I.2. Analyse de l'occupation et de la gestion de la
voie publique dans les deux communes
L'occupation et la gestion de la voie publique met en
relation plusieurs types d'acteurs : les responsables de la
municipalité, les occupants, les usagers de la voie (piétons et
personnes utilisant d'autres moyens de déplacement) ainsi que la
population riveraine. Tous ces acteurs concourent à l'harmonie de la
voie publique. Les acteurs des municipalités assurent le respect des
normes établies sur la voie et qui entre dans leur compétence.
Les occupants, quant à eux, sont intéressés par la voie en
tant que support pour les activités économiques. Il existe donc
différents usages de la voie mais aussi des perceptions par rapport
à chaque acteur.
I.2.1. La gestion de la voie publique dans les deux
communes : une même modalité pour des enjeux différents
La gestion des espaces publics en général et de
la voie publique en particulier est conférée à la commune
conformément aux textes. Il s'agit de réglementer ses
occupations, assurer la circulation des biens et personnes, sa propreté,
son éclairage et sa sécurité ; etc. Ainsi, les communes de
Ouakam et de Mermoz se sont dotées d'outils leur permettant d'assurer
convenablement leur tâche à l'instar la mise en place d'une
procédure pour les autorisations d'occupation de la voie publique.
Les procédures sont les mêmes dans les deux
communes. Le dossier est composé d'une lettre adressée au Maire
et une copie de la carte d'identité. Le Maire impute le dossier aux
services techniques qui l'étudieront et puis feront une descente sur le
terrain pour : voir la disposition du sol, vérifier sa
faisabilité par rapport à la circulation, si la place fait objet
d'une occupation ou destinée à un projet ; ou encore consulter
les associations et autres organisations communautaires de la commune pour
vérifier si elles ont prévu des réalisations sur les
lieux.
Après cette étape, le service technique donne
son avis et renvoie le dossier auprès du Maire qui accordera ou non
l'autorisation d'occupation. La procédure est la même pour tous
les types d'occupation. Le temps de l'instruction varie selon les demandes mais
aussi du Maire qui peut signer ou non l'autorisation au moment voulu.
L'étude
70
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
au niveau des services techniques peut prendre au plus une
à deux semaines. Comme le montre le graphique ci-dessous, en
générale le dossier a une réponse dans un délai
d'une semaine. Certains cas prennent du temps allant jusqu'à des
semaines voire des mois et cela est dû à l'envergure des
installations ou des travaux à effectuer sur la voie, ou bien l'endroit
en question fait l'objet d'une affectation quelconque pour une tierce personne
ou une association. La commune doit d'abord s'assurer qu'il n'existe aucun
conflit d'intérêt avant de procéder à une
autorisation.
Figure I.11 : Durée de
l'instruction pour un permis d'occuper
Plus d'un mois Un mois Deux semaines Une semaine
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50%
Delai d'instruction
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Cependant, l'instruction ne se base pas sur des normes
déjà établies (comme dans le cas de la procédure
d'autorisation de construire). Les critères utilisés sont
l'encombrement, la nature domaniale du sol et l'existence d'un litige ou non
mais ce qui détermine dans ce contexte reste en général un
jugement subjectif et des négociations avec les différents
acteurs concernés. Une situation qui pourrait expliquer pourquoi ces
occupations constituent une contrainte pour les habitants et les
piétons.
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.12 : L'instruction de
l'autorisation pour occupation de la voie publique
![](Problematiques-de-l-occupation-et-de-la-gestion-de-l-espace-public-dans-les-communes-de-Ouakam-et-d25.png)
![](Problematiques-de-l-occupation-et-de-la-gestion-de-l-espace-public-dans-les-communes-de-Ouakam-et-d26.png)
Dépot au secrétariat du Maire
Renvoie du dossier au Maire après avis
des services technique
Imputation à la direction des services techniques
Arrivée du dossier chez le chef de division
chargé des
OVP
![](Problematiques-de-l-occupation-et-de-la-gestion-de-l-espace-public-dans-les-communes-de-Ouakam-et-d27.png)
Descente sur le terrain pour l'étude des lieux
![](Problematiques-de-l-occupation-et-de-la-gestion-de-l-espace-public-dans-les-communes-de-Ouakam-et-d28.png)
71
Source : enquête
mémoire / Moussa Dicker 2016
L'autorisation est précaire et révocable
conformément au Code du domaine l'État. Les redevances sont
fixées soit par jour soit par mois le m2, ou encore par
rapport à la nature de l'occupation ; par le conseil municipal et
approuvé par le représentant de l'État (le
sous-préfet). Les prix ne sont pas les mêmes dans les deux
communes.
Tableau 6 : Redevances
d'occupation dans la commune de Mermoz
Type d'occupation
|
Le montant de la redevance en FCFA
|
Cantine inférieur ou égale à 4
m2
|
8
|
000
|
Kiosque à pain
|
4
|
000
|
Kiosque à journaux
|
6
|
000
|
Container 20 pieds
|
25
|
000
|
|
72
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Container 40 pieds
|
50
|
000
|
Kiosque PMU
|
6
|
000
|
Table inférieure à 3
m2
|
4
|
000
|
Table supérieure à 3
m2
|
5
|
000
|
|
Source :
procès-verbal de la commune de Mermoz n° 003/ 2014
Ces redevances sont payables chaque mois. Pour toutes autres
installations autres que celles énumérées ci-dessus, le
prix est de 1 500 F le m2, ainsi que les kiosques
et cantines supérieures à 4 m2. A partir de 500
m2 et pour les parkings de vente de véhicules, la taxe est de
200 000 F.
Par contre la commune d'Ouakam fixe les prix au m2
par jour ou par mois. Les redevances ne sont pas les mêmes que celles de
Mermoz. Les besoins financiers de chacune étant particuliers par rapport
aux charges, les communes fixent les prix en tenant compte de la
disponibilité foncière et des ressources qu'elle peut
générer.
Tableau 7 : Redevances
d'occupation dans la commune de Ouakam
Type d'occupation
|
Montant de la redevance en FCFA
|
Terrasses à café
|
1 000 /m2/mois
|
Ouvriers, mécaniciens, menuisiers
|
600 /m2/mois
|
Balises ou dispositifs de
délimitation
|
700 /m2/mois
|
Décharges
|
200 /jour/mois
|
Cantines, containers, souks, gargotes,
kiosques*
|
1 250 /m2/mois
|
Etalage devant magasin
|
800 /m2/mois
|
Tisserands
|
100 /m2/mois
|
Ateliers et garage
|
500 /m2/mois
|
Tailleurs de pierres
|
100 /jour/m2
|
|
Source :
délibération du conseil de Ouakam n°02/03/14
*A l'exception de ces kiosques :
- Kiosque à pain : 3 000 FCFA /mois
- Kiosque à journaux : 4 000 FCFA /mois
- Autres kiosques : 6 000 FCFA/mois
73
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
L'appréciation des taxes varie selon l'occupant,
chacun payant un montant différent. Comme le montre le diagramme
ci-dessous, plus de la moitié (55%) trouvent que les redevances sont
moyennes. Ceux-ci occupent des superficies qui ne sont pas grandes et leurs
installations ne correspondent pas à ceux qui coutent chères le
m2.
Figure I.13 :
Appréciation de la taxe par les occupants
Moins chèr
Moyen
Tros chèr
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60%
Niveau d'appréciation
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker
Les taxes semblent être moins chères pour les
tabliers, les chariots et toutes autres étales qui paient une somme
infime soit par jour, soit par semaine ou par mois. Les parkings de vente et
les stations de lavage sont les plus taxés et considèrent donc
que ces taxes sont trop chères.
La taxation sur la voie publique varie donc entre les deux
communes. Pour le paiement, il doit être fait au plus tard le 10
de chaque mois ou le 31 mars de chaque année.
Le choix du moment de payer revient aux occupants : payer par année ou
par mois. Les occupations irrégulières sont déguerpies
après une sommation pour libérer la voie publique.
Les recettes générées par les
occupations à la voie publique représentent 4% dans le budget de
la commune de Ouakam de 2016 (soit 52 millions sur 1.3 milliards de FCFA) et de
16 % dans celui de Mermoz Sacré-Coeur, soit 200 millions de FCFA pour
1.2 milliards. Ces montants sont des estimations dans l'élaboration du
budget. Ils peuvent être atteints ou bien dépassés durant
l'exercice de cette année. La différence entre les deux communes
réside d'abord dans le montant des redevances qui sont plus
74
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
élevées au niveau de la commune de Mermoz
Sacré-Coeur (par exemple kiosque à pain 4 000 F à Mermoz
contre 3 000 à Ouakam ; Containers entre 25 000 à 50 000 à
Mermoz et 1 250 à Ouakam).
La commune de Ouakam a certes un marché autour duquel
il peut y avoir de nombreux occupants. Tous ces occupants n'ont pas
évidemment une autorisation et échappe souvent au contrôle
des autorités. Ceux qui n'y échappent pas payent de patente
quotidienne ou hebdomadaire moins chère (150 F à 200 F). Dans la
commune de Mermoz, il existe des occupations dont les redevances sont
considérables telles que le parking, les kiosques et containers. La
commune n'ayant pas d'équipements marchands, profite des occupations sur
la voie pour combler ce manque. Car depuis la Loi n° 2013-10 du 28
décembre 2013, les communes ont à leur charge certains
équipements tels que les hôpitaux voire le paiement des salaires
des employés. De ce fait, les occupations ne sont pas toutes conformes
aux normes et dispositions de la voie. L'analyse de ces occupations au chapitre
suivant démontre avec plus de détails.
I.2.2. Analyses des occupations de la voie
|
publique
|
|
Les occupations sur la voie publique ne se font pas dans une
même logique. Les personnes qui s'installent sur la voie
l'aménagent par rapport à leur besoin ou l'activité
qu'elles exercent. Ainsi la superficie, les types d'installations ainsi que la
durée de l'occupation varient selon les occupants et leurs
activités.
I.2.2.1. Les occupations réguliers et non
réguliers
La gestion de la voie publique dans la Ville de Dakar a
souvent opposé les agents municipaux et les occupants irréguliers
(sans autorisation). Dans la zone de cette étude, les agents des
municipalités sont beaucoup plus vigilants à cette question. La
voie est une source de revenus pour les communes qui font face à des
difficultés financières, depuis qu'elles sont
érigées en communes de plein exercice. Toutefois, il faut noter
la présence des occupants qui n'ont pas d'autorisation mais qui
s'installent sur la voie publique.
75
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Figure I.14 : Répartition
des occupants selon la régularité
![](Problematiques-de-l-occupation-et-de-la-gestion-de-l-espace-public-dans-les-communes-de-Ouakam-et-d30.png)
37%
Oui Non
63%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les occupants enquêtés sur les voies ont en
majorité une autorisation ou un permis pour s'installer sur la voie.
Cette particularité s'explique par le fait que les deux
municipalités s'adaptent continuellement aux réalités et
trouvent de modalité pour régulariser les occupants.
Néanmoins, une partie considérable des occupants est toujours
installée sur la voie sans autorisation. Ces occupants évoquent
diverses raisons pour expliquer leur irrégularité et cela est
présenté par le graphique ci-dessous.
Figure I.15: Raisons avancée par les
irréguliers
14%
Ignorance lourdeur
administrative
Procédure couteuse Autre
Raison d'irrégularité
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
76
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Les occupants irréguliers ignorent pour la plupart
(13% d'entre eux) que l'occupation de la voie nécessite une autorisation
préalable. Ils ont une perception différente de la voie publique
: la rue est un bien commun, cela appartient à tout le monde et chacun
peut en disposer à sa façon. La régularité des
occupants dépend aussi des types activités et de types
d'occupation. Certaines occupations ne peuvent pas échapper à la
surveillance de la commune de par leur importance en matière de taxe.
Les agents de la commune se chargent d'interdire ces occupations
irrégulière, 31% d'entre eux affirment que la commune les a
interdits l'occupation contre 50% auprès duquel la commune n'est pas
intervenue.
Figure I.16 : La
régularité des occupants par activités
120% 100% 80% 60% 40% 20%
0%
|
|
|
|
|
Autre Boutiquier Garagiste Restaurateur Vendeur de Vente et
fruits location de
véhicules
Non Oui
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les propriétaires de parking de vente et les
boutiquiers occupent tous régulièrement la voie publique. Les
taxes liées à ces occupations sont importantes et la commune
veille à ce qu'elles aient une autorisation avant de s'installer. Quant
aux garagistes, vendeurs de fruits, restaurateurs et les diverses
activités, leurs installations sont souvent effectuées sans
permis. Même dans ces conditions, les communes arrivent à
percevoir les taxes sur les occupants. Elles sont soit hebdomadaires,
mensuelles, voire quotidiennes (appelée communément
«djouti«). Ainsi, 83% des occupants
irréguliers payent ces taxes contre 17% qui ne le paient pas. Pour
mesurer l'ampleur de ces occupations, leur durée sur la voie nous
permettra d'édifier comment la commune gère la voie dans le
temps.
77
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
En effet la durée des occupations peut
déterminer l'ampleur de ces dernières sur les voies dans les deux
communes et particulièrement sur les voies où les enquêtes
ont été effectuées.
Figure I.17 :
Répartition de la durée des occupations
Plus de Tois ans Deux - Trois ans Un - Deux ans Six mois - Un
an Zéro - Six mois
|
|
|
|
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35%
Durée de l'occupation
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Ce graphique, illustre le nombre de temps que les occupants
ont fait sur la voie. Ainsi, 32% ont fait plus de trois ans sur cette voie.
Mais, à coté 31% ont fait entre 0 et 6 mois sur la même
voie. A ce niveau, ceux qui ont fait 6 mois viennent juste d'arriver parce
qu'ils ont été déguerpis de là où ils
étaient avant. Il y a aussi une forte communauté
d'étrangers qui a pris la place d'un de leur compatriote qu'il occupait
avant. Ceci est valable pour les 11% qui ont entre 6 mois et 1 an. Cependant,
certains occupent cette voie depuis un à deux ans soit 19% des occupants
et d'autre depuis deux à trois ans soit 7%.
Les occupations dans la zone ne sont pas donc toutes
nouvelles. La zone devient de plus en plus attractive pour les services et
nombreux acteurs y s'installent. La commune quant à elle essaie de tirer
un maximum de profits à travers ces installations en instaurant des
taxes au m2 et par types d'installation. Certains occupants exercent
pour la première fois leur activité en s'installant dans ces
communes.
78
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.18 :
Répartition des avis sur les activités
nouvelles
![](Problematiques-de-l-occupation-et-de-la-gestion-de-l-espace-public-dans-les-communes-de-Ouakam-et-d34.png)
43%
Oui Non
57%
Source . ·
enquêtes mémoire / Moussa Dicker 2016
Une majeure partie des occupants exercent leur
activité pour la première fois en s'installant dans la zone de
notre étude. Ces activités sont la vente de café, la vente
de fruit et légume, la restauration, le lavage automobile et la vente de
voiture. Pour ceux qui exerçaient déjà leur
activité, ils étaient installés en grande partie dans la
ville de Dakar comme le montre le diagramme ci-dessous.
Figure I.19 : Anciens lieux
d'exercice
Hors de la région de Dakar
Hors de la Ville de Dakar
Ville de Dakar
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70%
Ancien lieu d'exercice
Source . ·
enquêtes mémoire / Moussa Dicker 2016
En effet 63% exerçaient dans la ville de Dakar avant
de déménager ici. 29% étaient hors de la ville de Dakar
(principalement dans la banlieue). Ceux qui étaient hors de
79
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
la région de Dakar et qui viennent nouvellement
s'installer ici ne représentent que 8%. Ces arrivants ont
différents motifs : déguerpissement, coût du loyer, raison
familiale, etc.
Figure I.20 : Motifs de
déménagement
30%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Interroger sur les motifs de déménagements, 49%
(autre) ont évoqué des raisons personnelles, ou soit parce que le
marché est plus dynamique dans cette zone. 33% affirment qu'ils ont
été déguerpis par les autorités de leurs anciens
lieux de vente et qu'ils ont trouvé cet endroit adéquat pour se
réinstaller. Ceux qui affirment qu'ils trouvaient leurs lieux de vente
moins rentable représentent 15% des enquêtés, contre 3%
seulement qui ont évoqué des raisons de taxes (chères).
La mobilité des occupants est intra urbaine dans ce
contexte. Cela peut être expliqué par la théorie
des lieux centraux50. La zone de Mermoz et Ouakam - sous
l'avantage des infrastructures comme la VND - offre une centralité au
niveau de la ville de Dakar. En plus, les activités exercées sur
ces voies ciblent une clientèle offerte par les flux quotidiens, mais
aussi certaines d'entre elles « appellent » d'autres
activités (la restauration et les parkings de vente par exemple). Ce
sont souvent des activités dont les clients doivent se déplacer
pour bénéficier d'un bien ou d'un service. Ainsi,
l'accessibilité de la zone est l'un des avantages que les
différents occupants veulent en bénéficier.
50 La théorie est fondée sur la
distinction entre des centres, qui sont le siège d'une offre de biens et
de services, et des périphéries (région
complémentaire du centre) où réside la demande, la
population utilisatrice. Elle a été fondée par W.
Christaller et A. Lösch en 1933.
80
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
|