'article 457 de
la loi du 24 juillet 1966, l'arrêt qui constate que dans la notice de
présentation d'un emprunt obligataire, soumise au visa de la Commission
des opérations de bourse, les commissaires aux comptes font état
de vérifications opérées sur les comptes annuels et les
comptes consolidés alors que les plus significatifs de ces comptes
étaient faux (2).
La responsabilité du commissaire aux
comptes
262
Précédents jurisprudentiels :
CONFER : (1°). (1) Cf. A rapprocher : Chambre criminelle,
1981-05-05 , Bulletin criminel 1981, n° 140, p. 405 (cassation). CONFER :
(2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1981-01-12 , Bulletin criminel 1981,
n° 10, p. 31 (rejet).
Textes appliqués :
· Loi 1966-07-24 art. 457
La responsabilité du commissaire aux
comptes
263
Annexe 18
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 15 Septembre 1999
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Cour de cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 15 septembre 1999
N° de pourvoi: 98-81855
Publié au bulletin
Rejet
Président : M. Gomez,
président
Rapporteur : M. Martin., conseiller apporteur
Avocat général : M. Di Guardia., avocat
général
Avocats : la SCP Boré et Xavier, la SCP Célice,
Blancpain et Soltner, la SCP Guiguet, Bachellier et de la Varde, la SCP
Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Tiffreau, M. Capron., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET des pourvois formés par :
- X... Thierry, Y... Jean-François, Y... Christian, Z...
Aude, épouse X..., Y... Catherine, Y... Elisabeth, A... Jean, B...
Daniel, C... Sylvie, épouse B..., prévenus,
- Natexis Banque, venant aux droits du Crédit national et
de la société Domibourse, la société C..., la
société Lugdunum Gestion, parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en
date du 4 février 1998, qui, notamment, a condamné : Thierry X...
et Jean-François Y..., pour escroqueries,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
264
chacun à 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis et
500 000 francs d'amende, Christian Y..., pour escroqueries, à 2 ans
d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs d'amende, Elisabeth Y...,
Catherine Y... et Aude Z..., épouse X..., pour recels d'escroqueries,
chacune à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 100 000 francs d'amende,
Daniel B..., pour complicité d'abus de biens sociaux, escroqueries,
publication de comptes annuels infidèles et exercice illégal de
la profession de banquier, à 3 ans d'emprisonnement avec sursis et 2 000
000 francs d'amende, Sylvie C..., épouse B..., pour escroqueries et
complicité d'escroqueries, à 3 ans d'emprisonnement avec sursis
et 2 000 000 francs d'amende, Jean A..., pour non-révélation de
faits délictueux, à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 100
000 francs d'amende, Daniel B..., Sylvie C..., Thierry X...,
Jean-François Y... et Christian Y... à 5 ans d'interdiction des
droits de vote, d'éligibilité et des fonctions de juré, et
a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande, en défense et
en réponse ;
Attendu qu'il résulte du jugement entrepris et de
l'arrêt attaqué que la société de bourse C... SA, sa
filiale Lugdunum Gestion, créée en 1980 pour gérer les
fonds communs de placement dont la société mère
était dépositaire, et la société L'Finance,
constituée en 1988 dans le prolongement de C... SA pour
développer des produits nouveaux, complémentaires des services
offerts par la société de bourse, ont subi en 1989 et 1990 de
fortes pertes à la suite notamment d'une politique hasardeuse, et
parfois frauduleuse, de ventes de titres à réméré ;
qu'un audit, effectué à la demande de la société
des bourses françaises, a révélé de fortes
surévaluations de titres, estimées à 144 383 000 francs,
tandis que les pertes subies par les fonds communs de placement atteignaient
177 412 000 francs ;
Que, courant octobre 1990, le Crédit national a
racheté pour un franc la quasi-totalité du capital de la
société C... SA, s'engageant à reprendre la gestion des
fonds de placement et combler les pertes ; qu'il a déposé plainte
avec constitution de partie civile le 26 décembre 1990,
simultanément avec la commission des opérations de bourse, contre
les dirigeants des sociétés précitées, à
savoir : Sylvie C..., présidente de C... SA et directrice
générale de Lugdunum Gestion, son époux Daniel B...,
président du conseil d'administration de L'Finance, et Marc D...,
directeur général de la société L'Finance et
dirigeant de fait de C... SA ;
Que, par ailleurs, les consorts X...- Y... ont été
poursuivis pour escroqueries et recels d'escroqueries, commises au
préjudice de la société L'Finance et du Crédit
agricole mutuel de l'Ain, pour s'être fait remettre par la
première la somme de 10 millions de francs et par la seconde celle de 32
millions de francs, en arguant d'un projet immobilier purement fictif ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation présenté par la
société civile professionnelle Pascal Tiffreau pour les consorts
X... et Y... : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation,
présenté par la société civile professionnelle
Pascal Tiffreau pour les consorts X... et Y... : (sans intérêt)
;
Sur le troisième moyen présenté par la
société civile professionnelle Pascal Tiffreau : (sans
intérêt) ;
Sur le premier moyen de cassation présenté par la
société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez pour
Jean A..., pris de la violation des articles 233 et 257 de la loi du 24 juillet
1966, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure
pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
265
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré Jean A... coupable d'omission de révélation
au procureur de la République de faits délictueux commis courant
1989 et l'a condamné pénalement et civilement ;
» aux motifs que, devant les explications non concordantes
de Marc D... et de l'expert-comptable quant à l'absence de contrat
d'achat relatif à 4 billets à ordre négociables (BON),
Jean A... ne pouvait pas ne pas avoir un doute sur la réalité de
l'opération alors même qu'il constatait que ces billets à
ordre négociables, d'une valeur de 37, 8 millions de francs, avaient
été revendus à plusieurs reprises aux fonds communs de
placement précités avec une surévaluation de 8, 2 millions
de francs ; que cette somme était d'autant moins susceptible de passer
inaperçue qu'elle était isolée dans un compte d'attente ;
que, devant de telles anomalies relevées par Jean A... dans ses notes de
travail, celui-ci devait suspecter la régularité de l'achat de
ces titres et les raisons pour lesquelles ils avaient subi une telle
valorisation en une si brève période ; que les experts
judiciaires ont souligné que cette majoration ne pouvait passer
inaperçue, malgré le volume considérable des autres
opérations de réméré ; que l'attention du
commissaire aux comptes devait être d'autant plus vigilante qu'il
exerçait les mêmes fonctions au sein des fonds communs de
placement qui se trouvaient acquéreurs des titres
surévalués ; qu'en conséquence, il ressort de ces
éléments que Jean A... aurait dû dénoncer au
procureur de la République une telle situation dont il ne pouvait
ignorer le caractère délictueux, même s'il n'était
pas susceptible de qualifier pénalement les faits qu'il avait
découverts ;
» alors que, d'une part, la Cour, qui, faisant totalement
abstraction des éléments invoqués par Jean A... quant
à ses diligences pour obtenir communication des contrats d'achat des
billets à ordre négociables et à l'absence de tous motifs
lui permettant de suspecter la bonne foi des dirigeants de la
société L'Finance, tire ainsi pour conséquence du seul
défaut de concordance entre les explications fournies par le responsable
de la société Lugdunum et celles de l'expert-comptable de cette
société quant à l'absence de contrat, le fait que Jean
A... ne pouvait pas ne pas avoir un doute sur la réalité de
l'opération, n'a pas en l'état de cette argumentation totalement
hypothétique établi la connaissance chez
l'intéressé du caractère fictif de ces 4 billets à
ordre négociables indispensable pour que puisse être
constitué le délit de non-dénonciation incriminé
par l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966 ;
» et alors que, d'autre part, l'obligation imposée
au commissaire aux comptes par le texte susvisé supposant la
connaissance par celui-ci d'un fait ayant un caractère délictuel,
la Cour, qui a retenu ainsi une infraction à cette obligation à
raison d'une surévaluation de 4 billets à ordre
négociables pour 1989 sans répondre à l'argument
péremptoire des conclusions de Jean A... faisant valoir qu'en tout
état de cause l'option avait été levée pour ces
bons d'ordre négociables qui n'étaient pas restés dans les
fonds de placement n'a pas, faute d'expliquer en quoi ce qu'elle a
qualifié d'anomalie aurait présenté un caractère
délictueux, légalement justifié sa décision «
;
Sur le deuxième moyen de cassation présenté
par la société civile professionnelle Lyon-Caen, Fabiani et
Thiriez pour Jean A..., pris de la violation des articles 233 et 457 de la loi
du 24 juillet 1966, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de
procédure pénale, défaut de motifs et manque de base
légale :
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré Jean A... coupable de non-dénonciation par le
commissaire aux comptes de faits délictueux commis durant l'année
1990 et l'a condamné pénalement et civilement ;
» aux motifs que Jean A... ne conteste pas avoir
décelé, lors de la vérification des
La responsabilité du commissaire aux
comptes
266
comptes de cet exercice, la réalité de la
surévaluation massive des titres cédés à
réméré... qu'il est constant qu'il s'est rendu, le 23
octobre 1990, au cabinet du substitut du procureur de la République de
Lyon afin d'y dénoncer ces faits délictueux ; que, toutefois, des
irrégularités ont été constatées par Jean
A... au plus tard le 2 août 1990, soit plus de 2 mois et demi avant sa
démarche auprès des autorités judiciaires ; que la note
rédigée en ces termes « je ne vois qu'une seule solution (en
raison des responsabilités de C... SA en termes de renom de la place
boursière) : faire pression sur Daniel B... pour qu'il
révèle lui-même ses pratiques aux autorités
boursières SBF « était symptomatique de l'état
d'esprit dans lequel il se trouvait, à cette époque-là,
à savoir éviter qu'une dénonciation de ces pratiques
illégales ne rejaillisse sur une société de bourse de
renom ; qu'eu égard à l'importance et à la gravité
des malversations découvertes, il lui appartenait de dénoncer,
dans les plus brefs délais, les faits au procureur de la
République et de ne pas attendre plusieurs semaines, alors que cette
inertie aurait pu avoir pour conséquence d'aggraver encore les pertes
subies par les fonds communs de placement qui sont des organismes de placement
des particuliers ; qu'en dépit de la découverte de cette
situation, Jean A... devait, dans son rapport général, certifier
que les comptes annuels étaient réguliers et sincères et
donnaient une image fidèle du résultat des opérations de
l'exercice écoulé, ainsi que de la situation financière de
la société à la fin de cet exercice ; qu'enfin, il sera
relevé que, lorsque Jean A... se décidait à faire une
démarche auprès du procureur de la République, la
Société des Bourses Françaises avait déposé,
les 19 septembre et 9 octobre 1990, des rapports faisant état de ces
malversations, que la Commission des opérations de bourse avait
commencé ses investigations depuis le 12 octobre 1990 au sein de C... SA
et des sociétés satellites ; qu'ainsi, la
spontanéité de cette dénonciation apparaît
très discutable, compte tenu de l'ampleur prise par l'affaire ; qu'en
tout état de cause, elle était beaucoup trop tardive ;
» alors que, d'une part, un commissaire aux comptes
n'étant tenu de l'obligation de dénoncer édictée
par l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966 qu'à partir du moment
où il a acquis une conviction du caractère délictueux des
anomalies constatées par lui, la Cour, qui, pour retenir la
culpabilité de Jean A..., s'est fondée sur le fait que les
irrégularités avaient été constatées par lui
au plus tard le 2 août 1990 sans aucunement répondre à
l'argumentation développée dans ses conclusions faisant valoir
que, compte tenu de la technicité et de la complexité des
opérations réalisées par l'ensemble des
sociétés, il avait immédiatement saisi la
Société des Bourses Françaises aux fins
précisément d'avoir l'avis de cette autorité
boursière tant sur la nature des opérations en cause que sur les
risques qu'elles faisaient courir à la société Lugdunum
SA, n'a pas, en l'état de ce défaut de réponse à
conclusions et de cette confusion entre constatation d'une
irrégularité et appréciation de son caractère
délictueux, légalement justifié sa décision ;
» alors que, d'autre part, la Cour a d'autant moins
justifié cette décision fixant au 2 août la supposée
connaissance par Jean A... du caractère délictueux des
irrégularités commises par lui qu'elle s'est abstenue de
répondre aux autres arguments invoqués par celui-ci faisant
valoir que la Société des Bourses Françaises n'avait
détecté aucune pratique délictueuse lors de sa mission
d'inspection en mars-avril 1990 et s'était contentée d'ordonner
un audit et que, par ailleurs, le rapport de police, en date du 12 juin 1992,
avait mis en exergue la haute technicité de ce dossier et l'ampleur des
investigations devant être faites pour parvenir à une
appréciation quant aux agissements en cause ;
» et alors, enfin, que l'élément intentionnel
du délit de non-dénonciation supposant
La responsabilité du commissaire aux
comptes
267
une volonté de dissimuler des agissements
délictueux ne saurait être caractérisé à
l'encontre d'un commissaire aux comptes qui, à compter de sa
découverte d'irrégularités se situant dans un contexte
particulièrement complexe rendant délicat l'appréciation
de leur caractère, effectue immédiatement les diligences
préconisées notamment pour la norme professionnelle n° 351
établie en concertation avec la chancellerie en prenant tout d'abord
contact avec les dirigeants sociaux puis en saisissant la Société
des Bourses Françaises, autorité boursière ayant
également la possibilité de porter à la connaissance du
procureur de la République les faits délictueux dont elle a
connaissance à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et, enfin, en
contribuant à la mise en oeuvre d'un audit, sans qu'il puisse lui
être fait grief d'avoir attendu le résultat de ces investigations
pour saisir officiellement le procureur de la République, soit 2 mois et
demi après sa découverte « ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour déclarer Jean A..., commissaire aux
comptes de la société L'Finance et de 3 fonds communs de
placement, coupable d'omission de révélation de faits
délictueux au procureur de la République, faits commis en 1989
à raison des surévaluations affectant les billets à ordre
cédés à réméré et du caractère
fictif de 4 d'entre eux, et en 1990 à raison des surévaluations
massives de titres cédés à réméré
dont les plus-values anormalement élevées figuraient au bilan de
clôture au 31 mars 1990 pour un montant de 130 000 000 francs,
l'arrêt, après avoir relevé, relativement à la
première série de faits, que le commissaire aux comptes avait
constaté, dans ses notes de travail, l'absence de contrats d'achat de 4
billets à ordre négociables d'une valeur de l'ordre de 40
millions de francs, qui avaient été vendus à
réméré et renouvelés une douzaine de fois avec les
mêmes acheteurs pour des prix sans cesse majorés, se prononce par
les motifs en partie repris aux moyens ; Qu'en l'état de ces
énonciations, exemptes d'insuffisance ou de contradiction et
procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel, qui
n'avait pas à entrer dans le détail de l'argumentation des
parties et qui a répondu comme elle le devait aux chefs
péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a
caractérisé en tous ses éléments constitutifs le
délit de non-révélation de faits délictueux et
donné une base légale à sa décision ;
Qu'en effet, le commissaire aux comptes a l'obligation de
révéler au procureur de la République, dès qu'il en
a connaissance dans le cadre de sa mission, les irrégularités
susceptibles de recevoir une qualification pénale, même si
celle-ci ne peut en l'état être définie avec
précision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être
accueillis ;
Sur le troisième moyen de cassation
présenté par la société civile professionnelle
Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez pour Jean A... :
(sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation
présenté par la société Guiguet, Bachellier et de
la Varde pour les sociétés Natexis Banque, C... SA et Lugdunum
Gestion : (sans intérêt) ;
Sur le deuxième moyen de cassation présenté
par la société Guiguet, Bachellier et de la Varde pour les
sociétés Natexis Banque, C... SA et Lugdunum Gestion : (sans
intérêt) ;
Sur le quatrième moyen de cassation
présenté par la société Guiguet, Bachellier et de
la Varde pour les sociétés Natexis Banque, C... SA et Lugdunum
Gestion, pris de la violation des articles 234, alinéa 2, de la loi du
24 juillet 1966, 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale,
défaut de motifs et manque de base légale :
» en ce que la cour d'appel s'est déclarée
incompétente pour statuer sur la
La responsabilité du commissaire aux
comptes
268
responsabilité des commissaires aux comptes du fait des
infractions commises par Marc D..., Daniel B... et Sylvie C..., épouse
B..., ainsi que sur l'action civile dirigée contre la
société Mazars-Guérard-Turquin prise en tant que
civilement responsable ;
» aux motifs que l'action dirigée par Lugdunum
Gestion contre Jean A..., Guérard Viala et Mazars Guérard et
Turquin sur le fondement de l'article 234, alinéa 2, de la loi du 24
juillet 1966 ne ressort pas de la compétence de la juridiction
pénale ; qu'elle sera, en conséquence, déclarée
irrecevable ; que la juridiction pénale est incompétente pour
statuer sur les conséquences juridiques d'un traité d'apport
partiel d'actif en date du 24 juin 1996, intervenu entre Guérard Viala
et Mazars Guérard et Turquin ; que cette action sera également
déclarée irrecevable ;
» alors que les règles de fond de la
responsabilité civile s'imposent au juge pénal qui en est saisi
par la victime ; qu'en jugeant la juridiction pénale incompétente
pour déclarer civilement responsable des infractions commises par les
dirigeants des sociétés qu'il contrôle, par application du
second alinéa de l'article 234 de la loi du 24 juillet 1966, le
commissaire aux comptes qui a omis de révéler ces infractions
à l'assemblée générale, la cour d'appel a
méconnu l'étendue de sa compétence ; » et alors que
la juridiction pénale a compétence pour déterminer, au vu
des éléments du dossier relatifs à la situation juridique
des parties, les personnes civilement responsables des infractions qu'elle
déclare les prévenus coupables d'avoir commises ; qu'en refusant
de se prononcer, pour déterminer les personnes civilement responsables
des infractions commises par Jean A..., commissaire aux comptes, sur la
portée du traité conclu entre la société
Guérard Viala, qui employait Jean A... au moment des faits, et la
société Mazars Guérard Turquin à laquelle la
première avait apporté sa branche d'activité
expertise-comptable et commissariat aux comptes, la cour d'appel a
méconnu l'étendue de sa compétence « ;
Attendu, d'une part, qu'à bon droit la cour d'appel s'est
déclarée incompétente pour connaître de l'action
dirigée par la société Lugdunum Gestion contre Jean A...
et les sociétés Guérard-Viala et
Mazars-Guérard-Turquin, sur le fondement de l'article 234, alinéa
2, de la loi du 24 juillet 1966, dès lors que la responsabilité
civile du commissaire aux comptes prévue par ce texte en cas de
non-révélation par ce dernier, dans son rapport à
l'assemblée générale, des infractions commises par les
dirigeants sociaux, prend sa source non dans une infraction pénale mais
dans un manquement de caractère civil dont ne saurait être saisie
une juridiction pénale ; Attendu, d'autre part, que, si c'est à
tort que la cour d'appel s'est déclarée incompétente pour
statuer sur les conséquences juridiques d'un traité d'apport
partiel d'actif intervenu entre les sociétés Guérard-Viala
et Mazars-Guérard-Turquin en vue de déterminer qui était
civilement responsable de Jean A..., la décision n'en est pas moins
justifiée dès lors que, par une appréciation souveraine,
l'arrêt énonce que la société Guérard-Viala,
qui employait le commissaire aux comptes, doit être
déclarée civilement responsable de ses agissements ;
D'où il suit que le moyen doit être
écarté ;
Sur le premier moyen de cassation présenté par la
société Guiguet, Bachellier et de la Varde pour les
sociétés Natexis Banque, C... SA et Lugdunum Gestion : (sans
intérêt) ;
Sur le moyen unique de cassation présenté par Me
Capron pour Daniel B... et Sylvie C... : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme
;
REJETTE les pourvois.
Publication : Bulletin criminel 1999 N°
187 p. 593
La responsabilité du commissaire aux
comptes
269
Décision attaquée : Cour d'appel
de Lyon, du 4 février 1998
Titrages et résumés : 1°
SOCIETE - Société par actions - Société anonyme -
Commissaire aux comptes - Non-révélation de faits
délictueux - Définition.
1° Le commissaire aux comptes a l'obligation de
révéler au procureur de la République, dès qu'il en
a connaissance dans le cadre de sa mission, les irrégularités
susceptibles de recevoir une qualification pénale, même si
celle-ci ne peut en l'état être définie avec
précision(1).
2° SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Commissaire aux comptes - Infractions commises
par les administrateurs ou les membres du directoire -
Non-révélation dans son rapport à l'assemblée
générale - Responsabilité civile.
2° La responsabilité civile du commissaire aux
comptes prévue par l'article 234, alinéa 2, de la loi du 24
juillet 1966 sur les sociétés commerciales en cas de
non-révélation, dans son rapport à l'assemblée
générale, des infractions commises par les administrateurs ou les
membres du directoire prend sa source non pas dans une infraction pénale
mais dans un manquement de caractère civil. Il en résulte que la
juridiction pénale ne peut être saisie d'une telle action en
responsabilité.
Précédents jurisprudentiels :
CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1963-01-29,
Bulletin criminel 1963, n° 56, p. 109 (cassation) ; Chambre criminelle,
1981-01-12, Bulletin criminel 1981, n° 10 (6°), p. 31 (rejet).
Textes appliqués :
· Code pénal 121-3
· Loi 66-537 1966-07-24 art. 233, art. 257
· Loi 66-537 1966-07-24 art. 234, al. 2
La responsabilité du commissaire aux
comptes
270
Annexe 19
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
2 Mars 1983
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 2 mars 1983
N° de pourvoi:
Non publié au bulletin
Cassation
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
STATUANT SUR LES POURVOIS FORMES PAR : 1°) MERCIER DE SAINTE
CROIX GUY 2°) Y... JACQUES CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS,
9EME CHAMBRE, DU 21 DECEMBRE 1981, QUI LES A CONDAMNES CHACUN A 2 ANS
D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, D'UNE PART, POUR INFRACTIONS A LA LOI SUR LES
SOCIETES COMMERCIALES, D'AUTRE PART MERCIER DE SAINTE CROIX GUY POUR DELITS
ASSIMILES A LA BANQUEROUTE SIMPLE ET FRAUDULEUSE, ET Y... JACQUES POUR
COMPLICITE DE SEMBLABLES INFRACTIONS ;
VU LA CONNEXITE, JOIGNANT LES POURVOIS ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
271
SUR LES FAITS : ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE ET DU
JUGEMENT DONT IL CONFIRME LES MOTIFS NON CONTRAIRES QUE LA SOCIETE
CINEMATOGRAPHIQUE, DONT BRADFORD ETAIT LE DIRIGEANT DE FAIT ET Y... LE
COMMISSAIRE AUX COMPTES, A EU NOTAMMENT POUR PRESIDENT DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION FELLOUS, PUIS GEWOLD ET ENFIN MERCIER DE SAINTE CROIX ;
QU'UN REGLEMENT JUDICIAIRE EST INTERVENU LE 5 JUILLET 1973 ;
ATTENDU QUE, APRES DISJONCTION DES POURSUITES EN X... QUI
CONCERNE BRADFORD, LES PREMIERS JUGES ONT CONDAMNE FELLOUS POUR ABUS DE BIENS
SOCIAUX ET GEWOLD POUR X... MEME DELIT ET RECEL D'ABUS DE BIENS SOCIAUX ;
QUE, SUR APPEL, LA CULPABILITE DE MERCIER DE SAINTE CROIX A ETE
RETENUE POUR PUBLICATION ET PRESENTATION DE BILAN INEXACT ET POUR INFRACTIONS
ASSIMILEES D'UNE PART A LA BANQUEROUTE SIMPLE PAR DEFAUT DE DECLARATION DANS LE
DELAI LEGAL DE LA CESSATION DES PAIEMENTS ET PAIEMENTS PREFERENTIELS AU
PREJUDICE DE LA MASSE, D'AUTRE PART A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR
DETOURNEMENT D'ACTIF ;
QUE LA COUR D'APPEL A, PAR AILLEURS, APRES AVOIR REQUALIFIE LES
FAITS D'ABUS DE BIENS SOCIAUX REPROCHES A FELLOUS ET A GEWOLD EN DELITS
ASSIMILES A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR DETOURNEMENT D'ACTIF, DECLARE Y...
COUPABLE DE COMPLICITE TANT DES INFRACTIONS COMMISES PAR CES DEUX DERNIERS
PREVENUS QUE DE PRESENTATION DE BILAN INEXACT IMPUTE NOTAMMENT A BRADFORD,
AINSI QUE DE CONFIRMATION D'INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE LA
SOCIETE ET D'OMISSION DE DECLARATION AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE FAITS
DELICTUEUX DONT IL AVAIT CONNAISSANCE ;
EN CET ETAT : SUR LE POURVOI FORME PAR MERCIER DE SAINTE CROIX
GUY :
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DU
PRINCIPE DE LA PERSONNALITE DES PEINES, DE L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU
24 JUILLET 1966, DES ARTICLES 131 ET 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, DE
L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE
LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE UN
PRESIDENT-DIRECTEUR
La responsabilité du commissaire aux
comptes
272
GENERAL COUPABLE DE PUBLICATION ET PRESENTATION DE BILAN INEXACT,
D'INFRACTIONS ASSIMILEES A LA BANQUEROUTE SIMPLE PAR DEFAUT DE DECLARATION DANS
LE DELAI LEGAL DE LA CESSATION DES PAIEMENTS ET PAR PAIEMENTS PREFERENTIELS AU
PREJUDICE DE LA MASSE, AINSI QUE D'INFRACTIONS ASSIMILEES A LA BANQUEROUTE
FRAUDULEUSE PAR DETOURNEMENT D'ACTIF ;
»AUX MOTIFS QUE LE FAIT QU'IL AIT ETE TENU ECARTE DE LA
DIRECTION FINANCIERE DE LA «FRANCO LONDON FILMS» EN RAISON DE LA
LIMITATION CONVENTIONNELLE DE SES POUVOIRS ET QU'IL AIT ETE EN REALITE LE
PRETE-NOM DU DIRECTEUR GENERAL, NE POUVAIT ETRE PRIS EN CONSIDERATION, LES
PREROGATIVES DU PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION POUVANT ETRE
EFFECTIVEMENT LIMITEES MAIS NON SUPPRIMEES ;
»ALORS QU'UNE TELLE MOTIVATION NE SAURAIT JUSTIFIER LA
DECISION CRITIQUEE, QUE L'UN DES ELEMENTS CONSTITUTIFS DES INFRACTIONS
REPROCHEES AU PREVENU EST LA QUALITE DE PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, QUE LES
CONSTATATIONS DE L'ARRET ETABLISSENT QUE X... DERNIER N'A JAMAIS EU, EN
REALITE, UNE TELLE QUALITE, LA DIRECTION SOCIALE ETANT ASSUREE EN FAIT PAR LE
DIRECTEUR GENERAL» ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE
L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE
DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PREVENU DU CHEF
D'INFRACTION A LA LEGISLATION SUR LES SOCIETES PAR PRESENTATION ET PUBLICATION
DE BILAN INEXACT AU TITRE DE L'EXERCICE CLOS LE 31 DECEMBRE 1971 ;
»AUX MOTIFS QUE PAR LE JEU D'UNE ECRITURE DE COMPENSATION,
IL AVAIT FAIT DISPARAITRE DE L'ACTIF DE LA «FRANCO LONDON FILMS» UNE
CREANCE DE 1 865 955, 22 FRANCS ET AVAIT MAJORE INDUMENT X... MEME ACTIF DE 980
116, 66 FRANCS ;
»ALORS QUE POUR CARACTERISER L'ELEMENT MORAL DE CETTE
INFRACTION, LES JUGES D'APPEL SE SONT BORNES A DECLARER, QU'EN SA QUALITE DE
PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, LE PREVENU NE POUVAIT IGNORER QUE LES
ECRITURES PORTEES AU BILAN AVAIENT POUR OBJET DE DISSIMULER LA VERITABLE
SITUATION DE LA SOCIETE EN CAUSE AUX ACTIONNAIRES ET ONT DONC OMIS DE RELEVER
LE MOINDRE FAIT SIGNIFICATIF DE LA CONNAISSANCE REELLE, PAR X... DERNIER, DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
273
L'EXACTITUDE DU BILAN LITIGIEUX» ;
SUR LE CINQUIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE
L'ARTICLE 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE MERCIER DE SAINTE
CROIX COUPABLE D'INFRACTION ASSIMILEE A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR
DETOURNEMENT D'ACTIF ;
»AU MOTIF QUE DES ECRITURES DE COMPENSATION INJUSTIFIEES ONT
FAIT DISPARAITRE DE L'ACTIF DE LA SA FRANCO LONDON FILMS UNE VALEUR DE 1 865
955,22 F REPRESENTEE PAR TROIS CREANCES ;
»QUE LA PASSATION DE CES ECRITURES DE COMPENSATION QUI
CONSTITUENT UN ABANDON DES CREANCES EN CAUSE ET DONC UN DETOURNEMENT D'ACTIF A
ETE DECIDEE DANS UN ECHANGE DE CORRESPONDANCE INTERVENU DU 15 AU 28 DECEMBRE
1971 ENTRE LES DIRIGEANTS, ALORS QUE MERCIER DE SAINTE CROIX ETAIT PRESIDENT DU
CONSEIL D'ADMINISTRATION ;
»ALORS QUE L'INTENTION COUPABLE EST UN ELEMENT ESSENTIEL DU
DELIT DE BANQUEROUTE FRAUDULEUSE ;
QUE LA SEULE CONSTATATION QUE LA PASSATION DES ECRITURES
LITIGIEUSES AIT ETE DECIDEE PENDANT QUE MERCIER DE SAINTE CROIX ETAIT PRESIDENT
DU CONSEIL D'ADMINISTRATION NE CARACTERISE PAS LA PARTICIPATION DE CELUI-CI A
CETTE DECISION ET SA VOLONTE DE SOUSTRAIRE AUX CREANCIERS UNE PARTIE DU
PATRIMOINE DE LA SOCIETE» ;
LES MOYENS ETANT REUNIS ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR DES MOTIFS
PROPRES A JUSTIFIER LA DECISION ;
QUE L'INSUFFISANCE DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
274
ATTENDU QUE, POUR REPONDRE AUX CONCLUSIONS REPRISES AUX MOYENS,
LES JUGES ENONCENT QUE, SI «A L'EVIDENCE» LE PREVENU ETAIT PRIVE DE
«TOUTE RESPONSABILITE REELLE DANS LA VERITABLE DIRECTION DE LA
SOCIETE», CELUI-CI NE POUVAIT PAS, EN RAISON DE SON INSTRUCTION ET SON
EXPERIENCE, « IGNORER QU'EN ACCEPTANT DE DEMEURER A LA PRESIDENCE DE LA
SOCIETE FRANCO LONDON FILMS DANS DE TELLES CONDITIONS IL DEVENAIT EN REALITE LE
PRETE-NOM DE BRADFORD» ;
MAIS ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES SEULS MOTIFS, QUI REPOSENT SUR
UNE PRESOMPTION DE MAUVAISE FOI QUE NI L'ARTICLE 437 DE LA LOI DU 24 JUILLET
1966 NI LES ARTICLES 131 ET 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967 N'INSTITUENT, LA
COUR D'APPEL, QUI N'A PAS RECHERCHE LES CIRCONSTANCES PROPRES A ETABLIR
L'EXISTENCE DE L'INTENTION COUPABLE DANS CHACUN DES CAS VISES A LA PREVENTION,
A MECONNU LE PRINCIPE CI-DESSUS RAPPELE ;
QUE DES LORS, ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LES AUTRES
MOYENS, L'ARRET ENCOURT CASSATION SUR LE POURVOI FORME PAR Y... JACQUES: SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 220, 456 ET 457
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 59 ET60 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE
PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE DE COMPLICITE DE PUBLICATION ET DE PRESENTATION DE FAUX BILAN
;
»AUX MOTIFS QUE LE PREVENU SOUTIENT QU'IL NE SAURAIT ETRE
DECLARE COUPABLE DE S'ETRE RENDU COMPLICE DE PUBLICATION ET DE
PRESENTATION D'UN BILAN INEXACT FAUTE D'ACTE MATERIEL DE COMPLICITE ET FAUTE
D'INTENTION COUPABLE N'AYANT EN RIEN PARTICIPE A L'ELABORATION ET LA
PRESENTATION DU BILAN, QU'IL DEMENT L'EXACTITUDE DES MENTIONS PORTEES SUR LES
NOTES D'AUDIENCE DU TRIBUNAL SELON LESQUELLES IL AURAIT DECLARE AVOIR PASSE AU
BILAN L'ECRITURE DE COMPENSATION INEXACTE EN VERSANT AUX DEBATS UNE ATTESTATION
DE L'EXPERT-COMPTABLE DE LA SOCIETE CERTIFIANT AVOIR LUI-MEME PRONONCE LA
PHRASE AINSI IMPUTEE AU PREVENU X... QUI, SELON LUI, DEMONTRE L'ERREUR DE PLUME
COMMISE PAR LE GREFFIER DU TRIBUNAL, MAIS QU'UNE TELLE ATTESTATION NE PEUT
FAIRE ECHEC AUX CONSTATATIONS SOUVERAINES DES PREMIERS JUGES QUI ENONCENT QUE
LE PREVENU A RECONNU PAR DEUX FOIS A L'AUDIENCE QU'IL AVAIT PASSE LES ECRITURES
DE COMPENSATION ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
275
QUE CETTE CONSTATATION DU TRIBUNAL EST CORROBOREE PAR LES
INDICATIONS DONNEES PAR LE PREVENU AU JUGE D'INSTRUCTION PUISQU'IL A DECLARE
QU'IL AVAIT RECU DES HONORAIRES COMPLEMENTAIRES EN 1971 ET 1972 JUSTIFIES PAR
LA MISSION ETENDUE QUI LUI AVAIT ETE CONFIEE PAR LE PRESIDENT DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION DE LA SOCIETE CANADIENNE QUI POSSEDAIT LA MAJORITE DES ACTIONS
DE LA SOCIETE ;
QUE SON ROLE TEL QU'IL LE DECRIT LUI-MEME ETABLIT BIEN QUE SOUS
SON TITRE DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, IL ETAIT, EN REALITE, LE MANDATAIRE DE
X... PRINCIPAL ACTIONNAIRE ET QUE, POUR REPONDRE A SES EXIGENCES, IL AVAIT DU
NECESSAIREMENT S'IMMISCER DANS LA GESTION DE LA SOCIETE ;
QU'IL APPARAIT, EN CONSEQUENCE, QU'IL A EFFECTIVEMENT PARTICIPE A
L'ELABORATION DU BILAN 1971 ;
»ALORS QUE D'UNE PART LES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE
NE CARACTERISENT AUCUN ACTE DE PARTICIPATION ACTIVE CONSTITUTIF D'UNE
COMPLICITE DU PREVENU AU DELIT DE PUBLICATION ET DE PRESENTATION D'UN BILAN
INEXACT ;
QU'EN EFFET, DES LORS QUE LE PREVENU CONTESTAIT AVOIR DECLARE A
L'AUDIENCE DU TRIBUNAL QU'IL AVAIT PARTICIPE A L'ELABORATION DU BILAN ET
PRODUISAIT UNE ATTESTATION DU COMPTABLE DE L'ENTREPRISE PAR LAQUELLE X...
DERNIER RECONNAISSAIT ETRE L'AUTEUR DES DECLARATIONS QUI FIGURAIENT SUR LES
FEUILLES D'AUDIENCE DU TRIBUNAL COMME EMANANT DU PREVENU, LA COUR NE POUVAIT
REFUSER DE TENIR COMPTE DE CETTE ATTESTATION SOUS PRETEXTE QUE L'AFFIRMATION
DES PREMIERS JUGES SELON LAQUELLE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES AURAIT PARTICIPE A
L'ELABORATION DU BILAN ETAIT CORROBOREE PAR LE FAIT QU'IL AVAIT RECONNU AVOIR
ETE CHARGE PAR LE PRINCIPAL ACTIONNAIRE DE LA SOCIETE D'UNE MISSION
D'INFORMATION CONCERNANT LA MARCHE DE CELLE-CI, UNE TELLE MISSION PARFAITEMENT
CONFORME AU ROLE D'UN COMMISSAIRE AUX COMPTES TEL QU'IL EST DEFINI PAR LES
ARTICLES 228 ET 229 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, N'IMPLIQUANT AUCUN ACTE DE
PARTICIPATION A L'ELABORATION ET LA PRESENTATION DU BILAN ;
»ALORS QUE D'AUTRE PART PUISQUE POUR RELAXER LE PREVENU DU
CHEF D'EXERCICE ILLICITE DE LA FONCTION DE COMMISSAIRE AUX COMPTES LES JUGES DU
FOND ONT ADMIS QU'IL N'ETAIT PAS ETABLI QU'IL AVAIT EXERCE AU SEIN DE LA
SOCIETE DES FONCTIONS ADMINISTRATIVES COMPTABLES OU JUDICIAIRES, LA COUR S'EST
MISE EN CONTRADICTION FLAGRANTE AVEC SES PROPRES CONSTATATIONS EN ADMETTANT
La responsabilité du commissaire aux
comptes
276
CEPENDANT QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES AVAIT PARTICIPE
ACTIVEMENT A L'ELABORATION DU BILAN DE LA SOCIETE» ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 228 ET 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE DE CONFIRMATION D'INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE
LA SOCIETE PAR CERTIFICATION D'UN BILAN INEXACT ;
»AUX MOTIFS QUE LE BILAN DE L'EXERCICE 1971 EST CRITIQUE PAR
LA POURSUITE EN X... QU'IL FAIT DISPARAITRE DE L'ACTIF DE LA SOCIETE DES
CREANCES D'UN MONTANT TOTAL DE 1 856 953,22 F PAR LE JEU D'UNE ECRITURE DE
COMPENSATION ET MAJORE INDUMENT L'ACTIF D'UNE SOMME DE 980 116,66 F, QUE POUR
LA COMPENSATION UNE SOMME DE 143 912,81 F A ETE RETENUE DANS LE BILAN A TITRE
DE FRAIS SUPPLEMENTAIRES ET QUE LE PREVENU CONVIENT EXPRESSEMENT QU'IL NE PEUT
JUSTIFIER DES FRAIS CORRESPONDANTS, QUE DE MEME UNE SOMME DE 161 726,75 F A ETE
RETENUE AU TITRE DE LA DIFFERENCE DE CHANGE, SOMME QUE LE PREVENU A RECONNUE
COMME INJUSTIFIEE A CONCURRENCE DE 35 000 F ;
QU'EN X... QUI CONCERNE LES FRAIS DE VOYAGE ET DE RECEPTION, ILS
NE SONT ASSORTIS D'AUCUNE JUSTIFICATION ;
QUE LA MAJORATION INDUE DE L'ACTIF RESULTE SELON LES EXPERTS DE
X... QUE, POUR PLUSIEURS FILMS DONT LA REALISATION AVAIT ETE ABANDONNEE, LES
FRAIS PRELIMINAIRES N'ONT PAS ETE TOTALEMENT AMORTIS ET QUE POUR UN PROJET DE
FILM LA PROVISION CONSTITUEE ETAIT INSUFFISANTE ;
QUE LE PREVENU INVOQUE LES DISPOSITIONS DU PLAN COMPTABLE
PROFESSIONNEL DE L'INDUSTRIE CINEMATOGRAPHIQUE QUI NE FAIT PAS OBLIGATION DE
CONSTITUER UNE PROVISION POUR FRAIS PRELIMINAIRES ET PRECISE QUE LES FRAIS
ENGAGES NE PEUVENT ETRE CONSIDERES COMME DES NON-VALEURS, MAIS QUE X... PLAN
COMPTABLE N'A ETE MIS EN VIGUEUR QUE PAR L'ARRETE MINISTERIEL DU 26 JUILLET
1972 ET N'ETAIT DONC PAS APPLICABLE A L'EXERCICE 1971 ;
QUE LA COUR RETIENDRA DONC L'INEXACTITUDE DU BILAN SUR X... POINT
EGALEMENT, QUE LE PREVENU SOUTIENT QU'IL N'EST PAS ETABLI QU'IL AIT
La responsabilité du commissaire aux
comptes
277
SCIEMMENT DONNE OU CERTIFIE DES INFORMATIONS MENSONGERES MAIS,
AINSI QUE LA COUR L'A DEJA RAPPELE, LA POURSUITE A DISTINGUE LES FAITS DE
COMPLICITE RETENUS PAR LA COUR A SON ENCONTRE DANS L'ELABORATION DU BILAN ET LA
CERTIFICATION DE X... FAUX BILAN ;
QU'AINSI, IL NE PEUT ETRE CONTESTE QUE LE PREVENU AVAIT
CONNAISSANCE DU CARACTERE MENSONGER DE X... BILAN ;
»ALORS QUE D'UNE PART DES LORS QUE LES MOTIFS DE L'ARRET,
SELON LESQUELS LE PREVENU AURAIT PARTICIPE A L'ELABORATION DU BILAN LITIGIEUX,
SONT EN CONTRADICTION FORMELLE AVEC LES AUTRES MOTIFS DE L'ARRET SERVANT DE
SOUTIEN NECESSAIRE AU CHEF DU DISPOSITIF RELAXANT LE PREVENU DES POURSUITES
POUR EXERCICE ILLICITE DE LA PRFESSION D'EXPERT-COMPTABLE, LA COUR A PRIVE SA
DECISION DE MOTIFS EN DEDUISANT LA CONNAISSANCE QUE LE PREVENU AVAIT DU
CARACTERE MENSONGER DU BILAN DE SA PARTICIPATION A L'ELABORATION DE X...
DOCUMENT ;
»ALORS QUE D'AUTRE PART PUISQUE AUX TERMES DE L'ARTICLE 228
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 LE ROLE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES CONSISTE A
CERTIFIER NOTAMMENT LE BILAN ET A CONTROLER LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES
COMPTES A L'EXCLUSION DE TOUTE IMMIXTION DANS LA GESTION DE LA SOCIETE, LE FAIT
QUE CERTAINES SOMMES FIGURANT AU DEBIT DE LA SOCIETE N'AIENT PAS ETE ASSORTIES
DE JUSTIFICATIONS NE PERMETTAIT PAS AU COMMISSAIRE AUX COMPTES DE REFUSER SA
CERTIFICATION DES LORS QUE C'ETAIT EN RAISON D'UNE DECISION PRISE PAR LES
DIRIGEANTS SOCIAUX QUE CES SOMMES ETAIENT PORTEES AU CREDIT DU PRINCIPAL
ACTIONNAIRE DE LA SOCIETE POUR ETRE COMPENSEES AVEC LES DETTES DE X... DERNIER
ENVERS LA SOCIETE ;
»ALORS QU'ENFIN LE FAIT QUE LE PLAN COMPTABLE PROFESSIONNEL
DE L'INDUSTRIE CINEMATOGRAPHIQUE NE SOIT ENTRE EN VIGUEUR QU'UN MOIS APRES
L'APPROBATION DU BILAN, N'INTERDISAIT PAS AU COMMISSAIRE AUX COMPTES DE SE
REFERER AUX REGLES DE X... PLAN POUR APPROUVER LES PROVISIONS FIGURANT AU BILAN
ETABLIES CONFORMEMENT AUX USAGES EN VIGUEUR» ;
LES MOYENS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER LE PREVENU COUPABLE DE COMPLICITE DE
PRESENTATION DE BILAN INEXACT, LA COUR D'APPEL RAPPELLE NOTAMMENT QUE LES
PREMIERS JUGES ONT ENONCE QUE Y... «A RECONNU PAR DEUX FOIS A L'AUDIENCE
QU'IL AVAIT PASSE DES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
278
ECRITURES DE COMPENSATION» AYANT ENTRAINE LA FAUSSETE DUDIT
BILAN ;
QUE CES MENTIONS FAISANT FOI JUSQU'A INSCRIPTION DE FAUX, ET LEUR
AUTORITE NE POUVANT ETRE DETRUITE PAR LA SEULE PRODUCTION D'UNE ATTESTATION, LE
PREMIER MOYEN PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
ATTENDU QUE, POUR ECARTER L'APPLICATION DE L'ARTICLE 456 DE LA
LOI DU 24 JUILLET 1966, L'ARRET ESTIME QUE LES AGISSEMENTS REPROCHES A Y...,
QUI A «EN L'OCCURRENCE OUTREPASSE SA MISSION DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES», NE SUFFISENT PAS A CARACTERISER L'INFRACTION AU TEXTE PRECITE
;
QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, N'IMPLIQUANT PAS L'INEXISTENCE
DE TOUTE INTERVENTION DE X... DERNIER DANS LA GESTION DE LA SOCIETE, LA COUR
D'APPEL A PU, SANS SE CONTREDIRE, FAIRE ETAT PAR AILLEURS DE CERTAINS ACTES DE
NATURE COMPTABLE ;
QUE DES LORS LE PREMIER MOYEN PRIS EN SA DEUXIEME BRANCHE ET LE
DEUXIEME MOYEN PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE DOIVENT ETRE REJETES ;
ATTENDU QUE, EN RETENANT QUE Y... AVAIT, EN SA QUALITE DE
COMMISSAIRE AUX COMPTES, SCIEMMENT CONFIRME DES INFORMATIONS MENSONGERES EN
CERTIFIANT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DU BILAN DE L'EXERCICE 1971 DONT IL
CONNAISSAIT LA FAUSSETE POUR AVOIR PARTICIPE A SON ELABORATION, LES JUGES ONT,
SANS ENCOURIR LE GRIEF ARTICULE A LA DEUXIEME BRANCHE DU DEUXIEME MOYEN, RELEVE
TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DU DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 457 DE
LA LOI DU 24 JUILLET 1966 POUR LEQUEL LE DEMANDEUR ETAIT POURSUIVI ;
ATTENDU ENFIN QUE, POUR CARACTERISER LA FAUSSETE DU BILAN DE
L'EXERCICE 1971 PAR MAJORATION INDUE DE L'ACTIF, LA COUR D'APPEL RELEVE UN
MANQUE DE PROVISION POUR LES FRAIS PRELIMINAIRES ENGAGES AVANT REALISATION D'UN
FILM ALORS QUE SEMBLABLE PROVISION FIGURAIT AU BILAN DE L'EXERCICE POUR
D'AUTRES PROJETS ;
QU'ELLE A PU AINSI ESTIMER INOPERANTE L'ARGUMENTATION «DONT
LE PREVENU N'A PAS FAIT ETAT AU COURS DES OPERATIONS D'EXPERTISE»,
INVOQUEE AUX CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE ET REPRISE A LA TROISIEME
BRANCHE DU SECOND MOYEN ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
279
QU'EN CONSEQUENCE LES MOYENS REUNIS DOIVENT ETRE REJETES ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 59 ET 60 DU CODE PENAL, 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967 ET 593 DU
CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU COUPABLE
DE COMPLICITE D'INFRACTION ASSIMILEE A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR
DETOURNEMENT D'ACTIFS COMMIS PAR GEWOLD ET FELLOUS ;
»AUX MOTIFS QUE LA DENAGATION PAR LE PREVENU DE TOUTE
PARTICIPATION A L'ACTION FRAUDULEUSE DES DEUX PRESIDENTS DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION QUI ONT CONCLU UNE TRANSACTION AVEC L'ANCIEN PRESIDENT
DEMISSIOGNAIRE ALLOUANT A X... DERNIER UNE INDEMNITE INDUE DE 513 000 F ET 7,5
% DES RECETTES A L'ETRANGER DU FILM «MOURIR D'AIMER» EST DENUEE DE
TOUTE PERTINENCE ;
QU'EN EFFET, EN ACCEPTANT D'ETRE LE MANDATAIRE DU PRINCIPAL
ACTIONNAIRE, LE PREVENU A MECONNU SA VERITABLE MISSION DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES ;
QU'IL A INFORME X... DERNIER DU DEROULEMENT DES POURPARLERS QUI
ONT PRECEDE LA SIGNATURE DE LA TRANSACTION LUI PERMETTANT AINSI DE FAIRE
PARVENIR A SES AVOCATS TOUTES INSTRUCTIONS UTILES POUR UN ABOUTISSEMENT
FAVORABLE A SES INTERETS ET A CELUI DE SON GROUPE, FUT-CE AU DETRIMENT DE LA
SOCIETE ;
QUE DES LORS LA PRESENCE DU PREVENU AUX ENTRETIENS PRELIMINAIRES
QUI SE SONT DEROULES ENTRE LES AVOCATS DU PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION
DEMISSIONNAIRE ET CEUX DE LA SOCIETE CONSTITUE BIEN, AU SENS DE L'ARTICLE 60 DU
CODE PENAL, UNE AIDE, ASSISTANCE ET FOURNITURE DE MOYENS, APPORTEE EN TOUTE
CONNAISSANCE DE CAUSE ;
»ALORS QUE ET COMME LE PREVENU LE FAISAIT JUSTEMENT VALOIR
DANS SES CONCLUSIONS, LE FAIT QU'IL AIT ASSISTE AUX POURPARLERS QUI ONT PRECEDE
LA TRANSACTION ET QU'IL EN AIT RENDU COMPTE AU PRINCIPAL ACTIONNAIRE DE LA
SOCIETE NE CONSTITUE AUCUN ACTE D'AIDE, D'ASSISTANCE OU DE FOURNITURE DE MOYEN
CONSTITUTIF DE LA COMPLICITE DES LORS QUE LES SERVICES QU'IL A AINSI RENDUS
AU
La responsabilité du commissaire aux
comptes
280
PRINCIPAL ACTIONNAIRE DE LA SOCIETE SONT TOTALEMENT ETRANGERS A
LA CONCLUSION DE LA TRANSACTION QUI S'EST REALISEE SANS AUCUNE INTERVENTION DE
X... DERNIER QUI N'A D'AILLEURS PAS ETE INCULPE» ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... COUPABLE DE COMPLICITE
D'INFRACTION ASSIMILEE A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR DETOURNEMENT D'ACTIF
COMMIS PAR FELLOUS ET GEWOLD, LES JUGES ENONCENT QUE LE PREVENU A PARTICIPE
ACTIVEMENT A L'ELABORATION D'UN ACCORD ATTRIBUANT A MASSE, ANCIEN DIRIGEANT
SOCIAL, DES AVANTAGES PECUNIAIRES SANS CONTREPARTIE ;
QU'ILS PRECISENT QUE, POUR PERMETTRE A FELLOUS ET A GEWOLD DE
RECEVOIR DES INSTRUCTIONS CONFORMES AUX INTERETS DE L'ACTIONNAIRE MAJORITAIRE
DEMEURANT AU CANADA, IL INFORMAIT X... DERNIER TELEPHONIQUEMENT DU DEROULEMENT
DES POURPARLERS ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS QUI CARACTERISENT UNE
ASSISTANCE APPORTEE AUX DIRIGEANTS SOCIAUX PAR AILLEURS CONDAMNES, C'EST A BON
DROIT QUE LA COUR D'APPEL A RETENU LA CULPABILITE DU DEMANDEUR ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
SUR LE QUATRIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 229, 233 ET 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 388 ET 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, VIOLATION DES DROITS DE LA DEFENSE, DEFAUT DE MOTIFS ET
MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE DE NON REVELATION AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DES FAITS
DELICTUEUX ;
»AUX MOTIFS QUE LE PREVENU AFFIRME NE PAS AVOIR DENONCE LES
FAITS ACCOMPLIS PAR LES DIRIGEANTS SOCIAUX PARCE QU'IL NE LES ESTIMAIT PAS
DELICTUEUX ;
QU'EN X... QUI CONCERNE LE REMBOURSEMENT PARTIEL D'UN EMPRUNT A
LA BANK OF AMERICA INTERVENU EN 1973 CONSTITUTIF D'UN PAIEMENT PREFERENTIEL AU
PREJUDICE DE LA MASSE, LE COMMISSAIRE AUX COMPTES QUI, AUX TERMES DE L'ARTICLE
229 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, A POUR MISSION D'OPERER TOUTES VERIFICATIONS
ET CONTROLES OPPORTUNS, N'EST PAS FONDE A SE REFUGIER DERRIERE SA PRETENDUE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
281
IGNORANCE DU PAIEMENT PREFERENTIEL, IGNORANCE QUI RESULTERAIT DE
L'ABSENCE DE CONTROLE DE SA PART SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE 1973, QUE POUR
LES AUTRES INFRACTIONS, LE PREVENU SE BORNE A EN CONTESTER LA MATERIALITE PAR
DE SIMPLES AFFIRMATIONS DE SA PART ;
QU'EN X... QUI CONCERNE LE VERSEMENT A TITRE D'INDEMNITE D'UNE
SOMME DE 140 000 F AU PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, AU MOMENT DE SON
DEPART, CONSTITUTIF D'UN DELIT DE BANQUEROUTE FRAUDULEUSE, LE PREVENU SE BORNE
A INDIQUER QUE CETTE INDEMNITE A ETE ALLOUEE APRES DES NEGOCIATIONS ENTRE SON
BENEFICIAIRE ET LE PRINCIPAL ACTIONNAIRE, QU'IL EN AVAIT FAIT MENTION DANS SON
RAPPORT SPECIAL ET QU'IL N'AVAIT GUERE LE MOYEN D'APPRECIER LES RAISONS QUI
EXPLIQUAIENT LE PRINCIPE ET LE MONTANT D'UNE TELLE INDEMNITE ;
QUE L'INDIGENCE D'UNE TELLE ARGUMENTATION SUFFIT A LUI OTER TOUTE
PERTINENCE ;
»ALORS QUE D'UNE PART DES LORS QUE LE COMMISSAIRE AUX
COMPTES ETAIT SEULEMENT PREVENU D'AVOIR COURANT 1971 ET 1972 SCIEMMENT OMIS DE
REVELER AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE LES DELITS DONT IL AVAIT EU CONNAISSANCE,
LES JUGES DU FOND ONT VIOLE LES DROITS DE LA DEFENSE ET STATUE EN DEHORS DES
LIMITES DE LEUR SAISINE EN LUI IMPUTANT UNE NON DENONCIATION D'UN DELIT REALISE
EN 1973 ;
»ALORS QUE D'AUTRE PART POUR QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES
SOIT TENU DE DENONCER LES FAITS DONT IL A EU CONNAISSANCE, IL FAUT
NECESSAIREMENT QU'IL AIT ETE EN MESURE D'EN APPRECIER LE CARACTERE DELICTUEUX
;
QUE DES LORS, EN L'ESPECE, OU LE PREVENU CONTESTAIT AVOIR PU
APPRECIER LE CARACTERE DELICTUEUX DES AGISSEMENTS DE SES COPREVENUS, LA COUR NE
POUVAIT LE DECLARER COUPABLE DE L'INFRACTION QUI LUI ETAIT REPROCHEE EN SE
BORNANT A INVOQUER L'INDIGENCE DE CETTE ARGUMENTATION» ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER Y... COUPABLE DE NON REVELATION AU
PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE FAITS DELICTUEUX, LES JUGES ONT RELEVE QUE
CELUI-CI «NE CONTESTE PAS AVOIR EU CONNAISSANCE DES FAITS DE LA
CAUSE» MAIS PRETEND SEULEMENT AVOIR IGNORE QUE CEUX-CI ETAIENT
REPREHENSIBLES ;
282
QU'ILS ONT ESTIME QUE CES DERNIERES AFFIRMATIONS «NE PEUVENT
PAR ELLES-MEMES CONTROUVER LES PRECEDENTES CONSTATATIONS RELATIVES AU CARACTERE
PUNISSABLE DES AGISSEMENTS INCRIMINES ;
QU'ILS ONT, PAR AILLEURS, RETENU QUE LE PREVENU «AURAIT DU
PORTER A LA CONNAISSANCE DU PARQUET» L'EXISTENCE D'UNE INDEMNITE SANS
CAUSE VERSEE A GEWOLD ET QU'IL A «PASSE DES ECRITURES FRAUDULEUSES QUI LE
DISPENSAIENT DE CERTAINES REVELATIONS» ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS DESQUELLES SE DEDUIT
NECESSAIREMENT LA MAUVAISE FOI DU DEMANDEUR, ET QUELQUE REGRETTABLE QUE SOIT
L'ERREUR COMMISE DANS L'ARRET QUANT A LA DATE D'UN DES FAITS RETENUS PAR ELLE,
LA COUR D'APPEL A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION DES LORS QUE LA PEINE
PRONONCEE EST JUSTIFIEE PAR LES AUTRES INFRACTIONS RETENUES, LES DISPOSITIONS
DE L'ARTICLE 598 DU CODE DE PROCEDURE PENALE DEVANT RECEVOIR APPLICATION ;
QUE, PAR SUITE, LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ET ATTENDU QUE
L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
PAR CES MOTIFS : 1°) REJETTE LE POURVOI FORME PAR Y...
JACQUES ;
CONDAMNE LE DEMANDEUR PAR CORPS AUX DEPENS, FIXE AU MINIMUM
EDICTE PAR LA LOI LA DUREE DE LA CONTRAINTE PAR CORPS ;
2°) CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS DU
21 DECEMBRE 1981 EN SES DISPOSITIONS RELATIVES A MERCIER DE SAINTE CROIX GUY,
ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI DANS LA LIMITE DE LA
CASSATION AINSI PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR
D'APPEL DE VERSAILLES, A X... DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN
CHAMBRE DU CONSEIL ;
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, Chambre 9, du 21 décembre 1981
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
283
Annexe 20
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 12 Janvier 1981
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 12 janvier 1981
N° de pourvoi: 79-93455
Publié au bulletin
REJET
Pdt M. Pucheus CDFF, président
Rpr M. Cosson, conseiller apporteur
Av.Gén. M. Dullin, avocat général
Av. Demandeur : MM. Choucroy, Ryziger, SCP Philippe et Claire
Waquet, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
STATUANT SUR LES POURVOIS FORMES PAR :
- X... PAUL,
- Y... ANDRE,
- Z... JEAN,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 9E CHAMBRE, EN DATE
DU 9 JUILLET 1979, QUI LES A CONDAMNES :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
284
- X... PAUL, A 2 ANS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, POUR DELITS
ASSIMILES AUX BANQUEROUTES SIMPLE ET FRAUDULEUSE ET POUR INFRACTIONS A LA LOI
SUR LES SOCIETES,
- Y... ANDRE, A 15 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 5 000
FRANCS D'AMENDE,
- Z... JEAN, A 15 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 1 000
FRANCS D'AMENDE, TOUS DEUX POUR FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE, AINSI QUE POUR
DELIT D'INFORMATIONS MENSONGERES ET DEFAUT DE DENONCIATION PAR COMMISSAIRE AUX
COMPTES ;
VU LA CONNEXITE JOIGNANT LES POURVOIS ; SUR LES FAITS :
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT DONT IL
ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES, QUE X... ETAIT PRESIDENT DE LA SOCIETE
GEEP-INDUSTRIES S.A., ET GERANT DE LA SOCIETE GEEP S.A.R.L., LIEES PAR UN
CONTRAT D'ASSOCIATION EN PARTICIPATION ; QUE Y... ET Z... ETAIENT COMMISSAIRES
AUX COMPTES DE LA GEEP-INDUSTRIES ; QUE LE GROUPE, QUI AVAIT POUR OBJET LA
FABRICATION DE BATIMENTS SCOLAIRES POUR L'ETAT ET LES COLLECTIVITES LOCALES, A
CONNU UNE CROISSANCE RAPIDE, A PARTIR DE 1964, TOUT EN SOUFFRANT D'UNE
INSUFFISANCE EXTREME DE CAPITAUX PROPRES ; QUE LES PREMIERES DIFFICULTES
FINANCIERES GRAVES SONT APPARUES EN 1969 A LA SUITE D'UNE REDUCTION DES
COMMANDES, QUE, LE 25 JUIN 1971, LA SOCIETE GEEP-INDUSTRIES A ETE DECLAREE EN
REGLEMENT JUDICIAIRE, MESURE QUI A ETE ETENDUE A LA GEEP S.A.R.L., LE 16
JUILLET 1971 ; QUE, LE 25 MARS 1975, L'HOMOLOGATION D'UN CONCORDAT A ETE
REFUSEE PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS QUI A ORDONNE LA LIQUIDATION DES BIENS ;
EN CET ETAT :
I - SUR LE POURVOI DE X... :
VU LE MEMOIRE PRODUIT PAR LA SOCIETE CIVILE PROFESSIONNELLE
PHILIPPE ET CLAIRE WAQUET ;
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 130, 131, 132 ET 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, DE L'ARTICLE 29 DE
LA MEME LOI, DE L'ARTICLE 402 DU CODE PENAL ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, EXCES DE POUVOIR, DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE
MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PREVENU DU CHEF DE DELITS
ASSIMILES A LA BANQUEROUTE, PAR NON-DECLARATION DE LA CESSATION DES PAIEMENTS,
TENUE DE COMPTABILITE IRREGULIERE ET INCOMPLETE, EMPLOI DE MOYENS RUINEUX,
ENGAGEMENTS EXCESSIFS, PAIEMENTS PREFERENTIELS ET DETOURNEMENT D'ACTIF ;
AU MOTIF QUE LES DEUX SOCIETES DONT LE PREVENU ETAIT, DE L'UNE LE
PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, DE L'AUTRE LE GERANT, ETAIENT EN ETAT DE CESSATION
DES PAIEMENTS DEPUIS LE 30 SEPTEMBRE 1969 ; ALORS, D'UNE PART, QUE POUR
CARACTERISER LA CESSATION DES PAIEMENTS A LA DATE RETENUE, LA COUR D'APPEL
S'APPUIE SUR UNE SITUATION FINANCIERE ANTERIEURE, SELON SES PROPRES
CONSTATATIONS, DE TROIS ANNEES ; QU'ELLE AFFIRME QU'A LA DATE RETENUE LA
SITUATION ETAIT DEFINITIVEMENT COMPROMISE ET RELEVE CEPENDANT QU'ELLE AURAIT PU
ENCORE ETRE RETABLIE ; QU'ELLE CONSTATE, APRES LA PRETENDUE CESSATION DES
PAIEMENTS, LE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
285
MAINTIEN OU LA SURVENANCE D'EVENEMENTS PROPRES A LA DENIER ;
QU'ELLE A AINSI STATUE PAR MOTIFS INSUFFISANTS ET CONTRADICTOIRES ET PRIVE SON
ARRET DE BASE LEGALE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA DATE RETENUE EST ANTERIEURE DE PLUS
DE 18 MOIS AUX JUGEMENTS DECLARATIFS AFFERENTS AUX SOCIETES LITIGIEUSES ; QUE
L'ARRET ATTAQUE A AINSI VIOLE, PAR DEFAUT D'APPLICATION, L'ARTICLE 29 DE LA LOI
DU 13 JUILLET 1967 ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER X... COUPABLE DE DELITS ASSIMILES AUX
BANQUEROUTES SIMPLE ET FRAUDULEUSE, L'ARRET ENONCE QUE LA DATE DE CESSATION DES
PAIEMENTS DES SOCIETES EN CAUSE DOIT ETRE FIXEE AU 30 SEPTEMBRE 1969, LA
SITUATION FINANCIERE DE CES ENTREPRISES ETANT ALORS DEFINITIVEMENT ET
INELUCTABLEMENT COMPROMISE, DES LORS, QU'A PARTIR DE CETTE DATE, LES BANQUES
ONT REFUSE DE CONTINUER A PRETER LEUR CONCOURS A CES SOCIETES, FAUTE PAR X...
DE SATISFAIRE AUX CONDITIONS QUI LUI AVAIENT ETE IMPOSEES POUR LA RECONDUCTION
D'UN MORATOIRE ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS SOUVERAINES, LA COUR
D'APPEL, D'UNE PART, A CARACTERISE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS SANS
ENCOURIR LES GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN ;
QUE, D'AUTRE PART, AUX TERMES DE L'ARTICLE 139 DE LA LOI DU 13
JUILLET 1967, UNE CONDAMNATION POUR BANQUEROUTE SIMPLE OU FRAUDULEUSE OU POUR
DELIT ASSIMILE A LA BANQUEROUTE SIMPLE OU FRAUDULEUSE PEUT ETRE PRONONCEE MEME
SI LA CESSATION DES PAIEMENTS N'A PAS ETE CONSTATEE DANS LES CONDITIONS PREVUES
AU TITRE IER DE LADITE LOI ; QU'IL RESULTE DE CE TEXTE QU'INDEPENDAMMENT DES
PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 29 DE CETTE LOI, QUI IMPOSE AU JUGE CIVIL OU
COMMERCIAL DE LIMITER A 18 MOIS LA PERIODE PENDANT LAQUELLE CERTAINS ACTES
POURRONT ETRE DECLARES INOPPOSABLES A LA MASSE, LE JUGE REPRESSIF PEUT, A BON
DROIT COMME IL L'A FAIT EN L'ESPECE, POUR CARACTERISER L'INFRACTION, FAIRE
REMONTER LA CESSATION DES PAIEMENTS A UNE DATE ANTERIEURE SANS QUE SA DECISION
SUR CE POINT PUISSE AVOIR UNE INCIDENCE SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 29
PRECITE :
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DE
L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE
DE PROCEDURE PENALE, EXCES DE POUVOIR, DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE
MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PREVENU DU CHEF
D'INFRACTION A LA LEGISLATION SUR LES SOCIETES PAR PRESENTATION DE BILAN
INEXACT AU TITRE DES EXERCICES 1968 ET 1969 ;
AU MOTIF QU'IL AVAIT DELIBEREMENT MAJORE LES VALEURS D'ACTIF
INCLUSES DANS LES POSTES VALEURS REALISABLES, FRAIS D'ETUDES ET TRAVAUX EN
COURS ;
ALORS, D'UNE PART, QUE LES JUGES D'APPEL NE RELEVENT PAS LE
MOINDRE FAIT SIGNIFICATIF DE LA CONNAISSANCE, PAR LE PREVENU, DE L'INEXACTITUDE
DES BILANS LITIGIEUX ; QUE, POUR CARACTERISER L'INTENTION DELICTUEUSE, ILS SE
FONDENT SEULEMENT SUR LES ACTIVITES DE TIERS, DONT LE PREVENU NE SAURAIT ETRE
RESPONSABLE,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
286
OU SUR DES FAITS ANTERIEURS OU POSTERIEURS AUX AGISSEMENTS
INCRIMINES, OU ENCORE SUR DES FAITS QUE L'ARRET ATTAQUE CONTREDIT LUI-MEME, PAR
D'AUTRES OBSERVATIONS ET CONSTATATIONS ; QUE L'ARRET ATTAQUE EST AINSI ENTACHE
DE DEFAUT, INSUFFISANCE ET CONTRADICTION DE MOTIFS, ET MANQUE DE BASE LEGALE
;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'EN NE CHERCHANT PAS SI LE PREVENU AURAIT
AGI «EN VUE DE DISSIMULER LA VERITABLE SITUATION DE LA SOCIETE»,
SELON LES TERMES MEMES DU TEXTE QUI FONDE LA PREVENTION, LES JUGES D'APPEL ONT
PRIVE LEUR ARRET DE BASE LEGALE ET VIOLE L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU 24
JUILLET 1966 ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER X... COUPABLE D'AVOIR SCIEMMENT
PRESENTE AUX ACTIONNAIRES DES BILANS INEXACTS, L'ARRET ENONCE QUE LES BILANS
AUX DATES DES 31 DECEMBRE 1968 ET 31 DECEMBRE 1969, PRESENTES AUX ASSEMBLEES
GENERALES D'ACTIONNAIRES LES 30 JUIN 1969 ET 23 JUIN 1970, COMPORTAIENT DES
MAJORATIONS FRAUDULEUSES D'ACTIFS, RESULTANT DE CE QUE CERTAINS POSTES QUE
L'ARRET ENUMERE N'AVAIENT PAS FAIT L'OBJET DES PROVISIONS QUI S'IMPOSAIENT ;
QUE, COMPTE TENU DES BENEFICES DEGAGES FACE AUX TRES IMPORTANTS DEFICITS
EXISTANT EFFECTIVEMENT, «APPARAISSAIT L'AMPLEUR DE MANIPULATIONS
EFFECTUEES DANS LE BUT DE PARVENIR A L'INVERSION DES RESULTATS» ; QUE
LESDITES MAJORATIONS D'ACTIFS «SONT INTERVENUES DANS UNE SITUATION DE
CRISE, MALGRE LES NOMBREUSES MISES EN GARDE ET AVERTISSEMENTS RECUS», ET
QU'ELLES «PROCEDAIENT D'UNE ACTION DELIBEREE, DETERMINEE PAR LE SOUCI DE
FAIRE APPARAITRE UN RESULTAT BENEFICIAIRE, MEME MEDIOCRE, EN VUE D'EVITER LA
REVELATION PUBLIQUE D'UNE SITUATION FINANCIERE OBEREE PUIS COMPROMISE, EN DEPIT
D'UNE APPARENTE PROSPERITE» ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT, LA COUR D'APPEL A CARACTERISE, A LA
CHARGE DE X..., LA REUNION DE TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS, TANT MATERIELS
QU'INTENTIONNELS, DU DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI
DU 24 JUILLET 1966, ET A, PAR DES MOTIFS EXEMPTS D'INSUFFISANCE ET DE
CONTRADICTION, DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
II - SUR LES POURVOIS DE Y... ET DE Z... :
VU LES MEMOIRES PRODUITS ;
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION COMMUN A Y... ET Z... ET PRIS
DE LA VIOLATION DES ARTICLES 147 ET 150 DU CODE PENAL, 168, 170, 228 ET
SUIVANTS, 444 ET 445 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 135, 139, 140 ET SUIVANTS DU
DECRET DU 23 MARS 1967, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET DE
L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE
;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DE FAUX EN ECRITURE DE COMMERCE ;
AUX MOTIFS QUE, APRES AVOIR DELIVRE AUX ORGANES SOCIAUX UN
RAPPORT DE CERTIFICATION DES COMPTES DE L'EXERCICE 1969, LES DEUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES LUI ONT SUBSTITUE CLANDESTINEMENT UN NOUVEAU RAPPORT ETABLI ET
SIGNE LES 22 ET 23
La responsabilité du commissaire aux
comptes
287
JUIN 1970 BIEN QUE RECEVANT LA DATE DU IER JUIN 1970 AVANT QUE CE
DOCUMENT SOIT INTRODUIT PAR L'UN D'EUX DANS LE DOSSIER DE L'ASSEMBLEE GENERALE,
DANS LA MATINEE DU 23 JUIN 1970, DATE DE LA DELIBERATION SUR LES COMPTES DE
L'EXERCICE SUSVISE, QUE CERTES SEUL L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES EST
INTERVENU AU STADE DE LA SUBSTITUTION, MAIS QUE LE PREVENU S'EST ASSOCIE
DELIBEREMENT A L'ENSEMBLE DE LA MACHINATION EN SE PRETANT A L'ETABLISSEMENT
D'UN NOUVEAU RAPPORT ET NON D'UN RAPPORT COMPLEMENTAIRE, EN FAISANT PORTER CE
NOUVEAU RAPPORT AU SECOND COMMISSAIRE AUX COMPTES ET EN S'ABSTENANT DE TOUTE
COMMUNICATION ECRITE OU VERBALE AUX ACTIONNAIRES ET AUX DIRIGEANTS SOCIAUX, QUE
CERTES LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 228 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 NE
PREVOIENT PAS LA NECESSITE DE PORTER UNE DATE SUR LE RAPPORT, QUE TOUTEFOIS DE
LA COMBINAISON DES ARTICLES 168-170, 444 ET 445 DE LA MEME LOI ET 135 DU DECRET
DU 23 MARS 1967 QUI ORGANISENT LA MISE A DISPOSITION DES ACTIONNAIRES DU
RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX COMPTES, DECOULE LOGIQUEMENT LA NECESSITE DE DATER
UN TEL DOCUMENT EN SORTE QUE DANS LE CAS PARTICULIER, LA DATE CONSTITUE BIEN
L'UN DES ELEMENTS SUBSTANTIELS DU DOCUMENT INCRIMINE ET QUE LES PREVENUS ONT
MODIFIE FONDAMENTALEMENT LA PORTEE DU RAPPORT INITIAL QUI CERTIFIAIT LA
REGULARITE ET LA SINCERITE DES COMPTES EN ETABLISSANT UN SECOND RAPPORT DANS
LEQUEL ILS REFUSAIENT LEUR CERTIFICATION ;
ALORS QUE, D'UNE PART, AUCUN TEXTE N'INTERDISANT AUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES D'APPORTER UNE MODIFICATION SUBSTANTIELLE AU CONTENU DE LEUR
RAPPORT AVANT LA REUNION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES OU MEME DE
REDIGER UN NOUVEAU RAPPORT ET AUCUN TEXTE N'IMPOSANT AUX COMMISSAIRES AUX
COMPTES DE DATER LEUR RAPPORT, LES JUGES DU FOND ONT PRIVE LEUR DECISION DE
BASE LEGALE EN DECLARANT COUPABLE DE FAUX LE PREVENU QUI S'EST CONTENTE, APRES
AVOIR ETABLI UN PREMIER RAPPORT ATTESTANT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES
COMPTES SOCIAUX, DE REDIGER, LA VEILLE DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES
ACTIONNAIRES, UN NOUVEAU RAPPORT DATE DU MEME JOUR QUE LE PRECEDENT ET EMETTANT
DES RESERVES ET QUI A CHARGE SON CONFRERE, EGALEMENT COMMISSAIRE AUX COMPTES,
DE DONNER CONNAISSANCE DE CE NOUVEAU RAPPORT AU COURS DE L'ASSEMBLEE GENERALE
;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'OBLIGATION PREVUE PAR LES TEXTES
INVOQUES PAR LES JUGES DU FOND DE METTRE LE RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX
COMPTES A LA DISPOSITION DES ACTIONNAIRES, 15 JOURS AU MOINS AVANT LA REUNION
DE L'ASSEMBLEE GENERALE, PESE SEULEMENT SUR LES DIRIGEANTS SOCIAUX ET NON SUR
LES COMMISSAIRES QUI PEUVENT PARFAITEMENT DEPOSER UN NOUVEAU RAPPORT JUSQU'AU
JOUR DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
SUR LES PREMIER ET DEUXIEME MOYENS DE CASSATION PROPOSES PAR
Z..., CONTENUS DANS LE MEMOIRE ADDITIONNEL ET PRIS :
- LE PREMIER, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 150 DU CODE PENAL ;
EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE
D'UN FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
288
AU MOTIF QU'IL RESULTE DES PROPRES DECLARATIONS DES PREVENUS
Y...ET Z..., QU'APRES AVOIR DELIVRE AUX ORGANES SOCIAUX LE RAPPORT DE
CERTIFICATION DES COMPTES DE L'EXERCICE 1969, LES DEUX COMMISSAIRES LUI ONT
SUBSTITUE CLANDESTINEMENT UN NOUVEAU RAPPORT ETABLI ET SIGNE LES 22 ET 23 JUIN
1970, BIEN QUE RECEVANT LA DATE DU 1ER JUIN 1970 AVANT D'ETRE INTRODUIT PAR
L'UN D'EUX DANS LE DOSSIER DE L'ASSEMBLEE GENERALE DANS LA MATINEE DU 23 JUIN
1970, DATE DE LA DELIBERATION SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE SUSVISE ; ALORS QUE
LE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE N'EST CONSTITUE QU'AUTANT QU'IL Y A EU
ALTERATION DE LA VERITE DANS UN ECRIT, QU'EN L'ESPECE ACTUELLE, LES JUGES DU
FOND AYANT EUX-MEMES CONSTATE QUE LE RAPPORT SUBSTITUE PAR LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES Z... ET Y... A LEUR PREMIER RAPPORT ETAIT CONFORME A LA VERITE, N'ONT
PU CONDAMNER CEUX-CI POUR FAUX ;
- LE DEUXIEME, DE LA VIOLATION DES ARTICLES 147 ET 150 DU CODE
PENAL, 168, 170, 228 ET SUIVANTS, 444 ET 445 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 135,
139, 140 ET SUIVANTS DU DECRET DU 23 MARS 1967, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE
MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DE FAUX EN ECRITURE DE COMMERCE ;
AUX MOTIFS QUE, APRES AVOIR DELIVRE AUX ORGANES SOCIAUX UN
RAPPORT DE CERTIFICATION DES COMPTES DE L'EXERCICE 1969, LES DEUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES LUI ONT SUBSTITUE CLANDESTINEMENT UN NOUVEAU RAPPORT ETABLI ET
SIGNE LES 22 ET 23 JUIN 1970, BIEN QUE RECEVANT LA DATE DU 1ER JUIN 1970, AVANT
QUE CE DOCUMENT SOIT INTRODUIT PAR L'UN D'EUX DANS LE DOSSIER DE L'ASSEMBLEE
GENERALE, DANS LA MATINEE DU 23 JUIN 1970, DATE DE LA DELIBERATION SUR LES
COMPTES DE L'EXERCICE SUSVISE, QUE CERTES, SEUL L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES
EST INTERVENU AU STADE DE LA SUBSTITUTION, MAIS QUE LE PREVENU S'EST ASSOCIE
DELIBEREMENT A L'ENSEMBLE DE LA MACHINATION EN SE PRETANT A L'ETABLISSEMENT
D'UN NOUVEAU RAPPORT ET NON D'UN RAPPORT COMPLEMENTAIRE, EN FAISANT PORTER CE
NOUVEAU RAPPORT AU SECOND COMMISSAIRE AUX COMPTES ET EN S'ABSTENANT DE TOUTE
COMMUNICATION ECRITE OU VERBALE AUX ACTIONNAIRES ET AUX DIRIGEANTS SOCIAUX,
QUE, CERTES, LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 228 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 NE
PREVOIENT PAS LA NECESSITE DE PORTER UNE DATE SUR LE RAPPORT, QUE TOUTEFOIS, DE
LA COMBINAISON DES ARTICLES 168, 170, 444 ET 445 DE LA MEME LOI ET 135 DU
DECRET DU 23 MARS 1967 QUI ORGANISENT LA MISE A DISPOSITION DES ACTIONNAIRES DU
RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX COMPTES, DECOULE LOGIQUEMENT LA NECESSITE DE DATER
UN TEL DOCUMENT EN SORTE QUE, DANS LE CAS PARTICULIER LA DATE CONSTITUE BIEN
L'UN DES ELEMENTS SUBSTANTIELS DU DOCUMENT INCRIMINE ET QUE LES PREVENUS ONT
MODIFIE FONDAMENTALEMENT LA PORTEE DU RAPPORT INITIAL QUI CERTIFIAIT LA
REGULARITE ET LA SINCERITE DES COMPTES EN ETABLISSANT UN SECOND RAPPORT DANS
LEQUEL ILS REFUSAIENT LEUR CERTIFICATION ;
ALORS QUE, D'UNE PART, AUCUN TEXTE N'INTERDISANT AUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES D'APPORTER UNE MODIFICATION
La responsabilité du commissaire aux
comptes
289
SUBSTANTIELLE AU CONTENU DE LEUR RAPPORT AVANT LA REUNION DE
L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES OU MEME DE REDIGER UN NOUVEAU RAPPORT ET
AUCUN TEXTE N'IMPOSANT AUX COMMISSAIRES AUX COMPTES DE DATER LEUR RAPPORT, LES
JUGES DU FOND ONT PRIVE LEUR DECISION DE BASE LEGALE EN DECLARANT COUPABLE DE
FAUX LE PREVENU QUI S'EST CONTENTE, APRES AVOIR ETABLI UN PREMIER RAPPORT
ATTESTANT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES COMPTES SOCIAUX, DE REDIGER, LA
VEILLE DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES, UN NOUVEAU RAPPORT DATE DU
MEME JOUR QUE LE PRECEDENT ET EMETTANT DES RESERVES ET QUI A CHARGE SON
CONFRERE, EGALEMENT COMMISSAIRE AUX COMPTES, DE DONNER CONNAISSANCE DE CE
NOUVEAU RAPPORT AU COURS DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE L'OBLIGATION PREVUE PAR LES TEXTES
INVOQUEE PAR LES JUGES DU FOND DE METTRE LE RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX
COMPTES A LA DISPOSITION DES ACTIONNAIRES, 15 JOURS AU MOINS AVANT LA REUNION
DE L'ASSEMBLEE GENERALE, PESE SEULEMENT SUR LES DIRIGEANTS SOCIAUX ET NON SUR
LES COMMISSAIRES QUI PEUVENT PARFAITEMENT DEPOSER UN NOUVEAU RAPPORT JUSQU'AU
JOUR DE L'ASSEMBLEE GENERALE ;
LES MOYENS CI-DESSUS TRANSCRITS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... ET Z..., COMMISSAIRES AUX
COMPTES, COUPABLES DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE, L'ARRET ATTAQUE CONSTATE
QUE, LE 23 JUIN 1970, PEU AVANT LA REUNION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES
ACTIONNAIRES, Z... A SUBSTITUE, A UN PRECEDENT RAPPORT DES COMMISSAIRES AUX
COMPTES, UN NOUVEAU RAPPORT, ETABLI LA VEILLE, FAUSSEMENT DATE DU 1ER JUIN 1970
ET QUI CONTENAIT DES CONCLUSIONS DIFFERENTES DE CELLES DU PREMIER RAPPORT,
NOTAMMENT EN CE QU'IL COMPORTAIT DES RESERVES SUR LA REGULARITE ET LA SINCERITE
DES COMPTES QUI NE FIGURAIENT PAS DANS LE DOCUMENT INITIAL ; QUE Y..., QUI A
SIGNE AVEC Z... CE SECOND RAPPORT, S'EST ASSOCIE A CETTE MACHINATION ; QUE LES
DEUX PREVENUS ONT RECONNU LA MATERIALITE DES FAITS ;
ATTENDU QUE, POUR REJETER LES CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE,
REPRISES AU MOYEN, LA COUR D'APPEL ENONCE QUE LA DATE DU DOCUMENT CONTREFAIT
N'ETAIT PAS REELLE ET AVAIT ETE PORTEE AINSI UNIQUEMENT DANS LE DESSEIN DE
DISSIMULER LA DATE EFFECTIVE DE LA MISE A LA DISPOSITION DES ACTIONNAIRES ;
QU'ELLE CONSTITUAIT, DES LORS, UN ELEMENT ESSENTIEL DE L'ACTE INCRIMINE DE FAUX
; QUE, MEME SI LES ACTIONNAIRES N'AVAIENT PAS EU CONNAISSANCE DU RAPPORT
«FORGE ET SCIEMMENT REVETU D'UNE DATE FALLACIEUSE», UN PREJUDICE
POUVAIT EN RESULTER POUR EUX, «CETTE ALTERATION FAISANT PRESUMER QUE LEDIT
ACTE AVAIT ETE A LEUR DISPOSITION DANS LE DELAI DE 15 JOURS, ALORS QUE,
N'EXISTANT PAS, IL NE POUVAIT LEUR AVOIR ETE COMMUNIQUE» ; QUE LE BUT
RECHERCHE PAR LES PREVENUS AVAIT ETE DE «SE COUVRIR» EVENTUELLEMENT
SI, COMME ILS LE CRAIGNAIENT, L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS DE LA SOCIETE
VENAIT A ETRE DECOUVERT ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS, LA COUR D'APPEL A
CARACTERISE, EN TOUS SES ELEMENTS CONSTITUTIFS, TANT MATERIELS
La responsabilité du commissaire aux
comptes
290
QU'INTENTIONNELS, LE DELIT DE FAUX EN ECRITURES DE COMMERCE, DONT
ELLE A DECLARE LES DEMANDEURS COUPABLES, ET A, SANS ENCOURIR LES GRIEFS
ALLEGUES AU MOYEN, DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ; D'OU IL SUIT QUE LES
MOYENS NE SAURAIENT ETRE ACCUEILLIS ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION COMMUN AUX DEUX DEMANDEURS ET
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 MODIFIEE PAR
LA LOI DU 4 JANVIER 1967, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20
AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DU DELIT D'INFORMATION MENSONGERE ;
AUX MOTIFS QUE LE PREVENU A, AVEC UN AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES, ETABLI UN PREMIER RAPPORT DATE DU 1ER JUIN 1970 DANS LEQUEL ILS
CERTIFIAIENT POUR LA PREMIERE FOIS EN 5 ANS SANS RESERVES LES COMPTES DE LA
SOCIETE ; QUE CEPENDANT QUELQUES JOURS PLUS TARD LES COMMISSAIRES AUX COMPTES
ETABLISSAIENT UN SECOND RAPPORT PORTANT LA MEME DATE MAIS METTANT EN RELIEF
CERTAINES IRREGULARITES ET CONSTITUANT EN FAIT UN REFUS D'APPROBATION DES
COMPTES ET DOCUMENTS, QU'IL APPARAIT DONC EN DEFINITIVE QUE LES COMMISSAIRES
AUX COMPTES ETAIENT REELLEMENT PERSUADES DE L'INEXACTITUDE DU BILAN ET QU'ILS
N'ONT PAS HESITE A SE PREMUNIR CONTRE LES CONSEQUENCES D'UNE PRECEDENTE
CERTIFICATION A L'EVIDENCE INSOUTENABLE, QUE LE PREVENU NE JUSTIFIE D'AUCUN
ELEMENT PEREMPTOIRE QUI PUISSE L'EXONERER DES CONSEQUENCES DE LA MISE A
DISPOSITION DES ORGANES SOCIAUX D'UN RAPPORT QU'IL SAVAIT CONTRAIRE A LA
VERITE, SA TOTALE PASSIVITE A COMPTER DE LA REDACTION DU SECOND RAPPORT
TEMOIGNANT DE SA CONNIVENCE AVEC L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES DANS LE
PROCESSUS FRAUDULEUX DEJA DECRIT ET AUQUEL IL S'EST DELIBEREMENT ASSOCIE ;
ALORS QUE LE FAIT QUE LE PREVENU AIT SIGNE UN PREMIER RAPPORT
APPROUVANT LES COMPTES DE L'EXERCICE 1969 SANS RESERVES, PUIS, QUELQUES JOURS
PLUS TARD, AIT REDIGE UN SECOND RAPPORT EMETTANT DES RESERVES, NE CONSTITUE PAS
LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 S'IL
N'EST PAS ETABLI QUE LE PREVENU SAVAIT QUE LE PREMIER RAPPORT PRETENDUMENT
MENSONGER SERAIT FINALEMENT LE SEUL A ETRE COMMUNIQUE A L'ASSEMBLEE GENERALE
DES ACTIONNAIRES, QUE DES LORS EN L'ESPECE OU LES PREMIERS JUGES ONT RELAXE LE
DEMANDEUR DU CHEF D'INFORMATION MENSONGERE APRES AVOIR CONSTATE QUE CE DERNIER
AVAIT LAISSE AU SECOND COMMISSAIRE AUX COMPTES LE SOIN DE DONNER CONNAISSANCE
DU SECOND RAPPORT A L'ASSEMBLEE, LA COUR NE POUVAIT DECLARER LE PREVENU
COUPABLE D'INFORMATION MENSONGERE SANS S'EXPLIQUER SUR LE FAIT QUE CE DERNIER
PR ECISAIT QUE LE SECOND RAPPORT NON MENSONGER SERAIT SOUMIS PAR SON CONFRERE A
L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION PROPRE A Z... CONTENU DANS LE
MEMOIRE ADDITIONNEL ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 457 DE LA LOI DU 24
JUILLET 1966 MODIFIEE PAR LA LOI DU 4 JANVIER 1967, 593 DU
La responsabilité du commissaire aux
comptes
291
CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT
DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DU DELIT D'INFORMATION MENSONGERE ;
AUX MOTIFS QUE LE PREVENU A, AVEC UN AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES, ETABLI UN PREMIER RAPPORT DATE DU 1ER JUIN 1970 DANS LEQUEL ILS
CERTIFIAIENT POUR LA PREMIERE FOIS EN 5 ANS SANS RESERVES LES COMPTES DE LA
SOCIETE ; QUE, CEPENDANT, QUELQUES JOURS PLUS TARD, LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES ETABLISSAIENT UN SECOND RAPPORT PORTANT LA MEME DATE MAIS METTANT EN
RELIEF CERTAINES IRREGULARITES ET CONSTITUANT, EN FAIT, UN REFUS D'APPROBATION
DES COMPTES ET DOCUMENTS, QU'IL APPARAIT DONC EN DEFINITIVE QUE LES
COMMISSAIRES AUX COMPTES ETAIENT REELLEMENT PERSUADES DE L'INEXACTITUDE DU
BILAN ET QU'ILS N'ONT PAS HESITE A SE PREMUNIR CONTRE LES CONSEQUENCES D'UNE
PRECEDENTE CERTIFICATION A L'EVIDENCE INSOUTENABLE, QUE LE PREVENU NE JUSTIFIE
D'AUCUN ELEMENT PEREMPTOIRE QUI PUISSE L'EXONERER DES CONSEQUENCES DE LA MISE A
DISPOSITION DES ORGANES SOCIAUX D'UN RAPPORT QU'IL SAVAIT CONTRAIRE A LA
VERITE, SA TOTALE PASSIVITE A COMPTER DE LA REDACTION DU SECOND RAPPORT
TEMOIGNANT DE SA CONNIVENCE AVEC L'AUTRE COMMISSAIRE AUX COMPTES DANS LE
PROCESSUS FRAUDULEUX DEJA DECRIT ET AUQUEL IL S'EST DELIBEREMENT ASSOCIE ;
ALORS QUE LE FAIT QUE LE PREVENU AIT SIGNE UN PREMIER RAPPORT
APPROUVANT LES COMPTES DE L'EXERCICE 1969 SANS RESERVES, PUIS, QUELQUES JOURS
PLUS TARD AIT REDIGE UN SECOND RAPPORT EMETTANT DES RESERVES, NE CONSTITUE PAS
LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 S'IL
N'EST PAS ETABLI QUE LE PREVENU SAVAIT QUE LE PREMIER RAPPORT PRETENDUMENT
MENSONGER SERAIT FINALEMENT LE SEUL A ETRE COMMUNIQUE A L'ASSEMBLEE GENERALE
DES ACTIONNAIRES ;
LES MOYENS CI-DESSUS TRANSCRITS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... ET Z... COUPABLES D'AVOIR
SCIEMMENT DONNE OU CONFIRME DES INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE LA
SOCIETE, L'ARRET ENONCE QUE LES PREVENUS ONT ETABLI UN RAPPORT APPROUVANT LE
BILAN DE L'EXERCICE 1969, PRESENTE AUX ACTIONNAIRES PAR X... LE 23 JUIN 1970
QUI, BIEN QUE SOUSTRAIT AU DERNIER MOMENT, A SERVI DE BASE AUX DELIBERATIONS DE
L'ASSEMBLEE ; QUE LA PREUVE DE LA CONNAISSANCE QU'AVAIENT LES DEUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES DES INEXACTITUDES DE CE BILAN RESSORTAIT DE LEUR SECOND RAPPORT,
ANTIDATE ET DEMEURE SECRET, QUE LES EXPERTS JUDICIAIRES ONT DECOUVERT PAR LA
SUITE QUE LES DEUX PREVENUS ONT «AGI DE CONNIVENCE DANS LE PROCESSUS
FRAUDULEUX DECRIT» ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS QUI, CONTRAIREMENT A CE QUI
EST ALLEGUE AU MOYEN, CARACTERISENT L'ELEMENT CONSTITUTIF INTENTIONNEL DE LA
PREMIERE INFRACTION INSTITUEE PAR LES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 457 DE LA LOI
DU 24 JUILLET 1966, RETENUE A LA CHARGE DE Y... ET DE Z..., LA COUR D'APPEL A
JUSTIFIE SA DECISION ; QU'AINSI, LES MOYENS DOIVENT ETRE REJETES ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
292
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION COMMUN AUX DEUX DEMANDEURS ET
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 437 ET 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966
MODIFIEE PAR LA LOI DU 4 JANVIER 1967, DE L'ARTICLE 131 DE LA LOI DU 13 JUILLET
1967, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI
DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, DEFAUT DE REPONSE A
CONCLUSIONS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU
COUPABLE DE NON-DENONCIATION DE FAITS DELICTUEUX ;
AUX MOTIFS QUE LE PREVENU N'A PAS DENONCE LES AVANCES
IRREGULIERES CONSENTIES PAR LA DIRECTION DE LA SOCIETE A DIVERSES SCI DANS
LESQUELLES LE PDG DE LA SOCIETE DONT IL ETAIT LE COMMISSAIRE AUX COMPTES ETAIT
DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT INTERESSE ; QUE POUR TENTER DE JUSTIFIER SA
CARENCE, LE PREVENU INVOQUE ESSENTIELLEMENT LE FAIT QUE LES OPERATIONS
EFFECTUEES PAR CES SCI N'ETAIENT PAS CONTRAIRES A L'INTERET SOCIAL ET QUE LES
OPERATIONS N'AVAIENT PAS ETE FAITES DANS L'INTERET D'UN ADMINISTRATEUR, QUE
CERTES CERTAINES DES OPERATIONS LITIGIEUSES ONT INDIRECTEMENT BENEFICIE A LA
SOCIETE, MAIS QU'IL EN ETAIT DIFFEREMMENT, EU EGARD A LA SITUATION FINANCIERE
OBEREE DE LA SOCIETE, DES AVANCES UTILISEES POUR LA CONSTRUCTION DE LOGEMENTS A
USAGE PERSONNEL OU POUR L'AQUISITION DE TERRAINS A BATIR ; QUE, PAR AILLEURS,
LES COMMISSAIRES AUX COMPTES N'ONT PAS REVELE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS
INTERVENU DES LE 30 SEPTEMBRE 1969, QUE LA PRETENDUE PERMANENCE DU CREDIT
BANCAIRE DURANT LA PERIODE POSTERIEURE CORRESPONDAIT EN REALITE NON PAS AU
RENOUVELLEMENT DELIBERE ET CIRCONSTANCIE DE PRECEDENTS ENGAGEMENTS
REGULIEREMENT CONTRACTES MAIS A LA RECONDUCTION PRECAIRE D'UNE SITUATION
DEBITRICE RUINEUSE DANS L'UNIQUE SOUCI D'EVITER UN EFFONDREMENT BRUTAL ET
IMMEDIAT AVEC LES CONSEQUENCES POUVANT EN DECOULER AU REGARD DES CREANCES DU
POOL BANCAIRE, QUE D'AILLEURS LES DEUX COMMISSAIRES NE SE SONT NULLEMENT MEPRIS
SUR LA SIGNIFICATION DE CES VERITABLES SURSIS SUCCESSIFS QUE CONSTITUAIENT LES
ECHEANCES MENSUELLES DE LA SOCIETE A PARTIR DE L'AUTOMNE 1969 PUISQUE DANS LEUR
RAPPORT CONTREFAIT ETABLI LE 22 JUIN 1970, ILS ONT MENTIONNE QUE «CERTAINS
RISQUES SUBSISTENT», FORMULATION INTENTIONNELLEMENT SIBYLLINE QUI TRADUIT
EN REALITE LEUR CONVICTION D'UNE SITUATION FINANCIERE COMPROMISE EN MEME TEMPS
QUE LE SOUCI DE SE CONSTITUER UN ALIBI DANS LA PERSPECTIVE D'UN EFFONDREMENT
QU'ILS TENAIENT POUR INELUCTABLE ;
ET QU'ENFIN, SI LA DEROBADE UTILISEE PAR LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES DANS LEUR RAPPORT RELATIF A L'EXERCICE 1968 LES EXONERE DE L'IMPUTATION
DE CONFIRMATION D'INFORMATIONS MENSONGERES PUISQU'ILS NE SE SONT PAS AVENTURES
A CERTIFIER LA REGULARITE ET LA SINCERITE DE CE BILAN, LEUR CARENCE A LA SUITE
DE LA PRESENTATION AUX ACTIONNAIRES D'UN BILAN QU'ILS SAVAIENT INEXACT JUSTIFIE
A LEUR ENCONTRE L'IMPUTATION DE LA SECONDE INFRACTION DEFINIE PAR L'ARTICLE 457
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, DE MEME QUE LEUR CARENCE EN DEPIT DE LA
PRESENTATION AUX ACTIONNAIRES DU
La responsabilité du commissaire aux
comptes
293
BILAN RELATIF A L'EXERCICE DE L'ANNEE 1969 DONT ILS AVAIENT
DECELE L'INEXACTITUDE ;
ALORS QUE, D'UNE PART, LA COUR QUI A RECONNU QUE CERTAINES DES
AVANCES CONSENTIES AUX SCI ETAIENT CONFORMES A L'INTERET DE LA SOCIETE
PRETEUSE, NE POUVAIT PRETENDRE QUE D'AUTRES AVANCES UTILISEES POUR LA
CONSTRUCTION DE LOGEMENTS A USAGE PERSONNEL OU POUR L'ACQUISITION DE TERRAINS A
BATIR ETAIENT ETRANGERES A L'OBJET SOCIAL SANS REPONDRE AUX CONCLUSIONS DU
PREVENU QUI SOULIGNAIT QUE LES AVANCES LITIGIEUSES AVAIENT ETE CONSENTIES AUX
SCI POUR EDIFIER DES LOGEMENTS DESTINES AU PERSONNEL DE LA SOCIETE OU POUR
DIVERSIFIER L'ACTIVITE SOCIALE DE LA SOCIETE MERE APRES LE RALENTISSEMENT DES
COMMANDES DE L'ADMINISTRATION ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE LE FAIT QUE LES
COMMISSAIRES AUX COMPTES AIENT DANS PLUSIEURS RAPPORTS EXPRIME DES RESERVES
CONCERNANT LES RISQUES ENCOURUS N'IMPLIQUAIT EN RIEN QU'ILS AIENT PU AVOIR
CONNAISSANCE D'UNE PRETENDUE SITUATION DE CESSATION DES PAIEMENTS, CETTE
SITUATION SANS ISSUE ETANT D'AILLEURS A PRIORI EXCLUE PAR LA PERMANENCE DU
SOUTIEN BANCAIRE ACCORDE A LA SOCIETE JUSQU'A LA DATE DU DEPOT DU BILAN ;
ET ALORS QU'ENFIN LE FAIT POUR UN COMMISSAIRE AUX COMPTES
D'EXPRIMER DANS SON RAPPORT DES RESERVES SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE QU'IL A
POUR CHARGE DE VERIFIER N'IMPLIQUE EN RIEN QUE CE COMMISSAIRE PUISSE AVOIR
CONNAISSANCE DE L'INEXACTITUDE PRETENDUE DU BILAN ET DU CARACTERE PENALEMENT
REPREHENSIBLE DE CETTE INEXACTITUDE ;
ET SUR LE QUATRIEME MOYEN DE CASSATION PROPRE A Z... CONTENU DANS
LE MEMOIRE ADDITIONNEL ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 437, 457 DE LA LOI
DU 24 JUILLET 1966 MODIFIEE PAR LA LOI DU 4 JANVIER 1967, DE L'ARTICLE 131 DE
LA LOI DU 13 JUILLET 1967, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DE
NON-DENONCIATION DE FAIT DELICTUEUX ;
AUX MOTIFS QUE LE DEMANDEUR SE SERAIT TOTALEMENT ABSTENU DE
DENONCER AU MINISTERE PUBLIC DES FAITS CARACTERISANT D'UNE PART L'EXISTENCE DE
PRELEVEMENTS ABUSIFS AU PROFIT DES SOCIETES CIVILES IMMOBILIERES, D'AUTRE PART
L'OMISSION DE DECLARATION DE LA CESSATION DES PAIEMENT DE GEEP-INDUSTRIES ;
ALORS, D'UNE PART, QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES NE SE REND
COUPABLE DU DELIT DE NON-REVELATION AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE FAITS
DELICTUEUX QU'A CONDITION QU'IL AIT EU CONNAISSANCE, NON SEULEMENT DES FAITS
EUX-MEMES, MAIS DE LEURS CARACTERES D'INFRACTION PENALE ; QUE LE DELIT D'ABUS
DE BIENS SOCIAUX SUPPOSE L'UTILISATION PAR UN DIRIGEANT SOCIAL DES FONDS DE LA
SOCIETE DANS UN BUT PERSONNEL ET CONTRAIRE A L'INTERET SOCIAL ; QU'IL NE
RESULTE PAS DE LA DECISION ATTAQUE QUE LE DEMANDEUR AIT EU CONNAISSANCE DE CE
QUE L'USAGE QUI A ETE FAIT DES FONDS SOCIAUX POUR LA CONSTITUTION DE LA SCI
ETAIT CONTRAIRE A L'INTERET SOCIAL ; QUE LA COUR D'APPEL DEVAIT D'AUTANT PLUS
S'EXPLIQUER SUR CE POINT QU'ELLE AVAIT ETE SAISIE PAR UN AUTRE COMMISSAIRE AUX
COMPTES DE CONCLUSIONS SUSCEPTIBLES DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
294
BENEFICIER AU DEMANDEUR ET SOULIGNANT QUE LES AVANCES LITIGIEUSES
AVAIENT ETE CONSENTIES AUX SCI POUR EDIFIER DES LOGEMENTS DESTINES AU PERSONNEL
DE LA SOCIETE OU POUR DIVERSIFIER L'ACTIVITE SOCIALE DE LA SOCIETE MERE APRES
LE RALENTISSEMENT DES COMMANDES DE L'ADMINISTRATION ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE SI LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT ADOPTE
LES MOTIFS DES PREMIERS JUGES, DONT IL RESULTE QUE LE DEMANDEUR AVAIT, DES LE
22 NOVEMBRE 1969, ECRIT A Y... QUE LA POSITION FINANCIERE DE GEEP-INDUSTRIES
ETAIT TRES PRECAIRE ET LUI AVAIT FAIT CONNAITRE, LE 26 MARS 1970, QUE
L'ECHEANCE DU 10 AVRIL 1970 SERAIT TRES DIFFICILE PUISQUE DES EFFETS D'UNE
VALEUR DE 10 MILLIONS DE FRANCS AVAIENT ETE REFUSES ET QUE LA SOCIETE GENERALE
S'ETAIT RETIREE DU BANCAIRE, IL NE RESULTE PAS DE CETTE CONSTATATION QUE LE
DEMANDEUR AVAIT CONNAISSANCE DE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS PUISQUE LES
PREMIERS JUGES CONSTATENT, AU CONTRAIRE, QUE LE DEMANDEUR AVAIT DEMANDE A X...
D'INTRODUIRE UNE INSTANCE EN SUSPENSION DES POURSUITES, CE QUI IMPLIQUAIT
NECESSAIREMENT QUE DANS SON ESPRIT IL N'Y AVAIT PAS DE CESSATION DE PAIEMENT,
LA SUSPENSION DES POURSUITES NE POUVANT ETRE ORDONNEE QU'AU PROFIT D'UNE
SOCIETE QUI NE SE TROUVE PAS EN ETAT DE CESSATION DE PAIEMENT ;
ALORS, ENFIN, QUE LE FAIT, POUR UN COMMISSAIRE AUX COMPTES,
D'EXPRIMER DANS SON RAPPORT DES RESERVES SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE QU'IL A
POUR CHARGE DE VERIFIER, N'IMPLIQUE EN RIEN QUE CE COMMISSAIRE PUISSE AVOIR
CONNAISSANCE DE L'INEXACTITUDE PRETENDUE DU BILAN ET DU CARACTERE PENALEMENT
REPREHENSIBLE DE CETTE INEXACTITUDE ;
LES MOYENS CI-DESSUS TRANSCRITS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... ET Z... COUPABLES DE N'AVOIR PAS
DENONCE AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE LES FAITS DELICTUEUX DONT ILS ONT EU
CONNAISSANCE, L'ARRET ENONCE QUE LES PREVENUS ONT CONNU, SANS LES DENONCER,
D'UNE PART, LES AGISSEMENTS DE X... QUI CONSISTAIENT A AVOIR, APRES
CONSTITUTION DE SOCIETES CIVILES IMMOBILIERES, FAIT FAIRE, PAR LA SOCIETE
GEEP-INDUSTRIES, A PLUSIEURS DE CELLES-CI ET SANS AUTORISATION DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION, DES AVANCES DE TRESORERIE TOTALISANT 10 538 808 FRANCS,
D'AUTRE PART, L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS DES SOCIETES GEEP, ET ENFIN, LE
DELIT DE PRESENTATION DE BILANS INEXACTS, COMMIS PAR X..., TANT EN CE QUI
CONCERNE LES COMPTES DE 1968 QUE CEUX DE 1969 ;
ATTENDU QUE LES JUGES PRECISENT, D'UNE PART, POUR REPONDRE A UN
CHEF DES CONCLUSIONS DE Y... REPRIS AU MOYEN, QUE LES AVANCES DE TRESORERIE EN
CAUSE ONT ETE PARTIELLEMENT UTILISEES A LA CONSTRUCTION DU LOGEMENT PERSONNEL
DE X... ET A L'ACQUISITION DE TERRAINS SANS RAPPORT AVEC L'OBJET DES SOCIETES
GEEP ET QUE X... S'EST AINSI CONSTITUE, A L'AIDE DE FONDS SOCIAUX, UN
PATRIMOINE QUI LUI ETAIT PROPRE, D'AUTRE PART, EN CE QUI CONCERNE LA DATE DE
CESSATION DES PAIEMENTS FIXEE AU 30 SEPTEMBRE 1969, QUE LES DEUX COMMISSAIRES
AUX COMPTES NE SE SONT NULLEMENT MEPRIS SUR L'ETAT DE LA SOCIETE A PARTIR DE
CETTE DATE, AINSI QU'IL RESULTE DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
295
LA CORRESPONDANCE ECHANGEE ENTRE EUX ET DE LEUR RAPPORT ANTIDATE
ETABLI LE 22 JUIN 1970, ET ENFIN, QUE LES DEUX PREVENUS, EN NE DENONCANT PAS LA
PRESENTATION DE DEUX BILANS DONT ILS CONNAISSAIENT LE CARACTERE INEXACT, ONT
FAIT PREUVE D'UNE CARENCE COUPABLE ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT, LA COUR D'APPEL, QUI A CARACTERISE, A LA
CHARGE DE Y... ET DE Z..., COMMISSAIRES AUX COMPTES, LE DELIT DE
NON-DENONCIATION PREVU PAR L'ARTICLE 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, ET A
REPONDU AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT REGULIEREMENT
SAISIE, A, SANS ENCOURIR LES GRIEFS ALLEGUES AU MOYEN, DONNE UNE BASE LEGALE A
SA DECISION ; D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS DOIVENT ETRE REJETES ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS.
Publication : Bulletin Criminel Cour de
Cassation Chambre criminelle N. 10
Décision attaquée : Cour d'appel
Paris (Chambre 9 ) du 9 juillet 1979
Titrages et résumés : 1)
BANQUEROUTE - Etat de cessation des paiements - Date - Constatations
suffisantes.
Caractérise exactement l'état de cessation des
paiements d'une société l'arrêt qui constate que la
situation financière de celle-ci se trouvait
irrémédiablement compromise, dès lors que les banques ont
refusé de continuer à lui prêter leur concours, faute par
le dirigeant de cette société de satisfaire aux conditions qui
lui avaient été imposées pour l'obtention d'un moratoire
(1).
2) BANQUEROUTE - Etat de cessation des paiements - Date - Date
antérieure de plus de 18 mois au jugement du Tribunal de commerce -
Appréciation souveraine des juges répressifs.
Aux termes de l'article 139 de la loi du 13 juillet 1967, une
condamnation pour
banqueroute simple ou frauduleuse ou pour délit
assimilé à la banqueroute simple ou frauduleuse peut être
prononcée même si la cessation des paiements n'a pas
été constatée dans les conditions prévues au titre
1er de ladite loi. Le juge répressif statuant sur l'action publique
peut, dès lors et sans que sa décision puisse avoir une incidence
sur l'application par le juge civil ou commercial de l'article 29 de cette loi,
faire remonter la cessation des paiements à une date antérieure
de plus de 18 mois au prononcé du jugement déclaratif du
règlement judiciaire ou de la liquidation des biens.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
296
3) SOCIETE - Société en général -
Bilan - Présentation de bilan inexact - Eléments constitutifs -
Mauvaise foi - Dissimulation de la véritable situation de la
société.
L'élément intentionnel du délit de
présentation de bilans inexacts résulte de la constatation par
les juges de ce que le prévenu a eu, en manipulant plusieurs postes des
bilans, le souci de faire apparaître un résultat
bénéficiaire en vue d'éviter la révélation
publique d'une situation financière compromise (2).
4) FAUX - Faux en écritures de commerce - Rapport des
commissaires aux comptes - Date inexacte - Elément essentiel.
Constitue un faux en écritures de commerce le fait pour
les commissaires aux comptes d'apposer sur un rapport une date fausse de nature
à faire croire que ce document a été mis à la
disposition des actionnaires dans le délai légal ; cette date
constituait un élément essentiel de l'acte et sa fausseté
était de nature à causer un préjudice aux actionnaires
(3).
* FAUX - Faux en écritures de commerce - Préjudice
- Rapport des commissaires aux comptes - Date inexacte. 5) SOCIETE -
Société par actions - Société anonyme -
Commissaires aux comptes - Informations mensongères - Mauvaise foi -
Constatations suffisantes.
Commettent le délit de communication d'informations
mensongères prévu et réprimé par l'article 457 de
la loi du 24 juillet 1966, les commissaires aux comptes d'une
société anonyme qui, dans un rapport mis à la disposition
des actionnaires en vue de l'assemblée générale,
approuvent un bilan qu'ils savent être inexact (4).
6) SOCIETE - Société par actions -
Société anonyme - Commissaire aux comptes -
Non-révélation de faits délictueux - Définition.
Commettent le délit de non-dénonciation
prévu et réprimé par l'article 457 de la loi du 24 juillet
1966, les commissaires aux comptes d'une société anonyme qui
omettent de dénoncer au Procureur de la République les
délits d'abus de biens sociaux, de présentations de bilans
inexacts et les délits assimilés à la banqueroute dont ils
avaient connaissance (5).
Précédents jurisprudentiels : (1)
CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle)
297
1965-01-16 Bulletin Criminel 1965 N. 4 p. 5 (IRRECEVABILITE) et
les arrêts cités. (1) (1) CF. Cour de Cassation (Chambre
criminelle) 1978-11-20 Bulletin Criminel 1978 N. 319 p. 823 (ANNULATION
PARTIELLE) et les arrêts cités. (1) (2) CF. Cour de Cassation
(Chambre criminelle) 1966-12-14 Bulletin Criminel 1966 N. 291 p. 678 (REJET) et
les arrêts cités. (3) (2) CF. Cour de Cassation (Chambre
criminelle) 197405-14 Bulletin Criminel 1974 N. 177 p. 452 (REJET ET AMNISTIE).
(3) (2) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1978-11-27 Bulletin Criminel
1978 N. 331 p. 867 (REJET) et l'arrêt cité. (3) (3) CF. Cour de
Cassation (Chambre criminelle) 1962-0409 Bulletin Criminel 1962 N. 175 p. 361
(CASSATION SANS RENVOI) et l'arrêt cité. (4) (4) CF. Cour de
Cassation (Chambre criminelle) 1980-01-14 Bulletin Criminel 1980 N. 21 p. 49
(REJET). (5) (4) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 196802-08 Bulletin
Criminel 1968 N. 42 p. 95 (REJET) et les arrêts cités. (6)
Textes appliqués :
· (2)
· (5) (6) LOI 66-537 1966-07-24 ART. 437-2, ART. 444, ART.
445
· Code pénal 402
· LOI 66-537 1966-07-24 ART. 457
· LOI 67-563 1967-07-13 ART. 130, ART. 131, ART. 132, ART.
133
· LOI 67-563 1967-07-13 ART. 29, ART. 139
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
298
Annexe 21
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 31 Janvier 2007
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 31 janvier 2007
N° de pourvoi: 05-85886
Publié au bulletin
Rejet
M. Cotte , président
Mme Thin, conseiller apporteur
M. Finielz, avocat général
Me Foussard, SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Peignot et Garreau,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience
publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt
suivant :
REJET des pourvois formés par A... Etienne, Y... Marc,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 20
septembre 2005, qui, sur renvoi après cassation, les a condamnés,
chacun, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, le premier, pour
complicité d'escroqueries, le second, pour complicité
d'escroquerie et non-révélation de faits délictueux et a
prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
299
Vu les mémoires produits en demande et en défense
;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et
des pièces de procédure qu'Alain Z..., dirigeant un groupe de
sociétés, au nombre desquelles la société anonyme
Z... ayant pour activité l'achat et la vente de véhicules
automobiles, a été déclaré définitivement
coupable d'escroquerie, pour avoir organisé, à partir de
l'année 1993, un circuit de ventes fictives à l'exportation et
obtenu du Trésor public le paiement d'une somme s'élevant, pour
la période de 1996 à 1999, à 572 millions de francs, en
remboursement de taxes non décaissées, en produisant des
déclarations mensuelles de chiffre d'affaires appuyées par des
documents contrefaits ou falsifiés, comptabilisant des crédits
fictifs de TVA ; qu'Etienne A... et Marc Y..., respectivement expert-comptable
et commissaire aux comptes de la société depuis 1987, ont
été poursuivis pour complicité d'escroquerie, et le
second, pour non-révélation de faits délictueux ;
En cet état ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé par la
société civile professionnelle Peignot et Garreau, pour Etienne
A... , pris de la violation des articles 121-6,1217,313-1 du code
pénal,591 et 593 du code de procédure pénale,6 § 2 de
la Convention européenne des droits de l'homme, défaut et
insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi :
» en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a
déclaré Etienne A... coupable du délit de
complicité d'escroquerie ; « aux motifs qu'» il convient tout
d'abord de rappeler le contexte économique et professionnel dans lequel
les prévenus ont exercé leur mission pendant la période de
la prévention ; que Marc Y... était commissaire aux comptes de la
Société SA Z... depuis 1987, qu'Etienne A... était
l'expert-comptable du groupe depuis la même époque ; que la
situation financière et économique du groupe résultant des
écritures comptables tenues, vérifiées et en tout
état de cause, connues des deux prévenus est décrite
exactement dans le rapport de M.B..., expert commis par le tribunal de commerce
d'Amiens, lors de la procédure de liquidation judiciaire du groupe ;
qu'en substance, il ressortait des écritures comptables que, depuis
1996, l'ensemble du groupe était en état virtuel de cessation des
paiements, sa survie n'ayant été possible que par l'importance
des flux financiers en provenance de l'activité exportation de la SA
Z... vers les autres sociétés du groupe pour un montant de 206 MF
sur la période visée ; que ces chiffres connus des
prévenus, toute constatation d'un mécanisme de fraude à ce
stade de l'analyse étant écartée, devait les conduire
à porter une attention particulière à la SA Z... et
à son activité à l'exportation ; que les écritures
comptables de la SA Z... faisaient apparaître à l'examen des deux
prévenus, experts du chiffre, le circuit suivant tel qu'il a
été exactement relevé par les experts judiciaires :-un
véhicule acheté à Mercedes France 100 hors taxes
était facturé à Z... toutes taxes comprises 100 + 20,6 =
120,6-le véhicule était revendu à Car Diffusion hors taxe
100 + marge Z... 100 + 10 = 110,-Car Diffusion payait directement par
compensation 110 à Mercedes France,-SA Z... se trouvait donc redevable
envers Mercedes France de 120,6-110 = 10,6, que, dans ces conditions, il aurait
du apparaître un flux de trésorerie de 10,6 de SA Z... vers
Mercedes France ; qu'en fait, celui-ci était inexistant, le compte
fournisseur de Mercedes France au sein de SA Z... étant apuré au
moyen de diverses factures, qui se sont révélées fausses
de Z... à Mercedes pour frais sous divers intitulés tels que
« préparation de véhicules « ; qu'ainsi à la
seule lecture de la comptabilité l'unique flux de trésorerie
pouvant être constaté au sein de la SA Z... consistait en un
remboursement de TVA mensuel de 12 à 15 MF ; que cet état de
trésorerie apparaissait encore plus surprenant à l'examen du
compte fournisseur Mercedes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
300
France où on pouvait constater :-que les factures
Mercedes portaient la mention « paiement par chèque comptant «
alors qu'elles étaient comptabilisées par compensation :-que les
rapprochements bancaires ne faisaient apparaître ni le paiement d'une TVA
décaissée et remboursable, ni le paiement à Mercedes
France ; qu'Etienne A... était conscient de ce flux de trésorerie
en provenance du Trésor public dans la mesure où dans le cadre de
ses fonctions d'expert-comptable il établissait personnellement les
attestations mensuelles de crédit de TVA destinées à la
banque qui avançait les fonds à SA Z... sous la forme de cession
de créances ; que, confrontés à ces anomalies comptables,
les prévenus, selon leurs déclarations pendant l'enquête,
les auraient tenues pour négligeables ; que, notamment, ils se seraient
abstenus, alors que l'activité exportation de SA Z... dans son circuit
Mercedes vers Car Diffusion représentait 80 % de l'activité du
groupe, de rechercher la marge, de prendre connaissance des contrats avec
Mercedes France, du contrat dit de « compensation « du paiement des
voitures à Mercedes par Car Diffusion, de procéder à des
rapprochements bancaires élémentaires ; que, compte tenu de la
compétence professionnelle et de l'expérience des
prévenus, l'incuriosité dont ils font état est
incompatible avec l'exercice de leur mission ; que la fictivité des
comptes annuels et notamment des déclarations mensuelles de TVA
remboursable ne pouvaient échapper à des professionnels du
chiffre ; qu'ainsi Etienne A... en établissant les comptes et Marc Y...
en les certifiant, ont permis pendant les exercices visés à la
prévention, la réalisation de l'escroquerie ; que, dans les
mêmes circonstances, Marc Y... a omis de révéler au parquet
ces faits dont il avait connaissance ; que les prévenus seront
déclarés coupables des délits visés à la
prévention ; que, pour ce qui concerne l'application de la loi
pénale, en l'absence d'antécédents judiciaires des
prévenus, il sera prononcé des peines d'emprisonnement assorties
du sursis « ; « alors, d'une part, que la complicité qui
requiert par principe l'existence d'un fait positif ne peut s'induire d'une
simple inaction ou abstention qu'à la condition que le prévenu
soit tenu à une obligation de ne pas laisser se perpétrer
l'infraction et ait eu le pouvoir d'y faire obstacle, de sorte qu'en se bornant
à retenir que « la fictivité des comptes annuels ou
notamment des délibérations mensuelles de TVA remboursable ne
pouvaient échapper à des professionnels du chiffre « sans
rechercher, comme elle y était invitée, si l'existence de
l'escroquerie commise par Alain Z... était réellement
décelable par Etienne A... dans la mesure où, prévenu du
seul chef de complicité d'escroquerie il n'avait pas eu connaissance des
fausses pièces justificatives établies par Alain Z... et son
assistante destinées à justifier la fausse activité
d'exportation de lots de véhicules Mercedes à savoir les fausses
factures de Mercedes Benz France à la Société Garage Z...,
les fausses factures de la Société Garage Z... à Car
Diffusion, les fausses autorisations de vente en franchise de taxe avec
dispense de visa délivrées par la Société Car
Diffusion, les fausses attestations d'exportation en franchise de taxe
émanant de Car Diffusion et les instructions de Mercedes Benz France
relatives au paiement par délégation, la cour d'appel n'a pas
justifié légalement sa décision ; « alors, d'autre
part, que la présomption d'innocence est un droit essentiel et que la
complicité par abstention se distingue de la simple négligence
professionnelle, de sorte qu'en postulant qu'en raison de sa compétence
professionnelle, Etienne A... aurait fait preuve d'une abstention coupable en
ne relevant pas les escroqueries commises par Alain Z..., la cour d'appel qui a
fait donc peser sur Etienne A... une présomption de connaissance de
l'infraction principale en raison de cette seule compétence
professionnelle, a violé les articles 121-7 du code pénal et 6
§ 2 de la Convention européenne des droits de l'homme ; «
alors, en outre, que l'insuffisance
La responsabilité du commissaire aux
comptes
301
de motifs constitue un défaut de motifs, de sorte qu'en
omettant de répondre aux conclusions d'Etienne A... aux termes
desquelles il exposait qu'il avait « pris la précaution
d'insérer, en application des règles professionnelles, dans son
attestation de mission de présentation des comptes annuels de la SA
Garage Z... pour les exercices 1997 et 1998 une réserve selon laquelle
« les stocks et l'activité export n'ont pas fait l'objet de
contrôles particuliers de notre part « ce dont il résultait
qu'Etienne A... qui estimait ne pas avoir disposé, dans le cadre de sa
mission de présentation des comptes, des moyens de contrôle
adaptés, ne pouvait s'être rendu complice par abstention, la cour
d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ; «
alors enfin, que l'élément moral de la complicité implique
la volonté du complice de laisser l'auteur principal accomplir un acte
délictueux dont il sait qu'il se commet, de sorte qu'en se bornant
à relever qu'Etienne A... aurait fait preuve d'incuriosité
incompatible avec l'exercice de sa mission et sans caractériser la
conscience qu'Etienne A... aurait eu de l'infraction principale commise par
Alain Z... à l'aide de pièces fausses, sans relever dans quelle
mesure Etienne A... aurait eu connaissance de ces faux, la cour d'appel n'a pas
justifié légalement sa décision « ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé par la
société civile professionnelle Bouzidi et Bouhanna, pour Marc
Y..., pris de la violation des articles 121-6,1217,313-1 du code pénal,
L. 225-35, L. 225-36, L. 225-37 et L. 225-40 du code de commerce, du
décret n° 67-236 du 25 mai 1967,591 et 593 du code de
procédure pénale, défaut de motifs et manque de base
légale :
» en ce que l'arrêt infirmatif a dit le demandeur
coupable des délits de complicité d'escroquerie et de
non-révélation de faits délictueux par un commissaire aux
comptes et en répression l'a condamné à dix-huit mois
d'emprisonnement avec sursis ; « aux motifs que le conseil de Marc Y...,
prévenu intimé, dépose à titre subsidiaire des
conclusions tendant à voir déclarer irrecevable l'appel de l'Etat
français, partie civile, du jugement du 11 avril 2001 ; qu'à
l'appui il est exposé que ce jugement avait statué exclusivement
sur les poursuites pénales et avait renvoyé l'affaire à
l'audience du 15 mai 2001 sur les intérêts civils ; qu'en
application des dispositions de l'article 495-3 du code de procédure
pénale l'appel serait irrecevable ; que le jugement du 11 avril 2001,
renvoyant des fins de la poursuite les prévenus Marc Y... et Etienne
A... impliquait un débouté des demandes de l'Etat
français, partie civile, lors de l'audience de renvoi du 15 mai 2001 ;
que, dans ces conditions, la décision du 11 avril 2001 portait atteinte
aux droits de la partie civile et était, dès lors, susceptible
d'appel de celle-ci ; qu'en tout état de cause, l'Etat français,
partie civile, a également interjeté appel de la décision
du 15 mai 2001 le déboutant de ses demandes ; que la situation
financière et économique du groupe résultait des
écritures comptables tenues, vérifiées et en tout
état de cause, connues des deux prévenus et décrites
exactement dans le rapport de M.B..., expert commis par le tribunal de commerce
d'Amiens lors de la procédure de liquidation judiciaire du groupe ;
qu'en substance, il ressortait des écritures comptables que, depuis
1996, l'ensemble du groupe était en état virtuel de cessation des
paiements, sa survie n'ayant été possible que par l'importance
des flux financiers en provenance de l'activité exportation de la SA
Z... vers les autres sociétés du groupe pour un montant de 206 MF
sur la période visée ; que ces chiffres connus des
prévenus, toute constatation d'un mécanisme de fraude à ce
stade de l'analyse étant écartée, devaient les conduire
à porter une attention particulière à la SA Z... et
à son activité à l'exportation ; que les écritures
comptables de la SA Z... faisaient apparaître à l'examen des deux
prévenus, experts du chiffre, le circuit suivant tel qu'il a
été exactement relevé par les experts judiciaires : un
véhicule acheté à Mercedes France
La responsabilité du commissaire aux
comptes
302
100 hors taxes était facturé Z..., toutes taxes
comprises 100 + 20,6 = 120,6 le véhicule était revendu à
Car Diffusion hors taxes 100 + marge Z...,100 + 10 = 110, Car Diffusion payait
directement par compensation 110 à Mercedes France, SA Z... se trouvait
donc redevable envers Mercedes France de 120,6 - 110 = 10,6 ; que, dans ces
conditions, il aurait dû apparaître un flux de trésorerie de
10,6 de SA Z... vers Mercedes France ; qu'en fait, celui-ci était
inexistant, le compte fournisseur de Mercedes France au sein de SA Z...
étant apuré au moyen de diverses factures, qui se sont
révélées fausses, de Z... à Mercedes pour frais
sous divers intitulés tels que « préparation de
véhicules « ; qu'ainsi à la seule lecture de la
comptabilité l'unique flux de trésorerie pouvant être
constaté au sein de la SA Z... consistait en un remboursement de TVA
mensuel de 12 à 15 MF ; que cet état de trésorerie
apparaissait encore plus surprenant à l'examen du compte fournisseur
Mercedes France où on pouvait constater que les factures Mercedes
portaient la mention « paiement par chèque comptant « alors
qu'elles étaient comptabilisées par compensation ; que les
rapprochements bancaires ne faisaient apparaître ni le paiement d'une TVA
décaissée et remboursable, ni le paiement à Mercedes
France ; qu'Etienne A... était conscient de ce flux de trésorerie
en provenance du Trésor public dans la mesure où dans le cadre de
ses fonctions d'expert-comptable, il établissait personnellement les
attestations mensuelles de crédit de TVA destinées à la
banque qui avançait les fonds à SA Z... sous la forme de cession
de créances ; que confrontés à ces anomalies comptables
les prévenus, selon leurs déclarations pendant l'enquête,
les auraient tenues pour négligeables ; que notamment ils se seraient
abstenus alors que l'activité d'exportation de la SA Z... dans son
circuit Mercedes vers Car Diffusion représentait 80 % de
l'activité du groupe, de rechercher la marge, de prendre connaissance
des contrats avec Mercedes France, du contrat dit de « compensation «
du paiement des voitures à Mercedes par Car Diffusion, de
procéder à des rapprochements bancaires
élémentaires ; que, compte tenu de la compétence
professionnelle et de l'expérience des prévenus,
l'incuriosité dont ils font état est incompatible avec l'exercice
de leur mission ; que la fictivité des comptes annuels et notamment des
déclarations mensuelles de TVA remboursable ne pouvaient échapper
à des professionnels du chiffre ; qu'ainsi Etienne A... en
établissant les comptes et Marc Y..., en les certifiant, ont permis
pendant les exercices visés à la prévention, la
réalisation de l'escroquerie ; que, dans les mêmes circonstances,
Marc Y... a omis de révéler au parquet ces faits dont il avait
connaissance ; que les prévenus seront déclarés coupables
des délits visés à la prévention ; « alors,
d'une part, que le demandeur avait fait valoir l'existence d'une organisation
financière et comptable structurée, la réalisation de deux
contrôles fiscaux portant sur les années 1990 à 1992 et
1995 à 1999 n'ayant révélé aucune anomalie ou
fraude dans la comptabilité du groupe Z..., seule une perquisition
à but fiscal déclenchée chez les sociétés
Car Diffusion, Mercedes et Z... le 24 septembre 1999 ayant permis de mettre en
lumière le caractère fictif du marché d'exportation ;
qu'en retenant qu'à la seule lecture de la comptabilité l'unique
flux de trésorerie pouvant être constaté au sein de la
société Z... consistait en un remboursement de TVA mensuel de 12
à 15 MF, que cet état de trésorerie apparaissait encore
plus surprenant à l'examen du compte fournisseur Mercedes France
où on pouvait constater que les factures Mercedes portaient la mention
« paiement par chèque comptant « alors qu'elles étaient
comptabilisées par compensation, que les rapprochements bancaires ne
faisaient apparaître ni le paiement d'une TVA décaissée et
remboursable ni le paiement à Mercedes France, que confrontés
à ces anomalies comptables, le demandeur et Etienne A... les auraient
tenues pour
La responsabilité du commissaire aux
comptes
303
négligeables, qu'ils se seraient abstenus alors que
l'activité export de la SA Z... dans son circuit Mercedes vers Car
Diffusion représentait 80 % de l'activité du groupe, de
rechercher la marge, de prendre connaissance des contrats avec Mercedes France,
du contrat dit de « compensation « du paiement des voitures à
Mercedes par Car Diffusion, de procéder à des rapprochements
bancaires élémentaires, pour en déduire que compte tenu de
la compétence professionnelle et de l'expérience des
prévenus, l'incuriosité dont ils font état est
incompatible avec l'exercice de leur mission, la fictivité des comptes
annuels et notamment des déclarations mensuelles de TVA remboursable ne
pouvant échapper à des professionnels du chiffre, sans
rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que
l'administration fiscale elle-même, lors des différents comptables
fiscaux opérés, n'ait relevé aucune anomalie,
n'était pas de nature à exclure toute responsabilité du
demandeur dans l'exécution de sa mission, la cour d'appel n'a pas
légalement justifié sa décision au regard des textes
susvisés ; « alors, d'autre part, qu'en affirmant que Marc Y..., en
certifiant les comptes, a permis pendant les exercices visés à la
prévention la réalisation de l'escroquerie et que, dans les
mêmes circonstances, il a omis de révéler au parquet ces
faits dont il avait connaissance, la cour d'appel, qui ne précise
nullement comment le demandeur aurait pu déceler l'escroquerie
opérée au préjudice de l'Etat, alors que notamment elle
n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si le fait
que les services comptables composés de quinze personnes n'aient rien
révélé, que le rapport des experts consultants ne fasse
aucunement état de faits d'escroquerie ou anomalies diverses, pas plus
que les services fiscaux dans le cadre des contrôles
opérés, l'administration fiscale ayant reconnu n'avoir aucunement
décelé la fraude opérée à son
préjudice, a privé sa décision de base légale au
regard des textes susvisés ; « alors de troisième part, que
le demandeur faisait valoir que l'escroquerie était indécelable
dès lors que les moyens mis en oeuvre consistaient dans l'utilisation de
faux papiers à en tête Mercedes, de fausses factures de
fournisseurs Mercedes, de fausses factures de ventes à la
société Car Diffusion et de fausses correspondances et fax,
l'expert B... ayant admis « la difficulté à distinguer un
faux d'un vrai document « outre que les remboursements de crédit de
TVA sont une pratique normale ; qu'en affirmant qu'à la seule lecture de
la comptabilité l'unique flux de trésorerie pouvant être
constaté au sein de la société Z... consistait en un
remboursement TVA mensuel de 12 à 15 MF, que cet état de
trésorerie apparaissait encore plus surprenant à l'examen du
compte fournisseur Mercedes France où on pouvait constater que les
factures Mercedes portaient la mention « paiement par chèque
comptant « alors qu'elles étaient comptabilisées par
compensation, et que les rapprochements bancaires ne faisaient apparaître
ni le paiement d'une TVA décaissée et remboursable ni le paiement
à Mercedes France, qu'Etienne A... était conscient de ce flux de
trésorerie en provenance du Trésor public dans la mesure
où dans le cadre de ses fonctions d'expert-comptable il
établissait personnellement les attestations mensuelles de crédit
de TVA destinées à la banque qui avançait les fonds
à la SA Z... sous forme de cession de créances ; que
confrontés à ces anomalies comptables, les prévenus les
auraient tenues pour négligeables, qu'ils se seraient abstenus, alors
que l'activité d'exportation de la société Z... dans son
circuit Mercedes vers Car Diffusion représentait 80 % de
l'activité du groupe, de rechercher la marge, de prendre connaissance
des contrats avec Mercedes France, du contrat dit de « compensation «
du paiement des voitures à Mercedes par Car Diffusion, de
procéder à des rapprochements bancaires
élémentaires, sans rechercher, comme elle y était
invitée, si eu égard à l'ensemble des moyens de faussaires
mis en oeuvre, de tels contrôles, à les supposer non
exécutés, auraient permis de déceler la fraude
La responsabilité du commissaire aux
comptes
304
ce que n'avait pas décelé l'administration fiscale
lors des différents contrôles opérés, la cour
d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard
des textes susvisés ; « alors, de quatrième part, qu'en
retenant que le demandeur, en certifiant les comptes, a permis pendant les
exercices visés à la prévention la réalisation de
l'escroquerie, la cour d'appel, qui n'a nullement caractérisé ce
délit, a violé les textes susvisés ; « alors, de
cinquième part, que la complicité d'escroquerie suppose une
intention coupable consistant en une participation volontaire à l'acte
de l'auteur principal en ayant conscience de l'aide apportée à la
réalisation de l'infraction ; qu'en affirmant que le demandeur, en
certifiant les comptes, a permis la réalisation de l'escroquerie, la
cour d'appel, qui n'a nullement caractérisé
l'élément moral de l'infraction, a privé sa
décision de base légale au regard des textes susvisés ;
« alors enfin, que le demandeur faisait valoir l'absence de délit
de non-révélation de faits délictueux, le délit
supposant qu'il ait une connaissance réelle de faits délictueux
et l'absence de révélation fait sciemment ; qu'en se contentant
d'affirmer péremptoirement que l'exposant a omis de
révéler au parquet les faits dont il avait connaissance, sans
nullement caractériser une telle connaissance, les juges du fond ayant
caractérisé la négligence du demandeur, ni sa
volonté d'omettre de révéler de tels faits, la cour
d'appel a violé les textes susvisés « ; Les moyens
étant réunis ; Attendu que, pour déclarer Etienne A... et
Marc Y... coupables de complicité d'escroqueries, l'arrêt retient
que l'examen de la comptabilité de la société Z... a
révélé que l'unique flux de trésorerie consistait
en un remboursement mensuel de TVA de 12 à 15 millions de francs, que
des distorsions existaient dans les mentions du compte du seul fournisseur,
relatives au paiement des achats de véhicules, que les rapprochements
bancaires ne faisaient apparaître ni ces paiements ni le versement de la
TVA et que, compte tenu de l'importance au sein du groupe, qui, depuis 1996, se
trouvait en état virtuel de cessation des paiements, de
l'activité d'exportation de la société Z... et des flux
financiers en provenant, le caractère fictif des comptes et des
déclarations mensuelles de TVA remboursable n'a pu échapper aux
prévenus ; que les juges ajoutent qu'Etienne A... , en
établissant les comptes annuels, les déclarations mensuelles de
chiffre d'affaires taxable et les attestations mensuelles de crédit de
TVA adressées à la banque de la société et Marc
Y..., en certifiant les comptes, ont permis la réalisation des
escroqueries pendant les exercices visés à la prévention ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il
résulte qu'Etienne A... , en attestant de la conformité et de la
sincérité de comptes dont le caractère fictif ne pouvait
lui échapper et Marc Y..., en certifiant en connaissance de cause et sur
plusieurs exercices lesdits comptes, ont sciemment fourni à l'auteur
principal les moyens lui permettant de réitérer l'escroquerie, la
cour d'appel, qui a répondu aux articulations essentielles des
conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision
; D'où il suit que les moyens, le premier proposé pour Marc Y...,
inopérant en sa 6éme branche, en ce qu'il porte sur le
délit de non-révélation de faits délictueux, dont
celui-ci avait été déclaré définitivement
coupable, doivent être écartés ;
Sur le second moyen de cassation, proposé par la
société civile professionnelle Bouzidi et Bouhanna, pour Marc
Y... : (Publication sans intérêt) ; pris de la violation des
articles 121-6,121-7,313-1 du code pénal, L. 225-35, L. 22536, L. 225-37
et L. 225-40 du code de commerce, du décret n° 67-236 du 25 mai
1967,1382 du code civil,591 et 593 du code de procédure pénale,
défaut de motifs et manque de base légale :
» en ce que la cour d'appel a condamné solidairement
le demandeur et Etienne A... à payer à l'Etat français,
partie civile, la somme de 9 037 990,50 euros et ce
La responsabilité du commissaire aux
comptes
305
solidairement avec Alain Z... au terme du jugement du tribunal
correctionnel du 15 mai 2001 ; « aux motifs que sur l'action civile,
l'Etat français, partie civile, a fait déposer des conclusions
tendant à voir condamner Etienne A... et Marc Y... à payer
à l'Etat français conjointement et solidairement avec Alain Z...
la somme de 9 037 990,50 euros, soit 592 853 328 francs à titre de
dommages et intérêts ; qu'au vu des motifs qui
précèdent, la partie civile sera déclarée recevable
et bien fondée en son action ; que les premiers juges ont fait une juste
application de son préjudice ; « alors, d'une part, qu'en se
contentant de viser les conclusions de l'Etat français, partie civile,
puis de décider qu'au vu des motifs qui précèdent la
partie civile sera déclarée recevable et bien fondée en
son action, que les premiers juges ont fait une juste application de son
préjudice puis, réformant le jugement, la cour d'appel, qui
décide de condamner le demandeur solidairement à payer une somme
de 9 37 990,50 euros, a privé sa décision de tous motifs et
violé les textes susvisés ; « alors, d'autre part, qu'en se
contentant de viser les conclusions de l'Etat français puis en
décidant qu'au vu des motifs qui précèdent la partie
civile sera déclarée recevable et bien fondée en son
action, que les premiers juges ont fait une juste application de son
préjudice, la cour d'appel, qui décide, réformant les
jugements entrepris, de condamner le demandeur avec Etienne A... à payer
à l'Etat Français la somme de 9 037 990,50 euros solidairement
avec Alain Z..., sans donner aucun motif justifiant la condamnation des
exposants à réparer le préjudice subi par l'Etat
Français, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
« alors de troisième part qu'en se contentant de viser les
conclusions de l'Etat Français puis en décidant qu'au vu des
motifs qui précèdent la partie civile sera déclarée
recevable et bien fondée en son action, que les premiers juges ont fait
une juste application de son préjudice, la cour d'appel, qui
décide, réformant les jugements entrepris, de condamner
l'exposant avec Etienne A... à payer à l'Etat français la
somme de 9 037 990,50 euros solidairement avec Alain Z..., sans relever aucun
rapport causal entre les faits imputés à l'exposant et le
préjudice retenu par les premiers juges à l'encontre d'autres
prévenus, a violé les textes susvisés ; « alors
enfin, que le demandeur contestait tout rôle causal dans le
préjudice allégué par l'Etat français, invitant la
cour d'appel à constater les carences de l'administration fiscale qui
non seulement n'a rien décelé lors des différents
contrôles fiscaux opérés mais, en 1999, a continué
à rembourser de la TVA au groupe Z... ; qu'en ne statuant pas sur ce
moyen, la cour d'appel, qui n'a opéré aucune recherche sur le
rôle causal de l'Etat français dans la production de son propre
dommage, a violé les textes susvisés « ;
Attendu que, pour condamner Marc Y... à verser des
dommages-intérêts à l'Etat, partie civile, solidairement
avec Etienne A... et Alain Z..., l'arrêt prononce par les motifs
reproduits au moyen ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel, qui n'a fait
qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des
conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le
dommage né de l'infraction, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis
;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme
;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 1 000 euros la somme que Marc Y... et Etienne A...
devront payer chacun à l'Etat, au titre de l'article 618-1 du code de
procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
criminelle, et prononcé par le président le trente et un janvier
deux mille sept ; En foi de quoi le présent arrêt a
été signé par le président, le rapporteur et le
greffier de chambre ;
Publication : Bulletin criminel 2007 N° 25
p. 84
306
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris du 20 septembre 2005
Titrages et résumés : COMPLICITE
- Eléments constitutifs - Aide ou assistance - Définition -
Escroquerie
Justifie sa décision, la cour d'appel qui, pour
déclarer un expert-comptable et un commissaire aux comptes coupables de
complicité d'escroqueries commises par un dirigeant de
société, après avoir constaté que le premier a
attesté la conformité et la sincérité de comptes
dont le caractère fictif ne pouvait lui échapper, et que le
second a certifié ces comptes en toute connaissance de cause durant
plusieurs exercices, énonce qu'ils ont sciemment fourni à
l'auteur principal les moyens lui permettant de réitérer
l'escroquerie commise en matière de TVA (arrêt n° 1) et de
commettre les escroqueries relatives à l'obtention d'ouvertures de
crédits (arrêt n° 2)
IMPOTS ET TAXES - Taxe sur la valeur ajoutée -
Escroquerie au préjudice du Trésor public - Expert-comptable -
Complicité - Cas
ESCROQUERIE - Escroquerie au Trésor public - Taxe sur la
valeur ajoutée - Expert-comptable - Complicité - Cas
IMPOTS ET TAXES - Taxe sur la valeur ajoutée -
Escroquerie au préjudice du Trésor public - Commissaire aux
comptes - Complicité - Cas
ESCROQUERIE - Escroquerie au Trésor public - Taxe sur la
valeur ajoutée - Commissaire aux comptes - Complicité - Cas
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
307
Annexe 21
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 25 Février 2004
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 25 février 2004
N° de pourvoi: 03-81173
Publié au bulletin
Cassation
M. Cotte, président
M. Rognon, conseiller apporteur
M. Finielz, avocat général
Me Foussard, la SCP Bouzidi et Bouhanna, la SCP Peignot et
Garreau., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS AU NOM DU PEUPLE
FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience
publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq
février deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :
La responsabilité du commissaire aux
comptes
308
Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de
Me X..., de la société civile professionnelle BOUZIDI et BOUHANNA
et de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU,
avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général
FINIELZ ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL D'AMIENS,
- L'ADMINISTRATION DES IMPOTS, partie civile,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre
correctionnelle, en date du 21 janvier 2003, qui a débouté la
partie civile de ses demandes après relaxe de Marc Y... et Etienne Z...
du chef de complicité d'escroquerie ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande, en défense et
en réplique ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé par
l'administration des Impôts, contestée en défense :
Attendu qu'il résulte des pièces produites que la
déclaration de pourvoi formalisée le 27 janvier 2003 au greffe de
la cour d'appel d'Amiens, par la direction des services fiscaux de la Somme, a
été signée par l'inspecteur principal Luc A..., en
fonction dans cette direction et habilité par elle à suivre les
actions relatives à l'impôt ;
Que le pourvoi est recevable ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué
qu'Alain B..., dirigeant un groupe de sociétés d'achats et ventes
de véhicules automobiles, a organisé un circuit de ventes
fictives à l'exportation et obtenu du Trésor public, de 1996
à novembre 1999, le paiement d'une somme de 572 millions de francs, en
remboursement de taxes jamais décaissées, en produisant des
déclarations mensuelles de chiffre d'affaires, appuyées de
documents contrefaits ou falsifiés, comptabilisant des crédits
fictifs de TVA ;
Attendu que Marc Y... et Etienne Z..., respectivement
commissaire aux comptes et expert-comptable des sociétés, sont
poursuivis pour complicité des délits
La responsabilité du commissaire aux
comptes
309
d'escroquerie dont Alain B... a été
définitivement reconnu coupable ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation du procureur
général près la cour d'appel d'Amiens, pris de la
violation des articles 121-6, 121-7, 313-1 du Code pénal et 593 du Code
de procédure pénale ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé par Me X...,
pris de la violation des articles 121-6, 121-7 et 313-1 du Code pénal,
des articles L. 225-35, L. 225-36, L. 225-37 et L. 225-40 du Code de commerce,
du décret n° 67-236 du 25 mai 1967, ensemble les articles 591 et
593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs ;
»en ce que l'arrêt attaqué a relaxé
Marc Y..., commissaire aux comptes, du chef de complicité d'escroquerie
et rejeté les demandes formées par l'Etat ;
»aux motifs que «Marc Y... assumait le mandat de
commissaire aux comptes de la SA B... depuis sa création ; que, chaque
année, sa rémunération s'est élevée, entre
1996 et 1999, à une somme d'environ 86 à 89 000 francs ; que,
comme il possédait d'autres mandats dans le groupe, il percevait
globalement une rémunération annuelle de 220 000 francs ; que
Marc Y... confiait à trois ses collaborateurs, pendant 10 à 15
jours par an, l'exercice concret de sa mission ; que la mission principale du
commissaire aux comptes consiste à vérifier les comptes de
l'exercice tels qu'ils ont été arrêtés par les
dirigeants et tels qu'ils seront soumis à l'approbation de
l'assemblée générale des actionnaires ; qu'il doit
certifier que les comptes annuels sont essentiellement réguliers et
sincères et donnent une image fidèle du résultat des
opérations de l'exerce écoulé ; qu'il doit donc
contrôler les principaux documents comptables dressés par les
dirigeants, notamment le bilan, le compte de résultats et leurs annexes
; que la régularité et la conformité aux lois en
général, et aux prescriptions réglementaires applicables
à la comptabilité et à la sincérité consiste
à préciser les règles qui ont été suivies
dans l'établissement des documents comptables en attirant l'attention
sur les résultats lorsqu'ils sont inhabituels ; que, comme Etienne Z...,
l'attention de Marc Y... a été amoindrie par l'environnement
comptable du groupe B... , très structuré, de 12 à 15
salariés selon les époques ; qu'il existait un directeur
financier et la présence d'un expert-comptable, dans lequel il avait
toute confiance, était un élément supplémentaire de
nature à le rassurer ; que Marc Y... avait fait procéder au
contrôle de l'activité export par une analyse des factures
Mercedes et des factures vers l'acquéreur Car Diffusion ; que toutes les
factures Mercedes et Car Diffusion ont été
contrôlées pour établir une balance par comparaison de
numéros de châssis de chaque véhicule ; qu'il a
adressé des mises en demeure écrites à Alain B... , par
exemple le 15 décembre 1997 et le 18 mai 1998, mais s'est
contenté de la réponse d'Alain B... qui, comme justificatif, lui
fournissait un faux fax établi par lui-même ; que les experts Van
Den C... et D... ont eux-mêmes noté qu'en l'absence d'une
procédure de confirmation directe, les contrôles de substitution
qui auraient porté sur des pièces falsifiées auraient
été
La responsabilité du commissaire aux
comptes
310
inopérants ; qu'il faut reconnaître que les
indicateurs naturels de l'escroquerie n'ont pas fonctionné, puisque le
service comptable de la SA B... n'a rien révélé, ni le
directeur financier, alors que des formulaires vierges des fausses factures
Mercedes ont été retrouvés stockés au service
comptable ; que l'expert-comptable n'a exprimé aucun de ses doutes
auprès du commissaire aux comptes, alors qu'il avait voulu circulariser,
ce à quoi Alain B... s'était opposé ;
que l'administration fiscale, qui dispose de moyens beaucoup
plus considérables d'investigation, n'a rien décelé au
cours de deux contrôles fiscaux ; que Marc Y... est justifié
d'écrire que l'escroquerie était en réalité
indécelable, car les schémas comparables habituels, en raison des
moyens de faussaire mis en oeuvre par Alain B... comme le faux papier à
en-tête, les fausses factures, les fausses correspondances et les faux
fax ; que Marc Y... s'est trouvé ainsi dans l'impossibilité de
déceler le passage des vraies factures jusqu'en 1993 aux fausses
factures à partir de cette dernière date ; que la
complicité suppose un acte positif par fourniture de moyen par aide ou
assistance, et elle ne peut exister que si aide ou assistance ont
été antérieures ou concomitantes du délit principal
; que, cependant, rien ne démontre dans le dossier que Marc Y... ait
participé à la préparation ou à l'exécution
du délit d'escroquerie alors que la seule négligence ne saurait
caractériser l'élément matériel du délit de
complicité d'escroquerie ;
quant à l'élément moral, il ne peut
s'assimiler à une simple négligence ou à un contrôle
insuffisant qui n'est pas une participation active et intentionnelle à
la commission de l'infraction, seul mode pour pouvoir retenir un prévenu
dans les liens de la prévention, qui n'est pas le cas de Marc Y... en
l'espèce» (arrêt pages 10 et 11)»
;
»alors que, premièrement, le commissaire aux comptes
se rend coupable de complicité d'escroquerie lorsque, ayant connaissance
des faits révélateurs du délit d'escroquerie, il
s'abstient, en connaissance de cause, de satisfaire à ses obligations
professionnelles, et notamment à son obligation de certifier les comptes
et de procéder à toutes les vérifications qu'exige la
situation, donnant ainsi l'assurance à l'auteur principal du
délit de pouvoir le commettre sans être inquiété ;
qu'en l'espèce, les juges du second degré ont retenu que Marc
Y... avait connaissance des escroqueries ; qu'il avait néanmoins
certifié les comptes de la société et permis à
celle-ci de continuer son activité, bien que le remboursement indu de
TVA ait causé des dommages considérables à l'Etat
(arrêt, page 12 4 et 5) ; qu'en s'abstenant de retenir une
complicité d'escroquerie, en l'état de ces énonciations
qui établissaient que le commissaire aux comptes s'était
volontairement abstenu de satisfaire aux obligations qui lui incombaient,
permettant ainsi à l'auteur de l'escroquerie de poursuivre ses
agissements frauduleux, les juges du fond ont violé les textes
susvisés ;
»et alors que, deuxièmement, les juges du fond ont
encore constaté que Marc Y... ayant connaissance des escroqueries, il
s'était abstenu de les révéler au procureur
La responsabilité du commissaire aux
comptes
311
de la République comme il aurait dû le faire, et
que cette abstention avait permis à l'auteur de la fraude de poursuivre
ses activités frauduleuses (arrêt, page 12 4 et 5) ; qu'en
refusant de retenir une complicité d'escroquerie, en l'état de
ces énonciations, les juges du font ont de nouveau violé les
textes susvisés» ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les
motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la
contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour renvoyer Marc Y..., commissaire aux comptes,
des fins de la poursuite du chef de complicité d'escroqueries,
l'arrêt attaqué énonce, notamment, que la
complicité, supposant un acte positif par fourniture de moyens ou par
aide ou assistance, ne peut exister que si l'aide ou l'assistance ont
été antérieure ou concomitante au délit principal
et que rien ne démontre que le prévenu ait participé
à la préparation ou à l'exécution du délit
d'escroquerie ; que les juges ajoutent que la seule négligence ne
saurait caractériser l'élément matériel du
délit de complicité d'escroquerie ; qu'ils retiennent enfin que
l'élément moral ne peut être assimilé à une
simple négligence ou à un contrôle insuffisant qui n'est
pas une participation active et intentionnelle à la commission de
l'infraction ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle
retenait que Marc Y..., déclaré coupable de
non-révélation de faits délictueux au procureur de la
République, avait connaissance des escroqueries commises par Alain B...
et qu'elle relevait que les certifications réitérées des
comptes avaient permis la poursuite des activités de la
société au préjudice de l'Etat, appelé à
rembourser chaque mois le montant de la TVA, la cour d'appel n'a pas
tiré les conséquences légales de ses propres constatations
;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Sur le second moyen de cassation du procureur
général près la cour d'appel d'Amiens, pris de la
violation des articles 121-6, 121-7, 313-1 du Code pénal et 593 du Code
de procédure pénale ;
Sur le second moyen de cassation, proposé par Me X...,
pris de la violation des articles 121-6, 121-7 et 313-1 du Code pénal,
de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, ensemble les articles 591
et 593 du Code de procédure pénale, 2 de l'ordonnance n°
45-2138 du 19 septembre 1945, défaut de motifs ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
312
»en ce que l'arrêt attaqué a relaxé du
chef de complicité d'escroquerie Etienne Z..., expert-comptable, et
rejeté les demandes formées par l'Etat ;
»aux motifs que «Etienne Z... ne disposait d'aucune
lettre de mission concernant les sociétés dans lesquelles il
intervenait ; qu'expert-comptable depuis 1987, il dirigeait depuis 1988 la SECS
qui employait 17 collaborateurs et il était présent à la
société B... un jour par semaine, qui était sa cliente
depuis 1986, le groupe B... représentant 20 % du chiffre d'affaires de
son cabinet ; qu'en 1999, il avait sollicité un montant d'honoraires de
235 000 francs pour la SA B... et un total de près de 1 500 000 francs
pour le groupe ; que sa mission de présentation des comptes annuels
devait comporter diverses diligences ayant pour objectif de lui permettre de
rédiger une attestation indiquant qu'il n'a pas relevé
d'éléments mettant en cause la cohérence et la
vraisemblance des comptes annuels ; que le contrôle de la
cohérence devait porter sur le rapprochement formel des documents et
informations entre eux et la vraisemblance sur la qualité de
l'information produite par le rapport à la connaissance de l'entreprise
et de son environnement ; qu'en l'espèce, Etienne Z... ne s'est jamais
étonné de l'existence dans la comptabilité de la SA B...
d'un compte fournisseur Mercedes, alors que cette société
n'était pas concessionnaire Mercedes ; qu'il n'a donc jamais
demandé la copie du contrat de concession qui n'existait pas, ne
serait-ce que pour vérifier les conditions qui auraient pu y figurer
;
qu'il admettait, cependant, que ce document aurait dû
être dans son dossier ; qu'il a pu expliquer aux enquêteurs :
«j'ai fait ce que j'ai pu en fonction des informations que j'avais, ma
mission a été remplie, sauf pour l'export, car je n'avais pas les
documents pour ce faire ; je les ai réclamés, je ne les ai pas
obtenus, ce qui m'embêtait ; en fait, c'était les comptes
périphériques, les comptes clients Mercedes et Car Diffusion, car
il y avait des refacturations» ; qu'il est ainsi établi qu'Etienne
Z... s'est montré peu diligent et a accompli sa mission avec de
très nombreuses carences ; que, cependant, il convient de remarquer
qu'un premier contrôle fiscal d'octobre 1993 à mai 1994 a
crédibilisé la cohérence du système mis en place
par Alain B... , puisqu'aucune objection n'a été faite à
l'égard des paiements par compensation qui pouvaient paraître
très surprenants dans une telle configuration ; que le centre des
Impôts de Peronne, qui remboursait la TVA tous les mois, s'est satisfait
des réponses d'Alain B... , et une seconde vérification fiscale
du 14 octobre 1998 au 3 novembre 1999, portant sur les années 1995
à 1999, s'est conclue par une lettre du vérificateur du 3
novembre 1999 à Alain B... , rédigée de la manière
suivante : «la vérification comptable pour 1998 n'a donné
lieu à aucun redressement ; il m'est agréable de vous en faire
part» ; que l'absence de suite de ces contrôles fiscaux a endormi de
manière supplémentaire l'attention d'Etienne Z... qui s'est
contenté de vivre sur ses errements habituels et d'accepter les
réponses évasives de M. B... ; que le dossier n'a pu mettre en
évidence aucun acte matériel préalable et concomitant
à l'escroquerie commise par Alain B... , alors que rien n'indique
qu'Etienne Z... avait connaissance du mécanisme de la fraude ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
313
qu'il convient d'ajouter un élément d'ordre
économique : Alain B... était à la tête du plus
grand groupe économique de la région de Peronne, il faisait vivre
640 salariés et il faisait valoir lui-même que certaines des
opérations à l'exportation, qui rapportaient 80 % du chiffre
d'affaires de la société, étaient couvertes par un certain
secret commercial des tractations qui devait perdurer pour ne pas faire capoter
certains marchés particulièrement juteux ; qu'Etienne Z..., dans
sa grande candeur, s'est contenté de cette explication sans chercher
à aller plus loin pour des raisons précitées, puisque tout
acteur économique est nécessairement obsédé par le
risque de licenciement de personnel si les marchés commerciaux ne sont
pas maintenus au même étiage ; que, dans ces conditions, en
l'absence d'éléments caractérisés de la
complicité du délit d'escroquerie, la relaxe d'Etienne Z... qui a
été prononcée en première instance devra être
confirmée» (arrêt, page 8, dernier , et page 9) ;
»alors que, premièrement, les juges du fond
relèvent qu'Etienne Z..., en tant qu'expert-comptable, ne s'est jamais
étonné de l'existence dans la comptabilité de la SA B...
d'un compte fournisseur Mercedes alors que cette société
n'était pas concessionnaire Mercedes, et qu'il n'a jamais demandé
la copie du contrat de concession (qui n'existait pas) pour s'assurer des
stipulations de ce contrat ; qu'ils relèvent encore qu'Etienne Z...
s'est montré peu diligent et a accompli sa mission avec de très
nombreuses carences ; qu'ils observent également qu'il s'est
contenté de vivre sur ses errements habituels et d'accepter les
réponses évasives d'Alain B... ; qu'en s'abstenant de rechercher,
eu égard à ces constatations, si, s'abstenant de satisfaire aux
obligations qui étaient les siennes, Etienne Z... n'avait pas fourni une
aide ou une assistance à l'auteur principal, les juges du fond ont
privé leur décision de base légale au regard des textes
susvisés ;
»alors que, deuxièmement, en admettant même que
l'abstention d'Etienne Z... n'ait pu être regardée comme
préalable aux escroqueries commises au cours de l'exercice qui faisait
l'objet de ses travaux, les juges du fond auraient dû rechercher, en tout
état de cause, si cette abstention ne permettait pas à l'auteur
principal de poursuivre ses agissements, au cours de l'exercice
ultérieur, et si elle ne pouvait être retenue comme étant
antérieure aux infractions projetées pour avoir fourni à
l'auteur principal l'assurance de pouvoir les commettre sans être
inquiété ; qu'à cet égard également,
l'arrêt attaqué est entaché d'une décision de base
légale ;
»alors que, troisièmement, si l'existence ou
l'absence d'intention fait l'objet d'une appréciation souveraine, c'est
à la condition que les motifs qui constatent l'intention ou l'absence
d'intention soient exempts d'erreur de droit, de contradiction ou
d'insuffisance ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont relevé que
l'activité d'export était pour le groupe stratégique (page
5, 5), qu'elle aurait dû retenir toute l'attention de l'expert-comptable
et qu'n soin tout particulier aurait dû être apporté aux
opérations mensuelles de compensation (page 5, 5) ; qu'ils observent
encore qu'Etienne Z... a fermé les yeux sur l'existence dans la
comptabilité d'un compte fournisseur Mercedes alors que la
société B... n'est pas concessionnaire Mercedes, et que
l'expert-comptable n'a jamais demandé la copie du contrat de concession
(page 9, 1er) ; qu'il a cependant établi des attestations pour les
années 1996 et 1997 sans aucune réserve et n'a pas
hésité à noter sur l'attestation en 1998 et 1999 que
La responsabilité du commissaire aux
comptes
314
les stocks et l'activité export n'avaient pas fait
l'objet de contrôle particulier de sa part (page 5, 5) ; qu'en
s'abstenant de rechercher si ces différents éléments,
rapprochés les uns des autres, n'étaient pas de nature à
caractériser la conscience d'Etienne Z... de l'existence d'un
mécanisme frauduleux révélateur d'une escroquerie, les
juges du fond ont entaché leur décision d'une insuffisance de
motifs ;
»et alors que, quatrièmement, faute d'avoir
indiqué pour quelles raisons l'expert-comptable pouvait ne pas avoir
conscience des faits délictueux qui étaient
perpétrés au sein de l'entreprise, après avoir retenu que
le commissaire aux comptes avait connaissance de ces escroqueries, les juges du
fond, qui ne se sont pas suffisamment expliqués, ont de nouveau
entaché leur décision d'une insuffisance de motifs» ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les
motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance des
motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour renvoyer Etienne Z..., expert-comptable, des
fins de la poursuite du chef de complicité d'escroquerie, l'arrêt
attaqué énonce, notamment, que la procédure n'a mis en
évidence aucun acte matériel préalable et concomitant
à l'escroquerie commise et que rien n'indique qu'Etienne Z... avait
connaissance du mécanisme de la fraude ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher si,
en établissant les comptes annuels et les déclarations mensuelles
du chiffre d'affaires taxable, dont la fictivité ne pouvait
échapper à un professionnel de la comptabilité, et en
attestant pourtant leur conformité et leur sincérité, le
prévenu n'avait pas sciemment permis à l'auteur principal de
commettre et réitérer, chaque mois, les escroqueries commises au
préjudice du Trésor public, la cour d'appel n'a pas
justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt
susvisé de la cour d'appel d'Amiens, en date du 21 janvier 2003, et pour
qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la
loi,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
315
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris,
à ce désignée par délibération
spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa
transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens et sa
mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation,
chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus
;
Etaient présents aux débats et au
délibéré : M. Cotte président, M. Rognon conseiller
rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Dulin, Mmes Thin, Desgrange, M.
Chanut conseillers de la chambre, Mme de la Lance, MM. Soulard, Samuel, Mme
Salmeron conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Finielz ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été
signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre
;
Publication : Bulletin criminel 2004 N° 53
p. 207
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Amiens, du 21 janvier 2003
Titrages et résumés : 1°
COMPLICITE - Eléments constitutifs - Aide ou assistance -
Définition - Escroquerie.
1° Encourt la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui
relaxe un commissaire aux comptes du chef de complicité d'escroqueries
à la TVA après avoir retenu que le prévenu avait
connaissance des faits délictueux commis par l'auteur principal et
relevé que les certifications réitérées de comptes
annuels fictifs en avaient permis la continuation.
1° IMPOTS ET TAXES - Taxe sur la valeur ajoutée -
Escroquerie au préjudice du Trésor public - Commissaire aux
comptes - Complicité - Cas 1° ESCROQUERIE - Escroquerie au
Trésor public - Taxe sur la valeur ajoutée - Commissaire aux
comptes - Complicité - Cas 2° COMPLICITE - Eléments
constitutifs - Aide ou assistance - Définition - Escroquerie.
316
2° Ne justifie pas sa décision la cour d'appel qui
renvoie des fins de la poursuite, du chef de complicité d'escroqueries
à la TVA, un expert-comptable qui a établi et attesté la
sincérité de comptes annuels et de déclarations de chiffre
d'affaires dont il ne pouvait ignorer la fictivité, sans rechercher si
le prévenu n'avait pas ainsi permis la réitération de
l'infraction, commise, chaque mois, au préjudice du Trésor public
(1).
2° IMPOTS ET TAXES - Taxe sur la valeur ajoutée -
Escroquerie au préjudice du Trésor public - Expert-comptable -
Complicité - Cas 2° ESCROQUERIE -
Escroquerie au Trésor public - Taxe sur la valeur
ajoutée - Expert-comptable - Complicité - Cas
Précédents jurisprudentiels :
CONFER : (2°). (2) A rapprocher : Chambre criminelle, 1979-01-15,
Bulletin criminel 1979, n° 21 (1), p. 63 (rejet).
Textes appliqués :
· 2° :
· Code pénal 121-6, 121-7, 313-1
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
317
Annexe 21
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 25 Février 2009
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 25 février
2009
N° de pourvoi: 08-80314
Non publié au bulletin
Cassation partielle
M. Pelletier (président),
président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Nicolaý, de
Lanouvelle, Hannotin, SCP Piwnica et Molinié, SCP Thouin-Palat et
Boucard, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt
suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- A... André,
- A... René,
- A... René-Louis,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour
d'appel de VERSAILLES, en date du 22 novembre 2000, qui, dans l'information
suivie contre eux des chefs
La responsabilité du commissaire aux
comptes
318
d'abus de biens sociaux, escroqueries, faux et usage, passation
d'écritures fictives en comptabilité, a prononcé sur leur
requête en annulation de pièces de la procédure ;
- A... André,
- A... René,
- A... René-Louis,
- X... Marcelle, épouse Y...,
- LA SOCIÉTÉ FINANCIÈRE Z..., partie
civile,
contre l'arrêt de la même cour d'appel, 9e chambre,
en date du 11 octobre 2007, qui a condamné, pour abus de biens sociaux,
escroqueries et faux et usage, le premier à dix-huit mois
d'emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d'amende, le deuxième
à douze mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, le
troisième à quinze mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000
euros d'amende et, pour complicité d'abus de biens sociaux, la
quatrième à trois mois d'emprisonnement avec sursis, 2 000 euros
d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience
publique du 28 janvier 2009 où étaient présents : M.
Pelletier président, Mme Canivet-Beuzit conseiller rapporteur, M. Dulin,
Mme Desgrange, M. Rognon, Mmes Nocquet, Ract-Madoux, M. Bayet conseillers de la
chambre, Mmes Slove, Labrousse conseillers référendaires ; Avocat
général : M. Davenas ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
Sur le rapport de Mme le conseiller CANIVET-BEUZIT, les
observations de la société civile professionnelle BORÉ et
SALVE de BRUNETON, de la société civile professionnelle PIWNICA
et MOLINIÉ, de la société civile professionnelle
THOUIN-PALAT et BOUCARD, et de la société civile professionnelle
NICOLAY, de LANOUVELLE et HANNOTIN, avocats en la Cour, et les conclusions de
M. l'avocat général DAVENAS ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense
;
I-Sur le pourvoi contre l'arrêt du 22 novembre 2000 :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des
articles 80, 81, 86, 152, 591 et 593 du code de procédure pénale
;
» en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir
lieu à nullité d'actes ou de pièces de la procédure
;
» aux motifs que, si le réquisitoire introductif du
31 août 1994 visait les délits d'escroquerie, faux en
écriture de commerce et usage, et présentation de faux bilan, il
n'en demeure pas moins que le juge d'instruction est saisi in rem et peut
qualifier librement les faits dont il est saisi par la plainte avec
constitution de partie civile ou par réquisitoire, les inculpations en
cours d'information étant d'ailleurs purement indicatives ; que la
commission rogatoire ayant visé les délits d'escroquerie,
complicité, abus de biens sociaux, complicité, faux et usage de
faux, complicité, abus de confiance et complicité, vols, recels
et falsification de chèques, infraction à la législation
sur la facturation, n'est affectée d'aucune irrégularité ;
qu'il y a lieu de rejeter la demande en annulation de ce chef ;
» alors que les pouvoirs accordés au juge
d'instruction par l'article 81 du code de procédure pénale sont
limités aux seuls faits dont il est régulièrement saisi
en
La responsabilité du commissaire aux
comptes
319
application des articles 80 et 86 du code de procédure
pénale ; qu'en retenant que les qualifications d'escroquerie, de faux et
d'usage en écriture de commerce et de présentation de faux bilan
retenues par le réquisitoire introductif étaient simplement
indicatives pour en déduire que la commission rogatoire visant plus
largement les délits d'escroquerie, complicité, abus de biens
sociaux, complicité, faux et usage de faux, complicité, abus de
confiance, complicité, vols, recel et falsification de chèques et
infraction à la législation sur la facturation était
régulière, la chambre d'accusation, qui s'est abstenue de
rechercher si ces qualifications juridiques n'impliquaient pas une extension de
la saisine du juge d'instruction au delà des faits visés au
réquisitoire, n'a pas légalement justifié sa
décision « ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de la
commission rogatoire du 17 novembre 1994, l'arrêt prononce par les motifs
repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations,
d'où il se déduit que le juge d'instruction n'a pas
excédé sa saisine, la chambre d'accusation a justifié sa
décision ;
Qu'ainsi le moyen ne peut être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des
articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 104, 105,
591 et 593 du code de procédure pénale ;
» en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir
lieu à nullité d'actes ou de pièces de la procédure
;
» aux motifs qu'aux termes de l'article 105 du code de
procédure pénale, les personnes à l'encontre desquelles il
existe des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits,
dont le juge d'instruction est saisi, ne peuvent être entendues comme
témoins ; que, lorsque André A..., René A... et
René Louis A... ont été entendus par les services de
police en qualité de témoins, ne figuraient alors en
procédure que le rapport SF... versé par la partie civile, qui,
aux dires mêmes de la défense, n'avait aucun caractère
probant, ainsi que des auditions de témoins, s'agissant pour certains de
salariés de la société, qui n'ont fait que des
dépositions partielles, parfois fondées sur des rumeurs, et en
tous cas dont le contenu nécessitait pour le moins l'audition des
personnes qui étaient mises en cause par la partie civile ; qu'ainsi,
avant l'audition de ces personnes, le magistrat instructeur ne pouvait pas
considérer qu'il existait à leur encontre des indices graves et
concordants rendant de ce fait impossibles leurs auditions en tant que
témoins ; que les auditions de René, André et
René-Louis A... ont dès lors été faites
régulièrement et sans qu'aient été violées
les dispositions de l'article 105 du code de procédure pénale ;
qu'il y a donc lieu de rejeter la demande en annulation de ce chef ;
» 1°) alors que, aux termes de l'article 105 du code de
procédure pénale, les personnes à l'encontre desquelles il
existe des indices graves et concordants d'avoir participé aux faits
dont le juge d'instruction est saisi ne peuvent être entendues comme
témoins ; qu'en l'espèce, la plainte avec constitution de partie
civile imputait aux consorts A... des faits d'escroquerie, de faux et d'usage
de faux, et de présentation de faux, et la mise en examen de ces
derniers n'est intervenue qu'après qu'un expert-comptable et des
employés des deux sociétés eussent été
entendus de manière circonstanciée ; que la chambre d'accusation,
qui s'est bornée à considérer que les consorts A...
devaient être entendus sur le contenu des auditions avant qu'il ne soit
procédé à leur mise en examen pour décider qu'il
n'existait pas à leur encontre des indices et concordants, a
violé les articles visés au moyen ;
» 2°) alors que, dans le réquisitoire aux fins
de renvoi, le parquet a relevé que les infractions imputées aux
consorts A... résultaient, notamment, des nombreuses auditions des
salariés de la société qui « attestaient notamment
des abus de biens
La responsabilité du commissaire aux
comptes
320
sociaux et de la sur ou fausse facturation » et de
l'audition d'employés du service de la comptabilité qui «
reconnaissaient le non-enregistrement de certaines factures », ce dont il
résultait que lesdites auditions, intervenues antérieurement
à la mise en examen des consorts A..., démontraient que des
indices graves et concordants préexistaient ; que la chambre
d'accusation qui retient quant à elle que leur mise en examen ne
s'imposait pas avant leur audition, a privé sa décision de base
légale ; » 3°) alors que les personnes visées
nommément par le réquisitoire du procureur de la
République ne peuvent être entendues comme témoins ; que
commet un détournement de pouvoir le procureur qui, pour éluder
les prescriptions protectrices de l'article 105 du code de procédure
pénale, ouvre une information judiciaire contre personne non
dénommée sur la base d'une plainte avec constitution de partie
civile imputant aux consorts A... des faits d'escroquerie, de faux et d'usage
de faux, et de présentation de faux bilan ; qu'il n'existait à ce
stade aucune ambiguïté sur les prétendus auteurs de ces
faits ; qu'en ne restituant pas au réquisitoire introductif sa
véritable nature et en n'en tirant pas les conséquences qui s'en
évinçaient, la chambre d'accusation a violé les articles
visés au moyen « ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation d'actes de la
procédure en raison de la mise en examen tardive d'André,
René et René-Louis A..., l'arrêt prononce par les motifs
repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que le magistrat
instructeur a la faculté de ne mettre en examen une personne
déterminée qu'après s'être éclairé,
notamment en faisant procéder, en qualité de témoin,
à son audition sur sa participation aux agissements incriminés
dans des conditions pouvant engager sa responsabilité pénale, la
chambre d'accusation a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, nouveau en sa troisième
branche et comme tel irrecevable, ne saurait être accueilli ;
II-Sur les pourvois contre l'arrêt du 11 octobre 2007 :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et
des pièces de procédure, qu'André A..., René A...
et René-Louis A... ont, le 28 novembre 1991, cédé à
Claude Z..., auquel s'est substituée la société
Financière Z..., les actions qu'ils détenaient dans les
sociétés Mettetal Saint Germain accessoires (MSGA) et Martin
& compagnie approvisionnement automobile (Martin) ; que celles-ci ont
été mises en redressement judiciaire le 3 novembre 1992, puis en
liquidation judiciaire le 19 octobre 1993 ; que les acquéreurs, estimant
avoir été trompés sur la valeur des titres, ont
porté plainte et se sont constitués parties civiles des chefs
d'escroqueries, faux, usage et présentation de comptes annuels
infidèles ; qu'à l'issue de l'information, André,
René et René-Louis A..., dirigeants des sociétés
MSGA et Martin, ont été renvoyés devant le tribunal
correctionnel des chefs, notamment, d'abus de biens sociaux, escroqueries, faux
et usage, Marcelle Y..., expert-comptable de ces sociétés, des
chefs de complicité de ces infractions, Joëlle B..., comptable
salariée, des chefs, notamment, de complicité d'abus de biens
sociaux et d'escroqueries, d'usage de faux et recel et Bernard AA...,
commissaire aux comptes, du chef de non-révélation de faits
délictueux ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation proposé par la
société civile profesionnelle Boré et Salve de Bruneton
pour Marcelle X..., épouse Y..., pris de la violation des articles 437,
463 et 464 de la loi du 24 juillet 1966, 2 de l'ordonnance du 19 septembre
1945, 59 et 60 de l'ancien code pénal, 591 et 593 du code de
procédure pénale et 6 de la Convention européenne des
droits de l'homme ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
321
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré Marcelle Y... coupable de complicité d'abus de
biens sociaux et l'a condamnée à une peine de trois mois
d'emprisonnement avec sursis et à une amende délictuelle de 2 000
euros ;
» aux motifs que Marcelle Y... sera suivie dans la
présentation de ses obligations légales et conventionnelles ;
qu'il reste néanmoins à confronter ces obligations à la
réalité de ce qu'elle a connu des faits et malversations
existantes, d'une part, à l'antériorité de l'un de ses
devoirs par rapport à chaque abus commis, d'autre part ; que, sur la
réalité de la connaissance des faits et malversation, Joëlle
C..., épouse B..., l'a clairement mise en cause :
- Marcelle Y... « tiquait » souvent sur des factures et
savait qu'un certain nombre ne servait qu'à justifier des sorties de
caisse, des chèques des consorts A... et l'existence des factures
manuscrites de René A... qu'elle savait fausses ; que toutes les
dépenses, même importantes et personnelles, des consorts A...,
étaient enregistrées sur le compte 607 Achat de marchandises,
méthode qui déplaisait à Joëlle C... et Marcelle Y...
; qu'elles ont préféré se taire devant l'insistance
d'André A... ;
- Le compte spécial « fournisseurs » au nom de
D... et le compte « fournisseur divers » où figurait E...,
salarié connu de Marcelle Y... n'ont pas manqué d'attirer
l'attention de l'expert-comptable ;
- Joëlle C... a signalé que certains comptes, (Brandt
notamment) retenaient
l'attention de Marcelle Y..., car il s'agissait d'un gros
fournisseur dont le compte était difficile à pointer et les
règlements effectués de façon échelonnées ;
que les voitures et motos étaient passées en charges et Marcelle
Y... n'était pas d'accord avec ce type d'achats et « craignait que
quelqu'un s'en aperçoive » ; que les factures de ventes de
matériels pour l'étranger et notamment l'Afrique jusqu'au 3
août 1992 ont totalisé 5 415 838 francs et 15 334 livres Sterling
; que les frères A... et René A... étaient visés
par la dénomination, la gestion, la direction des sociétés
Fulcam et 3G ; qu'aucun contrôle, pourtant minimum, n'a été
fait sur l'existence ou le défaut d'approbation de convention entre
l'une ou l'autre des deux sociétés avec les
sociétés africaines ; que pourtant, l'examen du registre des
assemblées faisait partie des obligations de l'expert-comptable ; que
Marcelle Y... avait d'abord déclaré qu'elle n'avait
décelé aucune anomalie dans la comptabilité
contrôlée, si ce n'est deux erreurs de la taxe sur la valeur
ajoutée de 50 000 francs et des chèques émis sans
justificatifs qui avaient été corrigés à sa demande
; qu'ensuite, elle a admis qu'elle avait effectivement constaté
certaines anomalies, tels l'enregistrement en charges d'achats de
véhicules ou l'achat de divers matériels qui n'entraient pas dans
l'objet social des deux sociétés, ainsi que des dépenses
de voyages ; qu'elle finissait par reconnaître avoir progressivement
découvert les anomalies révélées par l'instruction,
mais disait ne pas avoir réagi ni démissionné par
faiblesse, que, ce faisant, elle avait été manipulée par
Joëlle C... et André A... ; qu'elle affirmait ne pas avoir
participé à l'évaluation des deux sociétés
avant leurs cessions ; qu'après sa mise en examen, elle revenait sur ses
déclarations pour nier toute connaissance ou participation dans les
agissements frauduleux reprochés, malgré les mises en cause
circonstanciées de Joëlle C..., T... et F... qui ont notamment
indiqué que Marcelle Y... reprochait à Joëlle C... de ne pas
répertorier les références des biens dans le journal
général et sur les pièces justificatives correspondantes,
ce qui démontrait qu'elle avait identifié les
irrégularités commises ; qu'elle avait « baissé les
bras et laissé faire car elle n'aime
La responsabilité du commissaire aux
comptes
322
pas le conflit » ; qu'elle a estimé a posteriori
qu'elle aurait dû démissionner ; qu'elle a remis une note
appuyée d'un rapport d'expertise comptable commandé par elle et
déposé au dossier d'instruction, qui conclurait que les
irrégularités, lorsqu'elles existent, lui furent
étrangères et qu'elle ne saurait être poursuivie dans la
mesure où il ne pouvait pas être établi à son
encontre ni le moindre intérêt ni la moindre intervention complice
et encore moins une participation volontaire active ou même passive aux
irrégularités constatées ; que l'accusation avait retenu
qu'elle avait une parfaite « connaissance et conscience des délits
commis auxquels elle ne s'était nullement opposée alors
même, s'agissant d'une abstention coupable volontaire, que ses fonctions
et prérogatives lui permettaient de faire échouer les agissements
frauduleux des consorts A... » ; qu'elle a évalué les deux
sociétés à 13 millions de francs, (qui ont
été cédées à 10 millions de francs) ;
qu'elle a recommandé téléphoniquement à Joëlle
C... de ne rien dire sur sa complicité ; qu'il est déduit de cet
ensemble d'explications de l'expert-comptable et des témoignages que
Marcelle Y... avait connaissance des malversations qualifiées d'abus de
biens sociaux, perpétrés, au principal, par les consorts A...,
à titre de complice, par la chef comptable Joëlle C... ; que
l'absence de réaction de sa part s'explique par sa faiblesse
vis-à-vis des consorts A... ; que, sur l'acte de complicité,
positif et antérieur ou concomitant au fait principal punissable,
Marcelle Y... s'est appuyée, dès la fin de l'instruction sur le
« rapport BB... », qui a retenu qu'il n'y avait eu de la part de
l'expert-comptable :
- ni acte positif, ce que n'est pas la découverte a
posteriori de malversations,
- ni antériorité ou concomitance,
indépendamment de la connaissance préalable des faits, ces
aspects de la défense dont il vient d'être dit qu'il
n'était pas considéré comme pertinent ; qu'elle a
également fait état du secret professionnel auquel elle
était soumise qui lui interdisait de manifester une quelconque
réaction extérieure à la société ; qu'elle
ne pouvait que se borner à inviter le dirigeant indélicat
à mettre un terme à la dépossession
irrégulière ou à rembourser l'entreprise du montant du
préjudice ; que si les pratiques illégales perduraient et
prenaient des proportions significatives, l'expert-comptable serait
inévitablement conduit à mettre un terme à sa
collaboration, selon le rapport BB... ; que nul n'a fait état d'acte
positif : au terme de l'ordonnance de renvoi, la complicité vient de
l'acceptation sans réserve et de la certification des comptes des deux
sociétés « qu'elle savait couvrir des abus de biens sociaux
» ; que ni l'acceptation sans réserve ni la certification ne sont
des actes de la fonction de l'expert-comptable tels qu'il résulte des
textes régissant cette fonction, c'est-à-dire l'ordonnance de
1945 et la lettre de mission de 1984 ; que la « révision des
comptes », arrêtés au 31 mars de chaque année,
l'établissement de la situation intermédiaire semestrielle et les
« contrôles » des registres d'immobilisation, des comptes de
trésorerie, des déclarations de la taxe sur la valeur
ajoutée, du journal général, du livre d'inventaires, lui
permettait de vérifier la régularité formelle, les travaux
matériels d'établissement relevant du service de
comptabilité des deux sociétés ; qu'elle n'avait pas de
contrôle de sincérité des comptes ; que le seul acte
positif qu'elle pouvait accomplir, dès lors qu'il est
considéré qu'elle avait connaissance de malversations sur les
biens sociaux, c'est-à-dire la connaissance de certains achats, anormaux
en volume, en natures physiques, en destination vers des employés et
clients, connaissances de dépenses découvertes comme étant
maquillées en facturations à l'encontre de tiers, était de
s'informer sur les modalités de maquillage qu'elle n'aurait pas encore
détectées auprès des acteurs principaux et
La responsabilité du commissaire aux
comptes
323
des employés du service comptable ; qu'alors titulaire des
informations, il ne lui appartenait pas de « dénoncer » une
malversation, mais de faire des réserves sur les conditions dans
lesquelles sa mission avait pu être réalisée, en
l'espèce, réserves sur le fait que toute la documentation
comptable afférente aux achats de marchandises ou dépenses
personnelles, à la comptabilisation des modes de cession ou
d'utilisation des biens disparus au titre des marchandises et fonds ou valeurs,
ne lui avait pas été remise ; que, s'agissant desdits achats
détournés abusivement, en contrariété avec l'objet
et l'intérêt sociaux, Marcelle Y... n'a pas énoncé
de réserves ; qu'elle n'a pas « accepté » les comptes
de la société, « sans réserves » ; qu'or, cette
« absence de réserves » que la cour considère comme
volontaire, même si l'expert-comptable n'a pas « agi » par
faiblesse, par crainte des consorts A... et André A... en particulier,
de chez qui elle a été vue sortir en pleurs, qui est devenue
ainsi un acte positif, n'est pas antérieur ou concomitant à
l'abus de biens sociaux, sauf à placer le moment de la commission du
délit, non pas au temps de la cession, sorte de l'entreprise,
c'est-à-dire au moment où l'objet acquis est abusivement
utilisé, cédé, donné, mais au moment où ne
seront plus modifiables les enregistrements comptables frauduleux,
c'est-à-dire au temps où la situation d'abus est
définitivement acquise, lors de l'établissement des comptes
annuels ; que c'est en effet à ce moment que les contacts pris par
l'expert-comptable avec le dirigeant social-auteur, seront
considérés comme fructueux, le dirigeant procédant
à un remboursement de la société et faisant donc rectifier
le compte falsifié, ou au contraire, comme infructueux,
l'expert-comptable choisissant alors d'émettre des «
réserves » voire de démissionner ; que l'émission de
« réserves », ou / et de démission est alors l'acte
positif antérieur ou concomitant au fait principal d'abus de biens
sociaux ; que cette analyse spécifique au moment de la commission d'abus
de biens sociaux et acte de complicité avait été
posée comme question lors des débats devant la cour ; que
Marcelle Y... n'y a pas répondu ni son conseil par conclusions,
écrites ou oralement ; qu'en l'espèce, la pratique de Marcelle
Y..., qui correspond aux temps passés à la révision des
comptes, à la connaissance qu'elle avait des anomalies comptables,
à l'absence de courage professionnel dans l'accomplissement de ses
diligences usuelles qu'elle a reconnue, permet d'identifier les
éléments matériels constitutifs de la complicité
des abus de biens sociaux reprochés en principal aux consorts A... ; que
l'élément moral de l'infraction résulte de la conscience
qu'avait Marcelle Y..., d'avoir permis les premiers accomplissements des
délits et leur pérennisation au cours de la période de la
prévention ; que Marcelle Y... est donc déclarée coupable
de complicité d'abus de biens sociaux ;
» 1°) alors que la complicité suppose
l'accomplissement d'un acte positif ; qu'elle ne peut s'induire d'une simple
inaction ou abstention qu'à la condition que le prévenu soit tenu
à une obligation de ne pas laisser se perpétrer l'infraction et
ait eu le pouvoir d'y faire obstacle ; qu'en condamnant Marcelle Y... du chef
de complicité d'abus de biens sociaux en raison de son inaction quand,
conformément à sa mission définie par l'ordonnance du 19
septembre 1945 et sa lettre de mission, l'expert-comptable se contentait de
retranscrire dans les écritures les opérations déjà
réalisées par les auteurs de l'infraction principale et n'avait
ni l'obligation de certifier des comptes ni celle d'émettre des
réserves, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
» 2°) alors que Marcelle Y... soulignait que sa mission
se limitait à un contrôle de la régularité formelle
des comptes, « le contrôle de la sincérité des comptes
incombant à Bernard AA..., commissaires aux comptes des deux
sociétés » ; qu'en ne
La responsabilité du commissaire aux
comptes
324
s'expliquant pas sur cette argumentation essentielle de nature
à démontrer que Marcelle Y... n'avait pas l'obligation de
certifier les comptes et d'émettre des réserves le cas
échéant, ce rôle incombant aux commissaires aux comptes, la
cour d'appel a privé sa décision de base légale «
;
Sur le second moyen de cassation proposé par la
société civile profesionnelle Boré et Salve de Bruneton
pour Marcelle X..., épouse Y..., pris de la violation des articles 437,
463 et 464 de la loi du 24 juillet 1966, 2 de l'ordonnance du 19 septembre
1945, 59 et 60 de l'ancien code pénal, 591 et 593 du code de
procédure pénale et 6 de la Convention européenne des
droits de l'homme ;
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré Marcelle Y... coupable de complicité d'abus de
biens sociaux et l'a condamnée à une peine de trois mois
d'emprisonnement avec sursis et à une amende délictuelle de 2 000
euros ;
» aux motifs que Marcelle Y... sera suivie dans la
présentation de ses obligations légales et conventionnelles ;
qu'il reste néanmoins à confronter ces obligations à la
réalité de ce qu'elle a connu des faits et malversations
existantes, d'une part, à l'antériorité de l'un de ses
devoirs par rapport à chaque abus commis, d'autre part ; que, sur la
réalité de la connaissance des faits et malversation, Joelle C...
l'a clairement mise en cause :
- Marcelle Y... « tiquait » souvent sur des factures et
savait qu'un certain nombre ne servait qu'à justifier des sorties de
caisse, des chèques des consorts A... et l'existence des factures
manuscrites de René A... qu'elle savait fausses ; que toutes les
dépenses, même importantes et personnelles, des consorts A...,
étaient enregistrées sur le compte 607 Achat de marchandises,
méthode qui déplaisait à Joëlle C... et Marcelle Y...
; qu'elles ont préféré se taire devant l'insistance
d'André A... ;
- Le compte spécial « fournisseurs » au nom de
D... et le compte « fournisseur divers » où figurait E...,
salarié connu de Marcelle Y... n'ont pas manqué d'attirer
l'attention de l'expert-comptable ;
- Joëlle C... a signalé que certains comptes, (Brandt
notamment) retenaient l'attention de Marcelle Y..., car il s'agissait d'un gros
fournisseur dont le compte était difficile à pointer et les
règlements effectués de façon échelonnées ;
que les voitures et motos étaient passées en charges et Marcelle
Y... n'était pas d'accord avec ce type d'achats et « craignait que
quelqu'un s'en aperçoive » ; que les factures de ventes de
matériels pour l'étranger et notamment l'Afrique jusqu'au 3
août 1992 ont totalisé 5 415 838 francs et 15 334 livres Sterling
; que les frères A... et René A... étaient visés
par la dénomination, la gestion, la direction des sociétés
Fulcam et 3G ;
qu'aucun contrôle, pourtant minimum, n'a été
fait sur l'existence ou le défaut d'approbation de convention entre
l'une ou l'autre des deux sociétés avec les
sociétés africaines ; que, pourtant, l'examen du registre des
assemblées faisait partie des obligations de l'expert-comptable ; que
Marcelle Y... avait d'abord déclaré qu'elle n'avait
décelé aucune anomalie dans la comptabilité
contrôlée, si ce n'est deux erreurs de TVA de 50 000 francs et des
chèques émis sans justificatifs qui avaient été
corrigés à sa demande ; qu'ensuite, elle a admis qu'elle avait
effectivement constaté certaines anomalies, tels l'enregistrement en
charges d'achats de véhicules ou l'achat de divers matériels qui
n'entraient pas dans l'objet social des deux sociétés, ainsi que
des dépenses de voyages ; qu'elle finissait par reconnaître
avoir
La responsabilité du commissaire aux
comptes
325
progressivement découvert les anomalies
révélées par l'instruction, mais disait ne pas avoir
réagi ni démissionné par faiblesse, que, ce faisant, elle
avait été manipulée par Joëlle C... et André
A... ; qu'elle affirmait ne pas avoir participé à
l'évaluation des deux sociétés avant leurs cessions ;
qu'après sa mise en examen, elle revenait sur ses déclarations
pour nier toute connaissance ou participation dans les agissements frauduleux
reprochés, malgré les mises en cause circonstanciées de
Joëlle C..., T... et F... qui ont notamment indiqué que Marcelle
Y... reprochait à Joëlle C... de ne pas répertorier les
références des biens dans le journal général et sur
les pièces justificatives correspondantes, ce qui démontrait
qu'elle avait identifié les irrégularités commises ;
qu'elle avait « baissé les bras et laissé faire car elle
n'aime pas le conflit » ; qu'elle a estimé a posteriori qu'elle
aurait dû démissionner ; qu'elle a remis une note appuyée
d'un rapport d'expertise comptable commandé par elle et
déposé au dossier d'instruction, qui conclurait que les
irrégularités, lorsqu'elles existent, lui furent
étrangères et qu'elle ne saurait être poursuivie dans la
mesure où il ne pouvait pas être établi à son
encontre ni le moindre intérêt ni la moindre intervention complice
et encore moins une participation volontaire active ou même passive aux
irrégularités constatées ; que l'accusation avait retenu
qu'elle avait une parfaite « connaissance et conscience des délits
commis auxquels elle ne s'était nullement opposée alors
même, s'agissant d'une abstention coupable volontaire, que ses fonctions
et prérogatives lui permettaient de faire échouer les agissements
frauduleux des consorts A... » ; qu'elle a évalué les deux
sociétés à 13 millions de francs, (qui ont
été cédées à 10 millions de francs) ;
qu'elle a recommandé téléphoniquement à Joëlle
C... de ne rien dire sur sa complicité ; qu'il est déduit de cet
ensemble d'explications de l'expert-comptable et des témoignages que
Marcelle Y... avait connaissance des malversations qualifiées d'abus de
biens sociaux, perpétrés, au principal, par les consorts A...,
à titre de complice, par la chef comptable Joëlle C... ; que
l'absence de réaction de sa part s'explique par sa faiblesse
vis-à-vis des consorts A... ; que, sur l'acte de complicité,
positif et antérieur ou concomitant au fait principal punissable,
Marcelle Y... s'est appuyée, dès la fin de l'instruction sur le
« rapport BB... », qui a retenu qu'il n'y avait eu de la part de
l'expert-comptable :
- ni acte positif, ce que n'est pas la découverte a
posteriori de malversations,
- ni antériorité ou concomitance,
indépendamment de la connaissance préalable des faits, ces
aspects de la défense dont il vient d'être dit qu'il
n'était pas considéré comme pertinent ; qu'elle a
également fait état du secret professionnel auquel elle
était soumise qui lui interdisait de manifester une quelconque
réaction extérieure à la société ; qu'elle
ne pouvait que se borner à inviter le dirigeant indélicat
à mettre un terme à la dépossession
irrégulière ou à rembourser l'entreprise du montant du
préjudice ; que si les pratiques illégales perduraient et
prenaient des proportions significatives, l'expert-comptable serait
inévitablement conduit à mettre un terme à sa
collaboration, selon le rapport BB... ; que nul n'a fait état d'acte
positif : qu'au terme de l'ordonnance de renvoi, la complicité vient de
l'acceptation sans réserve et de la certification des comptes des deux
sociétés « qu'elle savait couvrir des abus de biens sociaux
» ; que ni l'acceptation sans réserve ni la certification ne sont
des actes de la fonction de l'expert-comptable tels qu'il résulte des
textes régissant cette fonction, c'est-à-dire l'ordonnance de
1945 et la lettre de mission de 1984 ; que la « révision des
comptes », arrêtés au 31 mars de chaque année,
l'établissement de la situation intermédiaire semestrielle et les
« contrôles » des registres d'immobilisation,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
326
des comptes de trésorerie, des déclarations de TVA,
du journal général, du livre d'inventaires, lui permettait de
vérifier la régularité formelle, les travaux
matériels d'établissement relevant du service de
comptabilité des deux sociétés ; qu'elle n'avait pas de
contrôle de sincérité des comptes ; que le seul acte
positif qu'elle pouvait accomplir, dès lors qu'il est
considéré qu'elle avait connaissance de malversations sur les
biens sociaux, c'est-à-dire la connaissance de certains achats, anormaux
en volume, en natures physiques, en destination vers des employés et
clients, connaissances de dépenses découvertes comme étant
maquillées en facturations à l'encontre de tiers, était de
s'informer sur les modalités de maquillage qu'elle n'aurait pas encore
détectées auprès des acteurs principaux et des
employés du service comptable ; qu'alors titulaire des informations, il
ne lui appartenait pas de « dénoncer » une malversation, mais
de faire des réserves sur les conditions dans lesquelles sa mission
avait pu être réalisée, en l'espèce, réserves
sur le fait que toute la documentation comptable afférente aux achats de
marchandises ou dépenses personnelles, à la comptabilisation des
modes de cession ou d'utilisation des biens disparus au titre des marchandises
et fonds ou valeurs, ne lui avait pas été remise ; que,
s'agissant desdits achats détournés abusivement, en
contrariété avec l'objet et l'intérêt sociaux,
Marcelle Y... n'a pas énoncé de réserves ; qu'elle n'a pas
« accepté » les comptes de la société, «
sans réserves » ; qu'or, cette « absence de réserves
» que la cour considère comme volontaire, même si
l'expert-comptable n'a pas « agi » par faiblesse, par crainte des
consorts A... et André A... en particulier, de chez qui elle a
été vue sortir en pleurs, qui est devenue ainsi un acte positif,
n'est pas antérieur ou concomitant à l'abus de biens sociaux,
sauf à placer le moment de la commission du délit, non pas au
temps de la cession, sorte de l'entreprise, c'est-à-dire au moment
où l'objet acquis est abusivement utilisé, cédé,
donné, mais au moment où ne seront plus modifiables les
enregistrements comptables frauduleux, c'est-à-dire au temps où
la situation d'abus est définitivement acquise, lors de
l'établissement des comptes annuels ; que c'est en effet à ce
moment que les contacts pris par l'expert-comptable avec le dirigeant
social-auteur, seront considérés comme fructueux, le dirigeant
procédant à un remboursement de la société et
faisant donc rectifier le compte falsifié, ou au contraire, comme
infructueux, l'expert-comptable choisissant alors d'émettre des «
réserves » voire de démissionner ; que l'émission de
« réserves », ou / et de démission est alors l'acte
positif antérieur ou concomitant au fait principal d'abus de biens
sociaux ; que cette analyse spécifique au moment de la commission d'abus
de biens sociaux et acte de complicité avait été
posée comme question lors des débats devant la cour ; que
Marcelle Y... n'y a pas répondu ni son conseil par conclusions,
écrites ou oralement ; qu'en l'espèce, la pratique de Marcelle
Y..., qui correspond aux temps passés à la révision des
comptes, à la connaissance qu'elle avait des anomalies comptables,
à l'absence de courage professionnel dans l'accomplissement de ses
diligences usuelles qu'elle a reconnue, permet d'identifier les
éléments matériels constitutifs de la complicité
des abus de biens sociaux reprochés en principal aux consorts A... ; que
l'élément moral de l'infraction résulte de la conscience
qu'avait Marcelle Y..., d'avoir permis les premiers accomplissements des
délits et leur pérennisation au cours de la période de la
prévention ; que Marcelle Y... est donc déclarée coupable
de complicité d'abus de biens sociaux ;
» 1°) alors que la complicité suppose
l'accomplissement d'un fait antérieur ou concomitant à la
réalisation de l'infraction ; que l'abus de biens sociaux est une
infraction instantanée consommée lors de chaque paiement
indû ; que n'est donc pas punissable au titre de la complicité le
seul fait, pour un expert-comptable, de ne
La responsabilité du commissaire aux
comptes
327
pas émettre des réserves postérieurement
à l'accomplissement d'un abus de biens sociaux ; qu'en décidant
le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
» 2°) alors qu'en jugeant que l'absence de réserve avait
permis la pérennisation des délits au cours de la période
de la prévention quand il résultait de ses propres constatations
que les réserves n'auraient, en toute hypothèse,
été formulées qu'après l'accomplissement des
premiers délits et sans préciser en quoi ces réserves, qui
auraient été adressées aux consorts A..., auraient fait
obstacle à la pérennisation des infractions, la cour d'appel n'a
pas donné de base légale à sa décision au regard
des textes susvisés « ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour déclarer Marcelle Y... coupable de
complicité des abus de biens sociaux commis par les dirigeants des
sociétés MSGA et Martin, l'arrêt énonce que la
prévenue, expert-comptable de ces sociétés depuis 1980, a
eu connaissance des détournements et des anomalies comptables les
dissimulant et a omis d'émettre des réserves sur les conditions
d'exercice de sa mission ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dont il
résulte que l'expert-comptable, en transcrivant systématiquement
en comptabilité, des écritures dissimulant des délits qui
se sont renouvelés pendant la période de la prévention, a,
sciemment, par aide ou assistance, favorisé la préparation et la
consommation des abus de biens sociaux poursuivis, la cour d'appel a
justifié sa décision ;
Qu'ainsi, les moyens doivent être écartés
;
Sur le sixième moyen de cassation proposé par la
société civile profesionnelle Thouin-Palat et Boucard pour
André, René et René-Louis A..., pris de la violation des
articles 2, 5, 591 et 593 du code de procédure pénale,
défaut de motifs et manque de base légale ;
» en ce que l'arrêt attaqué a reçu la
constitution de partie civile de la société Financière
Z... et a condamné André, René et René-Louis A...
à verser à cette société la somme de 1 021 416, 64
euros à titre de dommages-intérêts ;
» aux motifs que, s'agissant de la recevabilité de
l'action civile de SFF, la règle « electa una via » ou
l'article 5 du code de procédure pénale, ne permettent pas
à la partie qui a exercé son action devant le juge civil
compétent, de la porter devant le juge pénal, à moins que
ce dernier n'ait été saisi par le ministère public avant
qu'un jugement sur le fond n'ait été rendu par le juge civil ;
que les consorts Z... ont saisi la juridiction pénale le 19 mai 1994 par
leur plainte avec constitution de partie civile ; que la procédure a
fait l'objet d'un renvoi devant le tribunal correctionnel par ordonnance du 15
novembre 2001 et les consorts Z... et la SFF ont fait la demande de la
réparation du préjudice résultant d'infractions dont un
tribunal correctionnel a été saisi par ordonnance de renvoi d'un
juge d'instruction ; qu'il n'importe qu'à ce stade de la
procédure, que la partie civile ait ou non correctement fondé ses
demandes et leurs montants ; que, dans le cadre de la procédure
commerciale, sur assignation en date du 6 avril 1994, la SFF et les consorts
Z... demandaient la résolution de la cession des actions des deux
sociétés Mettetal et Martin, l'assignation visant les
frères A... ; que les deux actions n'avaient pas le même objet, la
même cause, ni les mêmes parties agissant à la même
qualité, le moyen est donc rejeté comme non fondé en droit
;
» et aux motifs que les délits dont les consorts A...
ont été déclarés coupables ont causé des
préjudices à diverses personnes, en tout cas à celle des
personnes à qui les éléments de comptes ou la
totalité de ceux-ci ont été communiqués, l'acheteur
des sociétés, trompé sur la consistance de l'objet de son
achat ; que la valeur d'achat des actions des deux sociétés a
été fixée à 10 millions de francs alors que,
à
La responsabilité du commissaire aux
comptes
328
fin décembre 1991 :- les deux sociétés
avaient été pillées par des payements
d'achats, des retraits d'espèces ou des émissions
de chèques, les premiers cédés ou donnés à
des tiers ou employés, hors contrepartie, les seconds pour des besoins
personnels hors salaires, au titre des abus de biens sociaux au cours des
années 1991 et antérieures ;- il y avait eu fraude à la
TVA et fraude quant à l'évaluation des stocks, délits
ayant, en plus des précédentes conséquences des abus de
biens sociaux trompé l'acheteur, sur les valeurs patrimoniales des
exercices objets de la communication ;- des faux, encore utilisés fin
1991, non détectés qui avaient couverts les abus de biens sociaux
et escroqueries tant pour fausses factures que par fausses imputations
comptables, contribuaient à tromper l'acheteur lors de sa prise de
connaissance des comptes ; que les réparations dues à ces titres
sont indépendantes des éventuelles condamnations à
l'extension de la liquidation judiciaire et ses conséquences ; que la
cour estime que la fraude à la TVA a été couverte par
l'abandon en compte courant et la garantie toutes deux provisoires, à
cinq ans et dix ans ; que les prévenus avaient été
renvoyés devant le tribunal correctionnel comme ayant causé les
détournements, escroqueries suivantes et ont été
condamnés par le tribunal :
ORTC
Tribunal alloué
Demandes PC
Du chef d'abus de biens sociaux
1 459 155 francs (Martin)
978 808 francs (Mettetal)
Faux bilans produits
3 266 134 francs (trois années)
Escroquerie TVA
1 832 627 francs
limité à
340 000 francs Faux écritures
2 159 364 francs Totaux
9 696 088 francs (9 956 016 francs) 5 285 169 euros
La responsabilité du commissaire aux
comptes
329
1 478 159 euros
1 517 785 euros
Réduit devant la cour d'appel à 3 496 161 euros
(c'est-à-dire
(22 933 312 francs)
que les 1 517 785 euros ne représentant que la perte
d'investissement de SFF selon la critique de la partie civile ; qu'il est
d'abord observé que le choix du recours à l'emprunt à
hauteur de 9, 5 millions de francs n'a relevé que de la SFF / Claude
Z... et que tous les intérêts, frais, garanties, etc., ne sont pas
inclus dans le préjudice résultant directement de l'infraction
qui en toute hypothèse et logique ne peut atteindre près de 23
millions de francs ; que la cour ne saurait ordonner que la réparation
des préjudices résultant directement des atteintes à la
valeur financière de l'acquisition, dans les limites des poursuites,
c'est-à-dire en fonction des montants retenus et des périodes
concernées, soit :- pour les abus de biens sociaux commis courant 1990
et 1991 en excluant les faits répertoriés mais commis avant le
1er janvier 1990, la cour évalue le préjudice matériel
à 2 437 963 francs ou 371 665, 06 euros ;- pour l'escroquerie à
la TVA commise du 1er avril 1990 au 31 décembre 1991, la cour
évalue le préjudice à 340 000 francs ou 51 832, 67 euros
;- pour l'escroquerie aux bilans dont stocks commise de novembre 1991 à
courant 1992 sur les', : oh exercices * : J33- 1S » 0 et 1G91 faisant
apparaître des résultats frauduleusement améliorés
pour les trois exercices antérieurs à la cession litigieuse, la
cour constate que l'amélioration des stocks doit être
limitée au montant énoncé dans la prévention de 3
266 134 francs (au lieu de 3 314 359 francs), soit 497 918, 91 euros ;- pour
les faux en écriture de commerce et usages du 19 mai 1991 à fin
1991 au sein de Mettetal et Martin par facturations non causées et
mentions inexactes sur achats et ventes pour un total évalué
à 2 159 364 francs, la cour jugeant que lesdites fausses facturations
d'achats et de ventes correspondant à une définition
différents des abus de biens sociaux, cause en l'espèce un
préjudice calqué sur celui des abus de biens sociaux dont elles
constituent le moyen de réalisation ; qu'il y a lieu d'en déduire
que le préjudice matériel résultant des faux et usage de
faux est déjà réparé ;
» alors que la partie qui se prétend
lésée par une infraction et qui a saisi le juge civil ne peut
plus porter son action indemnitaire devant le juge répressif ; qu'en
l'espèce, l'action introduite par les consorts Z... et la
société Financière Z... devant le juge consulaire avait
pour objet la résolution de la cession des deux sociétés,
et était fondée sur un vice du consentement résultant de
la fausseté des informations comptables communiquées ; que
l'action civile introduite devant le juge répressif était
fondée sur les faits notamment imputés à André et
René-Louis A... qui auraient faussé les informations
communiquées ; que la cour d'appel qui, pour déclarer la
société Financière Z... recevable en sa constitution de
partie civile, a exclu toute identité d'objet, de cause et de parties, a
violé les textes visés au moyen « ; Attendu que, pour
rejeter l'exception d'irrecevabilité de l'action civile,
présentée par les prévenus et tirée de
l'application de l'article 5 du code de procédure pénale,
l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que l'action
introduite devant le juge civil n'a ni la même cause ni le même
objet que l'action portée devant la juridiction répressive et
n'oppose pas les mêmes parties, la cour d'appel a justifié sa
décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
330
Sur le troisième moyen de cassation proposé par la
société civile profesionnelle Thouin-Palat et Boucard pour
André, René et René-Louis A..., pris de la violation des
articles L. 241-9 et L. 242-6 du code de commerce, 2, 591 et 593 du code de
procédure pénale ;
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré André, René et René Louis A...
coupables d'abus de biens sociaux, a reçu la constitution de partie
civile de la société Financière Z..., et les a
condamnés à verser à cette dernière la somme de 371
665, 06 euros en réparation de son préjudice résultant de
ce délit ;
» aux motifs que, sur les qualités de dirigeant
sociaux de droit ou de fait ; 1 / André A... était le
président directeur général de la SA Mettetal et directeur
général de la SA Martin ; qu'il s'occupait de « Martin
« comme son frère René-Louis s'occupait de Mettetal ; qu'ils
étaient « les deux patrons «, discutaient ensemble avant de
prendre une décision ; que la répartition officielle masquait une
direction à deux têtes avec répartition des rôles sur
un plan pratique ; que le personnel comptable précisait qu'en l'absence
d'André A..., notamment lorsqu'il était au Cameroun,
c'était son fils et son frère qui codirigeaient ; 2 /
René-Louis A... était le président directeur
général de la SA Martin et directeur général de
Mettetal ; qu'il a confirmé les explications de son frère
André, ajoutant qu'en fait, son frère s'occupait de la «
gestion de Martin « avec la comptable ; que, pour Mettetal, il s'occupait
de la partie technique, le magasin, les relations avec les
représentants, pour ce qui concernait les poids lourds, de l'achat et de
la transformation des véhicules neufs ; qu'à compter de janvier
1992, il sera recruté comme directeur salarié de Mettetal
jusqu'à son licenciement pour motif économique courant
février 1993 ; 3 / René A... (fils d'André) était
directeur commercial chez la SA Martin ; que, de janvier 1992 à
septembre 1992, il aura les mêmes fonctions dans les deux
sociétés ; que le chef magasinier CC... chez Mettetal dirigeait
« le magasin « à peu prés comme il le voulait en
respectant les ordres et les directives donnés par René A...
(frère) à b'0 %, par André A... et son fils René
à 13 % ; que le chef d'atelier chez « Martin «, M. G...
indiquait que ses « patrons directs « étaient André
A... et son fils René A... ; que de même, M. H...,
représentant chez Martin, qui animait une équipe de sept à
huit personnes, avait comme supérieurs hiérarchiques les A...,
André et son fils René ; qu'en outre, René A... (fils)
intervenait au sein de Mettetal ainsi qu'il l'a admis au cours de son audition
par les enquêteurs, expliquant qu'il lui arrivait d'intervenir sur
Mettetal pour essayer de prendre des marchés, ou d'intervenir dans les
négociations sur les véhicules légers, rôle
déterminant de direction et de gestion ; qu'il a donc valablement
été considéré comme codirigeant de fait dans les
deux sociétés, qui bien que distinctes juridiquement, ne font
qu'une ; qu'il n'y avait qu'un seul service administratif et comptable pour les
deux sociétés ; que la famille A... apparaît comme trois
personnes qui géraient de fait les deux sociétés en se
répartissant les tâches ; qu'André A..., président
directeur général de Mettetal, s'occupait de Martin avec son
fils, et son frère René, président directeur
général de Martin, était en charge de la partie poids
lourds (Mettetal), en liaison avec André et son fils René ;
qu'André A... assurait la partie administrative et comptable de Martin
et Mettetal ; que sur les abus de biens sociaux et complicité de ces
délits ; que la prescription de l'action publique à pour point de
départ la constatation de la matérialité du fait dans des
conditions permettant l'exercice de l'action publique, ce qui n'a
été le cas, en l'espèce, qu'à compter du jour
où les consorts Z... ont été en mesure de découvrir
les détournements de biens et d'en informer le parquet, soit en juillet
1993, ce qui implique que tous ces faits comptablement portés dans les
comptes annuels de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
331
l'exercice clos au 31 mars 1990, comptes à faire approuver
au 30 septembre 1990 et à dater pour la liasse fiscale au 30 juin 1990
sont concernés ; que l'analyse des pièces comptables des
sociétés Martin et Mettetal pour les exercices clos aux 31 mars
1990 et 1991 et du 31 mars au 31 décembre 1991 ont
démontré qu'André, René et René-Louis A...
ont fait supporter aux deux sociétés, divers achats et frais
généraux qui n'entraient pas dans leurs objet et
intérêt sociaux et ce, pour l'ensemble de cette période,
pour un montant total de 1 459 155 francs pour la société Martin
et 978 808 francs pour la société Mettetal ; que concernant la
société Martin, il s'est agi notamment, pour la période en
cause, de matériels électroménager (machines à
laver le linge et la vaisselle, réfrigérateurs), hi-fi, TV et
vidéos (télévisions, magnétoscopes) pour un montant
de 1 270 930 francs, mais aussi de titre de transports et de séjours
à destination de Bastia, Jersey, Douala, Biarritz, Casablanca, Milan
pour un total de 51 136 francs et, enfin, de matériels pour bateau d'un
montant de 38 509 francs ; que, pour ce qui concerne la société
Mettetal, les principales dépenses en cause ont trait à des
achats de pièces et de moteurs automobiles d'occasion pour 121 976
francs, des achats d'équipements pour la maison et le jardin et des
dépenses d'habillements pour un total sur la période en cause de
419 969 francs ; qu'ont également été comptabilisés
des dépenses de biens alimentaires et de spiritueux pour 46 050 francs
et des titres de transports à destination de Tanger, Bastia et Le Caire
pour 55 610 francs ; qu'en outre, diverses factures de tiers, totalement
irrégulières en raison de l'absence d'entêté
commerciale, ont été payées et comptabilisées en
charge pour un total de 305 533 francs alors que ces factures, mentionnant
souvent des sommes « rondes «, ne correspondaient à aucune
prestation réelle et concernaient, pour la plupart des membres du
personnel de la société Mettetal ou des relations «
privilégiées «, qui, ce faisant, percevaient des
rémunérations ou commissions inexpliquées ; qu'enfin,
l'analyse des comptes permettait de déterminer que les
sociétés Mettetal et Martin avaient supporté des achats de
trois véhicules de tourisme pour 314 912 francs ainsi que des frais de
remise en état d'un véhicule Porshe Carrera pour 25 000 francs
(alors qu'aucun véhicule de tourisme n'appartenait à la
société à la date de la facture) et, enfin, des frais
d'acquisition de dix motos et cinq scooters (237 323 francs pour la
société Mettetal et 47 821 francs pour la SA Martin) ; qu'il
convient de préciser à cet effet que ces différents achats
ont été comptabilisés sans aucune justification dans les
charges des deux entreprises et dès lors, sans inscription à
l'actif des sociétés ni, du reste, sans qu'aucune
déclaration sur la taxe des véhicules de tourisme et de
sociétés ne soit réalisée ; qu'en fait, ces achats
hors objet social, qu'ils correspondent à des prestations réelles
ou fictives, avaient trois explications :soit ils étaient
redistribués sous forme de « cadeaux « afin de
fidéliser ou de « remercier « les clients, décideurs,
intermédiaires ou membres du personnel ;- soit ils étaient
revendus de façon dissimulée, c'est-à-dire sans
véritable enregistrement comptable de ces ventes ;- soit, en
dépit même des dénégations des consorts A... qui ont
nié tout enrichissement personnel à ce titre, ces dépenses
indues l'ont été à leur profit direct, bien que
l'enquête n'ait pas permis d'établir dans quelle proportion ; que
tel est, par exemple, le cas des dépenses de matériels nautiques
ayant trait au bateau d'André A... ou des dépenses de voyage en
Afrique ou en Corse, ou encore des notes de restaurant le week-end ou des frais
de réparations et d'assurances des véhicules ; que le
caractère « hors objet social « a été
contesté ; qu'il est donc utile de rechercher la
matérialité de la nature et de la destination desdits achats pour
les rapprocher de l'objet ou de l'intérêt social ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
332
A) sur la nature des achats litigieux de biens par les
sociétés Mettetal et Martin ; 1) les factures
d'équipements à destination du Cameroun-Douala ou Yaoundé
:- du 25 octobre 1988 au 9 décembre 1991 à Eurcam
(équipements d'usine, d'accumulateurs de batteries, matériels
divers) = 2 926 736 francs,- du 24 octobre 1988 = 484 KF (batteries) à
Cédric,- du 20 février 1989 = 8 000 francs pour Fulmen,
- du 3 mars 1989 = 2 920 francs pour SFM Douala,- du 16 juin 1989
au 25 septembre 1989 = 608 670 francs pour Euro Afric,- du 19 avril 1990 = 99
301 francs pour CHH,- du 18 octobre 1990 au 28 août 1992 pour 3G = 1 217
110 francs,- du 27 mai 1991 au 24 juin 1991 = 37 600 pour Vertex à
Brazaville (Congo),- du 27 juillet 1992 pour « 3G « = 15 334 livres
Sterling,- du 3 août 1992 = 31 500 francs de Ferre pour Morbiro, Total =
5 415 838 francs + 15 334 livres sterling ; 2) factures achats de
voyage-hôtel :- de Havas, du 19 avril 1989 à avril 1992 = 108 867
francs pour des croisières en Egypte, voyages en Corse, Tanger, Rabat,
Douala, Biarritz, Jersey,- de Saint-Germain voyages, du 15 mai 1989 à
1991 = 16 815 francs pour des voyages à Bastia, Milan, Douala,-
Hôtel à Villefranche en novembre 1989 = 2 807 francs,-Voyage et
hôtel à Nice du 14 mai 1990 = 5 257 francs,- SNCM du 12 juin 1990
= 7 320 francs,- Nouvelles frontières de août et octobre 1990 = 5
734 francs (Bastia, Douala),- hôtels Tanger de novembre 1990 et juillet
1991 pour 28 738 francs,- hôtels Rabat de novembre 1990 et juin 1991 pour
5 828 francs,- Europcar de juillet 1991 et mai 1992 pour 4 302 francs,
total = 185 769 francs ; 3) divers personnel-intérieur
:-32 000 francs chez Metro, Music force, Saint-Maclou, Art ou Bricolage,
Fabricants cuirs, Cooperative agricole de courant 1989 à courant 1991 ;
4) factures de vins et champagnes :- champagne du 30 mai 1989 au 21
février 1991 = 25 784 francs,- champagne Bricourt au 26 mars 1990 = 4
761 francs,- caveau des vins 12 décembre 1990 = 11 416 francs,- vins F.
Borelli du 11 octobre 1990 = 6 421 francs,- vins chez Carrefour du 17 juin 1991
= 1 332 francs,- vins chez Auchan du 23 décembre 1991 = 3 395 francs,
total = 58 420 francs ;
5) factures véhicules :- JR Moto = 989 francs,- Sotor Moto
du 18 avril 1989 au 9 mai 1992 = 220 020 francs,- Zonzon Moto du 30 novembre
1989 = 9 728 francs,- Moto change des 11 juin 1992 et 4 juillet 1992 = 17 600
francs, total = 248 339 francs ; 6) factures d'achats d'armes et d'articles de
marine :- d'armurerie des 29 novembre 1989 et 23 octobre 1990 = 3 055 francs,-
de Marine Power des 10 avril 1989 et 17 juin 1989 = 3 055 francs,- DAPP du 8
juin 1990 = 2 289 francs et Hors du 17 juillet 1990 = 872 francs,- Nautirama du
10 octobre 1990 au 12 juillet 1991 = 45 300 francs, total = 56 771 francs ; 7)
matériaux de jardins-équipement de maison (en francs)
Porche du 13 janvier 1989 au 31 mai 1989 = 21 363 Fly 21 octobre
1990 = 1 450
Lapeyre du 20 octobre 1989 au 20 janvier 1992 = 120 120
Serrurerie du 30 / 04 / 1991 au 28 juin 1991 = 3 676 Carrefour 9 juin 1990 = 2
631
La responsabilité du commissaire aux
comptes
333
Mobis du 27 novembre 1991 = 12 890
Conforama du 5 juillet 1990 et 6 juin 1990 = 3 335
Espace Pyram du 7 novembre 1991 = 1 267
Truffaut du 3 août 1990 = 1 100
Clemencon du 30 avril 1992 = 113 543
Art du bricolage du 16 août 1990 au 18 juin 1992 = 19
420
Bruneau du 4 novembre 1992 = 31 915
Cuisine spacial du 13 septembre 1990 =
Lambertdu 31 mai 1992 = 1 213
Castorama du 29 mai 1989 =
2 141
Bigmat du 18 mai 1989 au 19 juillet 1989 = 48 173
Lepatre du 5 juin 1989 =
5 284
Duport du 28 / 02 / 1990 au 19 / 06 / 1990 = 31 612 Tronciera du
4 octobre 1991 = 5 688
total = 368 636 francs, ce, pour des marchandises telles que
lave-linge, lave-vaisselle, réfrigérateur, mobilier de cuisine,
abris de jardins etc...
8) matériels de camping, d'habillements, cycles :
Poissy camping du 21 février 1989 au 9 décembre1989
=
26 628
Chemiserie du 20 octobre 1990 = 3 627
Weinberc du 9 novembre 1991 au 9 avril 1992 =
Imagine = 3 000
Brumm El Cergy du
Décathlon du 19 mars1991 = 338
Janirel des 4 janvier 1992 et 16 décembre 1991
La responsabilité du commissaire aux
comptes
334
Baby botte du 9 novembre 1991 = 560 La Literie du 4
décembre 1989 = 7 456 Cindarella du 27 novembre 1991 = 1 460
Continent du 6 juin 1989 au 13 décembre 1991 total = 49
999 francs
pour les trois exercices concernés, les rubriques (7 et 8)
totalisaient = 419 969 francs
;
9) matériels hi-fi-TV-vidéo
(téléviseurs, magnétoscopes), notamment :
Brandt du 26 janvier 1989 au 3 mars 1992 =
Metro du 19 janvier 1989 = 967
Continent du 25 juillet 1989 au 22 novembre 1991 =
Vidéo + du 25 janvier 1989 =
49 442
Darty du 3 janvier 1989 au
Decobert du 3 mai 1990 = 14 310
Boulanger du 7 novembre 1991 = 15 990
Leclerc du 13 décembre 1990 = 2 985
Hugo symphonie du 27 février 1992 = 4 490
totaux = 217 608 francs ; NB : il y a eu revente de Mettetal
à un M. I... du 22 mai au 10 septembre 1992 pour 10 927 francs ;
10) achats de véhicules ; que le témoin ZZ... a
fait état d'achats de véhicules de tourisme (3)
c'est-à-dire une Peugeot 205, une Audi 100, une Fiat Tipo, courant
novembre 1990 et août et décembre 1991 pour 314 912 francs, de
frais de réparation d'une Porsche pour 25 000 francs
réglés par Mettetal aux 31 mars 1990 au 31 décembre 1991,
de rachats de 10 motos et 5 scooters pour 237 323 francs payés par
Mettetal et pour 47 821 francs par Martin le 31 mars 1990 et pour 14 604 francs
le 31 mars 1991 ; que ces achats ont été constatés
directement « en charges « dans les deux sociétés et
non pas inscrits dans les « actifs « et il n'a été
trouvé aucune trace comptable de leur cession ; que les autres valeurs
concernées par les abus de biens sociaux ; que les prises de fonds pour
dépenses personnelles ; que Joëlle C... a dû enregistrer en
comptabilité des fausses factures d'achats visant à justifier des
chèques tirés sur des sociétés par André et
René A... ; qu'elle a indiqué que René A... prenait des
espèces et fournissait des factures destinées à couvrir
ces
La responsabilité du commissaire aux
comptes
335
sorties, indication réitérée à
plusieurs reprises en cours d'enquête, d'information et d'instruction
à l'audience ;
11) factures sans en-tête commerciales ; qu'elles ont
été dites fausses, destinées pour les consorts A...
à sortir de l'argent de Mettetal pour un total de 699 478 francs ; que
quelques « destinataires « significatifs sont relevés :-
Daniel J..., du 13 janvier 1989 au 1 août 1990 pour des « ventes de
portes électriques à Mettetal « pour 28 420 francs,- Mr D...
du 29 mai 1990 au 22 juillet 1992 pour 299 450 francs et du 6 décembre
1991 pour 30 000 francs, ce personnage présentant la
particularité d'être signataire de l'attestation Volvo (cf
Stocks),- Jean-Paul K... du 1er juillet 1989 au 6 septembre 1990 pour 26 600
francs (ami de René A...) dont le garage porte le sigle RGA (comme
René A... Automobile, a-t-il précisé) tous
éléments portant sur des pièces de véhicules,
matériels d'occasion,- E... (employé de société) du
7 juillet 1989 au 21 septembre 1990 pour 49 350 francs et au total à 50
882 francs (HT) ; que les dépenses totales des matériels divers
comptabilisées dans les deux sociétés ont
été calculées à 1 459 155 francs pour la
société Martin, à 978 808 francs pour Mettetal
correspondant, à s'en limiter pour les seuls trois exercices
concernés :- à 1 270 930 francs pour des achats
d'électroménager par la SA Martin,- à des achats de titres
de voyages et de séjours pour les deux sociétés pour 106
746 francs,- à des achats de matériel de marine pour 38 509
francs objets destinés à des relations privilégiées
de l'un ou l'autre des consorts A..., non inscrites au RCS ou au
Répertoire des métiers, agissant dans le simple exercice de leur
fonction professionnelle, pour laquelle ils étaient
rémunérés par leur employeurs, sans qu'il ait
été possible de trouver trace comptable de fournitures de
prestation ou de matériels correspondant à de la clientèle
; que les bénéficiaires de ces factures sans « en-tête
« commerciale doivent étaient encore identifiés dans 1) du
personnel des deux sociétés comme Daniel M... chef d'atelier
Mettetal, Michel N..., chef d'équipe d'électricité, Michel
O..., chef magasinier, Lequilleu, technico-commercial, 2) des personnels de
sociétés fournisseurs ou clients comme Bernard P..., directeur
des achats chez CEAC, DD..., employé Volvo, Ismaël Q..., magasinier
chez Talbot, qui a reçu des « commissions « ;
B) sur la destination des biens et l'enregistrement comptable ;
que sont visés par la prévention :- les dépenses
personnelles même liées à l'activité,- l'achat de
biens de consommation à des fins personnelles ou pour servir de
commissions ou pour favoriser des entreprises dans lesquelles l'un ou l'autre
des consorts A... était directement ou indirectement
intéressé ; 1) la qualification d'absence de conformité
à l'objet et l'intérêt sociaux est corroboré par la
reconnaissance des prévenus, par la malversation accompagnant les
enregistrements comptables ;
A) Joëlle C... (ex-EE... au moment des faits), chef de
service unique des comptabilités des deux sociétés, avait
travaillé sous l'autorité d'André A..., avait
indiqué qu'elle ne cherchait pas à comprendre, faisant ce que les
A... lui demandaient de faire, et explique aussi qu'elle avait eu une liaison
avec René A... qui, à ses dires, se serait achevée en 1993
; qu'elle reconnaissait avoir commis des irrégularités parmi
lesquelles les fausses factures destinées à justifier les
chèques de sociétés tirés par André et
René A..., la non-immobilisation des véhicules, les importants
retraits d'espèces, les abus de biens sociaux qui se faisaient avec la
carte bleue et les chéquiers des sociétés et les
décaissements compensés par les fausses factures ; qu'il
était difficile pour le service comptable, d'obtenir les factures des
achats pour faire les rapprochements, de sorte que beaucoup de dépenses
étaient
La responsabilité du commissaire aux
comptes
336
en attente de rapprochement, situation que l'expert-comptable
Y... avait vivement critiquée ; que Joëlle C... a aussi
précisé que ces achats disparaissaient ; que Marcelle Y... lui
disait qu'il fallait absolument qu'elle obtienne des justificatifs ; qu'elle a
confirmé l'existence de « dépenses n'entrant pas dans
l'objet social « telles que voyage, notes d'hôtels, dépenses
alimentaires..., qu'elle se bornait à enregistrer d'après les
justificatifs qu'André A... lui donnait sans pouvoir rien dire ; qu'elle
indiquait que René A... (fils) demandait des espèces et remettait
des factures « visant à couvrir ces sorties « ; qu'elle
était au courant des factures sans en-tête commerciale ; qu'elle a
identifié, dans les pièces jointes, les factures d'achats de
marchandise celles qui étaient destinées à faire des
cadeaux dont certains ont pu être « revendus «, d'autres ayant
servi « pour le compte personnel des A... » ; qu'elle a
expliqué qu'au vu de ces factures, elle effectuait les imputations
fournisseurs ; que c'est au niveau des instructions données à
l'atelier que le défaut de facturation de certains clients était
décidé par M. A... ; que les salariés
bénéficiaient de remises sur les pièces-auto, selon «
l'humeur du jour des A... » ; qu'elle a enregistré des factures
achats « RGA « dont elle dirait que le responsable K... était
« très proche « du fils A... ; qu'il arrivait que « des
clients « demandent des appareil hi-fi, TV, frigidaires etc., avec demande
de faire figurer des « pièces-auto « sur leur facture ; que
les A..., lui remettait des factures à en-tête de
société « extérieures « dont ils avaient
personnellement rédigé le contenu, ce qui leur permettaient de
justifier des sorties de caisses et de banque ; que des biens, achetés
par l'une des sociétés, comme des véhicules, motos,
scooters, frigidaires étaient destinés à être vendus
à des clients et étaient comptabilisés en achats et il n'y
avait pas « de trace de cession « de ces biens ; que, quand des biens
achetés dans ces conditions, y compris des véhicules, devaient
être enregistrés en « immobilisations «, M. A...
écrivait à son intention « Immo « sur la facture ;
qu'elle a reconnu que les matériels, hi-fi,
électro-ménagers, camping, voyages... (dont Brandt qui figurait
dans les comptes « achats, fournisseurs «) n'avaient pas de rapport
avec les pièces-auto, que ces biens allaient « chez des clients
«, que les factures étaient prises en charge par l'employée
Gatherdle, avec les bons de livraison, après visa d'André A... ;
qu'une partie était « facturée « comme « achat de
pièces «, par exemple « pour se faire offrir un bien personnel
«, une « télé « ; que Joëlle C... a
expliqué la méthode théorique du « cadeau commercial
ou de fidélité « ; que, lorsqu'on décide d'un tel
cadeau, celui-ci doit figurer dans les charges et figure sur la facture-client,
comme on le ferait pour une ristourne ou sur une facture spéciale ; que
la « sortie « doit également figurer sur une pièce
comptable ; qu'en l'espèce, les magasiniers faisaient « les bons de
livraisons « à partir desquels étaient éditées
les factures qui comprenaient un libellé faussé (des
pièces auto remplaçant l'énoncé réel du
bien) ; qu'elle expliquait, par opposition, que les achats « hors objet
social «, permettaient de faire bénéficier certains clients
de cadeaux, sous couvert de facturation de pièces ; qu'il existait un
compte « cadeaux-clientèle « mais les achats encaissés
n'y ont pas été imputés, sous réserve de voyages ;
que Joëlle C... se souvenait des factures sans « entête «
commerciale où figuraient les noms des salariés ou clients, MM.
E... (salarié de Mettetal) ou D... (employé de Volvo) ; que ces
factures étaient « payées « avec le
chéquier-société de René A... (fils) ; qu'elle a
enregistré en « achat « de nombreuses dépenses
personnelles de A... ayant eu beaucoup de mal à obtenir des
justificatifs de leur part, ces derniers servant souvent « à
couvrir des sorties de caisse « demandées à
l'employée F... qui ne pouvait qu'accepter ; que les A... avaient chacun
un chéquier de la société, c'est-à-dire René
et René-Louis A..., dès lors qu'André A... était
lui, le président ; qu'ils avaient également des cartes bleues de
la société, qu'ils utilisaient à des fins personnelles
;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
337
que Joëlle C... comptabilisait en « achat « ces
diverses utilisations personnelles ; qu'il s'agissait souvent de paiement de
restaurant, de voyages, mais de toute façon elle n'avait que la trace du
paiement, du débit, mais elle ne connaissait pas le vrai motif de la
dépense, les A... lui disait ce qu'ils voulaient des justificatifs ;
qu'il en était de même pour les factures d'entretien et de
paiement de primes d'assurance de véhicules A... ou de proches de
ceux-ci ; que, s'agissant d'achat de pièces et moteurs d'occasion
effectués par les « deux sociétés «, Joëlle
C... indiquait que les A... achetaient du matériel d'occasion qui
était convoyé en Afrique avec une facturation et des documents
douaniers ; que des matériels d'occasions venaient d'achats aux
enchères ; que pour les livraisons de matériels en Corse, tous
les mois, avec un kilométrage important, Joëlle C... n'a pas
disposé de facturation ; que, s'agissant des sociétés
camerounaises, les frères A... avaient des intérêts dans
une société Fulcam basé à Douala qui fabriquait des
batteries ; que cette société a « mal fonctionné
« (selon les dires de Claude Z...) et les A... ont constitué une
société « 3G « qui avait une activité de
négoce de pièces automobiles ; que Claude Z... a rappelé,
qu'après la reprise de Mettetal, André A... s'est servi de
l'en-tête pour faire une demande de visa d'un an, pour se rendre à
Douala, en utilisant la fausse qualité de directeur commercial (alors
qu'il n'était plus rien dans aucune des deux sociétés), en
faisant signer cette lettre à Joëlle C..., à l'époque
très liée au fils, ce que cette dernière a confirmé
; que la SA Martin a établi des factures de livraisons de pièces
automobiles à « 3G « que cette dernière n'a pas
payées ; qu'en mars 1992, le fils A..., repris comme salarié, qui
connaissait l'entrepris Giao, (marque Fulmen-batteries) a expliqué
à Claude Z... qu'il fallait profiter d'un voyage organisé par
CEAC pour se faire « connaître « ; que René A...
connaissait l'entreprise CEAC et s'était réservé le
marché des batteries ; que les époux Z... sont donc partis ; que
Claude Z... n'a compris qu'après ce voyage qu'il y avait eu
détournement de marchandises pour le Cameroun et poursuite pendant son
absence de systèmes de fausses facturations, rendues possibles
grâce à l'absence de restitution des anciens chéquiers-CB
de la société Mettetal d'avant la cession ; qu'il a encore
été établi que les A..., et essentiellement René
A..., ont fait des règlements au garage RGA (sigle de René A...
Automobile), le garage de Bastia dirigé par K..., règlements qui
correspondaient aux factures retrouvées, dans un grand désordre,
par les époux Z..., et déposées en procédure ;
qu'à l'examen des talons de chèque correspondant à une
facture, Monique Z... a découvert que le chèque a
été émis à l'ordre même de Mme R...
(mère de René-Louis et grand-mère de René A...) ;
qu'à cette époque du 12 mai 1992, date du chèque, les
A..., employés de l'une et de l'autre des sociétés
cédées bénéficiaient d'une délégation
de signature sur les comptes des deux sociétés jusqu'à 5
000 francs ; que Monique Z... ne reconnaissait ni son écriture dans le
libellé ni sa signature ; que Joëlle C... a confirmé le fait
précisant que ce chèque à l'ordre de Mme R... avait
été établi par le comptable à la demande de
René A... qui avait néanmoins seul rempli l'ordre, au nom de sa
grand-mère ; que des salariés ont témoigné dans le
même sens de la fausse facturation, justification des achats et
redistributions des biens ; que Mme F... a témoigné que
René A... (appelé le neveu) achetait des voitures et des motos ;
que celui-ci, comme André et René-Louis A... demandaient
fréquemment des chéquiers commerciaux à Joëlle C...
pour faire des achats présentés comme « publicitaires «
ou pour payer des voyages qu'ils faisaient en Corse ou au Cameroun ; que le
« neveu « A... faisait « passer « des dépenses
personnelles sur la caisse de la SA Martin, notamment des dépenses en
restaurant ; que le témoin a expliqué que René A...
faisait des fausses factures, faisait facturer à un magasin une
livraison non effectuée aux clients ; qu'elle recevait ensuite les
La responsabilité du commissaire aux
comptes
338
plaintes desdits clients qui disaient ne pas avoir reçu le
matériel indiqué sur la facture ; que, sur instruction de
René A..., le magasinier contacté par ses soins pour
vérification, lui disait de faire un avoir au client ; qu'elle
connaissait la société camerounaise Fulcam à Douala,
où son mari, électricien, s'était rendu pour conseiller
André A... en matière électrique ; que Mme S... : elle a
témoigné que « les A... » faisaient des cadeaux, dits
« promotions «, à des clients, la partie « facturation
« étant assurée par Mme F... ; qu'elle même
établissait de fausses factures au non de la SA Martin pour justifier
des sorties de fonds ; que le fils A... (René) avait un train de vie
particulièrement élevé, « des voitures haut de gamme
et des motos « ; qu'à la demande de Joëlle C..., elle avait
« passé « ces investissements en « achat « de
marchandise, de même qu'elle enregistrait « sur le compte de la
société « les dépenses personnelles des « A...
» ainsi que leurs voyages en Corse et en Afrique où André
A... avait une société « 3 G « au Cameroun ;
qu'Isabelle T... , opératrice de saisie informatique, qui a tenu la
comptabilité fournisseur en 1987, donc deux à trois ans avant le
début des faits, a indiqué que dans les factures d'achats qui lui
étaient apportées, en grand nombre par « les A... » et
Joëlle C..., il y avait des factures correspondant à des achats
personnels (alimentation, vestimentaire, voyages et hôtels,
matériels électro-ménagers, vins et spiritueux) « des
«
A... ; que, dans ces cas-là, Joëlle C... lui disait
de les passer « en achat normal « c'est-à-dire dans les
comptes « 607 achat de marchandises « ; que « les A... »
payaient avec la carte bleue de la société, et il était
difficile d'identifier de type d'achat ; qu'André et son fils
René A... menaient un train de vie élevé et c'était
surtout le fils qui « frimait « ; que celui-ci « faisait «
des fausses factures, décrites dans les mêmes termes que sa
collègue YY... quant aux protestations des clients et aux annulations de
factures ; que René A... lui disait alors que « cela allait passer
sans que le client s'en aperçoive, ce qui n'a pas été le
cas ; que René A... a finalement cessé de « faire ce type de
fausses factures « ; que Catherine U..., employée de bureau chez
Mettetal, qui disait avoir menti dans sa première audition du 29 mars
1996 par peur des A... qu'elle craignait physiquement, a relaté la
« visite « de René A... quelques semaines avant sa
deuxième audition du 18 juin 1996 : qu'il avait demandé à
M. U..., présent, quelles questions la police avait posé ; que le
mari, non au courant, n'avait rien pu lui dire ; que René A... avait dit
à ce dernier qu'il était passé à la mairie
d'Orgeval devenue l'employeur de Catherine U..., aide ménagère
pour la mairie ; qu'elle craignait toujours les représailles ; qu'elle
expliquait les fausses factures au sein de Mettetal, à la demande «
des « A..., pour justifier la sortie de fonds, que René A... lui
demandait et qu'elle devait prendre dans la caisse de Mettetal ; que, pour
justifier ces « sorties «, elle « retirait « des factures
de vente de clients qui payait en espèces, René A... lui
demandait ainsi de 3 000 à 5 000 francs par mois ; que ce même
René A... demandait au personnel d'augmenter les fiches d'inventaires
qu'elle appelait « compté à la louche «, il lui a
« fait payer des réparations et achats de pièces pour son
véhicule personnel « ; qu'André A... lui faisait taper, sur
des feuilles blanches, sans en-tête commerciale, des libellés de
factures en liaison avec une société à Douala, ce, en
plusieurs exemplaires ; que René A... lui demandait le même
établissement de factures sur feuilles blanches, lui indiquant leur
contenu : qu'il s'agissait de rembourser des notes de restaurant personnelles,
comme à Forges-les-Eaux, des « repas pris avec son copain D...
» (employé Volvo), de « surfacturer certaines factures pour
englober les cadeaux faits aux employés des clients « ; que, sur
instructions, les chefs d'atelier de Mettetal, M. J... et Mantou, lui faisaient
facturer « de la vente de pièces « à des clients qui
faisaient réparer tout en
La responsabilité du commissaire aux
comptes
339
ne faisant pas apparaître la mention «
réparation « ou « remise en état « sur les
factures car ces employés de clients qui avaient ces pièces se
seraient « fait disputer « par leurs employeurs qui avaient aussi un
service de réparation ; que, pour les marchés publics, les
sociétés Martin et Mettetal ne devaient pas dépasser le
« budget « de 300 000 francs ; que si le marché
dépassait ce montant, le marché « était
tronçonné sur plusieurs entreprises (citées par le
témoin) qui servaient de prête-nom et prenaient, vis-à-vis
de Mettetal, un pourcentage oscillant entre 3 et 5 % du montant de la facture ;
que ces entreprises envoyaient à Mettetal des factures vierges,
numérotées, que Mettetal devait rédiger ; que ces
entreprises extérieures reversaient à Mettetal ces sommes
facturées « pour « cette dernière, aux
ministères concernés, moins leur commission ; que Mettetal leur
adressait ensuite une « facture de vente de pièces pour justifier
le retour d'argent « ; que d'autres salariés des deux
sociétés ont fait état de « refacturations «,
pour ces « cadeaux « dont la nature a été
confirmées ; 1) O..., chef magasinier (qualifié de très
proche des A... par le personnel), qui a bénéficié
lui-même de machine à laver, micro-ondes, TV, pièces pour
son véhicule, sans mention de ces rémunérations sur ses
fiches de paye ou FF..., représentant, qui ont fait état de
facturation aux clients par le biais de « surfacturation «, le
premier refusant de dire quels étaient les «
bénéficiaires «, 2) R. V..., chef de magasin chez la SA
Martin, pour qui divers cadeaux étaient considérés comme
des ristournes, refacturés aux clients sous forme de prestations ou de
matériels « imaginaires « ; qu'il s'agissait dans ce cas d'un
habillage visant à faire payer des clients-sociétés, les
cadeaux faits aux employés de ces clients ; 3) GG..., magasinier chez
Mettetal, qui parlait de cadeaux livres a des clients en tant que ristournes ;
Ios Sudétés-dienies ou tes garac ^ ss-uïentô faisaient
facturer une prestation de service ou un achat de pièces pour couvrir
les cadeaux ; 4) J. C. HH..., représentant de Mettetal, ou R. H...,
représentant de la SA Martin, (le premier ayant eu « des A...
» la demande de « proposer « aux clients différents
cadeaux) pour qui la société surfacturait les pièces
« réellement livrées « à fins d'englober le prix
des cadeaux, visant à faire payer aux clients les cadeaux faits aux
préposés de ces derniers ; qu'il a lui même
bénéficié d'un chèque de 10 800 francs, une facture
de même montant a été découverte concernant la
pseudo-vente par Mettetal, à la société Sansac, de pompes
à injection ; que II... a confirmé qu'il s'agissait d'une fausse
facture ; que début 1992, René A... avait refusé de lui
donner une
commission alors que Mettetal avait pu obtenir un gros
marché avec l'armée, avec de très courtes marges ; que
René A... l'a finalement payé 10 800 francs en établissant
la fausse facture Sansac ; 5) E. JJ..., représentant chez Mettetal, a
assuré lui-même la livraison d'un tracteur-tondeuse à gazon
dans un garage Citroën ; 6) H..., représentant et animateur de
l'équipe, qui personnellement n'a fait que des remises de vins de
tradition aux clients garagistes connaissait le système des cadeaux mais
il ne peut pas citer les bénéficiaires tellement ils
étaient nombreux ; 7) KK..., technicien chez Mettetal, pour qui,
à chaque fois qu'un client avait un cadeau, René A... se
remboursait sur le client en établissant une facture d'une vente fictive
et le client payait en réalité le cadeau dont
bénéficiait le salarié ; que le témoin
précisait « nous débitions un produit ou une prestation
fictive qui couvrait une fois ou une fois et demi le montant du cadeau ; que
des bénéficiaires ont été identifiés dans
des sociétés extérieures, parmi lesquels : 1) M. K... pour
lequel il y a eu notamment remise de deux téléviseurs, pour ses
enfants, refacturés, 2) M. W..., directeur commercial chez Scania,
constructeur de poids lourds, client régulier de Mettetal pour la
peinture de déflecteurs de camions, réservoirs et pour la
fourniture de peintures, diluants et vernis, a obtenu une cuisine
aménagée, un système d'alarme,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
340
une multitude d'appareils payés par Mettetal ; que M.
XX..., acheteur chez Scania, a bénéficié de la Fiat Tipo
et de sa 205 déjà évoquées, selon René A...
; que LL..., employé de la Via-France, a eu des placards Lapeyre
payé par Mettetal ; que MM..., directeur commercial de la CEAC, qui a
bénéficié d'une machine séchante valant 3 573, 91
francs de la part de René A..., que ce dernier a fait payer par
Mettetal, en échange de quoi la CEAC a payé une facture de 11 385
francs pour une prestation que Mettetal n'a jamais fournie ; que D...,
responsable des marchés poids lourds chez Volvo-France, a reçu en
« échange de fournitures de marché «, des
chèques et liquidités, rétribué par René
A... ; que parmi les fausses factures, l'une était au nom de Raymond
D... (père) qui lui n'avait aucune fonction chez Volvo ; que René
D... et J. C. D... revendaient en outre des pièces extraites des
réparations des camions chez Mettetal, au lieu de restituer les
pièces à Volvo ; que ces pièces étaient revendues
à des tiers et le produit des ventes étaient répartis
entre eux ; que ce personnage a très largement
bénéficié des avantages en argent et en nature des biens
de l'une ou l'autre des sociétés, notamment Mettetal ; 2) le
caractere abusif ; que, pour les consorts A..., ces « cadeaux «
étaient distribués dans le cadre d'une politique commerciale,
sans préjudice financier pour l'une ou l'autre des
sociétés ; qu'André A... a indiqué que les
véhicules, motos et accessoires étaient comptabilisés en
« achats «, parce qu'ils étaient destinés aux clients,
ce choix s'inscrivait dans le cadre de la politique commerciale promotionnelle,
que les cadeaux faisaient partie du jeu commercial, pour faire face à la
concurrence ; qu'en ce qui concerne tout ce qui était
électro-ménager, il le faisait depuis vingt ans, d'abord avec son
père qui selon René A... il était « parfaitement dans
son droit «, et que cette politique commerciale avait pour but de
maintenir et de développer le chiffre d'affaires et n'a pas «
été mise en place de gaîté de coeur « ; que
René A..., qui donnait les mêmes explications, invoquait en outre
que la société signait « un contrat avec les clients aux
termes duquel s'ils atteignaient un chiffre d'affaires fixé, ils
obtiendraient un cadeau « ; que le choix était fait par
l'équipe commerciale dans le cadre de la politique promotionnelle, mais
le choix était fait sur catalogue par les clients ; que
René-Louis A... achetait des pièces d'occasion, selon son
frère André, la société les revendant après
leur remise en état, la société étant
spécialement équipée pour reconditionner des moteurs et
pièces-moteurs ; que tous reconnaissaient la matérialité
des achats pour faire des « cadeaux », André A...
précisant, contre la réalité comptable, unanimement
décrite par les personnels, que les cadeaux étaient
destinés à être donnés ou « revendue «,
dans ce cas, avec bénéfice « aux clients ou décideurs
des sociétés clientes « ; que si cette politique soutenait
ou augmentait artificiellement le chiffre d'affaires et faussait
l'appréciation réelle de la rentabilité des deux
sociétés, c'était résiduel et ne
représentait que 2 % des achats annuels ; qu'André A...
reconnaissait que certains voyages payés par les deux
sociétés étaient des voyages d'agrément ou
personnel, tel celui de Mme F... au sein de l'entreprise Fulcam de Douala
(oubliant de rappeler que le mari a travaillé chez Fulcam dans ses
fonctions d'électricien) ; que, pour régulariser et compenser
« a posteriori « ces dépenses personnelles, André A...
a prétendu avoir réglé sur ses deniers personnels une
somme d'environ 80 000 francs ; que certaines factures et expéditions
étaient relatives, comme l'admettait André A... à son
« business personnel « en Afrique, et certains intermédiaires
étaient payés en espèces pour améliorer les rouages
commerciaux, qu'il appelait « habillage de commissions « qu'il
répugnait néanmoins à appeler « fausses factures
« permettant de décaisser des fonds servant aux versements de
prétendues commissions ; que, pour leur marché avec l'Afrique et
sa société 3G, il avait besoin d'une en-tête commerciale et
il utilisait celle de Martin ou de Mettetal ; qu'André A... minimisait
les faits et
La responsabilité du commissaire aux
comptes
341
malversations au motif qu'ils auraient été
effectués dans l'interêt des sociétés ; qu'il
contestait avoir escroqué Claude Z... en lui présentant des
comptes des trois derniers exercices ; qu'il est même, en fin
d'instruction, revenu sur ses précédentes déclarations
concernant la prise en compte par les deux sociétés de ses
dépenses personnelles ; que, devant le tribunal, il indiquait que s'il
avait voulu sortir de l'argent à son profit, il n'aurait pas fait de
chèque, que s'il y avait des factures sans en-tête, c'était
quand même des sommes « réellement payées «, que
le matériel n'a jamais été envoyé au Cameroun
où il revendait les batteries, cette société camerounaise
étant un client qui payait régulièrement les factures ;
que, pour ses marchés avec l'Afrique et notamment les
expéditions, outre les SA Martin et Mettetal, André A...
utilisait aussi d'autres entités juridiques, Mobird Limited et Guercam
Limited à Jersey ; qu'il contestait des expéditions à 3G
(Cameroun) de matériels achetés par Martin et Mettetal
après la cession des deux sociétés, ce malgré
l'existence de factures de ventes de pièces vers l'Afrique par Mettetal
; qu'il est rappelé que malgré leur dénégations,
André et René A... ont été vus par un chef
d'atelier chez Martin jusqu'en 1994 (Pascal G...) et salarié depuis
1981, insusceptible de commettre une quelconque erreur après la cession
des deux sociétés, emporter dans leurs voitures des cartons et
des sacs ; que René-Louis A... a contesté toutes malversations et
même la notion d'anomalies, se retranchant notamment derrière le
fait qu'il ne s'occupait pas des aspects administratif et comptable des deux
sociétés et affirmait que les achats effectués rentraient
dans les objets sociaux des deux sociétés ; qu'il reconnaissait
néanmoins avoir « contribué à utiliser les
chéquiers commerciaux « des deux sociétés
postérieurement à leurs cessions, mais c'était, à
ses dires, avec l'accord de Claude Z... ce qui était contesté par
ce dernier ; qu'il a fini par reconnaître les pratiques d'encaissements
de factures hors comptabilité, des cadeaux aux clients dont des
véhicules, de revente de biens achetés sans qu'ils aient
été comptabilisés, de la fausse facturation
destinée à « compenser des cadeaux commerciaux ou à
habiller des commissions « ; qu'il s'agissait « d'inscrire sur une
facture, la vente bidon d'une pièce de façon à couvrir le
montant d'un cadeau « ; que, comme son frère André, il a
reconnu la prise en charge par leurs deux sociétés des assurances
et frais d'entretien des véhicules personnels ; que divers
matériels payés par Mettetal et SA Martin ont été
découverts à son domicile personnel ; que René A..., qui a
admis la cogestion dans les sociétés Martin et Mettetal avec son
père André et son oncle René-Louis, a reconnu la pratique
des cadeaux aux bons clients, incluant notamment des véhicules, des
voyages à Casablanca pour un agent de Renault, au Caire à un
garagiste d'Andresy..., de la prise en charge, par les deux
sociétés, de certains de ces voyages privés en Corse, de
l'acquisition de son téléviseur ou des réparations de ses
véhicules dont une Porsche « prêtée «, de
même qu'il a reconnu la fausse facturation ou « surfacturation
« aux clients de certains des achats effectués par les deux
sociétés, cadeaux à J. P. K... et à NN..., de gros
électroménagers, avoir été l'auteur de six factures
à l'en-tête de RGA, ne correspondant à aucune prestation,
dont les montants ont été payés à sa
grand-mère, à titre de remboursement mais sans justifications de
ce qu'il aurait contracté des dettes envers cette personne ; qu'il a
encore reconnu avoir fait expédier, chaque année, en Corse, six
batteries destinées au bateau de son père, aux frais de Mettetal
; qu'il a également cité trois de ses relations garagistes ayant
bénéficié d'une moto (OO... à Groissy, PP...,
même ville et XX... déjà bénéficiaire de deux
voitures) ; qu'en fin d'instruction, se contredisant et revenant sur ses
préalables affirmations, il prétendait ne jamais avoir fait payer
des dépenses personnelles par l'une ou par l'autre des
sociétés, si ce n'est les réparations et les assurances de
véhicules ; qu'il prétendait alors, aussi, que les
La responsabilité du commissaire aux
comptes
342
espèces qu'il se faisait remettre par le service unique de
la comptabilité étaient destinées à payer les
commissions à des salariées de clients dans le cadre de la «
politique commerciale maison « ; que, devant le tribunal, il ajoutait que
certains voyages « aboutissaient à des ventes « que les «
factures étaient faites pour sortir des espèces pour l'atelier de
modernisation « qu'à l'achat du « matériel d'occasion
«, il reconnaissait qu'il utilisait le compte de sa grand-mère ;
qu'in fine, il concluait que Claude Z... avait très mal fait son travail
et qu'il avait essayé de l'aider ; qu'il n'a pas justifié de
prétendus déplacements professionnels à Tanger pour une
prétendue prospection du marché des compresseurs d'air qui n'a
évidemment débouché sur aucun contrat ; que, s'agissant de
ses prélèvements d'espèces, il prétendait qu'il
s'agissait de remboursements de frais, toujours avec justificatifs,
contrairement aux dires unanimes du personnel du service de comptabilité
; que les assurances de ses véhicules entraient dans le cadre d'une
assurance « flotte « forfaitaire ; que, s'agissant de ses signatures
de chèques avec le chéquier de la société, il
prétendait avoir la signature pour tous montants jusqu'à 11 KF ou
12 KF (au lieu de 500 francs), n'avoir fait aucun chèques de
dépenses personnelles ; qu'ainsi, l'auto-justification que René
A... s'est octroyée en prétendant que Claude Z... a
effectué des achats entre le 20 janvier et le 24 octobre 1992
relevé manuscrit de vingt-sept opérations dont quatre fois un nom
illisible suivi de la mention « travail au noir «, auprès de
Lapeyre-Art de Vivre-Darty... dont un abri de jardin pour un total de 62 784,
83 francs, n'est pas une preuve et en tout cas est sans intérêt
pour des achats effectués par les consorts A... dans la période
antérieure à la cession ; que ne sont pas plus pertinents les
autres éléments d'appréciation de mise en place des «
cadeaux fidélités «, pour n'intéresser s'agissant de
voyages que 1987 / 1989, ou une production de carte postale en photocopie,
côté texte et adresse, non compostée ou la copie vierge,
non datée, non renseignée quant au nom des sociétés
intéressées, relative à une prétendue convention
d'avance en produit ou des exemplaires illisibles compostés «
Automobile Talbot « d'avril 1993 qui pourraient être des bons de
livraisons, dactylographiés avec ajout, manuscrits, du mot « Avance
« ; que les destinations des objets-marchandises-fonds ne méritent
pas la qualification de ristournes ou cadeaux traditionnels ou de substituts
à la publicité, compte tenu des moyens d'enregistrements
comptables frauduleux ; que sur la non-conformité à l'objet et
à l'intérêt sociaux ; 1) il est observé que les
méthodes d'enregistrement, des sorties des fonds-objets essentiellement,
caractérisent des faits de fausses écritures comptables ou de
commerce en ce que les dépenses personnelles non justifiées et
enregistrées sous couvert de faux justificatifs, au demeurant difficiles
à obtenir pour le service comptable, ne sont pas
caractérisées comme exposées pour l'intérêt
de la société Martin ou Mettetal ;- les sorties de
marchandises-auto ou étrangères à l'objet social,
après rachats par Martin ou Mettetal, ont été
justifiées par des fausses factures soit par augmentation d'une facture
destinée à la société pour se rembourser de la
valeur de l'offre faite au salarié de cette dernière, soit par
l'envoi de factures à des clients sans lien avec le
bénéficiaire, que ce client proteste ou non (cas de René
A...) et bénéficie d'un avoir correctif et faux dans la
comptabilité elle-même, la refacturation n'étant nullement
justificative dès lors qu'elle est la réalisation d'un faux ; que
les faits de faux subsistent même s'ils n'ont pas été
poursuivis comme tels indépendamment de la manifestation de la
volonté délinquante attachées aux délit d'abus de
biens sociaux ; 2) il est observé que les
destinataires-bénéficiaires desdits achats et les donateurs, SA
Martin et Mettetal à travers l'action de ses dirigeants de droit et de
fait, ont reçu ou donné de façon illicite des objets
marchandises pour accomplir le simple devoir de leur fonction :- les premiers,
pour
La responsabilité du commissaire aux
comptes
343
recevoir des clients ou des fournisseurs et passer ou recevoir
des commandes auprès de Martin ou Mettetal, les « présents
« ne constituant qu'une rémunération sans droit, un objet de
corruption ;- les seconds, pour avoir remis ces objets de corruption pour
obtenir des préférences quant aux marchés à
conclure ou à maintenir avec un salarié de ces
sociétés cocontractantes de Mettetal ou SA Martin ; qu'un choix
de politique commerciale n'est admissible que s'il ne met pas en cause la
loyauté et la légalité du commerce ; que ces deux types de
comportements sont ceux de fraudeurs et de corrupteurs par les dirigeants et
font encourir des risques pénaux dès leurs commissions et pendant
les trois années postérieures, et la déclaration à
l'époque de civilement responsable de deux sociétés vis
à vis des victimes qui se ferait connaître, y compris un
acquéreur de deux sociétés dirigées par MM. A...
est sans influence ; 3) à l'égard des salariés, objets des
mêmes comportements de « cadeaux «, hors commissions
régulières, hors primes conventionnelles et exceptionnelles non
inscrite sur le bulletin de salaire ou non déduites des salaires, il a
également été procédé à des faux et
corruption d'employés qui font encourir des risque pénaux,
fiscaux, sociaux en ce que, pour ces derniers risques, des
pénalités financières et intérêts de retard
sont encourus, peu important qu'en 2007 ces risques financiers ne puissent plus
être mis en oeuvre, alors que le risque était actuel et perdurait
pendant les années où les titulaires des droits pouvaient les
récupérer ; 4) sont sans intérêts les arguments
tirés :- de la jurisprudence du Conseil d'Etat de 1983 selon laquelle
les cadeaux ou charges revêtant un caractère illégal ne
pouvait être déduits,- de la doctrine fiscale de 1988 pour
laquelle aurait importé le caractère illégal ou illicite
dont serait assortis les cadeaux, à partir du moment où ils
représentent un intérêts certain pour l'entreprise ; que ce
qui importe c'est de déterminer la nature abusive du cadeau au regard
des objets et intérêts sociaux ; que le cadeau conçu comme
entrant dans l'objet social ou conforme à l'intérêt social
est celui que la tradition admet comme tel (réception
représentation, de faible valeur à l'époque conçu
comme voisin de 200 francs au sens du code général des
impôts, confère à la société
bénéficiaire et non à l'un de ses salariés à
l'insu de celle-ci) qui ne se transforme pas, par sa fréquence,
périodicité, montant sans la contrepartie équivalente, en
objet de corruption dont, en l'espèce, d'excellent exemples sont
relevés dans les cas E..., employé ou D... (salarié
Volvo), le cadeau étant régulièrement inscrit au budget et
repris dans les comptes annuels en clôture d'exercice sans faux comptable
; que pourtant, il était aisé de respecter les prescriptions
légales puisqu'il existait un compte « cadeaux-clientèle
«, sur lequel rappelait Joëlle C..., ces achats n'ont pas
été imputés (sauf les voyages) ; que les abus de biens
sociaux de l'espèce, générateurs de préjudice ; que
la « récupération « des coûts d'achats par les
surfacturations faites aux sociétés tierces, des dépenses
personnelles par des facturations d'autrui ou sous couvert d'autres charges ne
font pas disparaître le préjudice financier créé
dans son actualité du début de 1992 tant les risques financiers
encourus, que par l'impact sur des valeurs financières et
dépenses engagées pendant les trois précédentes
années non couvertes par quelques procédés frauduleux que
ce soit et partant sur la fiabilité des renseignements
communiquées à Claude Z... courant 1991 jusqu'à la date de
cession des actions des deux sociétés ; que fut également
une cause de préjudice, l'atteinte à la réputation des
deux sociétés, connue par les sociétés
cocontractantes, par les employés se prêtant aux
dévoiements directoriaux ; qu'il n'importe qu'a posteriori, un
expert-comptable, pour le compte de Marcelle Y..., qui l'en avait requis, ait
cru pouvoir distinguer dans les divers achats des dépenses qu'il
prétendait « conforme « de celles qui se seraient «
supposées abusives « pour chacune des
La responsabilité du commissaire aux
comptes
344
sociétés et ait cru pouvoir fixer entre 88 et 90 %
les dépenses jugées par lui « normales « pour en
conclure que, si préjudice il y a lieu, il est infime par rapport aux
montant des achats, soit de 4 % en moyenne du montant des achats par les
consorts A... ; qu'aucun de ces faits d'abus de biens sociaux n'est couvert par
la prescription ; qu'en effet, la prescription ne commence à courir
qu'à compter du jour où les faits ont pu être
constatés dans des conditions permettant l'exercice de l'action
publique, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce,- ni
à compter de l'assemblée générale d'approbation des
comptes de l'exercice commençant le 1er avril 1989 jusqu'au 31 mars
1990, qui se tient au plus tard dans les six mois de la clôture de
l'exercice (30 septembre 1990),- ni à compter de la supervision des
comptes et l'établissement des comptes annuels, qui a lieu au jour
où la liasse fiscale est acheminée, laquelle comprend les comptes
annuels et annexes, c'est-à-dire au plus tard à la fin des trois
mois suivants la clôture de l'exercice (30 juin 1990) mais a
été le cas au jour où la victime a déposé
plainte c'est-à-dire le 19 mai 1994 permettant l'engagement de la
procédure de poursuites des faits jusqu'à lors restés
dissimulés, comme le démontrent les détails de
perpétration des faits ;
» et aux motifs que les délits dont les consorts A...
ont été déclarés coupables ont causé des
préjudices à diverses personnes, en tout cas à celle des
personnes à qui les éléments de comptes ou la
totalité de ceux-ci ont été communiqués, l'acheteur
des sociétés, trompé sur la consistance de l'objet de son
achat ; que la valeur d'achat des actions des deux sociétés a
été fixée à 10 millions de francs alors que,
à fin décembre 1991 :- les deux sociétés avaient
été pillées par des payements d'achats, des retraits
d'espèces ou des émissions de chèques, les premiers
cédés ou donnés à des tiers ou employés,
hors contrepartie, les seconds, pour des besoins personnels hors salaires, au
titre des abus de biens sociaux au cours des années 1991 et
antérieures ;- il y avait eu fraude à la TVA et fraude quant
à l'évaluation des stocks, délits ayant, en plus des
précédentes conséquences des abus de biens sociaux
trompé l'acheteur, sur les valeurs patrimoniales des exercices objets de
la communication ;- des faux, encore utilisés fin 1991, non
détectés, qui avaient couverts les abus de biens sociaux et
escroqueries tant pour fausses factures que par fausses imputations comptables,
contribuaient à tromper l'acheteur lors de sa prise de connaissance des
comptes ; que les réparations dues à ces titres sont
indépendantes des éventuelles condamnations à l'extension
de la liquidation judiciaire et ses conséquences ; que la cour estime
que la fraude à la TVA a été couverte par l'abandon en
compte courant et la garantie toutes deux provisoires, à cinq ans et dix
ans ; que les prévenus avaient été renvoyés devant
le tribunal correctionnel comme ayant causé les détournements,
escroqueries suivantes et ont été condamnés par le
tribunal :
ORTC
Tribunal alloué
Demandes PC
Du chef d'abus de biens sociaux
1 459 155 francs (Martin)
978 808 francs (Mettetal)
La responsabilité du commissaire aux
comptes
345
Faux bilans produits
3 266 134 francs (trois années) Escroquerie TVA
1 832 627 francs
Limité à 340 000 francs Faux écritures
2 159 364 francs Totaux
9 696 088 francs 9 956 016 francs
5 285 169 euros 1 478 159 euros
1 517 785 euros
Réduit devant la cour d'appel à
3 496 161 euros (c'est-à-dire 22 933 312 francs)
les 1 517 785 euros ne représentant que la perte
d'investissement de SFF selon la critique de la partie civile ; qu'il est
d'abord observé que le choix du recours à l'emprunt à
hauteur de 9, 5 millions de francs n'a relevé que de la SFF / Claude
Z... et que tous les intérêts, frais, garanties, etc., ne sont pas
inclus dans le préjudice résultant directement de l'infraction
qui en toute hypothèse et logique ne peut atteindre près de 23
millions de francs ; que la cour ne saurait ordonner que la réparation
des préjudices résultant directement des atteintes à la
valeur financière de l'acquisition, dans les limites des poursuites,
c'est-à-dire en fonction des montants retenus et des périodes
concernées, soit :- pour les abus de biens sociaux commis courant 1990
et 1991 en excluant les faits répertoriés mais commis avant le
1er janvier 1990, la cour évalue le préjudice matériel
à 2 437 963 francs ou 371 665, 06 euros ;- pour l'escroquerie à
la TVA commise du 1er avril 1990 au 31 décembre 1991, la cour
évalue le préjudice à 340 000 francs ou 51 832, 67 euros
;- pour l'escroquerie aux bilans dont stocks commise de novembre 1991 à
courant 1992 courant sur les exercices * : J33- 1S » 0 et 1G91 faisant
apparaître des résultats frauduleusement améliorés
pour les trois exercices antérieurs à la cession litigieuse, la
cour constate que l'amélioration des stocks doit être
limitée au montant énoncé dans la prévention de 3
266 134 francs (au lieu de 3 314 359 francs), soit 497 918, 91 euros ;- pour
les faux en écriture de commerce et usages du 19 mai 1991 à fin
1991 au sein de Mettetal et Martin par facturations non causées et
mentions inexactes sur achats et ventes pour un total évalué
à 2 159 364 francs, la cour
La responsabilité du commissaire aux
comptes
346
jugeant que lesdites fausses facturations d'achats et de ventes
correspondant à une définition différente des abus de
biens sociaux, cause en l'espèce un préjudice calqué sur
celui des abus de biens sociaux dont elles constituent le moyen de
réalisation ; qu'il y a lieu d'en déduire que le préjudice
matériel résultant des faux et usage de faux est
déjà réparé ;
» 1°) alors que le délit d'abus de biens sociaux
ne peut être imputé qu'aux dirigeants de fait ou de droit de la
société dont les biens ont été utilisés
à des fins contraires à son intérêt ; qu'en
l'espèce, la cession des sociétés Mettetal et Martin est
intervenue pour prendre effet au 1er janvier 1992, de sorte qu'en reprochant
aux consorts A... d'avoir fait des fonds des entreprises un usage contraire
à leur intérêt en payant des factures
postérieurement à la date à laquelle ils avaient perdu la
qualité de dirigeants desdites sociétés, et en
appréciant sur cette base l'étendue du préjudice qu'aurait
subi la société Financière Z..., la cour d'appel, qui n'a
pas justifié de la qualité de gérants de fait de MM. A...
postérieurement à l'acte de cession, a violé les articles
visés au moyen ;
» 2°) alors que le délit d'abus de biens sociaux
porte atteinte au patrimoine social de l'entreprise de sorte que l'actionnaire
de la société qui n'exerce pas l'action ut singuli ne peut subir
qu'un préjudice indirect ; que la cour d'appel, qui reçoit la
constitution de partie civile de la société Financière
Z... en raison de l'atteinte portée par les abus de biens sociaux
reprochés aux consorts A... à la valeur financière de
l'acquisition qu'elle a faite des sociétés Mettetal et Martin, a
violé les articles visés au moyen « ; Sur le
quatrième moyen de cassation proposé par la société
civile profesionnelle Thouin-Palat et Boucard pour André, René et
René-Louis A..., pris de la violation des articles 405 de l'ancien code
pénal, 313-1 du code pénal, 2, 591 et 593 du code de
procédure pénale ;
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré André, René-Louis et René coupables
d'escroquerie à la TVA et d'escroquerie au bilan, a reçu la
constitution de partie civile de la société Financière
Z..., et les a condamnés à verser à cette dernière
les sommes de 51 832, 67 euros et de 497 918, 91 euros en réparation de
son préjudice résultant de ces délits ;
» aux motifs qu'il résulte de l'information que les
résultats des sociétés Martin et Mettetal, clos au 31 mars
1990, au 31 mars 1991, et de la période du 1er avril 1991 au 31
décembre 1991 ont été artificiellement surestimés
par une minoration des achats comptabilisés et une majoration
corrélative de la TVA récupérée sur les achats et
frais généraux ; 1) la matérialité des faits ; que,
pour les trois périodes ci-dessus énoncées visées
à la prévention, les minorations d'achats et les montants de TVA
récupérés à tort s'établissent à un
total de 1 832 627 francs, soit 902 627 francs pour la société
Martin et 950 000 francs pour la SA Mettetal ; que Joelle C..., chef du service
comptable, et les employées ont exposé leur mise en oeuvre
matérielle de la pratique frauduleuse ; que le commissaire aux comptes,
prédécesseur de Bernard AA..., avait évoqué devant
elle la possibilité de malversations sur ce point, lui indiquant qu'on
pouvait facilement « se donner un crédit de la TVA » en
augmentant les totaux de la TVA et en diminuant parallèlement, dans la
même mesure, les montants hors taxe » ; qu'il s'agissait d'une
« fraude facile à faire et difficile à détecter
» ; qu'au lieu de garder cela pour elle, elle avait
répercuté l'information « en plaisantant » à
André A... qui lui avait dit d'appliquer la méthode en lui disant
: « Vous savez ce qu'il vous reste à faire » ; que Joëlle
C... a expliqué l'intérêt de la fraude et la méthode
: a) ce type de fraude avait un double intérêt : diminuer le
montant des charges, le montant de la TVA à payer ; que le but
d'André A... était surtout de payer moins de TVA ; b) elle a fait
augmenter, sur les journaux d'achats
La responsabilité du commissaire aux
comptes
347
manuels, le montant de la taxe sur la valeur ajoutée
à récupérer, tout en diminuant du même montant les
montants hors taxe pour que les montants toutes taxes comprises soient
équivalents ; qu'elle n'utilisait que des sommes « rondes » et
seulement sur les totaux, car un calcul par achat aurait demandé trop de
travail ; qu'à la demande d'André A..., elle a dit aux autres
employées du service (Véronique YY..., Isabelle T... ) qu'il
fallait procéder ainsi, mais avec de petites sommes pour que cela ne se
voit pas ; qu'Isabelle T... a indiqué que Joëlle C... lui avait
demandé « d'augmenter les taux de la TVA déductible »
et elle savait que la pratique s'était poursuivie avec sa
collègue ; que Véronique YY... a expliqué qu'elle a
augmenté les écritures de C..., c'est-à-dire qu'elle
diminuait le « total hors taxe du folio » et augmentait la taxe sur
la valeur ajoutée de la somme correspondante ; qu'André et
René-Louis A... ont reconnu ces faits, chacun admettant savoir que
c'était illégal ; qu'ils ont expliqué que l'origine de la
fraude venait d'une erreur d'une salariée de la SA Martin,
détectée par Joëlle C... qui en a fait part à
André A... ; que l'erreur tenait à la ventilation de la taxe sur
la valeur ajoutée, fait par une personne des achats ; qu'André
A... s'est rendu compte, à ce moment-là, qu'on pouvait «
sans trop de danger d'être découverts » modifier les taux de
la taxe sur la valeur ajoutée, afin de minorer la taxe sur la valeur
ajoutée à payer ; que René-Louis A... a donné la
même origine, ajoutant « on pouvait changer les chiffres sans trop
de risque de se faire prendre » ; que Joëlle C... avait repris le
système, que cela ne pouvait être éventuellement que son
frère (André) qui lui en avait donné l'ordre ;
qu'André A... a aussi indiqué que « quelqu'un du FISC, qui
était de passage ou un fiscaliste leur avait dit que c'était une
pratique courante ; que l'objectif de la fraude en cette matière
était de diminuer le montant de la taxe sur la valeur ajoutée
à reverser au Trésor, ou encore « d'augmenter les taux de la
taxe sur la valeur ajoutée payer auprès des fournisseurs pour
avoir moins de taxe sur la valeur ajoutée à payer à l'Etat
» ; que cette minoration de la taxe sur la valeur ajoutée
permettait corrélativement de diminuer les montants hors taxe de leurs
achats, donc de leurs charges ; qu'André A... a ajouté que la
société avait des problèmes avec la taxe sur la valeur
ajoutée car (les sociétés) avaient des marchés avec
l'Etat, qui payait tardivement alors qu'ils devaient régler
immédiatement la taxe sur la valeur ajoutée aux fournisseurs ;
qu'André A... a finalement reconnu avoir « donné un accord
» pour récupérer la taxe sur la valeur ajoutée et a
ajouté avoir « régularisé » auprès de son
successeur ; que René-Louis A... a reconnu que c'était l'ancien
commissaire aux comptes qui avait donné « l'idée à
Joëlle C... », il était au courant mais ne s'en occupait pas ;
que, quant à René A..., il en a « entendu parler » ; 2)
sur la prescription, selon les frères A... s'agissant de la poursuite du
chef d'escroquerie dite « à la TVA » ; que la prescription
serait acquise au motif qu'il n'y aurait pas de plainte préalable
interruptive de prescription de l'administration fiscale ; que, cependant, il a
déjà été expliqué que cette escroquerie
était un délit de droit commun ; que ces faits sont relatifs,
selon la prévention, à la période du 14 mai 1991 à
la fin de l'année 1991 ; qu'une première rectification s'impose :
la plainte assortie d'une constitution de partie civile des consorts Z... est
du 19 mai 1994 ; que le cours de la prescription se décompte, donc pour
de telles qualifications d'escroquerie, à compter du 19 mai 1991 ;
qu'une deuxième rectification s'impose : en application des articles 287
et annexe IV article 39 du code général des impôts, les
déclarations de taxe sur le chiffre d'affaires étaient à
souscrire, chaque mois, en l'espèce, selon les numéros
d'identification des sociétés, les 23 ou 24 du mois suivant ;
qu'ainsi les déclarations des 23 ou 24 mai 1991 intéressaient les
faits générateurs d'avril 1991, qui sont inclus dans les
débats ; 3) l'intention coupable et le préjudice ; qu'elle se
déduit du but
La responsabilité du commissaire aux
comptes
348
poursuivi et de la méthode frauduleuse employée ;
que l'ensemble des éléments constitutifs du délit sont
caractérisés à l'encontre des consorts A... ; que la
fraude avouée permettait aux deux sociétés de se procurer
aisément de la trésorerie ; que l'amélioration du
bénéfice en était la conséquence inéluctable
et causait un préjudice, indépendamment du Trésor public,
à l'acquéreur des actions des sociétés,
trompé par l'affectation du résultat ; que, s'agissant des
montants de fraude, Joëlle C... a indiqué que, pour « fixer
les augmentations de la TVA », elle se basait sur les ventes de
façon à ce que « nous n'ayons pas ou peu de TVA à
payer » ; qu'elle a quelques fois indiqué les montants des sommes
à augmenter sur les totaux de taxe sur la valeur ajoutée «
dans les journaux d'achats », mais Catherine YY... en avait aussi
l'initiative ; qu'elles s'arrangeaient pour « savoir ce qu'il fallait
déclarer dans la TVA ajoutée déductible » par rapport
aux ventes ; que Joelle C... estimait que cela faisait 30 000 et 50 000 francs
par mois ; qu'elle avait institué un code de maquillage comptable par
« croix », chacune valant 10 000 francs de fraude ; que
Véronique YY..., à qui Joëlle C... donnait des sommes
rondes, indiquait qu'à chaque fois ces dernières étaient
généralement de 10 000 ou 20 000 francs ; qu'André A... a
admis que ces montants de fraude étaient de 10 000, 20 000 et
jusqu'à 50 000 francs par mois ; que Joëlle C... lui rendait compte
de ce qu'elle « changeait » mais pas tout le temps ; qu'il fallait
souvent qu'il lui demande où « on » en était ; que,
pour les sociétés Martin et Mettetal, selon le rapport d'audit de
M. ZZ... il y a eu majoration systématique chaque mois de août
1989 à novembre 1991 pour un montant mensuel (détaillé de
10 à 40 KF) et en avril 1990 (280 000 francs) par montants de sommes
« rondes » à trois exceptions près sur trois mois de
1990 ; que la synthèse du rapport sur les sommes indûment
récupérées au titre de la TVA ;
Exercice clos
1er mars 1990
1er mars 1991
situation au 31 décembre 1991
SA Martin
62 007
90 620
150 000
SA Mettetal
70 000
70 000
190 000
Totaux
La responsabilité du commissaire aux
comptes
349
132 007
160 620
340 000
Total général : 1 832 627
que, compte tenu de la période limitée de la
prévention, le préjudice résultant du délit
poursuivi est limité à 340 000 francs : constitutif du risque
fiscal ; qu'en revanche, pour une victime comme Claude Z..., qui a eu
accès, de droit, en sa qualité d'acquéreur des deux
sociétés, à l'ensemble des comptes des trois exercices,
c'est-à-dire depuis l'exercice clos du 31 mars 1989, le total
général supérieur à 1, 8 millions de francs est le
montant sur lequel il a effectivement été trompé à
compter de fin 1991 lorsqu'il a examiné lesdits comptes au titre de
l'usage des faux ;
» et aux motifs qu'il est rappelé que la
prévention vise la présentation de fausses situations comptables
de courant novembre 1991 et courant 1992 au titre des escroqueries aux bilans,
ceux-ci concernant les exercices 1989, 1990, 1991 pour obtenir la remise de 10
millions de francs près avoir fait apparaître des résultats
frauduleusement améliorés ; que, par conséquent, si le
comportement de Claude Z... après le 2 janvier 1992 peut avoir un
intérêt sur des causes de faillite, il est indifférent
quant à l'évaluation de situation au-delà du 31
décembre 1991, et plus précisément au-delà du
dernier inventaire de 1991 ; que, sur la prescription afférente à
l'escroquerie au bilan, il est rappelé que la société
commerciale doit souscrire la déclaration de résultat dans les
trois mois de la clôture de l'exercice (au 30 juin en l'espèce) ;
que la liasse fiscale contient les comptes annuels (bilan, compte de
résultats - annexes) ; qu'ainsi, au 19 mai 1991, les
sociétés étaient en cours d'établissement des
comptes de l'exercice 1er avril 1990 au 31 mars 1991 qu'elles devaient joindre
à la déclaration de résultat ; qu'en conséquence,
le contenu des comptes de l'exercice 1er avril 1990 au 31 mars 1991, pour
l'établissement desquels il aurait été fait usage de faux,
ne sont pas concernés par la prescription ; qu'enfin, les comptes
annuels-bilan-compte de résultats comportent en parallèle, pour
chaque poste, en colonne adjacente, les montants chiffrés repris de
l'année précédente (N-1) ; qu'en l'espèce, les
bilans et comptes de résultats de l'année N (1er avril 1990 au 31
mars 1991) portaient les données chiffrées de l'année
(N-1) (c'est-à-dire du 1er avril 1989 au 31 mars 1990) ; que, pour ce
deuxième motif, aucune prescription ne sera retenue s'agissant des
manoeuvres frauduleuses tenant à des usages de faux commis au cours de
l'exercice 1er avril 1989 au 31 mars 1990 ; qu'il a été
établi, par l'information, que les stocks de la société SA
Martin ont été majorés d'un montant total de 1 433 507
francs en 1990 et 1991, à l'aide de fiches d'inventaires
falsifiées, répertoriant des pièces provenant de la
société Mettetal, ne faisant pas l'objet de factures d'achats, et
des pièces laissées en dépôt par les constructeurs
Scania et Volvo ; que la version des consorts A... a consisté à
indiquer que le stock a été transféré dans les
locaux de Mettetal au moment de l'incendie chez la SA Martin en 1986, et n'y
est jamais revenu ; que les modifications de fiches d'inventaires
n'étaient, pour eux, que des régularisations, pour
la comptabilité, et non une double comptabilisation des stocks Mettetal
chez la SA Martin ; que, pour les pièces Scania et Volvo, il s'agissait
de pièces achetées sans facture et revendues dans les mêmes
conditions, afin de dégager de la trésorerie, nécessaire
pour la rémunération de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
350
certains intermédiaires ; qu'il en était
déduit que les sociétés Martin et Mettetal
présentaient donc des résultats bénéficiaires qui
ne reflétaient pas leur image fidèle, car elles auraient dû
présenter des pertes ; que l'employée comptable, Isabelle T... ,
a constaté que les pièces figuraient sur les fiches d'inventaires
falsifiées, ne pouvaient pas être comptabilisées
informatiquement chez Martin, parce qu'il s'agissait de pièces ayant des
références de Mettetal ; que Joëlle C... a utilisé
des photocopies de fiches Mettetal concernées, suivant les instructions
d'André A... elle avait actualisé ces fiches afin de les imputer
sur Martin ; que Joëlle C... et Mme F... contredisaient la version
donnée par les consorts A... sur les suites de l'incendie de 1986 chez
Martin, qui a tout détruit ; que les A... avaient organisé une
braderie sur place, pour vendre le peu de stock à peu près
vendable ; que la procédure consistant à imputer du stock
Mettetal chez Martin datant de 1980 ; que Mme U... attestait que René
A... demandait au personnel d'augmenter les stocks sur les fiches d'inventaires
; que d'une manière générale, le stock n'était pas
comptabilisé selon les règles comptables régulières
; qu'après avoir reconnu, lors de ses auditions, les manipulations des
fiches de stocks de la SA Martin, expliquées par la procédure
adoptée à la suite de l'incendie, avec l'assentiment de
l'expert-comptable, André A... a contesté que Joëlle C...
ait agit selon ses instructions et avoir escroqué Claude Z... par la
présentation de comptes qui n'auraient pas reflété la
réalité comptable et financière des deux
sociétés vendues, affirmant, notamment concernant les stocks, que
leur estimation avait été contradictoire ; que René-Louis
A... a également commencé par reconnaître la falsification
des fiches d'inventaires ; que René A... avait admis une minoration des
stocks, mais c'était pour répondre à une exigence de
Claude Z... lors de la vente des sociétés ; que l'auditeur ZZ...
a estimé que les stocks de marchandises de la SA Martin ont
été majorés entre 1990 et 1991 avec incidence sur le
résultat ;
Au 31 mars 1990
Au 31 mars 1991
Au 31 décembre 1991
Majoration du stock
664 888 francs 1 215 964 francs 1 433 507 francs Incident sur le
résultat
664 888 francs 551 076 francs 217 543 francs
qu'il indiquait que ces majorations provenaient des pièces
référencées Mettetal apparues dans les stocks Martin sans
comptabilisation et de pièces dont le montant
La responsabilité du commissaire aux
comptes
351
aurait été retenu alors qu'elles appartenaient
à des déposants constructeurs (Volvo et Scania), ces
dépôts ayant été confirmés par les
magasiniers de Mettetal et par un responsable technique de Volvo, M. D... ;
que, sur ce point, les consorts A... ont produit une attestation de J. C. D...,
datée du 19 novembre 1993, dans laquelle, au contraire de ce qu'il avait
indiqué à l'auditeur, il écrivait, sur papier à
en-tête de Volvo véhicules industriels France SA (à
Chaville 92) « pour le compte de Volvo », qu'à la date du 31
décembre 1991, Volvo ne possédait aucun matériel en
dépôt dans les ateliers de Mettetal à Orgeval, destinataire
de l'attestation ; que la cour considère que cette attestation, faisant
état d'une absence de dépôt de pièces Volvo à
une date précise, le 31 décembre 1991 (ce qui ne modifie en rien
ce qu'il en était dans les temps précédents) n'est au
demeurant pas fiable lorsque la cour observe l'intérêt du
témoin à confirmer des affirmations des A..., compte tenu qu'il a
grassement été payé au cours des trois dernières
années et pouvait craindre, encore en 1993, que les actes de corruption
dont il avait grandement bénéficié seraient
découverts ou dénoncés et poursuivis ; que l'auditeur a
constaté :- dans les documents d'inventaire, que les relevés
d'inventaires d'exercices précédents avaient été
intégrés parmi les états justificatifs des inventaires
dressés à la clôture de chacun des exercices
vérifiés ; que certaines de ces feuilles attribuées
à la société Martin concernaient les
références de pièces de la société Mettetal,
dont la mention même était raturée ; que d'autres feuillets
laissaient apparaître le nom de salariés qui avaient quitté
Mettetal bien avant les dates d'inventaires examinés ;- que le montant
des stocks apparaissant au dernier bilan de la SA Martin paraissait être
suffisant pour permettre une exploitation normale alors que des magasiniers lui
ont déclaré avoir eu des difficultés pour satisfaire les
demandes des clients, le stock opérationnel était en permanence
d'un niveau insuffisant ;- que s'agissant de l'inventaire des stocks au 31
décembre 1991 de la SA Martin, il y avait pour 417 986 francs de
pièces de l'activité Mettetal laissées en
dépôt par Scania et Volvo ; que la chef comptable a donné
les explications suivantes : 1) pour faire l'inventaire chaque année, on
utilisait des fiches, mais il y en avait de deux sortes : les fiches
informatisées, pour le matériel qui avait une
référence à l'information ; que, pour ce matériel,
la gestion des stocks entrées / sorties n'était pas
informatisée ; que l'ordinateur sortait des listings avec des
références produits, en face desquelles les magasiniers notaient
le nombre ; que, ces nombres étaient enregistrés afin de calculer
le total et la valeur de ces stocks informatisés ; que, pour les
produits dont les références n'étaient pas
enregistrées à l'informatique, on établissait des fiches
manuelles rédigées à la main, et dont la valeur
était calculée sur une vieille machine à partir du prix ;
2) à propos de ces fiches, elle se souvenait avoir écrit Martin
sur des fiches que lui remettait André A..., car c'est lui qui recevait
toutes les fiches ; que ce qui est certain, c'est que toutes les fiches
anciennes, qui avaient servi de justificatif aux précédents
bilans, se trouvaient dans le bureau d'André A... et que si quelqu'un
voulait en faire une photocopie, il devait aller les chercher dans ce bureau ;
qu'il est possible qu'il se soit agit de photocopies de fiches d'inventaires de
1984, car figuraient dessus des noms de salariés n'exerçant plus
dans la société ; 3) s'agissant de la valorisation des stocks,
ceux-ci étaient enregistrés à la valeur du dernier achat,
c'est-à-dire la dernière facture ; qu'elle a appris en
travaillant ailleurs, ensuite, que ce n'était pas du tout une bonne
méthode de valorisation ; qu'en tout cas, le commissaire aux comptes
était parfaitement au courant, car elle lui photocopiait la
dernière facture fournisseur, qu'il joignait à la fiche de stocks
correspondant à ce fournisseur ; que la chef comptable, Joëlle C...
a indiqué également :- qu'André A... lui donnait des
fiches d'inventaires de Mettetal déjà remplies qu'il lui
demandait « d'actualiser » par des dates, une
La responsabilité du commissaire aux
comptes
352
inscription « Martin » au lieu de Mettetal ; qu'il
s'agissait de fiches d'inventaires anciennes qui n'avaient jamais fait l'objet
d'enregistrement comptable ;- que la valorisation des stocks ne se faisait par
aucune des méthodes Fifo ou prix moyen pondéré, mais selon
le prix d'achat de la dernière facture, ce qui valorisait le stock
surtout lorsqu'il était là depuis longtemps ;- qu'il n'y avait
pas d'inventaire des objets n'entrant pas dans l'objet social, le comptage du
stock se faisait uniquement au travers des inventaires physiques, ce qui
signifiait que les stocks étaient plus importants que ce qui avait
été vendu puisqu'ils « couvraient » pour partie des
objets hors objet social ;- que pour les stocks, on ne pouvait se fier qu'aux
inventaires physiques qui, s'ils n'étaient « pas réels
», faussaient le résultat, et il était « impossible de
rectifier » ; que la cour relève outre ces explications dites
pertinentes :que l'argument selon lequel le dernier inventaire avant la
cession, avait été contradictoire puisque Claude Z... y avait
assisté, n'est pas pertinent ; qu'en effet, les consorts A... ayant
été contraints d'en convenir, Claude Z... n'y a participé
que partiellement et ne pouvait accompagner les multiples personnes qui y
procédaient en divers étages des magasins, plusieurs jours
consécutifs ;- que les consorts A... ont été incapables,
au cours de la confrontation, de donner une explication logique concernant
l'augmentation de 1 225 000 francs du stock de la SA Martin entre le 31mars et
le 31 décembre 1991 ; qu'il est déduit de l'ensemble de ces
éléments factuels que les stocks ont été
frauduleusement majorés au cours des exercices 1989 au 31 mars 1990, du
1er avril 1990 au 31 mars 1991 et du 1er avril 1991 au 31 décembre 1991,
pour lesquels les comptes annuels ont été communiqués fin
1991 et courant 1992 au futur acquéreur Claude Z..., sans que soit en
cause la « valorisation » des stocks que le commissaire aux comptes
n'a pas critiquée et a même justifiée ; que la
conséquence de principe de la majoration des stocks ; qu'une majoration
de stock de la SA Martin a entraîné une majoration des
résultats ; que cette majoration a eu, comme il a déjà
été précisé, une conséquence directe
altérant l'image fidèle du résultat des opérations
de la société, de sa situation financière et de son
patrimoine, image dont tous les « destinataires », parmi lesquels se
trouve le cessionnaire des actions, tirent une appréciation qui lui est
préjudiciable lorsqu'il s'agit d'acquérir la
société dont la valeur patrimoniale est faussée ; qu'il
n'est pas critiquable que Claude Z... ait tenu compte d'une valeur de
pièces Volvo laissées en dépôt ce qui était
admis par les consorts A... et que nul n'a remis valablement en cause et
surtout par le nommé D... ; que l'évaluation de la majoration des
stocks ; qu'au 31 mars 1990, elle a été évaluée
à 664 888 francs et, au 31 mars 1991, à 1 015 521 francs, le
témoin Henri ZZ... précisant qu'il n'avait pas, pour ces
pièces, retrouvé trace de leur achat dans les comptes de la SA
Martin ; que le témoin a conclu que les résultats des trois
exercices des deux sociétés avaient été
bonifiés globalement de 1 433 507 francs ; que les résultats en
apparence bénéficiaires au regard des états financiers
étaient en réalité déficitaires ; que la correction
effectuée, par le témoin expert comptable, compte tenu des «
anomalies sur les achats et la TVA et la surévaluation des stocks aurait
dû aboutir, pour les deux sociétés à :- perte
cumulée au 31 mars 1990 à 998 926 francs contre prétendu
bénéfice de 197 969 francs ;- perte cumulée au 31 mars
1991 à 1 309 399 francs contre prétendu bénéfice de
202 297 francs ;
» et encore aux motifs que les délits dont les
consorts A... ont été déclarés coupables ont
causé des préjudices à diverses personnes, en tout cas
à celle des personnes à qui les éléments de comptes
ou la totalité de ceux-ci ont été communiqués,
l'acheteur des sociétés, trompé sur la consistance de
l'objet de son achat ; que la valeur d'achat des actions des deux
sociétés a été fixée à 10 millions de
francs alors que, à fin décembre 1991 :- les deux
sociétés avaient été pillées par des
payements
La responsabilité du commissaire aux
comptes
353
d'achats, des retraits d'espèces ou des émissions
de chèques, les premiers, cédés ou donnés à
des tiers ou employés, hors contrepartie, les seconds, pour des besoins
personnels hors salaires, au titre des abus de biens sociaux au cours des
années 1991 et antérieures ;- il y avait eu fraude à la
TVA et fraude quant à l'évaluation des stocks, délits
ayant, en plus des précédentes conséquences des abus de
biens sociaux, trompé l'acheteur, sur les valeurs patrimoniales des
exercices objets de la communication ;- des faux, encore utilisés fin
1991, non détectés qui avaient couverts les abus de biens sociaux
et escroqueries tant pour fausses factures que par fausses imputations
comptables, contribuaient à tromper l'acheteur lors de sa prise de
connaissance des comptes ; que les réparations dues à ces titres
sont indépendantes des éventuelles condamnations à
l'extension de la liquidation judiciaire et ses conséquences ; que la
cour estime que la fraude à la TVA a été couverte par
l'abandon en compte courant et la garantie toutes deux provisoires, à
cinq ans et dix ans ; que les prévenus avaient été
renvoyés devant le tribunal correctionnel comme ayant causé les
détournements, escroqueries suivantes et ont été
condamnés par le tribunal :
ORTC
Tribunal alloué
Demandes PC
Du chef d'abus de biens sociaux
1 459 155 francs (Martin)
978 808 francs (Mettetal)
Faux bilans produits
3 266 134 francs (trois années) Escroquerie TVA
1 832 627 francs
limité à 340 000 francs Faux écritures
2 159 364 francs Totaux
9 696 088 francs (9 956 016 francs)
5 285 169 euros 1 478 159 euros
La responsabilité du commissaire aux
comptes
354
1 517 785 euros
Réduit devant la cour d'appel à 3 496 161 euros
(c'est-à-dire 22 933 312 francs)
les 1 517 785 euros ne représentant que la perte
d'investissement de SFF selon la critique de la partie civile ; qu'il est
d'abord observé que le choix du recours à l'emprunt à
hauteur de 9, 5 millions de francs n'a relevé que de la SFF / Claude
Z... et que tous les intérêts, frais, garanties, etc., ne sont pas
inclus dans le préjudice résultant directement de l'infraction
qui, en toute hypothèse et logique, ne peut atteindre près de 23
millions de francs ; que la cour ne saurait ordonner que la réparation
des préjudices résultant directement des atteintes à la
valeur financière de l'acquisition, dans les limites des poursuites,
c'est-à-dire en fonction des montants retenus et des périodes
concernées, soit :- pour les abus de biens sociaux commis courant 1990
et 1991 en excluant les faits répertoriés mais commis avant le
1er janvier 1990, la cour évalue le préjudice matériel
à 2 437 963 francs ou 371 665, 06 euros ;- pour l'escroquerie à
la TVA commise du 1er avril 1990 au 31 décembre 1991, la cour
évalue le préjudice à 340 000 francs ou 51 832, 67 euros
;- pour l'escroquerie aux bilans dont stocks commise de novembre 1991 à
courant 1992 sur les exercices * : J33- 1S » 0 et 1G91 faisant
apparaître des résultats frauduleusement améliorés
pour les trois exercices antérieurs à la cession litigieuse, la
cour constate que l'amélioration des stocks doit être
limitée au montant énoncé dans la prévention de 3
266 134 francs (au lieu de 3 314 359 francs), soit 497 918, 91 euros ;- pour
les faux en écriture de commerce et usages du 19 mai 1991 à fin
1991 au sein de Mettetal et Martin par facturations non causées et
mentions inexactes sur achats et ventes pour un total évalué
à 2 159 364 francs, la cour jugeant que lesdites fausses facturations
d'achats et de ventes correspondant à une définition
différente des abus de biens sociaux, cause en l'espèce un
préjudice calqué sur celui des abus de biens sociaux dont elles
constituent le moyen de réalisation ; qu'il y a lieu d'en déduire
que le préjudice matériel résultant des faux et usage de
faux est déjà réparé ;
» 1°) alors que le préjudice est un
élément constitutif de l'escroquerie ; que la cour d'appel qui,
pour déclarer MM. A... coupables d'escroqueries à la TVA, s'est
fondée sur un simple risque fiscal, n'a pas légalement
justifié sa décision, violant les articles visés au moyen
;
» 2°) alors que nul n'est responsable pénalement
que de son propre fait ; qu'en se bornant à relever que René A...
avait entendu parler du mécanisme de majoration de la TVA
récupérée sur les achats et frais généraux,
la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la participation
personnelle de René A... à l'infraction poursuivie, a
violé les articles visés au moyen ;
» 3°) alors que, l'action civile appartient à la
personne qui a souffert d'un préjudice directement causé par
l'infraction ; que le délit d'escroquerie à la taxe sur la valeur
ajoutée consistant à majorer le montant de la taxe sur la valeur
ajoutée récupérée sur les achats et frais
généraux porte atteinte à la seule administration fiscale,
de sorte qu'en recevant la constitution de partie civile de la
société Financière Z... de ce chef de la
prévention, et en condamnant MM. A... à réparer le
préjudice en résultant pour cette société, la cour
d'appel a violé les articles visés au moyen « ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche
:
Attendu que les prévenus ne sauraient se faire un grief de
ce que la cour d'appel n'a
La responsabilité du commissaire aux
comptes
355
pas recherché s'ils avaient conservé la direction
de fait des sociétés MSGA et Martin, postérieurement
à la date de cession des titres de celles-ci à la
société Financière Z..., dès lors que les abus de
biens sociaux dont ils ont été déclarés coupables
ont été commis antérieurement à cette cession ;
Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche
:
Attendu que, pour déclarer André et
René-Louis A..., coupables d'escroqueries à la taxe sur la valeur
ajoutée, l'arrêt énonce que la fraude avouée,
consistant à minorer les totaux mensuels des achats comptabilisés
en charges et à majorer corrélativement la taxe sur la valeur
ajoutée récupérée, permettait aux
sociétés MSGA et Martin de se procurer de la trésorerie
;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations,
d'où il résulte que les faits ont nécessairement
causé préjudice à l'Etat, la cour d'appel a
justifié sa décision ; D'où il suit que les griefs ne sont
pas encourus ;
Mais sur le quatrième moyen, pris en sa deuxième
branche :
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les
motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la
contradiction des motifs équivaut à leur absence ; Attendu que,
pour déclarer René A... coupable d'escroqueries à la taxe
sur la valeur ajoutée, l'arrêt se borne à énoncer
que ce prévenu « en a entendu parler « ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seules
énonciations, qui ne caractérisent pas la participation
personnelle du prévenu à l'infraction poursuivie, la cour d'appel
n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, le
quatrième moyen, pris en sa deuxième branche ;
Vu l'article 2 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'action civile en
réparation du préjudice causé par un délit
n'appartient qu'à ceux qui ont personnellement souffert du dommage
directement causé par l'infraction ;
Attendu que, pour déclarer la société
Financière Z... recevable en sa constitution de partie civile des chefs
d'abus de biens sociaux et d'escroqueries à la taxe sur la valeur
ajoutée et lui allouer des dommages-intérêts du chef de ces
délits, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, d'une
part, le délit d'abus de biens sociaux ne cause un préjudice
personnel et direct qu'à la société elle-même, ses
actionnaires ne pouvant souffrir que d'un préjudice qui, à le
supposer établi, est indirect, d'autre part, les escroqueries à
la taxe sur la valeur ajoutée ont été commises au seul
préjudice de l'Etat, la cour d'appel a méconnu le texte
susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est de nouveau encourue de
ce chef ;
Et sur le premier moyen proposé par la
société civile professionnelle Piwnica et Molinié pour la
société Financière Z..., pris de la violation des articles
6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 457 de la loi
n° 66-537 du 24 juillet 1966 devenu L. 223-39, L. 241-8 et L. 242-27 du
code de commerce puis L. 820-7 du code de commerce, 2, 480-1, 593 du code de
procédure pénale ;
» en ce que l'arrêt attaqué a relaxé
Bernard AA... du chef du délit de non-révélation de faits
délictueux par commissaire aux comptes ;
» aux motifs qu'il n'est pas établi, au delà
de tout doute possible que Bernard AA... ait eu connaissance de la suite
significative, en nature des biens et fonds et en ampleur financière,
des détournements ou des escroqueries visant la taxe sur la valeur
La responsabilité du commissaire aux
comptes
356
ajoutée ou la surévaluation des stocks ou
même les moyens comptables de perpétration des délits ;
qu'il n'est pas établi qu'il ait manqué de vigilance au point
d'avoir sciemment laissé échapper un fait délictueux ;
qu'en effet, l'accomplissement des diligences, telles qu'observées par
Joëlle C..., ne contredit pas ce qu'il dénie comme étant
l'utilisation d'une technique de sondage ; qu'au surplus, il
bénéficiait du travail de révision des comptes de
l'expert-comptable ; qu'ainsi, s'agissant des stocks, il ne participait pas
à la comptabilisation des pièces, et ne pouvait pas
détecter d'anomalies sur ce point, tel que le doublement du comptage, ce
qui impliquait le pointage systématique par référence de
chacune des centaines de pièces par société, tel le
comptage de pièces qui ne s'y trouvaient pas ou plus, ou la
détection de pièces achetées et jamais enregistrées
ce qui aurait impliqué le pointage préalable des factures
d'achats comparées aux entrées et des factures de ventes qui ne
mentionnaient plus les mêmes références et natures de
pièces devenues des objets de corruption d'employés ou de tiers ;
qu'il n'avait pas de raison de suspecter la fausseté de tous ces
éléments de comptage matériel ; qu'au regard de la
valorisation des pièces, la méthode, qu'il n'a pas
critiquée, pouvait s'expliquer et être admise en l'absence
d'informatisation ; qu'en revanche la distorsion observée entre la
valeur du stock au 31 décembre 1991 renforcée du 30 juin 1992 par
rapport à celle énoncée aux 31 mars 1989-1990 1991 a
attiré son attention et a donné lieu à une réaction
de sa part, qu'il y lieu d'estimer adaptée, c'est-à-dire le
début de la procédure d'alerte ; qu'au surplus, l'administration
fiscale n'a rien critiqué sur ce point ; que s'agissant de ses
contrôles sur la taxe sur la valeur ajoutée collectée et
payée, il n'a décelé aucune anomalie d'après son
examen du dossier de contrôle établi par l'expert-comptable ;
qu'il n'avait aucune raison de douter de l'existence d'une majoration de la
taxe sur la valeur ajoutée déductible systématiquement
surtout en procédant par la technique de sondage, aucune diligence plus
étendue, plus systématique n'étant requise dans son
programme habituel ; que, s'agissant des abus de biens sociaux, et en raison de
la limite de ses contrôles, par sondages et muni des dossiers de
contrôle de l'expert-comptable, il n'est pas établi qu'il ait pu
détecter des malversations, les explications factuelles sur ce point
étant jugées pertinentes par la cour ; que
l'élément matériel de la non révélation de
faits délictueux dont il aurait eu connaissance n'est pas
caractérisé ; que le commissaire aux comptes doit être
relaxé ;
» 1°) alors que le commissaire aux comptes a
l'obligation de révéler au procureur de la République,
dès qu'il en a connaissance dans le cadre de sa mission, les
irrégularités susceptibles de recevoir une qualification
pénale, même si celle-ci ne peut en l'état être
définie avec précision ; qu'il résulte des propres
mentions de l'arrêt attaqué que les sociétés
Mettetal et Martin ont utilisé au cours des exercices 1990 et 1991 des
factures sans en-tête commerciale pour couvrir certains des abus de biens
sociaux commis au cours des mêmes exercices par André,
René-Louis et René A... avec la complicité de Joëlle
C... et de Marcelle Y... ; que la cour a constaté que de telles factures
et leur utilisation étaient constitutifs des délits de faux en
écritures de commerce et usage de faux ; qu'en relaxant Bernard AA... du
chef de non révélation par un commissaire aux comptes de faits
délictueux, sans rechercher si, dans le cadre de sa mission, il n'avait
pas eu connaissance de ce type de factures constitutives
d'irrégularités susceptibles de recevoir une qualification
pénale, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa
décision ;
» 2°) alors qu'il résulte de mentions de
l'arrêt attaqué que les sociétés Mettetal et Martin
ont enregistré dans leur comptabilité, au cours des exercices
1990 et 1991, des factures d'achats étrangères à leur
objet social telles que des factures d'achats
La responsabilité du commissaire aux
comptes
357
de voyage et d'hôtel, des factures de vins et de champagne,
des factures d'achats de motos, d'armes, de matériaux de jardin,
d'équipements pour la maison, de camping, d'habillement, de cycles, de
matériels Hifi TV Vidéo, de véhicules Peugeot, Audi, Fiat
Tipo, de réparation de Porsche, pour des montants très
élevés ; que de tels achats ont été
qualifiés par la cour d'appel comme étant constitutifs d'abus de
biens sociaux ; qu'en relaxant Bernard AA... du chef de
non-révélation de faits délictueux tels que ces abus de
biens sociaux au seul motif qu'il n'est pas établi qu'il aurait eu
connaissance de ces malversations, sans mieux s'expliquer et sans rechercher
si, dans le cadre de sa mission, il n'avait pas eu connaissance de ce type de
factures et d'enregistrements comptables, la cour d'appel a derechef
privé sa décision de base légale « ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les
motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la
contradiction des motifs équivaut à leur absence ; Attendu qu'il
résulte de l'arrêt que Bernard AA..., commissaire aux comptes des
sociétés MSGA et Martin, est poursuivi pour avoir omis de
dénoncer au procureur de la République des faits
délictueux commis au sein de ces sociétés par leurs
dirigeants ;
Attendu que, pour le renvoyer des fins de la poursuite,
l'arrêt énonce notamment que les comptes, certifiés sans
aucune réserve, comportaient des factures d'achat
étrangères à l'objet de la société, d'un
montant très élevé et des fausses factures sans
en-tête commerciale, destinées à couvrir des agissements
délictueux ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de
ses propres constatations que le prévenu avait eu nécessairement
connaissance, dans le cadre de sa mission, d'irrégularités
susceptibles de constituer des infractions à la loi pénale, la
cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce
chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second
moyen de la société Financière Z..., et les
cinquième et septième moyens d'André, René et
René-Louis A... ;
I-Sur le pourvoi d'André, René et René-Louis
A... contre l'arrêt du 22 novembre 2000 et de Marcelle Y... contre
l'arrêt du 11 octobre 2007 :
Les REJETTE ;
II-Sur les autres pourvois contre l'arrêt du 11 octobre
2007 :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel
de Versailles, en date du 11 octobre 2007, en toutes ses dispositions relatives
à René A... et en toutes ses dispositions civiles, toutes autres
dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit
à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les
limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris,
à ce désignée par délibération
spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application au profit de la
société Financière Z... de l'article 618-1 du code de
procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa
transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et
sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement
annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq
février deux mille neuf ;
En foi de quoi le présent arrêt a été
signé par le président, le rapporteur et le greffier
La responsabilité du commissaire aux
comptes
358
Annexe 22
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 29 Janvier 1963
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : REVELATION DES FAITS
DELICTUEUX
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 29 janvier 1963
N° de pourvoi: 61-91478
Publié au bulletin
Cassation
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS CASSATION SUR LES
POURVOIS DE : 1° X... (JEAN) ;
2° Y... (ROBERT) ;
3° Z... (JOSEPH) ;
4° DE A... (CHRISTIAN), CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL
DE PAU DU 15 FEVRIER 1961 QUI A CONDAMNE LE PREMIER A DEUX ANS D'EMPRISONNEMENT
AVEC SURSIS ET 1000 NOUVEAUX FRANCS D'AMENDE, LE SECOND A HUIT MOIS
D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 800 NOUVEAUX FRANCS D'AMENDE, LE TROISIEME A UN
AN D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 1000 NOUVEAUX FRANCS D'AMENDE,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
359
LE QUATRIEME A TROIS MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET 250
NOUVEAUX FRANCS D'AMENDE, POUR ABUS DE CONFIANCE, INFRACTION A LA LOI DU 24
JUILLET 1867 ET COMPLICITE LA COUR, JOIGNANT LES POURVOIS EN RAISON DE LA
CONNEXITE ;
SUR LES POURVOIS DE X..., Y... ET Z... ;
SUR LE MOYEN PRESENTE PAR X... ET LES TROIS PREMIERS MOYENS
PRESENTES PAR Y... ET Z... REUNIS ET PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 593 DU
CODE DE PROCEDURE PENALE, 59, 60, 408 DU CODE PENAL, 15, PARAGRAPHE 6 ET 7 DE
LA LOI DU 24 JUILLET 1867 ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE REPONSE,
INSUFFISANCE DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, 1° «EN CE QUE LA
COUR N'A PAS REPONDU AUX CHEFS ESSENTIELS DES CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT
SAISIE, SAVOIR LA DESIGNATION DES EXPERTS DEJA NOMMES PAR LA CHAMBRE CIVILE DE
LA COUR DE PAU, DANS LE BUT D'EXAMINER LES FAITS ESSENTIELS REPROCHES AU
DEMANDEUR, SOIT : 1°, LA DISCRIMINATION DES FAITS DE
«CARAMBOUILLAGE» COMMIS D'AOUT A NOVEMBRE 1953 PAR LES AUTRES
PREVENUS ET LES FAITS QUI POUVAIENT ETRE MIS A LA CHARGE DU DEMANDEUR AVANT SON
RENVOI DE LA SFG ;
2°, LA NATURE REELLE DE LA CESSION EN SEPTEMBRE 1950 DU
STOCK DE LA PARTICIPATION A LA SFG ;
3°, LA NATURE EXACTE DU PRETENDU DEBIT DE 6635392 FRANCS
PRIS EN CHARGE PAR LA SFG SUR LE COMPTE COURANT DU DEMANDEUR ;
»ALORS QUE TOUTE JURIDICTION, DE QUELQUE NATURE QU'ELLE SOIT
EST TENUE, A PEINE DE NULLITE, DE LA DECISION INTERVENUE, DE REPONDRE AUX
CONCLUSIONS QUI LUI ONT ETE REGULIEREMENT PRESENTEES ;
2° «EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE APRES AVOIR RECONNU
QUE LA SOCIETE FORESTIERE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DE GELOS AVAIT A
PLUSIEURS REPRISES FAIT APPEL A Z... DONT LES CONSEILS ET L'AIDE ETAIENT
SOLLICITES DANS LES MOMENTS DIFFICILES ET QUI AVAIT NOTAMMENT CONSENTI A SE
PORTER CAUTION POUR LA SOCIETE A CONCURRENCE DE DIX MILLIONS ET AVAIT DEPOSE A
LA BANQUE POPULAIRE DE DAX CINQ BILLETS A ORDRE DESTINES A REGLER CERTAINS
EFFETS IMPAYES ET SOUSCRITS PAR LA SOCIETE ET A AVANCER DES FONDS A CELLE-CI, A
DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DE COMPLICITE DANS LES FAITS D'INFRACTION A LA
LOI SUR LES SOCIETES ET D'ABUS DE CONFIANCE REPROCHE A CERTAINS DE SES
CO-INCULPES, PAR LE MOTIF QU'IL APPARAITRAIT QUE L'ASSIDUITE DONT A FAIT PREUVE
Z... AUPRES DE LA SOCIETE FORESTIERE ET L'INFLUENCE QU'IL Y A EXERCEE
N'AURAIT
La responsabilité du commissaire aux
comptes
360
TENDU QU'A SAUVER SES PROPRES INTERETS DANS L'ASSOCIATION EN
PARTICIPATION QU'IL AVAIT AVEC X... ET A PERMETTRE A CETTE ASSOCIATION DE TOUTE
EVIDENCE DEFICITAIRE A RENTRER DANS SES FONDS ET QUE L'ASSOCIATION EN
PARTICIPATION AURAIT COUTE A GELOS UNE SOMME DE HUIT A DIX MILLIONS DE FRANCS
ENVIRON ET QUE Z... BIEN QUE NE POUVANT ETRE CONSIDERE COMME ADMINISTRATEUR SE
SERAIT NEANMOINS PAR AIDES, CONSEILS ET ASSISTANCE CONSTANTE, RENDU COMPLICE
D'UN DETOURNEMENT D'ACTIF QUI N'A ETE REALISE PAR LES ADMINISTRATEURS DE GELOS,
PRINCIPALEMENT X... ET DE B... QUE DANS LEUR INTERET PROPRE, DETOURNEMENT DONT
Z... ANCIEN PARTICIPANT AURAIT DIRECTEMENT PROFITE ;
»ALORS QUE LES FAITS D'AIDE OU D'ASSISTANCE CONSTITUTIFS DE
LA COMPLICITE DOIVENT ETRE CARACTERISES ET QU'IL NE RESULTE PAS DES
ENONCIATIONS DE L'ARRET QUE Z... AIT AIDE EN QUOI QUE CE SOIT QUICONQUE A
COMMETTRE UN DETOURNEMENT DE BIENS SOCIAUX, A SUPPOSER CES DETOURNEMENTS
ETABLIS, PUISQUE AU CONTRAIRE IL RESULTE DE L'ARRET QUE Z... EST VENU A
PLUSIEURS REPRISES AU SECOURS DE LA SOCIETE EN RENFORCANT ET EN FACILITANT
L'ACTIVITE DE CELLE-CI PAR DES CAUTIONS DONNEES SUR SES BIENS PROPRES, OU LE
REGLEMENT DE DETTES DE LA SOCIETE DE SES PROPRES DENIERS ;
3° «EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE
DEMANDEUR COUPABLE DU DELIT PREVU ET REPRIME PAR LES ARTICLES 15, 6° ET
7° ET L'ARTICLE 45 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867, AU MOTIF QU'IL POURRAIT
ETRE CONSIDERE COMME ADMINISTRATEUR DE FAIT DE LA SOCIETE
FORESTIERE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DE GELOS ;
»ALORS QUE LE DELIT PREVU ET REPRIME PAR LA COMBINAISON DES
ARTICLES 15, 6° ET 7° DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867 ET L'ARTICLE 45 DE
LA MEME LOI NE PEUT ETRE CONSTITUE QU'A LA CHARGE DES ADMINISTRATEURS
REGULIEREMENT INVESTIS D'UN MANDAT SOCIAL ;
4° «EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A RETENU LE
DEMANDEUR DANS LES LIENS DE LA PREVENTION COMME COUPABLE D'ABUS DE CONFIANCE,
AU MOTIF QU'IL AURAIT PUISE DANS LA CAISSE SOCIALE ET PASSE DES ECRITURES SOUS
SA PROPRE AUTORITE DESQUELLES IL RESULTERAIT QU'IL AURAIT PRELEVE INDUMENT EN
1950, 173666 FRANCS, 1853381 FRANCS, 151626 FRANCS, SOIT AU TOTAL 2178623
FRANCS ;
»ALORS QUE LA DECISION ATTAQUEE QUI NE CONSTATE PAS QUE CES
PRELEVEMENTS AIENT ETE EFFECTUES A L'INSU DES DIRIGEANTS DE LA SOCIETE ET SE
CONTENTE D'AFFIRMER QUE Y... AURAIT INDUMENT PRELEVE DES SOMMES DANS LA CAISSE
SOCIALE N'A PAS CARACTERISE L'INTENTION FRAUDULEUSE QUI EST UN DES ELEMENTS
CONSTITUTIFS
La responsabilité du commissaire aux
comptes
361
ESSENTIEL DE L'ABUS DE CONFIANCE» ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS
PROPRES A JUSTIFIER LA DECISION ;
QUE L'INSUFFISANCE DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LA
SOCIETE FORESTIERE INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE DE GELOS, CREE SOUS FORME DE
SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE A ETE TRANSFORMEE EN SOCIETE ANONYME LE 27
OCTOBRE 1950 ;
QUE X... EN A ETE ADMINISTRATEUR DEPUIS CE JOUR JUSQU'AU 6
OCTOBRE 1953, DATE A LAQUELLE IL A DONNE SA DEMISSION ;
QU'IL A TOUCHE DES APPOINTEMENTS ELEVES ET QU'IL A PROCEDE A DES
PRELEVEMENTS IMPORTANTS ;
QUE SON COMPTE A LA SOCIETE ETAIT DEBITEUR DE 1576971 FRANCS AU
31 DECEMBRE 1952 ET DE 3672992 FRANCS AU JOUR DE LA FAILLITE ;
QU'AVANT SON DEPART, IL A FAIT CREDITER SON COMPTE DE 3078527
FRANCS, EN REMBOURSEMENT DE FRAIS DIVERS ;
QUE Y..., QUI N'ETAIT PAS ADMINISTRATEUR, MAIS CHARGE DE
FONCTIONS D'ORDRE COMPTABLE, COMMERCIAL ET FINANCIER, A ACCOMPLI DE SA PROPRE
INITIATIVE DES ACTES D'ADMINISTRATION ET DE GESTION ;
QU'IL A PRELEVE DE 1950 A 1952 DIFFERENTES SOMMES D'UN MONTANT
TOTAL DE 2178623 FRANCS ;
QUE Z... N'ETAIT PAS, LUI NON PLUS, ADMINISTRATEUR, MAIS QU'IL
AVAIT SOUSCRIT POUR UNE SOMME IMPORTANTE A L'AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA
SOCIETE ET QU'IL A CONSIDERE QU'IL AVAIT SUR ELLE UN DROIT DE REGARD POUR LA
SAUVEGARDE DE SES INTERETS ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
362
QU'IL ETAIT SOUVENT CONSULTE ET QUE SON AIDE ETAIT SOLLICITEE
DANS LES MOMENTS DIFFICILES ;
QU'EN SEPTEMBRE 1953 IL A CONSENTI A SE PORTER CAUTION AVEC LES
ADMINISTRATEURS POUR LE COMPTE DE LA SOCIETE A CONCURRENCE DE DIX MILLIONS DE
FRANCS ET QU'IL A DEPOSE A LA BANQUE POPULAIRE A DAX CINQ BILLETS A ORDRE POUR
REGLER DES EFFETS IMPAYES DE LA SOCIETE D'UN MONTANT DE PLUS DE QUATRE MILLIONS
DE FRANCS ;
QUE L'ARRET EN DEDUIT, «QUE BIEN QUE N'ETANT PAS
ADMINISTRATEUR, IL S'EST NEANMOINS PAR AIDE, CONSEIL ET ASSISTANCE CONSTANCE,
RENDU COMPLICE D'UN DETOURNEMENT D'ACTIF QUI N'A ETE REALISE PAR LES
ADMINISTRATEURS DE GELOS, PRINCIPALEMENT X... ET DE B... QUE DANS LEUR INTERET
PROPRE, DETOURNEMENT DONT IL A INDIRECTEMENT PROFITE» ;
QUE L'ARRET DEDUIT DE CES CONSTATATIONS QUE X..., Y... ET DEUX
AUTRES ONT, «SOIT DIRECTEMENT, SOIT PAR COMPLICITE COMMIS UN VERITABLE
DETOURNEMENT D'ACTIF, EN L'ESPECE LE DELIT PREVU ET REPRIME TANT PAR L'ARTICLE
15, PARAGRAPHE 1, 6 ET 7 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867 QUE PAR L'ARTICLE 408 DU
CODE PENAL» ;
ET QUE Z... EST CONVAINCU «DU DELIT DE COMPLICITE DE
DETOURNEMENT ET D'ABUS DE BIENS REPROCHES AUX ADMINISTRATEURS» ;
MAIS ATTENDU QUE CES ENONCIATIONS NE FONT PAS CONNAITRE, A LA
CHARGE DE X... ET DE Y..., CE DERNIER N'ETANT PAS, D'AILLEURS, ADMINISTRATEUR,
CEUX DES FAITS QUI CONSTITUERAIENT DES ABUS DE CONFIANCE, PREVUS PAR L'ARTICLE
408 DU CODE PENAL, ET CEUX QUI CONSTITUERAIENT DES ABUS DES BIENS SOCIAUX,
PREVUS PAR L'ARTICLE 15 DE LA LOI DE 1867 ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE L'ARRET NE CONSTATE PAS, EN CE QUI
CONCERNE LES FAITS D'ABUS DE CONFIANCE, EN VERTU DE QUEL CONTRAT, PREVU A
L'ARTICLE 408 PRECITE, LES FONDS AURAIENT ETE REMIS AUX PREVENUS, NI, EN CE QUI
CONCERNE LES FAITS D'ABUS DES BIENS SOCIAUX, QUE LES CONDITIONS PREVUES A
L'ARTICLE 15 DE LA LOI SUSVISEE SOIENT REMPLIES, NOTAMMENT QUE LES PREVENUS
AIENT AGI DE MAUVAISE FOI ;
QUE PAR CETTE INSUFFISANCE DE MOTIFS, LA COUR D'APPEL N'A PAS
JUSTIFIE SA DECISION A L'EGARD DE X... ET DE Y... ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
363
QUE, PAR SUITE, LE DELIT DE COMPLICITE DE CES DELITS NE SAURAIT
ETRE RETENU CONTRE Z..., ALORS D'AILLEURS QUE LES ENONCIATIONS DE L'ARRET NE
CARACTERISENT PAS A SA CHARGE DES FAITS DE COMPLICITE
;
SUR LE POURVOI DE A... : SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS
DELA VIOLATION DE L'ARTICLE 34 DE LA LOI DU 14 JUILLET 1867, DE L'ARTICLE 7 DE
LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE
LEGALE, «EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A RETENU DE A... DANS LES
LIENS DE LA PREVENTION POUR S'ETRE ABSTENU DE PORTER DES FAITS PRETENDUMENT
DELICTUEUX A LA CONNAISSANCE DU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE ;
»MOTIF PRIS DE CE QUE, «DE A... AURAIT DU EXAMINER
ATTENTIVEMENT LA REGULARITE DE LA CONSTITUTION DE LA SOCIETE ET LA SINCERITE DE
L'ACTE CONSTITUTIF QUE S'IL AVAIT VERIFIE L'ORIGINE DES APPORTS IL N'AURAIT PAS
MANQUE DE S'APERCEVOIR DE LA FAUSSETE DES DECLARATIONS FAITES DANS L'ACTE PAR
LES FONDATEURS ;
QUE DE A... A PRESENTE SON PREMIER RAPPORT A L'ASSEMBLEE GENERALE
DU 1ER DECEMBRE 1951 ET QU'A CETTE DATE IL AVAIT EU LE TEMPS DE S'INFORMER ET
DE VOIR FONCTIONNER LA SOCIETE» ;
»ALORS QUE D'UNE PART, DE TELS MOTIFS SONT ESSENTIELLEMENT
HYPOTHETIQUES ET DUBITATIFS ;
»ALORS QUE, D'AUTRE PART, LA RESPONSABILITE PENALE DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES N'EST ENGAGEE QUE SI CELUI-CI A EU CONNAISSANCE DES
FAITS DELICTUEUX QU'IL AURAIT DU SIGNALER AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE ET
QU'EN L'ESPECE, LES JUGES DU FOND NE CONSTATENT NULLEMENT CETTE CONNAISSANCE
;
»ALORS QU'ENFIN, LE DELIT REPROCHE A DE A... SUPPOSE UNE
INTENTION COUPABLE QUI N'EST PAS CONSTATEE PAR L'ARRET ATTAQUE» ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 34 DE LA LOI DU 24 JUILLET
1867 EST PUNI DES PEINES QU'IL EDICTE «TOUT COMMISSAIRE QUI A SCIEMMENT
DONNE OU CONFIRME DES INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE LA SOCIETE
OU QUI N'A PAS REVELE AU PROCUREUR DE LA
La responsabilité du commissaire aux
comptes
364
REPUBLIQUE LES FAITS DELICTUEUX DONT IL A EU CONNAISSANCE»
;
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET QUE DE A... A ETE, DES LA
PREMIERE ASSEMBLEE, EN OCTOBRE 1950, DESIGNE COMME COMMISSAIRE AUX COMPTES DE
LA SOCIETE, «QU'IL N'APPARAIT PAS QU'IL AIT PU TRES AISEMENT REMPLIR SA
MISSION LES RESPONSABLES DE LA SOCIETE AYANT MIS UN MAUVAIS VOULOIR CERTAIN A
LUI COMMUNIQUER LES DOCUMENTS NECESSAIRES A LA VERIFICATION DES OPERATIONS
SOCIALES» ;
QU'IL A FAIT UN RAPPORT LE 1ER DECEMBRE 1951 SUR L'EXERCICE DE
1950, QUI N'AVAIT DURE QUE DEUX MOIS ;
QUE, NE POUVANT OBTENIR LA COMMUNICATION DES ELEMENTS DE SON
RAPPORT POUR L'EXERCICE 1951, IL A DONNE SA DEMISSION LE 31 AOUT 1952 ;
QUE L'ARRET DECLARE QUE, SI LE PREVENU AVAIT FAIT LES
VERIFICATIONS NECESSAIRES, IL AURAIT PU S'APERCEVOIR DE LA FAUSSETE DES
DECLARATIONS DE LIBERATION DU CAPITAL, ET DU FAIT QUE LA SOCIETE AVAIT PRIS EN
CHARGE LE PASSIF D'UNE AUTRE SOCIETE DITE «LA PARTICIPATION» ;
QUE L'ARRET DEDUIT DES CONSTATATIONS QUI PRECEDENT QUE DE A...
«SOIT PAR NEGLIGENCE SOIT PAR COMPLAISANCE, A COMMIS LE DELIT D'ABSTENTION
PREVU ET PUNI PAR L'ARTICLE34 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867» ;
MAIS ATTENDU QU'IL NE RESULTE PAS DE CES ENONCIATIONS QUE LE
DEMANDEUR AIT EU CONNAISSANCE DE FAITS DELICTUEUX A LA CHARGE DES DIRIGEANTS DE
LA SOCIETE, NI PAR SUITE, QU'IL AIT ETE DE MAUVAISE FOI EN NE SIGNALANT PAS AU
PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE CEUX QUI AURAIENT ETE COMMIS ;
QUE, DE CE CHEF EGALEMENT, LA DECISION N'EST PAS JUSTIFIEE ;
PAR CES MOTIFS : ET, SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LE
QUATRIEME MOYEN PROPOSE PAR Y... ET Z... ;
CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PAU DU 15 FEVRIER
1961, DANS TOUTES SES DISPOSITIONS CONCERNANT X..., Y..., Z... ET DE A...
365
ET, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE
BORDEAUX PRESIDENT : M LEDOUX, CONSEILLER LE PLUS ANCIEN, FAISANT FONCTIONS -
RAPPORTEUR : M PIHIER - AVOCAT GENERAL : M BOUCHERON - AVOCATS : MM
MARTIN-MARTINIERE, RYZIGER ET BROUCHOT
Publication : Bulletin criminel 1963 N°
56
Titrages et résumés : 1°)
SOCIETE - SOCIETE PAR ACTIONS - USAGE FRAUDULEUX DES BIENS OU DU CREDIT DE LA
SOCIETE - MAUVAISE FOI - CONSTATATIONS NECESSAIRES.
1° DOIT ETRE CASSE L'ARRET QUI DECLARE LES DIRIGEANTS D'UNE
SOCIETE ANONYME (DONT CERTAINS N'ETAIENT PAS ADMINISTRATEURS) COUPABLES D'ABUS
DE CONFIANCE ET D'ABUS DES BIENS SOCIAUX, SANS PRECISER LES DELITS REPROCHES A
CHACUN D'EUX ET SANS CONSTATER LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE CHACUN DE CES
DELITS.
* ABUS DE CONFIANCE - Contrat - Constatations nécessaires.
* SOCIETES - Sociétés par actions - Usage frauduleux des biens ou
du crédit de la société - Poursuites simultanées
pour abus de confiance - Distinction des deux ordres de faits - Constatations
nécessaires. 2°) SOCIETES - SOCIETE PAR ACTIONS - SOCIETE ANONYME -
COMMISSAIRE AUX COMPTES - NON-REVELATION DE FAITS DELICTUEUX - MAUVAISE FOI -
CONSTATATIONS NECESSAIRES.
2° L'ARRET QUI DECLARE UN COMMISSAIRE AUX COMPTES COUPABLE
DU DELIT PREVU A L'ARTICLE 34 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1867, DOIT CONSTATER LA
MAUVAISE FOI DU PREVENU.
Textes appliqués :
· (2)
· Loi 1867-07-24 art. 34
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
366
Annexe 23
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
16 Mai 2000
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : SECRET PROFESSIONNEL
Le : 08/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 16 mai 2000
N° de pourvoi: 99-85304
Publié au bulletin
Rejet
Président : M. Gomez,
président
Rapporteur : M. Joly., conseiller apporteur
Avocat général : M. Géronimi., avocat
général
Avocat : M. Bouthors., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET du pourvoi formé par : - X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre,
en date du 1er juillet 1999, qui, dans la procédure suivie contre lui du
chef de violation du secret professionnel, a prononcé sur les
intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
367
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des
articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 226-13 et
434-26 du Code pénal, 38 de la loi du 29 juillet 1881, 1382 du Code
civil, 2, 10, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
» en ce que la Cour a dit que le prévenu, avocat de
profession avait commis des faits de violation du secret professionnel, et l'a
condamné à verser une indemnité à la partie civile
;
» aux motifs, en premier lieu, que X..., avocat au barreau
de Marseille, et la société civile professionnelle d'avocats dont
il était membre, avaient assisté Y..., entre 1984 et 1994,
à l'occasion de diverses poursuites pénales exercées
à son encontre devant les tribunaux de grande instance de Grasse et de
Paris ; qu'en 1994, un contentieux relatif aux honoraires dus à la
société civile professionnelle, et portant sur une somme
supérieure à 1 000 000 francs, avait opposé X... et Y... ;
que Me X..., qui avait expliqué n'avoir reçu de Y... qu'une somme
d'environ 80 000 francs à titre de provision, sur l'engagement de son
client et le rémunérer dès que la caution de 1 500 000
francs versée dans le cadre de la procédure suivie devant le
tribunal de Grasse lui serait restituée, avait engagé une
procédure de taxation le 12 décembre 1994 devant le
bâtonnier de Marseille, puis avait saisi le premier président de
la Cour d'Aix-en-Provence, qui avait finalement rendu le 17 janvier 1996 une
ordonnance fixant les honoraires dus à la somme de 933 020 francs ;
qu'au cours de cette procédure, Y... avait soutenu avoir
déjà réglé le montant des honoraires
réclamés et avait produit à l'appui de ses
déclarations des lettres et attestations manuscrites émanant de
son amie Z... et certifiant qu'elle avait, à de multiples reprises,
versé en espèces des fonds à l'avocat, à hauteur de
1 200 000 francs ; qu'au nom de la société civile
professionnelle, X... avait, le 25 juillet 1995, déposé entre les
mains d'un juge d'instruction parisien une plainte avec constitution de partie
civile contre Y... et Z... des chefs de faux et usage, tentative d'escroquerie
au jugement et complicité qui avait donné lieu à une
information, toujours en cours ; que Y... dénonçait les passages
suivants de cette plainte :
» 1° du mois de juillet 1985 au 7 novembre 1994, Me
X..., plus particulièrement, et les autres associés de la
société civile professionnelle ont assisté Y..., à
l'occasion de plusieurs affaires dont les deux plus importantes ont
été par ordre :
»devant le tribunal de grande instance de Grasse, celle
relative aux poursuites du chef d'escroquerie sur plainte de A... qui s'est
achevée le 7 juin 1994 par un jugement le condamnant à une peine
amnistiable et à une amende de 10 000 francs, les intérêts
civils en jeu étant aujourd'hui d'environ 6 000 000 francs, en capital
et intérêts ;
»devant le tribunal de grande instance de Paris, celle
relative aux poursuites du chef d'escroquerie sur plainte de B..., qui s'est
achevée le 7 décembre 1989 par un jugement de relaxe,
confirmé par un arrêt du 6 avril 1990, rendus l'un et l'autre pour
des motifs de pure procédure ... (nullité de l'information et
prescription) les intérêts en jeu étant de 12 000 000
francs environ ;
» 2° Y... étant, de surcroît,
étroitement surveillé en raison de son activité
prétendue dans le commerce des armes « ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
368
» 3° il est bon de rappeler :
»que Y... n'a jamais eu la moindre activité
officiellement rémunérée en France, ni le moindre revenu
à ce titre, ainsi qu'il l'a fait valoir à l'administration
fiscale dans un courrier du 28 avril 1989 et dans lequel il écrit :
»je peux à nouveau vous certifier que je ne
possède rien en France, aucun bien, aucun véhicule, aucun compte
en banque, aucune société et que je ne reçois aucune
rémunération d'aucun organisme que ce soit» ;
»que lorsqu'il a requis la société civile
professionnelle d'avocats, lors de l'audience de jugement de mai 1994 de faire
valoir au tribunal de grande instance de Grasse que contrairement à ce
que lui reprochait la partie civile, il avait bien une profession dans le
négoce d'armes et qu'il était, entre autres, président
d'une société C..., 10, rue de la Paix à Paris, ainsi que
l'attestait un courrier en date du 30 décembre 1993 de M. D..., ministre
de la Défense nationale, il a fait usage d'une fausse qualité
puisqu'il s'est avéré lorsque la société civile
professionnelle a voulu prendre des mesures conservatoires, par notamment la
saisie de ses parts dans cette société, qu'il n'en avait jamais
eu la qualité d'associé et n'en avait même pas
été l'employé ;
»en sorte que la lettre de M. D... a été
obtenue de ce ministre par subterfuge, ce qui a incontestablement trompé
les juges grassois, qui le 6 juin 1994 l'ont fait bénéficier d'un
traitement de faveur en requalifiant l'escroquerie en abus de confiance et en
lui infligeant une peine amnistiable, ce qui, au passage, prouve qu'il n'a pas
hésité à tromper Me X... lui faisant croire qu'il avait
une activité professionnelle alors qu'il n'en avait aucune ;
»qu'il se targue de n'avoir d'autres moyens d'existence en
France que ceux provenant de retraits opérés sur un compte en
Suisse à l'évidence non déclaré ;
qu'il s'énorgueillit, nonobstant de certaines
complaisances de la part de magistrats, de fonctionnaires de police, des
Douanes et du fisc auprès desquels il joue le rôle d'indicateur ou
«d'aviseur» et qu'il prétend avoir obligés ; que Y...
exposait que X... avait violé le secret professionnel, en ce que ces
propos reflétaient le contenu de certaines de ses lettres, remises pour
les besoins de sa défense, ou en ce que ces propos reproduisaient des
confidences ou traduisaient l'expression de l'intime conviction de l'avocat
à l'égard des dossiers de son client (arrêt p. 4 à
6) ; que le secret professionnel s'imposait à l'avocat, confident
nécessaire de son client, à raison de tous les renseignements
recueillis dans l'exercice de sa profession et dont la divulgation pourrait
s'avérer préjudiciable soit à celui qui s'est
confié, soit au crédit attaché à sa profession ;
que si les indications contenues dans la plainte avec constitution de partie
civile déposée au nom de la société civile
professionnelle et relatives aux jugements des tribunaux de Grasse et de Paris
ne relevaient pas du secret professionnel, celles concernant la situation
matérielle ou les activités de Y... en France, ou celles
relatives aux circonstances de la production d'un courrier du ministre de la
Défense lors de l'une de ces instances, ou bien encore les
allégations de l'intéressé quant à ses relations,
revêtaient incontestablement un caractère protégé,
quand bien même elles auraient été débattues
publiquement lors des audiences correctionnelles, la révélation
par le professionnel lui-même conférant à
La responsabilité du commissaire aux
comptes
369
ces informations un crédit supérieur ; que la
plainte avec constitution de partie civile déposée en juillet
1995 constituait l'élément matériel de l'infraction de
révélation du secret, l'élément intentionnel
étant également caractérisé, puisque le
prévenu, professionnel du droit, ne pouvait ignorer ses obligations ;
qu'étaient couvertes par le secret professionnel non seulement les
confidences faites par le client à son avocat, mais également
toutes les informations qu'avait pu recueillir ce professionnel à
l'occasion de l'exercice de ses fonctions et les déductions personnelles
qu'il avait pu en faire ; que seule la publicité intégrale de
l'information était de nature à priver celle-ci de son
caractère secret, et que même si le fait était
partiellement connu ou divulgué, sa révélation par le
professionnel dépositaire du secret, qui lui conférait un
caractère certain dont il était jusque-là dépourvu,
était punissable au sens de l'article 226-13 du Code pénal ; que
la défense exposait que la plainte n'avait fait que reprendre les
déclarations de la partie civile au bâtonnier du barreau de
Marseille et au procureur général d'Aix-en-Provence à
l'occasion de la procédure de taxe, ou au juge de l'exécution de
Paris lors de la mise en oeuvre de procédures d'exécution, ou
bien encore que cette plainte avait exposé des faits portés
à la connaissance de l'avocat postérieurement au contentieux de
la procédure de taxe, ou débattus lors des instances
pénales ;
qu'une telle argumentation ne pouvait prospérer, dans la
mesure où le caractère public des informations en cause ne
pouvait se déduire du fait que Y... aurait partiellement livré
certaines informations, de façon d'ailleurs parfois indirecte à
d'autres personnes ou instances tenues elles aussi au secret, ni du fait qu'il
aurait été fait état de certaines de ces informations lors
d'audiences correctionnelles tenues publiquement (arrêt p. 7 à 9)
;
» 1° alors, d'une part, que le dépôt
d'une plainte avec constitution de partie civile entre les mains d'un juge
d'instruction est irréprochable, dès lors que la plainte n'a pas
fait l'objet d'une publicité à l'initiative de la partie civile,
que le juge d'instruction est lui-même tenu au secret et que les
conditions éventuelles d'une dénonciation téméraire
ou abusive ne sont pas réunies du chef de la personne mise en cause ;
qu'ainsi, la Cour a méconnu le champ d'application limité de
l'article 226-13 du Code pénal ;
» 2° alors que, d'autre part, il ne peut exister de
révélation punissable qu'en présence d'un secret, lequel
est exclu lorsque les informations concernées ont été
débattues dans une enceinte publique, telle qu'une juridiction
correctionnelle ; que la Cour, après avoir constaté que
l'essentiel des informations contenues dans la plainte de l'avocat contre un
ancien client avaient déjà été débattues
publiquement devant un juge correctionnel, ne pouvait se dispenser de
caractériser précisément les informations ainsi rendues
publiques, et de rechercher s'il résultait effectivement, du reste des
termes de la plainte, la violation d'un secret protégé ;
» aux motifs, en second lieu, que quant à
l'existence de faits justificatifs découlant de l'exercice des droits de
la défense de l'avocat lui-même, la plainte avec constitution de
partie civile précitée s'était inscrite dans une
stratégie de défense, destinée à contrecarrer la
production par Y... d'attestations tendant à établir que la
société civile professionnelle avait déjà
été honorée et que sa réclamation était de
mauvaise foi ; que, cependant, les révélations faites dans cette
plainte, par leur nature, avaient excédé les strictes exigences
des intérêts de la défense de la société
d'avocats, en
La responsabilité du commissaire aux
comptes
370
ce que cette plainte se référait à des
lettres adressées par Y... et remises par ce dernier à Me X...
(par exemple une lettre à l'administration fiscale datée d'avril
1989), soit à des confidences ou renseignements livrés par la
partie civile à son conseil notamment lors de l'exercice de ses droits
devant les juridictions (courriers du ministre de la Défense du 30
décembre 1993), ou en ce que la plainte faisait état de la
conviction de l'avocat en ce qui concernait la situation de son client
(complaisance de diverses autorités) ; que le principe constitutionnel
d'égalité des citoyens devant la loi ne pouvait justifier la
violation du secret professionnel de l'avocat, quels que soient les mobiles de
son auteur (arrêt p. 8 et 9) ;
» 3° alors, enfin que, n'excède pas les
nécessités de l'exercice des droits de la défense,
l'avocat qui, pour contrer les allégations déshonorantes d'un
ancien client selon lesquelles des honoraires réclamés par voie
contentieuse auraient déjà été payés en
espèces, se prévaut d'éléments de nature à
jeter le doute sur la crédibilité de son accusateur ; qu'à
cet égard, les fraudes ordinaires aussi bien que les mensonges et les
faux commis par un ancien client tous éléments déjà
débattus pour l'essentiel au cours de procès antérieurs en
audience publique et concourant à démontrer la fausseté
des allégations de l'intéressé sur de prétendus
versements d'honoraires en espèces doivent pouvoir être
invoqués par l'avocat sans restriction ni réserve ; qu'à
défaut, l'avocat injustement mis en cause serait placé dans une
situation nettement désavantageuse et ne serait pas mis en situation de
se défendre
«
;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que
X..., avocat, et la société civile professionnelle X..., D...,
X..., ont assisté Y..., entre 1985 et 1994, à l'occasion de
plusieurs poursuites exercées contre celui-ci ;
Qu'en 1994, la société civile professionnelle a
engagé une procédure en recouvrement d'honoraires au cours de
laquelle Y..., soutenant avoir déjà réglé, en
espèces, les sommes qui lui étaient réclamées, a
produit diverses lettres et attestations en ce sens ;
Que X..., au nom de la société civile
professionnelle, a déposé plainte avec constitution de partie
civile contre Y... devant le juge d'instruction des chefs de fausses
attestations et usage ;
Que Y... estimant que plusieurs passages de cette plainte
caractérisaient le délit de violation du secret professionnel, a
cité directement X... devant le tribunal correctionnel, lequel a
relaxé le prévenu et débouté la partie civile ;
Attendu que, pour condamner X... à des réparations
civiles sur le seul appel de la partie poursuivante, la juridiction du second
degré se prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et
énonciations, la cour d'appel a caractérisé en tous ses
éléments constitutifs l'infraction retenue à la charge du
prévenu et a ainsi justifié sa décision sans encourir les
griefs allégués ;
Qu'en effet, d'une part, la révélation d'une
information à caractère secret réprimée par
l'article 226-13 du Code pénal n'en suppose pas la divulgation ; qu'elle
peut
La responsabilité du commissaire aux
comptes
371
exister légalement, lors même qu'elle en est
donnée à une personne unique et lors même que cette
personne est elle-même tenue au secret ;
Que, d'autre part, la connaissance par d'autres personnes, de
faits couverts par le secret professionnel, n'est pas de nature à
enlever à ces faits leur caractère confidentiel et secret ;
Qu'enfin les juges ont souverainement apprécié les
faits et circonstances de la cause d'où ils ont déduit que la
violation du secret professionnel n'était pas, en l'espèce,
rendue nécessaire par l'exercice des droits de la défense ;
D'où il suit que le moyen doit être
écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
Publication : Bulletin criminel 2000 N°
192 p. 566
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, du 1 juillet 1999
Titrages et résumés : 1°
SECRET PROFESSIONNEL - Violation - Eléments constitutifs - Divulgation -
Nécessité (non) - Révélation à une personne
tenue au secret - Circonstance inopérante.
1° La révélation d'un fait couvert par le
secret professionnel n'en suppose pas la divulgation ; le délit est
constitué, même si la révélation est donnée
à une seule personne et la circonstance que la personne à qui est
révélé un fait couvert par le secret professionnel soit
elle-même tenue au secret est inopérante(1).
1° AVOCAT - Secret professionnel - Violation -
Eléments constitutifs - Divulgation - Nécessité (non) -
Révélation à une personne tenue au secret - Circonstance
inopérante 2° SECRET PROFESSIONNEL - Caractère absolu - Fait
révélé susceptible d'être déjà connu -
Circonstance inopérante - Délit constitué.
2° L'obligation au secret professionnel établie par
l'article 226-13 du Code pénal s'impose aux avocats comme un devoir de
leur fonction. La connaissance par d'autres personnes de faits couverts par le
secret n'est pas de nature à enlever à ces faits leur
caractère confidentiel et secret(2).
2° SECRET PROFESSIONNEL - Personnes tenues au secret -
Avocat 2° AVOCAT - Secret professionnel - Caractère absolu - Fait
révélé susceptible d'être déjà connu -
Circonstance inopérante - Délit constitué 3° SECRET
PROFESSIONNEL - Violation - Avocat - Exercice des droits de la défense -
Nécessité (non).
372
3° Justifie sa décision la cour d'appel, qui, par
une appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause,
retient qu'en l'espèce, la violation du secret professionnel n'est pas
rendue nécessaire par l'exercice des droits de la défense(3).
3° AVOCAT - Secret professionnel - Violation - Exercice des
droits de la défense - Nécessité (non)
Précédents jurisprudentiels :
CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1874-11-21,
Bulletin criminel 1874, n° 298, p. 546 (annulation). CONFER : (2°).
(2) A rapprocher : Chambre criminelle, 1989-03-07, Bulletin criminel 1989,
n° 109, p. 290 (rejet) ; Chambre criminelle, 1994-02-08, (rejet), Pourvoi
n° 89-84.035, Non publié (Diffusé Légifrance) ;
Chambre criminelle, 1994-11-22, (rejet), Pourvoi n° 93-.85.009, Non
publié (Diffusé Légifrance). CONFER : (3°). (3) A
rapprocher : Chambre criminelle, 18 octobe 1993, Bulletin criminel 1993,
n° 296, p. 743 (rejet et cassation partielle).
Textes appliqués :
· 3° :
· Code pénal 226-13
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
373
Annexe 24
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
7 Mars 1989
COMMISSAIRE AUX COMPTES : SECRET PROFESSIONNEL
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 7 mars 1989
N° de pourvoi: 87-90500
Publié au bulletin
Rejet
Président :M. Berthiau, conseiller doyen faisant
fonction, président
Rapporteur :M. Dumont, conseiller apporteur
Avocat général :Mme Pradain, avocat
général
Avocats :M. Choucroy, la SCP Piwnica et Molinié,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET des pourvois formés par :
1°) X... Fernand ;
2°) Y... Robert, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre,
en date du 30 juin 1987, qui a condamné le premier pour violation du
secret professionnel, à une amende de 5 000 francs ainsi qu'à des
réparations civiles au profit du second et qui n'a pas
entièrement fait droit aux demandes de ce dernier.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
374
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur le pourvoi de X... :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des
articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de
motifs, manque de base légale :
» en ce que la Cour a rejeté l'exception de
nullité tirée d'une violation des dispositions de la Convention
européenne des droits de l'homme ;
» au seul motif que cette exception ne peut être
invoquée devant une juridiction que lorsque ont été
épuisées toutes les voies de recours légales du droit
français ; que tel n'étant pas le cas en l'espèce, cette
exception sera rejetée ;
» alors que tout prévenu a droit notamment à
ce que sa cause soit entendue et jugée dans un délai raisonnable
et à interroger ou faire interroger les témoins à
décharge dans les mêmes conditions que les témoins à
charge ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de
l'arrêt attaqué que la plainte déposée le 10
décembre 1965, a entraîné l'inculpation du demandeur 16 ans
plus tard ; que, dans ses conclusions, le demandeur soulignait que toutes les
personnes dont le témoignage avait été recueilli au cours
de l'information et de l'instruction avaient déjà
été entendues en 1966 et les suppléments d'information
ordonnés par la chambre d'accusation en 1974 et 1978 n'ont eu pour objet
ni pour résultat aucune investigation complémentaire ; que, par
suite, la cour d'appel ne pouvait légalement s'abstenir de
vérifier si, à la suite d'une plainte déposée en
1965, le jugement rendu en 1987 n'était pas intervenu au-delà du
délai raisonnable prévu par l'article 6-1 de la Convention
européenne des droits de l'homme qui se borne à reprendre un
principe interne du droit français, celui du respect des droits de la
défense qui interdit qu'une procédure pénale ne
présentant aucune difficulté majeure se voit tranchée au
bout de 21 ans « ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire grief des motifs,
même erronés, par lesquels la cour d'appel a rejeté
l'exception tirée de la violation de l'article 6-1 de la Convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales et qui résulterait de la durée excessive de la
procédure ayant précédé le jugement dès lors
que les juridictions correctionnelles ne peuvent prononcer l'annulation des
procédures d'instruction lorsque celles-ci ont été
renvoyées devant elles par la chambre d'accusation et qu'au surplus la
durée excessive d'une procédure, à la supposer
établie, n'entraînerait pas sa nullité ;
Qu'ainsi le moyen ne peut être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des
articles 378 du Code pénal, 593 du Code de procédure
pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
» en ce que l'arrêt attaqué a
déclaré le demandeur coupable de violation du secret
professionnel ;
» aux motifs que le 10 juin 1963, dernier jour légal
de la surenchère, un déjeuner amical avait réuni à
Paris : Mme de Z..., M. de A..., le prévenu qui était
déjà l'associé de ces derniers dans une autre
société civile, ainsi que Me Weil Curiel ; qu'au cours de ce
repas la conversation porta sur l'opération immobilière en cours
en Haute-Savoie, opération dont chacun connaissait déjà
l'existence ; que s'il n'a pas été établi de façon
formelle que chacun des faits révélés à des tiers
par le prévenu ait, en lui-même, été couvert par le
secret professionnel, il n'en reste pas moins évident qu'en brossant un
tableau d'ensemble très précis de la situation de l'affaire, Me
X...
La responsabilité du commissaire aux
comptes
375
outrepassait l'obligation de discrétion à laquelle
il était tenu ; qu'il possédait seul, en sa qualité
d'avocat de Y..., l'ensemble des informations, de toute nature, dont le tout
constituait le secret de sa profession qu'il devait respecter ; qu'il convient
cependant de lui tenir largement compte de l'intention dans laquelle il a agi ;
que dans une note remise au magistrat instructeur par Me Weil-Curiel (D. 216,
p. 16) il est indiqué : » c'est en toute bonne foi et dans
l'ignorance de cet accord qui reste à prouver que Fernand X... a
parlé de la surenchère possible, au cours du déjeuner du
10 juin 1963 à la fois pour préserver les chances de Y... et
pour, au cas où il n'aurait pu les matérialiser, sauver
grâce aux apports de Mme de Z... une affaire qu'il croyait appelée
à prospérer ;
» alors que, d'une part, la violation du secret
professionnel suppose l'existence d'un secret ; que ne saurait être
considérée comme secrète une information qui, sur un plan
général est déjà connue des personnes auxquelles
elle a été donnée et qui a fait l'objet d'une large
diffusion ; que, par suite, la cour d'appel qui a expressément
constaté qu'il n'a pas été établi de façon
formelle que chacun des faits révélés à des tiers
par le prévenu ait été en lui-même couvert par le
secret professionnel, circonstances propres à exclure l'infraction
incriminée, n'a pas tiré de ses propres énonciations les
conséquences légales qui s'imposaient ;
» alors, d'autre part, et en tout état de cause que
le secret professionnel suppose un élément intentionnel ; qu'il
résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que le
demandeur n'avait, au cours de la conversation incriminée,
évoqué les difficultés de son client que pour lui procurer
des concours extérieurs et ainsi lui apporter l'aide qui lui faisait
défaut ; que, par suite, la Cour ne pouvait légalement s'abstenir
de vérifier si, en l'état de cette circonstance,
l'élément intentionnel de l'infraction était bien
caractérisé « ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que
Robert Y... qui désirait créer une station de sports d'hiver dans
une localité de Haute-Savoie, a, dans ce dessein, procédé
à diverses opérations et notamment acquis la majorité des
actions d'une société anonyme exploitant un
téléphérique ; qu'à la suite d'une décision
préfectorale interdisant cette exploitation la société
anonyme a été déclarée en faillite et ses biens mis
en vente ; qu'ils ont été adjugés le 31 mars 1963, Y...
étant dans l'incapacité de se procurer les fonds
nécessaires pour les acquérir ; que le 10 juin 1963, dernier jour
du délai de surenchère, X..., qui avait été le
conseil de Y... dans ses affaires en Haute-Savoie, et qui connaissait ses
difficultés financières, a informé une dame de Z... de la
situation et lui a proposé de surenchérir en lui exposant que son
client aurait ainsi un délai supplémentaire pour réunir
des fonds et qu'en tout état de cause elle ferait une bonne affaire ;
que la surenchère ayant été faite les biens de la
société ont été définitivement
adjugés le 20 septembre 1963 à une société Serem
qui avait notamment pour associés Mme de Z... et l'épouse de X...
; qu'à la suite de la plainte de Y... pour violation du secret
professionnel, le tribunal correctionnel a déclaré X... coupable
de cette infraction ;
Attendu que pour confirmer le jugement sur la culpabilité
la juridiction du second degré énonce notamment « que s'il
n'a pas été établi de façon formelle que chacun des
faits révélés à des tiers par le prévenu
ait, en lui-même, été couvert par le secret professionnel,
il n'en est pas moins évident qu'en brossant un tableau d'ensemble
très précis de la situation de l'» affaire «, X...
outrepassait l'obligation de discrétion à laquelle il
était tenu ; qu'il possédait seul en sa qualité d'avocat
de Y... l'ensemble des informations de toute nature dont le tout constituait le
secret de sa profession qu'il devait respecter « ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs la cour d'appel a
caractérisé les éléments matériels
La responsabilité du commissaire aux
comptes
376
et intentionnel de l'infraction sans encourir les griefs
allégués ; que, d'une part, le principe posé par l'article
378 du Code pénal est général et absolu même s'il
s'agit d'un fait connu dans son ensemble lorsque l'intervention du
dépositaire du secret entraîne la divulgation de précisions
qu'il était seul à connaître ; que, d'autre part,
l'intention frauduleuse consiste dans la conscience qu'a le prévenu de
révéler le secret dont il a connaissance, quel que soit le mobile
qui a pu le déterminer ; Que le moyen ne peut donc être accueilli
;
Sur le pourvoi de la partie civile : (sans intérêt)
;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme
;
REJETTE les pourvois.
Publication : Bulletin criminel 1989 N°
109 p. 290
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, du 30 juin 1987
Titrages et résumés : 1°
CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 - Délai
raisonnable - Durée excessive d'une procédure - Portée
1° Si, en application de l'article 6 de la Convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
dans un délai raisonnable, la durée excessive d'une
procédure pénale n'en entraîne pas la nullité. Elle
permet seulement à celui qui en aurait souffert de saisir
éventuellement la juridiction nationale compétente d'une demande
de réparation ou, s'il y a lieu, de saisir la Commission
européenne des droits de l'homme.
2° SECRET PROFESSIONNEL - Caractère absolu - Fait
connu dans son ensemble
2° L'obligation au secret professionnel établie par
l'article 378 du Code pénal
s'impose aux avocats comme un devoir de leur fonction. Elle est
générale et absolue même s'il s'agit d'un fait connu dans
son ensemble lorsque l'intervention du dépositaire du secret
entraîne la divulgation de précisions qu'il était seul
à connaître (1).
2° AVOCAT - Secret professionnel - Caractère absolu
- Fait connu dans son ensemble 2° SECRET PROFESSIONNEL - Personnes tenues
au secret - Avocat 3° SECRET PROFESSIONNEL - Violation - Eléments
constitutifs - Elément intentionnel
3° L'intention frauduleuse de celui qui commet une
violation du secret professionnel consiste dans la conscience qu'il a de
révéler le secret dont il a connaissance, quel que soit le mobile
qui a pu le déterminer (2).
377
3° AVOCAT - Secret professionnel - Violation -
Eléments constitutifs - Elément intentionnel
Précédents jurisprudentiels :
CONFER : (2°). Chambre criminelle, 1957-01-24 , Bulletin criminel
1957, n° 86, p. 144 (rejet). CONFER : (3°). Chambre criminelle,
1885-12-15 Dalloz périodique, 1886, 1, p. 347
Textes appliqués :
· Code pénal 378
· Convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales 1950-11-04 art. 6
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
378
Annexe 25
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 20 Février 2008
COMMISSAIRE AUX COMPTES : INCOMPATIBILITES
Cour de cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 20 février 2008
N° de pourvoi: 07-84731
Non publié au bulletin
Rejet
M. Cotte (président),
président
SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt
suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Joseph,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9e chambre, en
date du 5 juin 2007 qui, pour complicité de banqueroute, recel, travail
dissimulé et exercice des fonctions de commissaire aux comptes
malgré incompatibilité, l'a condamné à deux ans
d'emprisonnement avec sursis, 40 000 euros d'amende et a prononcé sur
les intérêts civils ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
379
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des
articles 6 § 1 et 6 § 3 de la Convention européenne des droits
de l'homme et des libertés fondamentales, 388 et 593 du code de
procédure pénale, défaut de motifs, violation des droits
de la défense, manque de base légale ;
»en ce que l'arrêt attaqué, requalifiant les
poursuites exercées contre Joseph X... du chef de banqueroute par
détournement d'actifs commis au préjudice de la SARL Arc-en-Ciel,
a déclaré ce prévenu coupable de complicité et de
recel de ce délit imputé à son coprévenu en
qualité d'auteur principal ;
»aux motifs que la période limitée de
l'intervention de Joseph X... dans la gestion de la société
Arc-en-Ciel de mi-juin jusqu'au 23 juillet 2004 ne permet pas de le retenir en
qualité de gérant de fait de cette société ; que,
par la création de la société 5 en Stores,
bénéficiaire des détournements d'actif, par sa fonction de
gérant de la société Action & Stratégie, par le
choix des bénéficiaires d'une partie du matériel
détourné (son neveu, sa fille) il a apporté les moyens du
délit et en a été le bénéficiaire ; que la
cour requalifiant les faits visés à la prévention le
déclarera coupable du délit de complicité de banqueroute
et de recel ;
»alors que s'il appartient aux juges répressifs de
restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification,
c'est à la condition de ne statuer que sur les faits dont ils sont
saisis et, au surplus, que le prévenu ait été au
préalable mis en demeure de présenter sa défense sur la
nouvelle qualification envisagée ; qu'en l'espèce où
Joseph X... qui était poursuivi et avait été
condamné en première instance, pour avoir en sa prétendue
qualité de gérant de fait de la SARL Arc-en-Ciel, commis le
délit de banqueroute par détournement d'actifs de cette personne
morale, avait dans ses conclusions d'appel, contesté avoir exercé
la gérance de cette SARL, la cour, qui a formellement admis la valeur de
ce moyen, a violé les textes visés au moyen ainsi que les droits
de la défense en entrant néanmoins en voie de condamnation
à son encontre pour complicité et recel de détournement
d'actifs après avoir requalifié les poursuites sans même
avoir mis le demandeur en mesure de présenter sa défense sur
cette nouvelle qualification qui reposait sur des faits non visés par
l'acte des poursuites» ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que
le prévenu, poursuivi pour banqueroute par détournement d'actifs,
a été avisé, lors des débats, que la
requalification des faits en complicité et recel de ce délit
était envisagée ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel, qui a
puisé les éléments de sa décision dans les faits
visés à la prévention sans rien y ajouter et mis le
prévenu en mesure de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
380
s'expliquer sur les nouvelles qualifications retenues, a
justifié sa décision sans méconnaître les textes
légaux et conventionnels visés au moyen ;
D'où il suit que le moyen doit être
écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation
des articles L. 820-6, L. 822-10 et L. 822-13 du code de commerce, 593 du code
de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base
légale ;
»en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a
déclaré Joseph X... coupable d'exercice de la fonction de
commissaire aux comptes nonobstant les incompatibilités légales
;
»aux motifs qu'il n'est pas contesté par Joseph X...
qu'à l'époque des faits il exerçait le mandat de
commissaire aux comptes au sein de la SA Japad ; qu'à l'audience de la
cour, il déclare exercer encore cette fonction ; qu'il résulte
des motifs ci-dessus qu'il a dans le même temps exercé la fonction
de gérant de fait de la SARL 5 en Stores, en violation de
l'incompatibilité édictée par l'article L. 822-13 du code
de commerce ; qu'en revanche, le dossier de la procédure ne contient pas
d'élément permettant de retenir que Joseph X... a exercé
une activité commerciale au sein des sociétés Capital
Passion et Argos ; que la cour réformant le jugement
déféré déclarera Joseph X... coupable du chef de
prévention d'exercice des fonctions de commissaire aux comptes
malgré incompatibilité pour avoir dirigé de fait la SARL 5
en Stores ; qu'en conséquence la cour aggravera la sanction à
l'encontre de ce prévenu ;
»alors que, la cour qui n'a pas constaté que le
prévenu ait été nommé commissaire aux comptes de la
SARL 5 en Stores n'a pas caractérisé l'incompatibilité
édictée par l'article L. 822-13 du code de commerce dont elle a
cru devoir le déclarer coupable ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable
d'exercice de la fonction de commissaire aux comptes, malgré les
incompatibilités légales, la cour d'appel a prononcé par
les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en cet état, la cour d'appel qui, nonobstant
la référence surabondante à l'article L. 822-13 du code de
commerce, a caractérisé en tous ses éléments
l'infraction prévue et réprimée par les articles L.
822-10, 3°, et L. 820-6 dudit code, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation
des articles 520 et 593 du code de procédure pénale,
défaut de motifs, manque de base légale ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
381
»en ce que l'arrêt attaqué, après avoir
annulé le jugement en ce qu'il a omis de statuer sur l'action civile, a
évoqué pour déclarer Me Y... recevable tant en son appel
qu'en son action civile pour condamner les prévenus à payer
à la partie civile les sommes de 50 000 euros à titre de dommages
et intérêts ainsi que 400 euros au titre de l'article 475-1 du
code de procédure pénale ;
»aux motifs que le tribunal a été saisi sur
citation directe du parquet, que Me Y..., mandataire liquidateur
régulièrement avisée en qualité de victime,
était représentée à l'audience par Me Z... avocat
qui se constituait partie civile et présentait une demande de 100 000
euros à titre de dommages et intérêts solidairement contre
les deux prévenus ; que le jugement ne comporte aucune disposition
civile ; que la cour annulera en partie le jugement déféré
en ce qu'il a omis de statuer et évoquant déclarera Me Y...
recevable tant en son appel qu'en son action et statuera sur l'action civile
;
»alors que l'article 520 du code de procédure
pénale ne permet pas à la cour d'appel d'évoquer pour se
prononcer à l'égard d'une partie qui ne se trouvait pas en cause
en première instance ; qu'en l'espèce où le jugement ne
mentionne la présence ni de la partie civile ni d'aucun avocat
chargé de la représenter, non plus qu'une demande formée
par elle à l'audience, la cour a violé le texte
précité en statuant par voie d'évocation sur la demande de
la partie civile» ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et
des pièces de procédure que Me Y..., mandataire judiciaire
à la liquidation de la société Arc-en-Ciel, s'est
régulièrement constitué partie civile à l'audience
du tribunal correctionnel et a sollicité l'allocation de
dommages-intérêts en réparation du préjudice subi
par cette société ;
Attendu, en conséquence, que la cour d'appel, qui
constatait que le jugement ne statuait pas sur cette demande, l'a, à bon
droit, annulé sur l'action civile, et évoquant, a prononcé
sur la demande de dommages-intérêts ;
D'où il suit que le moyen doit être
écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme
;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation,
chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus
;
Etaient présents aux débats et au
délibéré, dans la formation prévue à
l'article 567-1-
382
1 du code de procédure pénale : M. Cotte
président, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la
chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été
signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre
;
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris du 5 juin 2007
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
383
Annexe 26
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
24 Mai 1983
COMMISSAIRE AUX COMPTES : INCOMPATIBILITES
Le : 09/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 24 mai 1983
N° de pourvoi:
Non publié au bulletin
Rejet
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
STATUANT SUR LE POURVOI DE : - MARTINET JACQUES - CONTRE UN
ARRET DE LA COUR D'APPEL D'ANGERS (2 EME CHAMBRE) EN DATE DU 4 NOVEMBRE 1982,
QUI, SUR RENVOI APRES CASSATION, L'A CONDAMNE A 30000 FRANCS D'AMENDE POUR
EXERCICE, MALGRE UNE INCOMPATIBILITE LEGALE, DES FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES ;
VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 4 DU CODE PENAL, 220-4 EME ET 456 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 591 ET
593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE ;
EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE SIEUR
MARTINET, QUI EXERCAIT LES FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX COMPTES AUPRES DE LA
SOCIETE TOURAINE AGRI, COUPABLE DE VIOLATION DES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
384
DISPOSITIONS DE L'ALINEA 4 DE L'ARTICLE 220 DE LA LOI DU 24
JUILLET 1966 ;
AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE LE SIEUR MARTINET PERCEVAIT DE FACON
CONSTANTE ET SYSTEMATIQUE UNE REMUNERATION SUPERIEURE DE PLUS DU DOUBLE A CELLE
A LAQUELLE IL POUVAIT LEGALEMENT PRETENDRE, CE QUI REVELAIT A L'EVIDENCE LA
REMUNERATION NON D'INTERVENTIONS PONCTUELLES MAIS D'UN SERVICE REGULIER
D'ASSISTANCE, ETRANGER AUX FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX COMPTES ;
ALORS QU'EN PRETENDANT DEDUIRE DE CE DEPASSEMENT DE TARIFS
L'EXERCICE PAR LE SIEUR MARTINET D'UNE ACTIVITE REGULIERE D'ASSISTANCE
ETRANGERE A SES FONCTIONS, LA COUR A STATUE PAR UN MOTIF HYPOTHETIQUE ET, EN
TOUTE HYPOTHESE, INSUFFISAMMENT CARACTERISE LE CUMUL DE FONCTIONS INCRIMINE
;
AU MOTIF, D'AUTRE PART, QUE LE SIEUR MARTINET ETAIT DEMEURE DANS
SES FONCTIONS BIEN QU'IL FUT LE CONJOINT D'UNE PERSONNE QUI, EN SA QUALITE DE
GERANTE MAJORITAIRE A 80 % DES SOCIETES FIDUCO ET SOMECA (CHARGEES
RESPECTIVEMENT DES ACTIVITES DE SECRETARIAT JURIDIQUE ET DE TRAITEMENT
MECANOGRAPHIQUE DE LA COMPTABILITE DE LA SOCIETE TOURAINE AGRI), PERCEVAIT DE
CELLE-CI DES SALAIRES OU REMUNERATIONS AUTRES QUE CELLES DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES ;
ALORS QUE L'INCOMPATIBILITE FORMULEE PAR L'ARTICLE 220 ALINEA 4
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 CONCERNE EXCLUSIVEMENT LES PERSONNES OU LES
CONJOINTS DE PERSONNES QUI RECOIVENT, EN RAISON DE FONCTIONS AUTRES QUE CELLES
DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, UN SALAIRE OU UNE REMUNERATION DE LA SOCIETE
CONTROLEE OU D'UNE SOCIETE POSSEDANT LE DIXIEME DU CAPITAL DE CETTE SOCIETE OU
DONT CELLE-CI POSSEDE LE DIXIEME DU CAPITAL ;
QUE, DES LORS QU'IL N'A JAMAIS ETE ALLEGUE NI A FORTIORI ETABLI
QUE LA SOCIETE TOURAINE AGRI, D'UNE PART, ET LES SOCIETES FIDUCO ET SOMECA,
D'AUTRE PART, FUSSENT LIEES PAR DES INTERETS FINANCIERS DANS DES PROPORTIONS
PREVUES PAR LE TEXTE, LES JUGES DU FOND NE POUVAIENT, SANS VIOLER LE PRINCIPE
D'INTERPRETATION STRICTE DE LA LOI PENALE, ETENDRE L'INCOMPATIBILITE INCRIMINEE
AUX FONCTIONS EXERCEES PAR LE CONJOINT D'UN COMMISSAIRE AUX COMPTES AU SEIN
D'UNE SOCIETE PERCEVANT LES REMUNERATIONS PROVENANT DE LA SOCIETE CONTROLEE
;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
385
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE QUE MARTINET JACQUES,
COMMISSAIRE AUX COMPTES DE LA SA TOURAINE AGRI, A D'UNE PART, EXERCE CES
FONCTIONS AU SEIN DE LADITE SOCIETE TOUT EN PERCEVANT EN OUTRE DE LA MEME
PERSONNE MORALE DES REMUNERATIONS CORRESPONDANT A D'AUTRES DE SES ACTIVITES,
ELLES, OCCULTES, ET D'AUTRE PART, ETANT COMMISSAIRE AUX COMPTES DE TOURAINE
AGRI CONSERVE LESDITES FONCTIONS ALORS QUE DIFFERENTES PRESTATIONS FOURNIES PAR
LES SARL FIDUCO ET SOMECA DONT LA DAME MARTINET, SON EPOUSE ETAIT LA GERANTE ET
L'ASSOCIEE MAJORITAIRE, ETAIENT PAR AILLEURS RETRIBUEES PAR TOURAINE AGRI ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER X... COUPABLE D'INFRACTION AUX
DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 456 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, LA COUR D'APPEL
CONSTATE QUE LE PREVENU PERCEVAIT DE LA SA TOURAINE AGRI, DE FACON CONSTANTE ET
SYSTEMATIQUE UNE REMUNERATION DE PLUS DU DOUBLE DE CELLE A LAQUELLE IL POUVAIT
PRETENDRE EN SA QUALITE DE COMMISSAIRE AUX COMPTES ;
QUE LE CARACTERE SYSTEMATIQUE DESDITS DEPASSEMENTS REVELAIT A
L'EVIDENCE, NON PAS LA REMUNERATION D'INTERVENTIONS PONCTUELLES EXCEPTIONNELLES
DU COMMISSAIRE AUX COMPTES TEL QUE L'ENVISAGE L'ARTICLE 123 DU DECRET DU 12
AOUT 1969 MAIS LE SALAIRE D'UN SERVICE D'ASSISTANCE REGULIER, ETRANGER AUX
FONCTIONS DE COMMISSAIRES AUX COMPTES ;
QUE L'ARRET AJOUTE QUE DU TEMOIGNAGE D'UN ADMINISTRATEUR DE LA
SA TOURAINE AGRI IL RESSORT QUE C'ETAIT X... QUI AU TRAVERS DES SARL SOMECA ET
FIDUCO ASSURAIT PERSONNELLEMENT LA TENUE DE LA COMPTABILITE DE LA SOCIETE
ANONYME ET QUE DES ECRITS MEMES DU PREVENU IL RESULTE QUE X... PARTICIPAIT A
L'ETABLISSEMENT DES BILANS DE TOURAINE AGRI AU MOTIF QUE CELA LUI PERMETTAIT
D'EVITER QU'ILS NE SOIENT ULTERIEUREMENT MODIFIES ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS
SOUVERAINES, LA COUR D'APPEL, ABSTRACTION FAITE DE TOUS AUTRES MOTIFS ERRONES
MAIS SURABONDANTS, A CARACTERISE EN TOUS SES ELEMENTS CONSTITUTIFS L'INFRACTION
PREVUE PAR L'ARTICLE 220-4EME DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 DONT ELLE A DECLARE
LE PREVENU COUPABLE ET A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI, ET ATTENDU
QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Angers, Chambre 2, du 4 novembre 1982
La responsabilité du commissaire aux
comptes
386
Annexe 27
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 18 Octobre 1983
COMMISSAIRE AUX COMPTES : INCOMPATIBILITES
Le : 09/09/2012
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 18 octobre 1983
N° de pourvoi: 82-94298
Publié au bulletin
REJET
Pdt M. Bruneau CAFF, président
Rpr M. Leydet, conseiller apporteur
Av.Gén. M. Clerget, avocat général
Av. Demandeur : M. Choucroy, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
- X... JOHN,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE VERSAILLES, 7E CHAMBRE, EN
DATE DU 6 DECEMBRE 1982 QUI, POUR EXERCICE ILLEGAL DES FONCTIONS DE COMMISSAIRE
AUX COMPTES, L'A CONDAMNE A 5 000 FRANCS D'AMENDE ;
VU LE MEMOIRE PRODUIT ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 220, 229, 377 ET 456 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, DE L'ARTICLE 119 DU
DECRET DU 12 AOUT 1969, MODIFIE PAR L'ARTICLE 16 DU DECRET
La responsabilité du commissaire aux
comptes
387
DU 7 DECEMBRE 1976 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE
PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE,
» EN CE QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE D'EXERCICE ILLEGAL DES FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX COMPTES,
AUX MOTIFS PROPRES A LA COUR QUE LE PREVENU COMMISSAIRE AUX COMPTES DE LA SA
LESIEUR A PU, SOIT EN TANT QUE SALARIE SOIT COMME ASSOCIE DE LA SOCIETE
D'EXPERTISE COMPTABLE AUDIT CONTINENTAL QUI AVAIT ETE CHARGEE PAR UNE FILIALE
DE LA SOCIETE PRECITEE D'UNE VERIFICATION DE LA SITUATION COMPTABLE D'UNE
SOCIETE TIERCE QUE CETTE FILIALE SE PROPOSAIT D'ACQUERIR, PERCEVOIR UNE
FRACTION DES HONORAIRES VERSES A LA SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE ;
QUE LE CONTROLE DE LA SITUATION COMPTABLE D'UNE SOCIETE TIERCE
N'ENTRAIT PAS DANS LES ATTRIBUTIONS DEVOLUES AU COMMISSAIRE AUX COMPTES ET NE
REPONDAIT A AUCUNE DEMANDE D'UNE AUTORITE PUBLIQUE TELLE QUE LA COMMISSION DES
OPERATIONS DE BOURSE, ET AU MOTIF ADOPTE DES PREMIERS JUGES QUE LE PREVENU NE
SAURAIT UTILEMENT FAIRE VALOIR QUE C'EST DANS LE CADRE D'UNE « EXTENSION
LICITE « DE SON MANDAT DE COMMISSAIRE AUX COMPTES ET ES QUALITES QU'IL A
PROCEDE A LA VERIFICATION DES COMPTES DE LA SOCIETE WILLIAM SAURIN, CELLE-CI
N'ETANT EN EFFET A L'EPOQUE DE LA VERIFICATION PAS ENCORE DEVENUE UNE FILIALE
DE LA SOCIETE DONT IL ETAIT LE COMMISSAIRE AUX COMPTES MAIS UNE SOCIETE TIERCE
DONT LE GROUPE ENVISAGEAIT D'ACQUERIR LE CAPITAL ;
ALORS QUE, D'UNE PART, PUISQUE LES JUGES DU FOND ONT EUX-MEMES
CONSTATE QUE LES HONORAIRES VERSES EN REMUNERATION DE LA MISSION LITIGIEUSE
L'AVAIENT ETE NON AU COMMISSAIRE AUX COMPTES MAIS A LA SOCIETE D'EXPERTISE
COMPTABLE, LA COUR A VIOLE L'ARTICLE 220-4 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 EN
DECIDANT QUE LE PREVENU AVAIT COMMIS L'INFRACTION D'EXERCICE ILLEGAL DES
FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX COMPTES PARCE QU'IL AVAIT PU BENEFICIER
INDIRECTEMENT DE CETTE REMUNERATION EN SA DOUBLE QUALITE D'ASSOCIE ET DE
SALARIE DE LA SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE ; QU'EN EFFET LE TEXTE PRECITE
N'INTERDIT AU COMMISSAIRE AUX COMPTES QUE DE RECEVOIR UNE REMUNERATION DE LA
SOCIETE POUR LAQUELLE IL ASSURE SES FONCTIONS OU DE SES FILIALES, MAIS NON DE
BENEFICIER INDIRECTEMENT DES HONORAIRES VERSES PAR CES SOCIETES A UNE SOCIETE
D'EXPERTISE COMPTABLE DONT IL EST L'ASSOCIE ET LE SALARIE ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, ET COMME LE PREVENU LE SOUTENAIT DANS
SES CONCLUSIONS LAISSEES SANS REPONSE, LE LEGISLATEUR N'A INTERDIT QUE LA
PERCEPTION D'UN SALAIRE OU DE REMUNERATION VERSES PAR LA SOCIETE OU PAR SES
FILIALES A SON COMMISSAIRE AUX COMPTES QU'EN RAISON DE FONCTIONS AUTRES QUE
CELLES DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, CE QUI IMPLIQUE QU'UN COMMISSAIRE AUX
COMPTES PEUT SANS CONTREVENIR AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 2204 DE LA LOI DU
24 JUILLET 1966, PERCEVOIR UNE REMUNERATION EN RAISON D'UNE MISSION
PARTICULIERE QUI LUI EST CONFIEE PAR LA SOCIETE OU PAR SA FILIALE DES LORS QUE
L'ACCOMPLISSEMENT DE CETTE MISSION NE CONSTITUE PAS L'EXERCICE D'UNE FONCTION
;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
388
QUE DES LORS EN RAISONNANT EN L'ESPECE COMME SI
L'ACCOMPLISSEMENT D'UNE SEULE MISSION TEMPORAIRE ET LIMITEE AVAIT PU CONSTITUER
L'INFRACTION D'EXERCICE ILLEGAL DES FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, LES
JUGES DU FOND ONT A NOUVEAU VIOLE LE TEXTE PRECITE ;
ET ALORS QU'ENFIN, PUISQUE L'ARTICLE 377 DE LA LOI DU 24 JUILLET
1966 PREVOIT QU'EN CAS DE FUSION DE PLUSIEURS SOCIETES, LES COMMISSAIRES AUX
COMPTES DE CHACUNE D'ENTRE ELLES, ASSISTES LE CAS ECHEANT D'EXPERTS DE LEUR
CHOIX, ETABLISSENT ET PRESENTENT UN RAPPORT SUR LES MODALITES DE LA FUSION ET
PLUS SPECIALEMENT SUR LA REMUNERATION DES APPORTS FAITS A LA SOCIETE
ABSORBANTE, LES JUGES DU FOND ONT VIOLE CE TEXTE DONT LES DISPOSITIONS ETAIENT
INVOQUEES PAR LE PREVENU EN DECIDANT QUE LE CONTROLE DE LA SITUATION COMPTABLE
DE LA SOCIETE QUE LA FILIALE SE PROPOSAIT D'ACHETER N'ENTRAIT PAS DANS LES
ATTRIBUTIONS DU COMMISSAIRE AUX COMPTES « ;
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE ET DU JUGEMENT QU'IL
CONFIRME SUR LE PRINCIPE DE LA CULPABILITE, QUE X... JOHN, COMMISSAIRE AUX
COMPTES DE LA SOCIETE ANONYME LESIEUR, LAQUELLE POSSEDAIT 99 % DES ACTIONS
D'UNE SOCIETE FILIALE LESIEUR-COTELLE, A ETE CHARGE DE VERIFIER LES COMPTES DE
LA SOCIETE WILLIAM-SAURIN DANS LAQUELLE CETTE FILIALE ENVISAGEAIT DE PRENDRE
UNE PARTICIPATION ;
QUE CETTE VERIFICATION A ETE EFFECTUEE SOUS LE CONTROLE DU
PREVENU, PAR LA SOCIETE ANONYME FRANCAISE D'EXPERTISE COMPTABLE : AUDIT
CONTINENTAL SA DONT IL ETAIT L'UN DES ACTIONNAIRES AINSI QUE LE SALARIE ;
QU'A LA SUITE DE CES TRAVAUX, X... N'A RECU AUCUNE REMUNERATION
EN SA QUALITE DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, MAIS QUE DES HONORAIRES S'ELEVANT AU
TOTAL A 390 000 FRANCS ONT ETE VERSES A LA SOCIETE D'EXPERTISE COMPTABLE ;
ATTENDU QUE POURSUIVI POUR AVOIR, ETANT COMMISSAIRE AUX COMPTES
DE LA SA LESIEUR, PERCU DE LA PART DE LA SA LESIEUR COTELLE FILIALE A 99 % DE
LA PRECEDENTE, UNE REMUNERATION AUTRE QUE CELLE D'HONORAIRES DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES, X... A ETE DECLARE COUPABLE DE CE DELIT PREVU ET REPRIME PAR LES
ARTICLES 220 ET SUIVANTS ET 456 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 ;
ATTENDU QU'A L'APPUI DE LEUR DECISION, LES JUGES D'APPEL
ENONCENT QUE LE PRINCIPE DE L'INDEPENDANCE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES GARANTS
DE LA CONFIANCE QUE LEUR ACCORDENT LEURS MANDANTS S'OPPOSE A TOUTE ACTIVITE
ETRANGERE A LEURS FONCTIONS, PERMANENTE OU NON, REMUNEREE DIRECTEMENT OU
INDIRECTEMENT SANS QU'IL Y AIT LIEU DE CONSIDERER SI CETTE ACTIVITE A ETE
BENEFIQUE POUR LES ASSOCIES ;
QU'ILS RELEVENT ENSUITE « QU'IL RESULTE DE L'ANALYSE DES
FAITS DE LA CAUSE ET DES REGLES QUI REGISSENT LES FONCTIONS DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES, QUE LE CONTROLE DE LA SITUATION COMPTABLE D'UNE SOCIETE TIERCE, NON
SEULEMENT N'ENTRAIT PAS DANS LES ATTRIBUTIONS DEVOLUES A X... EN SA QUALITE DE
COMMISSAIRE AUX COMPTES DE LA SA LESIEUR, MAIS ENCORE NE REPONDAIT A AUCUNE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
389
DEMANDE D'UNE AUTORITE PUBLIQUE TELLE QUE LA COMMISSION DES
OPERATIONS DE BOURSE « ;
QU'ILS RETIENNENT ENFIN « QUE LE PREVENU, COMMISSAIRE
AUX COMPTES DE PLUSIEURS SOCIETES IMPORTANTES, AVAIT L'OBLIGATION NON SEULEMENT
DE CONNAITRE ET DE RESPECTER LES TEXTES DE LOI APPLICABLES DANS CE DOMAINE,
MAIS ENCORE, EN CAS DE DOUTE SUR LEUR INTERPRETATION, DE CONSULTER AU PREALABLE
LES INSTANCES COMPETENTES « ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS
DEDUITES D'UNE APPRECIATION SOUVERAINE DES ELEMENTS DE PREUVE SOUMIS AU DEBAT
CONTRADICTOIRE, LA COUR D'APPEL A CARACTERISE EN TOUS SES ELEMENTS TANT
MATERIEL QU'INTENTIONNEL LE DELIT DONT ELLE A DECLARE LE PREVENU COUPABLE, ET,
SANS ENCOURIR LES GRIEFS ALLEGUES, JUSTIFIE SA DECISION ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.
Publication : Bulletin Criminel Cour de
Cassation Chambre criminelle N. 254
Décision attaquée : Cour d'appel
Versailles (Chambre 7) du 6 décembre 1982
Titrages et résumés : SOCIETES -
Sociétés par actions - Sociétés anonymes -
Commissaire aux comptes - Incompatibilités. Justifie l'application des
articles 220 et suivants et 456 de la loi du 24 juillet 1966, l'arrêt qui
constate qu'au cours de son mandat un commissaire aux comptes d'une
société, a reçu une rémunération même
indirecte pour des travaux étrangers à ses fonctions, à
savoir une expertise destinée à analyser la situation comptable
d'une société dans laquelle une prise de participation
était envisagée par la société qu'il
contrôlait (1).
Précédents jurisprudentiels : (1)
CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1944-04-28 Bulletin Criminel 1944 n.
114 p. 175 (REJET). (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1946-04-05
Bulletin Criminel 1946 n. 107 p. 154 (REJET). (1) CF. Cour de Cassation
(Chambre criminelle) 1981-11-16 n. 80-94.340 (REJET) non publié.
Textes appliqués :
· LOI 66-537 1966-07-24 ART. 220 S., ART. 456
La responsabilité du commissaire aux
comptes
390
Annexe 28
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
5 Juin 1975
COMMISSAIRE AUX COMPTES : COMPLICITE D?ESCROQUERIE
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 5 juin 1975
N° de pourvoi: 74-92792
Publié au bulletin
REJET
PDT M. COMBALDIEU, président
RPR M. PUCHEUS, conseiller apporteur
AV.GEN. M. ALBAUT, avocat général
Demandeur
AV. MM. BROUCHOT, RYZIGER, NICOLAS, LABBE, DE
SEGOGNE, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
REJET DES POURVOIS FORMES PAR : 1° X... CHRISTIAN, CONTRE
UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, 9EME CHAMBRE, EN DATE DU 26 AOUT 1974
QUI, POUR ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC, COMPLICITE D'ABUS DE CONFIANCE AVEC
APPEL AU PUBLIC ET ABUS DE BIENS SOCIAUX, L'A CONDAMNE A TREIZE MOIS
D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS ET A DES REPARATIONS CIVILES;
2° Y... ALBERT, CONTRE LE MEME ARRET QUI, POUR COMPLICITE
D'ABUS DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
391
CONFIANCE AVEC APPEL AU PUBLIC ET COMPLICITE DE RECEL D'ABUS DE
CONFIANCE, L'A CONDAMNE A DEUX ANS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, 20000 FRANCS
D'AMENDE ET A DES REPARATIONS CIVILES ;
3° Z... LEON, CONTRE LE MEME ARRET QUI, POUR COMPLICITE
D'ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC, L'A CONDAMNE A HUIT MOIS D'EMPRISONNEMENT
AVEC SURSIS ET 3000 FRANCS D'AMENDE ;
4° A... RAYMOND, CONTRE LE MEME ARRET QUI, POUR COMPLICITE
D'ESCROQUERIE ET DE TENTATIVE D'ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC, L'A CONDAMNE
A DEUX ANS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, 30000 FRANCS D'AMENDE ET A DES
REPARATIONS CIVILES ;
5° B... VICTOR, CONTRE LE MEME ARRET QUI, POUR COMPLICITE
D'ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC, COMPLICITE D'ABUS DE CONFIANCE AVEC APPEL
AU PUBLIC ET COMPLICITE DE RECEL D'ABUS DE CONFIANCE, L'A CONDAMNE A TROIS ANS
D'EMPRISONNEMENT DONT DIX-HUIT MOIS AVEC SURSIS ET A DES REPARATIONS
CIVILES. LA COUR, VU LA CONNEXITE,
JOIGNANT LES POURVOIS ;
I SUR LE POURVOI DE X... : SUR LES PREMIER, DEUXIEME, TROISIEME
ET QUATRIEME MOYENS DE CASSATION REUNIS ET PRIS : LE PREMIER MOYEN, DE LA
VIOLATION DE L'ARTICLE 405 DU CODE PENAL, DES ARTICLES 5 ET 6 DE LA LOI DE
FINANCES DU 2 JUILLET 1963, DE L'ARTICLE 44 DE LA LOI N° 73-1193 DU 27
DECEMBRE 1973, DES ARTICLES 485 ET 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, « EN
CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'ESCROQUERIE AVEC
APPEL AU PUBLIC, CETTE ESCROQUERIE AYANT CONSISTE EN UNE PUBLICITE FAITE TANT
DANS LA PRESSE QUE PAR L'EDITION DE PLAQUETTES ET BROCHURES, ET MEME D'UN
JOURNAL, LA GARANTIE FONCIERE, ADRESSE A TOUTES PERSONNES SUSCEPTIBLES D'ETRE
INTERESSEES, PROFERANT DES PROMESSES QUI APPARAISSAIENT REVETIR UN SERIEUX
PARTICULIER, NOTAMMENT EN RAISON DES PRECISIONS DONNEES ET DES PERSONNALITES,
DONT IL ETAIT FAIT ETAT, QUI LES CONFIRMAIENT OU QUI LES INFIRMAIENT, CETTE
PUBLICITE ETANT AXEE AUTOUR DE DEUX THEMES PRIMAIRES, D'UNE PART, LA SECURITE
DE L'INVESTISSEMENT PAR INDEXATION DU CAPITAL SOUSCRIT, ET D'AUTRE PART LA
RENTABILITE REMARQUABLE DU PLACEMENT QUI SE TRADUISAIT PAR UN INTERET ANNUEL DE
10,25% NET, CEPENDANT QUE CES PROMESSES CONFRONTEES AVEC LA REALITE DU MOMENT
AURAIENT ETE CHIMERIQUES ;
ALORS QUE LE FAIT DE SE LIVRER A UNE PUBLICITE, COMPORTANT SOUS
QUELQUE FORME QUE CE SOIT DES ALLEGATIONS, INDICATIONS OU PRESENTATIONS
FAUSSES, OU DE NATURE A INDUIRE EN ERREUR, ET PORTANT NOTAMMENT SUR LA NATURE
ET LES QUALITES SUBSTANTIELLES
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comptes
392
DE BIENS OU SERVICES QUI FONT L'OBJET DE LA PUBLICITE, OU SUR
LES RESULTATS QUI PEUVENT ETRE ATTENDUS DE LEUR UTILISATION, OU SUR LES
ENGAGEMENTS PRIS PAR L'ANNONCEUR, OU SUR LES QUALITES OU APTITUDES DU
FABRICANT, DES REVENDEURS, DES PROMOTEURS OU DES PRESTATAIRES CONSTITUE EN
REALITE NON LE DELIT D'ESCROQUERIE, MAIS LE DELIT DE PUBLICITE MENSONGERE»
;
LE DEUXIEME MOYEN, DE LA VIOLATION DES ARTICLES 59 ET 60 DU CODE
PENAL DE L'ARTICLE 405 DU MEME CODE, 485, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE,
«EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE FAITE DE L'ESCROQUERIE REALISEE AU
PREJUDICE DES SOUSCRIPTEURS DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS, AUX MOTIFS QU'IL
AURAIT DONNE LA CAUTION DE SA PERSONNALITE A LA PUBLICITE MENSONGERE ;
ALORS QUE LE DELIT D'ESCROQUERIE, QUI EST UN DELIT DE COMMISSION
ET NON UN DELIT D'OMISSION, SUPPOSE QUE L'AUTEUR A ACCOMPLI DES ACTES POSITIFS,
ET QUE L'ENONCIATION DE L'ARRET SELON LEQUEL LE DEMANDEUR AURAIT « DONNE
SA CAUTION « A LA PUBLICITE MENSONGERE N'EST PAS, PAR LUI SEUL, SUFFISANT
POUR CONSTITUER UN FAIT POSITIF CONSTITUTIF D'UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE A LA
CHARGE DU DEMANDEUR» ;
LE TROISIEME MOYEN, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 405 DU CODE
PENAL, DE L'ARTICLE 408 DU MEME CODE, DES ARTICLES 485, 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, «EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE, SOUS LA RUBRIQUE «
PREMIERE PARTIE : SUR LES FAITS D'ESCROQUERIE COMMIS AU PREJUDICE DES
SOUSCRIPTEURS DE PARTS DES SCI GARANTIE FONCIERE «, DECLARE LE DEMANDEUR
COUPABLE AUX MOTIFS QU'IL SERAIT PERSONNELLEMENT, SANS AUCUNE INCONSCIENCE,
INTERVENU DANS DE NOMBREUSES OPERATIONS FRAUDULEUSES, QU'IL AURAIT NOTAMMENT
RECLAME, COMMINATOIREMENT SOUS SA SIGNATURE, LE 27 AVRIL 1971, AUX TROIS
SOCIETES FILIALES DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS, LES SCI GALILEE, TIPHAINE ET
IENA, LES 2246243,11 FRANCS D'INTERETS QU'AUCUNE CONVENTION N'AVAIT PREVUS ET
QU'ELLES ETAIENT DANS L'INCAPACITE DE VERSER, LE BUT DE L'OPERATION ETANT DE
REGULARISER LA TRANSFORMATION D'UNE PARTIE DU CAPITAL DE LA GARANTIE FONCIERE
EN PRODUIT D'EXPLOITATION ;
QUE LE 19 FEVRIER 1971 IL A SIGNE L'ACTE DE CESSION DE
L'IMMEUBLE DU 12 DE LA RUE DES PARTANTS A LA GARANTIE FONCIERE CAPITAL POUR
ALIMENTER LA TRESORERIE DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS ET FAIRE APPARAITRE UNE
PLUS-VALUE A SON COMPTE LOYERS EN VIOLATION DES STATUTS, ET QUE, PASSANT A
L'EXAMEN D'AUTRES FAITS REPROCHES AU DEMANDEUR CONCERNANT LA GARANTIE FONCIERE
INTERNATIONALE, LA COUR DECLARE « QUE, LA AUSSI, LES FAITS DENONCES SOUS
LA QUALIFICATION D'ESCROQUERIE DANS LE CADRE DE
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393
CETTE SCI CONSTITUENT, POUR PARTIE, EN CE QUI CONCERNE CHRISTIAN
X..., DES FAITS D'ABUS DE CONFIANCE» ;
ALORS D'UNE PART LES JUGES DU FOND ONT LE DEVOIR DE QUALIFIER
LES FAITS QU'ILS RETIENNENT COMME DES INFRACTIONS, ET QUE LA COUR D'APPEL N'A
PU, SANS OMETTRE DE DONNER UNE BASE LEGALE A SA DECISION, LAISSER DANS
L'IMPRECISION LE POINT DE SAVOIR SI ELLE REPRIMAIT UN CERTAIN NOMBRE DE FAITS
COMME COMPLICITE D'ESCROQUERIE OU COMME ABUS DE CONFIANCE ;
ALORS D'AUTRE PART QUE LES TRIBUNAUX CORRECTIONNELS NE PEUVENT
STATUER LEGALEMENT QUE SUR LES FAITS RELEVES PAR LE TITRE DE POURSUITE ET QUE
L'ORDONNANCE DE RENVOI NE RELEVE AUCUN FAIT DE DETOURNEMENT COMMIS PAR LE
DEMANDEUR SOIT AU PREJUDICE DES SOCIETES GALILEE, TIPHAINE ET IENA, SOIT AU
PREJUDICE DE LA GARANTIE FONCIERE CAPITAL ;
ALORS EGALEMENT EN CE QUI CONCERNE LE DELIT D'ESCROQUERIE QUE LE
SEUL FAIT D'ADRESSER UNE LETTRE COMMINATOIRE AUX SOCIETES GALILEE, TIPHAINE ET
IENA NE SAURAIT CONSTITUER UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE, TENDANT A REALISER UNE
ESCROQUERIE AU PREJUDICE DE CES SOCIETES, DES LORS, QUE SI LES JUGES DU FOND
CONSTATENT QU'IL N'EXISTAIT AUCUNE CONVENTION AYANT PREVU DES INTERETS A LA
CHARGE DE CES SOCIETES, ILS NE CONSTATENT PAS QUE LE DEMANDEUR AIT FAIT ETAT
POUR OBTENIR CE VERSEMENT D'UNE QUELCONQUE CONVENTION, NI QU'IL AIT PAR UNE
MACHINATION QUELCONQUE TENTE DE FAIRE CROIRE A L'EXISTENCE DE CES CONVENTIONS
;
ALORS SURABONDAMMENT QUE LES MEMES FAITS TELS QU'ILS SONT
CONSTATES PAR LES JUGES DU FOND NE SAURAIENT CONSTITUER A LA CHARGE DU
DEMANDEUR LE DELIT D'ESCROQUERIE A L'ENCONTRE DES SOUSCRIPTEURS, DES LORS QU'IL
RESULTE DES CONSTATATIONS DE L'ARRET QUE LES INTERETS RECLAMES AUXDITES
SOCIETES AURAIENT ETE PORTES COMME PRODUITS D'EXPLOITATION DE L'EXERCICE 1970,
ET, PAR AILLEURS, QUE X... N'AURAIT ETE PRESIDENT DE LA COFRAGIM, GERANT DE LA
GARANTIE FONCIERE REVENUS, QUE DEPUIS LE 14 JANVIER 1971, DE TELLE SORTE QUE
L'ARRET NE JUSTIFIE PAS DE LA PART QUE LE DEMANDEUR AURAIT PRIS A LA MANOEUVRE
REPRIMEE, DONT IL EST DU RESTE IMPOSSIBLE DE SAVOIR A LA LECTURE DE L'ARRET, SI
ELLE EST OU NON DISTINCTE DE LA PUBLICITE MENSONGERE ;
ALORS SURABONDAMMENT QUE SI L'ARRET NOTE QUE LE DEMANDEUR AURAIT
SIGNE L'ACTE DE CESSION DE L'IMMEUBLE DU 12 DE LA RUE DES PARTANTS, IL NE
PRECISE PAS LA PART QUE LE DEMANDEUR AURAIT EUE DANS LA COMPTABILISATION DE LA
PLUS-VALUE DE CESSION AU COMPTE
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comptes
394
LOYER (NI, A FORTIORI DANS LA DISTRIBUTION), ET NE PRECISE PAS,
LA NON PLUS, DANS QUELLE MESURE LA PRETENDUE MANOEUVRE FRAUDULEUSE A LAQUELLE
LE DEMANDEUR AURAIT PRIS PART A CONSTITUE UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE AUTONOME,
OU SI ELLE A SEULEMENT CONCOURU A CREER LA FACADE, PRETEE A LA GARANTIE
FONCIERE REVENUS EN VUE D'UNE PUBLICITE MENSONGERE ;
ALORS ENFIN QUE SI LES JUGES DU FOND ONT CONSTATE QUE LE
DEMANDEUR AURAIT SIGNE L'ACTE DE CESSION DE L'IMMEUBLE DU 12,
RUE DES PARTANTS A LA GARANTIE FONCIERE CAPITAL, POUR ALIMENTER LA TRESORERIE
DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS, IL NE RESULTE PAS DES CONSTATATIONS DES JUGES
DU FOND QUE LE DEMANDEUR AIT EN QUOI QUE CE SOIT PARTICIPE A L'UTILISATION DES
FONDS AINSI DEGAGES, ET CONTRIBUE A DETOURNER OU DISSIPER LES FONDS PROVENANT
DE LA VENTE « ;
LE QUATRIEME MOYEN, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 408 DU CODE
PENAL, DES ARTICLES 485, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, «EN CE QUE
L'ARRET ATTAQUE DECLARE LE DEMANDEUR COMPLICE D'UN ABUS DE CONFIANCE COMMIS PAR
C... AU PREJUDICE DE LA GARANTIE FONCIERE INTERNATIONALE, ABUS DE CONFIANCE QUI
AURAIT CONSISTE A FAIRE SOUSCRIRE EN ESPECES PAR LA GARANTIE FONCIERE
INTERNATIONALE DES ACTIONS D'UNE SOCIETE MIDILUX QUI VENAIT D'ABSORBER UNE
SOCIETE CRT REAL ESTATE TRUST, ACTIONS QUI N'AURAIENT, D'APRES L'ARRET, VALU
QUE 50% DU PRIX DE SOUSCRIPTION ;
QUE POUR CARACTERISER LA PRETENDUE COMPLICITE DU DEMANDEUR LA
COUR ENONCE « QUE X... CHRISTIAN A AIDE ET ASSISTE C... ROBERT TOUT AU
LONG DE L'ACTION, QU'IL NE PEUT VENIR PRETENDRE QU'IL IGNORAIT LE CONTENU DE CE
QU'IL SIGNAIT ALORS QU'IL PARTICIPAIT A TOUTES LES TRACTATIONS ;
QUE C'EST AVEC CONNAISSANCE QU'IL A AIDE C... (ROBERT) DANS SON
ENTREPRISE FRAUDULEUSE» ;
ALORS D'UNE PART QUE LES TRIBUNAUX CORRECTIONNELS DISQUALIFIENT
LES FAITS OBJET DE LA POURSUITE, ILS NE PEUVENT CEPENDANT STATUER LEGALEMENT
QUE SUR LES FAITS RELEVES PAR LE TITRE DE POURSUITE, ET QUE L'ORDONNANCE DE
RENVOI NE RELEVE AUCUN FAIT DE COMPLICITE AU DETOURNEMENT COMMIS PAR X... A
L'ENCONTRE DE LA GARANTIE FONCIERE INTERNATIONALE ;
ALORS D'AUTRE PART QUE LES FAITS DE COMPLICITE PAR AIDE OU
ASSISTANCE SUPPOSENT DE LA PART DU PREVENU DE COMPLICITE UNE
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395
AIDE DANS LES FAITS QUI ONT PREPARE, FACILITE OU CONSOMME
L'ACTION PRINCIPALE, QUE, S'AGISSANT DE LA COMPLICITE D'ABUS DE CONFIANCE, IL
FAIT QUE LES FAITS REPROCHES AUX COMPLICES AIENT PREPARE, FACILITE OU CONSOMME
LE DETOURNEMENT OU LA DISSIPATION, ELEMENTS CARACTERISTIQUES ESSENTIELS DU
DELIT D'ABUS DE CONFIANCE, ET, QU'EN L'ESPECE ACTUELLE, IL NE RESSORT D'AUCUNE
CONSTATATION DE L'ARRET QUE X... CHRISTIAN AIT, PAR UNE ACTION POSITIVE, AIDE,
FACILITE LE DETOURNEMENT OU LA DISSIPATION DE 265000 DOLLARS PROVENANT DES
FONDS DE LA GARANTIE FONCIERE INTERNATIONALE, QUE « L'ACCORD «
RAPPORTE PAR L'ARRET, QU'IL AURAIT DONNE A LA SOUSCRIPTION EN ESPECES DE 26301
ACTIONS DE MIDILUX APRES L'ABSORPTION PAR CELLE-CI DE CRT REAL ESTATE TRUST,
ACCORD QUI N'ETAIT DU RESTE PAS NECESSAIRE, X... N'ETANT PLUS D'APRES LES
CONSTATATIONS DE L'ARRET PRESIDENT DE COFRAGIM A L'EPOQUE DE LA SOUSCRIPTION,
NE POUVANT CONSTITUER UN FAIT D'AIDE OU D'ASSISTANCE AUX FAITS DE DETOURNEMENT
;
ALORS ENFIN QUE L'AIDE OU L'ASSISTANCE DOIVENT ETRE RELIEES AU
FAIT PRINCIPAL PAR LA VOLONTE D'EN FACILITER L'ACCOMPLISSEMENT, ET QUE SI
L'ARRET CONSTATE QUE X... CHRISTIAN NE PEUT VENIR PRETENDRE QU'IL IGNORAIT LE
CONTENU DE CE QU'IL SIGNAIT, CEPENDANT QU'IL PARTICIPAIT A TOUTES LES
TRACTATIONS, IL NE RESULTE DE CE MOTIF, NI QUE LE DEMANDEUR AIT EU LA VOLONTE
D'AIDER AU DETOURNEMENT, NI MEME QUE LE DEMANDEUR AIT SU QUE LES ACTES QU'IL
ACCOMPLISSAIT POUVAIENT AIDER OU FACILITER LA PREPARATION OU LA CONSOMMATION
D'UN DETOURNEMENT COMMIS PAR C... ;
» ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE
ET DE CELLES DU JUGEMENT DONT IL A ADOPTE LES MOTIFS NON CONTRAIRES QUE, DE
1968 A JANVIER 1972, LES DIRIGEANTS SUCCESSIFS DE LA COMPAGNIE FRANCAISE
D'INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS (COFRAGIM), SOCIETE DE GERANCE DES SOCIETES
CIVILES IMMOBILIERES DENOMMEES « GARANTIE FONCIERE REVENUS «, «
GARANTIE FONCIERE CAPITAL « ET « GARANTIE FONCIERE INTERNATIONALE
«, ONT EMPLOYE DES MANOEUVRES FRAUDULEUSES QUI, TENDANT A PERSUADER LES
DETENTEURS DE CAPITAUX DE L'EXISTENCE D'UNE ENTREPRISE QUI ETAIT FAUSSE ET D'UN
CREDIT IMAGINAIRE, ONT DETERMINE CES PERSONNES A SOUSCRIRE DES PARTS DES
SOCIETES CIVILES SUSMOMMEES ET A LEUR REMETTRE DES SOMMES CONSIDERABLES DONT LE
MONTANT TOTAL A ETE EVALUE A 227026000 FRANCS, LA PLUS GRANDE PART DE CES
FONDS, SOIT 219597000 FRANCS, AYANT ETE VERSEE A LA GARANTIE FONCIERE REVENUS
;
QUE CES MANOEUVRES FRAUDULEUSES ONT ESSENTIELLEMENT CONSISTE EN
UNE ORGANISATION PUBLICITAIRE ENVAHISSANTE ET MULTIFORME QUI AVAIT, NOTAMMENT,
POUR SUPPORTS DES ANNONCES DE PRESSE, UNE PROFUSION D'AFFICHES, DE PLAQUETTES,
DE
La responsabilité du commissaire aux
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396
BROCHURES ET MEME UN PERIODIQUE INTITULE « JOURNAL DE LA
GARANTIE FONCIERE « ET QUI FAISAIT ETAT DES NOMS ET DES QUALITES DE
DIVERSES PERSONNALITES APPAREMMENT IRREPROCHABLES AU SEIN DES ORGANISMES DE
DIRECTION ET DE CONTROLE DES SOCIETES CIVILES
;
QUE CETTE PUBLICITE INSISTAIT INLASSABLEMENT, EN REPRODUISANT
DES COMPTES ERRONES ET SPECIALEMENT DES FAUX BILANS, SUR LA SECURITE QU'OFFRAIT
AUX EPARGNANTS LE PLACEMENT QUI LEUR ETAIT OFFERT ET L'IMPORTANCE DES REVENUS
QUI LEUR ETAIENT PROMIS AU TAUX DE 10,25% PAR AN ;
QU'EN REALITE, DU FAIT DE LA RENTABILITE INSUFFISANTE DES
INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS REALISES, DE LA GESTION MALSAINE ET EXCESSIVEMENT
ONEREUSE DES SOCIETES CIVILES, DES DETOURNEMENTS FRAUDULEUX TRES IMPORTANTS
COMMIS PAR LES DIRIGEANTS, LES TROIS GARANTIES FONCIERES N'AVAIENT AUCUNEMENT
LA SITUATION PROSPERE DONT IL ETAIT FAIT ETAT AUPRES DU PUBLIC ET NE POUVAIENT
SERVIR L'INTERET ELEVE QU'ELLES PROMETTAIENT QU'EN PRATIQUANT DIVERS ARTIFICES
FINANCIERS QUE LES JUGES DU FOND DECRIVENT ET ANALYSENT ET QUI ABOUTISSAIENT,
EN FAIT, A PRELEVER SUR LE CAPITAL ET SUR LES APPORTS DES NOUVEAUX
SOUSCRIPTEURS LES REVENUS QUI ETAIENT DISTRIBUES ;
ATTENDU QUE LES JUGES PRECISENT QUE X..., ADMINISTRATEUR DE LA
COFRAGIM DU 1ER JUILLET 1969 AU 14 JANVIER 1971, EN A ETE ENSUITE LE
PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL JUSQU'AU 25 MAI 1971, PUIS LE VICE-PRESIDENT, DE
CETTE DERNIERE DATE JUSQU'EN 1971 ;
QU'EN CES DIVERSES QUALITES, IL EST DEVENU UN DES HOMMES DE
CONFIANCE DE C... ROBERT, LE CREATEUR ET L'ANIMATEUR DU GROUPE DE SOCIETES ;
QU'IL A DONNE LA CAUTION DE SA PERSONNALITE A LA PUBLICITE
FALLACIEUSE ;
QU'IL EST INTERVENU PERSONNELLEMENT ET CONSCIEMMENT DANS DE
NOMBREUSES OPERATIONS FRAUDULEUSES QUI AVAIENT POUR EFFET, SOIT DE FAIRE
APPARAITRE COMME PRODUITS NETS D'EXPLOITATION ET COMME REVENUS DISTRIBUABLES
DES SOMMES QUI ETAIENT PRELEVEES EN REALITE SUR LE CAPITAL DES SOCIETES
CIVILES, SOIT DE PERMETTRE A C... DE DETOURNER UNE PARTIE IMPORTANTE DES FONDS
SPECIALEMENT RECUEILLIS PAR LA GARANTIE FONCIERE INTERNATIONALE
;
La responsabilité du commissaire aux
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397
ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL CONCLUT QU'A RAISON DE CES FAITS,
X... S'EST RENDU COUPABLE, D'UNE PART, EN QUALITE DE COAUTEUR, DE L'ESCROQUERIE
AVEC APPEL AU PUBLIC QUI A ETE COMMISE AU PREJUDICE DES SOUSCRIPTEURS DES
SOCIETES CIVILES ET, D'AUTRE PART, COMME COMPLICE PAR AIDE ET ASSISTANCE, DE
L'ABUS DE CONFIANCE, EGALEMENT COMMIS AVEC LA CIRCONSTANCE AGGRAVANTE D'APPEL
AU PUBLIC, QUI A ETE RETENU CONTRE C... AU SEIN DE LA GARANTIE FONCIERE
INTERNATIONALE ;
ATTENDU QUE PAR L'ENSEMBLE DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS
QUI ECHAPPENT A TOUT GRIEF D'INSUFFISANCE ET DE CONTRADICTION ET QUI
CARACTERISENT LA PARTICIPATION QUE X... A PRISE PAR DES ACTES POSITIFS
RESULTANT DE SES ACTIVITES D'ADMINISTRATEUR OU DE PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL
DE LA COFRAGIM AUX MANOEUVRES FRAUDULEUSES CONSTITUTIVES DE L'ESCROQUERIE AUSSI
BIEN QU'AU DETOURNEMENT DE FONDS DONT IL A ETE DECLARE LE COMPLICE, LES JUGES
DU FAIT ONT JUSTIFIE LEUR DECISION ;
QU'EN EFFET, D'UNE PART, C'EST A BON DROIT QU'ILS ONT CONSIDERE
QUE L'ORGANISATION PUBLICITAIRE CREEE ET UTILISEE PAR LES DIRIGEANTS DE FAIT OU
DE DROIT DE LA COFRAGIM, EN PARTICULIER PAR X..., CARACTERISAIT UNE MANOEUVRE
FRAUDULEUSE AU SENS DE L'ARTICLE 405 DU CODE PENAL ET QUE CE FAIT DEVAIT ETRE
RETENU EN TANT QU'ELEMENT CONSTITUTIF DE L'ESCROQUERIE QUI A ETE CONSOMMEE AU
PREJUDICE DES SOUSCRIPTEURS DES SOCIETES CIVILES
;
QU'A CET EGARD, IL NE SAURAIT ETRE ADMIS, COMME LE SOUTIENT
VAINEMENT LE PREMIER MOYEN, QUE SEUL AURAIT DU ETRE RETENU LE DELIT DISTINCT DE
PUBLICITE MENSONGERE PREVU ET REPRIME PAR LES LOIS DU 2 JUILLET 1963, 27
DECEMBRE 1973, ET 1ER AOUT 1905, DES LORS QUE LES JUGES DU FOND ONT CONSTATE
QUE LA MISE EN SCENE PUBLICITAIRE UTILISEE EN L'ESPECE TENDAIT A PERSUADER LES
SOUSCRIPTEURS DE L'EXISTENCE D'UNE FAUSSE ENTREPRISE ET D'UN CREDIT IMAGINAIRE
;
QUE, D'AUTRE PART, EN RETENANT SOUS LA QUALIFICATION D'ABUS DE
CONFIANCE, UN FAIT QUE LA PREVENTION AVAIT, A TORT, ENGLOBE DANS LA
QUALIFICATION GENERALE D'ESCROQUERIE ALORS QU'IL CONSTITUAIT, AINSI QUE
L'EXPOSE L'ARRET, LE DETOURNEMENT FRAUDULEUX D'UNE SOMME DE 265000 DOLLARS AU
PREJUDICE DE LA GARANTIE FONCIERE INTERNATIONALE, LA COUR D'APPEL N'A AJOUTE
AUCUN ELEMENT NOUVEAU AUX FAITS DONT ELLE ETAIT SAISIE ET A JUSTIFIE LA
La responsabilité du commissaire aux
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398
DISQUALIFICATION QU'ELLE A OPEREE ;
D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS REUNIS NE SAURAIENT ETRE ACCUEILLIS
;
SUR LES CINQUIEME ET SIXIEME MOYENS DE CASSATION REUNIS, ET PRIS
:
LE CINQUIEME MOYEN, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 437, 3, DE LA
LOI N° 66-537 DU 24 JUILLET 1966, DES ARTICLES 485 ET 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, VIOLATION DE L'ARTICLE 9 DE LA DECLARATION DES DROITS DE
L'HOMME ET DU CITOYEN, «EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE
DEMANDEUR COUPABLE D'ABUS DE BIENS SOCIAUX AU PREJUDICE DE LA COFRAGIM, AUX
MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QU'IL AURAIT, EN TEMPS QUE PRESIDENT DE CETTE
SOCIETE VERSE AU CABINET AMERICAIN CLEARY GOTLIEB DES HONORAIRES D'UN MONTANT
DE 44854,00 FRANCS POUR UNE CONSULTATION QUI AURAIT ETE DONNEE PERSONNELLEMENT
A C... A NEW-YORK ;
QUE X... A DECLARE AVOIR SIGNE CE CHEQUE SUR LES INSTRUCTIONS DE
C... SANS EN CONNAITRE LE MOTIF EXACT, MAIS QUE, COMPTE TENU D'AUTRES
INFRACTIONS COMMISES, PAR LUI DANS LE PREMIER SEMESTRE DE 1971, SA BONNE FOI NE
SAURAIT ETRE ADMISE ;
ALORS D'UNE PART QUE LE DELIT D'ABUS DE BIENS SOCIAUX N'EST
CONSTITUE A LA CHARGE DU PRESIDENT D'UNE SOCIETE ANONYME, QUE POUR AUTANT QU'IL
AIT, DE MAUVAISE FOI, FAIT DES BIENS DE LA SOCIETE UN USAGE QU'IL SAVAIT
CONTRAIRE A L'INTERET DE CELLE-CI A DES FINS PERSONNELLES OU POUR FAVORISER UNE
AUTRE SOCIETE OU ENTREPRISE, DANS LAQUELLE IL ETAIT INTERESSE DIRECTEMENT OU
INDIRECTEMENT, ET QUE LA DECISION ATTAQUEE N'INDIQUE PAS L'INTERET PERSONNEL
QUE LE DEMANDEUR AURAIT EU A REGLER LES HONORAIRES DE CLEARY ET GOTLIEB ;
ALORS D'AUTRE PART, QUE TOUTE DECISION DOIT ETRE MOTIVEE ET QUE
LES JUGES DU FOND AVAIENT LE DEVOIR D'INDIQUER DE FACON PRECISE LA NATURE DE LA
CONSULTATION PRISE PAR C... ROBERT A NEW-YORK ET DE RECHERCHER SI CELLE-CI
ENTRAIT OU NON DANS L'OBJET NORMAL DE LA COFRAGIM ET CE D'AUTANT PLUS QUE
L'OBJET TEL QUE CONSTATE PAR LES PREMIERS JUGES, DONT LA COUR A ADOPTE LES
MOTIFS, ETAIT DES PLUS LARGES, PUISQU'IL COMPORTAIT LA GESTION D'IMMEUBLES SANS
AUCUNE RESTRICTION, L'ACQUISITION ET LA CESSION D'IMMEUBLES POUR LE COMPTE DE
TIERS, ET, D'UNE FACON GENERALE L'EXECUTION DE TOUS MANDATS QUI POURRAIENT LUI
ETRE CONFIES DANS LE DOMAINE IMMOBILIER ;
ALORS EGALEMENT, QUE L'INTENTION FRAUDULEUSE D'UN PREVENU
DOIT
La responsabilité du commissaire aux
comptes
399
ETRE APPRECIEE, POUR CHAQUE CAS PARTICULIER, QUE LA PRESOMPTION
D'INNOCENCE DONT BENEFICIE TOUT CITOYEN EN VERTU DE LA DECLARATION DES DROITS
DE L'HOMME ET DU CITOYEN REAFFIRMEE PAR LA CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958,
S'ETEND AUSSI BIEN A L'ELEMENT MATERIEL QU'A L'ELEMENT INTENTIONNEL DU DELIT,
ET QU'ELLE DOIT EN OUTRE ETRE CONSTATEE DANS CHAQUE CAS PARTICULIER, DE TELLE
SORTE, QUE SOUS PEINE DE FAIRE ECHEC A CETTE PRESOMPTION D'INNOCENCE, LA COUR
D'APPEL NE POUVAIT ADOPTER LES MOTIFS DES PREMIERS JUGES SELON LESQUELS LA
BONNE FOI DU DEMANDEUR NE SAURAIT ETRE ADMISE « COMPTE TENU D'AUTRES
INFRACTIONS COMMISES PAR LUI DANS LE PREMIER SEMESTRE DE 1951 « ;
ALORS ENFIN QUE LE DELIT D'ABUS DE BIENS SOCIAUX N'EST CONSTITUE
QU'A LA CHARGE DU PREVENU QUI SAIT QUE L'USAGE QU'IL FAIT DES BIENS DE LA
SOCIETE EST CONTRAIRE A L'INTERET SOCIAL ET QUE LA SIMPLE CONSTATATION DE LA
MAUVAISE FOI DU DEMANDEUR EST DONC INSUFFISANTE ;
» LE SIXIEME MOYEN, DE LA VIOLATION DES MEMES TEXTES,
«EN CE QUE LA COUR D'APPEL A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'UN ABUS DE
BIENS SOCIAUX QU'IL AURAIT COMMIS EN TANT QUE PRESIDENT DE LA SOCIETE COFRAGIM,
ABUS DE BIENS SOCIAUX QUI AURAIT PORTE SUR UNE SOMME DE 423878,58 FRANCS, PAR
LE MOTIF ADOPTE DES PREMIERS JUGES QUE, DURANT LE PREMIER TRIMESTRE 1959, C...
ET X... MANDATAIRES DE LA COFRAGIM AURAIENT FAIT REGLER PAR CETTE SOCIETE DES
FRAIS DE TRANSPORT POUR 423878 FRANCS, ALORS QUE POUR LES TROIS ANNEES
PRECEDENTES, L'ENSEMBLE DE CES FRAIS N'AURAIT PAS ATTEINT 620000 FRANCS, QUE
LES DOCUMENTS FIGURANT DANS LES SCELLES ETABLISSENT QU'UNE PARTIE DE CES FRAIS
SE RAPPORTE A DES VOYAGES DANS LE MONDE ENTIER EN VUE DE TRANSACTIONS,
D'OPERATIONS ETRANGERES A L'ACTIVITE DES GARANTIES FONCIERES, MAIS NON
ETRANGERES AUX ACTIVITES PERSONNELLES DE C... ;
QUE L'ON CONSTATE MEME DES IMPUTATIONS ERRONEES COMME LE VOYAGE
DE Y... A BARCELONE OU IL NE POUVAIT SE RENDRE ETANT INTERDIT DE SEJOUR, QUE
B... S'EST FAIT REMBOURSER PAR LA COFRAGIM UN VOYAGE CIRCULAIRE EN MARS 1971
POUR UN MONTANT DE 12443 FRANCS ;
QUE DE NOMBREUX VOYAGES A LUXEMBOURG, GENEVE, EN ESPAGNE,
EFFECTUES TANT PAR Y..., B..., CONSEIL DE SOCIETES ETRANGERES DE C..., QUE PAR
CES DERNIERS ET X..., SE RAPPORTAIENT AUX ACTIVITES DE SOCIETES
LUXEMBOURGEOISES ET SUISSES DANS LESQUELLES C... AVAIT DES INTERETS ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
400
QU'IL A MEME FRETE UN AVION POUR SE RENDRE A LUXEMBOURG POUR, LA
SEULE JOURNEE DU 5 JUILLET, ASSISTER A L'ASSEMBLEE AYANT DECIDE LA FUSION DE
DEUX SOCIETES CRT RET ET MIDILUX AU COURS DE LAQUELLE X... ET C... N'ONT
DEFENDU QUE LES INTERETS PERSONNELS DE C... ;
ALORS D'UNE PART, QUE LE DELIT D'ABUS DE BIENS SOCIAUX N'EST
CONSTITUE A LA CHARGE DU PRESIDENT D'UNE SOCIETE QUE POUR AUTANT QUE CELUI-CI A
AGI A DES FINS PERSONNELLES, OU DANS L'INTERET D'UNE SOCIETE, OU ENTREPRISE
DANS LAQUELLE IL ETAIT INTERESSE DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT ET QU'EN L'ESPECE
ACTUELLE LA DECISION ATTAQUEE NE CARACTERISE PAS L'INTERET PERSONNEL QUE X...
AURAIT EU A REGLER LES FRAIS DE DEPLACEMENT LITIGIEUX ;
ALORS D'AUTRE PART QUE LE DELIT D'ABUS DE BIENS SOCIAUX N'EST
CARACTERISE QUE POUR AUTANT QUE LE PREVENU A AGI DANS UN INTERET CONTRAIRE A
L'INTERET SOCIAL ET QUE, L'INTERET ET L'OBJET SOCIAL DE LA COFRAGIM NE SE
CONFONDANT PAS AVEC CELUI DES GARANTIES FONCIERES, AINSI QUE CELA RESULTE DES
CONSTATATIONS MEMES DES JUGES DU FOND, CEUX-CI DEVAIENT INDIQUER DE FACON
PRECISE EN QUOI LE PAIEMENT DES FRAIS DE TRANSPORT ETAIT CONTRAIRE A L'INTERET
SOCIAL ;
ALORS ENFIN, QUE L'ABUS DE BIENS SOCIAUX N'EST CONSTITUE QUE
POUR AUTANT QUE LE PREVENU SAVAIT QU'IL AGISSAIT CONTRAIREMENT A L'INTERET
SOCIAL ET QUE LA DECISION ATTAQUEE, SI ELLE AFFIRME QUE X... ETAIT DE MAUVAISE
FOI, NE PRECISE PAS D'OU RESULTE QU'IL SAVAIT QU'IL AGISSAIT CONTRAIREMENT A
L'INTERET SOCIAL ;
» ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS DES JUGES DU FOND
QU'EN SA QUALITE DE PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL DE LA COFRAGIM, X... A PRELEVE,
DE MAUVAISE FOI, SUR LES FONDS SOCIAUX DEUX SOMMES DE 44854,23 FRANCS ET DE
423878,58 FRANCS POUR REGLER, D'UNE PART, DES DEPENSES PERSONNELLES DE C... ET,
D'AUTRE PART, LES FRAIS DES VOYAGES FAITS PAR CE DERNIER, PAR B... ET PAR
LUI-MEME DANS LE MONDE ENTIER, VOYAGES QUI N'INTERESSAIENT AUCUNEMENT LA
COFRAGIM ;
ATTENDU QUE PAR CES CONSTATATIONS DESQUELLES SE DEDUIT
NECESSAIREMENT LA REUNION DE TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DES DELITS D'ABUS
DE BIENS SOCIAUX DONT X... A ETE DECLARE COUPABLE ET, NOTAMMENT, L'INTERET
PERSONNEL QUI Y A TROUVE LE PREVENU, LES JUGES DU FOND ONT DONNE UNE BASE
LEGALE A LEUR
La responsabilité du commissaire aux
comptes
401
DECISION ;
QUE, DES LORS, LES MOYENS REUNIS DOIVENT ETRE REJETES ;
II SUR LE POURVOI DE Y... : SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 60, 408 ET 460 DU CODE PENAL, DES ARTICLES 75
ET SUIVANTS DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE
PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, «EN CE
QUE L'ARRET ATTAQUE CONFIRME LE JUGEMENT CONDAMNANT LE DEMANDEUR POUR
COMPLICITE D'ABUS DE CONFIANCE COMMIS PAR D... DE E... ANDRE AU PREJUDICE DE LA
GARANTIE FONCIERE ET L'INFIRME EN CONDAMNANT LE DEMANDEUR POUR COMPLICITE DE
RECEL D'ABUS DE CONFIANCE COMMIS PAR C... ;
AUX MOTIFS, NOTAMMENT, QU'IL A DEBITE LE 11 MAI 1970 LE COMPTE
DE LA GARANTIE FONCIERE OUVERT EN SON ETUDE DE 4800000 FRANCS, PRIX DES
ANCIENNES ACTIONS DE LA SOCIETE FRANCIA-LAFAYETTE, ET A CREDITE, DU 30 AVRIL AU
11 MAI 1970, LE COMPTE DE LA SOCIETE DU MONTANT DES ACTIONS NOUVELLES
SOUSCRITES PAR LES ASSOCIES ORIGINAIRES ;
QUE, SANS ORDRE DE CESSION DES SOUSCRIPTEURS, IL A SOLDE FIN
MAI, DEBUT JUILLET 1970 LE COMPTE « GARANTIE FONCIERE «, ET CONVERTI
LE SOLDE EN PIECES D'OR, QU'IL A REMIS A C... ROBERT SANS QUALITE POUR LES
RECEVOIR, LEQUEL S'EST DEFAIT D'UNE FAIBLE PARTIE DE CET OR EN FAVEUR DES
SOUSCRIPTEURS ;
QU'IL A PU CONSTATER LA DIFFERENCE ENTRE LES PRIX D'ACHAT DES
ACTIONS PAR LES PRETE-NOMS ET CELUI DEMANDE A LA GARANTIE FONCIERE, QU'IL N'A
JAMAIS VU LES INTERMEDIAIRES, SE CONTENTANT DE RECEVOIR DE D... DE E... DES
DOCUMENTS AFFIRMANT FAUSSEMENT QUE LES SOUSCRIPTEURS AVAIENT ETE PAYES DU
MONTANT SUREVALUE DE LEURS ACTIONS ;
QUE, SANS MANDAT DE CES INTERMEDIAIRES, IL A PASSE LES PREMIERS
ORDRES D'ACHAT D'OR LE 30 AVRIL 1970 ;
QU'IL A REMIS LE 8 MAI 1970 DES PIECES D'OR A C..., ALORS QUE
LES ACTIONS NOUVELLES N'ETAIENT PAS LIBEREES ET NE POUVAIENT ETRE CEDEES ;
QUE DEUX ACTES AUTHENTIQUES DRESSES LE 11 MAI 1970 N'AURAIENT
La responsabilité du commissaire aux
comptes
402
PAS ETE SIGNES EN SON ETUDE ;
QU'IL NE PEUT SOUTENIR QUE LE CARACTERE FRAUDULEUX DE
L'OPERATION LUI ECHAPPAIT ;
ALORS QUE L'INTENTION DELICTUEUSE DU DEMANDEUR, QUI NE RESULTE
PAS DES OPERATIONS PAR LUI EFFECTUEES, LESQUELLES SONT PARFAITEMENT REGULIERES,
NE RESULTE PAS DAVANTAGE DES FAITS CONSTATES PAR L'ARRET, NOTAMMENT DE CE QUE
LE DEMANDEUR AIT CONNU LA DIFFERENCE ENTRE LE PRIX DE SOUSCRIPTION DES ACTIONS
ET LE PRIX DE LEUR REVENTE PAR LES SOUSCRIPTEURS A LA GARANTIE FONCIERE, LES
SOUSCRIPTEURS AYANT LE DROIT DE REVENDRE LES ACTIONS NOUVELLES A UN PRIX
SUPERIEUR A CELUI AUQUEL ILS LES AVAIENT ACHETEES ;
QUE CETTE INTENTION DELICTUEUSE EST AU SURPLUS INFIRMEE PAR LE
FAIT, CONSTATE PAR L'ARRET, QUE L'AUTEUR PRINCIPAL A TRANSMIS AU DEMANDEUR DES
DUPLICATA AFFIRMANT FAUSSEMENT QUE LES SOUSCRIPTEURS AVAIENT BIEN ETE PAYES DU
MONTANT SUREVALUE DE LEUR ACTIONS, DOCUMENTS DONT L'ARRET NE CONSTATE PAS QUE
LE DEMANDEUR AIT CONNU LE CARACTERE DE FAUX DONT L'EXISTENCE EUT ETE SUPERFLUE,
S'ILS N'AVAIENT EU POUR BUT DE TROMPER LE DEMANDEUR, TANT SUR LA COMMISSION DE
L'ABUS DE CONFIANCE, QUE SUR LE RECEL ;
QU'ENFIN, L'ARRETE ATTAQUE N'AURAIT PU RETENIR LA COMPLICITE DE
RECEL D'ABUS DE CONFIANCE QUE S'IL AVAIT CONSTATE QUE LE DEMANDEUR, EN
REMETTANT LES SACS D'OR A C..., AVAIT SU D'ORES ET DEJA QUE CE DERNIER EN
CONSERVERAIT UNE PARTIE POUR LUI ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DES JUGES DU FOND
QU'AGISSANT A L'INSTIGATION DE C..., D... DE E..., ALORS PRESIDENT-DIRECTEUR
GENERAL DE LA COFRAGIM, A FAIT ACHETER PAR LA GARANTIE FONCIERE REVENUS LES
ACTIONS D'UNE SOCIETE ANONYME FRANCIA-LAFAYETTE, PROPRIETAIRE D'UN IMMEUBLE,
POUR LE PRIX GLOBAL DE 4800000 FRANCS ;
QU'AFIN DE PERMETTRE A C... DE REALISER, A L'OCCASION DE CETTE
OPERATION, UN TRES IMPORTANT PROFIT OCCULTE AU PREJUDICE DE LA GARANTIE
FONCIERE REVENUS, IL A ETE IMAGINE DE PROCEDER SIMULTANEMENT A UNE AUGMENTATION
DU CAPITAL DE LA SOCIETE FRANCIA-LAFAYETTE PORTANT SUR LA CREATION DE 800
ACTIONS NOUVELLES QUI ONT ETE CENSEES AVOIR ETE SOUSCRITES, NOTAMMENT, PAR SIX
PRETE-NOMS AU PRIX DE 600 FRANCS, CES ACTIONS AYANT ETE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
403
ENSUITE RECEDEES, A LA GARANTIE FONCIERE REVENUS AU PRIX DE 4800
FRANCS CHACUNE, QUE, GRACE A CE SUBTERFUGE, QUI A PORTE LE PRIX PAYE
EFFECTIVEMENT PAR LADITE SOCIETE CIVILE POUR L'ACQUISITION DE LA SOCIETE
FRANCIA-LAFAYETTE A 8622000 FRANCS, C... A PU SE FAIRE REMETTRE FINALEMENT,
TOUS FRAIS DEDUITS, UNE SOMME DE 2572000 FRANCS ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER LE NOTAIRE Y... COUPABLE DE S'ETRE
RENDU COMPLICE DES DELITS D'ABUS DE CONFIANCE ET DE RECEL DES FONDS PROVENANT
DE CET ABUS DE CONFIANCE POUR LESQUELS D... DE E... ET C... ONT ETE
RESPECTIVEMENT CONDAMNES, LES JUGES CONSTATENT QUE CET OFFICIER PUBLIC, EN LA
CHARGE DE QUI L'OPERATION A ETE REALISEE, A RECU LA SOMME DE 8622000 FRANCS EN
PROVENANCE DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS SACHANT QUE LE PRIX REEL DES ACTIONS
ANCIENNES DE LA SOCIETE FRANCIA-LAFAYETTE N'EXCEDAIT PAS 4800000 FRANCS ;
QU'IL A PU ENSUITE CONSTATER LA DIFFERENCE CONSIDERABLE EXISTANT
ENTRE LE PRIX PAYE PAR LES PRETENDUS SOUSCRIPTEURS POUR LES ACTIONS NOUVELLES
ET CELUI AUQUEL LA GARANTIE FONCIERE REVENUS LES A ACQUISES ET QUE CETTE
CESSION EST INTERVENUE ALORS QUE LES ACTIONS, N'ETANT PAS LIBEREES PAR CEUX QUI
ETAIT CENSES LES AVOIR SOUSCRITES, N'ETAIENT PAS NEGOCIABLES ;
QUE, CEPENDANT, SANS AVOIR RECU AUCUN ORDRE DE CES
SOUSCRIPTEURS, Y... A REMIS A C..., QUI N'AVAIT AUCUNE QUALITE POUR LE
RECEVOIR, LE PRIX DE CES ACTIONS SOUS FORME DE PIECES D'OR QU'IL AVAIT COMMENCE
D'ACHETER EN GRANDES QUANTITES DES LE 30 AVRIL 1970 AVANT MEME QUE
L'AUGMENTATION DE CAPITAL AIT ETE DECIDEE PAR UNE ASSEMBLEE GENERALE ;
ATTENDU QUE LES JUGES CONCLUENT QU'AU VU DE CES FAITS, IL EST
CONSTANT QU'AVEC CONNAISSANCE, Y... A AIDE ET ASSISTE D... DE E... ET C... DANS
LES FAITS QUI ONT PREPARE, FACILITE ET CONSOMME LES DELITS D'ABUS DE CONFIANCE
ET DE RECEL DES FONDS OBTENUS PAR CE DELIT QUI ONT ETE RETENUS CONTRE CES
DERNIERS ;
ATTENDU QUE PAR CES ENONCIATIONS, LES JUGES DU FOND ONT RELEVE
L'EXISTENCE DE TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DES DELITS DONT ILS ONT DECLARE
Y... COUPABLE, NOTAMMENT LA MAUVAISE FOI DU PREVENU QU'ILS ONT DEDUITE SANS
CONTRADICTION DES FAITS SOUVERAINEMENT CONSTATES PAR EUX ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
404
III SUR LE POURVOI DE Z... : SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 59, 60 ET 405 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE,
«EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COMPLICE D'ESCROQUERIE
AVEC APPEL AU PUBLIC ;
AUX MOTIFS QU'IL A CERTIFIE LA REALITE DE TOUS LES CHIFFRES
PORTES AU BILAN DE L'EXERCICE 1968 DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS ET LEUR
AFFECTATION CONFORME AUX STATUTS, QU'IL A AINSI PROCEDE EN EXCIPANT DE LA
QUALITE DE COMMISSAIRE AUX COMPTES ET CE EN VISANT EXPRESSEMENT LE DECRET
N° 68-259 DU 15 MARS 1968 DANS SON RAPPORT ;
ALORS QU'IL N'ETAIT PAS INSCRIT SUR UNE DES LISTES PREVUES A
L'ARTICLE 219 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 OU A L'ARTICLE 305 DU DECRET DU 23
MARS 1967, AINSI QUE LE PREVOIT L'ARTICLE 7-13° DUDIT DECRET N°
68-259, QUE LE BILAN CERTIFIE PAR Z... ETAIT INEXACT, AINSI QU'IL A ETE
CONSTATE, ET QUE CES INEXACTITUDES N'ETAIENT PAS INCONSCIENTES, QUE LE PREVENU
N'A PU, DANS SON RAPPORT, INDIQUER AUX ASSOCIES QUE LA REPARTITION DES REVENUS
ETAIT FONDEE SUR «LES BENEFICES DE L'EXERCICE «, SANS S'APERCEVOIR
QUE CETTE AFFIRMATION NE REPOSAIT SUR AUCUNE DONNEE PRECISE, ET CE, ALORS QUE
LES STATUTS DE LA SOCIETE AUXQUELS IL A PRETENDU S'ETRE CONFORME LUI IMPOSAIENT
UN COMPTE D'EXPLOITATION ET UN COMPTE DE PROFITS ET PERTES QU'IL S'EST BIEN
GARDE D'ETABLIR, QU'IL CONNAISSAIT PARFAITEMENT LA SITUATION DU GROUPE C...,
QUE LES CONDITIONS DANS LESQUELLES IL A CERTIFIE SON BILAN METTENT A NEANT LES
EXPLICATIONS QU'IL A FOURNIES QUANT AUX « PRELOYERS « ET AU POSTE
« LOYER «, QUE CES EXPLOITATIONS DEMONTRENT AU CONTRAIRE, COMPTE TENU
DES AUTRES ELEMENTS DE LA PROCEDURE, LA CONSCIENCE QU'IL AVAIT DE MASQUER LA
VERITE PAR DES MENTIONS A TOUT LE MOINS EQUIVOQUES ;
ALORS, D'UNE PART, QUE LA SEULE REFERENCE, SANS AUTRE PRECISION,
AU DECRET DU 15 MARS 1968, ETAIT INSUFFISANTE POUR ETABLIR, AUPRES DU PUBLIC,
LA QUALITE DE COMMISSAIRE INSCRIT SUR UNE LISTE DU CERTIFICATEUR ET QU'EN TOUT
ETAT DE CAUSE, LE DEMANDEUR N'A PAS ETE POURSUIVI DE CE CHEF MAIS COMME
COMPLICE DE L'ESCROQUERIE COMMISE A TITRE PRINCIPAL PAR C... ROBERT ET AUTRES
;
ALORS D'AUTRE PART, QU'EN SE REFERANT AU DECRET DU 15 MARS 1968,
LE DEMANDEUR PLACAIT EFFECTIVEMENT LE TRAVAIL DE CERTIFICATION ACCOMPLI DANS LE
CADRE DE CE DECRET, LEQUEL PREVOIT, DANS SON ARTICLE 7-13°, QUE TOUTE
PROPAGANDE OU PUBLICITE EN VUE DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
405
PROPOSER DES PLACEMENTS DE FONDS EN PARTS DE SOCIETES CIVILES
VISEES A L'ARTICLE 6, DOIT ETRE PRECEDEE DE L'INSERTION AU BALO D'UNE NOTICE
COMPORTANT DES INDICATIONS SUR LE DERNIER BILAN DE LA SOCIETE ARRETE A UNE DATE
ANTERIEURE DE DOUZE MOIS AU PLUS ET DONT LA REGULARITE ET LA SINCERITE ONT ETE
CERTIFIEES PAR UN COMMISSAIRE AUX COMPTES INSCRIT SUR UNE LISTE QUE CE TEXTE
PREVOIT LA CERTIFICATION DU BILAN, A L'EXCLUSION DE TOUT AUTRE DOCUMENT, QU'IL
NE POUVAIT DONC ETRE REPROCHE AU DEMANDEUR DE N'AVOIR PAS ETABLI DANS LE CADRE
LIMITE DE SA MISSION DE CONTROLE ;
QU'AU SURPLUS LA REFERENCE AUX STATUTS DE LA SOCIETE NE
CONCERNAIT QUE L'AFFECTATION CONFORME DES CHIFFRES DU BILAN, NON
L'ETABLISSEMENT DE DOCUMENTS RELEVANT DU PERSONNEL DE LA SOCIETE, NON EN
CERTIFICATEUR, ALORS QUE, PAR AILLEURS, EN VERTU DU MEME DECRET DU 15 MARS
1968, IL INCOMBAIT AU DEMANDEUR DE CERTIFIER, COMME IL L'A FAIT, LA REGULARITE
ET LA SINCERITE DU BILAN, NON SON EXACTITUDE, SEUL CRITERE RETENU A TORT PAR
L'ARRET ATTAQUE ;
ALORS ENFIN, EN CE QUI CONCERNE LA MAUVAISE FOI AFFIRMEE DU
DEMANDEUR, QUE LA COUR, EN INVOQUANT LES « CONDITIONS « DE LA
CERTIFICATION, QUALIFIEE « DE COMPLAISANCE « ET « LES AUTRES
ELEMENTS DE LA PROCEDURE «, SANS EXPLIQUER SUR LES UNS ET LES AUTRES N'A
PAS REPONDU AUX CONCLUSIONS D'APPEL SOLLICITANT LA CONFIRMATION DU JUGEMENT
ENTREPRIS, ET N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION, QU'EN OUTRE, APRES
AVOIR ADMIS QUE, DANS LA PERIODE INITIALE DE LEUR EXPLOITATION, LES SOCIETES
CIVILES DE PLACEMENT PEUVENT ETRE APPELEES A EFFECTUER DES PRELEVEMENTS SUR LE
CAPITAL SOUSCRIT POUR REMUNERER LES ASSOCIES A UN TAUX FIXE ANNONCE, A LA
CONDITION QUE CETTE SITUATION NE SOIT PAS FRAUDULEUSEMENT CACHEE AUX
SOUSCRIPTEURS ET NE SOIT QUE TRANSITOIRE, QU'EN L'ESPECE LES DIRIGEANTS AVAIENT
PLEINE CONSCIENCE QUE LES CONDITIONS D'EXPLOITATION NE POUVAIENT QUE SE
DEGRADER D'ANNEE EN ANNEE, LA COUR N'A PU SANS SE CONTREDIRE CONDAMNER COMME
FRAUDULEUX AUX YEUX DU DEMANDEUR L'EMPLOI D'UN PROCEDE TENDANT PRECISEMENT A LA
REMUNERATION DES ASSOCIES PENDANT LES PREMIERS MOIS DE LA VIE SOCIALE, ALORS
QUE LE DEMANDEUR N'ETAIT PAS AU NOMBRE DES DIRIGEANTS QUI POUVAIENT PREVOIR
L'AVENIR ET QUE, DANS UN SOUCI DE SINCERITE, IL A TENU A PRECISER AU POSTE
LOYERS QU'UNE SOMME DE 400000 FRANCS REPRESENTAIT LE MONTANT DES LOYERS ET
« INDEMNITES « EN COURS D'ENCAISSEMENT, EXPRESSIONS DEPOURVUES
D'EQUIVOQUE « ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE
L'EXPERT-COMPTABLE Z... A CERTIFIE LA REALITE DE TOUS LES CHIFFRES PORTES AU
BILAN DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS POUR L'EXERCICE 1968, D'UNE PART, EN SE
REFERANT AUX DISPOSITIONS DU DECRET DU 15
La responsabilité du commissaire aux
comptes
406
MARS 1968 DANS DES CONDITIONS QUI DONNAIENT A CROIRE QU'IL
AGISSAIT EN QUALITE DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, ALORS QU'IL N'ETAIT PAS INSCRIT
SUR LES LISTES PREVUES PAR LA LEGISLATION EN VIGUEUR CONCERNANT L'AGREMENT DES
COMMISSAIRES DE SOCIETES ET, D'AUTRE PART, EN MENTIONNANT DANS SON RAPPORT QUE
LES REPARTITIONS DE REVENUS ETAIENT FONDEES SUR LES BENEFICES DE L'EXERCICE,
ALORS QUE, PAR LA CONNAISSANCE QU'IL AVAIT DE LA SITUATION DES SOCIETES
DIRIGEES PAR C..., IL SAVAIT QU'IL N'EN ETAIT RIEN;
QU'IL S'EST AINSI ASSOCIE DE MAUVAISE FOI AUX MANOEUVRES
FRAUDULEUSES QUI ETAIENT DE PERSUADER LES EPARGNANTS DE LA RENTABILITE ELEVEE
DU PLACEMENT QUI LEUR ETAIT OFFERT ;
ATTENDU QU'EN CET ETAT ET ABSTRACTION FAITE DE TOUS AUTRES
MOTIFS SURABONDANTS, LA COUR D'APPEL A REPONDU AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES
CONCLUSIONS DU PREVENU ET A JUSTIFIE LA CONDAMNATION QU'ELLE A PRONONCEE CONTRE
LUI DU CHEF DE COMPLICITE D'ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC ;
QU'EN EFFET, L'APPRECIATION DE LA MAUVAISE FOI FAITE PAR LES
JUGES DU FOND EST SOUVERAINE DES LORS QUE, COMME EN L'ESPECE, ELLE A ETE
DEDUITE SANS CONTRADICTION DES FAITS PAR EUX CONSTATES ;
QU'AINSI LE MOYEN NE PEUT ETRE ADMIS ;
IV SUR LE POURVOI DE A... : SUR LE MOYEN ADDITIONNEL DE
CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 405 DU CODE PENAL, 5 ET 6 DE LA LOI
DU 2 JUILLET 1963, 44 DE LA LOI DU 27 DECEMBRE 1973, 485, 512, 567 ET 593 DU
CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT ET INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE
LEGALE, EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE DE
COMPLICITE D'ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC, CETTE ESCROQUERIE AYANT CONSISTE
EN UNE PUBLICITE FAITE DANS LA PRESSE QUE PAR L'EDITION DE PLAQUETTES ET
BROCHURES, ET MEME D'UN JOURNAL : « LA GARANTIE FONCIERE «, ADRESSE A
TOUTES PERSONNES SUSCEPTIBLES D'ETRE INTERESSEES, PROFERANT DES PROMESSES QUI
APPARAISSAIENT REVETIR UN SERIEUX PARTICULIER, NOTAMMENT EN RAISON DES
PRECISIONS DONNEES ET DES PERSONNALITES, DONT IL ETAIT FAIT ETAT, QUI LES
CONFIRMAIENT OU QUI LES INFIRMAIENT, CETTE PUBLICITE ETANT AXEE AUTOUR DE DEUX
THEMES PRIMAIRES, D'UNE PART LA SECURITE DE L'INVESTISSEMENT PAR INDEXATION DU
CAPITAL SOUSCRIT, ET D'AUTRE PART LA RENTABILITE REMARQUABLE DU PLACEMENT QUI
SE TRADUISAIT PAR UN INTERET ANNUEL DE 10,25% NET, CEPENDANT QUE CES PROMESSES
CONFRONTEES AVEC LA REALITE DU MOMENT AURAIENT ETE CHIMERIQUES ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
407
ALORS QUE LE FAIT DE SE LIVRER A UNE PUBLICITE, COMPORTANT SOUS
QUELQUE FORME QUE CE SOIT DES ALLEGATIONS, INDICATIONS OU PRESENTATIONS
FAUSSES, OU DE NATURE A INDUIRE EN ERREUR, ET PORTANT NOTAMMENT SUR LA NATURE
ET LES QUALITES SUBSTANTIELLES DE BIENS OU SERVICES QUI FONT L'OBJET DE LA
PUBLICITE, OU SUR LES RESULTATS QUI PEUVENT ETRE ATTENDUS DE LEUR UTILISATION,
OU SUR LES ENGAGEMENTS PRIS PAR L'ANNONCEUR, OU SUR LES QUALITES OU APTITUDES
DU FABRICANT, DES REVENDEURS, DES PROMOTEURS OU DES PRESTATAIRES CONSTITUE EN
REALITE NON LE DELIT D'ESCROQUERIE, MAIS LE DELIT DE PUBLICITE MENSONGERE ;
» ATTENDU QUE CE MOYEN, IDENTIQUE AU PREMIER MOYEN QUI A
ETE PRESENTE PAR X..., DOIT ETRE REJETE PAR LES MOTIFS QUI ONT ETE EXPOSES
CI-DESSUS A L'OCCASION DE L'EXAMEN DU POURVOI DE CE DEMANDEUR ;
SUR LE MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 60
ET 405 DU CODE PENAL, 1382 DU CODE CIVIL, 2 ET SUIVANTS, 567 ET 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, 7, PARAGRAPHE I DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE REPONSE
AUX CONCLUSIONS, DEFAUT ET INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE
QUE L'ARRET ATTAQUE AYANT DECLARE LE SIEUR A... COUPABLE DE COMPLICITE
D'ESCROQUERIES ET DE TENTATIVES D'ESCROQUERIES COMMISES PAR LES EPOUX C... ET
PAR LEURS COAUTEURS AU PREJUDICE DES ASSOCIES DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE
« GARANTIE FONCIERE REVENUS «, L'A CONDAMNE A UNE PEINE DE DEUX
ANNEES D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, A UNE PEINE DE 30000 FRANCS D'AMENDE,
AINSI QU'A DES DOMMAGES-INTERETS ENVERS LES PARTIES CIVILES ;
MOTIFS PRIS DE CE QUE A... EN SA QUALITE DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES DE CETTE SOCIETE AURAIT PRESENTE ET FAIT APPROUVER DES BILANS FALSIFIES
ET AINSI, PAR AIDE ET ASSISTANCE DANS LES FAITS QUI ONT PREPARE, FACILITE OU
CONSOMME LES DELITS RETENUS A LA CHARGE DES PRINCIPAUX PREVENUS, COMMIS
L'INFRACTION QUI LUI ETAIT REPROCHEE ;
ALORS QUE D'UNE PART, LA COUR A CONFIRME LES DISPOSITIONS DU
JUGEMENT EN DECLARANT PROUVEES LES MANOEUVRES FRAUDULEUSES DENONCEES PAR LA
PREVENTION SANS S'EXPLIQUER SUR LES MOYENS DE DEFENSE SOULEVES PAR LES
CONCLUSIONS DU PREVENU, TENDANT A FAIRE ADMETTRE QUE, DANS DE NOMBREUX CAS, LES
FALSIFICATIONS N'ETAIENT PAS CERTAINES ET QUE, PAR SUITE, LA MAUVAISE FOI,
ELEMENT CONSTITUTIF DE LA COMPLICITE, N'ETAIT PAS SUFFISAMMENT ETABLIE EN CE
QUI CONCERNE A... ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
408
ET ALORS QUE D'AUTRE PART LES CONCLUSIONS D'APPEL EXPOSAIENT
EXPRESSEMENT QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES D'UNE SOCIETE A UNIQUEMENT POUR
MISSION DE VERIFIER LA REGULARITE DE SES BILANS, EN SE REFERANT AUX ECRITURES
TELLES QU'ELLES SONT PRESENTEES PAR LES COMPTABLES DE L'ENTREPRISE, SEULS TENUS
DE LES FAIRE CONCORDER AVEC LES ACTES AUXQUELS ELLES CORRESPONDENT DE TELLE
SORTE QUE A... AVAIT PU, DE BONNE FOI, FAIRE CONFIANCE AUX COMPTABLES DE LA
SOCIETE, D'AUTANT QU'AUCUN D'EUX N'AVAIT ETE IMPLIQUE DANS LES POURSUITES ;
» ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE
QUE L'EXPERT-COMPTABLE A..., INSCRIT SUR LA LISTE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES
DE SOCIETES, A CERTIFIE SINCERES ET VERITABLES LES BILANS ET LES COMPTES
D'EXPLOITATION DE LA GARANTIE FONCIERE REVENUS POUR LES EXERCICES 1969 ET 1970
ALORS QUE CES DOCUMENTS CONTENAIENT DE NOMBREUSES INEXACTITUDES QUE LES JUGES
ANALYSENT ET QUI AVAIENT POUR EFFET DE FAIRE APPARAITRE DES PRODUITS NETS
DISTRIBUABLES SUPERIEURS A CEUX QUI EXISTAIENT REELLEMENT ;
QUE LE PREVENU AYANT ARGUE DE SA BONNE FOI EN CONTESTANT
CERTAINES CONCLUSIONS DES EXPERTS JUDICIAIRES ET EN SOUTENANT QU'IL AVAIT
ETABLI SES RAPPORTS A PARTIR DES DOCUMENTS TENUS PAR LES SERVICES COMPTABLES DE
LA SOCIETE, NE POUVANT VERIFIER LUI-MEME LA PARFAITE CONCORDANCE ENTRE LES
ACTES JURIDIQUES, LES ECRITURES ET LES MOUVEMENTS DE FONDS, LA COUR D'APPEL
PRECISE QUE CES ALLEGATIONS NE PEUVENT ETRE RETENUES DU FAIT QUE, D'UNE PART,
A... NE PROCEDE QUE PAR AFFIRMATIONS LORSQU'IL RELEVE CERTAINES ERREURS QUI NE
MODIFIENT PAS LE RESULTAT FINAL ET QUE, D'AUTRE PART, IL EST ETABLI QUE LES
COMPTES QU'IL A CERTIFIES NE CONCORDAIENT MEME PAS TOUJOURS AVEC LES PIECES
COMPTABLES OU LES PIECES JUSTIFICATIVES QUI LUI ONT ETE PRESENTEES ;
QU'EN OUTRE, AYANT ETE CHARGE, COURANT 1970, DE MISSIONS
NOMBREUSES ET IMPORTANTES DANS LE DOMAINE COMPTABLE, IL A EU UNE CONNAISSANCE
APPROFONDIE DES PROCEDES UTILISES PAR LES DIRIGEANTS SOCIAUX POUR QUE LES
ASSOCIES PUISSENT CONTINUER A PERCEVOIR UN INTERET QUI ETAIT PRELEVE EN
REALITE, POUR LA PLUS GRANDE PART, SUR LES CAPITAUX SOUSCRITS ;
ATTENDU QUE LES JUGES CONCLUENT QUE CES FAITS ETABLISSENT QUE
A... A CERTIFIE LES BILANS ET COMPTES D'EXPLOITATION DES ANNEES 1969 ET 1970
SACHANT QU'ILS ETAIENT INEXACTS ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
409
QUE, CONNAISSANT L'ORGANISATION PUBLICITAIRE MISE EN OEUVRE ET
AYANT PLEINE CONSCIENCE DES PROCEDES QUI PERMETTAIENT DE DISSIMULER LE
VERITABLE MONTANT DES PRODUITS NETS D'EXPLOITATION ET LA PROVENANCE
ARTIFICIELLE DES FONDS QUI JUSTIFIAIENT APPAREMMENT UNE DISTRIBUTION D'INTERETS
A UN TAUX ELEVE, IL SAVAIT QU'IL AIDAIT LES DIRIGEANTS DE LA COFRAGIM A
PERPETRER UNE ESCROQUERIE AVEC APPEL AU PUBLIC ;
ATTENDU QUE PAR CES ENONCIATIONS, LA COUR D'APPEL, QUI A REPONDU
AUX CHEFS PEREMPTOIRES DES CONCLUSIONS DU PREVENU ET QUI A CARACTERISE EN TOUS
SES ELEMENTS TANT MATERIELS QU'INTENTIONNELS LA COMPLICITE D'ESCROQUERIE DONT
ELLE L'A DECLARE COUPABLE, A JUSTIFIE SA DECISION;
QUE, DES LORS, LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
V SUR LE POURVOI DE B... : SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 114 NOTAMMENT EN SON ALINEA 1ER, 170, 174 ET
593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, 1134 DU CODE CIVIL, DES DROITS DE LA DEFENSE,
DENATURATION DU PROCES-VERBAL DE PREMIERE COMPARUTION DU 3 AOUT 1971, DES
DEPOSITIONS DU BATONNIER LEMAIRE ET DE MAITRE NICOLAS, DEFAUT ET CONTRADICTION
DE MOTIFS, ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REFUSE DE
PRONONCER LA NULLITE DU PROCES-VERBAL DE PREMIERE COMPARUTION DU 3 AOUT 1971 DE
MAITRE B..., DEMANDEUR ;
AUX MOTIFS QUE, D'UNE PART, LES TEMOIGNAGES DU BATONNIER LEMAIRE
ET DE MAITRE NICOLAS « N'ETABLISSENT EN RIEN QUE LES FORMALITES DE
L'ARTICLE 114 DU CODE DE PROCEDURE PENALE N'ONT PAS ETE OBSERVEES « ;
ET QUE, D'AUTRE PART, MAITRE B... « S'EST SPONTANEMENT
EXPLIQUE SUR LES FAITS QUI LUI ETAIENT IMPUTES « ;
ALORS QUE D'UNE PART, LA COUR QUI A ELLE-MEME RELEVE LES
DECLARATIONS DU BATONNIER LEMAIRE AUX TERMES DESQUELLES CELUI-CI A PRECISE QUE
LE JUGE D'INSTRUCTION, APRES AVOIR INCULPE MAITRE B..., N'AVAIT TENU AUCUN
PROPOS, CE QUI SIGNIFIE « QU'IL N'A PAS ETE PARLE DES FAITS « LORS DE
LA PREMIERE COMPARUTION, ET LES DECLARATIONS DE MAITRE NICOLAS QUI A AFFIRME
QU'A PART L'INCULPATION, « IL N'A PAS ETE FAIT ALLUSION A D'AUTRES FAITS
«, NE POUVAIT SANS MECONNAITRE LE SENS ET LA PORTEE DE CES TEMOIGNAGES -
DONT ELLE A ELLE-MEME DECLARE QU'ILS ETAIENT
La responsabilité du commissaire aux
comptes
410
EXEMPTS DE COMPLAISANCE - CONCLURE, QU'IL N'ETABLISSAIT PAS QUE
LES FORMALITES DE L'ARTICLE 114 N'ONT PAS ETE OBSERVEES ;
QUE POUR LE MOINS, LA COUR D'APPEL N'A PAS TIRE DE SES PROPRES
CONSTATATIONS LES CONSEQUENCES LEGALES NECESSAIRES ET A AFFECTE SON ARRET D'UNE
CONTRADICTION EVIDENTE DE MOTIFS ET, ALORS QUE D'AUTRE PART, EN DECIDANT QUE
MAITRE B... S'ETAIT EXPLIQUE SUR LES FAITS A LUI IMPUTES, LA COUR D'APPEL A
MANIFESTEMENT DENATURE LE SENS DE SES DECLARATIONS DANS LA MESURE OU LE
DEMANDEUR S'ETAIT BORNE DE MANIERE TRES GENERALE A REPONDRE AUX ACCUSATIONS
DONT LA PRESSE SE FAISAIT L'ECHO SANS ABORDER D'UNE QUELCONQUE MANIERE LES
REPROCHES QUI AURAIENT DU LUI ETRE FAITS CONCERNANT LES STATUTS DE LA GARANTIE
FONCIERE ET LEUR MODIFICATION OU LES ACTES D'ACQUISITION DE DROITS IMMOBILIERS
« ;
ATTENDU QUE B... A SOULEVE, AVANT TOUTE DEFENSE AU FOND, LA
NULLITE DE LA PROCEDURE RESULTANT DE CE QUE, SELON SES DIRES, LE JUGE
D'INSTRUCTION NE LUI AURAIT PAS FAIT CONNAITRE, LORS DE SA PREMIERE
COMPARUTION, LE 3 AOUT 1971, LES FAITS QUI LUI ETAIENT IMPUTES, MECONNAISSANT
AINSI LES PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 114, ALINEA 1ER, DU CODE DE PROCEDURE
PENALE ;
QUE LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR AYANT, CEPENDANT, LAISSE FIGURER
DANS LE PROCES-VERBAL LA MENTION IMPRIMEE « NOUS LUI AVONS FAIT CONNAITRE
LES FAITS QUI LUI SONT IMPUTES «, B... S'EST PREVALU, POUR CONTESTER CES
MENTIONS, DES TEMOIGNAGES FAITS A L'AUDIENCE PAR LE BATONNIER DE L'ORDRE DES
AVOCATS ET PAR UN AUTRE MEMBRE DU CONSEIL DE L'ORDRE QUI AVAIENT ETE ADMIS A
ASSISTER A SA PREMIERE COMPARUTION, EN RAISON DE SA QUALITE D'AVOCAT ;
ATTENDU QUE, POUR REJETER CES CONCLUSIONS, REPRISES DEVANT LA
COUR D'APPEL ET PAR LE PRESENT MOYEN DE CASSATION, LES JUGES DU FOND ENONCENT
QUE LES DECLARATIONS DES DEUX AVOCATS, FONDEES SUR DES SOUVENIRS FRAGMENTAIRES
OU IMPRECIS, N'ETABLISSENT PAS QUE LES FORMALITES PREVUES PAR L'ARTICLE 114 DU
CODE DE PROCEDURE PENALE N'ONT PAS ETE OBSERVEES ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CETTE APPRECIATION SOUVERAINE DES
TEMOIGNAGES, LES JUGES DU FOND ONT JUSTIFIE LEUR DECISION ;
QU'IL SUIT DE LA QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
411
SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 118 NOTAMMENT EN SON ALINEA 3, 170, 172, 174 ET 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, DES DROITS DE LA DEFENSE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE
LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A REJETE L'EXCEPTION DE NULLITE PROPOSEE PAR
MAITRE B..., DEMANDEUR, ET VISANT LES INTERROGATOIRES SUBIS PAR CELUI-CI LES 27
ET 30 AOUT 1971 ET 29 MAI 1973 ;
AUX MOTIFS QUE « L'INTERROGATOIRE DU 27 AOUT 1971 A ETE
DIFFERE, A LA DEMANDE DE CERTAINS AVOCATS PRESENTS, DU TEMPS NECESSAIRE POUR
QU'ILS PUISSENT PRENDRE PLUS AMPLEMENT CONNAISSANCE DU DOSSIER ;
QUE LECTURE INTEGRALE DES DECLARATIONS FAITES LA VEILLE PAR LES
DEUX FRERES C... ET F... A ETE DONNEE A VICTOR B... ;
QUE LORS DE L'INTERROGATOIRE DU 30 AOUT 1971, LES DECLARATIONS
DE Y... QUI AVAIENT PRECEDE, ONT ETE AUSSI LUES ;
QUE CONNAISSANCE DES DECLARATIONS DE G... ET H... A ETE EGALEMENT
DONNEE AU PREVENU AVANT SON INTERROGATOIRE DU 29 MAI 1973 ;
ALORS QUE D'UNE PART, IL RESSORT DES PROPRES CONSTATATIONS DE
L'ARRET ATTAQUE QUE LORSQUE MAITRE B... A ETE INTERROGE A LA SUITE DES
AUDITIONS DE C..., F..., Y..., G... ET H... ET SUR LES MEMES FAITS, LES
PROCES-VERBAUX DE CES AUDITIONS DATES DE LA VEILLE OU DU JOUR MEME N'AVAIENT PU
ETRE MATERIELLEMENT MIS A LA DISPOSITION DE SES CONSEILS VINGT-QUATRE HEURES AU
PLUS TARD AVANT SON INTERROGATOIRE ET QU'EN TOUT ETAT DE CAUSE, LA CONSTATATION
DE L'ARRET SELON LAQUELLE L'INTERROGATOIRE DU 27 AOUT 1971 A ETE DIFFERE DU
TEMPS NECESSAIRE A LA CONSULTATION DU DOSSIER NE PERMET PAS A LA COUR DE
CASSATION DE VERIFIER SI LE DELAI LEGAL A ETE RESPECTE ;
ET ALORS QUE D'AUTRE PART LA LECTURE DES PIECES DU DOSSIER
QUELQUES MINUTES AVANT L'INTERROGATOIRE NE SAURAIT SUPPLEER LA MISE A LA
DISPOSITION DU CONSEIL DU DOSSIER COMPLET DANS LES CONDITIONS IMPERATIVEMENT
EXIGEES PAR L'ARTICLE 118, ALINEA 3, ET QUE LA COMMUNICATION D'UN DOSSIER
INCOMPLET EQUIVAUT AU DEFAUT DE COMMUNICATION ET NE SATISFAIT PAS AUX
PRESCRIPTIONS DES TEXTES VISES AU MOYEN ;
ATTENDU QUE B... A EGALEMENT SOULEVE REGULIEREMENT LA NULLITE
DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
412
LA PROCEDURE RESULTANT, SELON LUI, DE CE QUE LE JUGE
D'INSTRUCTION L'A INTERROGE LES 27 ET 30 AOUT 1971 ET LE 29 MAI 1973 EN
VIOLATION DES PRESCRIPTIONS DE L'ARTICLE 118, ALINEA 3, DU CODE DE PROCEDURE
PENALE DU FAIT QUE LES PROCES-VERBAUX DE CERTAINES DECLARATIONS, FAITES LA
VEILLE OU LE MEME JOUR PAR DES COINCULPES OU DES TEMOINS, NE SE TROUVAIENT PAS
CONTENUS DANS LE DOSSIER QUI AVAIT ETE MIS A LA DISPOSITION DE SES CONSEILS
VINGT-QUATRE HEURES AU PLUS TARD AVANT LESDITS INTERROGATOIRES ;
ATTENDU QU'IL RESULTE TANT DES ENONCIATIONS DE L'ARRET QUE DES
PIECES DE LA PROCEDURE QUE L'INTERROGATOIRE DU 27 AOUT 1971 A ETE DIFFERE, A LA
DEMANDE DES AVOCATS DU DEMANDEUR DU TEMPS NECESSAIRE POUR QU'ILS PUISSENT
PRENDRE PLUS AMPLEMENT CONNAISSANCE DU DOSSIER ET QUE LECTURE INTEGRALE DE
DECLARATIONS FAITES LA VEILLE PAR LES DEUX FRERES C... ET PAR F... A ETE FAITE
A B... ;
QU'AVANT SON INTERROGATOIRE DU 30 AOUT SUIVANT, LES DECLARATIONS
DE Y... ENTENDU LE MEME JOUR, LUI ONT ETE EGALEMENT LUES EN PRESENCE DE SES
CONSEILS ;
QU'ENFIN, AVANT SON INTERROGATOIRE DU 29 MAI 1973, IL LUI A ETE
DONNE CONNAISSANCE DANS LES MEMES CONDITIONS DES DECLARATIONS DE G... ET DE
H..., TEMOINS ENTENDUS LE MEME JOUR ;
ATTENDU QUE, POUR REJETER L'EXCEPTION, LES JUGES ENONCENT
ENSUITE QUE, D'UNE PART, L'OBLIGATION FAITE AU JUGE D'INSTRUCTION PAR L'ARTICLE
118, ALINEA 3, DU CODE DE PROCEDURE PENALE DE METTRE LA PROCEDURE A LA
DISPOSITION DU CONSEIL DE L'INCULPE VINGT-QUATRE HEURES AU PLUS TARD AVANT
CHAQUE INTERROGATOIRE N'IMPOSE QUE LA COMMUNICATION DE TOUTES LES PIECES QUI SE
TROUVENT CONTENUES DANS LE DOSSIER A CETTE DATE SANS EN OMETTRE UNE SEULE ;
QU'IL N'EST PAS CONTESTE QU'EN L'ESPECE, LES PRESCRIPTIONS DE CE
TEXTE ONT ETE RESPECTEES ;
QU'AINSI, AUCUNE NULLITE FORMELLE POUVANT RESULTER DES
DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 170 DU MEME CODE NE PEUT, A CET EGARD, ETRE RETENUE
;
QUE, D'AUTRE PART, AUCUNE DISPOSITION LEGALE N'INTERDIT QUE,
L'INFORMATION SE POURSUIVANT, LES PIECES ETABLIES OU PARVENUES
La responsabilité du commissaire aux
comptes
413
ENTRE LA DATE DE LA COMMUNICATION DE LA PROCEDURE ET CELLE DE
L'INTERROGATOIRE DE L'INCULPE SOIENT VERSEES AU DOSSIER ;
QUE LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR AYANT PRIS SOIN, EN L'ESPECE, DE
DONNER CONNAISSANCE A B... ET A SES CONSEILS DE TELLES PIECES, AVANT LES
INTERROGATOIRES, AUCUNE ATTEINTE N'A ETE PORTEE AUX DROITS DE LA DEFENSE DE
L'INCULPE DANS DES CONDITIONS SUSCEPTIBLES D'ENTRAINER LA NULLITE PREVUE PAR
L'ARTICLE 172 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;
ATTENDU QUE PAR L'ENSEMBLE DE CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS
LES JUGES DU FOND ONT JUSTIFIE LEUR DECISION AU REGARD, D'UNE PART, DES
ARTICLES 118 ALINEA TROISIEME ET 170 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, ET, D'AUTRE
PART, DE L'ARTICLE 172 DU MEME CODE ;
QUE, DES LORS, LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 378, 56, 57, 95, 96 ET 97, 593 DU CODE DE PROCEDUR PENALE, DES DROITS
DE LA DEFENSE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET
ATTAQUE A ADMIS LA REGULARITE DE LA PERQUISITION EFFECTUEE AU CABINET DE MAITRE
B..., AVOCAT A LA COUR, DEMANDEUR ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES, QUE D'UNE PART, LE JUGE
D'INSTRUCTION, EN PRESENCE DES REPRESENTANTS DU CONSEIL DE L'ORDRE ET DU
MINISTERE PUBLIC A RECHERCHE ET SAISI LES DOCUMENTS UTILES A L'INFORMATION EN
RESPECTANT LES DROITS DE LA DEFENSE ET EN PRENANT TOUTES LES MESURES
NECESSAIRES POUR QUE LE SECRET PROFESSIONNEL NE SOIT PAS VIOLE, ET QU'EN
DECIDANT DE PASSER OUTRE AUX RESERVES DU REPRESENTANT DU CONSEIL DE L'ORDRE, IL
A SPECIFIE QU'IL OBSERVERAIT LES REGLES DU SECRET PROFESSIONNEL ;
ET QUE D'AUTRE PART LE SECRET PROFESIONNEL DE L'AVOCAT TROUVE SA
LIMITE DANS LE PRINCIPE DE LA LIBRE DEFENSE QUI COMMANDE DE RESPECTER LES
COMMUNICATIONS CONFIDENTIELLES DES ACCUSES AVEC LES AVOCATS QU'ILS ONT CHOISIS
OU VEULENT CHOISIR COMME DEFENSEURS ET QUE CE SECRET NE PEUT COUVRIR DES
DOCUMENTS NON LIES A L'EXERCICE D'UNE LIBRE DEFENSE ;
ALORS QUE D'UNE PART, COMPTE TENU DE LA MANIERE DONT LE JUGE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
414
D'INSTRUCTION A PROCEDE A LA PERQUISITION ET A LA SAISIE DES
DOSSIERS ENTIERS ET COMPLETS DU DEMANDEUR, SOIT PRES DE 4000 PIECES EN QUELQUES
HEURES A PEINE, LE REPRESENTANT DU CONSEIL DE L'ORDRE - QUI A EXPRESSEMENT ET A
JUSTE TITRE PROTESTE DE CE CHEF - N'A PAS EU LA POSSIBILITE MATERIELLE DE
S'ASSURER DU RESPECT DU SECRET PROFESSIONNEL ET DES DROITS DE LA DEFENSE ET
QU'IL IMPORTE PEU QUE LE JUGE D'INSTRUCTION SE SOIT PERSONNELLEMENT ENGAGE A
RESPECTER LUI-MEME LE SECRET PROFESSIONNEL EN NE DIVULGUANT PAS LES PIECES
SAISIES DANS LA MESURE OU LA REGLE AINSI VIOLEE TROUVE SON FONDEMENT DANS LA
CRAINTE NON PAS TANT DE DIVULGATIONS INCONSIDEREES DE LA PART DU JUGE
D'INSTRUCTION, MAIS DE L'UTILISATION DES RENSEIGNEMENTS QUE CE DERNIER EST
SUSCEPTIBLE DE RECUEILLIR DANS LES DOSSIERS DE L'AVOCAT ;
ET ALORS QUE D'AUTRE PART, LES DOCUMENTS PREEXISTANTS AUX
POURSUITES QUI SE TROUVENT DANS LE CABINET DE L'AVOCAT SONT COUVERTS PAR LE
SECRET PROFESSIONNEL ET PROTEGES PAR LA LIBERTE DE LA DEFENSE DANS LA MESURE OU
ILS S'Y TROUVAIENT, EN RAISON DE LA PROFESSION DU DEMANDEUR ET QUE CETTE REGLE
DOIT ETRE D'AUTANT PLUS SCRUPULEUSEMENT OBSERVEES, LORSQU'IL S'AGIT DE LETTRES
ECHANGEES ENTRE UNE PARTIE ET SON CONSEIL ;
ATTENDU QUE B... A ENFIN SOULEVE AVANT TOUTE DEFENSE AU FOND
DEVANT LES PREMIERS JUGES LA NULLITE DE LA PROCEDURE RESULTANT, SELON LUI, DE
CE QUE LA PERQUISITION OPEREE PAR LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR DANS SON CABINET
D'AVOCAT, LE 3 AOUT 1971 ET LA SAISIE DES DOCUMENTS A LAQUELLE CETTE
PERQUISITION A DONNE LIEU AVAIENT ETE FAITES DANS DES CONDITIONS PORTANT
ATTEINTE AU CARACTERE CONFIDENTIEL DES DOSSIERS CONTENUS DANS UN CABINET
D'AVOCAT ET AU RESPECT DU AU PRINCIPE DE LA LIBERTE DE LA DEFENSE
;
ATTENDU QUE POUR REJETER CETTE EXCEPTION, LES JUGES DU FOND
CONSTATENT QUE LA PERQUISITION EN CAUSE A ETE EFFECTUEE PAR LE JUGE
D'INSTRUCTION LUI-MEME EN PRESENCE DE L'INCULPE ET D'UN REPRESENTANT DU CONSEIL
DE L'ORDRE DES AVOCATS ;
QU'ELLE S'EST POURSUIVIE PENDANT PLUS DE CINQ HEURES ET QUE, SI
PENDANT CE LAPS DE TEMPS, PRES DE 4000 PIECES ONT ETE SAISIES, CES PIECES SE
TROUVAIENT, EN FAIT, REGROUPEES DANS DES DOSSIERS PORTANT LE NOM DES SOCIETES
QU'ILS CONCERNAIENT, DOSSIERS DONT LE CONTENU POUVAIT ETRE AUSSITOT EXAMINE
SANS QU'IL SOIT NECESSAIRE DE PROCEDER A DES RECHERCHES PARTICULIERES ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
415
QUE, SI LE REPRESENTANT DU CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS A CRU
DEVOIR ELEVER UNE PROTESTATION CONTRE LA SAISIE DE CES DOSSIERS « ENTIERS
ET COMPLETS «, LE JUGE D'INSTRUCTION, QUI N'A PAS MANQUE DE FAIRE FIGURER
CETTE PROTESTATION DANS LE PROCES-VERBAL, A ESTIME DEVOIR PASSER OUTRE ;
ATTENDU QUE LES JUGES PRECISENT ENCORE QU'AU MOMENT DE LA
PERQUISITION, B... N'ETAIT LE CONSEIL D'AUCUNE DES PERSONNES QUI ETAIENT DEJA
INCULPEES DANS LA PROCEDURE ET QU'IL S'EST REVELE QU'AUCUN DES DOCUMENTS SAISIS
N'AVAIT UN CARACTERE CONFIDENTIEL AU REGARD DES NECESSITES DE LEUR DEFENSE ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES CONSTATATIONS, LES JUGES DU FOND
ENONCENT QUE LA PERQUISITION ET LA SAISIE AVAIENT ETE REGULIERES AUX MOTIFS,
D'UNE PART, QU'IL APPARTIENT AU JUGE D'INSTRUCTION SEUL ET NON AU BATONNIER DE
L'ORDRE DES AVOCATS OU A SON REPRESENTANT DE RECHERCHER ET DE SAISIR LES
DOCUMENTS UTILES A L'INFORMATION ET, D'AUTRE PART, QUE LE POUVOIR DU JUGE NE
TROUVE SA LIMITE QUE DANS LE PRINCIPE DE LA LIBERTE DE LA DEFENSE QUI COMMANDE
DE RESPECTER LES COMMUNICATIONS CONFIDENTIELLES DE L'AVOCAT AVEC SES CLIENTS
;
QUE L'ARRET AJOUTE QUE LE SECRET PROFESSIONNEL DE L'AVOCAT NE
PEUT COUVRIR DES DOCUMENTS TELS QUE CEUX QUI ONT ETE SAISIS EN L'ESPECE ET QUE
LE PREVENU AVAIT ETE AMENE A RECUEILLIR DANS DES ACTIVITES AYANT MOTIVE SA
PROPRE INCULPATION ;
ATTENDU QUE PAR CES CONSTATATIONS ET ENONCIATIONS DESQUELLES IL
RESULTE QUE LE MAGISTRAT INSTRUCTEUR S'EST CONFORME, LORS DE LA PERQUISITION ET
DE LA SAISIE, AUX DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 96, ALINEA 3, DU CODE DE PROCEDURE
PENALE QUI PRESCRIVENT AU JUGE D'INSTRUCTION DE PROVOQUER PREALABLEMENT TOUTES
MESURES UTILES POUR QUE SOIT ASSURE LE RESPECT DU SECRET PROFESSIONNEL ET DES
DROITS DE LA DEFENSE, LA COUR D'APPEL A JUSTIFIE SA DECISION
;
QU'IL S'ENSUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE ECARTE ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS
La responsabilité du commissaire aux
comptes
416
Publication : Bulletin Criminel Cour de
Cassation Chambre criminelle N. 146 P. 400
Décision attaquée : Cour d'appel
Paris (Chambre 9 ) du 26 août 1974
Titrages et résumés : 1)
ESCROQUERIE - MANOEUVRES FRAUDULEUSES - BUT - MISE EN SCENE PUBLICITAIRE
TENDANT A PERSUADER L'EXISTENCE D'UNE FAUSSE ENTREPRISE ET D'UN CREDIT
IMAGINAIRE - DELIT DE PUBLICITE MENSONGERE (NON).
LES JUGES, QUI ONT CONSTATE QU'UNE ORGANISATION PUBLICITAIRE
UTILISEE PAR DES DIRIGEANTS DE SOCIETES FAISANT APPEL AU PUBLIC ETAIT UNE MISE
EN SCENE TENDANT A PERSUADER LES DETENTEURS DE CAPITAUX DE L'EXISTENCE D'UNE
FAUSSE ENTREPRISE ET D'UN CREDIT IMAGINAIRE, ONT, A BON DROIT, RETENU CE FAIT
COMME CONSTITUANT UNE MANOEUVRE FRANDULEUSE D'ESCROQUERIE AU SENS DE L'ARTICLE
4O5 DU CODE PENAL, DES LORS, LA QUALIFICATION DE PUBLICITE MENSONGERE PREVUE
PAR LA LOI DU 2 JUILLET 1963, PUIS, PAR LA LOI DU 27 DECEMBRE 1973, ETAIT
INAPPLICABLE EN L'ESPECE.
* ESCROQUERIE - DELIT DE PUBLICITE MENSONGERE - CARACTERE
DISTINCTIF. * PUBLICITE MENSONGERE - ESCROQUERIE - CARACTERE DISTINCTIF. 2)
INSTRUCTION - INCULPE - GARANTIES - DROITS DE LA DEFENSE - INTERROGATOIRE -
COMMUNICATION DE LA PROCEDURE AU CONSEIL - PIECES ETABLIES OU PARVENUES APRES
LA COMMUNICATION - CONNAISSANCE DE CES PIECES DONNEES A L'INCULPE ET A SON
CONSEIL AVANT UN INTERROGATOIRE - ABSENCE DE NULLITE.
L'OBLIGATION FAITE AU JUGE D'INSTRUCTION PAR L'ARTICLE 118
ALINEA 3 DU CODE DE PROCEDURE PENALE DE METTRE LE DOSSIER A LA DISPOSITIONS DU
CONSEIL DE L'INCULPE VINGT-QUATRE HEURES AU PLUS TARD AVANT CHAQUE
INTERROGATOIRE N'IMPOSE QUE LA COMMUNICATION DE TOUTES LES PIECES QUI SE
TROUVENT CONTENUES DANS LE DOSSIER A CETTE DATE. D'AUTRE PART, AUCUNE
DISPOSITION LEGALE N'INTERDIT QUE, L'INFORMATION SE POURSUIVANT, LES PIECES
ETABLIES OU PARVENUES ENTRE LA DATE DE LA COMMUNICATION DE LA PROCEDURE ET
CELLE DE L'INTERROGATOIRE SOIENT VERSEES AU DOSSIER. DES LORS QU'IL EST
CONSTANT QUE LE JUGE D'INSTRUCTION A D'UNE PART COMMUNIQUE LE DOSSIER COMPLET
AU CONSEIL DE L'INCULPE DANS LE DELAI PRESCRIT PAR LA LOI ET, QU'AVANT DE
PROCEDER A L'INTERROGATOIRE, IL A D'AUTRE PART DONNE CONNAISSANCE A L'INCULPE
ET A SON CONSEIL DES PIECES ETABLIES OU PARVENUES APRES CETTE COMMUNICATION, IL
N'Y A EU VIOLATION, NI DES DISPOSITIONS DES ARTICLES 118 ET 170 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE NI DE CELLES DE L'ARTICLE 172 DU MEME CODE.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
417
* INSTRUCTION - DROIT DE LA DEFENSE - INTERROGATOIRE -
COMMUNICATION DE LA PROCEDURE AU CONSEIL - ETENDUE. 3) INSTRUCTION -
PERQUISITION - CABINET D'UN AVOCAT - EXAMEN DES DOCUMENTS - MISSION DU JUGE
D'INSTRUCTION - SECRET PROFESSIONNEL DE L'AVOCAT - LIMITES DES POUVOIRS DU JUGE
D'INSTRUCTION.
IL APPARTIENT AU JUGE D'INSTRUCTION SEUL ET NON AU BATONNIER DE
L'ORDRE DES AVOCATS OU A SON REPRESENTANT DE RECHERCHER ET DE SAISIR DANS LE
CABINET D'UN AVOCAT DES DOCUMENTS UTILES A L'INFORMATION. LE POUVOIR DU JUGE
D'INSTRUCTION NE TROUVE SA LIMITE QUE DANS LE PRINCIPE DE LA LIBERTE DE LA
DEFENSE QUI COMMANDE DE RESPECTER LES COMMUNICATIONS CONFIDENTIELLES DE
L'AVOCAT AVEC SES CLIENTS. LE SECRET PROFESSIONNEL NE PEUT COUVRIR DES
DOCUMENTS TELS QUE CEUX QUI ONT ETE SAISIS EN L'ESPECE ET QU'UN AVOCAT AVAIT
ETE AMENE A RECUEILLIR DANS DES ACTIVITES QUI ONT MOTIVE SA PROPRE INCULPATION
DES CHEFS DE COMPLICITE D'ESCROQUERIE ET DE COMPLICITE D'ABUS DE CONFIANCE
(1).
* AVOCATS - SECRET PROFESIONNEL - PERQUISITION EFFECTUEE DANS
SON CABINET.
Précédents jurisprudentiels : (1)
CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1960-03-24 Bulletin Criminel 1960 N.
169 P. 355 (REJET) (1) CF. Cour de Cassation (Chambre criminelle) 1968-03-06
Bulletin Criminel 1968 N. 230 P. 391 (REJET)
Textes appliqués :
· Code de procédure pénale 118 AL. 3
· Code de procédure pénale 170
· Code de procédure pénale 172
· Code de procédure pénale 485
· Code pénal 405
· Code pénal 408
· Code pénal 59
· Code pénal 60
· LOI 1963-07-02
· LOI 46-537 1946-06-24 ART. 437
· LOI 73-1193 1973-12-27 ART. 44
La responsabilité du commissaire aux
comptes
418
Annexe 29
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle 31 Janvier 2007
COMMISSAIRE AUX COMPTES : COMPLICITE D?ESCROQUERIE
Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du 31 janvier 2007
N° de pourvoi: 06-81258
Publié au bulletin
Rejet
M. Cotte , président
M. Chanut, conseiller apporteur
M. Finielz, avocat général
SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Célice, Blancpain et Soltner,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience
publique tenue au Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt
suivant :
REJET du pourvoi formé par X... Marc, contre l'arrêt
de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 11 janvier
2006, qui, pour complicité d'escroqueries, l'a condamné à
cinq ans d'interdiction d'exercice de l'activité de commissaire aux
comptes ;
La COUR, statuant après débats en l'audience
publique du 20 décembre 2006 où étaient présents :
M. Cotte président, M. Chanut conseiller rapporteur, M. Dulin,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
419
Mmes Thin, Desgrange, M. Rognon, Mmes Nocquet, Ract-Madoux
conseillers de la chambre, MM. Soulard, Lemoine, Mmes Degorce, Labrousse
conseillers référendaires ; Avocat général : M.
Finielz ; Greffier de chambre : Mme Daudé ; Sur le rapport de M. le
conseiller CHANUT, les observations de la société civile
professionnelle BOUZIDI et BOUHANNA, et de la société civile
professionnelle CÉLICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocats en la Cour, et les
conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Vu les mémoires en demande, en défense et en
réplique produits ;
Sur la recevabilité du mémoire en défense,
contestée par le demandeur au pourvoi : Attendu que la
société Cofica, aux droits de laquelle vient la
société Cetelem, n'ayant pas formé de pourvoi en cassation
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, en date du 11 janvier 2006,
qui a déclaré sa constitution de partie civile irrecevable, son
mémoire en défense, tendant au rejet du pourvoi du prévenu
et à la condamnation de celui-ci au titre de l'article 618-1 du code de
procédure pénale, est irrecevable ; Sur le moyen unique de
cassation, pris de la violation des articles 121-6,121-7,3131,313-3,313-6,313-8
du code pénal, L. 225-235 du code de commerce,131-6, alinéa
1er,11° du code pénal,6 de la Convention européenne des
droits de l'homme,591 et 593 du code de procédure pénale,
défaut de motifs et manque de base légale : » aux motifs
que, c'est par des motifs insuffisants et contradictoires que la cour, en
conséquence, ne saurait adopter, que les premiers juges, après
avoir exposé les faits et analyser les éléments de preuve,
se sont prononcés négativement sur la culpabilité de Marc
X... à qui il est reproché :
-d'avoir à Péronne, en tout cas dans le ressort
judiciaire du tribunal de grande instance de Péronne, entre le mois de
juin 1997 et le mois de décembre 1999, en tout cas en un temps non
couvert par la prescription, été complice des délits
d'escroqueries commis à la même période au préjudice
de la société Cofica pour un montant total de 22 747 110,80
francs (environ 3 467 774 euros) par Alain Y..., en l'aidant ou l'assistant
sciemment dans leur préparation ou consommation, en l'espèce en
fournissant sciemment de 1994 à 1998 à Alain Y... des comptes
annuels et consolidés certifiés de la SA Tutrice et de la SA
Finapex qu'il savait ne pas refléter une image fidèle de la
situation de ces sociétés lui permettant de commettre les
escroqueries au préjudice de la société Cofica ;
qu'il résulte de l'instruction notamment des deux
expertises comptables ordonnées par le juge d'instruction que Marc X...
ne saurait sérieusement soutenir avoir accepté pendant de
nombreuses années de certifier sans réserve (sauf pour
l'année 1998) les comptes des sociétés en s'abstenant
d'accomplir, comme par hasard, sur l'activité export de la
société qui représentait environ 60 % de l'activité
et décelait une gigantesque escroquerie les nombreux contrôles
inhérents aux normes de sa profession et en ne décelant pas en
professionnel de la comptabilité qu'il était, l'infraction
commise : la moindre diligence normale du commissaire aux comptes dans cette
affaire lui aurait permis en effet de révéler au grand jour
l'ensemble des escroqueries commises avec comme conséquence
immédiate le refus de certification des comptes et l'obligation de
dénoncer l'infraction au procureur de la République ; qu'en
certifiant chaque année des comptes falsifiés indispensables pour
tromper les tiers et les escroquer, Marc X..., qui ne pouvait ignorer leur
utilisation frauduleuse, a permis à Alain Y... de pouvoir disposer
l'année ou les années suivantes de comptes présentant une
apparence de crédibilité lui permettant de commettre les
escroqueries ;
que, c'est parce que Marc X... a certifié par exemple les
comptes falsifiés des années 1995 et 1996 (voir expertise Z...)
qu'Alain Y... a pu escroquer en janvier 1998, la
La responsabilité du commissaire aux
comptes
420
société Cofica en lui présentant ces
documents pour obtenir le prêt ; qu'en certifiant en 1995 et 1996 les
comptes erronés, dont la fictivité ne pouvait échapper
à un professionnel de la comptabilité, Marc X... a bien commis
préalablement à la commission de l'escroquerie des
éléments permettant de commettre l'infraction (fourniture de
moyens) ;
qu'il n'est dès lors pas possible d'envisager, quant
à la culpabilité, en fait comme en droit, la même solution
que celle du tribunal, de sorte que Marc X... sera déclaré
coupable du délit de complicité d'escroqueries qui lui est
reproché ; « alors, d'une part, que la complicité requiert
l'existence d'un fait positif qui ne peut s'induire de la seule abstention
dès lors que le prévenu n'est pas tenu d'une obligation de ne pas
laisser se perpétrer l'infraction et qu'il n'avait pas le pouvoir d'y
faire obstacle ; qu'en retenant qu'il résulte de l'instruction, et
notamment d'expertises comptables, que Marc X... ne saurait sérieusement
soutenir avoir accepté pendant de nombreuses années de certifier
sans réserve les comptes des sociétés en s'abstenant
d'accomplir, comme par hasard, sur l'activité export de la
société, qui représentait environ 60 % de
l'activité et décelait une gigantesque escroquerie, les nombreux
contrôles inhérents aux normes de sa profession et en ne
décelant pas en professionnel de la comptabilité qu'il
était, l'infraction commise, la moindre diligence normale du commissaire
aux comptes dans cette affaire lui aurait permis en effet de
révéler au grand jour l'ensemble des escroqueries commises avec
comme conséquence immédiate le refus de certification des comptes
et l'obligation de dénoncer l'infraction au procureur de la
République, que c'est parce qu'il a certifié les comptes
falsifiés des années 1995 et 1996 qu'Alain Y... a pu escroquer en
janvier 1998 la société Cofica, en lui présentant ces
documents pour obtenir le prêt, qu'en certifiant en 1995 et 1996 les
comptes erronés, dont la fictivité ne pouvait échapper
à un professionnel de la comptabilité, il a commis
préalablement à la commission de l'escroquerie des
éléments permettant de commettre l'infraction par fourniture de
moyens, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'existence de
l'escroquerie commise par Alain Y... était réellement
décelable par le demandeur, dans la mesure où il n'avait pas eu
connaissance des fausses pièces justificatives ou de la fausseté
des pièces produites, établies par Alain Y... et son assistante,
destinées à justifier la fausse activité d'exportation de
lots de véhicules Mercedes, à savoir les fausses factures de
Mercedes Benz France à la société Garage Tutrice, les
fausses factures de la société Garage Tutrice à Car
Diffusion, les fausses autorisations de ventes, franchises de taxes avec
dispense de visas, délivrés par la société Car
Diffusion, les fausses attestations d'exportation en franchises de taxes
émanant de Car Diffusion et des instructions de Mercedes Benz France
relatives au paiement par délégation, a privé sa
décision de toute base légale ;
» alors, d'autre part, que le demandeur avait fait valoir
l'existence d'un service comptable du Groupe Y... très structuré,
composé de douze à quinze salariés, d'un directeur
financier et d'un expert-comptable dans lequel il avait toute confiance, le
contrôle de l'activité export, activité
prépondérante du Groupe, se faisant par une analyse des factures
Mercedes et des factures vers l'acquéreur Car Diffusion, les fiches de
travaux de Marc X... démontrant qu'il a contrôlé toutes les
factures Mercedes et Car Diffusion pour établir une balance par
comparaison des numéros de châssis de chaque véhicule,
qu'il n'avait pas connaissance de la fausseté de ces factures ; qu'en ne
recherchant pas si, dès lors, en l'état des pièces
contrôlées, lesquelles devaient être ultérieurement
reconnues fausses, le demandeur était en mesure d'empêcher
l'escroquerie, la cour d'appel a privé sa décision de base
légale ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
421
» alors, de troisième part, que le demandeur avait
fait valoir l'existence d'une organisation financière et comptable
structurée, composée de douze à quinze personnes, d'un
directeur financier et d'un expert-comptable, dans lequel il avait toute
confiance ; qu'en ne recherchant pas si, eu égard à ce service
structuré, amené à exercer des contrôles,
lui-même n'ayant contrôlé que les factures Mercedes et Car
Diffusion, lesquelles se sont révélées
ultérieurement fausses, le demandeur était en mesure
d'empêcher l'escroquerie, la cour d'appel a privé sa
décision de toute base légale ;
» alors, de quatrième part, que le demandeur faisait
valoir avoir adressé à Alain Y... des mises en demeure
écrites en 1997 et 1998, qu'en réponse, Alain Y... lui adressait
copie d'un fax prétendument émané de la direction de
l'hôtel Royal Monceau, confirmant que les frais avaient été
diligentés dans l'intérêt de l'entreprise, l'enquête
devant révéler qu'il s'agissait d'un faux fabriqué par
Alain Y... ou ses collaborateurs ; qu'il rappelait que le commissaire aux
comptes ne dispose d'aucun pouvoir d'investigations directes auprès des
fournisseurs ou des clients de la société, les experts ayant
relevé qu'en l'absence d'une procédure de confirmation directe,
les contrôles de substitution qui auraient porté sur des
pièces falsifiées auraient été inopérants
;
qu'en ne recherchant pas, dès lors, si le demandeur
était en mesure, en l'état de pièces falsifiées,
d'empêcher l'escroquerie, la cour d'appel a privé sa
décision de base légale, au regard des textes susvisés
;
» alors, de cinquième part, que le demandeur faisait
valoir que l'expert-comptable du Groupe Y..., salarié, n'avait
exprimé aucun doute, que le rapport déposé le 8 juin 1998
par la société Stratège ne révèle rien,
concluant que « la réussite passée et à venir de ce
Groupe, dont on sent bien la capacité interne d'expansion et
d'extension, réside, d'une part dans le dynamisme et le savoir-faire du
chef d'entreprise, qu'est Alain Y..., et d'autre part dans l'équipe
centrale qu'il a su choisir, mettre en place, former et animer », que les
contrôles fiscaux portant sur les années 1990 à 1992 et
1995 à 1999 n'avaient révélé aucune anomalie ou
fraude dans la comptabilité du Groupe Y..., l'inspecteur principal des
services fiscaux ayant d'ailleurs déclaré dans le cadre d'une
autre procédure, qu'« il n'y a pas eu de rappel de crédit de
TVA au titre des activités d'exportation car il existait un contrat
entre Mercedes et la S.A. Bernard Y... » ; que le 3 novembre 1999
l'administration fiscale notifiait un avis d'absence de redressement ensuite
des contrôles opérés ; que le demandeur invitait la cour
d'appel à constater que l'escroquerie était indécelable ;
qu'en ne statuant pas sur ce moyen, la cour d'appel a entaché sa
décision de défaut de motifs ;
» alors, de sixième part, que le demandeur faisait
valoir que non seulement l'escroquerie était indécelable mais
impossible à découvrir dès lors qu'elle résultait
de faux papiers à en-tête, faux facturiers et fausses factures,
fausses correspondances et fax, l'expert Z... ayant relevé « la
difficulté à distinguer un faux d'un vrai document » ; qu'en
ne statuant pas sur ce moyen de nature à établir l'absence de
complicité imputée au demandeur, la cour d'appel a entaché
sa
décision de défaut de motifs ;
» alors, de septième part, que la complicité
d'escroquerie suppose une intention coupable consistant en une participation
volontaire à l'acte de l'auteur principal, en ayant conscience de l'aide
apportée à la réalisation de l'infraction ; qu'en retenant
que c'est parce que Marc X... a certifié les comptes falsifiés
des années 1995 et 1996, qu'Alain Y... a pu escroquer en janvier 1998 la
société Cofica en lui présentant ces documents pour
obtenir le prêt, qu'en certifiant les comptes erronés dont la
fictivité ne pouvait échapper à un professionnel de la
comptabilité, Marc X... a bien
La responsabilité du commissaire aux
comptes
422
commis préalablement à la commission de
l'escroquerie des éléments permettant de commettre l'infraction
(fourniture de moyens), pour décider que Marc X... sera
déclaré coupable du délit de complicité
d'escroqueries, sans relever les éléments établissant que
le demandeur avait eu une participation volontaire à l'acte de l'auteur
principal en ayant conscience de l'aide qui lui était apportée en
vue de l'escroquerie au préjudice de la société Cofica, la
cour d'appel a entaché sa décision de manque de base
légale ;
» alors, enfin, qu'en affirmant qu'en certifiant chaque
année des comptes falsifiés indispensables pour tromper les tiers
et les escroquer, Marc X..., qui ne pouvait ignorer leur utilisation
frauduleuse, a permis à Alain Y... de pouvoir disposer, l'année
ou les années suivantes, de comptes présentant une apparence de
crédibilité lui permettant de commettre les escroqueries, que
c'est parce qu'il a certifié par exemple les comptes falsifiés
des années 1995 et 1996 qu'Alain Y... a pu escroquer en janvier 1998 la
société Cofica en lui présentant ces documents pour
obtenir le prêt, qu'en certifiant ces comptes erronés, dont la
fictivité ne pouvait échapper à un professionnel de la
comptabilité, Marc X... a bien commis préalablement à la
commission de l'escroquerie des éléments permettant de commettre
l'infraction par fourniture de moyens, la cour d'appel, qui n'a aucunement
caractérisé l'intention coupable, consistant en l'aide et
l'assistance en vue d'escroquer la société Cofica, a privé
sa décision de toute base légale au regard des textes
susvisés « ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des
pièces de procédure que la société Cofica a
consenti en 1998 et 1999 à la société Finapex, holding du
groupe Y..., dirigé par Alain Y..., des ouvertures de crédit
à hauteur de 22 747 110,80 francs, avec la caution de la
société Y..., sur la présentation des comptes annuels et
consolidés certifiés de ces sociétés, dont Marc
X... était le commissaire aux comptes ; que le groupe Y... ayant
été déclaré en liquidation judiciaire, la
société Cofica a porté plainte et s'est constituée
partie civile contre Alain Y... et Marc X... des chefs d'escroquerie et
complicité, en exposant qu'elle avait accordé des ouvertures de
crédit au vu des comptes annuels établis à partir de
documents falsifiés par la comptabilisation de crédits fictifs de
TVA ;
Attendu que, pour déclarer Marc X... coupable du
délit de complicité d'escroquerie commis par Alain Y...,
définitivement condamné de ce chef, l'arrêt énonce
qu'il résulte notamment de deux expertises comptables que le
caractère fictif des écritures comptables relatives à des
exportations représentant 60 % de l'activité du groupe ne pouvait
échapper à un professionnel de la comptabilité ; que les
juges ajoutent qu'en acceptant, dans ces conditions, de certifier lesdits
comptes sans réserve pendant plusieurs années, Marc X..., qui ne
pouvait ignorer leur utilisation frauduleuse, a permis la commission des
escroqueries ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations,
d'où il résulte qu'en certifiant en connaissance de cause, durant
plusieurs exercices, des comptes inexacts, le prévenu a sciemment fourni
à l'auteur principal les moyens de commettre les escroqueries
poursuivies, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être
écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
criminelle, et prononcé par le président le trente et un janvier
deux mille sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été
signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre
;
Publication : Bulletin criminel 2007 N° 25
p. 84
423
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Amiens du 11 janvier 2006
Titrages et résumés : COMPLICITE -
Eléments constitutifs - Aide ou assistance - Définition -
Escroquerie
Justifie sa décision, la cour d'appel qui, pour
déclarer un expert-comptable et un commissaire aux comptes coupables de
complicité d'escroqueries commises par un dirigeant de
société, après avoir constaté que le premier a
attesté la conformité et la sincérité de comptes
dont le caractère fictif ne pouvait lui échapper, et que le
second a certifié ces comptes en toute connaissance de cause durant
plusieurs exercices, énonce qu'ils ont sciemment fourni à
l'auteur principal les moyens lui permettant de réitérer
l'escroquerie commise en matière de TVA (arrêt n° 1) et de
commettre les escroqueries relatives à l'obtention d'ouvertures de
crédits (arrêt n° 2)
IMPOTS ET TAXES - Taxe sur la valeur ajoutée - Escroquerie
au préjudice du Trésor public - Expert-comptable -
Complicité - Cas
ESCROQUERIE - Escroquerie au Trésor public - Taxe sur la
valeur ajoutée - Expert-comptable - Complicité - Cas
IMPOTS ET TAXES - Taxe sur la valeur ajoutée - Escroquerie
au préjudice du Trésor public - Commissaire aux comptes -
Complicité - Cas
ESCROQUERIE - Escroquerie au Trésor public - Taxe sur la
valeur ajoutée - Commissaire aux comptes - Complicité - Cas
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
424
Annexe 30
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Criminelle
2 Mars 1983
COMMISSAIRE AUX COMPTES : COMPLICITE DE BANQUEROUTE
Cour de cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 2 mars 1983
N° de pourvoi:
Non publié au bulletin
Cassation
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
STATUANT SUR LES POURVOIS FORMES PAR : 1°) MERCIER DE SAINTE
CROIX GUY 2°) Y... JACQUES CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS,
9EME CHAMBRE, DU 21 DECEMBRE 1981, QUI LES A CONDAMNES CHACUN A 2 ANS
D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, D'UNE PART, POUR INFRACTIONS A LA LOI SUR LES
SOCIETES COMMERCIALES, D'AUTRE PART MERCIER DE SAINTE CROIX GUY POUR DELITS
ASSIMILES A LA BANQUEROUTE SIMPLE ET FRAUDULEUSE, ET Y... JACQUES POUR
COMPLICITE DE SEMBLABLES INFRACTIONS ;
VU LA CONNEXITE, JOIGNANT LES POURVOIS ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS ;
SUR LES FAITS : ATTENDU QU'IL RESULTE DE L'ARRET ATTAQUE ET DU
JUGEMENT DONT IL CONFIRME LES MOTIFS NON CONTRAIRES QUE LA
La responsabilité du commissaire aux
comptes
425
SOCIETE CINEMATOGRAPHIQUE, DONT BRADFORD ETAIT LE DIRIGEANT DE
FAIT ET Y... LE COMMISSAIRE AUX COMPTES, A EU NOTAMMENT POUR PRESIDENT DU
CONSEIL D'ADMINISTRATION FELLOUS, PUIS GEWOLD ET ENFIN MERCIER DE SAINTE CROIX
;
QU'UN REGLEMENT JUDICIAIRE EST INTERVENU LE 5 JUILLET 1973 ;
ATTENDU QUE, APRES DISJONCTION DES POURSUITES EN X... QUI
CONCERNE BRADFORD, LES PREMIERS JUGES ONT CONDAMNE FELLOUS POUR ABUS DE BIENS
SOCIAUX ET GEWOLD POUR X... MEME DELIT ET RECEL D'ABUS DE BIENS SOCIAUX ;
QUE, SUR APPEL, LA CULPABILITE DE MERCIER DE SAINTE CROIX A ETE
RETENUE POUR PUBLICATION ET PRESENTATION DE BILAN INEXACT ET POUR INFRACTIONS
ASSIMILEES D'UNE PART A LA BANQUEROUTE SIMPLE PAR DEFAUT DE DECLARATION DANS LE
DELAI LEGAL DE LA CESSATION DES PAIEMENTS ET PAIEMENTS PREFERENTIELS AU
PREJUDICE DE LA MASSE, D'AUTRE PART A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR
DETOURNEMENT D'ACTIF ;
QUE LA COUR D'APPEL A, PAR AILLEURS, APRES AVOIR REQUALIFIE LES
FAITS D'ABUS DE BIENS SOCIAUX REPROCHES A FELLOUS ET A GEWOLD EN DELITS
ASSIMILES A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR DETOURNEMENT D'ACTIF, DECLARE Y...
COUPABLE DE COMPLICITE TANT DES INFRACTIONS COMMISES PAR CES DEUX DERNIERS
PREVENUS QUE DE PRESENTATION DE BILAN INEXACT IMPUTE NOTAMMENT A BRADFORD,
AINSI QUE DE CONFIRMATION D'INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE LA
SOCIETE ET D'OMISSION DE DECLARATION AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE FAITS
DELICTUEUX DONT IL AVAIT CONNAISSANCE ;
EN CET ETAT : SUR LE POURVOI FORME PAR MERCIER DE SAINTE CROIX
GUY :
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DU
PRINCIPE DE LA PERSONNALITE DES PEINES, DE L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU
24 JUILLET 1966, DES ARTICLES 131 ET 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, DE
L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE
LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE UN
PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL COUPABLE DE PUBLICATION ET PRESENTATION DE BILAN
INEXACT, D'INFRACTIONS ASSIMILEES A LA BANQUEROUTE SIMPLE PAR DEFAUT DE
DECLARATION DANS LE DELAI LEGAL DE LA CESSATION DES PAIEMENTS ET PAR PAIEMENTS
PREFERENTIELS AU PREJUDICE DE LA
La responsabilité du commissaire aux
comptes
426
MASSE, AINSI QUE D'INFRACTIONS ASSIMILEES A LA BANQUEROUTE
FRAUDULEUSE PAR DETOURNEMENT D'ACTIF ;
»AUX MOTIFS QUE LE FAIT QU'IL AIT ETE TENU ECARTE DE LA
DIRECTION FINANCIERE DE LA «FRANCO LONDON FILMS» EN RAISON DE LA
LIMITATION CONVENTIONNELLE DE SES POUVOIRS ET QU'IL AIT ETE EN REALITE LE
PRETE-NOM DU DIRECTEUR GENERAL, NE POUVAIT ETRE PRIS EN CONSIDERATION, LES
PREROGATIVES DU PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION POUVANT ETRE
EFFECTIVEMENT LIMITEES MAIS NON SUPPRIMEES ;
»ALORS QU'UNE TELLE MOTIVATION NE SAURAIT JUSTIFIER LA
DECISION CRITIQUEE, QUE L'UN DES ELEMENTS CONSTITUTIFS DES INFRACTIONS
REPROCHEES AU PREVENU EST LA QUALITE DE PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, QUE LES
CONSTATATIONS DE L'ARRET ETABLISSENT QUE X... DERNIER N'A JAMAIS EU, EN
REALITE, UNE TELLE QUALITE, LA DIRECTION SOCIALE ETANT ASSUREE EN FAIT PAR LE
DIRECTEUR GENERAL» ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE
L'ARTICLE 437-2° DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE
DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A CONDAMNE LE PREVENU DU CHEF
D'INFRACTION A LA LEGISLATION SUR LES SOCIETES PAR PRESENTATION ET PUBLICATION
DE BILAN INEXACT AU TITRE DE L'EXERCICE CLOS LE 31 DECEMBRE 1971 ;
»AUX MOTIFS QUE PAR LE JEU D'UNE ECRITURE DE COMPENSATION,
IL AVAIT FAIT DISPARAITRE DE L'ACTIF DE LA «FRANCO LONDON FILMS» UNE
CREANCE DE 1 865 955, 22 FRANCS ET AVAIT MAJORE INDUMENT X... MEME ACTIF DE 980
116, 66 FRANCS ;
»ALORS QUE POUR CARACTERISER L'ELEMENT MORAL DE CETTE
INFRACTION, LES JUGES D'APPEL SE SONT BORNES A DECLARER, QU'EN SA QUALITE DE
PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, LE PREVENU NE POUVAIT IGNORER QUE LES
ECRITURES PORTEES AU BILAN AVAIENT POUR OBJET DE DISSIMULER LA VERITABLE
SITUATION DE LA SOCIETE EN CAUSE AUX ACTIONNAIRES ET ONT DONC OMIS DE RELEVER
LE MOINDRE FAIT SIGNIFICATIF DE LA CONNAISSANCE REELLE, PAR X... DERNIER, DE
L'EXACTITUDE DU BILAN LITIGIEUX» ;
SUR LE CINQUIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
427
L'ARTICLE 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967, ET DE L'ARTICLE 593
DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE MERCIER DE SAINTE
CROIX COUPABLE D'INFRACTION ASSIMILEE A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR
DETOURNEMENT D'ACTIF ;
»AU MOTIF QUE DES ECRITURES DE COMPENSATION INJUSTIFIEES ONT
FAIT DISPARAITRE DE L'ACTIF DE LA SA FRANCO LONDON FILMS UNE VALEUR DE 1 865
955,22 F REPRESENTEE PAR TROIS CREANCES ;
»QUE LA PASSATION DE CES ECRITURES DE COMPENSATION QUI
CONSTITUENT UN ABANDON DES CREANCES EN CAUSE ET DONC UN DETOURNEMENT D'ACTIF A
ETE DECIDEE DANS UN ECHANGE DE CORRESPONDANCE INTERVENU DU 15 AU 28 DECEMBRE
1971 ENTRE LES DIRIGEANTS, ALORS QUE MERCIER DE SAINTE CROIX ETAIT PRESIDENT DU
CONSEIL D'ADMINISTRATION ;
»ALORS QUE L'INTENTION COUPABLE EST UN ELEMENT ESSENTIEL DU
DELIT DE BANQUEROUTE FRAUDULEUSE ;
QUE LA SEULE CONSTATATION QUE LA PASSATION DES ECRITURES
LITIGIEUSES AIT ETE DECIDEE PENDANT QUE MERCIER DE SAINTE CROIX ETAIT PRESIDENT
DU CONSEIL D'ADMINISTRATION NE CARACTERISE PAS LA PARTICIPATION DE CELUI-CI A
CETTE DECISION ET SA VOLONTE DE SOUSTRAIRE AUX CREANCIERS UNE PARTIE DU
PATRIMOINE DE LA SOCIETE» ;
LES MOYENS ETANT REUNIS ;
VU LESDITS ARTICLES ;
ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR DES MOTIFS
PROPRES A JUSTIFIER LA DECISION ;
QUE L'INSUFFISANCE DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;
ATTENDU QUE, POUR REPONDRE AUX CONCLUSIONS REPRISES AUX MOYENS,
LES JUGES ENONCENT QUE, SI «A L'EVIDENCE» LE PREVENU ETAIT PRIVE DE
«TOUTE RESPONSABILITE REELLE DANS LA VERITABLE DIRECTION
La responsabilité du commissaire aux
comptes
428
DE LA SOCIETE», CELUI-CI NE POUVAIT PAS, EN RAISON DE SON
INSTRUCTION ET SON EXPERIENCE, « IGNORER QU'EN ACCEPTANT DE DEMEURER A LA
PRESIDENCE DE LA SOCIETE FRANCO LONDON FILMS DANS DE TELLES CONDITIONS IL
DEVENAIT EN REALITE LE PRETE-NOM DE BRADFORD» ;
MAIS ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES SEULS MOTIFS, QUI REPOSENT SUR
UNE PRESOMPTION DE MAUVAISE FOI QUE NI L'ARTICLE 437 DE LA LOI DU 24 JUILLET
1966 NI LES ARTICLES 131 ET 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967 N'INSTITUENT, LA
COUR D'APPEL, QUI N'A PAS RECHERCHE LES CIRCONSTANCES PROPRES A ETABLIR
L'EXISTENCE DE L'INTENTION COUPABLE DANS CHACUN DES CAS VISES A LA PREVENTION,
A MECONNU LE PRINCIPE CI-DESSUS RAPPELE ;
QUE DES LORS, ET SANS QU'IL Y AIT LIEU DE STATUER SUR LES AUTRES
MOYENS, L'ARRET ENCOURT CASSATION SUR LE POURVOI FORME PAR Y... JACQUES: SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 220, 456 ET 457
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 59 ET60 DU CODE PENAL, 593 DU CODE DE PROCEDURE
PENALE, DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE DE COMPLICITE DE PUBLICATION ET DE PRESENTATION DE FAUX BILAN
;
»AUX MOTIFS QUE LE PREVENU SOUTIENT QU'IL NE SAURAIT ETRE
DECLARE COUPABLE DE S'ETRE RENDU COMPLICE DE PUBLICATION ET DE PRESENTATION
D'UN BILAN INEXACT FAUTE D'ACTE MATERIEL DE COMPLICITE ET FAUTE D'INTENTION
COUPABLE N'AYANT EN RIEN PARTICIPE A L'ELABORATION ET LA PRESENTATION DU BILAN,
QU'IL DEMENT L'EXACTITUDE DES MENTIONS PORTEES SUR LES NOTES D'AUDIENCE DU
TRIBUNAL SELON LESQUELLES IL AURAIT DECLARE AVOIR PASSE AU BILAN L'ECRITURE DE
COMPENSATION INEXACTE EN VERSANT AUX DEBATS UNE ATTESTATION DE
L'EXPERT-COMPTABLE DE LA SOCIETE CERTIFIANT AVOIR LUI-MEME PRONONCE LA PHRASE
AINSI IMPUTEE AU PREVENU X... QUI, SELON LUI, DEMONTRE L'ERREUR DE PLUME
COMMISE PAR LE GREFFIER DU TRIBUNAL, MAIS QU'UNE TELLE ATTESTATION NE PEUT
FAIRE ECHEC AUX CONSTATATIONS SOUVERAINES DES PREMIERS JUGES QUI ENONCENT QUE
LE PREVENU A RECONNU PAR DEUX FOIS A L'AUDIENCE QU'IL AVAIT PASSE LES ECRITURES
DE COMPENSATION ;
QUE CETTE CONSTATATION DU TRIBUNAL EST CORROBOREE PAR LES
INDICATIONS DONNEES PAR LE PREVENU AU JUGE D'INSTRUCTION PUISQU'IL A DECLARE
QU'IL AVAIT RECU DES HONORAIRES COMPLEMENTAIRES EN 1971 ET 1972 JUSTIFIES PAR
LA MISSION ETENDUE
La responsabilité du commissaire aux
comptes
429
QUI LUI AVAIT ETE CONFIEE PAR LE PRESIDENT DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION DE LA SOCIETE CANADIENNE QUI POSSEDAIT LA MAJORITE DES ACTIONS
DE LA SOCIETE ;
QUE SON ROLE TEL QU'IL LE DECRIT LUI-MEME ETABLIT BIEN QUE SOUS
SON TITRE DE COMMISSAIRE AUX COMPTES, IL ETAIT, EN REALITE, LE MANDATAIRE DE
X... PRINCIPAL ACTIONNAIRE ET QUE, POUR REPONDRE A SES EXIGENCES, IL AVAIT DU
NECESSAIREMENT S'IMMISCER DANS LA GESTION DE LA SOCIETE ;
QU'IL APPARAIT, EN CONSEQUENCE, QU'IL A EFFECTIVEMENT PARTICIPE A
L'ELABORATION DU BILAN 1971 ;
»ALORS QUE D'UNE PART LES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE
NE CARACTERISENT AUCUN ACTE DE PARTICIPATION ACTIVE CONSTITUTIF D'UNE
COMPLICITE DU PREVENU AU DELIT DE PUBLICATION ET DE PRESENTATION D'UN BILAN
INEXACT ;
QU'EN EFFET, DES LORS QUE LE PREVENU CONTESTAIT AVOIR DECLARE A
L'AUDIENCE DU TRIBUNAL QU'IL AVAIT PARTICIPE A L'ELABORATION DU BILAN ET
PRODUISAIT UNE ATTESTATION DU COMPTABLE DE L'ENTREPRISE PAR LAQUELLE X...
DERNIER RECONNAISSAIT ETRE L'AUTEUR DES DECLARATIONS QUI FIGURAIENT SUR LES
FEUILLES D'AUDIENCE DU TRIBUNAL COMME EMANANT DU PREVENU, LA COUR NE POUVAIT
REFUSER DE TENIR COMPTE DE CETTE ATTESTATION SOUS PRETEXTE QUE L'AFFIRMATION
DES PREMIERS JUGES SELON LAQUELLE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES AURAIT PARTICIPE A
L'ELABORATION DU BILAN ETAIT CORROBOREE PAR LE FAIT QU'IL AVAIT RECONNU AVOIR
ETE CHARGE PAR LE PRINCIPAL ACTIONNAIRE DE LA SOCIETE D'UNE MISSION
D'INFORMATION CONCERNANT LA MARCHE DE CELLE-CI, UNE TELLE MISSION PARFAITEMENT
CONFORME AU ROLE D'UN COMMISSAIRE AUX COMPTES TEL QU'IL EST DEFINI PAR LES
ARTICLES 228 ET 229 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, N'IMPLIQUANT AUCUN ACTE DE
PARTICIPATION A L'ELABORATION ET LA PRESENTATION DU BILAN ;
»ALORS QUE D'AUTRE PART PUISQUE POUR RELAXER LE PREVENU DU
CHEF D'EXERCICE ILLICITE DE LA FONCTION DE COMMISSAIRE AUX COMPTES LES JUGES DU
FOND ONT ADMIS QU'IL N'ETAIT PAS ETABLI QU'IL AVAIT EXERCE AU SEIN DE LA
SOCIETE DES FONCTIONS ADMINISTRATIVES COMPTABLES OU JUDICIAIRES, LA COUR S'EST
MISE EN CONTRADICTION FLAGRANTE AVEC SES PROPRES CONSTATATIONS EN ADMETTANT
CEPENDANT QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES AVAIT PARTICIPE ACTIVEMENT A
L'ELABORATION DU BILAN DE LA SOCIETE» ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
430
SUR LE DEUXIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 228 ET 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE DE CONFIRMATION D'INFORMATIONS MENSONGERES SUR LA SITUATION DE
LA SOCIETE PAR CERTIFICATION D'UN BILAN INEXACT ;
»AUX MOTIFS QUE LE BILAN DE L'EXERCICE 1971 EST CRITIQUE PAR
LA POURSUITE EN X... QU'IL FAIT DISPARAITRE DE L'ACTIF DE LA SOCIETE DES
CREANCES D'UN MONTANT TOTAL DE 1 856 953,22 F PAR LE JEU D'UNE ECRITURE DE
COMPENSATION ET MAJORE INDUMENT L'ACTIF D'UNE SOMME DE 980 116,66 F, QUE POUR
LA COMPENSATION UNE SOMME DE 143 912,81 F A ETE RETENUE DANS LE BILAN A TITRE
DE FRAIS SUPPLEMENTAIRES ET QUE LE PREVENU CONVIENT EXPRESSEMENT QU'IL NE PEUT
JUSTIFIER DES FRAIS CORRESPONDANTS, QUE DE MEME UNE SOMME DE 161 726,75 F A ETE
RETENUE AU TITRE DE LA DIFFERENCE DE CHANGE, SOMME QUE LE PREVENU A RECONNUE
COMME INJUSTIFIEE A CONCURRENCE DE 35 000 F ;
QU'EN X... QUI CONCERNE LES FRAIS DE VOYAGE ET DE RECEPTION, ILS
NE SONT ASSORTIS D'AUCUNE JUSTIFICATION ;
QUE LA MAJORATION INDUE DE L'ACTIF RESULTE SELON LES EXPERTS DE
X... QUE, POUR PLUSIEURS FILMS DONT LA REALISATION AVAIT ETE ABANDONNEE, LES
FRAIS PRELIMINAIRES N'ONT PAS ETE TOTALEMENT AMORTIS ET QUE POUR UN PROJET DE
FILM LA PROVISION CONSTITUEE ETAIT INSUFFISANTE ;
QUE LE PREVENU INVOQUE LES DISPOSITIONS DU PLAN COMPTABLE
PROFESSIONNEL DE L'INDUSTRIE CINEMATOGRAPHIQUE QUI NE FAIT PAS OBLIGATION DE
CONSTITUER UNE PROVISION POUR FRAIS PRELIMINAIRES ET PRECISE QUE LES FRAIS
ENGAGES NE PEUVENT ETRE CONSIDERES COMME DES NON-VALEURS, MAIS QUE X... PLAN
COMPTABLE N'A ETE MIS EN VIGUEUR QUE PAR L'ARRETE MINISTERIEL DU 26 JUILLET
1972 ET N'ETAIT DONC PAS APPLICABLE A L'EXERCICE 1971 ;
QUE LA COUR RETIENDRA DONC L'INEXACTITUDE DU BILAN SUR X... POINT
EGALEMENT, QUE LE PREVENU SOUTIENT QU'IL N'EST PAS ETABLI QU'IL AIT SCIEMMENT
DONNE OU CERTIFIE DES INFORMATIONS MENSONGERES MAIS, AINSI QUE LA COUR L'A DEJA
RAPPELE, LA POURSUITE A DISTINGUE LES FAITS DE COMPLICITE RETENUS PAR LA COUR A
SON ENCONTRE DANS L'ELABORATION DU BILAN ET LA CERTIFICATION DE X... FAUX BILAN
;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
431
QU'AINSI, IL NE PEUT ETRE CONTESTE QUE LE PREVENU AVAIT
CONNAISSANCE DU CARACTERE MENSONGER DE X... BILAN ;
»ALORS QUE D'UNE PART DES LORS QUE LES MOTIFS DE L'ARRET,
SELON LESQUELS LE PREVENU AURAIT PARTICIPE A L'ELABORATION DU BILAN LITIGIEUX,
SONT EN CONTRADICTION FORMELLE AVEC LES AUTRES MOTIFS DE L'ARRET SERVANT DE
SOUTIEN NECESSAIRE AU CHEF DU DISPOSITIF RELAXANT LE PREVENU DES POURSUITES
POUR EXERCICE ILLICITE DE LA PRFESSION D'EXPERT-COMPTABLE, LA COUR A PRIVE SA
DECISION DE MOTIFS EN DEDUISANT LA CONNAISSANCE QUE LE PREVENU AVAIT DU
CARACTERE MENSONGER DU BILAN DE SA PARTICIPATION A L'ELABORATION DE X...
DOCUMENT ;
»ALORS QUE D'AUTRE PART PUISQUE AUX TERMES DE L'ARTICLE 228
DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 LE ROLE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES CONSISTE A
CERTIFIER NOTAMMENT LE BILAN ET A CONTROLER LA REGULARITE ET LA SINCERITE DES
COMPTES A L'EXCLUSION DE TOUTE IMMIXTION DANS LA GESTION DE LA SOCIETE, LE FAIT
QUE CERTAINES SOMMES FIGURANT AU DEBIT DE LA SOCIETE N'AIENT PAS ETE ASSORTIES
DE JUSTIFICATIONS NE PERMETTAIT PAS AU COMMISSAIRE AUX COMPTES DE REFUSER SA
CERTIFICATION DES LORS QUE C'ETAIT EN RAISON D'UNE DECISION PRISE PAR LES
DIRIGEANTS SOCIAUX QUE CES SOMMES ETAIENT PORTEES AU CREDIT DU PRINCIPAL
ACTIONNAIRE DE LA SOCIETE POUR ETRE COMPENSEES AVEC LES DETTES DE X... DERNIER
ENVERS LA SOCIETE ;
»ALORS QU'ENFIN LE FAIT QUE LE PLAN COMPTABLE PROFESSIONNEL
DE L'INDUSTRIE CINEMATOGRAPHIQUE NE SOIT ENTRE EN VIGUEUR QU'UN MOIS APRES
L'APPROBATION DU BILAN, N'INTERDISAIT PAS AU COMMISSAIRE AUX COMPTES DE SE
REFERER AUX REGLES DE X... PLAN POUR APPROUVER LES PROVISIONS FIGURANT AU BILAN
ETABLIES CONFORMEMENT AUX USAGES EN VIGUEUR» ;
LES MOYENS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER LE PREVENU COUPABLE DE COMPLICITE DE
PRESENTATION DE BILAN INEXACT, LA COUR D'APPEL RAPPELLE NOTAMMENT QUE LES
PREMIERS JUGES ONT ENONCE QUE Y... «A RECONNU PAR DEUX FOIS A L'AUDIENCE
QU'IL AVAIT PASSE DES ECRITURES DE COMPENSATION» AYANT ENTRAINE LA
FAUSSETE DUDIT BILAN ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
432
QUE CES MENTIONS FAISANT FOI JUSQU'A INSCRIPTION DE FAUX, ET LEUR
AUTORITE NE POUVANT ETRE DETRUITE PAR LA SEULE PRODUCTION D'UNE ATTESTATION, LE
PREMIER MOYEN PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
ATTENDU QUE, POUR ECARTER L'APPLICATION DE L'ARTICLE 456 DE LA
LOI DU 24 JUILLET 1966, L'ARRET ESTIME QUE LES AGISSEMENTS REPROCHES A Y...,
QUI A «EN L'OCCURRENCE OUTREPASSE SA MISSION DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES», NE SUFFISENT PAS A CARACTERISER L'INFRACTION AU TEXTE PRECITE
;
QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS, N'IMPLIQUANT PAS L'INEXISTENCE
DE TOUTE INTERVENTION DE X... DERNIER DANS LA GESTION DE LA SOCIETE, LA COUR
D'APPEL A PU, SANS SE CONTREDIRE, FAIRE ETAT PAR AILLEURS DE CERTAINS ACTES DE
NATURE COMPTABLE ;
QUE DES LORS LE PREMIER MOYEN PRIS EN SA DEUXIEME BRANCHE ET LE
DEUXIEME MOYEN PRIS EN SA PREMIERE BRANCHE DOIVENT ETRE REJETES ;
ATTENDU QUE, EN RETENANT QUE Y... AVAIT, EN SA QUALITE DE
COMMISSAIRE AUX COMPTES, SCIEMMENT CONFIRME DES INFORMATIONS MENSONGERES EN
CERTIFIANT LA REGULARITE ET LA SINCERITE DU BILAN DE L'EXERCICE 1971 DONT IL
CONNAISSAIT LA FAUSSETE POUR AVOIR PARTICIPE A SON ELABORATION, LES JUGES ONT,
SANS ENCOURIR LE GRIEF ARTICULE A LA DEUXIEME BRANCHE DU DEUXIEME MOYEN, RELEVE
TOUS LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DU DELIT PREVU ET REPRIME PAR L'ARTICLE 457 DE
LA LOI DU 24 JUILLET 1966 POUR LEQUEL LE DEMANDEUR ETAIT POURSUIVI ;
ATTENDU ENFIN QUE, POUR CARACTERISER LA FAUSSETE DU BILAN DE
L'EXERCICE 1971 PAR MAJORATION INDUE DE L'ACTIF, LA COUR D'APPEL RELEVE UN
MANQUE DE PROVISION POUR LES FRAIS PRELIMINAIRES ENGAGES AVANT REALISATION D'UN
FILM ALORS QUE SEMBLABLE PROVISION FIGURAIT AU BILAN DE L'EXERCICE POUR
D'AUTRES PROJETS ;
QU'ELLE A PU AINSI ESTIMER INOPERANTE L'ARGUMENTATION «DONT
LE PREVENU N'A PAS FAIT ETAT AU COURS DES OPERATIONS D'EXPERTISE»,
INVOQUEE AUX CONCLUSIONS DONT ELLE ETAIT SAISIE ET REPRISE A LA TROISIEME
BRANCHE DU SECOND MOYEN ;
QU'EN CONSEQUENCE LES MOYENS REUNIS DOIVENT ETRE REJETES ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
433
SUR LE TROISIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 59 ET 60 DU CODE PENAL, 133 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967 ET 593 DU
CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU COUPABLE
DE COMPLICITE D'INFRACTION ASSIMILEE A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR
DETOURNEMENT D'ACTIFS COMMIS PAR GEWOLD ET FELLOUS ;
»AUX MOTIFS QUE LA DENAGATION PAR LE PREVENU DE TOUTE
PARTICIPATION A L'ACTION FRAUDULEUSE DES DEUX PRESIDENTS DU CONSEIL
D'ADMINISTRATION QUI ONT CONCLU UNE TRANSACTION AVEC L'ANCIEN PRESIDENT
DEMISSIOGNAIRE ALLOUANT A X... DERNIER UNE INDEMNITE INDUE DE 513 000 F ET 7,5
% DES RECETTES A L'ETRANGER DU FILM «MOURIR D'AIMER» EST DENUEE DE
TOUTE PERTINENCE ;
QU'EN EFFET, EN ACCEPTANT D'ETRE LE MANDATAIRE DU PRINCIPAL
ACTIONNAIRE, LE PREVENU A MECONNU SA VERITABLE MISSION DE COMMISSAIRE AUX
COMPTES ;
QU'IL A INFORME X... DERNIER DU DEROULEMENT DES POURPARLERS QUI
ONT PRECEDE LA SIGNATURE DE LA TRANSACTION LUI PERMETTANT AINSI DE FAIRE
PARVENIR A SES AVOCATS TOUTES INSTRUCTIONS UTILES POUR UN ABOUTISSEMENT
FAVORABLE A SES INTERETS ET A CELUI DE SON GROUPE, FUT-CE AU DETRIMENT DE LA
SOCIETE ;
QUE DES LORS LA PRESENCE DU PREVENU AUX ENTRETIENS PRELIMINAIRES
QUI SE SONT DEROULES ENTRE LES AVOCATS DU PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION
DEMISSIONNAIRE ET CEUX DE LA SOCIETE CONSTITUE BIEN, AU SENS DE L'ARTICLE 60 DU
CODE PENAL, UNE AIDE, ASSISTANCE ET FOURNITURE DE MOYENS, APPORTEE EN TOUTE
CONNAISSANCE DE CAUSE ;
»ALORS QUE ET COMME LE PREVENU LE FAISAIT JUSTEMENT VALOIR
DANS SES CONCLUSIONS, LE FAIT QU'IL AIT ASSISTE AUX POURPARLERS QUI ONT PRECEDE
LA TRANSACTION ET QU'IL EN AIT RENDU COMPTE AU PRINCIPAL ACTIONNAIRE DE LA
SOCIETE NE CONSTITUE AUCUN ACTE D'AIDE, D'ASSISTANCE OU DE FOURNITURE DE MOYEN
CONSTITUTIF DE LA COMPLICITE DES LORS QUE LES SERVICES QU'IL A AINSI RENDUS AU
PRINCIPAL ACTIONNAIRE DE LA SOCIETE SONT TOTALEMENT ETRANGERS A LA CONCLUSION
DE LA TRANSACTION QUI S'EST REALISEE SANS AUCUNE INTERVENTION DE X... DERNIER
QUI N'A D'AILLEURS PAS ETE INCULPE» ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
434
ATTENDU QUE, POUR DECLARER Y... COUPABLE DE COMPLICITE
D'INFRACTION ASSIMILEE A LA BANQUEROUTE FRAUDULEUSE PAR DETOURNEMENT D'ACTIF
COMMIS PAR FELLOUS ET GEWOLD, LES JUGES ENONCENT QUE LE PREVENU A PARTICIPE
ACTIVEMENT A L'ELABORATION D'UN ACCORD ATTRIBUANT A MASSE, ANCIEN DIRIGEANT
SOCIAL, DES AVANTAGES PECUNIAIRES SANS CONTREPARTIE ;
QU'ILS PRECISENT QUE, POUR PERMETTRE A FELLOUS ET A GEWOLD DE
RECEVOIR DES INSTRUCTIONS CONFORMES AUX INTERETS DE L'ACTIONNAIRE MAJORITAIRE
DEMEURANT AU CANADA, IL INFORMAIT X... DERNIER TELEPHONIQUEMENT DU DEROULEMENT
DES POURPARLERS ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS QUI CARACTERISENT UNE
ASSISTANCE APPORTEE AUX DIRIGEANTS SOCIAUX PAR AILLEURS CONDAMNES, C'EST A BON
DROIT QUE LA COUR D'APPEL A RETENU LA CULPABILITE DU DEMANDEUR ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN DOIT ETRE REJETE ;
SUR LE QUATRIEME MOYEN DE CASSATION, PRIS DE LA VIOLATION DES
ARTICLES 229, 233 ET 457 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, 388 ET 593 DU CODE DE
PROCEDURE PENALE, VIOLATION DES DROITS DE LA DEFENSE, DEFAUT DE MOTIFS ET
MANQUE DE BASE LEGALE ;
»EN X... QUE L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE
PREVENU COUPABLE DE NON REVELATION AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DES FAITS
DELICTUEUX ;
»AUX MOTIFS QUE LE PREVENU AFFIRME NE PAS AVOIR DENONCE LES
FAITS ACCOMPLIS PAR LES DIRIGEANTS SOCIAUX PARCE QU'IL NE LES ESTIMAIT PAS
DELICTUEUX ;
QU'EN X... QUI CONCERNE LE REMBOURSEMENT PARTIEL D'UN EMPRUNT A
LA BANK OF AMERICA INTERVENU EN 1973 CONSTITUTIF D'UN PAIEMENT PREFERENTIEL AU
PREJUDICE DE LA MASSE, LE COMMISSAIRE AUX COMPTES QUI, AUX TERMES DE L'ARTICLE
229 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, A POUR MISSION D'OPERER TOUTES VERIFICATIONS
ET CONTROLES OPPORTUNS, N'EST PAS FONDE A SE REFUGIER DERRIERE SA PRETENDUE
IGNORANCE DU PAIEMENT PREFERENTIEL, IGNORANCE QUI RESULTERAIT DE L'ABSENCE DE
CONTROLE DE SA PART SUR LES COMPTES DE L'EXERCICE 1973, QUE POUR LES AUTRES
INFRACTIONS, LE PREVENU SE BORNE A EN CONTESTER LA MATERIALITE PAR DE SIMPLES
AFFIRMATIONS
La responsabilité du commissaire aux
comptes
435
DE SA PART ;
QU'EN X... QUI CONCERNE LE VERSEMENT A TITRE D'INDEMNITE D'UNE
SOMME DE 140 000 F AU PRESIDENT DU CONSEIL D'ADMINISTRATION, AU MOMENT DE SON
DEPART, CONSTITUTIF D'UN DELIT DE BANQUEROUTE FRAUDULEUSE, LE PREVENU SE BORNE
A INDIQUER QUE CETTE INDEMNITE A ETE ALLOUEE APRES DES NEGOCIATIONS ENTRE SON
BENEFICIAIRE ET LE PRINCIPAL ACTIONNAIRE, QU'IL EN AVAIT FAIT MENTION DANS SON
RAPPORT SPECIAL ET QU'IL N'AVAIT GUERE LE MOYEN D'APPRECIER LES RAISONS QUI
EXPLIQUAIENT LE PRINCIPE ET LE MONTANT D'UNE TELLE INDEMNITE ;
QUE L'INDIGENCE D'UNE TELLE ARGUMENTATION SUFFIT A LUI OTER TOUTE
PERTINENCE ;
»ALORS QUE D'UNE PART DES LORS QUE LE COMMISSAIRE AUX
COMPTES ETAIT SEULEMENT PREVENU D'AVOIR COURANT 1971 ET 1972 SCIEMMENT OMIS DE
REVELER AU PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE LES DELITS DONT IL AVAIT EU CONNAISSANCE,
LES JUGES DU FOND ONT VIOLE LES DROITS DE LA DEFENSE ET STATUE EN DEHORS DES
LIMITES DE LEUR SAISINE EN LUI IMPUTANT UNE NON DENONCIATION D'UN DELIT REALISE
EN 1973 ;
»ALORS QUE D'AUTRE PART POUR QUE LE COMMISSAIRE AUX COMPTES
SOIT TENU DE DENONCER LES FAITS DONT IL A EU CONNAISSANCE, IL FAUT
NECESSAIREMENT QU'IL AIT ETE EN MESURE D'EN APPRECIER LE CARACTERE DELICTUEUX
;
QUE DES LORS, EN L'ESPECE, OU LE PREVENU CONTESTAIT AVOIR PU
APPRECIER LE CARACTERE DELICTUEUX DES AGISSEMENTS DE SES COPREVENUS, LA COUR NE
POUVAIT LE DECLARER COUPABLE DE L'INFRACTION QUI LUI ETAIT REPROCHEE EN SE
BORNANT A INVOQUER L'INDIGENCE DE CETTE ARGUMENTATION» ;
ATTENDU QUE POUR DECLARER Y... COUPABLE DE NON REVELATION AU
PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE FAITS DELICTUEUX, LES JUGES ONT RELEVE QUE
CELUI-CI «NE CONTESTE PAS AVOIR EU CONNAISSANCE DES FAITS DE LA
CAUSE» MAIS PRETEND SEULEMENT AVOIR IGNORE QUE CEUX-CI ETAIENT
REPREHENSIBLES ;
QU'ILS ONT ESTIME QUE CES DERNIERES AFFIRMATIONS «NE PEUVENT
PAR ELLES-MEMES CONTROUVER LES PRECEDENTES CONSTATATIONS RELATIVES AU CARACTERE
PUNISSABLE DES AGISSEMENTS INCRIMINES ;
436
QU'ILS ONT, PAR AILLEURS, RETENU QUE LE PREVENU «AURAIT DU
PORTER A LA CONNAISSANCE DU PARQUET» L'EXISTENCE D'UNE INDEMNITE SANS
CAUSE VERSEE A GEWOLD ET QU'IL A «PASSE DES ECRITURES FRAUDULEUSES QUI LE
DISPENSAIENT DE CERTAINES REVELATIONS» ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES ENONCIATIONS DESQUELLES SE DEDUIT
NECESSAIREMENT LA MAUVAISE FOI DU DEMANDEUR, ET QUELQUE REGRETTABLE QUE SOIT
L'ERREUR COMMISE DANS L'ARRET QUANT A LA DATE D'UN DES FAITS RETENUS PAR ELLE,
LA COUR D'APPEL A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION DES LORS QUE LA PEINE
PRONONCEE EST JUSTIFIEE PAR LES AUTRES INFRACTIONS RETENUES, LES DISPOSITIONS
DE L'ARTICLE 598 DU CODE DE PROCEDURE PENALE DEVANT RECEVOIR APPLICATION ;
QUE, PAR SUITE, LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ET ATTENDU QUE
L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
PAR CES MOTIFS : 1°) REJETTE LE POURVOI FORME PAR Y...
JACQUES ;
CONDAMNE LE DEMANDEUR PAR CORPS AUX DEPENS, FIXE AU MINIMUM
EDICTE PAR LA LOI LA DUREE DE LA CONTRAINTE PAR CORPS ;
2°) CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS DU
21 DECEMBRE 1981 EN SES DISPOSITIONS RELATIVES A MERCIER DE SAINTE CROIX GUY,
ET POUR ETRE STATUE A NOUVEAU CONFORMEMENT A LA LOI DANS LA LIMITE DE LA
CASSATION AINSI PRONONCEE, RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR
D'APPEL DE VERSAILLES, A X... DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN
CHAMBRE DU CONSEIL ;
Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, Chambre 9, du 21 décembre 1981
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
437
Annexe 31
Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Civile
18 Mai 1989
COMMISSAIRE AUX COMPTES : RESPONSABILITE DISCIPLINAIRE
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du 18 mai 1989
N° de pourvoi: 87-15084
Publié au bulletin
Rejet .
Président :M. Ponsard,
président
Rapporteur :M. Viennois, conseiller apporteur
Avocat général :Mme Flipo, avocat
général
Avocat :la SCP Waquet et Farge ., avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23
mars 1987) que M. X..., avocat, ayant été condamné
pénalement à une peine d'amende pour les délits de fraude
fiscale et d'omission de tenue du livre-journal prévu par l'article 99
du Code général
La responsabilité du commissaire aux
comptes
438
des impôts, a été
déféré, à la demande du procureur
général, devant le conseil de l'Ordre siégeant comme
conseil de discipline ; que celui-ci a prononcé contre M. X... la peine
de l'avertissement ; que, sur appel du procureur général, la
peine de trois mois de suspension a été infligée à
cet avocat ;
Attendu que M. X... reproche à la cour d'appel d'avoir
ainsi statué, alors, selon le moyen, d'une part, qu'en
considérant comme particulièrement grave le délit de
fraude fiscale commis par lui tandis que le juge répressif avait admis
qu'il ne s'était pas soustrait à ses obligations par esprit de
fraude, que tous les éléments permettant de déterminer
l'assiette exacte de son imposition existaient et étaient tenus à
la disposition de l'Administration et que les circonstances atténuantes
retenues par les premiers juges devaient être accordées au
prévenu qui s'est immédiatement mis en règle avec
l'Administration, la cour d'appel a violé le principe de
l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, et
alors, d'autre part, qu'en faisant état, pour justifier le
prononcé d'une peine de suspension, de la «
répétition des infractions « l'arrêt attaqué
qui a ainsi visé une récidive non retenue par la
prévention disciplinaire et sur laquelle l'intéressé n'a
pu s'expliquer, a violé les articles 4 du nouveau Code de
procédure civile et 6 de la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu, d'abord, que l'autorité de la chose
jugée au pénal sur l'action disciplinaire ne s'étend
qu'à ce qui a été nécessairement jugé quant
à l'existence du fait incriminé, à sa qualification et
à la culpabilité ou à l'innocence de celui à qui ce
fait est imputé ; qu'il s'ensuit que le juge saisi de l'action
disciplinaire apprécie librement la gravité des faits qui lui
sont déférés au regard des règles
déontologiques en cause sans être tenu de se conformer aux
appréciations portées par le juge pénal quant à la
possibilité de faire bénéficier le prévenu des
circonstances atténuantes ; qu'en se prononçant comme elle a
fait, la cour d'appel n'a pas violé le principe de l'autorité de
la chose jugée au pénal ;
Attendu, ensuite, qu'en relevant la «
répétition des infractions de M. X... aux lois et
règlements ainsi qu'aux règles professionnelles «, la cour
d'appel ne s'est pas référée à la notion de
récidive, mais a seulement entendu rappeler que, pendant plusieurs
années, M. X... avait omis de déclarer l'ensemble de ses revenus
professionnels et que la tenue de sa comptabilité avait
été entachée de graves irrégularités ;
d'où il suit qu'en aucune de ses deux branches le moyen n'est
fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi
Publication : Bulletin 1989 I N° 201 p.
134
Décision attaquée : Cour d'appel
d'Aix-en-Provence, du 23 mars 1987
La responsabilité du commissaire aux
comptes
439
Titrages et résumés : CHOSE JUGEE
- Autorité du pénal - Etendue - Condamnation - Liberté
d'appréciation de la gravité des faits par le juge disciplinaire
L'autorité de la chose jugée au pénal sur l'action
disciplinaire ne s'étend qu'à ce qui a été
nécessairement jugé quant à l'existence du fait
incriminé, à sa qualification et à la culpabilité
ou à l'innocence de celui à qui ce fait est imputé. Il
s'ensuit que le juge saisi de l'action disciplinaire apprécie librement
la gravité des faits qui lui sont déférés au regard
des règles déontologiques en cause, sans être tenu de se
conformer aux appréciations portées par le juge pénal
quant à la possibilité de faire bénéficier le
prévenu des circonstances atténuantes .
AVOCAT - Discipline - Action disciplinaire - Poursuite
pénale préalable - Condamnation - Liberté
d'appréciation de la gravité des faits par le juge
disciplinaire
La responsabilité du commissaire aux
comptes
440
Annexe 32
DECISION DU CONSEIL D'ETAT FRANÇAIS 12 Octobre 2010
COMMISSAIRE AUX COMPTES : RESPONSABILITE DISCIPLINAIRE
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du 12 octobre 2010
N° de pourvoi: 09-13006
Non publié au bulletin
Rejet
Mme Favre (président),
président
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt
suivant : Statuant tant sur le pourvoi principal formé par M. X... que
sur le pourvoi incident relevé par la Société touristique
d'hôtellerie et de casino de la Réunion et M. Y... ; Sur le moyen
unique du pourvoi principal :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la
Réunion, 15 décembre 2008) rendu en matière de
référé, que M. Y... ayant cédé à M.
X... une partie des actions qu'il détenait dans la Société
touristique d'hôtellerie et de casino de la Réunion (la
société), ceux-ci ont conclu le 19 septembre 1998, pour une
durée de dix ans à compter de sa signature, un pacte
d'actionnaires aux termes duquel la société s'engageait à
communiquer à M. X... un certain nombre de documents relatifs aux
comptes sociaux ainsi qu'à désigner un co-commissaire aux
comptes, au choix de M. X..., « pour assurer la mission en
complémentarité avec le commissaire aux comptes actuel « ;
qu'alléguant des manquements de la société aux obligations
découlant pour elle de ce pacte, M. X... a obtenu d'un juge des
référés, par ordonnance déclarée
La responsabilité du commissaire aux
comptes
441
commune à M. Y..., la désignation d'un
co-commissaire aux comptes et la condamnation de la société
à lui remettre divers documents prévus par le pacte
d'actionnaires ; que la société et M. Y... ont interjeté
appel de cette décision ; Attendu que M. X... fait grief à
l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de désignation d'un
co-commissaire aux comptes alors, selon le moyen :
1° / que le juge des référés saisi
d'une demande d'exécution d'une obligation de faire sur le fondement de
l'article 873, alinéa 2 du code de procédure civile doit se
placer au jour de sa saisine pour apprécier le caractère non
sérieusement contestable de l'obligation ; que le juge des
référés qui constate qu'à ce jour, l'obligation
invoquée n'est pas sérieusement contestable, doit, en vertu de ce
texte, ordonner son exécution ; que pour rejeter la demande de
désignation d'un co-commissaire aux comptes formée par M. X... en
exécution du pacte d'actionnaires du 19 septembre 1998, la cour d'appel
a énoncé que le juge des référés doit se
placer à la date à laquelle il prononce sa décision pour
ordonner les mesures sollicitées, et qu'au jour où elle a
statué, cette obligation de désignation d'un commissaire aux
comptes ne valait plus dès lors que le pacte d'actionnaires,
prévu pour une durée de dix ans, avait expiré ; qu'en
statuant ainsi, alors qu'au 23 mai 2008, jour de sa saisine par l'effet de
l'enregistrement de la déclaration d'appel au greffe de la cour d'appel,
le pacte d'actionnaires conférant à M X... la faculté
d'obtenir la désignation d'un co-commissaire aux comptes était en
cours de validité, son échéance n'intervenant que le 19
septembre 2008, la cour d'appel a violé l'article 873, alinéa 2
du code de procédure civile ;
2° / qu'aux termes de l'article L. 823-4 du code de
commerce, lorsqu'un membre de l'assemblée ou de l'organe
compétent est habilité à demander en justice la
désignation d'un commissaire aux comptes, le mandat ainsi
conféré prend fin lorsqu'il a été pourvu par
l'assemblée ou l'organe compétent à la nomination du ou
des commissaires ; qu'en conséquence, le terme de l'obligation faite
à la société par le pacte d'actionnaires de
désigner, sur demande de M. X..., un co-commissaire aux comptes
était constitué non par le terme du pacte d'actionnaires, mais
par la nomination, par les organes de la société, du commissaire
aux comptes dont la désignation a été sollicitée ;
que pour débouter M. X... de sa demande tendant à la
désignation d'un co-commissaire aux comptes sur le fondement de
l'article L. 823-4 du code de commerce, la cour d'appel a énoncé
qu'au jour où elle a prononcé sa décision, l'obligation de
désignation d'un co-commissaire aux comptes issue du pacte
d'actionnaires ne valait plus dès lors que ce pacte, prévu pour
une durée de dix ans, avait expiré ; qu'en statuant ainsi, alors
que, valable au jour de la saisine de la juridiction, la demande de
désignation d'un co-commissaire devait être accueillie sans qu'il
soit tenu compte de la durée de validité de la convention qui
organisait la faculté, pour un associé, d'obtenir une telle
désignation, le terme de l'obligation de désignation d'un
co-commissaire aux comptes mise à la charge de la société
ne pouvant être constitué que par la nomination, par les organes
de cette société, d'un commissaire aux comptes, la cour d'appel a
violé l'article L. 823-4 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, que l'existence d'une contestation
sérieuse, de nature à affecter les pouvoirs de la juridiction des
référés d'ordonner l'exécution d'une obligation ou
d'allouer une provision, s'apprécie, en première instance comme
en appel, à la date de sa décision ; qu'ayant relevé qu'au
jour où elle statuait, le pacte d'actionnaires, qui fondait l'obligation
de la société de désigner un co-commissaire aux comptes,
était expiré du fait de l'écoulement de la durée
pour laquelle il avait été conclu, ce dont il résultait
que cette obligation était devenue caduque, la cour d'appel
La responsabilité du commissaire aux
comptes
442
a, à bon droit, retenu que son existence était
sérieusement contestable ;
Et attendu, d'autre part, que la désignation d'un
co-commissaire aux comptes, au choix d'un actionnaire, en exécution
d'une stipulation d'un pacte d'actionnaires, ne visant pas à
réparer l'omission d'une nomination légalement obligatoire et
nécessaire au fonctionnement régulier de la
société, les dispositions de l'article L. 823-4 du code de
commerce ne s'appliquaient pas ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être
accueilli en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que le moyen unique du pourvoi incident ne serait pas
de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chacune des parties la charge afférente
à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les
demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre
commerciale, financière et économique, et prononcé par le
président en son audience publique du douze octobre deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen, Fabiani
et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif
attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant
à la désignation de la Société SOGECA en
qualité de cocommissaire aux comptes de la SOCIETE TOURISTIQUE
D'HOTELLERIE ET DE CASINO DE LA REUNION (STHCR) ;
Aux motifs que « le Juge des référés se
place à la date à laquelle il prononce sa décision pour
ordonner les mesures sollicitées ; que le pacte comportant l'obligation
à la charge de la STHCR de désigner un commissaire aux comptes au
choix de Bernard X... en complémentarité avec le commissaire aux
comptes déjà choisi par la Société a
été conclu pour une durée de 10 ans à compter de sa
signature ; que les 10 ans étant expirés, l'obligation de
désignation d'un commissaire aux comptes ne vaut plus » ;
Alors que, de première part, le Juge des
référés saisi d'une demande d'exécution d'une
obligation de faire sur le fondement de l'article 873, alinéa 2 du Code
de procédure civile doit se placer au jour de sa saisine pour
apprécier le caractère non sérieusement contestable de
l'obligation ; que le Juge des référés qui constate
qu'à ce jour, l'obligation invoquée n'est pas sérieusement
contestable, doit, en vertu de ce texte, ordonner son exécution ; que
pour rejeter la demande de désignation d'un co-commissaire aux comptes
formée par M. X... en exécution du pacte d'actionnaires du 19
septembre 1998, la Cour d'appel a énoncé que le Juge des
référés doit se placer à la date à laquelle
il prononce sa décision pour ordonner les mesures sollicitées, et
qu'au jour où elle a statué, cette obligation de
désignation d'un commissaire aux comptes ne valait plus dès lors
que le pacte d'actionnaires, prévu pour une durée de dix ans,
avait expiré ; qu'en statuant ainsi, alors qu'au 23 mai 2008, jour de sa
saisine par l'effet de l'enregistrement de la déclaration d'appel au
Greffe de la Cour, le pacte d'actionnaires conférant à M. X... la
faculté d'obtenir la désignation d'un co-commissaire aux comptes
était en cours de validité, son échéance
n'intervenant que le 19 septembre 2008, la Cour d'appel a violé
l'article 873, alinéa 2 du Code de procédure civile ;
Alors que, de seconde part, aux termes de l'article L. 823-4 du
Code de commerce,
La responsabilité du commissaire aux
comptes
443
lorsqu'un membre de l'assemblée ou de l'organe
compétent est habilité à demander en justice la
désignation d'un commissaire aux comptes, le mandat ainsi
conféré prend fin lorsqu'il a été pourvu par
l'assemblée ou l'organe compétent à la
nomination du ou des commissaires ; qu'en conséquence, le
terme de l'obligation faite à la Société STHCR par le
pacte d'actionnaires de désigner, sur demande de M. X..., un
co-commissaire aux comptes était constitué non par le terme du
pacte d'actionnaires, mais par la nomination, par les organes de la
société, du commissaire aux comptes dont la désignation a
été sollicitée ; que pour débouter M. X... de sa
demande tendant à la désignation d'un co-commissaire aux comptes
sur le fondement de l'article L. 823-4 du Code de commerce, la Cour d'appel a
énoncé qu'au jour où elle a prononcé sa
décision, l'obligation de désignation d'un co-commissaire aux
comptes issue du pacte d'actionnaires ne valait plus dès lors que ce
pacte, prévu pour une durée de dix ans, avait expiré ;
qu'en statuant ainsi, alors que, valable au jour de la saisine de la
juridiction, la demande de désignation d'un co-commissaire devait
être accueillie sans qu'il soit tenu compte de la durée de
validité de la convention qui organisait la faculté, pour un
associé, d'obtenir une telle désignation, le terme de
l'obligation de désignation d'un co-commissaire aux comptes mise
à la charge de la Société STHCR ne pouvant être
constitué que par la nomination, par les organes de cette
société, d'un commissaire aux comptes, la Cour d'appel a
violé l'article L. 823-4 du Code de commerce.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Gatineau et
Fattaccini, avocat aux Conseils pour la Société touristique
d'hôtellerie et de casino de la Réunion et M. Y... Il est fait
grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné à la
STHCR de communiquer à M. X... les documents suivants :
- Les situations comptables trimestrielles des exercices 2005 et
2006 et les deux premiers trimestres de l'exercice 2006-2007
- Un état trimestriel de trésorerie pour le dernier
trimestre 2007 - Une copie des comptes sociaux des exercices 2005-2006
- Une copie des rapports généraux et
spéciaux du commissaire aux comptes pour l'exercice 2005-2006
- Un état de rapprochement entre les comptes et les
budgets relatifs à l'exercice 2005-2006,
d'AVOIR dit qu'à défaut de production de ces
documents dans le délai d'un mois suivant la signification de
l'ordonnance, la société débitrice sera redevable d'une
astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard, d'AVOIR dit l'ordonnance
commune à Charles Y..., d'AVOIR condamné la Société
STHCR à payer à Monsieur X... 600 euros au titre de l'article 700
du Code de procédure civile en première instance et d'AVOIR dit
n'y avoir lieu à application de l'article 700 pour les frais
attachés à la procédure d'appel ;
AUX MOTIFS QUE les pièces dont communication est
sollicitée sont précises et figurent dans la liste des documents
prévus dans le pacte d'actionnaires : les situations comptables
trimestrielles des exercices 2005 et 2006 et les deux premiers trimestres de
l'exercice 2006-2007 ; un état trimestriel de trésorerie pour le
dernier trimestre 2007 ; une copie des comptes sociaux des exercices 2005-2006
; un état de rapprochement entre les comptes et les budgets relatifs
à l'exercice 2005-2006 ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
444
que la société STHCR verse aux débats
beaucoup de documents comptables dont pas un ne correspond à ceux
demandés ; qu'ainsi en lieu et place des documents sociaux des exercices
2005-2006, la STHCR verse les procès-verbaux d'assemblées
générales indiquant que ces comptes ont été
adressés à tous les actionnaires, ce qui ne suffit pas, au moins
dans le cadre de la présente procédure, pour établir la
réalité de l'envoi ; qu'il n'est pas non plus justifié des
situations comptables trimestrielles des exercices 2005 et 2006, des deux
premiers trimestres de 2006 et 2007, de la trésorerie pour le dernier
trimestre 2007 ni de l'état de rapprochement entre les comptes ; que
c'est donc à bon droit que le juge des référés a
ordonné la production de ces documents sous astreinte ; qu'il convient
de confirmer la décision déférée sur ce point ;
ET AUX MOTIFS QUE « attendu que pour conclure à
l'inanité de la demande de communication de pièces comptables, la
société requise argue du fait qu'elles ont déjà
été communiquées dans le cadre d'autres instances
juridictionnelles ; qu'elle ne rapporte toutefois pas la preuve de cette
allégation ; qu'en outre, le cadre formel de cette production
étant nécessairement différent, il ne peut être
conjecturé que ces documents aient été fournis en leur
état complet : qu'en conséquence, la STHCR sera tenue de remettre
au requérant l'ensemble des documents énumérés
à l'acte, et détaillés dans le corps du dispositif de la
présent ordonnance, sous astreinte comminatoire de 500 euros par jour de
retard passé le délai d'un mois suivant la signification de la
présent «
1.- ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux
conclusions des parties ; que la société STHCR et monsieur Y...
faisaient valoir dans leurs conclusions (p. 7 § 6 et p. 8 § 1-2) que
le pacte d'actionnaires avait été conclu pour une durée de
10 ans de sorte que toutes les obligations nées du pacte
s'étaient éteintes le 19 septembre 2008, parmi lesquelles celle
concernant la communication des documents comptables sollicitée par
monsieur X... ; qu'en ordonnant le 15 décembre 2008 la production sous
astreinte de ces documents, sans répondre aux conclusions des exposantes
prises de l'extinction de toute obligation à la charge de la
société STHCR, la Cour d'appel a violé l'article 455 du
code de procédure civile ;
2. - ALORS subsidiairement QUE les juges doivent examiner tous
les éléments de preuve produits par les parties au soutien de
leurs prétentions ; que pour démontrer que les documents
réclamés par monsieur X... lui avaient déjà
été adressés, la société STHCR produisait
différents courriers attestant de leur envoi ou de leur remise en mains
propres à celui-ci (pièces produites n° 6c, 9c, 15c, 21c et
22c) ; qu'en affirmant péremptoirement que l'employeur
n'établissait pas l'envoi des documents sollicités, sans viser ni
analyser, serait-ce sommairement, ces courriers, la Cour d'appel a violé
l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Décision attaquée : Cour d'appel
de Saint-Denis de la Réunion du 15 décembre 2008
La responsabilité du commissaire aux
comptes
445
Annexe 33
DECISION DU CONSEIL D'ETAT FRANÇAIS 18 Mars 1983
COMMISSAIRE AUX COMPTES : RESPONSABILITE DISCIPLINAIRE
Conseil d'Etat statuant au contentieux
N° 26955
Publié au recueil Lebon
6 / 2 SSR
M. de Bresson, président
M. Strauss, rapporteur
M. Robineau, commissaire du gouvernement
lecture du vendredi 18 mars 1983
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Requête de M. X... tendant à ce que le Conseil
d'Etat :
1° déclare amnistiée la sanction disciplinaire
qui lui a été infligée par la chambre nationale de
discipline des commissaires aux comptes ;
2° à défaut, annule la décision du 27
juin 1980, par laquelle la Chambre nationale de discipline des commissaires aux
comptes a prononcé à son encontre la peine de l'avertissement
;
3° renvoie l'affaire devant la Chambre nationale de
discipline des commissaires aux
La responsabilité du commissaire aux
comptes
446
comptes ;
Vu la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 relative aux
sociétés commerciales ; le décret n° 69-810 du 2
août 1969 portant règlement d'administration publique et relatif
à l'organisation de la profession et au statut professionnel des
commissaires aux comptes de sociétés ; la loi n° 81-736 du 4
août 1981 portant amnistie ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le
décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la demande tendant au bénéfice de l'amnistie :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 457 de la
loi du 24 juillet 1966 que « Sera punie ... toute personne, qui, soit en
son nom personnel, soit au titre d'associé dans une
société de commissaires aux comptes ... n'aura pas
révélé au Procureur de la République, les faits
délictueux dont il aura eu connaissance « ; que, pour avoir omis de
révéler au Procureur de la République les faits
délictueux dont il a eu connaissance lors des contrôles
exercés auprès de la société SOGELOR, de 1972
à 1975, M. X..., président-directeur général de la
société Lorraine de Révision Comptable, autorisée
à exercer la fonction de commissaire aux comptes en vertu des
dispositions du 3e alinéa de l'article 218 de la loi du 24 juillet 1966,
et lui-même inscrit, en tant que personne physique, sur la liste des
commissaires aux comptes, a été reconnu coupable de ce chef, par
un jugement du tribunal correctionnel de Metz en date du 6 juillet 1978 ; que
ce jugement devenu définitif l'a dispensé de peine en application
des articles 469-1 et 469-2 du code de procédure pénale ;
Cons. que, pour infliger à M. X..., par décision du
27 juin 1980, la peine de l'avertissement, la chambre nationale de discipline
des commissaires aux comptes s'est fondée, en application de l'article
88 du décret du 12 août 1969, sur le fait que l'infraction
constatée par le juge pénal était également
constitutive d'une faute passible d'une sanction disciplinaire ;
Cons. que si, aux termes de l'article 13 de la loi du 4
août 1981 : « Sont amnistiés les faits commis
antérieurement au 22 mai 1981 en tant qu'ils constituent des fautes
passibles d'une sanction disciplinaire ou professionnelle. Toutefois ...
l'amnistie des sanctions est subordonnée à l'amnistie de la
condamnation pénale ... «, et si les faits reprochés
à M. X... sont antérieurs au 22 mai 1981, ces faits, alors
même que la condamnation pénale intervenue le 6 juillet 1978
serait amnistiée, présentent le caractère d'un manquement
à la probité ou à l'honneur, exclu, en matière
disciplinaire, du bénéfice de l'amnistie par les dispositions du
3e alinéa de l'article 13, susmentionné, de la loi du 4
août 1981 ; qu'il s'ensuit que le requérant n'est, en tout
état de cause, pas fondé à demander que lui soit reconnu
le bénéfice de l'amnistie ;
Sur la régularité de la décision de sanction
: Cons., d'une part, que l'autorité de la chose jugée par les
décisions du juge pénal s'attache aux constatations de fait
contenues dans son jugement ; que, toutefois, si la chambre nationale de
discipline des commissaires aux comptes, pour prononcer la sanction
disciplinaire contestée, a pris en compte l'existence d'une infraction
aux lois dont la réalité matérielle a été
reconnue par le juge pénal, elle n'a cependant pas fondé sa
décision sur la qualification juridique donnée à
l'infraction par ce juge, ni sur les conséquences que celui-ci en a
tiré quant au montant de la peine prononcée ; qu'en
conséquence, le requérant n'est pas fondé à
soutenir que la chambre nationale de discipline s'est crue liée par le
jugement intervenu en matière pénale ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
447
Cons., d'autre part, que, si le décret du 12 août
1969 prévoit la possibilité de poursuites disciplinaires à
l'encontre des commissaires aux comptes, « personne physique ou
société «, ni la loi du 24 juillet 1966, ni le décret
susmentionné ne subordonnent les poursuites disciplinaires à
l'encontre d'un commissaire aux comptes membre d'une société,
quelle que soit la forme de celle-ci, à l'exercice de poursuites contre
la société de commissaires aux comptes elle-même ; que,
dès lors, contrairement à ce que soutient M. X..., l'existence
d'une responsabilité, en matière disciplinaire, des
sociétés de commissaires aux comptes n'exclut, en aucun cas, la
responsabilité personnelle des membres de la société,
eux-mêmes inscrits en tant que personnes physiques sur la liste des
commissaires aux comptes ; que, par suite, ce moyen de la requête doit
être écarté ;
rejet .N
1 Rappr. Commissaire du gouvernement près le conseil
supérieur de l'ordre des experts comptables c/ Fortin, 17 nov. 1961, T.,
p. 935.
Abstrats : 07-01-01-03,RJ1 AMNISTIE, GRACE ET
REHABILITATION - AMNISTIE - BENEFICE DE L'AMNISTIE - FAITS CONTRAIRES A LA
PROBITE, AUX BONNES MOEURS, A L'HONNEUR -Commissaires aux comptes - Omission de
signaler des faits délictueux [1].
55-04-02 PROFESSIONS - CHARGES ET OFFICES - DISCIPLINE
PROFESSIONNELLE - SANCTIONS -Possibilité de rechercher la
responsabilité personnelle d'un membre d'une société de
commissaires aux comptes.
Résumé : 07-01-01-03
Présente le caractère d'un manquement à la probité
ou à l'honneur le fait pour un commissaire aux comptes d'avoir omis, en
méconnaissance de l'article 457 de la loi du 24 juillet 1966, de
signaler au Procureur de la République les faits délictueux dont
il a eu connaissance lors de contrôles exercés sur une
société [1].
55-04-02 Si le décret du 12 août 1969 prévoit
la possibilité de poursuites disciplinaires à l'encontre des
commissaires aux comptes, «personne physique ou
société», ni la loi du 24 juillet 1966, ni le décret
susmentionné ne subordonnent les poursuites disciplinaires à
l'encontre d'un commissaire aux comptes membre d'une société,
quelle que soit la forme de celle-ci, à l'exercice de poursuites contre
la société de commissaires aux comptes elle-même.
Dès lors, l'existence d'une responsabilité, en matière
disciplinaire, des sociétés de commissaires aux comptes n'exclut,
en aucun cas, la responsabilité personnelle des membres de la
société, eux-mêmes inscrits en tant que personnes physiques
sur la liste des commissaires aux comptes.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
448
1. RAPPR. Commissaire du gouvernement près le conseil
supérieur de l'ordre des experts comptables c/ Fortin, 1961-11-17, T.,
p. 935
449
La responsabilité du commissaire aux
comptes
La responsabilité du commissaire aux
comptes
450
Annexe 33
DECISION DU CONSEIL D'ETAT FRANÇAIS 2 Novembre 2005
COMMISSAIRE AUX COMPTES : RESPONSABILITE DISCIPLINAIRE
Conseil d'État
N° 268102
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
6ème et 1ère sous-sections
réunies
Mme Hagelsteen, président
M. Olivier Henrard, rapporteur
M. Guyomar, commissaire du gouvernement
SCP VINCENT, OHL ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, avocat(s)
lecture du mercredi 2 novembre 2005
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°), sous le n° 268102, la requête,
enregistrée le 28 mai 2004, présentée pour M. Claude A,
expert-comptable et commissaire aux comptes, demeurant ... ; M. A demande au
Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 18 mars 2004 par
laquelle le Haut Conseil du commissariat aux comptes a rejeté sa
requête tendant à l'annulation de la décision
La responsabilité du commissaire aux
comptes
451
du 3 juin 2003 de la chambre de discipline des commissaires aux
comptes du ressort de la cour d'appel de Paris lui infligeant une
réprimande ;
2°) de régler l'affaire au fond en application de
l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000
euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°), sous le n° 268347, la requête,
enregistrée le 4 juin 2004 au secrétariat du contentieux du
Conseil d'Etat, présentée pour le président de la
COMPAGNIE REGIONALE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DE PARIS ; il demande au
Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 18 mars 2004 par
laquelle le Haut Conseil du commissariat aux comptes a rejeté sa
requête tendant à l'annulation de la décision du 3 juin
2003 de la chambre de discipline des commissaires aux comptes du ressort de la
cour d'appel de Paris infligeant à M. A une réprimande ;
2°) de régler l'affaire au fond en application de
l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000
euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code de justice administrative ;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
452
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Henrard, Auditeur,
- les observations de la SCP Vincent, Ohl, avocat de M. A et de
la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle avocat de la COMPAGNIE REGIONALE DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES DE PARIS,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du
gouvernement ;
Considérant que M. A, commissaire aux comptes, d'une part,
le président de la COMPAGNIE REGIONALE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DE
PARIS, d'autre part, demandent l'annulation de la décision du 18 mars
2004 par laquelle le Haut Conseil du commissariat aux comptes a, sur les appels
qu'ils ont dirigés contre la décision de la chambre de discipline
des commissaires aux comptes du ressort de la cour d'appel de Paris, du 3 juin
2003, prononçant à l'encontre de M. A une réprimande,
confirmé cette sanction ; qu'il y a lieu de joindre ces deux
requêtes pour y statuer par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des
requêtes ;
Considérant qu'en estimant, après avoir
relevé que M. A, agissant tant en son nom personnel que comme porte-fort
de l'ensemble des associés de la société LGI,
s'était engagé à céder l'intégralité
du capital de cette société et avait participé aux
différents actes relatifs à cette cession tant lors de la
signature du protocole d'accord qu'en négociant et en concluant avec
l'acquéreur la garantie d'actif et de passif et en poursuivant
l'exécution de cet accord par l'envoi de lettres de mise en demeure
d'avoir à acquitter le prix de la cession, qu'il avait exercé
ainsi une activité de nature commerciale, en méconnaissance de
l'incompatibilité à laquelle il était soumis en
application des dispositions du 3° de l'article L. 255-222 du code de
commerce dans sa rédaction alors applicable, le Haut Conseil du
commissariat aux comptes n'a pas entaché sa décision d'erreur de
droit ; que, toutefois, il ressort des pièces soumises aux juges du fond
que cet agissement de M. A survenu à l'occasion d'une opération
relative à son patrimoine privé et qui est resté
isolé, n'a pas comporté d'autre irrégularité que la
méconnaissance de cette incompatibilité ; qu'en regardant ces
faits, commis en 1999, comme de nature à entraîner dans l'esprit
du public une « confusion et une interrogation sur le rôle des
commissaires aux comptes » et comme étant contraires à
l'honneur et à la probité et, donc, insusceptibles d'entrer dans
le champ de l'amnistie, le Haut Conseil ne leur a pas donné une exacte
qualification
La responsabilité du commissaire aux
comptes
453
juridique ; que, dès lors, les requérants sont
fondés à demander l'annulation de sa décision ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 821-2 du code de
justice administrative, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une
juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'Etat peut
« régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne
administration de la justice le justifie » ; qu'en l'espèce, il y a
lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui
précède que les faits litigieux sont amnistiés ; qu'il n'y
a plus lieu d'y statuer ni de renvoyer l'affaire au Haut Conseil du
commissariat aux comptes ;
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de
l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative et de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 3 000
euros au bénéfice respectivement de M. A et du président
de la COMPAGNIE REGIONALE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DE PARIS ;
D E C I D E :
Article 1er : La décision du 18 mars 2004 par laquelle le
Haut Conseil du commissariat aux comptes a infligé à M. A la
sanction de la réprimande est annulée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les appels
formés par M. A et le président de la COMPAGNIE REGIONALE DES
COMMISSAIRES AUX COMPTES DE PARIS.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer
respectivement à M. A et au président de la COMPAGNIE REGIONALE
DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DE PARIS les sommes de 3 000 euros chacun au titre
de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera
notifiée à M. Claude A, au président de la COMPAGNIE
REGIONALE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES DE PARIS, au Haut Conseil du
commissariat aux comptes et au garde des sceaux, ministre de la justice.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
454
Abstrats : 55-04-02-04-02 PROFESSIONS, CHARGES
ET OFFICES. DISCIPLINE PROFESSIONNELLE. SANCTIONS. AMNISTIE. FAITS NON
CONTRAIRES À LA PROBITÉ, AUX BONNES MURS OU À L'HONNEUR. -
COMMISSAIRES AUX COMPTES - EXERCICE PAR UN COMMISSAIRE AUX COMPTES D'UNE
ACTIVITÉ COMMERCIALE DEMEURANT ISOLÉE ET RELATIVE À SON
PATRIMOINE PRIVÉ.
55-05-01-03 PROFESSIONS, CHARGES ET OFFICES. RÈGLES DE
PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES DEVANT LE CONSEIL D'ETAT.
POUVOIRS DU JUGE. CONSEIL D'ÉTAT JUGE DE CASSATION. - DÉCISIONS
PRISES PAR LE HAUT CONSEIL DU COMMISSARIAT AUX COMPTES.
Résumé : 55-04-02-04-02 L'exercice
par un commissaire aux comptes d'une activité commerciale en
méconnaissance des dispositions du 3° de l'article L. 255-222 du
code de commerce est susceptible de justifier une sanction disciplinaire
prononcée en dernier ressort par le haut conseil du commissariat aux
comptes. Si un tel agissement survient à l'occasion d'une
opération relative aux patrimoine privé du commissaire aux
comptes et demeure isolé, il ne peut en revanche être
regardé comme contraire aux à l'honneur et à la
probité. Un tel agissement peut donc être amnistié.
55-05-01-03 Le Conseil d'Etat statue comme juge de cassation sur
les sanctions prononcées par le haut conseil du commissariat aux
comptes.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
455
Annexe 34
DECISION DU CONSEIL D'ETAT FRANÇAIS 12 Octobre 2009
COMMISSAIRE AUX COMPTES : RESPONSABILITE DISCIPLINAIRE
Conseil d'État
N° 311641
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Stirn, président
M. Richard Senghor, rapporteur
M. Guyomar Mattias, rapporteur public
SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, avocat(s)
lecture du lundi 12 octobre 2009
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire
complémentaire, enregistrés les 18 décembre 2007 et 10
mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat,
présentés pour M. Patrick-Hubert A, domicilié ... ; M. A
demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 11 octobre 2007 par
laquelle le Haut Conseil du commissariat aux comptes a infirmé la
décision du 22 mars 2006 de la chambre régionale de discipline
des commissaires aux comptes du ressort de la cour d'appel
La responsabilité du commissaire aux
comptes
456
de Paris et a prononcé à son encontre une sanction
disciplinaire d'interdiction temporaire d'exercice de la profession pour une
durée de cinq ans, avec sursis ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de
la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice
administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de commerce, notamment ses articles L. 822-1 à
L. 823-20 ;
Vu le décret n° 69-810 du 12 août 1969 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Richard Senghor, Maître des
Requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner,
avocat de M. A,
- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée
à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. A ;
Sur la régularité de la décision
attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article 6-1 de la
convention européenne de
La responsabilité du commissaire aux
comptes
457
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
(...) publiquement (...) par un tribunal indépendant et impartial
établi par la loi, qui décidera (...) des contestations sur ses
droits et obligations de caractère civil (...) ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 822-7 du code de
commerce, les décisions de la chambre régionale de discipline des
commissaires aux comptes peuvent être frappées d'appel devant le
Haut Conseil du commissariat aux comptes ; que l'article L. 822-8 de ce code
prévoit que ces juridictions peuvent infliger aux
intéressés les sanctions disciplinaires de l'avertissement, du
blâme, de l'interdiction temporaire pour une durée
n'excédant pas cinq ans et de la radiation de la liste ; qu'ainsi, les
décisions du Haut Conseil du commissariat aux comptes sont susceptibles
de porter atteinte au droit d'exercer la profession de commissaire aux comptes,
lequel revêt le caractère d'un droit de caractère civil au
sens des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il
suit de là que ces stipulations sont applicables aux procédures
disciplinaires diligentées à l'encontre des commissaires aux
comptes ;
En ce qui concerne la méconnaissance
alléguée d'une obligation de lecture publique
:
Considérant qu'en l'absence de texte imposant la lecture
publique d'une décision juridictionnelle, l'exigence de publicité
qui découle de l'article 6-1 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peut
être satisfaite, soit par l'initiative d'une telle lecture, soit par tout
autre moyen approprié assurant l'accès au texte de la
décision, en particulier par sa consultation au greffe de la juridiction
qui l'a prononcée ;
Considérant que si les dispositions réglementaires
organisant la procédure disciplinaire devant le Haut Conseil du
commissariat aux comptes ne prévoient pas la lecture publique des
décisions qu'il rend, il ressort toutefois de ses visas que la
décision contestée fait expressément mention de ce que le
Haut Conseil du commissariat aux comptes a statué publiquement lors de
sa séance du 11 octobre 2007, après avoir
délibéré à l'issue de la séance du 14 juin
2007 au cours de laquelle a été examinée la requête
d'appel formée par M. A à l'encontre de la décision du 22
mai 2006 prise par la chambre régionale de discipline des commissaires
aux comptes du ressort de la cour d'appel de Paris ; que cette mention, qui
fait foi jusqu'à preuve contraire, n'est contredite par aucune
pièce du dossier ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que
cette décision serait irrégulière faute d'avoir
été lue en séance publique doit être
écarté ;
En ce qui concerne le respect du principe d'impartialité
:
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-3 du code de
commerce : Le Haut
La responsabilité du commissaire aux
comptes
458
Conseil du commissariat aux comptes comprend : (...) 4°
Trois commissaires aux comptes, dont deux ayant une expérience du
contrôle des comptes des personnes faisant appel public à
l'épargne ou à la générosité publique. / Les
décisions sont prises à la majorité des voix. En cas de
partage égal des voix, la voix du président est
prépondérante. / Le président et les membres du Haut
Conseil du commissariat aux comptes sont nommés par décret pour
six ans renouvelables. Le Haut Conseil du commissariat aux comptes est
renouvelé par moitié tous les trois ans. ; que ces dispositions
sont notamment applicables aux décisions que le Haut Conseil prend en
matière disciplinaire ;
Considérant que M. A soutient que le principe
d'impartialité rappelé par les stipulations de l'article 6-1 de
la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales a été méconnu dès
lors que l'un des trois commissaires aux comptes qui, en application des
dispositions précitées, a siégé dans la formation
de jugement, en premier lieu, était membre de la même compagnie
régionale des commissaires aux comptes que lui, en deuxième lieu,
appartenait à un cabinet dont l'activité était beaucoup
plus réduite que celui dont il relève et, en troisième
lieu, que ce cabinet était impliqué dans un litige professionnel
avec le cabinet KPMG dont il est lui-même associé ;
Considérant qu'un moyen relatif à
l'irrégularité de la composition d'une formation de jugement,
quel qu'en soit le fondement, peut être invoqué à toute
étape de la procédure, y compris devant le juge de cassation ;
Considérant qu'aucune des deux premières
circonstances alléguées ne sauraient caractériser en
elles-mêmes une violation du principe d'impartialité ; qu'il ne
ressort pas par ailleurs des pièces du dossier soumis au Conseil d'Etat
que le commissaire aux comptes dont la participation à la
délibération attaquée est contestée aurait
été susceptible d'être influencé par un
intérêt personnel, du fait du litige opposant les deux cabinets,
dans le contentieux disciplinaire dont le requérant a été
l'objet ;
Considérant que, dès lors, le principe
d'impartialité n'a pas été méconnu ;
Sur le bien-fondé de la décision attaquée
:
Considérant qu'aux termes de l'article L. 225-222 du code
de commerce, applicable à l'époque des faits litigieux : Les
fonctions de commissaire aux comptes sont incompatibles : 1° Avec toute
activité ou tout acte de nature à porter atteinte à son
indépendance ; 2° Avec tout emploi salarié ; toutefois, un
commissaire aux comptes peut dispenser un enseignement se rattachant à
l'exercice de sa profession ou occuper un emploi rémunéré
chez un commissaire aux comptes ou chez un expert-comptable ; 3° Avec
toute activité commerciale, qu'elle soit exercée directement ou
par personne interposée. ; qu'aux termes de l'article 88 du
décret du 12 août 1969 relatif à l'organisation de la
profession et au statut professionnel des commissaires
La responsabilité du commissaire aux
comptes
459
aux comptes, dans sa rédaction en vigueur à
l'époque des faits incriminés : Toute infraction aux lois,
règlements et règles professionnels, toute négligence
grave, tout fait contraire à la probité ou à l'honneur
commis par un commissaire aux comptes, personne physique ou
société, même ne se rattachant pas à l'exercice de
la profession, constituent une faute disciplinaire passible d'une peine
disciplinaire. ;
Considérant que le requérant soutient que le
principe de légalité des délits et des peines s'opposait
à ce que le Haut Conseil du commissariat aux comptes pût infliger
une sanction fondée sur la méconnaissance de ces textes, qui
n'auraient pas défini avec une précision suffisante les
obligations imposées aux commissaires aux comptes ; que, toutefois, pour
ce qui concerne les sanctions susceptibles d'être infligées aux
membres des professions réglementées, y compris celles
revêtant un caractère disciplinaire, le principe de
légalité des délits est satisfait dès lors que les
textes applicables font référence à des obligations
auxquelles les intéressés sont soumis en raison de
l'activité qu'ils exercent, de la profession à laquelle ils
appartiennent ou de l'institution dont ils relèvent ; que, dès
lors, le Haut Conseil du commissariat aux comptes n'a pas entaché sa
décision d'erreur de droit en retenant que la méconnaissance des
dispositions figurant à l'article L. 225-222 du code de commerce et
à l'article 88 du décret du 12 août 1969 pouvait faire
l'objet d'une sanction disciplinaire ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier
soumis aux juges du fond que M. A, commissaire aux comptes, associé du
cabinet d'audit KPMG, est intervenu comme signataire pour la certification des
comptes de la société Rexel, notamment au titre des exercices
clos les 31 décembre 2001 et 31 décembre 2002, alors que,
parallèlement, sous la signature d'un autre commissaire aux comptes
associé du même cabinet, une mission a été
diligentée pendant l'année 2002 auprès de la même
société visant, d'une part, à l'assister dans la
réalisation de ses travaux de consolidation de l'exercice 2001 et,
d'autre part, à superviser ceux-ci ; qu'en observant que, de par sa
nature, sa durée, ses modalités d'exécution et le montant
de sa rémunération, cette intervention permettait de
présumer une situation de perte d'indépendance du cabinet, le
Haut Conseil du commissariat aux comptes a porté sur les faits de
l'espèce une appréciation souveraine exempte de
dénaturation ;
Considérant que, regardant cette situation comme engageant
en elle-même la responsabilité personnelle de M. A, dès
lors que celui-ci avait certifié les comptes de la société
Rexel sans avoir pris les dispositions utiles pour appréhender cette
situation d'incompatibilité ni tirer les conséquences de
celle-ci, le Haut Conseil du commissariat aux comptes n'a pas entaché
son appréciation d'une qualification juridique erronée en
retenant que le requérant avait commis une faute disciplinaire au sens
de l'article 88 du décret du 12 août 1969 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui
précède que M. A n'est pas fondé à demander
l'annulation de la décision attaquée ; que doivent être
rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant
à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
;
La responsabilité du commissaire aux
comptes
460
D E C I D E :
Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera
notifiée à M. Patrick-Hubert A, au Haut Conseil du commissariat
aux comptes et à la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la
justice et des libertés.
Abstrats : 01-04-03-07 ACTES LÉGISLATIFS
ET ADMINISTRATIFS. VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE
DE LA RÈGLE DE DROIT. PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT.
PRINCIPES INTÉRESSANT L'ACTION ADMINISTRATIVE. - PRINCIPE DE
LÉGALITÉ DES DÉLITS - APPLICATION AUX SANCTIONS
INFLIGÉES AUX PROFESSIONS RÉGLEMENTÉES, Y COMPRIS CELLES
REVÊTANT UN CARACTÈRE DISCIPLINAIRE [RJ1] - PORTÉE
[RJ2].
26-055-01-06-02 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS. CONVENTION
EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME. DROITS GARANTIS PAR LA CONVENTION.
DROIT À UN PROCÈS ÉQUITABLE (ART. 6). VIOLATION. - ABSENCE
- DÉFAUT DE LECTURE PUBLIQUE D'UNE DÉCISION JURIDICTIONNELLE
[RJ3].
54-05-02 PROCÉDURE. INCIDENTS. RÉCUSATION. -
REQUÉRANT S'ÉTANT ABSTENU DE DEMANDER LA RÉCUSATION D'UN
MEMBRE DE LA FORMATION DE JUGEMENT - CONSÉQUENCE SUR LA
RECEVABILITÉ D'UN MOYEN RELATIF À L'IRRÉGULARITÉ DE
LA FORMATION DE JUGEMENT - ABSENCE, Y COMPRIS DEVANT LE JUGE DE CASSATION
[RJ6].
54-06-03 PROCÉDURE. JUGEMENTS. COMPOSITION DE LA
JURIDICTION. - IRRÉGULARITÉ - MOYEN RECEVABLE À TOUTE
ÉTAPE DE LA PROCÉDURE, Y COMPRIS EN CASSATION, MÊME SI
L'INTÉRESSÉ N'A PAS USÉ DE LA VOIE DE LA RÉCUSATION
[RJ6].
54-07-01-04-01-02 PROCÉDURE. POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE.
QUESTIONS GÉNÉRALES. MOYENS. MOYENS D'ORDRE PUBLIC À
SOULEVER D'OFFICE. EXISTENCE. - IRRÉGULARITÉ DE LA FORMATION DE
JUGEMENT, QUEL QUE SOIT SON FONDEMENT [RJ5] [RJ6].
54-08-01-03-02 PROCÉDURE. VOIES DE RECOURS. APPEL. MOYENS
RECEVABLES EN APPEL. PRÉSENTENT CE CARACTÈRE. - MOYEN RELATIF
À L'IRRÉGULARITÉ DE LA COMPOSITION DE LA FORMATION DE
JUGEMENT [RJ4] [RJ7].
La responsabilité du commissaire aux
comptes
461
54-08-02-004-03 PROCÉDURE. VOIES DE RECOURS. CASSATION.
RECEVABILITÉ. RECEVABILITÉ DES MOYENS. - MOYEN RELATIF À
L'IRRÉGULARITÉ DE LA COMPOSITION DE LA FORMATION DE JUGEMENT
[RJ6].
Résumé : 01-04-03-07 Le principe
de légalité des délits s'applique aux sanctions
susceptibles d'être infligées aux membres des professions
réglementées, y compris celles revêtant un caractère
disciplinaire. Il est satisfait dès lors que les textes applicables font
référence à des obligations auxquelles les
intéressés sont soumis en raison de l'activité qu'ils
exercent, de la profession à laquelle ils appartiennent ou de
l'institution dont ils relèvent.
26-055-01-06-02 En l'absence de texte imposant la lecture
publique d'une décision juridictionnelle, l'exigence de publicité
qui découle de l'article 6 paragraphe 1 de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales peut être satisfaite, soit par l'initiative d'une telle
lecture, soit par tout autre moyen approprié assurant l'accès au
texte de la décision, en particulier par sa consultation au greffe de la
juridiction qui l'a prononcée.
54-05-02 Un moyen relatif à l'irrégularité
de la composition d'une formation de jugement peut, quel qu'en soit le
fondement, être invoqué à toute étape de la
procédure, y compris devant le juge de cassation. La circonstance que
l'intéressé s'est abstenu de demander la récusation d'un
membre de la formation de jugement ayant rendu la décision
attaquée est sans incidence sur la recevabilité du moyen.
54-06-03 Un moyen relatif à l'irrégularité
de la composition d'une formation de jugement peut, quel qu'en soit le
fondement, être invoqué à toute étape de la
procédure, y compris devant le juge de cassation. La circonstance que
l'intéressé s'est abstenu de demander la récusation d'un
membre de la formation de jugement ayant rendu la décision
attaquée est sans incidence sur la recevabilité du moyen.
54-07-01-04-01-02 Un moyen relatif à
l'irrégularité de la composition d'une formation de jugement
peut, quel qu'en soit le fondement, être invoqué à toute
étape de la procédure, y compris devant le juge de cassation. La
circonstance que l'intéressé s'est abstenu de demander la
récusation d'un membre de la formation de jugement de la décision
attaquée est sans incidence sur la recevabilité du moyen.
54-08-01-03-02 Un moyen relatif à
l'irrégularité de la composition d'une formation de jugement
peut, quel qu'en soit le fondement, être invoqué à toute
étape de la procédure. La circonstance que
l'intéressé s'est abstenu de demander la récusation d'un
membre de la formation de jugement ayant rendu la décision
attaquée est sans incidence sur la recevabilité du moyen.
54-08-02-004-03 Un moyen relatif à
l'irrégularité de la composition d'une formation de jugement
peut, quel qu'en soit le fondement, être invoqué en cassation,
même pour la première fois. La circonstance que
l'intéressé s'est abstenu de demander la récusation d'un
membre de la formation de jugement ayant rendu la décision
attaquée est sans incidence sur la recevabilité du moyen.
462
[RJ1] Ab. jur., sur l'absence d'application du principe de
légalité des délits et des peines en matière de
sanctions professionnelles disciplinaires, 30 mars 2005, Voydeville, n°
254244 et décision du même jour, Vaini-Elies, n° 255130,
inédites au Recueil. Cf. Cons. const., 17 janvier 1989, n° 88-248
DC ; 9 octobre 1996, Société Prigest, n° 170363, p.
692.,,[RJ2] Rappr. Assemblée, 7 juillet 2004, Ministre de
l'intérieur, de la sécurité intérieure et des
libertés locales c/ Benkerrou, n° 255136, p. 297.,,[RJ3] Ab. jur.,
sur ce point, 29 novembre 1999, Société Rivoli Exchange, n°
194721, p. 366.,,[RJ4] Ab. jur., sur la recevabilité du moyen en appel,
Section, 23 février 1968, Perdereau, n° 65466, p. 136.,,[RJ5] Cf.,
sur le caractère d'ordre public du moyen tiré de
l'irrégularité de la formation de jugement, 19 mai 1961,
Gianotti, n° 40930, p. 346 ; 30 novembre 1994, SARL Etude Ravalement
Constructions, n° 126600, p. 1125.,,[RJ6] Ab. jur., s'agissant de
l'irrecevabilité opposée en cas de non-usage de la voie de
récusation, 9 janvier 1952, Sieur Sanisart, n° 83522, p. 21 ; sur
ce point, en matière d'impartialité subjective, Section, 5
juillet 2000, Mme Rochard, n° 189523, p. 928.,,[RJ7] Ab. jur., s'agissant
de l'irrecevabilité opposée en cas de non-usage de la voie de
récusation, 9 janvier 1952, Sieur Sanisart, n° 83522, p. 21.
La responsabilité du commissaire aux
comptes
TABLE DES MATIERES
· INTRODUCTION GENERALE 2
· PREMIERE PARTIE LA RESPONSABILITE CIVILE DU COMMISSAIRE
AUX
COMPTES 21
· CHAPITRE I : NATURE ET BASE JURIDIQUE DE LA
RESPONSABILITE CIVILE DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES 24
· Section I : La nature de la responsabilité civile
du commissaire aux comptes : 24
· §I : La qualification de la responsabilité :
le concours des responsabilités 25
· A) La Thèse contractuelle : 25
· B) La thèse délictuelle : 29
· § II : Les particularités de la
responsabilité civile des commissaires aux comptes 31
La responsabilité du commissaire aux
comptes
463
·
|
A) Une responsabilité à caractère
hybride :
31
|
|
·
|
B) Une responsabilité à caractère
professionnel :
33
|
|
|
·
|
Section II : Le fondement de la responsabilité
civile du commissaire aux comptes ....
|
37
|
·
|
§ I : Le fondement spécial :
39
|
|
·
|
§ II : Les fondements de droit commun
43
|
|
· CHAPITRE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA
RESPONSABILITE CIVILE DU COMMISSAIRE
AUX COMPTES : 47
·
·
|
Section I : Les conditions d'existence de la
responsabilité :
§ I : La faute
47
48
|
|
·
|
A)
|
Les caractères de la faute :
|
48
|
·
|
B)
|
La nature de la faute
49
|
|
·
|
C)
|
Preuve et appréciation de la faute :
|
52
|
|
·
|
§ II : Le dommage
53
|
|
·
|
A)
|
La diversité des dommages :
54
|
|
·
|
a.
|
Le dommage matériel :
54
|
|
·
|
b.
|
Les qualités du préjudice
réparable
55
|
|
|
·
|
§ III : Le lien de causalité :
56
|
|
·
|
A)
|
Établissement du lien de causalité
:
57
|
|
·
|
a.
|
Défaut du lien de causalité
58
|
|
·
|
b.
|
Les causes d'exonération
58
|
|
·
|
c.
|
L'absence de faute :
59
|
|
·
|
d.
|
La faute du tiers :
|
59
|
·
|
e.
|
La faute de la victime :
60
|
|
|
·
|
Section II : Les effets de la responsabilité
civile :
61
|
|
·
|
§ I : l'exercice de l'action :
62
|
|
·
|
A)
|
Les parties à l'action :
62
|
|
·
|
a.
|
Les défendeurs :
65
|
|
·
|
b.
|
La compétence :
67
|
|
|
La responsabilité du commissaire aux
comptes
464
· § II : l'extinction de l'action :
68
· A) La prescription : 68
· a) Le quitus 70
· Conclusion de la première partie :
72
· DEUXIEME PARTIE LA RESPONSABILITE PENALE DU
COMMISSAIRE
AUX COMPTES Erreur ! Signet non
défini.
· CHAPITRE I : LA RESPONSABILITE PENALE DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES A TITRE
D'AUTEUR PRINCIPAL : Erreur ! Signet non
défini.
·
·
|
Section I : Infractions relatives à la mission du
commissaire aux comptes : Erreur !
Signet non défini.
§ I : Délit de confirmation d'information
mensongère : Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
A)
|
L'élément légal :
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
B)
|
L'élément matériel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
a)
|
L'information mensongère :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
b)
|
La donation et la confirmation des informations
mensongères : Erreur ! Signet
|
|
non défini.
· c) L'élément moral :
· § II : Le défaut de
révélation des faits délictueux
|
Erreur ! Signet non défini. Erreur ! Signet non
défini.
|
·
|
A)
|
L'élément légal :
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
B)
|
L'élément matériel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
a)
|
Le fait délictueux :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
b)
|
L'omission de révélation :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
B) L'élément moral :
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
§ III : La violation du secret professionnel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
A)
|
L'élément légal :
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
B)
|
L'élément matériel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
a)
|
Le secret professionnel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
b)
|
La révélation du secret professionnel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
C)
|
L'élément moral :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
La responsabilité du commissaire aux
comptes
465
· Section II : Infractions relatives au statut du
commissaire aux comptes :Erreur ! Signet non défini.
·
|
§ I : L'atteinte à l'indépendance du
commissaire aux comptes : Erreur ! Signet
non défini.
|
·
|
A)
|
Les catégories d'incompatibilités :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
a)
|
Situations inter-sociétaires et juridiques
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
b)
|
Situations personnelles :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
c)
|
Situations financières :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
B)
|
Délit de violation des incompatibilités
légales :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
a)
|
L'élément légal :
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
b)
|
L'élément moral :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
· § II : L'exercice illégal de la profession de
commissaire aux comptes : ... Erreur ! Signet non
défini.
·
|
A)
|
L'élément légal :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
B)
|
L'élément matériel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
C)
|
L'élément moral :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
· CHAPITRE II : LA RESPONSABILITE PENALE DU COMMISSAIRE AUX
COMPTES A TITRE
DE COMPLICE : Erreur ! Signet non
défini.
· Section I : les principes du droit commun de la
complicité : .Erreur ! Signet non défini.
·
|
§ I : La notion de complicité :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
§ II : Les éléments constitutifs :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
A) L'élément légal
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
B) L'élément matériel
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
C) L'élément moral
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
· Section II : L'application de la complicité au
commissaire aux comptes Erreur ! Signet non défini.
·
|
§ I : L'élément légal :
Erreur ! Signet non défini.
|
|
·
|
§II : L'élément matériel :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
·
|
§ III : L'élément moral :
|
Erreur ! Signet non défini.
|
|
466
· CHAPITRE III : LA RESPONSABILITE DISCIPLINAIRE DU
COMMISSAIRE AUX COMPTES
Erreur ! Signet non défini.
· Section I : Les particularités de la
responsabilité disciplinaire du commissaire aux
comptes Erreur ! Signet non défini.
· § I : La responsabilité disciplinaire
comparée à la responsabilité civile .. Erreur !
Signet non défini.
· § II : La responsabilité disciplinaire
comparée à la responsabilité pénaleErreur !
Signet non défini.
· Section II : Les conditions de la responsabilité
disciplinaire : Erreur ! Signet non défini.
· § I : La faute disciplinaire : Erreur !
Signet non défini.
·
|
A) Les fautes relatives à la violation des règles
professionnelles
non défini.
|
Erreur ! Signet
|
·
|
REFERENCES BIBLIOGRAPHIES
|
132
|
·
|
TABLE DES MATIERES
|
148
|
La responsabilité du commissaire aux
comptes
|