Conclusion
Dans ce travail, qui a caractérisé la dynamique
actuelle de l'érosion hydrique dans les bassins versants de Kingouari,
Mfilou et Djoué, les pertes en terre ont été
estimées en mettant l'accent sur les facteurs qui amplifient le
phénomène.
L'érosion hydrique au quartier 16A de Brazzaville est
due à la forte pluviosité caractérisée par les
intensités et la fréquence des pluies qui s'abattent sur la
ville. La dégradation de ce site par le phénomène
d'érosion hydrique qui est devenu spectaculaire ces dernières
décennies, plonge les populations dans une désolation totale.
L'amplification du phénomène sur ce site résulte de
l'action conjuguée des facteurs naturels et anthropiques aggravants
ci-après :
- les sols sableux très fragiles dont les constituants
sont facilement détachés par l'action des gouttes de pluie et du
ruissellement des eaux ;
- le relief est un plateau découpé de vallons
qui une fois loti, sans que des aménagements ne soient
préalablement réalisés, réunit les conditions pour
que le phénomène démarre ;
- l'occupation anarchique des terrains par les populations
;
- la destruction du couvert végétal par la
pression humaine ;
- l'imperméabilisation des surfaces du sol par la
construction d'habitations sans pourtant qu'un réseau
d'évacuation des eaux de pluies (caniveaux et égouts) ne soit
avant tout construit.
C'est ainsi que s'est réalisée la
dégradation rapide du site au cours de ces dernières
années. Les ravinements ont démarré dans les parties
pentues des voiries lorsqu' en amont les eaux sont collectées sur des
longues distances. Ces érosions ravinantes commencent
généralement sur les versants où elles évoluent en
direction du plateau par érosion régressive. En 6 mois de
mesures, sur les 12 voiries, 187,5 t/ha ont été
décapées. Le site est aujourd'hui raviné sur une distance
linéaire de 2,5 km ayant occasionné 443442 t de terre perdue. Les
ablations superficielles qui sont observées quelque soit la pente des
voiries provoquent des déchaussements des fondations et des arbres dans
le quartier. Les ablations profondes ou ravinements se manifestent en zone
où les pentes sont fortes. Sur les voiries, les particules du sol sont
détachées par l'impact des gouttes de pluies puis
déplacées par le ruissellement des eaux qui devient abrasif quand
les eaux sont collectées sur des grandes distances et/ou sur terrain
pentu. Quatre ravins ; Massengo, Intali, Balimalou et Ndouna Paul sur les vingt
deux que compte le quartier évoluent à un rythme effrayant
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et spectaculaire. Les glissements de leurs parois sont
fréquents lors des forts abats. Dans le reste des cas, quand les ravins
ne sont pas biens stabilisés (sauf dans le cas où ils sont
recouverts de gabions), d'une période à une autre, il y a parfois
reprise de l'érosion de la tête du ravin et/ou des parois.
Les dégâts et les préjudices causés
par le phénomène dépassent les possibilités des
populations au pouvoir d'achat dérisoire. Celles-ci essaient toujours
d'y faire face dans la mesure de leurs possibilités. Quelques rares
actions sont menées de façon collective, mais elles sont beaucoup
plus individuelles : lutter par la plantation des végétaux, le
remblaiement des têtes de ravins par les déchets solides
(épaves de voitures et ordures ménagères), l'usage des
sacs de terre et des pneus-sol, la construction des murets et diguettes (micro
barrages), des murs et des digues... Les ONG et les autorités
municipales s'y impliquent aussi pour des travaux de grande envergure.
Ces différentes techniques freinent le
phénomène sans arrêter son évolution. Seul le
gabionnage a permis d'arrêter réellement l'évolution de
trois ravins. Les gouvernants ont la lourde responsabilité de
s'impliquer activement pour sauver les habitations menacées et
protéger les zones encore non affectées.
Il est important de signaler que si les services d'urbanisme
aménageaient les terrains avant leur occupation par la population, il
n'y aurait pas les différents dégâts enregistrés et
de risque de déclenchement du phénomène. Tant que les
surfaces imperméables continueront à augmenter et que les
décideurs ne prendront pas de bonnes mesures, les moyens de lutte
entrepris par les populations se révéleront toujours inefficaces
et la situation déjà grave deviendra catastrophique.
Pour sauver les parcelles menacées et protéger
le reste du site, il faut que la responsabilité soit partagée
entre les populations responsables en partie et victimes du
phénomène, les autorités municipales et les ONG.
La population doit :
- prendre conscience de l'état de dégradation du
site et se mobiliser pour des solutions durables ;
- Veiller à la protection des aménagements
déjà réalisés ;
- Continuer à y faire face dans la mesure du possible.
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Les autorités municipales doivent :
- aménager un réseau d'évacuation des eaux
de ruissellement dans les voiries ;
- gabionner ou remblayer les différents ravinements ;
- former un personnel pour la vulgarisation des méthodes
de protection
environnementale.
Les organisations non gouvernementales (ONG) doivent s'impliquer
davantage dans la recherche
des solutions satisfaisantes pour un développement
durable.
Pour lutter contre l'érosion, il faut éviter
l'imperméabilisation des sols et aménager dans le quartier un
réseau d'évacuation des eaux de ruissellement que l'on doit
entretenir. Il s'agit d'abord de viabiliser les terrains avant que les
populations y habitent (bâtir des stratégies
préventives).
Vu la gravité du phénomène et les
attentes des populations de Kingouari, les décideurs doivent financer la
stabilisation des ravins encore actifs et bien d'autres pouvant de nouveau
évoluer (traitement curatif par le gabionnage par exemple) et construire
des collecteurs (systèmes de caniveaux et d'égouts) pour une
bonne gestion des eaux de ruissellement afin de prévenir la
dégradation du reste de la superficie encore non affecté
profondément.
Il serait souhaitable que cette étude soit poursuivie
pour évaluer les pertes durant toute une saison. D'autres études
devraient encore se réaliser dans ce site afin d'établir d'une
part la relation entre le degré d'imperméabilisation des surfaces
et le ruissellement généré par les voiries, d'autre par
sur les aspects socio-économiques et environnementaux liés au
phénomène. Ceci, afin de mieux comprendre cette rupture
morphodynamique et adopter des solutions efficaces pour un développement
durable.
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