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Université Cheikh Anta Diop
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Ecole Supérieure d'Economie
Appliquée (ESEA - ex_ENEA)
Département Aménagement du Territoire
Environnement et Gestion Urbaine (ATEGU)
Mémoire de fin d'étude
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Pour l'obtention
d'Aménagement
Sujet : Problématiques
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du Diplôme d'Ingénieur des
travaux
du Territoire et de Gestion Urbaine
de l'occupation et de la gestion de dans les communes de
Ouakam et de Mermoz
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l'espace public Sacré-Coeur
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Présenté par : MOUSSA MAHAMAT MOUSSA
DICKER
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Validé par le jury :
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? M. Birahim NDIAYE (Président) ;
? Dr. Bara NIANG (membre);
? Dr. Ibrahima NDIAYE (Directeur de
mémoire).
42e promotion
Année académique 2016 / 2017
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Remerciements
Je rends Grâce à Allah pour tous Ses
Bienfaits et particulièrement de m'avoir permis de passer quatre (04)
excellentes années au sein de l'Ecole Supérieure d'Economie
Appliquée.
Je remercie
avant tout mon encadreur Docteur Ibrahima NDIAYE pour sa
disponibilité et ses conseils durant toute ma formation.
l'Administration de l'ESEA et tout le corps professoral
avec tous mes sentiments de gratitude et de reconnaissance pour leur
dévouement en vue d'assurer ma formation dans des meilleures
conditions.
mes amis et camarades de la promotion, je pense à
Djidda Youssouf Loukia, Youssouf Saleh Abdoulaye, Ousmane Djamal Ali , Sabre
Hassan Hachim, Mara Mbaïdéo, Abdou Mahamat, Mahamat Aboubakar
Hisseine, Ngoné FALL, Serge HADEOU, Hawa DIOP, Samira Issakha Abdoulaye,
Emilia Marcelle FAGA, Mamadou CISSOKHO, Andy MBOU SVEINE, mais aussi mon amie
Chaima CHAOUI et ceux des autres promotions ; à toutes les personnes qui
ont contribué de près ou de loin dans ce travail et dans ma
formation durant ces 04 ans. Merci pour ces 04 inoubliables
années.
II
Dédicaces
Je dédie ce mémoire à ma famille,
particulièrement à ma mère Haoua Adoum et à mon
père feu Mahamat Moussa Dicker ; à mes frères et soeurs
qui m'ont toujours soutenu, à mon grand frère Adoum Mahamat,
à mon grand frère Mahamat Tahir Mahamat, à Mahamat Saleh
Moussa ; à toutes et tous les membres de ma familles.
III
La Table de Matières
Remerciements I
Dédicaces II
La Table de Matières III
Liste des Abréviations VI
La liste des Tableaux VII
La liste des Figures et Graphes VIII
La liste des Cartes IX
Résumé du Mémoire X
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE CADRE DE REFERENCE 3
Chapitre I : Problématique 4
Chapitre II : Revue critique de la littérature 7
II.1. L'espace public : du métaphorique au
matériel, une complémentarité ou une
expansion ? 7
II.2. Des formes et usages de la voie publique 10
II.3. Les usages et/ou occupations de la voie publique dans les
villes africaine et
particulièrement à Dakar 14
Chapitre III : Cadre théorique et conceptuel 19
III.1. La gestion urbaine (des espaces publics) 19
III.1.1. Essai de définition 19
III.1.2. La gestion des espaces publics 21
III.2. L'espace public en tant que voie publique 22
III.2.1. Définir l'espace public pour comprendre la voie
publique 22
III.2.2. La voie publique : de la voirie à la rue 25
III.3. Les usages de la voie publique : une diversité
d'acteurs autour d'un seul lieu 30
Chapitre IV : Cadre opératoire 33
IV.1. Objectif général de la recherche 33
IV.1.1. Les objectifs spécifiques de la recherche 33
IV.2. Question générale de la recherche 33
IV.2.1. Questions spécifiques de la recherche 34
IV.3. Hypothèse générale de la recherche
34
IV.3.1. Hypothèses spécifiques de la recherche
34
DEUXIÈMEPARTIE CADRE DE L'ÉTUDE ET METHODOLOGIE
36
IV
Chapitre I : Cadre de l'étude 37
I.1. Présentation de la Ville de Dakar 37
I.2. La présentation des communes de Ouakam et de Mermoz
Sacré-Coeur 41
I.2.1. La commune de Ouakam, l'ancien village des
pécheurs lébous face aux défis
de l'urbanisation 43
I.2.2. La commune de Mermoz Sacré-Coeur, le quartier de
résidence devenu
commune de plein exercice 44
I.3. L'urbanisation de ces deux communes sous l'influence des
équipements
structurants 46
Chapitre II : Méthodologie de la recherche 47
II.1. Élaboration du cadre théorique 47
II.2. De l'étude de cas : choix de la zone,
l'échantillonnage et les enquêtes 48
II.2.1. Justification du choix de la zone d'étude 48
II.2.2. L'échantillonnage 50
II.2.3. L'enquête et les outils utilisés 52
II.2.4. Les contraintes rencontrées et les
stratégies pour les surmonter 55
TROISIÈME PARTIE PRESENTATION DES RÉSULTATS ET
RECOMMANDATIONS 56
Chapitre I : Présentation et analyse des résultats
57
I.1. Caractéristiques socioéconomiques des
occupants 57
I.1.1. La relation entre le genre et l'activité, facteur
explicatif d'une disparité parmi
les occupants 57
I.1.2. La voie publique, un lieu d'accueil de diverses
activités 59
I.1.3. Les occupants par tranche d'âge ou la dominance des
jeunes 62
I.1.4. Le niveau d'étude des occupants 64
I.1.5. Le niveau de revenus des occupants 65
I.2. Analyse de l'occupation et de la gestion de la voie
publique dans les deux
communes 69
I.2.1. La gestion de la voie publique dans les deux communes :
une même modalité
pour des enjeux différents 69
I.2.2. Analyses des occupations de la voie publique 74
I.2.2.1. Les occupations réguliers et non
réguliers 74
I.2.2.2. Les installations sur la voie : de l'étale
à la construction en dure 80
I.2.2.3. La superficie occupée par les installations sur
la voie 83
I.2.2.4. Les parkings de vente de véhicules, une
occupation inédite en prolifération
dans la zone 84
I.3. L'impact des occupations sur la population et
appréciation de la gestion des voies
des différents acteurs 89
I.3.1. Les occupants et leur perception de la voie 89
V
I.3.2. L'appréciation des occupations par la population
90
I.3.3. Les nuisances des occupations sur la voie 91
I.3.4. L'appréciation de la gestion des voies publiques
93
Chapitre III : Recommandations 95
III.1. Les recommandations générales 95
III.2. Les recommandations spécifiques 96
III.2.1. La mise en place d'un dispositif de contrôle avec
des outils adaptés 96
III.2.2. Aménager les voies 96
III.2.3. Mettre en place un cadre de sensibilisation 97
III.3. Le plan d'action des recommandations 98
CONCLUSION 102
BIBLIOGRAPHIE 105
ANNEXES 108
VI
Liste des Abréviations
ANSD Agence Nationale de la Statistique et de la
Démographie
DESCOS Direction pour la Surveillance et le
Contrôle des Sols
EMTASUD Enquêtes Ménages sur la
Mobilité, le Transport et l'Accès aux Services Urbains dans
l'agglomération de Dakar
ESEA École Supérieure
d'Économie Appliquée
ITPC Interruption du terre-plein central
NTIC Nouvelles Technologies de l'Information et
de la Communication
VDN Voie de Dégagement Nord
Hbts Habitants
RGPH Recensement Général de la
Population et de l'Habitat
SICAP Société Immobilière
du Cap Vert
VII
La liste des Tableaux
Tableau n°3 : Présentation de quelques quartiers
de Mermoz 45
Tableau n°4 : Le résultat du recensement des
occupants 51
Tableau n°5 : Les échantillons des passants et
ménages 52
Tableau I.2 : Redevances d'occupation dans la commune de
Mermoz 71
Tableau I.2 : Redevances d'occupation dans la commune de
Mermoz 72
Tableau n°8 : Plan d'action des différentes
propositions. 98
VIII
La liste des Figures et Graphes
Image n°1 : Illustration des différents types
d'espace 23
Image n°2 : Caractéristique d'une voie 27
Figure n°1 : Les types de routes 41
Image n°3 : Évolution de l'occupation du sol
à Sacré-Coeur 46
Image n°4 : Présentation de la zone
d'enquête 49
Figure I.1 : Répartition des occupants selon le genre
58
Figure I.2 : Répartition des activités selon le
genre 59
Figure I.3 : Les différents types d'activité
occupant la voie 60
Figure I.4 : Relation entre activité et motif du choix
de la voie 61
Figure I.5 : Répartition des personnes qui pratique une
autre activité 62
Figure I.6 : La répartition des occupants selon l'Age
63
Figure I.7 : La répartition des activités selon
l'âge 64
Figure I.8 : La répartition des occupants selon le
niveau d'étude 65
Figure I.9 : Les revenus des occupants 66
Figure I.10 : Relation entre le niveau de revenu et les
activités 67
Figure I.11 : Durée de l'instruction pour un permis
d'occuper 70
Figure I.12 : L'instruction de l'autorisation pour occupation
de la voie publique 71
Figure I.13 : Appréciation de la taxe par les occupants
73
Figure I.14 : Répartition des occupants selon la
régularité 75
Figure I.15: Raisons avancée par les irréguliers
75
Figure I.16 : La régularité des occupants par
activités 76
Figure I.17 : Répartition de la durée des
occupations 77
Figure I.18 : Répartition des avis sur les
activités nouvelles 78
Figure I.19 : Anciens lieux d'exercice 78
Figure I.20 : Motifs de déménagement 79
Figure I.21 : Répartition des types d'installation
80
Image I.1 : Illustration des installations en dure sur la voie
81
Image I.2 : Illustration des installations précaires
82
Image I.3 : Les autres types d'occupations 83
Figure I.22 : Répartition des superficies des
occupations 84
Figure I.23 : Répartition du nombre de voiture 85
Figure I.24 : Nombre de vente par semaine 86
Figure I.25 : Répartition des clients visiteurs par
jour 86
Figure I.26 : Répartition des provenances des voitures
87
Figure I.27 : Perception de la voie par les occupants 89
Figure I.28 : L'appréciation des installations sur la
voie 90
Figure I.29 : La part des personnes impactés par les
occupations 91
Figure I.30 : Les différents types de nuisances 92
Figure I.31 : niveau d'approvisionnement des populations 93
Figure I.32 : Appréciation des différents
acteurs de la gestion de la voie 94
IX
La liste des Cartes
Carte n°1 : Les 19 communes de la Ville de Dakar 37
Carte n°2 : Occupation de l'espace dans la région
de Dakar depuis 1978 38
Carte n°3 : Répartition de la population de Dakar
39
Carte n°4 : Exemple de flux dans la Ville de Dakar 40
X
Résumé du Mémoire
La gestion des espaces publics est complexe, surtout pour des
nouvelles communes en pleine évolution. Cette complexité ressort
de la rencontre de nombreux acteurs, voire tous les acteurs urbains, à
l'échelle de ces espaces.
Ce travail porte sur l'analyse des modalités
d'occupation et de gestion de l'espace public, particulièrement la voie
publique, dans les communes de Ouakam et Mermoz Sacré-Coeur. Il s'agit,
d'une part, de caractériser les occupants afin de comprendre les
dynamiques d'occupation de l'espace. D'autre part, les procédures
administratives liées à la gestion de la voie sont
étudiées. Cette étude est basée sur des
informations qualitatives et quantitatives recueillies grâce à des
outils de collecte distincts.
Les occupants sur la voie publique ont des
caractéristiques très variées. Ils sont majoritairement
jeunes (16 - 30 ans) et de genre masculin (71%). Plusieurs activités
sont exercées sur la voie, telles que la vente de véhicules, la
restauration, la menuiserie, le lavage de voitures... ; chaque activité
nécessitant une installation particulière (étale,
container, chariot, etc.). Les occupants s'installent sur des superficies
allant de 0 à 300 m2 et indépendamment de
l'activité exercée.
La gestion de la voie est assurée par la commune
conformément aux textes (précisément la Loi 2013-10
portant Code générale des Collectivités Locales). Cette
dernière autorise les installations, interdit celles qui sont
irrégulières et s'assure de la bonne fonctionnalité de la
voie.
Cependant, les procédures pour l'octroi d'un permis
d'occupation sur la voie ne se font pas selon des normes urbanistiques. Ce qui
laisse la place à des appréciations et à des observations
qui peuvent être qualifiées de « subjectives », pour
l'autorisation d'une installation. Cela occasionne donc des
irrégularités et les occupations se prolifèrent sur la
voie en finissant par devenir un encombrement pour les populations surtout
celles riveraines.
C'est dans ce contexte que nous avons formulé quelques
recommandations qui permettront de résoudre les contraintes
rencontrées autant par les occupants, que par les populations riveraines
et les acteurs de la commune.
1
INTRODUCTION
Les villes des pays en voie de développement,
particulièrement celles de l'Afrique noire francophone, subissent ces
dernières décennies une forte pression démographique aux
multiples causes dont les plus marquantes sont la migration et la croissance
naturelle. Cette pression a contribué à la naissance d'une
urbanisation accélérée et incontrôlée de ces
villes, dans un contexte « de développement urbain dans des
pays aux capacités économiques relativement réduites
» 1 , ayant des difficultés à répondre aux
besoins des populations en services publics de base tels que le logement, le
transport, l'assainissement, l'éclairage public, etc.. (KOULGUEI, 2012).
Mais « la ville africaine » est récente, une «
production contemporaine »2 fruit de la
colonisation.
En effet, la ville dans les pays africains est, à
l'origine, conçue pour des besoins de la colonisation (infrastructures
pour l'acheminement des produits agricoles et miniers, de siège de
commandement militaire, etc..). Au Sénégal, la ville de Dakar en
est une parfaite illustration. L'héritage de ce passé colonial
est toujours ressenti à travers l'évolution de cette ville. Dakar
concentre l'essentiel des équipements et services du pays conduisant
ainsi à une importante concentration des activités
économiques voire politiques. Une situation synonyme
d'attractivité ou plutôt de centralité.
Dans ce contexte, la ville de Dakar doit absorber presque tout
le flux migratoire occasionné par les crises environnementales dans le
monde rural. La ville et ses périphéries (Pikine,
Guédiawaye) concentrent 23% de la population totale du pays (ANSD, 2013)
sur 550 km2 soit une densité de 5 374 hbts/km2. La
région compte en effet 3 137 196 hbts. La ville est
ainsi sous une forte pression démographique qui met au défi les
acteurs de la ville. Il y a d'une part les actions des politiques publiques qui
tentent de gérer le phénomène et d'autre part, la
population qui elle-même cherche des mécanismes d'adaptation. La
gestion urbaine devient ainsi un objet de confrontation entre les acteurs
à une échelle particulière de la ville, celle de l'espace
public.
1CHENAL Jérôme et al. Quelques rues
d'Afrique. Observation et gestion de l'espace public à Abidjan, Dakar et
Nouakchott, 2009, p.239.
2Ibid.
2
La gestion de l'espace public, précisément celle
des voies publiques, dans les communes de Dakar présente nombreux
défis. Les communes, érigées en communes de plein exercice
depuis 2013, ont des compétences élargies donc de nouvelles
responsabilités. Ces dernières éprouvent d'énormes
difficultés en matière de gestion urbaine aggravées par un
manque de ressources (principalement financières). Elles ont en effet
besoin de moyens pour exercer leurs compétences et de ce fait, mettent
en valeur les voies publiques pour combler ce manque. Ainsi, on assiste
à des installations parfois non organisées sur la voie, avec une
autorisation de la commune.
C'est dans ce contexte qu'évoluent les communes de la
ville de Dakar. Notre étude a porté spécifiquement sur
l'analyse de l'occupation et de la gestion de la voie publique dans les
communes de Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur. La zone de ces communes
fait l'objet d'une concentration d'activités et de services depuis ces
dernières années. La présence de la VDN et l'engorgement
du centre-ville de Dakar offrent donc une certaine centralité à
ces deux zones. L'occupation et la gestion de la voie publique deviennent donc
une question centrale pour ces deux communes.
La bibliographie consacrée à la matière,
telle que les conclusions de Jérôme Chenal dans
"La ville ouest-africaine : modèles de planification de l'espace
urbain" ; ont permis d'avoir une connaissance précise et assez
pertinente de la problématique. Afin de déterminer dans quelles
conditions s'effectue l'occupation et la gestion de la voie publique dans ces
deux communes, il était donc indispensable de se fonder sur des
méthodes et techniques pratiques notamment les enquêtes de
terrain, les entretiens et les observations directes. L'exploitation de ces
sources devait permettre de répondre à une série
d'interrogations inhérentes au sujet.
Ce mémoire tend à démontrer qu'une bonne
gestion de la voie publique passera par une organisation rigoureuse et des
outils adaptés aux réalités locales. Il est ainsi
structuré en trois grandes parties : la première est
consacrée à l'élaboration du cadre théorique et du
cadre opératoire ; la seconde consiste à la présentation
de la zone et des choix méthodologiques et enfin la troisième
partie dans laquelle sont présentés et analysés les
différents résultats obtenus, suite auxquels des recommandations
ont été formulées.
3
PREMIERE PARTIE
ADRE DE REFERENCE
« Sicinius: What is the city but the people? Citizens:
The people are the city »
William Shakespeare, The Tragedy of Coriolanus, Act 3,
Scene 1.
4
Première partie : cadre de
référence
Chapitre I : Problématique
La création et l'évolution de la Ville de Dakar
sont marquées par nombreux défis notamment l'urbanisation
galopante et ses conséquences. Les enjeux de ces
phénomènes se présentent différemment selon les
échelles. Mais le défi majeur est celui de la gestion urbaine
particulièrement celle de l'espace public. En effet, les effets des
différents phénomènes urbains se manifestent au niveau de
cet espace, mais aussi c'est l'échelle où les interactions
sociales sont les plus intenses et perceptibles.
La ville n'arrive pas à satisfaire tous les besoins de
la population, ou d'une catégorie de cette population qui est
économiquement défavorisée. Cette dernière «
s'approprie » d'une manière informelle, voire anarchique,
les espaces publics tels que les marchés et les rues, pour pratiquer des
activités commerciales capables d'assurer sa survie. Mais
l'appropriation de ces espaces « est sujette à des conflits
divers et à des changements dynamiques »3. Ces
dynamiques mettent en permanence en conflits la population et les communes. Par
contre, les textes ont déjà pris des dispositions pour
l'occupation de la voie publique.
En effet, l'occupation du domaine public est
caractérisée par un droit d'usage d'une partie du domaine public.
Selon le Code du domaine de l'État, il existe trois types d'occupation
de ce domaine : la permission de voirie, l'autorisation d'occuper et les
concessions et autorisations d'exploitation. La permission de voirie concerne
les occupations sur la voie publique. Elle a un caractère
précaire et révocable, ce qui permet de conserver la nature
domaniale de la voie publique (Art. 12 du Code du domaine de l'État). Le
régime juridique de ce domaine prouve la mise en place d'un outil
organisé pour la gestion de l'espace public. Cependant, la
maîtrise de cet espace est toujours problématique dans la ville de
Dakar.
Les tentatives de réponses pour résoudre ces
différents problèmes sont nombreuses. S'agissant des occupations
anarchiques et irrégulières, les agents communaux font de
descentes pour les limiter, mais les populations reviennent toujours
s'installer pour la simple raison qu'elles n'ont pas d'autres endroits pour
3Cheikh Samba Wade, Rémy Tremblay et
El Hadji Mamadou Ndiaye, in Études caribéennes
« Etude de la complexité de la gestion des espaces publics
à vocation de transport à Dakar (Sénégal) »,
mis en ligne le 22 mars 2016 URL :
http://etudescaribeennes.revues.org/7858
5
Première partie : cadre de
référence
exercer leur métier (Mbembo 2012, Abdelbassit 2015).
L'occupation de la rue est devenue finalement « l'éternel
problème entre les marchands et les mairies »4. Les
déguerpissements ne sont que des solutions
éphémères.
En effet, les mesures prises se trouvent être
inefficaces puisque les problèmes d'occupation
irrégulières et anarchiques persistent toujours sur les
artères de la ville de Dakar. En effet, « le manque
d'entretien, le déficit de surveillance par les services
compétents et la quasi inexistence de la police de conservation ont
créé les conditions d'une sous protection des biens relevant du
domaine public ». En outre, le contexte actuel lié aux
nouvelles réformes sur la décentralisation accentue aussi le
phénomène ; En effet, les communes ont plus de
responsabilités sans avoir de ressources nécessaires pour les
supporter. La voie publique leur offre donc une possibilité de combler
ce manque et elles n'hésitent pas d'en tirer profit.
Les occupations en plus de leur caractère anarchique
et/ou informel ont d'impacts sur la ville. Ces impacts sont notamment la
pollution sonore, l'insalubrité, l'encombrement et la nuisance à
la mobilité (Mbembo 2012, Abdelbassit 2015) mais aussi la
défiguration du paysage et de l'esthétique urbain. Les occupants
ne respectent pas les normes de propretés quand ils s'installent. En
outre ils disposent rarement de poubelles et ne ramassent pas
régulièrement les déchets qu'ils produisent (Mbembo,
2012). Quant à la pollution sonore, elle touche particulièrement
les populations riveraines. L'encombrement est l'une des difficultés les
plus ressenties par les piétons (Abdelbassit, 2015). Les occupations se
font sur la partie destinée à la marche à pied, laissant
la chaussée partagée entre véhicule et piéton.
C'est pourquoi les piétons se trouvent être les plus
impactés.
Les occupations anarchiques et informelles ont aussi un impact
majeur sur l'esthétique et le paysage urbain, car la rue
représente l'image de la ville. Les occupations anarchiques donnent
à la ville une image moins attrayante. L'attractivité même
si elle est souvent assimilée à son registre économique
« est devenue pour les villes une notion cruciale, aussi cruciale que
la compétitivité avec laquelle elle est parfois confondue
»5.
4www.senenews.com
publié le 09/02/2015 à 19 h 45. 5VINCI,
L'attractivité des villes, 2010 p.7.
6
Première partie : cadre de
référence
Cependant, des nouvelles dynamiques apparaissent par rapport
à l'occupation de la voie publique suivant les mutations de Dakar durant
ces dernières années avec la construction de nouveaux
équipements structurants mais aussi l'évolution du climat
politique. Ces occupations n'ont pas les mêmes caractéristiques
que celles anarchiques et se font dans la régularité pour la
plupart, c'est-à-dire qu'elles ont eu au préalable une
autorisation. En plus, elles sont plus visibles sur certaines artères
principales de la ville telle que la VDN. Ce sont des types d'occupation non
ambulante tels que les kiosques, les stations de lavage et de nettoyage, etc.
Ces sont parfois des occupations de type nouveau telles que les parcs
automobiles construites sur les dépendances de la voie publique. C'est
effectivement le cas dans les communes de Ouakam et Mermoz
Sacré-Coeur.
Ces deux communes sont toutes deux caractérisées
par les différents phénomènes décrits ci-haut. De
ce fait, cette problématique liée à l'occupation de la
voie publique mais aussi à sa gestion est posée dans cette
recherche afin d'avoir une lecture de ces pratiques au sein de la ville. Nous
allons, de ce fait, chercher à déterminer les différents
contours de ce phénomène à travers cette question
générale : « quelles sont les modalités
liées à la gestion et à l'occupation de la voie publique
dans les commune de Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur ? »
7
Première partie : cadre de
référence
Chapitre II : Revue critique de la
littérature
« Dans la ville, les espaces publics reflètent
les enjeux de la vie en société ». Il
représente un espace de rencontre qui met en relation ou pas
des usagers très différents.
L'espace public (rue, places, parcs, etc..) est un terme polysémique
utilisé dans plusieurs disciplines. Mais il a été
longtemps l'objet des urbanistes, architectes ou ingénieurs qui
s'intéressent plutôt à son aspect matériel et/ou
esthétique. L'usage du concept dans le champ des sciences sociales a
permis de prendre en compte les interactions et représentations des
usagers et « contribue à la compréhension et
l'explication de cet aspect de la réalité urbaine »
(Michel BASSAND et al. 2001, p.1). Dans ses différentes
significations, l'espace public représente aussi la voie
publique qui est un espace dédié à la circulation
des biens et personnes.
Dans ce cadre, pour traiter la voie publique à travers
la littérature, l'analyse portera sur celle-ci en tant
qu'espace public6 intégrant en
même temps les deux dimensions d'un espace public : l'une, un espace
immatériel du débat public (J. Habermas, 1962) et l'autre
dimension, matérielle ou physique sur laquelle pourrait se manifester ou
non la sphère immatérielle 7. Cette approche prend en
compte les dynamiques socio-urbaines en évitant une lecture simple de
l'espace, qui se limite à son caractère architectural (le
bâti). Car même si la voie publique a une fonction
particulière qui lui est attribuée - la circulation des biens et
personnes - elle peut être aussi un espace avec ses «
qualités, une valeur d'usage et un sens »8.
II.1. L'espace public : du métaphorique au
matériel, une complémentarité ou une expansion ?
Quand J. Habermas évoquait pour la première fois
le concept de l'espace public9, son
étude se limitait à l'espace communicationnel, l'espace de
publicité (la Öffentlichkeit
ou La publicité critique dont
parlait Kant). A l'image de l'Agora
6Dans le but de ne pas dissocier les deux dimensions,
le terme espace public sera utilisé et aura la
même connotation que la voie publique. Il sera
manié avec prudence afin d'éviter les ambiguïtés.
7Antoine Fleury, Espace public in.
http://www.hypergeo.eu/spip.php?article482
consulté le 09.05.16 8Ibid.
9Habermas, L'espace public : archéologie
de la publicité comme dimension constitutive de la société
bourgeoise, 1962. (Titre original : Strukturwandel der
Öffentlichkeit)
8
Première partie : cadre de
référence
grecque, il était considéré
comme l'espace « [...] pour discuter des questions
d'intérêt commun » (Patrick J. Brunet, 2001, p.
49.)10, mais aussi des décisions politiques de l'État.
Même si la conceptualisation du terme rimait au début avec cette
sphère immatérielle, l'idée d'un espace physique
destiné à l'usage de tous préexistait dans le langage
urbanistique. Mais surtout dans son approche juridique définie à
travers le domaine public.
Le parallélisme - plus ou moins - des deux espaces dans
la littérature est le résultat de l'évolution du concept
dans différents domaines tels que la géographie, l'architecture
ou la sociologie urbaine. Le terme générique est utilisé
dans chaque domaine à des fins différentes et dans des contextes
particuliers. L'évolution du concept suit les dynamiques des
sociétés et de la ville. Néanmoins, son usage se limite
aux dimensions suivantes quel qu'en soit le domaine : celle spatiale purement
physique (le bâti), de ses fonctions et la dimension liée à
la communication et le débat public.
Au-delà de la conception de la voie publique entretenue
par l'urbanisme fonctionnaliste de la Charte
d'Athènes (espace de circulation et de stationnement), l'espace
public est un lieu d'interactions et d'échanges. C'est l'ensemble des
« lieux que le public fréquente, indépendamment de leur
statut »11. De cette logique, sort
l'idée d'une extension de l'espace qui se construit lui-même. Cela
permet d'éviter une comparaison conceptuelle basée sur les
différents usages de l'espace public comme dans L'espace
public de Thierry Paquot « l'espace public est un
singulier dont le pluriel - les espaces publics - ne lui correspond pas
» (p. 3)12. Il est recherché plutôt une
articulation entre les deux dimensions. Puisque plus loin dans ses arguments,
T. Paquot, même s'il trace une frontière entre le singulier et le
pluriel, « il lui arrive d'employer le singulier pour désigner
un lieu urbain de circulation ouvert au
'0Patrick J. Brunet, L'éthique dans la
société de l'information, Québec et Paris, Presses de
l'Université Laval et L'Harmattan, 2001, p. 49. In
http://agora.qc.ca/dossiers/Espace_public.
''Antoine Fleury, Espace public in.
http://www.hypergeo.eu/spip.php?article482
consulté le 09.05.16.
'2En effet, il utilise l'espace public au singulier
comme le concept défini par Jürgen Habermas, qui est un lieu
symbolique où se forme l'opinion publique, issue du débat
politique et de l'usage public de la raison. Au pluriel, les espaces publics
désignent les lieux physiques dans lesquels le public peut circuler ou
stationner. Loïc Ballarini, « Thierry Paquot,
L'espace public », Lectures [En ligne], Les comptes rendus, 2010,
mis en ligne le 05 avril 2010, consulté le 23 septembre 2016. URL :
http://lectures.revues.org/970
9
Première partie : cadre de
référence
public »13. Cela montre
l'ambiguïté du terme dans la littérature, utilisé
fréquemment mais défini rarement par ceux qui l'emploient
(Loïc Ballarin, 2010).
La problématique de l'espace public ne se limite pas
à une confrontation entre deux sphères, mais «
la rencontre des formes spatiales et sociales »
(Véronique Bordes, 2006). Pour interpréter les
dynamiques de l'espace public cette confrontation entre ces deux formes est
essentielle. Le social ne peut être étudié sans un
contexte spatial ; et le spatial sans le social
serait un espace vide de sens. « Les formes sociales f...] ne
sont pas préinscrites dans l'espace existant, mais produites à
partir des relations spatiales engendrées par l'espace
»14. La complémentarité et/ou l'expansion
d'un espace vers l'autre (c'est-à-dire l'espace physique vers la
sphère publique) est relative aux conditions dans lesquelles sont
apparues ces deux dimensions. L'espace (physique) crée des conditions
favorables aux interactions sociales. Ces dernières façonnent
l'espace à travers leur dynamisme.
Deux courants se distinguent sur l'interaction de ces deux
espaces : d'un côté le courant du « spatialisme
», défendu par les urbanistes, considère que le spatial
dicte le social et d'un autre, l'approche sociologique marquée par la
philosophie durkheimien selon lequel « le social s'explique par le
social ». Il s'agirait plutôt de deux «
caractéristiques antagoniques d'une même réalité
», à l'image de la théorie du perspectivisme de
José Ortega y Gasse15. Alors entre ces deux courants,
Eric Charmes « considère que si le spatial ne
dicte pas le social, il est cependant en mesure de proscrire certains
comportements ou, au contraire, de constituer des conditions favorables au
développement de certains comportements sociaux » 16 . Les
manifestations de la sphère communicationnelle ou immatérielle
s'inscrivent donc dans un cadre spatial qui est un élément
essentiel pour leur interprétation.
13Ibid.
14Véronique Bordes. Espaces publics, espaces
pour tous ? Espaces de la jeunesse, espaces publics : organisation locale, Nov
2006, Rennes, France.
15Évoquée pour la première
fois en 1916 dans Verdad y Perspective, le tome 1 ï El Espectador, la
théorie du perspectivisme a été développée
par le philosophe José Ortega y Gasset. C'est une philosophie qui
prône une approche plurielle de la vérité.
16Thierry Rogel, « Eric Charmes, La rue,
village ou décor ? Parcours dans deux rues de Belleville »,
Lectures [En ligne], Les comptes rendus, 2007, mis en ligne le 04 septembre
2007, consulté le 12 octobre 2016.
10
Première partie : cadre de
référence
Dans le milieu urbain, les phénomènes sociaux
peuvent être perçus et analysés en les délimitant
dans l'espace public. Les deux dimensions de l'espace, somme toute, sont
indispensables pour comprendre la ville. Les différentes théories
de l'espace public (J. Habermas 1962 - 1978, Hannah Arendt 1983,
Lussault 2003) rapportent une distinction entre l'espace public et la
sphère publique qui néanmoins, semble être une analogie
conceptuelle. Car elles se résument toutes à des interactions
sociales entre différents acteurs qui se manifestent dans un espace (au
sens physique) défini. « Tout phénomène social -
et donc tout objet spatial - procède d'une dialogique complexe entre la
sphère idéelle dans son infini variété [...] et la
sphère matérielle dans sa diversité de substances,
d'objets et d'agencements » (J. Levy et M. Lussault,
2013 p.331). Les interactions spatiales pour ne pas dire socio-spatiales
varient selon l'échelle (la rue, un quartier ou la ville), le temps, les
acteurs et le contexte (économique, social).
II.2. Des formes et usages de la voie publique
L'espace public n'est pas immuable. Il peut prendre
différentes formes17 et peut être perçu de
différentes manières selon les acteurs. C'est une suite logique
dans laquelle l'intégration des deux dimensions de l'espace permet
d'avoir une organisation spécifique des lieux. Alors, il suffit de se
demander « que font les gens dans la rue ? Qui fait quoi ? Comment le
font-ils ? Comment ce qu'ils font est-il relié à la configuration
des lieux et plus généralement à leur
matérialité ? » (J. CHENAL et al, 2009 p.7).
Répondre à ces questions c'est aussi essayer de comprendre
pourquoi le font-ils.
Sur un cadre réglementaire, l'espace public ou la voie
publique est construite selon des normes précises (ou un régime
juridique précis). Des fonctions particulières lui sont
attribuées (principalement la circulation) mais dans cette configuration
d'autres paramètres entrent en jeux et influencent l'usage de la voie :
en plus des normes (surtout urbanistiques) il y a l'emplacement et les
constructions qui la bordent (J. CHENAL, 2013 p.27). Les usages des acteurs
viennent donc s'ajouter à ces différentes
17La forme ne se limite pas au physique ou
matériel. Dans ce contexte la forme est proportionnelle aux usages
variés de la voie publique.
11
Première partie : cadre de
référence
formes d'influences. Ce qui signifie que « ce n'est
pas le seul régime juridique de la propriété du sol qui
décide de la destination d'un terrain, mais les pratiques, les usages et
les représentations qu'il assure» (Yona Jébrak et
Barbara Julien, 2008 p.19).
Les dynamiques de l'espace public s'inscrivent dans un
processus qui débute par la construction puis la
transformation jusqu'à son utilisation
(Ibid.18). « L'espace public est devenu un
dérivé du mouvement » (Sennett, Richard, 1979).
L'étape la plus importante est celle qui fait le lien entre la
transformation et son utilisation puisqu'elle met en lien
« celui qui réalise l'espace public et celui qui l'utilise
». Les usages déterminent ce que va advenir à l'espace
public. Ainsi on peut déterminer cinq19 (05) formes d'espaces
publics qui constituent en même temps des enjeux « distinctes et
interdépendantes » (M. BASSAND et al, 1999) :
- Les espaces d'accessibilité
: cela se réduit à la mobilité des biens et
personnes (grâce aux différents moyens de transport) mais aussi
aux moyens de transport des infrastructures et équipements urbains
(services d'eau, d'électricité par exemple). Ce qui renvoie en
définitive aux fonctions premières de la voie publique dans sa
forme urbanistique ou architecturale ;
- Les espaces d'usage festif et/ou civil
: cette forme d'usage est considérée comme une
marque de citoyenneté, d'urbanité ou
l'expression de la démocratie (J. HABERMAS 1962 ;
Stéphane TONNELAT 201620, Ilaria CASILLO 2013). C'est
là où les populations partagent leur différence et leur
individualité (culturelle ou politique) ;
- Les espaces de marché :
c'est l'espace le plus partagé en milieu urbain. Il représente
certes un enjeu économique pour une ville (voire un pays surtout ceux du
sud ou les conséquences des problèmes socioéconomiques se
manifestent particulièrement sur cet espace) mais constitue un endroit
de partage des pratiques sociales par excellence ;
18Yona Jébrak et Barbara Julien Les
temps de l'espace public urbain : Construction, Transformation et utilisation
2008 ; 188p.
19Jérôme CHENAL, 2013 p27-29 ;
20Stéphane Tonnelat, « Espace public,
urbanité et démocratie », La Vie des idées, 30 mars
2016
12
Première partie : cadre de
référence
- Les espaces de sociabilité
: « la rue, la place [...] avaient servi pendant des
siècles dans un cadre plus large que le cadre familial, d'espace de base
pour une sociabilité populaire, spontanée ou organisée
» (Alain LEMENOREL, 1997 p.73). Dans l'anonymat
les individus se rencontrent au niveau de l'espace public socialisent
souvent sous l'obligation morale d'un
«bonjour» (particulièrement dans les
sociétés africaines). Ces différentes interactions
sous-entendent une affinité entre les acteurs qui aboutit à une
acceptation de l'autre au niveau de l'espace public si l'on considère la
sociabilité comme « les manières d'être ensemble
de groupes sociaux différenciés, dans un contexte culturel
donné » (Korosec-Serfaty, 1988) ;
- Les espaces d'identité :
cette forme s'exerce dans un contexte de reconnaissance d'une
société particulière ou d'une classe donnée.
L'espace devient un moyen de revendications puisque son accès n'exclus
particulièrement personne. L'espace est aussi un lieu de «
construction de l'identité urbaine » qui est «
l'image de soi qu'un acteur s'efforce de construire par rapport à
autrui » (M. BASSAND et al.2001 p.247).
Ces différentes formes (qui représentent aussi
d'enjeux) que peut prendre l'espace public décrivent la nature
même de cet espace qui « est de mélanger les gens et les
activités, de changer avec le temps, dans la journée, dans la
semaine ou encore dans la longue durée»21.
L'espace prend la forme de l'acteur qui l'utilise en fonction de ce
qu'il fait. « Chacun peut faire l'expérience de la
diversité des rues, à l'intérieur d'une même ville.
[...] Les rues (et l'idée que l'on s'en fait) se différencient
selon l'espace et le réseau de relations dans lesquels elles
s'inscrivent, à différentes échelles
»22. Les acteurs qui marquent cet espace peuvent
être des acteurs politiques, économiques, des spécialistes
de l'espace ou des usagers (BASSAND et al. 2001). Ces derniers jouent
un rôle, chacun à un moment donné, dans la création,
la transformation et l'usage de l'espace.
L'espace public contemporain est objet d'un débat
animé, vu que le concept même d'espace public n'est
utilisé que dans les années 1970. Avant même sa
création (en tant que concept), des auteurs comme Camillo Sitte
(1889) et Jane Jacobs (1961) évoquaient la
mort de l'espace public. Ce « déclin »
est un constat lié au changement
21Antoine Fleury, « La rue : un objet
géographique ? », Tracés. Revue de Sciences humaines [En
ligne], 5 | 2004, mis en ligne le 01 avril 2006
22Ibid.
13
Première partie : cadre de
référence
de paradoxe puisque l'espace public était une question
destinée à la bourgeoisie (Habermas, 1962) qui portait le
débat formant « l'opinion publique
»23 . Avec l'avènement des libertés (la
fin des royaumes) et l'automobile, l'accès à l'espace public se
bouleverse, change sa fonction d'antan et devient un espace de circulation.
« Privé de sens, vécu comme coupure, l'espace public,
perçu comme un vide entre les pleins du bâti, a souvent
été rempli au gré des besoins de la vie moderne, en
l'absence de réflexion globale. Il a ainsi perdu l'identité
propre qui, au XIXe siècle et avant, le caractérisait,
pour devenir une organisation complexe d'éléments
hétéroclites dans laquelle les espaces
s'interpénètrent et les fonctions se confondent.
»24
Ce changement de contexte ne présage pas pour autant la
mort de l'espace public mais démontre la transformation continuelle de
ce dernier. Se positionnant contre l'idée du péril de
l'espace public, François TOMAS25
atteste sur la métamorphose de ces lieux qui « subsistent et se
renouvellent ». Les mutations liées à l'usage des
espaces sont conditionnées par l'évolution de la ville
elle-même et de ses défis. C'est ainsi que de nos jours, avec les
défis de la croissance urbaine, les enjeux urbains sont d'ordre
environnemental dont la verdure et la piétonisation (ou bien la
réduction de l'automobile) conditionnent les politiques urbaines
à l'instar des rue piétonnes de Paris, Barcelone ou encore
Kigali.« Aujourd'hui, les nouvelles politiques cherchent à
restituer ces espaces aux piétons et à la population
»26. Les espaces publics sont donc au
premier plan et cela sonne comme une nostalgie des espaces d'avant
l'automobile.
De même, le rôle de la voie publique en tant que
support de concentration des interactions sociales est «
concurrencé » par la diffusion des médias
et le développement des Nouvelles Technologies de l'Information et de la
Communication (NTIC). Ces derniers créent un espace virtuel
« espace public numérique » et y
déplacent les interactions. « f...] L'espace est
constitué de processus de
23La femme, les pauvres, les esclaves et les
étrangers étant exclus du débat public.
24Communauté Urbaine de Lyon, Service Espace
Public, Le vocabulaire des espaces publics Les références du
Grand Lyon, Lyon, sans date 43 p.
25TOMAS François. L'espace public, un
concept moribond ou en expansion? Géocarrefour, vol. 76, n°1, 2001.
L'espace public. pp. 75-84.
26Dossier vue sur la ville : la requalification
des espaces publics, enjeu de la ville durable. Université
de Lausanne, n°19 décembre 2007.
14
Première partie : cadre de
référence
communication détachés des lieux, une
dimension analytique... Dans le monde moderne, les mass-médias et les
médias interactifs comme le net jouent un rôle très
important dans la constitution de l'espace »27. La
suppression des frontières ou limites physiques de l'espace par les NTIC
est une réalité incontournable.
Néanmoins ces deux dimensions sont
complémentaires. Même si l'essentiel du débat se
déroule au niveau virtuel, cela finit par se manifester dans la
rue à l'instar des revendications sociopolitiques au
Moyen-Orient (printemps arabe), le soulèvement des noirs aux
États Unis contre le crime racial, les revendications des travailleurs
en France ou encore le balai national au Burkina. L'espace
virtuel grâce à sa vitesse de transmission de l'information
au-delà des frontières facilite et renforce certaines
manifestations.
Aussi et enfin, l'espace public moderne est marqué par
le défi sécuritaire. La fréquentation assez
considérable de l'espace public par la population la rend finalement une
cible stratégique. L'exemple des attentats dans les marchés au
Nigeria, au Niger au Mali ou au Tchad depuis ces dernières
années, les tueries dans les églises et parcs au États
Unis, la tuerie de Nice en France, etc. en sont des
références.
La voie publique en somme ne se limite pas uniquement à
sa dimension architecturale et sa fonction comme support de circulation. En
tant qu'espace public, elle peut prendre différentes formes et peut
faire objet de différents usages. Ces derniers s'inscrivent dans le
temps et à travers l'évolution de la ville et de ses enjeux, la
rue étant déterminant dans « la fabrique de
l'urbanité » et de la ville.
II.3. Les usages et/ou occupations de la voie publique
dans les villes africaine et particulièrement à Dakar
Les villes africaines ont en commun un passé colonial.
La création de la ville elle-même et de ses outils de
planification et de gestion sont d'origine coloniale basée sur le
modèle de la ville occidentale. Pour parler d'un espace public
purement africain, il suffira de faire un détour dans la vie
traditionnelle ou les villageois se retrouvent
27 Dahlgren Peter, Relieu Marc. L'espace public et
l'internet. Structure, espace et communication. In: Réseaux, volume 18,
n°100, 2000. Communiquer à l'ère des réseaux. pp.
157-186.
15
Première partie : cadre de
référence
sous le baobab, soit autour du feu ou bien sur la place
publique du village où se partagèrent des histoires, où
l'on discute des décisions qui concernent la communauté,
d'envergure semblable à l'agora des grecs. Mais il s'agit ici
de l'espace public urbain, domaine de « l'anonymat »
où les gens qui se croisent ne peuvent pas du tout se connaître. A
la différence de cet espace africain, la ville est cosmopolite.
Certes la ville africaine est un hybride marqué par ces
traditions mais l'essence du mot espace urbain ne prend pas en compte le
contexte africain mais se base plutôt sur l'évolution de la ville
occidentale. L'emprunte ou la marque africaine est donc présente dans la
transformation et les usages de ces espaces : « dans le cas des villes
d'Afrique de l'Ouest, [...] la notion de l'espace public renvoie à
l'histoire sociale de la ville, marquée par la conception occidentale de
l'espace public (places, marchés, rues, avenues, gares, ports ...) mais
redéfinie par les usages autochtones » (CHENAL, 2009 p.31).
A Dakar la ville fut conçue sur des bases d'une
ségrégation spatiale excluant les autochtones du cadre urbain
occidentale à travers plusieurs opérations en 1901 (qui ont
abouties à la création de Médina en 1914) puis en 1950
avec la création de Pikine. L'exclusion des autochtones,
considérés comme non conformistes par le pouvoir colonial, fut
les bases d'une crise urbaine à Dakar, qui ne fera que
s'amplifier durant la période postcoloniale :« Le tissu urbain
ne s'est pas encore remis des blessures de l'époque coloniale et les
cicatrices sont visibles [...] » (CHENAL et al. 2008
p.240)
Le travail de Ousseynou FAYE et Ibrahima THIOUB28
sur les marginaux à Dakar retrace d'une manière assez exhaustive
le problème lié aux usages de la voie publique dans la ville
dakaroise. La configuration coloniale a permis la naissance de l'informel, une
issu pour une classe pauvre et ségréguée qui doit
chercher des moyens d'adaptation. Le phénomène de l'occupation de
l'espace public n'est donc pas nouveau. Et cela n'est pas particulier à
la ville de Dakar uniquement mais concerne aussi plusieurs villes africaines
« au Togo, tout comme dans les autres pays d'Afrique où les
espaces publics sont depuis longtemps occupés et détournés
de leur objectif
28Ousseynou Faye, Ibrahima Thioub, « Les
marginaux et l'État à Dakar », Le Mouvement Social
2003/3 (no 204), p. 93-108.
16
Première partie : cadre de
référence
premier f...] » (GBETANOU, 2010)29.
Il existait déjà les mendiants, les vendeurs ambulants et les
prostituées, qui se sont appropriés la voie publique (O. FAYE et
I. THIOUB, 2003).
Dans la ville postcoloniale, le phénomène s'est
aggravé avec les crises économiques et environnementales qui ont
touché les pays africains surtout ceux de la zone sahélienne. La
prolifération de l'informel répond donc à un besoin des
populations touchées par ces crises : « Le secteur informel
constitue une solution aux nombreux problèmes et besoins des populations
citadines» Colette Canet et Cheikh Ndiaye (FAO, 1999). Ces
occupations se font dans l'irrespect des normes urbanistiques (voire
environnementales) et du régime juridique de la voie, en
empiétant sur les emprises de cette dernière dans le
désordre et l'anarchie. (NGANAN, mémoire 2015 ; NJONA,
mémoire 2008 ; ESEA). Les occupations de la voie ne se font pas toutes
caractérisées par le secteur informel. Elles se
matérialisent « aussi par l'empiétement des
constructions des riverains, la mise en place des mobiliers urbains non
adaptés parfois non autorisés et l'implantation d'arbres
inadaptés » (NJONA, 2008 p.7).
Les dynamiques liées à la gestion et
l'occupation de la voie publique, leurs impacts sur la ville et les usages des
populations s'inscrivent dans le temps et l'espace. Cet espace public fait
objet de tentatives de contrôle par les communes, une ressource (support
d'activités) pour une partie de la population et façonne l'image
de la ville dakaroise et son ambiance (CHENAL, 2009). Le problème
d'occupation anarchique et informel se trouve être constant dans
l'évolution de la ville. Il met en conflits usagers et
responsables de la gestion de la voie : « les bana-banas ou
marchands ambulants et les petits cireurs qui racolent les touristes, sans
parler des voyous, les faux talibés qui mendient, quand ils devraient
être à l'école, les lépreux, handicapés
physiques et aliénés qui devraient être dans les
hôpitaux ou les centres médico-sociaux » disait feu L.
S. Senghor (Le Soleil, 20 janvier 1975, p. 3.).
Des dispositions sont prises dès lors pour palier
à cet « encombrement humain » (O. FAYE et I. THIOUB,
2003) telles que des sanctions à travers le Décret 76 -
018 du 16 janvier 1976 pris en application de la Loi 67 - 50
du 29 novembre 1967
29Komla Dzidzinyo GBETANOU Le commerce de la
rue et l'occupation des espaces publics à Lomé. Cas des
trottoirs. Université de Lomé - Togo - Mémoire de
Maitrise en sociologie 2010, 98p.
17
Première partie : cadre de
référence
(règlementant la vente sur la voie et dans les espaces
publics) avec appui le Code pénal mais aussi d'autres
moyens plus souples : « le pouvoir central sénégalais
décida, en accord avec les élites municipales, de construire en
1974 des échoppes au marché Sandaga, sur l'avenue William Ponty
et le long du boulevard de l'Arsenal » (O. FAYE et I. THIOUB, 2003
p.102).
La recrudescence de ces occupations s'explique selon plusieurs
facteurs. Il y a entre autres l'accessibilité des clients qui facilite
l'écoulement des produits. La rue a pour fonction principale la
circulation. A Dakar, le mode de transport le plus utilisé est la marche
à pied (70% des déplacements, EMTASUD, 2015). Cela permet aux
vendeurs d'avoir une clientèle en permanence durant les flux des
déplacements mais pas uniquement les piétons mais aussi les
automobilistes et autres personnes en déplacements. Aussi les
équipements publics (marchés, stades, etc..) constituent un lieu
de concentration de personnes et donc une opportunité pour ces acteurs.
Les occupants s'installent ainsi de plus en plus à côtés de
ces espaces.
La population résidentielle s'approvisionne aussi
grâce à ces acteurs économiques. MBEMBO Laure dans ses
recherches rapporte que 70% des enquêtés s'y approvisionne, dans
une étude menée sur l'axe de la route nationale n°1
(mémoire ESEA, 2012). A cela s'ajoute aussi une « complicité
» ou bien la mauvaise gestion des dépendances domaniales par les
acteurs des communes, dans la mesure où ils prélèvent des
taxes sur ces occupations. Ce qui signifie indirectement une autorisation
à occuper ses espaces ou un laissez-faire. C'est à l'exemple
d'une victime de déguerpissement par la Direction pour la Surveillance
et le Contrôle des Sols (DESCOS) dans le quartier Ouest Foire qui affirme
payer à hauteur de cent mille FCFA tous les mois.30 Ou encore
le paradoxe sur une voie dont 72% des occupants sont installés sans
permis mais 80% d'entre eux payent la taxe municipale (Mbembo, mémoire
ESEA 2012).
Les occupations sur la voie publique entrainent aussi des
problèmes notamment l'insalubrité, l'insécurité
mais aussi des encombrements à la mobilité réduisant ainsi
l'attractivité des lieux voire de la ville (NJONA, 2008). L'intervention
des autorités, animées par des raisons légitimes,
n'arriverait pas à bout de ce « fléau
» qui se mue au fil du temps sous l'influence des
phénomènes socioéconomiques, particulièrement la
30 Article publié sur le site Senenews le 10
novembre 2015
18
Première partie : cadre de
référence
pauvreté. Les réponses réactives
(déguerpissement par exemple) ne sont plus efficaces et la gestion,
naguère aux mains d'un pouvoir central, est maintenant une
compétence des collectivités décentralisées (suite
aux différentes réformes notamment l'Acte 1, 2 et
récemment 3). Ces dernières se trouvent elles aussi
limitées par un manque de ressources financières et humaines
(qualifiées) et finissent par s'adapter aux réalités
locales : « Il faut donc reconnaître que les usages et les
fonctions auxquels ces espaces étaient au départ destinés
sont détournés à d'autres fins, fins que la
municipalité cautionne en les considérant comme source de
rentabilité pour leur caisse laissant croire que ces occupations sont
légales » (GBETANOU, 2010). Ainsi la meilleure façon de
surmonter le problème des occupations anarchiques et illégales
est de trouver un compromis avec les usagers. Mais le phénomène
persiste toujours.
De ce qui précède, l'espace publique est un
concept polysémique, multidimensionnel et
pluridisciplinaire. Ce qui fait qu'il doit être prudemment
employé et bien défini afin d'éviter toute
ambigüité. Cette critique littéraire n'est pas exhaustive et
cela pour la simple raison de se limiter au contexte de cette recherche
précise qui s'articule autour de la gestion et aux usages de la voie
publique. Ainsi trois hypothèses31 peuvent être
formulées et ce, dans une perspective de tracer la suite de cette
recherche :
a) Les différentes dimensions de la voie publique,
notamment celle purement spatiale et l'autre idéelle
ou « a-territoriale », ne peuvent être
appréhendées différemment pour faire une analyse
pertinente d'un phénomène quelconque qui se manifeste
sur la voie ;
b) La voie publique en tant qu'espace public est en
permanence muable, change de forme et d'usages dans le temps et
l'espace. Ce qui implique que sa gestion devient complexe et multi
scalaire variant selon le contexte ;
c) « En pays du Sud, tout est dans la rue»
(Andrée Chédid, Le Liban, 1969). L'espace public dans
les villes africaines et particulièrement à Dakar constitue
d'abord un enjeu économique par lequel se diffusent des pratiques
socioculturelles, mais aussi un moyen d'intégration et
d'équité sociale pour certaines classes.
31Il ne s'agit pas des hypothèses
principales de notre recherche. Elles résument la critique de la
littérature et permettent de construire le cadre opératoire de la
recherche.
19
Première partie : cadre de
référence
Chapitre III : Cadre théorique et conceptuel
Les variables qui seront définies ou
conceptualisées sont interdépendantes : la gestion
urbaine (en insistant sur celle des espaces publics) ;
l'espace public versus voie publique et
les usages de la voie publique. D'autres sous-variables
permettront de bien recadrer l'élaboration de ce cadre conceptuel.
III.1. La gestion urbaine (des espaces publics)
III.1.1. Essai de définition
La gestion urbaine« consiste dans le management et
l'organisation du fonctionnement de services à l'usage des habitants,
des entreprises résidantes et de ceux qui fréquentent
périodiquement ou épisodiquement un territoire »
(Villes et Quartiers - G.I.E. entre la C.D.C. et l'Union Nationale
H.L.M. 2007)32. Entre manager et organiser, la
gestion relève ainsi d'une « action politique » des
autorités qui visent à assurer un accès à la ville
à tous les acteurs. C'est un défi lié à
l'accès équitable à des services de qualité pour
tous les usagers de la ville. Il faut donc prendre en compte les
diversités socioéconomiques et spatiales des territoires et de la
population.
La gestion urbaine est ainsi « la mise en oeuvre des
procédures régissant une ville en vue de la rendre fonctionnelle
et opérationnelle » (KOULGUEI, mémoire 2012). Elle est
un concept nouveau dans les pratiques de la ville (les années 1970).
« La gestion urbaine est une expression nouvellement introduite sous
l'influence des anglo-saxon. Gérer une ville c'est prendre soin,
l'administrer, l'organiser, s'assurer du bon fonctionnement, la placer sur une
trajectoire de développement, la pourvoir des moyens, instruments et
institutions nécessaires... » (TRIBILLON J.F,
2002). Cela souligne la complexité de son application et sa «
transversalité » puisqu'il s'agit de la
gestion de tout ce qui compose la ville : la politique sociale, les
dépenses d'équipement, les infrastructures et équipements
publics, la politique foncière, les finances et l'administration
municipale, de l'environnement, etc..
32Une définition proposée par David
Gabriel le Mercredi 14 novembre 2007 sur le site
http://gestion-urbaine.blogspot.sn/2007/11/definition.html
20
Première partie : cadre de
référence
Les enjeux urbains font que la gestion est un outil
incontournable pour « une ville durable ». Alors que dans le
contexte des villes africaines, assurer un service équitable de
qualité pour tous les habitants est toujours problématique. Le
contexte local de l'évolution de la ville l'explique : urbanisation
diffuse et non contrôlée, insuffisance de moyens, inégale
répartition des équipements et infrastructures (donc de
services), politiques urbaines limitées, etc..
Quant aux services qui font l'objet de la gestion urbaine, il
s'agit entre autres : de la propreté des espaces collectifs ;
l'enlèvement des déchets, des encombrants ; la conception et
l'entretien des espaces publics ; l'éclairage ; le mobilier urbain ; le
stationnement en sol ou en sous-sol, etc. (Pierre SARAGOUSSI, Politique de
la Ville et gestion urbaine -1997)33. Cette gestion varie selon
l'organisation de l'administration du territoire nationale qui détermine
les compétences de chaque entité selon les échelles. C'est
ainsi que la notion de gestion urbaine est assimilée à celle de
la gouvernance qui est : « la capacité des
sociétés humaines à se doter de systèmes de
représentation, d'institutions, de processus, de corps sociaux, pour se
gérer elles-mêmes dans un mouvement volontaire » (Pierre
Calamane et André Talmant).
En général, la gestion de la ville est une
compétence transférée aux collectivités notamment
la commune pour le cas du Sénégal. Mais cette gestion est
partagée entre différents acteurs : populations, usagers,
services déconcentrés. Quant à la ville de Dakar, elle
fait face à des défis considérables entre concentration de
populations et services qui signifie des besoins accrus mais aussi de
problèmes urbains de tout genre : la pauvreté, l'accès au
logement, l'insalubrité des rues, l'accès aux services sociaux de
base....
La gestion requiert donc une cohérence et de la rigueur
dans les stratégies et une adaptation aux réalités. «
Le management de la Ville de Dakar repose sur les valeurs fondamentales que
sont : la Participation, la Transparence, l'Equité sociale et la
Visibilité » (Document d'orientation stratégique, Ville
de Dakar date inconnue). Ce sont en effet des valeurs fondamentales,
mais leur application est du moins incertaine.
33Compte rendu du 22e l'atelier
régional sur la Politique de la Ville et gestion urbaine, tenu
le 01 juillet 1997 à Provence - Alpes - Côte d'Azur, France.
21
Première partie : cadre de
référence
III.1.2. La gestion des espaces publics
Les espaces publics (la voie publique) dans la ville de Dakar
sont gérés par les communes conformément aux textes
juridiques. C'est en termes de domaine public que le
droit sénégalais reconnaît l'espace public et ce dernier
est faiblement voire pas du tout représenté dans le code de
l'urbanisme. Il est inscrit au domaine public de l'État à travers
la Loi n°76-66 du 02 juillet 1976 portant Code du
domaine de l'État. Le domaine public est défini donc
comme l'ensemble des « biens et droits mobiliers et
immobiliers qui appartiennent à l'État et qui, en raison de leur
nature ou de la destination qui leur est donnée, ne sont pas
susceptibles d'appropriation privée » (Art. 2
du code).
Il est reparti en deux grandes catégories qui sont le
domaine public naturel et le domaine public artificiel. Le domaine public
naturel regroupe les biens qui « résultent exclusivement de
phénomènes naturels » et sont classés en domaine
public maritime, domaine public fluvial (les cours d'eau et les nappes
aquifères en général), le sous-sol et l'espace
aérien (Art. 05 du code). Quant à celui artificiel, il regroupe
au contraire « tous les bien mobiles et immobiles qui résultent
du travail humain et qui répondent aux critères de la
domanialité publique ».
Ce sont donc l'ensemble des aménagements, surtout quand
on parle d'espace public au sens physique, destinés à l'usage de
tous et qui ne sont pas susceptible d'être privatisés. Le domaine
artificiel est reparti en quatre (04) catégories : le domaine public de
circulation, le domaine public mobilier, le domaine public monumental et le
domaine public de défense nationale. Le domaine public est
inaliénable, imprescriptible et insaisissable.
La gestion de cet espace public (domaine public) varie selon
les échelles mais dépend aussi des compétences
transférées (Code des Collectivités). Pour la Ville de
Dakar et de ses communes, elles ont en charge la gestion « de la
voirie située à l'intérieur du périmètre
communal »34. Elles gèrent donc
l'ensemble des voies de communication qui sont dans son
périmètre, c'est-à-dire la conservation, l'entretien et
l'alignement de toutes les voies de communication affectées à la
circulation publique
34Art. 299 de la Loi n°2013-10 du 28
décembre 2013 portant Code des Collectivités Locales.
22
Première partie : cadre de
référence
et leur dépendance. En plus de la Loi sur le domaine de
l'État, il existe d'autres règlementations qui peuvent intervenir
dans la gestion du domaine public telles que le code de l'urbanisme, de
l'environnement, etc.
III.2. L'espace public en tant que voie publique
III.2.1. Définir l'espace public pour comprendre la
voie
publique
L'espace public est un concept polysémique et
utilisé dans plusieurs disciplines. Il est l'un des niveaux de la ville
qui met le plus d'acteurs en jeu. L'espace public est par définition
« l'espace ressortissant strictement à la sphère
publique », c'est-à-dire l'espace qui n'appartient pas
à une « personne de droit privé
»35. L'étude de cet espace est complexe en raison
de la diversité des perceptions et de ses différents usages. Il
est aussi un lieu d'échanges, lieu de protestations, d'expression, de
débat (J. Habermas, 1962) mais aussi un lieu de passage et de
circulation. On peut donc identifier deux types d'espace : un espace public
immatériel des idées, d'opinions ou d'expressions et l'espace
public physique qui est un support organisé selon des normes
précises (T. Paquot, 2009). Mais l'espace physique et immatériel
sont complémentaires.
Dans le cas de notre étude, nous nous
intéresserons à l'espace physique ou urbanistique
précisément les dynamiques liées à la gestion et
l'occupation de la voie publique. Mais une clarification conceptuelle
permettrait de bien aborder le sujet puisque la voie publique est avant tout un
espace public.
L'espace public est ainsi défini par Pierre MERLIN et
Patrice NOISETTE, dans le Dictionnaire de l'urbanisme et de
l'aménagement : « D'usage assez récent en
urbanisme, la notion d'espace public n'y fait cependant pas toujours l'objet
d'une définition rigoureuse. On peut considérer l'espace public
comme la partie du domaine public non bâti, affectée à des
usages publics ». Le concept est créé en 1962 par J.
Habermas dans son oeuvre l'espace public
(écrit en allemand puis traduit en 1978 en
français) et représente le lieu du débat public où
se forme l'opinion publique. Il est depuis utilisé dans
différents domaines principalement les sciences sociales.
35J. Lévy et
M. Lussault, Dictionnaire de la géographie et de
l'espace des sociétés, p.333.
23
Première partie : cadre de
référence
En outre Merlin et Noisette (et F. Choay dans la
dernière édition) vont plus loin pour spécifier cet espace
public « En tant que composé d'espaces ouverts, ou
extérieurs, l'espace public s'oppose, au sein du domaine public, aux
édifices publics. Mais il comporte aussi bien des espaces
minéraux (rues, places, boulevards, passages couverts) que des espaces
verts (parcs, jardins publics, squares, cimetières...) ou des espaces
plantés (mails, cours...) ». Et à Roger
Brunet36 d'ajouter : « Étendue ouverte au public et
entretenue ou équipée à cette fin : place, espace vert,
jardin, square, promenade, parc ».
Image n°1 : Illustration des
différents types d'espace
Source :
http://unt.unice.fr/uoh/espaces-publics-places/lappropriation-de-lespace/
Ce qui caractérise l'espace public est donc son
statut public. Ainsi il se différencie de
l'espace privé ou commun le premier étant « l'espace
appartenant à une personne morale de droit privé »
où l'accès au public est restreint ; et le second «
l'ensemble des espaces possibles de la pratique sociale des individus
». Tout se joue donc d'une part sur l'accessibilité
et d'autre part l'extimité37. Il s'agit donc de
trouver une limite entre
36Brunet, Roger, 1992, Les mots de la
géographie, Paris, Reclus/La Documentation française, p. 81.
37 Par opposition à l'intime, elle
représente la part d'intimité volontairement rendu
public.
www.larouuse.fr
24
Première partie : cadre de
référence
ce qui relève du public ou du privé et dans quel
espace. Dans ce contexte l'espace est défini comme « l'espace
accessible à tous » ayant la capacité de «
résumer la diversité des populations et des fonctions d'une
société urbaine dans son ensemble »38. Cet
espace devient possible « du moment où ceux qui s'y trouvent
peuvent et doivent penser que tous les autres membres de la
société pourraient l'y côtoyer »39 et
que ces membres doivent « s'unir aux autres sans tomber dans la
compulsion de l'intimité » (G. Simmel et R. Sennett, 1995).
Le débat se poursuit sur la nature de certains espaces
de droit privé mais accessibles au public(centres commerciaux, gares,
certains moyens de transport collectif). Existent aussi d'autres espaces dits
« intermédiaires » qui servent de pont entre l'espace
public et privé : « espace privatif, un espace
réservé à l'usage d'un particulier sans lui appartenir ;
espace collectif ou espace semi-public réservé à un usage
de voisinage » (P. Merlin et F. Choay, p. 318). Mais cela ne place
à aucune ambigüité, l'espace public à travers ses
caractéristiques se distingue de ces types d'espace.
Tableau n°1 :
Caractéristiques des différents types espaces
Extime/intime Accessibilité
|
Espace sociétal
|
Espace collectif
|
Espace individuel
|
Espace
communautaire
|
Accès libre
|
Domaine public : rues,
parcs...
|
-
|
-
|
-
|
Accès normé
|
Domaine semi-public : gares, transports publics,
cafés...
|
Entrée d'immeuble, « résidence
»
|
-
|
Quartiers traditionnels, quartiers ethniques...
|
Accès restreint
|
Domaine semi-privé : taxis,
|
Parties communes d'immeubles
|
Zones tampons entre individus, poste de
|
Lieux de culte
|
38J. Levy et M. Lussault, dictionnaire de la
géographie p.336 39Ibid. p.337
25
Première partie : cadre de
référence
|
boutiques, cinémas...
|
, rues privées
|
travail, jardins privés
|
|
Accès réservé
|
-
|
Lieux de travail, clubs
|
Espace privé : logements, automobiles
|
Lotissements fermés, « gated
communities40 »
|
Source : J. Levy et M. Lussault,
dictionnaire de la géographie, p.338
Ces définitions se limitent à l'espace
urbanistique dans sa dimension architecturale. En comparant cet espace à
celui proposé par Habermas, l'espace public prend une autre connotation
: « au singulier, l'espace public est le concept défini par
Jürgen Habermas comme lieu symbolique où se forme l'opinion
publique. Au pluriel, les espaces publics désignent les lieux physiques,
quel que soit leur statut juridique (public ou privé), dans lesquels le
public peut circuler ou stationner ». (Thierry Paquot,
L'espace public, 2009)
L'espace public est donc un carrefour, un endroit du commun et
pour tous. En milieu urbain, l'espace public reflète l'image de la
ville. La définition que nous retenons de l'espace public est la
suivante : c'est l'ensemble des places, des jardins ou espaces
verts, des voies publiques ou la rue ; où les acteurs de la ville sont
en interactions en permanence et donnent une identité à la
ville. L'accent porte sur l'espace physique sans l'isoler de ses
pratiques et usages dans le temps.
III.2.2. La voie publique : de la voirie à la
rue
La voie est un « espace aménagé pour se
déplacer en ville (voie urbaine), entre les localités ou en
milieu rural (routes) » (P. Merlin et F. Choay, dictionnaire de
l'urbanisme p.829). La voie publique quant à elle, est par
définition une voirie. Cette dernière est à la fois :
« l'ensemble des voies de circulation (le réseau routier :
routes, chemins, rues, etc.) avec leurs dépendances et la nature et la
structure de ces voies (voie unique, 2 x 2 voies, etc.)
»41. La voie publique a donc pour fonction première
la circulation des biens et personnes.
40On peut définir
les Gated communities comme « des
quartiers résidentiels dont l'accès est contrôlé,
interdit aux non-résidents, où l'espace public (rue, trottoirs,
parcs) est privatisé » Renaud Le Goix La dimension
territoriale des Gated communities aux États Unis ; 2003.
41 P. Merlin et F. Choay,
dictionnaires de l'urbanisme et Yann Picand, Dominique Dutoit In.
http://dictionnaire.sensagent.com/voirie/fr-fr/
Première partie : cadre de
référence
Quelques vocabulaires 42 propres à la route
qui est définie comme « une voie carrossable destinée
à la liaison entre les localités et à la desserte des
zones rurale » :
- L'emprise est la
propriété foncière (cadastre) affectée par le
gestionnaire à un usage routier ; il inclut la route elle-même et
ses dépendances (aire de stationnement).
- L'assiette est la partie de
l'emprise réellement utilisée par la route (incluant les talus).
Les terrains inutilisés sont qualifiés de
délaissés.
- La chaussée est la partie
revêtue qui est destinée à la circulation. Elle peut
être divisée en plusieurs voies de circulation.
- Les accotements et l'éventuel terre-plein
central bordent la ou les chaussées. Les dispositifs de
sécurité (glissières, séparateurs) y sont
implantés ; ils sont séparés de la chaussée par des
bandes dérasées destinées à prendre en compte
l'effet psychologique de mur qui conduit les automobilistes à s'en
écarter. Sur voies rapides, la bande dérasée de droite est
généralement élargie et revêtue pour constituer une
bande d'arrêt.
- La berme est la partie
d'accotement qui assure la jonction avec le fossé ou le talus. Le
terre-plein central peut être interrompu à certains endroits pour
ouvrir la circulation sur l'autre voie, on parle d'Interruption du terre-plein
central (ITPC).
- La bande de roulement se mesure
entre dispositifs de sécurité. Elle comprend donc la
chaussée et les bandes dérasées le cas
échéant.
- Enfin, la plate-forme réunit
accotements, chaussées et terre-plein central
26
42Yann Picand, Dominique Dutoit.
27
Première partie : cadre de
référence
Image n°2 :
Caractéristique d'une voie
Source :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Travers_chaussee.png
Il existe différents types de voie dont chacune
répond à une fonction précise (voie rapide, rue
piétonne, etc.), mais aussi selon la personne qui l'emploie
(ingénieurs de la circulation, aménageurs, urbanistes). En
définitive, la voie peut être caractérisée suivant
ces trois (03) niveaux : la voie primaire assure la
liaison entre agglomérations ou quartiers ; la voie
secondaire destinée à la circulation interne des
quartiers et la voie tertiaire qui dessert les
bâtiments.
Dans la littérature le terme rue
est utilisé pour analyser la voie publique, du moins par
rapport à ses usages. Littéralement, cette dernière du
latin ruga, désigne une « voie
bordée de maisons ou de murailles dans une ville ou un village
». (P. Merlin et F. Choay in. Dictionnaire de l'urbanisme).
La rue fait partie de la voirie et de ce fait est un espace de circulation qui
« dessert des logements et autres structures fonctionnelles
» (
www.wikipédia.com)
dans une ville. Elle se distingue des autres voies (boulevards, cours,
allées...) « par sa relative faible largeur notamment, et par
l'absence de contre-allées ». À une échelle
réduite, elle représente un enjeu social. La rue devient un
« lieu de rencontres et d'échange (notamment par les commerces)
où s'exerce et se construit la sociabilité des individus et des
groupes sociaux » et considérée par définition
comme un espace public.
28
Première partie : cadre de
référence
Quelques caractéristiques de la rue :
? une rue particulièrement étroite peut être
qualifiée de ruelle ;
? Une rue ne possédant qu'un point d'entrée est
une impasse ou un cul-de-sac
; ? La (ou les) voie(s) permettant d'accéder à
l'entrée d'une rue sont ses tenants ; ? la (ou
les) voie(s) situées à l'autre extrémité de la rue
sont ses aboutissants.
La rue est une voie publique prise dans son cadre fonctionnel,
du moins dans notre d'étude. L'aspect architectural est certes pris en
compte. En d'autres termes qu'est ce qui se passe sur la voie publique ?
Quelles sont ses usages ? Et par qui ? Etc. Ce qui signifie que la rue ne se
limite pas au bitume ou à la chaussé, elle est transformée
instantanément par des pratiques de la population : « les
pratiques citadines font de la rue un micro-espace complexe, avec des
trajectoires, des vitesses, des temporalités multiples. La nature
même de la rue est de mélanger les gens et les activités,
de changer avec le temps, dans la journée, dans la semaine ou encore
dans la longue durée ». (A. Fleury, 2004 p.35). De ce fait,
pour une analyse soutenue de la ville, les différents aspects de la rue
sont indispensables. Ce qui se passe sur et dans la rue définit sa
nature et ses fonctions.
La conception actuelle de la rue s'inscrit dans le temps. Un
rappel historique de son évolution peut justifier sa forme et ses
fonctions actuelles d'autant plus que son « évolution
morphologique est fonctionnelle ; elle a suivi celle des sociétés
et des techniques ».En d'autres termes « les étapes
de son histoire coïncident avec celles de l'histoire des villes et de
l'urbanisation » (P. Merlin et F. Choay, dictionnaire de
l'urbanisme, p.692).Le monde occidental sera comme référence
et reparti en quatre périodes majeures (ibid. p.692 - 693) :
- La rue « spécialisée »
du XVe siècle ne dissociant logements et travail
caractérise la vie urbaine entre échanges,
fêtes et marchés (J. Hillairet, La rue Saint-Antoine,
1970) ;
- L'époque de la Renaissance (XVe et
début XVIe siècle) des rues «
programmées » où l'évolution des
fonctions de la rue répondait aux normes techniques (défense
militaire, circulation en carrosse) et de l'esthétique ;
29
Première partie : cadre de
référence
- L'élargissement des rues, la construction de
nouvelles plus larges pour
s'adapter aux conditions de l'ère industrielle et
répondre à « l'hypertrophie » de la
circulation ; ont marqué la deuxième partie du XIXe
siècle ;
- L'invention de l'automobile place la rue dans un nouvel
contexte au XXe siècle. La problématique qui se pose
c'est le partage de la rue entre piéton et automobile. La configuration
de la rue par cette dernière est devenue l'objet de plusieurs critiques
notamment de la part des CIAM 43 , particulièrement le
Corbusier : « la rue corridor à deux trottoirs,
étouffée entre de hautes maisons doit disparaître
» (Le Corbusier, 1925).
La rue a ainsi évolué dans le monde occidental.
Étudiée sous ses divers aspects (sa forme, Gourdon 2001 ; son
esthétique, Coblence 1998 ; par les interactions entre les individus,
Joseph, 1984 et Leménorel, 1994 ; ou encore par l'histoire, Nicaulaud
1995), elle n'a « jamais fait autant l'objet de recherches en sciences
sociales » (A. Fleury, 2004 p.33). En urbanisme, le concept a pris de
l'ampleur dans les 1970 avec l'émergence de l'espace public.
Dans ce processus, la circulation a tenu une place primordiale.
Aujourd'hui un enjeu dans l'aménagement de toute voie, celle
piétonne fait son retour et occupe une place centrale dans les
politiques.
La tradition occidentale a sans doute marqué
l'évolution du concept. Mais il faudrait analyser chaque rue
relativement par rapport à son contexte, puisque « les
pratiques et les représentations de la rue dépendent de l'espace
urbain dans lequel celle-ci s'inscrit, à plusieurs échelles.
Elles dépendent donc aussi de la région ou du pays dans lesquels
la ville se situe : si la forme « rue » se retrouve dans de nombreux
contextes culturels, son sens peut varier considérablement »
(Ibid. p.42). C'est aussi une question de perception en paraphrasant
ainsi Balzac : « il existe
des rues nobles, puis des rues simplement honnêtes
(...) ; puis des rues assassines, des rues plus vieilles que de vieilles
douairières ne sont vieilles, des rues estimables, des rues toujours
propres, des rues toujours sales, des rues ouvrières, travailleuses,
mercantiles... (Balzac, 1988 p. 77).
43 Congrès Internationaux
d'Architecture Moderne sont nés du besoin de promouvoir une architecture
et un urbanisme fonctionnels. La première rencontre eut lieu en 1928,
à La Sarraz (Suisse), et Le Corbusier y joua un rôle important. Le
dernier congrès "officiel" des CIAM, le 10e du nom, eut lieu à
Dubrovnik en 1956.
30
Première partie : cadre de
référence
III.3. Les usages de la voie publique : une
diversité d'acteurs autour d'un seul lieu
L'histoire d'une rue « commence au ras du sol, avec
des pas » dont les jeux sont « façonnages d'espaces
» (Certeau, 1980). L'usage est
défini selon le Dictionnaire Larousse comme une : «
destination, fonction de quelque chose, emploi qu'on peut en faire
» ou encore une « pratique habituellement observée
dans un groupe, dans une société ; coutume ». Quant au
dictionnaire de droit en ligne de Serge Braudo44 (qui
définit le mot au pluriel), les usages «
sont des règles non écrites suivies par les habitants de
certaines régions ou par des personnes exerçant des professions
déterminées qu'ils considèrent obligatoires pour
régler leurs rapports ». Les acteurs sont déterminants
dans ce processus de transformation de la voie publique. Ils proviennent de
différents endroits, ont de profils distincts et utilisent la voie
à de fins particulières. Ce qui conduit à des
perceptions variées de l'espace.
La perception qui est un acte de
percevoir en encore son résultat, se définit comme une «
opération psychologique complexe par laquelle l'esprit, en
organisant les données sensorielles, se forme une représentation
des objets extérieurs et prend connaissance du réel
»45. C'est un processus par lequel un individu se
crée le dessein d'une chose ou d'un lieu. Il est aussi
considéré comme étant une « activité
à la fois sensorielle et cognitive par laquelle l'individu constitue sa
représentation intérieure (son image mentale) du monde de son
expérience » J. Levy et M. Lussault, dictionnaire de la
géographie et de l'espace des sociétés. Cela fait
appel à une capacité mentale d'interprétation des
réalités qui nous entourent.
La perception de la voie publique est donc une
représentation de l'espace (construction
mentale et/ou objectale figurant un espace géographique). Un autre
concept vient compléter le tableau : l'espace
vécu. Il désigne « l'espace tel qu'il est
perçu et pratiqué par les être qui y vivent ».
Ces différents concepts se résument en un seul : la
spatialité. C'est l'ensemble des «
caractéristiques de la dimension spatiale d'une
réalité sociale » ou encore « des actions
spatiales réalisées par les opérateurs d'une
société ». (Levy et Lussault). Les usages de la rue ou
la voie s'inscrivent dans
44
http://www.dictionnaire-juridique.com/definition/usages.php
45Définition donnée par le Centre Nation
de Ressources Textuelles et Lexicales (France)
www.cnrtl.fr
31
Première partie : cadre de
référence
un processus de spatialité dans son sens où il
est aussi une « réalité construite dans l'action
spatiale et qui signifie quelque(s) chose(s) pour quelqu'un, pour un acteur
».
Parmi les acteurs de la voie publique, il existe en
général quatre (04) catégories, les trois premiers
étant les plus dominants (Bassand et al. 2001) :
- Les acteurs économiques : Ce sont
principalement les entreprises et les propriétaires fonciers riverains
des espaces publics. Ils sont les instigateurs premiers de leur dynamique ;
- Les acteurs politiques : Ils peuvent appartenir aux
institutions communales, cantonales, fédérales. Ils accompagnent
ou contestent les décisions des premiers ;
- Les professionnels de l'espace (architectes, urbanistes)
: Ils accompagnent les deux premiers ;
- Et les usagers : Il s'agit d'acteurs très
complexes. Leurs attitudes et leurs pratiques des espaces publics varient selon
qu'ils sont hommes ou femmes, jeunes ou vieux....
Les usagers et les acteurs jouent particulièrement un
rôle considérable au niveau des usages de la voie. C'est pour dire
que « ce n'est pas le seul régime juridique de la
propriété du sol qui décide de la destination d'un
terrain, mais les pratiques, les usages et les représentations qu'il
assure ».
Après ces différentes conceptualisations, trois
usages de la voie peuvent être recensés dont leurs relations ne
sont pas « stables » (Eric Dacheux, 2008) :
- Usages politiques : ce sont d'une part les
interventions des pouvoirs pour la « normalisation de l'espace
». C'est le cadre de « la mise en scène et la mise en
sens », qui institue le social (Lefort, 1986, p. 256-258). Il s'agit
ainsi de « la construction de la norme ». D'autre part, la
politique dans sa définition de « gestion de la
cité » cela devient un espace de lutte pour les revendications
(de la population), un espace de protestation ;
- Usages économiques : c'est le cadre «
de la mise en valeur des ressources. Pour survivre et s'épanouir,
les sociétés humaines organisent la production, la circulation et
la consommation des ressources naturelles (faune, flore, etc.),
humaines
32
Première partie : cadre de
référence
et artificielles (objets, savoirs scientifiques, etc.)
» (Eric Dacheux, 2008). L'usage économique est donc un usage
par nécessité ;
- Usages sociaux ou « symboliques
» : « le symbolique, c'est ce qui donne sens
à la société. Plus précisément, le
symbolique est la société qui se comprend elle-même, qui
prend conscience d'elle-même. Le symbolique est la réalité
sociale telle que nous la percevons. Mais si le symbolique fonde un ordre
propre, c'est que les symboles ne renvoient pas uniquement à un
référent, mais s'articulent les uns aux autres dans un
réseau complexe de significations ». L'usage symbolique peut
concerner tous les acteurs qui pratiquent dans la rue.
33
Première partie : cadre de
référence
Chapitre IV : Cadre opératoire
IV.1. Objectif général de la
recherche
L'étude que nous menons a pour objectif principal de :
étudier les modalités de gestion de la voie publique
et les dynamiques d'occupation de la voie publique dans les Communes de Ouakam
et Mermoz Sacré-Coeur. La problématique et la
littérature, en tant cadre justificatif, ont démontré
l'intérêt du sujet. Pour mieux le cerner, l'objectif
général est éclaté en plusieurs objectifs
spécifiques.
IV.1.1. Les objectifs spécifiques de la
recherche
Ce sont entre autres :
a) Identifier les
caractéristiques des occupants, les types et les modes d'occupation sur
la voie publique;
b) Analyser les modalités
administratives liées à l'occupation de ces espaces ;
c) Identifier les effets des
occupations sur le cadre de vie des populations;
d) Déterminer la perception des
populations sur les usages de la voie publique.
Ces différents objectifs permettront
d'analyser et comprendre la
problématique liée à l'occupation et la gestion de
la voie publique dans ces communes en particulier et dans la Ville de
Dakar en général.
IV.2. Question générale de la
recherche
La question générale de notre recherche est la
suivante : quelles sont les modalités liées à
la gestion et à l'occupation de la voie publique dans la commune de
Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur ?
34
Première partie : cadre de
référence
IV.2.1. Questions spécifiques de la recherche
Les questions spécifiques sont au nombre de trois (03).
Elles interrogent les objectifs afin de leur apporter une réponse
adéquate.
QS1 : Les caractéristiques des
occupants déterminent-elles les types d'occupation de la voie publique
dans les communes de Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur ?
QS2 : Les procédures pour l'octroi
d'une autorisation d'occupation sur la voie publique dans la commune de Ouakam
et de Mermoz Sacré-Coeur prennent-elles en comptes des normes
urbanistiques ?
QS3 : Les nuisances des occupations
influencent-elles la perception que les populations ont de la voie publique
?
IV.3. Hypothèse générale de la
recherche
A partir de ce qui précède nous pouvons affirmer
que : la problématique de l'occupation et de la gestion de la voie
publique dans les communes de Ouakam et Mermoz Sacré-Coeur peuvent
est liée au laxisme des municipalité.
IV.3.1. Hypothèses spécifiques de la
recherche
HS1 : Les caractéristiques des
occupants déterminent les modes d'occupation sur la voie publique.
HS2 : Les procédures d'autorisation se
font plutôt selon un standard défini par les acteurs de la commune
selon la nature domaniale du lieu.
HS3 : La perception que les populations ont
de la voie publique et de ses usages est relative au niveau de nuisance de ces
derniers sur leur cadre de vie.
35
Première partie : cadre de
référence
Tableau n°2 : Opérationnalisation de
variables
Hypothèses
|
Variables
|
Indicateurs
|
ues des
Les caractéristiques
occupants déterminent leur mode
d'occupation de la voie publique.
|
Caractéristiques des
occupants
|
· Genre
· Origine
· Niveau d'instruction
· Profession
· Connaissance des normes liées à
l'occupation voie
· Perception de la voie
|
|
· Type d'activité
· Mode de construction
· Permis d'occupation
|
Les procédures d'autorisation se font selon
un standard défini
les acteurs de la commune
|
Les procédures · d'autorisation
· par Redevance
|
· Dossier à fournir
· Étapes de l'instruction du dossier
Délai
· Taxes par rapport au type de voie
|
|
· La nature des installations
· La superficie occupée
· Durée d'occupation
|
La perception que les populations ont de la voie
publique et de ses usages est relative au niveau de nuisance de ces
derniers
|
La perception des populations
|
· Niveau de connaissance des vocations de la voie
· Appréciation des usages
· Niveau d'appropriation
|
|
· La pollution sonore
· La production des déchets
· Appréciation de la population
· Niveau d'impact sur la mobilité
|
|
36
DEUXIÈMEPARTIE
ADRE DE L'ÉTUDE ET
METHODOLOGIE
« Il faut lier la construction sociale à la
construction de l'espace » Nicolas Soulier, "Reconquérir
les rues" 2012 p.104.
37
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Chapitre I : Cadre de l'étude
I.1. Présentation de la Ville de Dakar
Nous sommes dans la ville de Dakar, ville fondée en
1857 par Pinet-Laprade. Située sur la presqu'île du Cap Vert, elle
est en même temps la capitale de la République du
Sénégal, la capitale de la région de Dakar et le chef-lieu
du département de Dakar. Dakar est l'une des quatre (04) communes
historiques (Saint Louis, Gorée, Rufisque et Dakar) du
Sénégal. La zone d'étude constitue les deux communes de
Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur, qui font parties des 19 communes de la
Ville de Dakar. Précisément, le terrain d'étude est la
voie publique et cette dernière est fréquentée par toute
la population de la ville de Dakar voire de la région ou plus. De ce
fait, avant de faire la présentation de deux communes, une
présentation de la Ville de Dakar ou du moins ce qui est en relation
avec l'objet d'étude, sera faite pour mieux intégrer le cadre
d'étude.
Carte n°1 : Les 19 communes
de la Ville de Dakar
Le processus d'urbanisation de Dakar s'est effectué de
la zone du port vers le Nord (périphérie). Au fur et à
mesure des équipements et infrastructures furent réalisés
: le port, la gare ferroviaire, le marché Kermel, la place Protêt
(actuelle place de l'indépendance), éclairage public et
égouts, etc. La ville s'étend ainsi dans le temps
38
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
et dans l'espace, par la création des quartiers
aménagés et lotis ou une occupation non contrôlée du
sol par la population (provenant des zones rurales ou c'est la population
expulsée des zones urbanisée), entrainant ainsi une
urbanisation de la région toute entière. L'urbanisation de la
zone de Ouakam et de Mermoz quant à elle, s'inscrit dans les
années 1970 à 1980 (zone encerclée en rouge) comme le
montre la carte ci-dessous.
Carte n°2 : Occupation
de l'espace dans la région de Dakar depuis 1978
Aujourd'hui la région est la plus peuplée du
pays avec 3 137 196 habitants, soit près du quart de la population
nationale (23,2%) sur une superficie représentant 0,3% de la superficie
totale du pays. Ce qui donne une densité de 5 704 personnes/km2. La
population est majoritairement urbaine avec un taux d'urbanisation de 96%,
regroupant ainsi presque la moitié de la population urbaine du pays
(49,6%). Le Département de Dakar quant à lui est le
deuxième territoire le plus peuplé avec 1 146 053 individus, soit
36,5% ; après celui de Pikine (1 170 791 habitants, soit 37,3%). Au
niveau des communes, la population est inégalement répartie. Cela
s'explique par la configuration de la ville et son urbanisation complexe qui
ont conduit plus ou moins à un zonage du territoire : zone
résidentielle (Mermoz, Almadies, Liberté), zone
39
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
industrielle (Colobane, zone du Port), zone administrative
(Dakar Plateau), zone dortoir (Yoff, Parcelles Assainies), etc.
Carte n°3 :
Répartition de la population de Dakar
Les communes de Grand Yoff et Parcelles Assainies sont les
plus peuplées de la ville avec respectivement 185 503 hbts et 159 498
hbts. Entre ces zones, s'effectues des échanges dans une logique de flux
permanant entre des points émetteurs et d'autres récepteurs. Ce
flux est caractérisé par le niveau d'équipements et
infrastructures de chaque zone et de son accessibilité. La
fréquence varie dans le temps et l'espace.
Les communes de Ouakam et Mermoz Sacré-Coeur ont-elles
aussi respectivement 74 692 hbts et 28 798 hbts. Cette inégale
répartition est une conséquence du processus d'occupation du sol.
En effet, la zone de la commune de Mermoz fut aménagée dans le
cadre des politiques de construction de logement de la SICAP. L'occupation du
sol est donc organisée avec des habitats de standing moyen et
élevé. Par contre, la commune de Ouakam abritait
déjà un village Lébou. Ce denier s'est urbanisé
dans des conditions de précarité voire une occupation anarchique
du sol. En plus, le type d'habitat correspond à un niveau
économique moins élevé (souvent avec un grand
ménage). Ainsi la zone se densifie dans ces conditions de
précarité. Cette situation peut avoir des effets sur les
modalités d'occupation de la voie publique dans les deux communes.
40
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Carte n°4 : Exemple de flux
dans la Ville de Dakar
Au niveau des activités, Dakar a une population active
de 53, 2 % (ANSD. EPSFII 2011) supérieure aux autres villes du pays
(49%). Par contre 23,7% de cette population est au chômage (18, 8 % pour
les autres villes). De ce fait pour trouver de l'emploi cette dernière
doit être mobile étant donné que la non mobilité
peut être une cause de pauvreté (Monique, 2010). Et dans la ville
de Dakar, nous avons 8 824 792 déplacements quotidiens
(Enquête EMTSU-2000/2001) de motifs variés.
Les différents flux sont plus concentrés vers
le centre-ville de Dakar. Car cette zone, grâce à ses
équipements et infrastructures, concentre presque tous les
activités et services et exerce ainsi une forte polarisation sur les
autres territoires. Par contre, il existe d'autres zones qui exercent une
polarisation et attirent un flux considérable. C'est le cas de la zone
de Liberté ou encore Mermoz Sacré-Coeur.
La capacité polarisatrice de la région de Dakar
a été favorisée par la densité du réseau
routier du pays. Celui-ci favorise les liaisons verticales nécessaires
à l'économie d'exportation. Ainsi, 75% des trajets
intérieurs de marchandises ont pour origine ou pour destination Dakar
(France Volontaires, octobre 2010). Parmi ces infrastructures, il y a les
routes qui facilitent l'accès à la ville. Dans la ville de Dakar,
il en existe beaucoup et de toutes les catégories (primaire, secondaire
et tertiaire). Quant à la qualité de ces voies, elles sont pour
la plupart aménagées et bitumées : la voirie urbaine
domine avec 382 km (76,1% de l'ensemble de la région) ; la
catégorie « nationale »
41
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
avec 73 km et la catégorie «
départementale » très peu développée avec 11
km (Rapport sur la situation économique et sociale régionale de
Dakar de2013, ANSD avril 2015). Chacune de ces catégories joue un
rôle spécifique dans les flux de la ville et
l'accessibilité des différentes zones.
Figure n°1 : Les types de
routes
Source : Ageroute, 2013
La ville de Dakar est marquée une dynamique complexe
en plus de ces quelques caractéristiques. Ceux-ci permettent de mieux
intégrer les dynamiques de la ville à une échelle plus
réduite puisque la ville est un système dont les
différents éléments sont en interactions permanente.
I.2. La présentation des communes de Ouakam et
de Mermoz
Sacré-Coeur
La commune de Ouakam et celle de Mermoz sont voisines mais
n'ont pas les mêmes caractéristiques. Toutes les deux ont
été créés suite au découpage administratif
de 1996 en tant Commune d'Arrondissement de la Ville de Dakar. Elles sont
ensuite été érigées en Commune de plein exercice
après la réforme de 2013 notamment la Loi n° 2013-10
du 28 décembre 2013 portant Code général des
Collectivités locales. Ce sont donc des entités ayant leur propre
autorité - le Maire - élue et des compétences
particulières. Dans le cadre de la gestion urbaine, les communes ont
pour compétences par exemple :
- Les modalités d'exercice de tout droit d'usage pouvant
s'exercer à l'intérieur
du périmètre communal, sous réserve des
exceptions prévues par la loi ;
42
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
- Le plan général d'occupation des sols, les
projets d'aménagement, de
lotissement, d'équipement des périmètres
affectés à l'habitation, ainsi que l'autorisation d'installation
d'habitations ou de campements ;
- L'affectation et la désaffectation des terres du
domaine national ;
- La création, la modification ou la suppression des
foires et marchés ;
- L'acceptation ou le refus des dons et legs ;
- Le budget de la commune, les crédits
supplémentaires ainsi que toutes
modifications du budget ;
- Les projets locaux et la participation de la commune à
leur financement ;
- Les projets d'investissement humain ;
- Les acquisitions immobilières et mobilières, les
projets, plans, devis et
contrats de constructions neuves, de reconstructions, de grosses
réparations ou de tous autres investissements ;
- Le classement, le reclassement, l'ouverture, le redressement,
l'alignement,
le prolongement, l'élargissement ou la suppression des
voies et places publiques ainsi que l'établissement,
l'amélioration, l'entretien des pistes et chemins non classés
;
- etc.
43
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Carte n°5 : Situation
géographique des deux communes
I.2.1. La commune de Ouakam, l'ancien village des
pécheurs lébous face aux défis de l'urbanisation
Ouakam est un ancien village Lébou devenu une banlieue
résidentielle de Dakar. Il est situé en bord de mer et
était dirigé par un Jaraaf, de la lignée des GUEYE. La
commune de Ouakam se délimité au :
- Nord : le tracé sud du mur l'aéroport
jusqu'à la VDN ;
- Sud-ouest : de la côte en suivant le littoral de la baie
de Ouakam jusqu'à la
transversale du mur de l'aéroport en bordure de la route
de Ngor ;
- Et enfin à l'Est par la VDN entre ses intersections
avec la route de du Front de
Terre et la route de la Pyrotechnie et cette dernière
jusqu'à la côte en passant par la Stèle Mermoz (à la
limite de la commune de Mermoz Sacré-Coeur).
L'économie de la localité était fortement
basée sur la pêche. Avec une population de 74 692 (RGPH, 2013)
hbts dont 50,2 % de femmes, elle dispose aujourd'hui d'équipements et
infrastructures stratégiques tels que le marché, le Monument de
la
44
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Renaissance, le lycée Jean Mermoz ou encore
l'Hôpital militaire. Parmi ces équipements, le marché,
constitue l'un des plus importants équipements de la Ville de Dakar. De
ce fait le commerce et l'artisanat constitue une part considérable dans
l'économie locale. Son tourisme est avantagé par le Monument de
la Renaissance qui est aujourd'hui un symbole continental.
Située au pied des collines des mamelles, la commune
dispose aussi de deux plages aux vagues tant admirées par les surfeurs,
des camps militaires et bénéficie des voies de dessertes assez
bien aménagées telles que la VDN, la corniche etc.
I.2.2. La commune de Mermoz Sacré-Coeur, le
quartier tie
résidence devenu commune de plein
exercice
Peuplée de 28 798 hbts (RGPH 2013), la commune de
Mermoz fut au départ construit dans le cadre du programme de logement de
la société immobilière Sicap depuis 1953. Les quartiers
suivants sont successivement construit dans ce cadre : les cités Karack,
Baobab, Amitié III, Mermoz, Fenêtre Mermoz, Sacré-Coeur, II
et III. Elle est délimitée :
- au Nord : de l'intersection de la rue qui sépare
Liberté IV du Sacré-Coeur, la rue qui limite Sacré-Coeur
1, 2 et 3 jusqu'à l'ancienne piste en travers. La VDN jusqu'à son
débouché sur la route de Ouakam, puis celle-ci jusqu'au mur du
camp des Mariés de la Gendarmerie ;
- au Sud : par la partie de la Corniche Ouest qui rejoint la
Stèle Mermoz, puis l'avenue Cheikh Anta Diop, de la Stèle Mermoz
à son intersection avec l'avenue Bourguiba. L'avenue Bourguiba de son
intersection avec l'avenue Cheikh Anta Diop, à son intersection avec le
Boulevard Dial Diop. Le Boulevard Dial Diop, de son intersection avec l'avenue
Bourguiba et la rue 12, puis la rue 12 jusqu'à la rue séparant
Liberté IV et Sacré-Coeur ;
- à l'Est : la rue séparant Liberté IV
et Sacré-Coeur, de son intersection avec la rue 12qui limite
Sacré-Coeur 1, 2 et 3 et qui mène à l'ancienne piste ;
- Et enfin à l'Ouest : Le littoral compris entre le
prolongement sur la mer de la Corniche Ouest à partir de la Stèle
Mermoz et le prolongement sur la mer du mur du Camp des Mariés de la
Gendarmerie.
45
Deuxième partie : cadre de
l'étude et méthodologie
Contrairement à Ouakam, Mermoz ne dispose pas de
marché ou d'autres équipements d'envergure. Elle regroupe
plusieurs quartiers à usage d'habitation avec des stands de moyen et
haut niveau, bien lotit dont l'accessibilité est limitée à
une classe plus ou moins nantie.
Tableau n°3 :
Présentation de quelques quartiers de Mermoz
Quartiers
|
Construction
|
Surface
|
Logements
|
Karack
|
1953
|
5 ha
|
262
|
Baobabs
|
Entre 1954 et 1957
|
20 ha 50
|
899
|
Amitié !!!
|
1969
|
14 ha
|
468
|
Mermoz
|
1972
|
20 ha
|
706
|
Fenêtre Mermoz
|
1979
|
18 ha
|
163
|
Sacré-Coeur !
|
1979
|
26 ha
|
250
|
Sacré-Coeur II + extension + 1, 2, 3 et
4
|
Entre 1983 et 1991
|
10 ha 4543
|
424
|
Sacré-Coeur III
|
De 1991 à 1999
|
60 ha
|
1239
|
|
Source :
http://www.mermozsacrecoeur.org/mermoz-sacre-coeur/
Il faut aussi souligner qu'il existe d'autres cités
telles qu'à Karack (4 blocs de 84 logements au total construits en 1953
et à Baobabs (13 blocs de 202 logements au total construits en 1954) et
non structurés. A cela s'ajoute la nouvelle cité de Keur Gorgui
dans la zone de Sacré-Coeur III. Durant ces dernières
années (à partir de 2006, 2007), cette partie de la ville
connaît un nouvel dynamisme. Dakar Plateau est à sa limite de
concentration poussant ainsi les différents services à choisir
une nouvelle zone accessible. C'est ainsi que Mermoz Sacré-Coeur est
investi par ces services offrant un cadre propice à l'instar de la
Cité Keur Gorgui qui « accueille beaucoup de ministères
comme le celui de l'Élevage et des Productions animales, du Renouveau
urbain, de l'Habitat et du Cadre de vie et d'autres structures qui y ont
délocalisé leur siège à l'image de la
Société nationale de télécommunication (Sonatel).
» (
www.leral.net).
L'économie de la zone est basée ainsi sur les services, le
commerce - de boutiques - mais aussi d'autres types de commerce (superettes
à l'instar de Elton, super marché comme City Dia , ou le commerce
dans la rue tel que la vente de véhicules).
46
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
I.3. L'urbanisation de ces deux communes sous
l'influence des équipements structurants
L'urbanisation de la Ville de Dakar est en
général marquée par une forte pression
démographique et une concentration des équipements et services.
La ville devient ainsi hypertrophiée et finit
par se positionner dans une situation de macrocéphalie.
A l'intérieur de la ville, cette urbanisation est
caractérisée par une occupation du sol de diverses
manières selon la nature de la zone (irrégulière ou non
irrégulière).
Les communes de Ouakam et surtout de Mermoz présentent
ces caractéristiques d'urbanisation. Ce qui a influencé cette
partie de la ville est l'aménagement des infrastructures principalement
la VDN. L'accessibilité étant améliorée, la zone de
Mermoz et de Ouakam est sous l'afflux de nouvelles occupations. On peut citer
entre autre : des cliniques, des écoles de formations, des restaurants,
des sièges de société, des ministères mais aussi
sur la voie publique avec des parkings de vente de véhicule, des
gargotes, des kiosques voire des laveurs de véhicules.
Image n°3 :
Évolution de l'occupation du sol à
Sacré-Coeur
Source : Google Earth
L'occupation du sol s'est donc intensifiée depuis 2000
mais surtout à partir de 2005. Ainsi prend forme l'urbanisation de cette
zone entrainant avec elle de nombreux autres phénomènes notamment
l'occupation de la voie publique. C'est à ce niveau que les communes
sont mises en défi. Elles doivent assurer la gestion de ces espaces qui
représentent d'énormes enjeux pour des nouvelles communes de
plein exercice.
47
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Chapitre II : Méthodologie de la recherche
La méthodologie utilisée dans ce travail -
celle appliquée à l'ESEA - est une démarche
hypothético-déductive. « On part de la théorie,
et on ne se sert de l'observation que pour tenter de l'infirmer » ou
de confirmer. Elle se constitue donc de deux grandes étapes : une
première théorique qui vise à cadrer le sujet et
construire des hypothèses et une seconde qui nécessite un travail
pratique pour confirmer ou infirmer les hypothèses avancées
(étude de cas). Les différentes phases ont
nécessité différents techniques et outils durant tout le
processus.
II.1. Élaboration du cadre théorique
Cette première partie consiste à identifier les
écrits sur le thème de la gestion urbaine
en général et sur l'espace public
en particulier. La recherche documentaire (ouvrages
généraux, mémoires, articles, etc.) a
nécessité une investigation au niveau des bibliothèques et
sur le net. La problématique s'est faite à partir des textes
juridiques (lois), des mémoires, des articles de presses et aussi
grâce à des entretiens avec des personnes ressources et
l'observation directe.
La construction de la revue critique et du cadre conceptuel
est basée sur : des ouvrages généraux (J. Chenal, 2009 par
exemple), des mémoires (de la bibliothèque et mais aussi des
versions électroniques), des fiches de lecture et des articles
proposés par de revues en ligne ou par des bibliothèques en
ligne (www.cairn.info ou encore
www.traces.revues.org;
la bibliothèque en ligne de l'UCAD, etc.) et des articles et ouvrages
électroniques téléchargeables en ligne. Les ouvrages
généraux qui traitent le thème d'espace public
étant rare ou presque indisponible dans les bibliothèques (UCAD
et ESEA), nos recherches ont été concentrées sur le
net.
La période des ouvrages est -
généralement - située dans l'intervalle de 19602014,
étant donné que le concept d'espace public fut employé
pour la première fois en 1960. Les oeuvres ciblées sont celles
qui traitent des différentes dimensions de l'espace, de ses fonctions,
de ses usages et pratique, son évolution et de l'espace public en
Afrique et à Dakar. Nous avons ainsi pu déterminer trois (03)
point dans la littérature (dimensions de l'espace public, ses formes et
ses usages et enfin des usages de l'espace en Afrique et à Dakar) et
défini trois concepts principaux (gestion urbaine,
48
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
espace public / voie publique et usages) mais aussi des concepts
secondaires liés à ces derniers.
Suite à l'analyse de la littérature, le choix
de la zone d'étude a été définitif suite auquel, le
cadre opératoire a été élaboré.
Différents objectifs ont été fixés après
avoir eu un aperçu général de la situation des occupations
dans la zone (les fondements de ces objectifs restent la littérature et
l'observation directe). L'opérationnalisation de ces objectifs est
passée par d'interrogations qui ont abouti à des affirmations ou
hypothèses dont leur vérification justifie l'intérêt
même d'une investigation sur le terrain (pour recueillir des informations
brutes).
Entre la phase de l'élaboration du cadre
opératoire et la phase pratique, il existe différents
étapes. Les variables qui ont été identifiées
(d'après la littérature), nous ont permis de déterminer
des indicateurs - mesurables et/ou observables -. Ces indicateurs sont eux
aussi rendus opérationnels à travers des questions qui ont
été organisées grâce à des outils tels que le
questionnaire ou encore le guide d'entretien. Ainsi de la préparation du
terrain nous avons passé à la recherche des informations
primaires afin de les analyser et pouvoir vérifié nos
différentes hypothèses.
II.2. De l'étude de cas : choix de la zone,
l'échantillonnage et les enquêtes
II.2.1. Justification du choix de la zone
d'étude
La zone d'étude est délimitée de part et
d'autre par les communes d'Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur. Le terrain
d'étude étant la voie publique, nous avons ciblé les
artères principales (telles que la VDN) où les occupations sont
importantes mais aussi parce que nous y avons observé de nouvelles
dynamiques d'occupation (les parkings de vente de véhicules). «
La VDN une rue spécialisée dans les services et commerce
». Ouakam est choisie parce qu'elle est traversée par la VDN
à sa limite Est avec la commune de Mermoz. Sinon notre champ
d'étude principal est cette dernière. La commune de Mermoz avec
celle de Liberté constitue une « zone tampon » entre
le centre-ville de Dakar (qui est engorgée par des services) et la
périphérie dans un mouvement de déplacements pendulaires
entre ces deux bouts.
49
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Image n°4 :
Présentation de la zone d'enquête
La VDN
Boulevard du Koweït
Rue. 10 SC
Légende :
Parcours de l'enquête (environ 5 km)
Pour avoir une base de comparaison, la commune de Ouakam est
intégrée dans l'étude ainsi que deux autres voies
(Boulevard du Koweït jusqu'au collège Sacré-Coeur en plus de
la VDN). La particularité de ces voies se trouve au niveau de leur
dimension (largeur).
50
Deuxième partie : cadre de
l'étude et méthodologie
Image n°5 : schéma
de la VDN
Source : Moussa M. M.
Dicker / mémoire ESEA 2016
L'exemple de la VDN : en plus des deux chaussées
principales (de plus de 06 mètres environ), elle est constituée
de deux autres voies secondaires avant les limites des clôtures des
parcelles. Les chaussées sont séparées par un terre-plein
central dérasé de plus de 05 mètres. Entre les
chaussées secondaires et principales, il y a une berme d'environ 06
mètres. Cette dernière offre un espace pour les différents
types d'installations sur la voie dans cette zone. Les autres voies ont une
dimension moins large que celle de la VDN mais présentent les
mêmes caractéristiques et disposent d'un espace qui peut
accueillir les occupants et y exercer leur métier.
II.2.2. L'échantillonnage
L'échantillonnage est effectué selon le type de
cible. Notre cible mère est les occupants mais au total nous avons
enquêté les ménages riverains et les passants
piétons mais aussi les acteurs de la Mairie.
51
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Les occupants : étant donné que
nous ne disposions pas de base de sondage, un recensement fut mené.
Tableau n°4 : Le
résultat du recensement des occupants
Types d'occupation
|
La VDN
|
Boulevard du K.
|
Rue. 10 SC
|
Total
|
Parking de vente
|
16
|
1
|
2
|
19
|
Garage
|
4
|
0
|
0
|
4
|
Gargote
|
2
|
1
|
0
|
3
|
Étale de fruit
|
3
|
2
|
5
|
10
|
Chariot
|
11
|
11
|
9
|
31
|
Lavage et nettoyage
|
6
|
0
|
0
|
6
|
Extension
|
3
|
0
|
2
|
5
|
Menuiserie
|
2
|
0
|
0
|
2
|
Autres
|
16
|
3
|
8
|
27
|
Total
|
63
|
18
|
26
|
107
|
|
Moussa M. M. Dicker / mémoire ESEA 2016
Dans la catégorie « autres
» nous avons les tabliers (surtout les femmes), les
réparateurs de pneu ou autre type de tabliers. Vu le nombre des
occupants, nous avons décidé de faire une enquête
exhaustive. Néanmoins le nombre enquêté au final est de
72 occupants à cause de plusieurs contraintes : le
refus (surtout les tabliers ou vendeuses de produits de consommation tels que
l'arachide), les contraintes de la langue wolof, le renvoi de certains
et l'indisponibilité des propriétaires (souvent au niveau des
parkings de vente). Au total, 35 occupants n'ont pas été
enquêtés. Ce qui nous donne un taux de sondage de
67,2%.
52
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Les ménages : pour ces cibles aussi,
nous ne disposions pas de base de sondage. Comme les ménages
visés sont ceux qui se trouvent sur les voies dont les occupants ont
été enquêtés, la méthode
d'échantillonnage systématique par pas de sondage (3)
est choisie. De ce fait nous prenons un (01) ménage à
tous les trois (03) pas, c'est-à-dire 1 + 3 ménage et on
enquête donc le 4e ménage, ainsi de suite
jusqu'à la fin de la voie où notre enquête devra
s'arrêter. Nous avons de ce fait eu à enquêter 25
ménages. Ce nombre réduit se justifie : d'une part les
locaux aux abords de ces voies sont presque tous des bureaux de services ou
d'autres activités commerciales. Nous avons pris une rue en
arrière (au plus 100 mètres de la voie principale de notre
étude) et joint parallèlement la voie principale. Même avec
cela, il y a eu de refus ou bien le chef de ménage est au bureau et il
ne rentrera qu'à partir de 19 h. L'indisponibilité des chefs de
ménage et l'éloignement des ménages ne nous ont pas permis
d'avoir un nombre important.
Les passants (piétons) : de
même à ce niveau, nous n'avons pas de base de sondage. Nous avons
donc utilisé une technique aléatoire en choisissant 160
passants.
Tableau n°5 : Les
échantillons des passants et ménages
Types d'occupation
|
La VDN
|
Boulevard du K.
|
Rue. 10 SC
|
Total
|
Pour les ménages
|
115
|
35
|
10
|
160
|
Les passants
|
17
|
5
|
3
|
25
|
|
Les acteurs de la mairie : ce sont eux qui
gèrent la voie publique et sont donc en position de nous fournir des
informations indispensables (procédures, taxes, etc.). Dans chaque
commune nous avons ciblé le chargé des Occupations à la
Voie Publique., nous avons eu donc au total deux entretiens pour recueillir des
informations qualitatives.
II.2.3. L'enquête et les outils utilisés
Les enquêtes se sont déroulées du
20 septembre au 06 octobre, soit une descente de deux fois au
moins par semaine. Le souci en était que tout dépend de la
disponibilité de celui qui nous accompagne (un camarade qui parle le
wolof) mais aussi de la disponibilité des propriétaires.
Certains nous renvoient plus de deux fois et cela joue
53
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
sur le temps puisqu'il faudrait penser à respecter
l'échéance du dépôt du document. Les outils de
collecte des données sont le questionnaire, le guide d'entretien et
l'observation directe.
L'administration des questionnaires est faite directement
c'est à dire face à face. L'enquêté rempli soit
lui-même le questionnaire, soit il est assisté. Pour éviter
des « biais », le remplissage se fait sur place et les
réponses insatisfaisantes ou mal remplies sont rectifiées
après avoir bien expliqué la question à
l'enquêté. Nous ne disposons d'aucun outil pour vérifier la
fiabilité des réponses (puisqu'elles sont sujettes à une
totale subjectivité) à part une triangulation grâce aux
questionnaires déjà remplis.
Une évaluation des différents questionnaires a
été réalisée - grâce au logiciel
Sphinx -. Cela a permis d'avoir les taux de remplissage et
d'autres appréciations des questions ainsi que des réponses
collectées durant les enquêtes.
? Questionnaire adressé aux occupants : son taux de
remplissage global46 est de 67,5 %. Ce qui est
jugé « très faible » par le Sphinx.
Mais cette situation s'explique du fait qu'il y a une partie du questionnaire
adressée uniquement à une catégorie précise parmi
les occupants : les vendeurs de véhicules. Il représente 14 % des
enquêtés, ce qui fait que le taux de remplissage soit faible
surtout pour ces questions (moins de 50 %) ;
? Questionnaire adressé aux ménages : le taux
de remplissage à ce niveau est bon soit de 72,9 % (le
taux minimum étant de 33 %). Néanmoins certaines réponses
sont insuffisamment remplies. Les enquêtés n'ont souvent pas
d'avis sur la question ou bien ce sont des questions dont la réponse est
conditionnée par la précédente (c'est-à-dire
qu'elles sont valables qui si la question précédente est soit
« oui », soit « non » ou encore « autre ») ;
? Questionnaire adressé aux passants : il est de
93,85 % pour ce questionnaire. Ce chiffre élevé
est lié aux conditions dans lesquelles les enquêtes se sont
déroulées. Les enquêtés étant mobiles,
l'administration est souvent assistée
46 Le taux de remplissage permet
d'évaluer le poids, en pourcentage, des questions auxquelles
l'interviewé a réellement répondu par rapport à
l'ensemble des questions proposées dans l'enquête. Ce taux est
bien plus élevé pour les enquêtés
assistés.
54
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
et sur place. Les enquêteurs avait donc la
possibilité de parcourir toutes les questions afin d'avoir une
réponse auprès de l'interviewé.
L'évaluation ci-dessus est du questionnaire tout
entier. En outre, elle peut variée selon la question, le type de
question (fermé ou ouvert) ou de la nature de la question (texte ou
autre). Cette évaluation permet d'avoir un aperçu sur les
différentes questions, de juger si elles sont utiles ou non.
Les outils utilisés pour l'élaboration et le
traitement des données sont divers :
- Le logiciel Sphinx pour
l'élaboration du questionnaire, la saisie et le traitement des
données. C'est avec lui que nous avons fait un traitement des
données bruts pour réaliser des tableaux et créer une base
de données pour les logiciels SPSS et
Excel. Grâce à ce logiciel, une évaluation du
questionnaire fut effectuée ;
- Le logiciel Excel pour la
réalisation des graphiques et diagrammes, le croisement des indicateurs
et/ou modalités à travers son outil de filtrage ;
- Le logiciel SPSS a servi pour la
création des tableaux croisés afin d'avoir une analyse plus fine
des différentes modalités et interpréter certains
indicateurs.
Durant cette phase, le souci principal était
d'éviter le maximum d'erreurs possibles et de collecter des
données de qualité fiable. Des informations ont été
collectées grâce à l'observation directe. Néanmoins
quelques erreurs ont été - sans avoir un impact négatif
majeur sur les résultats - noté dans cette phase.
55
Deuxième partie : cadre de l'étude et
méthodologie
Figure n°2 : Les
étapes de la recherche
Source : réaliser
par l'auteur
Notre recherche est, en somme, repartie en deux grandes
phases. C'est un processus itératif et toutes les parties sont
complémentaires. L'objectif recherché étant une
fiabilité scientifique, l'étude s'est inscrite dans une rigueur
tout au long du travail.
II.2.4. Les contraintes rencontrées et les
stratégies pour les surmonter
Nous avons déjà mentionné le
problème de base de sondage dont nous ne disposons pas. En outre, il y a
eu la contrainte de la langue wolof suite à laquelle nous avons
sollicité l'aide des amis de la classe. Quant au refus de certains
occupants (qui nous soupçonnent d'être au servir de la
municipalité), nous n'avons pas réussi à les convaincre.
Aussi l'indisponibilité des données actualisées et des
cartes (à jour) des communes au niveau constituait un manque à
gagner, celles-ci aurait pu contribuer à l'enrichissement de nos
analyses.
56
TROISIÈME PARTIE
RESENTATION DES RÉSULTATS ET
RECOMMANDATIONS
« Tout espace urbain, qu'il soit réel ou
idéal, est caractérisé par une répartition des
activités et des hommes, une organisation de leurs relations »
Gilli Frédéric, 2001.
57
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Chapitre I : Présentation et analyse des
résultats
Les différentes investigations, dans cette
étude, ont permis d'avoir des données diverses à plusieurs
niveaux (les occupants, les passants et les habitants sans oublier les
renseignements fournis par des personnes ressources suite aux entretiens). Leur
analyse séparée et/ou croisée vont nous offrir
l'opportunité de comprendre les dynamiques des occupations ainsi que la
gestion de la voie publique dans les communes de Ouakam et de Mermoz
Sacré-Coeur. La voie publique est « un lieu d'expression,
d'étalage, d'accumulation de denrées et d'objets offerts aux
chalands ». Plusieurs variables et indicateurs (le genre,
l'âge, les types d'activités, les modalités d'occupation,
les installations, ...) seront confrontés sous différents angles
pour tenter de comprendre les usages de la voie publique (ou la rue), le jeu
des acteurs ainsi que les enjeux qui en découlent.
I.1. Caractéristiques socioéconomiques
des occupants
L'étude des déterminants sociaux et
économiques (dans leurs relations mutuelles) des occupants nous a permis
d'aboutir à des résultats très variés : une
disparité au niveau du genre, de l'âge, du niveau d'étude
et de l'activité exercée. Les occupants n'ont certainement pas le
même profil, chacun exerce une activité dans des conditions
particulières à un endroit précis.
I.1.1. La relation entre le genre et l'activité,
facteur explicatif d'une disparité parmi les occupants
La répartition des tâches, dans la
société africaine en général et au
Sénégal en particulier, a été longtemps
caractérisée par une invisibilité
des activités des femmes et une faible
participation de cette dernière à l'économie
nationale. Certaines activités étaient considérées
spécifiquement à un genre donné et la femme est «
dans des activités à faible valeur ajoutée
(agriculture, commerce) et sous des statuts de dépendants (aides
familiales) »47. Les activités
pratiquées dans la rue (formelles ou informelles) n'en sont pas non plus
épargnées par cette « ségrégation
».
47 Charmes Jacques, «
Femmes africaines, activités économiques et travail : de
l'invisibilité à la reconnaissance », Revue Tiers Monde
2/2005 (n° 182), p. 255-279
58
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.1 : Répartition
des occupants selon le genre
Masculin Feminin
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
La prédominance du genre masculin (avec 49 hommes
contre 20 femmes) est considérable. Cette situation montre la faible
présence des femmes exerçant sur la voie publique dans notre zone
d'étude. Mais cela est à considérer avec prudence et ne
pas le généraliser dans tous les contextes. La situation peut
varier selon la zone et l'activité exercée (par exemple une
étude sur les gargotes dans un quartier donné peu aboutir
à des conclusions très différentes).
Dans notre cas, précisément les voies publiques
ayant fait l'objet des enquêtes, la prédominance masculine peut
s'expliquer à travers différents facteurs, principalement
l'activité exercée dans cette zone. Car dans la commune de
Ouakam, au niveau du marché, cette réalité peut être
différente puisque le petit commerce (surtout la vente de produit
maraichers) est caractérisé par une forte présence des
femmes. Cette situation peut être sous l'influence de plusieurs facteurs.
Par exemple la répartition des occupants selon leurs activités et
leur genre peut fournir des éléments d'explication.
59
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.2 : Répartition
des activités selon le genre
Autre Boutiquier Garagiste Restaurateur Vendeur de
fruits
Sexe F Sexe M
Vente et location de véhicules
25
20
15
10
5
0
Source : enquêtes mémoire / Moussa
Dicker 2016
La répartition par genre des activités
exercées sur les voies dans les deux communes montre une absence
quasi-totale des femmes dans les différentes activités. La seule
activité où elles sont prédominantes est en effet la
restauration, majoritairement constituée de gargotes (11)
détenues toutes par des femmes.
Par contre, elles ne sont pas présentes dans trois
types d'activités : le commerce de boutique, la vente et location de
véhicules et le garage. Ce sont des activités pratiquées
traditionnellement par des hommes et dont les femmes sont plus ou moins
exclues. « Dans toutes les sociétés, les hommes et les
femmes ont des activités distinctes et ils assument des
responsabilités différentes au sein du ménage »
(FAO, 1998). Les activités exercées sur la voie publique sont
souvent marquées par cette distribution du travail. La faible
représentation des femmes peut être aussi explique par la
spécialisation de l'espace. Chaque espace a ses particularités.
Les activités exercées sur une voie publique différentes
de celles exercées au niveau d'un marché ou un centre commercial.
Et de ce fait, les activités présentes sur la voie publique sont
celles où on ne trouve pas assez de femmes. Cette approche est plus
proche de la réalité de notre zone.
I.1.2. La voie publique, un lieu d'accueil de diverses
activités
La rue à Dakar n'assure pas uniquement la circulation
des biens et personnes, elle représente aussi un support - pour les
activités économiques - à une partie de la
60
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
population. Cette dernière tente de profiter des flux
quotidiens des personnes et s'installe ainsi près des lieux les plus
fréquentés ou les voies à grande circulation.
Figure I.3 : Les
différents types d'activité occupant la voie
Autre
Vendeur de fruits
Boutiquier
Restaurateur
Garagiste
Vente et location de véhicules
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50%
Source : enquête
mémoire / Moussa Dicker 2016
La restauration et la vente de véhicule sont les plus
dominantes parmi les activités exercées sur la voie. Quant
à la rubrique « autres », (46 %
c'est-à-dire 33 personnes sur les 72 enquêtées) elle
regroupe plusieurs activités. Il y a les vendeurs (hommes et femmes) de
produits divers (qui représentent 36 % de la rubrique) tels que les
chariots de vente de café, les tabliers des vendeuses d'arachide, mais
aussi les services de lavage et de nettoyage (26 %) et d'autres types de
commerce (32 %).
Les restaurateurs ciblent les points de rassemblement tels
que les devantures des écoles (cas du Collège
Sacré-Coeur), à côté des parkings de vente de
véhicules, devant les bâtiments en chantier, etc. L'existence des
services, tout au long de ces voies, permet aussi aux restaurateurs de capter
les employés durant leur pause.
Quant aux vendeurs de véhicules, ils recherchent une
visibilité et trouvent que ces voies (surtout la VDN) leur permettent
d'être plus accessibles. En analysant la durée de leur occupation
et l'assouplissement de la politique d'importation de voiture (de cinq (05) ans
d'ancienneté à huit (08) ans en 2013), il existe un lien puisque
sur les 14 vendeurs enquêtés 11 se sont installés depuis
moins de trois (03) ans. Mais aussi 07 d'entre eux exercent pour la
première fois cette activité notamment 50 % des vendeurs. La
possibilité d'importer des véhicules plus anciens mais aussi
moins chers, est une
61
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
opportunité pour plusieurs acteurs économiques.
Pour vendre leur produit il leur faut de l'espace et une visibilité et
c'est ce que leur offre ces voies où ils se sont installés en
grand nombre.
Pour les boutiquiers, il faut noter que ce sont des
extensions sur la voie de certains de leur produits, faute d'espace à
l'intérieure de leur boutique. Les garagistes sont faiblement
représentés parce que la municipalité ne veut pas
autoriser de telles occupations sur ces voies à cause de leurs
déchets et leur impact sur la voie (disharmonie ou encore
défiguration). Les vendeurs de fruits (8 %) sont dispersés sur
les deux voies. Ils occupent ces voies pour accéder à une
clientèle permanente grâce aux flux quotidiens. Le choix de ces
acteurs pour exercer les activités ci-dessus peut être aussi
expliqué par leur motif.
Figure I.4 : Relation entre
activité et motif du choix de la voie
Vente et location de véhicules Vendeur de fruits
Restaurateur Garagiste Boutiquier Autre
|
|
|
|
0% 20% 40% 60% 80% 100% 120%
Visibilité Moins de contrôle Autre
Accessibilité des clients
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
L'accessibilité des clients et la visibilité
sont en effet les raisons les plus avancées pour le choix d'occupation
de la voie. Tous les occupants considèrent que sur ces voies ils sont
plus accessibles. La VDN est sans doute la deuxième artère la
plus importante de la voirie urbaine de Dakar après l'autoroute, et
accueille un flux
62
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
important engendré par les mouvements pendulaires
(entre le centre et la périphérie). Et le Boulevard du
Koweït assure la liaison entre les quartiers de Ouakam, Mermoz,
Liberté et Grand Yoff. Pour un acteur économique cherchant
visibilité et accessibilité, ces deux voies sont donc
stratégiques au niveau de cette zone.
En outre, il existe des occupants qui exercent une
activité secondaire. Une activité secondaire permet à ces
occupants de diversifier leur source de revenus. C'est aussi une garantie en
cas de crise majeure touchant son activité première.
Figure I.5 :
Répartition des personnes qui pratiquent une autre
activité
72%
Oui Non
28%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les occupants ayant une activité secondaire
représentent 28 % et sont investis dans des activités comme le
jardinage, l'artisanat, d'autres types de commerce ou encore ce sont des
étudiants qui exercent en leur période de vacances. En outre, une
majorité (72%) des occupants pratiquent une seule activité.
I.1.3. Les occupants par tranche d'âge ou la
dominance des jeunes
La population de Dakar en particulier et celle du
Sénégal en général est majoritairement jeune.
« Les jeunes âgés de 15 à 34 ans
représentent 32% de la population résidente au
Sénégal et 58,7% de la population résidente en âge
de travailler » (ANSD, 2016). Dakar concentre une partie
importante de cette tranche de
63
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
la population mais aussi celle en âge de travailler
toutes catégories confondues (68,8%; ANSD 2016). Cependant, la
population en âge de travailler (au niveau national) n'est pas si active,
notamment 49,6% sont inactives, 37,4% d'occupées et 13% au
chômage. Cette situation (certes générale) nous permettra
d'appuyer notre analyse sur la répartition ci-dessous des occupants
selon leur âge.
Figure I.6 : La
répartition des occupants selon l'Age
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
16-30 31-45 46-60 60+
Tranche d'âge
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les occupants qui exerçant sur la voie publique sont
en majorité jeunes (16 - 30 ans) avec 54 %. Souvent confrontés
à difficultés d'accès à l'emploi, les jeunes
trouvent d'autres alternatives pour s'adapter. Le secteur «
informel » et/ou les activités économiques
dans la rue, où l'accès n'exclut aucune catégorie sociale,
sont les domaines que choisissent ces jeunes.
64
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.7 : La
répartition des activités selon l'âge
70%
60% 50% 40% 30% 20% 10% 0%
|
|
|
|
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
La tranche d'âge 16 - 30 ans est dominée par le
commerce de boutique suivi des activités « autres
» regroupant en grande partie de vendeur de café à
chariot, ainsi que par la restauration. Par contre le commerce de boutique
n'est pas représenté dans la catégorie 31 - 45 ans comme
les autres activités. Quant aux sexagénaires, qui ne
représentent que 1 %, ils ne sont représentés que par les
activités diverses. Il faut aussi noter l'absence des moins de 15 ans
parmi les occupants, parce qu'ils représentent la catégorie des
mineurs et ne sont pas considérés comme en âge de
travailler. Cependant, même si cette classe n'est présente parmi
les occupants enquêtés dans notre cas d'étude, il existe
des jeunes de moins de 15 ans exerçant dans la rue à Dakar.
I.1.4. Le niveau d'étude des occupants
Le niveau d'étude de la population peut influencer la
perception que cette dernière a de la voie publique et de son
importance. Les plus scolarisés auront tendance à s'interroger
sur l'occupation de la voie publique tandis que les moins scolarisés
peuvent en faire fi.
65
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.8 : La
répartition des occupants selon le niveau d'étude
Non scolarisé Daara Alphabétisé Primaire
Secondaire Supérieur(Bac+)
|
|
|
|
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35%
Niveau d'étude
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Parmi les occupants, une très grande proportion (30%)
fréquente les Daaras. Quant aux occupants scolarisés, le
secondaire (19%) est le niveau d'étude le plus représenté
suivi du supérieur puis du primaire. Les occupants
alphabétisés en langues nationales représentent moins de
5% de la population. Cependant, les occupants non instruits représentent
une part importante (17%). Si nous considérons uniquement ceux qui ont
reçu une formation classique comme étant instruits, alors les
occupants ayant fait la Daara sont exclus. Dans ce cas, nous nous retrouvons
avec 50 % des occupants non instruits. Ces occupants sont pour la plupart issus
de la migration (des zones rurales ou des pays voisins) ou bien sont de la
périphérie de Dakar et non pas eu accès à
l'école - souvent caractérisés par une situation
économique faible.
I.1.5. Le niveau de revenus des occupants
La diversité des activités exercées sur
la voie se traduit aussi par des revenus variés des différents
occupants. Les activités sur la voie publique ont longtemps
été caricaturées « d'informelles », «
d'anarchiques » et de ce fait considérées comme des
activités à faible revenus. Mais dans contexte, la situation se
présente différemment. Il existe certes une disparité
entre les revenus, mais les revenus de certains occupants sont
considérables.
66
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.9 : Les revenus moyens des
occupants
200 000 fr et plus 100 000 - 200 000 fr 50 000 - 100 000 fr 0 -
50 000 fr
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70%
Revenus / mois
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
L'histogramme montre qu'une très grande proportion des
occupants (60%) a un faible niveau de revenu (entre 0 - 50.000 F). La
répartition de ces revenus peut être expliquée par
l'activité exercée par les occupants. Les occupants ayants un
faible revenu exercent dans des activités telles que la vente de
café, les tabliers avec des produits divers ainsi que les femmes
vendeuses d'arachides et autres produits. Les occupants avec un niveau de
revenu supérieur sont peu représentés : 14 % pour les
tranches 50 000 - 100 000 Fr et 100 000 - 200 000 Fr et 11% pour la tranche qui
gagne plus de 200 000 Fr.
Le graphique ci-dessous met en relation le niveau de revenu
et l'activité exercée par les occupants. Cela met en exergue la
disparité entre des revenus des occupants proportionnellement à
l'activité qu'ils exercent.
67
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Figure I.10 : Relation entre le
niveau de revenu et les activités
90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0%
|
|
|
|
|
Autre Boutiquier Garagiste Restaurateur Vendeur de Vente et
fruits location de
véhicules
0 - 50 000 Fr 50 000 - 100 000 Fr 100 000 - 200 000 fr 200 000
Fr et plus
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker2016
La part des occupants qui ont un revenu élevé
est assez important parmi l'activité de vente et de location de
véhicules. Car même en vendant une seule voiture dans le mois, ces
acteurs peuvent gagner un million au minimum. Leur activité est
lucrative contrairement aux vendeurs de fruit et boutiquiers qui ne
dépassent pas le seuil de 50 000 Fr. La disparité des revenus
constatée au niveau des activités « Autre » fait
l'exception, car c'est la seule catégorie où tous les niveaux de
revenu sont représentés. Les revenus les moins
élevés sont les mieux représentés, surtout
l'intervalle 50 000 à 100 000 Fr. Mais à ce niveau, on ne peut
pas distinguer pour quel type d'activité correspond un niveau de revenu.
Un autre indicateur peut fournir d'éléments d'explication de la
situation des revenus des occupants : le niveau d'instruction.
Une personne instruite a plus de « valeur ajoutée
» car la formation améliore le capital
humain48. « Il est aujourd'hui couramment
accepté que l'instruction est, au moins dans une de ses dimensions, un
investissement en capital humain » (A. Lucila et J. Lucila
Arrigarizza, 1972). La relation n'est pas directe entre le capital humain et le
niveau de vie. La formation offre une base qui permettra d'acquérir des
connaissances pratiques liées à un domaine donné. Mais
l'usage ou la mise en oeuvre de ce savoir est
48 Le capital humain se définit comme
l'ensemble des capacités productives qu'un individu acquiert par
l'accumulation de connaissances générales ou spécifiques,
de savoir-faire. La notion de capital exprime l'idée que c'est un stock
immatériel imputé à une personne pouvant être
accumulé, s'user. Gary Becker, 1964.
68
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
primordial pour la production d'une valeur ajoutée.
Néanmoins, il existe un écart entre les occupants ayant
reçu une formation et ceux qui ne sont pas instruits.
Figure I.11 : croisement du
niveau de revenus et celui d'étude
92%
100%
Alphabétisé Daara Non scolarisé Primaire
Secondaire Supérieur(Bac+)
0 - 50 000 Fr 50 000 - 100 000 Fr 100 000 - 200 000 fr 200 000
Fr et plus
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
57%
50%
45%
7%
9%
9%
3%1
13%1
3%
33%
33%33%
29%
27%
13%13%
58%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker2016
En effet, les occupants non scolarisés ont presque
tous un revenu inférieur ou égal à 50 000 FCFA. Par contre
ceux qui ont un niveau d'étude élevé ont de revenus moyens
par mois assez importants. L'écart des revenus selon le niveau
d'étude montre la contribution de la formation dans le
développement économique et la rentabilité individuelle
(Denison, 1962 et 1967). Le savoir-faire est déterminant dans
l'accès aux activités ou à l'emploi. Et les revenus
varient selon les activités. D'une manière indirecte, la
formation a donc des répercussions sur le niveau de revenus.
Somme toute, l'analyse des caractéristiques des
occupants offre un aperçu sur la relation entre le social et le spatial.
Les dynamiques de cette population répondent à une logique qui
peut s'expliquer à travers l'espace. Mais l'espace à lui seul ne
permet de comprendre les occupants et leurs pratiques : « Les formes
sociales [...] ne sont pas préinscrites dans l'espace existant, mais
produites à partir des relations spatiales engendrées par
l'espace »49. Le croisement des différents
indicateurs (âge, genre, activité, revenu, etc.) a permis d'avoir
une description plus ou moins complète des occupants. La connaissance
sociodémographique des occupants est un moyen d'appréhender les
dynamiques d'occupation sur la voie.
49Véronique Bordes. Espaces publics, espaces
pour tous ? Espaces de la jeunesse, espaces publics : organisation locale, Nov.
2006, Rennes, France.
69
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
I.2. Analyse de l'occupation et de la gestion de la
voie publique dans les deux communes
L'occupation et la gestion de la voie publique met en
relation plusieurs types d'acteurs : les responsables de la
municipalité, les occupants, les usagers de la voie (piétons et
personnes utilisant d'autres moyens de déplacement) ainsi que la
population riveraine. Tous ces acteurs concourent à l'harmonie de la
voie publique. Les acteurs des municipalités assurent le respect des
normes établies sur la voie et qui entre dans leur compétence.
Les occupants, quant à eux, sont intéressés par la voie en
tant que support pour les activités économiques. Il existe donc
différents usages de la voie mais aussi des perceptions par rapport
à chaque acteur.
I.2.1. La gestion de la voie publique dans les deux
communes : une même modalité pour des enjeux différents
La gestion des espaces publics en général et de
la voie publique en particulier est conférée à la commune
conformément aux textes. Il s'agit de réglementer ses
occupations, assurer la circulation des biens et personnes, sa propreté,
son éclairage et sa sécurité ; etc. Ainsi, les communes de
Ouakam et de Mermoz se sont dotées d'outils leur permettant d'assurer
convenablement leur tâche à l'instar la mise en place d'une
procédure pour les autorisations d'occupation de la voie publique.
Les procédures sont les mêmes dans les deux
communes. Le dossier est composé d'une lettre adressée au Maire
et une copie de la carte d'identité. Le Maire impute le dossier aux
services techniques qui l'étudieront et puis feront une descente sur le
terrain pour : voir la disposition du sol, vérifier sa
faisabilité par rapport à la circulation, si la place fait objet
d'une occupation ou destinée à un projet ; ou encore consulter
les associations et autres organisations communautaires de la commune pour
vérifier si elles ont prévu des réalisations sur les
lieux.
Après cette étape, le service technique donne
son avis et renvoie le dossier auprès du Maire qui accordera ou non
l'autorisation d'occupation. La procédure est la même pour tous
les types d'occupation. Le temps de l'instruction varie selon les demandes mais
aussi du Maire qui peut signer ou non l'autorisation au moment voulu.
L'étude
70
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
au niveau des services techniques peut prendre au plus une
à deux semaines. Comme le montre le graphique ci-dessous, en
générale le dossier a une réponse dans un délai
d'une semaine. Certains cas prennent du temps allant jusqu'à des
semaines voire des mois et cela est dû à l'envergure des
installations ou des travaux à effectuer sur la voie, ou bien l'endroit
en question fait l'objet d'une affectation quelconque pour une tierce personne
ou une association. La commune doit d'abord s'assurer qu'il n'existe aucun
conflit d'intérêt avant de procéder à une
autorisation.
Figure I.11 : Durée de
l'instruction pour un permis d'occuper
Plus d'un mois Un mois Deux semaines Une semaine
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50%
Delai d'instruction
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Cependant, l'instruction ne se base pas sur des normes
déjà établies (comme dans le cas de la procédure
d'autorisation de construire). Les critères utilisés sont
l'encombrement, la nature domaniale du sol et l'existence d'un litige ou non
mais ce qui détermine dans ce contexte reste en général un
jugement subjectif et des négociations avec les différents
acteurs concernés. Une situation qui pourrait expliquer pourquoi ces
occupations constituent une contrainte pour les habitants et les
piétons.
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.12 : L'instruction de
l'autorisation pour occupation de la voie publique
Dépot au secrétariat du Maire
Renvoie du dossier au Maire après avis
des services technique
Imputation à la direction des services techniques
Arrivée du dossier chez le chef de division
chargé des
OVP
Descente sur le terrain pour l'étude des lieux
71
Source : enquête
mémoire / Moussa Dicker 2016
L'autorisation est précaire et révocable
conformément au Code du domaine l'État. Les redevances sont
fixées soit par jour soit par mois le m2, ou encore par
rapport à la nature de l'occupation ; par le conseil municipal et
approuvé par le représentant de l'État (le
sous-préfet). Les prix ne sont pas les mêmes dans les deux
communes.
Tableau 6 : Redevances
d'occupation dans la commune de Mermoz
Type d'occupation
|
Le montant de la redevance en FCFA
|
Cantine inférieur ou égale à 4
m2
|
8
|
000
|
Kiosque à pain
|
4
|
000
|
Kiosque à journaux
|
6
|
000
|
Container 20 pieds
|
25
|
000
|
|
72
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Container 40 pieds
|
50
|
000
|
Kiosque PMU
|
6
|
000
|
Table inférieure à 3
m2
|
4
|
000
|
Table supérieure à 3
m2
|
5
|
000
|
|
Source :
procès-verbal de la commune de Mermoz n° 003/ 2014
Ces redevances sont payables chaque mois. Pour toutes autres
installations autres que celles énumérées ci-dessus, le
prix est de 1 500 F le m2, ainsi que les kiosques
et cantines supérieures à 4 m2. A partir de 500
m2 et pour les parkings de vente de véhicules, la taxe est de
200 000 F.
Par contre la commune d'Ouakam fixe les prix au m2
par jour ou par mois. Les redevances ne sont pas les mêmes que celles de
Mermoz. Les besoins financiers de chacune étant particuliers par rapport
aux charges, les communes fixent les prix en tenant compte de la
disponibilité foncière et des ressources qu'elle peut
générer.
Tableau 7 : Redevances
d'occupation dans la commune de Ouakam
Type d'occupation
|
Montant de la redevance en FCFA
|
Terrasses à café
|
1 000 /m2/mois
|
Ouvriers, mécaniciens, menuisiers
|
600 /m2/mois
|
Balises ou dispositifs de
délimitation
|
700 /m2/mois
|
Décharges
|
200 /jour/mois
|
Cantines, containers, souks, gargotes,
kiosques*
|
1 250 /m2/mois
|
Etalage devant magasin
|
800 /m2/mois
|
Tisserands
|
100 /m2/mois
|
Ateliers et garage
|
500 /m2/mois
|
Tailleurs de pierres
|
100 /jour/m2
|
|
Source :
délibération du conseil de Ouakam n°02/03/14
*A l'exception de ces kiosques :
- Kiosque à pain : 3 000 FCFA /mois
- Kiosque à journaux : 4 000 FCFA /mois
- Autres kiosques : 6 000 FCFA/mois
73
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
L'appréciation des taxes varie selon l'occupant,
chacun payant un montant différent. Comme le montre le diagramme
ci-dessous, plus de la moitié (55%) trouvent que les redevances sont
moyennes. Ceux-ci occupent des superficies qui ne sont pas grandes et leurs
installations ne correspondent pas à ceux qui coutent chères le
m2.
Figure I.13 :
Appréciation de la taxe par les occupants
Moins chèr
Moyen
Tros chèr
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60%
Niveau d'appréciation
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker
Les taxes semblent être moins chères pour les
tabliers, les chariots et toutes autres étales qui paient une somme
infime soit par jour, soit par semaine ou par mois. Les parkings de vente et
les stations de lavage sont les plus taxés et considèrent donc
que ces taxes sont trop chères.
La taxation sur la voie publique varie donc entre les deux
communes. Pour le paiement, il doit être fait au plus tard le 10
de chaque mois ou le 31 mars de chaque année.
Le choix du moment de payer revient aux occupants : payer par année ou
par mois. Les occupations irrégulières sont déguerpies
après une sommation pour libérer la voie publique.
Les recettes générées par les
occupations à la voie publique représentent 4% dans le budget de
la commune de Ouakam de 2016 (soit 52 millions sur 1.3 milliards de FCFA) et de
16 % dans celui de Mermoz Sacré-Coeur, soit 200 millions de FCFA pour
1.2 milliards. Ces montants sont des estimations dans l'élaboration du
budget. Ils peuvent être atteints ou bien dépassés durant
l'exercice de cette année. La différence entre les deux communes
réside d'abord dans le montant des redevances qui sont plus
74
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
élevées au niveau de la commune de Mermoz
Sacré-Coeur (par exemple kiosque à pain 4 000 F à Mermoz
contre 3 000 à Ouakam ; Containers entre 25 000 à 50 000 à
Mermoz et 1 250 à Ouakam).
La commune de Ouakam a certes un marché autour duquel
il peut y avoir de nombreux occupants. Tous ces occupants n'ont pas
évidemment une autorisation et échappe souvent au contrôle
des autorités. Ceux qui n'y échappent pas payent de patente
quotidienne ou hebdomadaire moins chère (150 F à 200 F). Dans la
commune de Mermoz, il existe des occupations dont les redevances sont
considérables telles que le parking, les kiosques et containers. La
commune n'ayant pas d'équipements marchands, profite des occupations sur
la voie pour combler ce manque. Car depuis la Loi n° 2013-10 du 28
décembre 2013, les communes ont à leur charge certains
équipements tels que les hôpitaux voire le paiement des salaires
des employés. De ce fait, les occupations ne sont pas toutes conformes
aux normes et dispositions de la voie. L'analyse de ces occupations au chapitre
suivant démontre avec plus de détails.
I.2.2. Analyses des occupations de la voie
|
publique
|
|
Les occupations sur la voie publique ne se font pas dans une
même logique. Les personnes qui s'installent sur la voie
l'aménagent par rapport à leur besoin ou l'activité
qu'elles exercent. Ainsi la superficie, les types d'installations ainsi que la
durée de l'occupation varient selon les occupants et leurs
activités.
I.2.2.1. Les occupations réguliers et non
réguliers
La gestion de la voie publique dans la Ville de Dakar a
souvent opposé les agents municipaux et les occupants irréguliers
(sans autorisation). Dans la zone de cette étude, les agents des
municipalités sont beaucoup plus vigilants à cette question. La
voie est une source de revenus pour les communes qui font face à des
difficultés financières, depuis qu'elles sont
érigées en communes de plein exercice. Toutefois, il faut noter
la présence des occupants qui n'ont pas d'autorisation mais qui
s'installent sur la voie publique.
75
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Figure I.14 : Répartition
des occupants selon la régularité
37%
Oui Non
63%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les occupants enquêtés sur les voies ont en
majorité une autorisation ou un permis pour s'installer sur la voie.
Cette particularité s'explique par le fait que les deux
municipalités s'adaptent continuellement aux réalités et
trouvent de modalité pour régulariser les occupants.
Néanmoins, une partie considérable des occupants est toujours
installée sur la voie sans autorisation. Ces occupants évoquent
diverses raisons pour expliquer leur irrégularité et cela est
présenté par le graphique ci-dessous.
Figure I.15: Raisons avancée par les
irréguliers
14%
Ignorance lourdeur
administrative
Procédure couteuse Autre
Raison d'irrégularité
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
76
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Les occupants irréguliers ignorent pour la plupart
(13% d'entre eux) que l'occupation de la voie nécessite une autorisation
préalable. Ils ont une perception différente de la voie publique
: la rue est un bien commun, cela appartient à tout le monde et chacun
peut en disposer à sa façon. La régularité des
occupants dépend aussi des types activités et de types
d'occupation. Certaines occupations ne peuvent pas échapper à la
surveillance de la commune de par leur importance en matière de taxe.
Les agents de la commune se chargent d'interdire ces occupations
irrégulière, 31% d'entre eux affirment que la commune les a
interdits l'occupation contre 50% auprès duquel la commune n'est pas
intervenue.
Figure I.16 : La
régularité des occupants par activités
120% 100% 80% 60% 40% 20%
0%
|
|
|
|
|
Autre Boutiquier Garagiste Restaurateur Vendeur de Vente et
fruits location de
véhicules
Non Oui
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les propriétaires de parking de vente et les
boutiquiers occupent tous régulièrement la voie publique. Les
taxes liées à ces occupations sont importantes et la commune
veille à ce qu'elles aient une autorisation avant de s'installer. Quant
aux garagistes, vendeurs de fruits, restaurateurs et les diverses
activités, leurs installations sont souvent effectuées sans
permis. Même dans ces conditions, les communes arrivent à
percevoir les taxes sur les occupants. Elles sont soit hebdomadaires,
mensuelles, voire quotidiennes (appelée communément
«djouti«). Ainsi, 83% des occupants
irréguliers payent ces taxes contre 17% qui ne le paient pas. Pour
mesurer l'ampleur de ces occupations, leur durée sur la voie nous
permettra d'édifier comment la commune gère la voie dans le
temps.
77
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
En effet la durée des occupations peut
déterminer l'ampleur de ces dernières sur les voies dans les deux
communes et particulièrement sur les voies où les enquêtes
ont été effectuées.
Figure I.17 :
Répartition de la durée des occupations
Plus de Tois ans Deux - Trois ans Un - Deux ans Six mois - Un
an Zéro - Six mois
|
|
|
|
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35%
Durée de l'occupation
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Ce graphique, illustre le nombre de temps que les occupants
ont fait sur la voie. Ainsi, 32% ont fait plus de trois ans sur cette voie.
Mais, à coté 31% ont fait entre 0 et 6 mois sur la même
voie. A ce niveau, ceux qui ont fait 6 mois viennent juste d'arriver parce
qu'ils ont été déguerpis de là où ils
étaient avant. Il y a aussi une forte communauté
d'étrangers qui a pris la place d'un de leur compatriote qu'il occupait
avant. Ceci est valable pour les 11% qui ont entre 6 mois et 1 an. Cependant,
certains occupent cette voie depuis un à deux ans soit 19% des occupants
et d'autre depuis deux à trois ans soit 7%.
Les occupations dans la zone ne sont pas donc toutes
nouvelles. La zone devient de plus en plus attractive pour les services et
nombreux acteurs y s'installent. La commune quant à elle essaie de tirer
un maximum de profits à travers ces installations en instaurant des
taxes au m2 et par types d'installation. Certains occupants exercent
pour la première fois leur activité en s'installant dans ces
communes.
78
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.18 :
Répartition des avis sur les activités
nouvelles
43%
Oui Non
57%
Source . ·
enquêtes mémoire / Moussa Dicker 2016
Une majeure partie des occupants exercent leur
activité pour la première fois en s'installant dans la zone de
notre étude. Ces activités sont la vente de café, la vente
de fruit et légume, la restauration, le lavage automobile et la vente de
voiture. Pour ceux qui exerçaient déjà leur
activité, ils étaient installés en grande partie dans la
ville de Dakar comme le montre le diagramme ci-dessous.
Figure I.19 : Anciens lieux
d'exercice
Hors de la région de Dakar
Hors de la Ville de Dakar
Ville de Dakar
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70%
Ancien lieu d'exercice
Source . ·
enquêtes mémoire / Moussa Dicker 2016
En effet 63% exerçaient dans la ville de Dakar avant
de déménager ici. 29% étaient hors de la ville de Dakar
(principalement dans la banlieue). Ceux qui étaient hors de
79
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
la région de Dakar et qui viennent nouvellement
s'installer ici ne représentent que 8%. Ces arrivants ont
différents motifs : déguerpissement, coût du loyer, raison
familiale, etc.
Figure I.20 : Motifs de
déménagement
30%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Interroger sur les motifs de déménagements, 49%
(autre) ont évoqué des raisons personnelles, ou soit parce que le
marché est plus dynamique dans cette zone. 33% affirment qu'ils ont
été déguerpis par les autorités de leurs anciens
lieux de vente et qu'ils ont trouvé cet endroit adéquat pour se
réinstaller. Ceux qui affirment qu'ils trouvaient leurs lieux de vente
moins rentable représentent 15% des enquêtés, contre 3%
seulement qui ont évoqué des raisons de taxes (chères).
La mobilité des occupants est intra urbaine dans ce
contexte. Cela peut être expliqué par la théorie
des lieux centraux50. La zone de Mermoz et Ouakam - sous
l'avantage des infrastructures comme la VND - offre une centralité au
niveau de la ville de Dakar. En plus, les activités exercées sur
ces voies ciblent une clientèle offerte par les flux quotidiens, mais
aussi certaines d'entre elles « appellent » d'autres
activités (la restauration et les parkings de vente par exemple). Ce
sont souvent des activités dont les clients doivent se déplacer
pour bénéficier d'un bien ou d'un service. Ainsi,
l'accessibilité de la zone est l'un des avantages que les
différents occupants veulent en bénéficier.
50 La théorie est fondée sur la
distinction entre des centres, qui sont le siège d'une offre de biens et
de services, et des périphéries (région
complémentaire du centre) où réside la demande, la
population utilisatrice. Elle a été fondée par W.
Christaller et A. Lösch en 1933.
80
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
I.2.2.2. Les installations sur la voie : de
l'étale à la construction en dure
La municipalité autorise l'occupation sur la voie
publique avec des installations précaires et démontable à
tout moment. Cependant, toutes les occupations ne sont pas conformes à
cette règle.
Figure I.21 :
Répartition des types d'installation
Autre Chariot Container Etale Enclos demontable Construction en
dur
|
|
|
|
|
|
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35%
Types d'installation
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Parmi tous les types d'installation de vente
répertoriés lors de nos enquêtes, les étalages sont
largement représentés 29%, suivis des enclos démontables
qui représentent 21%. Ces derniers sont essentiellement occupés
par les vendeurs de voitures. Certaines installations ont moins d'ampleur (les
chariots par exemple) et peuvent être délogées à
tout moment. En outre, le constat en est que certaines constructions ne
respectent pas la règle fixée par la municipalité, celle
de s'installer avec des matériaux précaires (les constructions en
dur qui représentent 13 % des installations).
Les différentes occupations sur la voie n'ont pas la
même envergure. L'occupation de l'espace se fait par rapport à
l'activité exercée. De ce fait, certaines activités
nécessitent plus d'espace, avec des installations particulières
(station de lavage et nettoyage). Le respect des normes est assuré par
la commune durant l'instruction du dossier mais aussi durant et après
l'occupation de la voie. Cependant, la réalité fait montre d'une
situation différente.
81
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Image I.1 : Illustration des
installations en dure sur la voie
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les occupants qui construisent en dur sont souvent les
vendeurs de véhicules et les stations de lavage. Ceux-ci
délimitent leur zone, y installent parfois des containers et
l'embellissent pour donner une belle image aux clients. Cette transformation de
la voie est effectuée sans harmonie et d'une manière non
coordonnée. Certains occupants respectent les normes et s'installent
avec des matériaux démontables. Les étales et les chariots
quant à eux n'occupent qu'une petite partie et s'installe d'une
manière précaire.
82
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Image I.2 : Illustration des
installations précaires
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
En outre, en plus de ces types d'occupations
répertoriés durant les enquêtes, il en existe d'autres sur
ces voies qui sont effectuées parfois sans autorisations : les parkings
de stationnement privé, l'aménagement des devantures des maisons,
l'installation des groupes électrogènes, etc. Les parkings de
stationnement sont privatisés souvent par des sociétés ou
autres types de services installés en face de la voie dont les clients
ou les employés ont des moyens de déplacement motorisés.
Certains sont arbitraires et on y trouve même des carcasses des voitures.
Les aménagements concernent en même temps certains services et des
logements qui embellissent leur façade en pavant et plantant des fleurs
tout au long de leur mur.
83
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Image I.3 : Les autres types
d'occupations
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
I.2.2.3. La superficie occupée par les
installations sur la voie
Les superficies des installations sur la voie publique
varient selon l'activité exercée. Certaines activités
requièrent une grande surface contrairement à d'autres. Cela
dépend aussi de la capacité de l'occupant à pouvoir payer
le prix au m2 car la commune fixe les redevances au m2
sur une durée déterminée.
84
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Figure I.22 :
Répartition des superficies des occupations
0 - 100 m2 100 - 150 m2 150 - 200
m2 200 - 250 m2 + 250 m2
1% 3%
7%
10%
79%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Une part importante des occupants (79%) est installée
sur une superficie comprise entre 0 et 100 m2. Ces petits espaces
sont occupés par des charriotes de café et des petits
étalages des vendeuses et des vendeurs de fruits et légumes, des
vendeuses d'arachides ainsi que de gargotes. Les espaces compris entre 100 -150
m2 représentent 10% avec comme occupant des cantines et
kiosques de journaux, etc. A côté de ces derniers, il y a les
laveurs de voitures qui représentent 1% et qui occupent une superficie
de 150-200 m2. En outre, une forte concentration de concessionnaires
automobile est notée sur ces voies. Ces derniers représentent
avec les stations de lavage les intervalles restant allant de 200 m2
à + 250 m2.
I.2.2.4. Les parkings de vente de véhicules,
une occupation inédite en prolifération dans la zone
Les parkings de vente, qui représentent 19% des
activités exercées dans cette zone, sont des occupations
particulières. S'étalant sur plusieurs mètres
carrés, ces types d'installations sont de plus en plus constants dans la
zone. Les dispositions des voies (leurs largeurs et la disponibilité
d'espace libre entre les chaussées et les habitations) facilitent leur
installation. Les communes, depuis 2013, sont dans un processus de
décentralisation. Elles ont plus de charges et leurs ressources sont
insuffisantes. Ainsi, les installations de parking de vente leur apportent
beaucoup (200 000 Fr par exemple pour la commune de Mermoz Sacré-Coeur)
en matière de recettes.
85
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Les artères favoris de ces commerciaux sont la VDN, le
Boulevard du Koweït et la rue allant du rondpoint de la Boulangerie Jaune
jusqu'au Collège Sacré-Coeur. Proportionnellement à la
superficie qu'ils occupent, le nombre de voiture varie d'un parc à un
autre.
Figure I.23 :
Répartition du nombre de voiture
plus de 30 20 à 30 10 à 20 0 à 10
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60%
Nombre de voiture
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
De tous les concessionnaires répertoriés et
enquêtés, la majorité (57%) dispose entre 10 à 20
voitures dans leur parc, sur une superficie comprise entre 200 et 250
m2. Ceux qui disposent entre 0 à 10, de 20 à 30 et
plus de 30 voitures dans leur parc représentent tous 14%. Cela nous
montre l'envergure des parcs dans la zone où tout au long de la voie on
n'aperçoit que des véhicules stationnés. Plus l'occupant a
de voitures, plus il nécessite d'espace.
Suivant cette dynamique (vu que les occupations de ce type
sont de plus en plus fréquentes), ces voies deviendront un grand centre
de vente et location de véhicule sans oublier les conséquences
qui pourront s'ensuivre. Dans la ville de Dakar, l'étalement et la
densification ont entraîné une réduction de l'espace mais
aussi la hausse du prix du foncier. Les vendeurs de véhicules n'ont pas
tous les moyens pour s'offrir des grands espaces pour exercer leur
métier. Par contre, la voie publique - surtout celle-ci ayant fait
l'objet de notre étude - leur offre une alternative. C'est aussi l'une
des raisons de l'afflux de ces commerciaux dans cette zone.
86
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
La vente de véhicule se fait dans un temps assez
important. Les voitures ne peuvent être écoulées - toutes -
en une semaine ou en un mois.
Figure I.24 : Nombre de vente
par semaine
10
12
10
8
6
4
1 1
2
0
0 à 05 05 à 10 20 à 20
Nombre de vente/ semaine
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les concessionnaires qui arrivent à vendre
jusqu'à 5, 10 à 20 voitures par semaine ne représentent
que 8%. Par contre, nombreux sont ceux qui arrivent à vendre uniquement
entre 0 à 5 voitures par semaine soit 83 %. La vente de véhicule
ne se fait pas rapidement dans le temps. Tout dépend de la
disponibilité des clients. Même si la vente prend du temps, elle a
son importance au niveau de revenu car une seule voiture vendue peu valoir plus
d'un million de FCFA.
Figure I.25 :
Répartition des clients visiteurs par jour
20 à 30
10 à 20
5 à 10
0 à 5
|
|
|
|
0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% 40%
Clients/jour
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
87
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Chaque jour, les propriétaires de parking
reçoivent des visites par des clients potentiels. 7% des vendeurs
reçoivent entre 20 à 30 clients par jour mais peu arrivent
à en acheter, suivi de 29% qui reçoivent entre 10 à 20
clients par jour. Ceux qui reçoivent entre 5 à 10 clients par
jour représentent 36%, soit le pourcentage le plus élevé
des vendeurs. 29% reçoivent moins de 5 clients par jour. Les visites
quotidiennes enregistrées montrent l'accessibilité des parkings
sur ces voies même si pour la plupart les visiteurs n'achètent pas
de véhicules.
Figure I.26 :
Répartition des provenances des voitures
Autre
Europe
USA
Italie
Belgique
Allemagne
Espagne
France
0% 20% 40% 60% 80% 100% 120%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les véhicules dans les parkings proviennent de
différents horizons. Parmi elles, 96% proviennent de l'Europe, notamment
des pays comme : l'Italie (15%), la Belgique (23%), l'Allemagne (6%) ;
l'Espagne (10%) et la France (21%). Les voitures en provenance des Etats-Unis
ne représentent que 21%. Et les 4% (autres) des pays du moyen orient
(Dubaï) et de l'Asie. L'importation des véhicules est devenue
intense depuis que le gouvernement a autorisé l'importation des
véhicules datant de plus de Cinq (05) ans. Les vendeurs diversifient
donc la provenance des voitures pour trouver celles qui sont à bon
prix.
88
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
L'étude de la gestion et de l'occupation de la voie
publique dans les deux communes de Ouakam et Mermoz Sacré-Coeur a
été, somme toute, un moyen de saisir les dynamiques de
l'organisation de l'espace et analyser la gestion de cet espace public
particulier. La voie publique aménagée avec des fonctions
précises (circulation) accueille des activités de nature diverse
qui finissent par la façonner au fil du temps. L'espace est donc
reproduit à travers ces interactions sociales : « l'espace peut
être considéré comme le produit (au sens large) de
l'activité sociale. Il est le signe et le résultat des
activités et des luttes des divers groupes. Il est l'objet de processus
d'appropriation ».
La gestion de la voie est assurée par la
municipalité. Les procédures administratives sont identiques dans
les deux communes (sauf pour les redevances). Les acteurs fournissent les
efforts pour bien gérer cet espace, mais ils sont sous la contrainte de
certains facteurs (manque de ressources humaines et financières). Cela a
des conséquences sur la manière dont ils gèrent qui
impacte à son niveau l'occupation de la voie. C'est en effet le cas de
certaines occupations qui ne sont pas dans les normes de
précarité (les constructions en dur des parkings et stations de
lavage) des installations sur ce domaine. Car la municipalité est moins
regardante sur ces normes si l'occupant s'acquitte des redevances.
Les caractéristiques sociodémographiques
constituent aussi des facteurs d'analyse des occupations sur la voie publique.
L'activité exercée, le niveau d'étude, le revenu peuvent
influencer les installations (le type, la superficie occupée) mais aussi
la régularité des occupations.
La gestion et l'occupation des voies dans ces communes
démontrent quelques irrégularités. Ce qui peut constituer
un effet de nuisance aux autres usagers de la voie et aux populations
riveraines. La perception des occupants influence l'occupation, mais l'impact
de ces occupations peut aussi influencer la perception des populations.
89
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
I.3. L'impact des occupations sur la population et
appréciation de la gestion des voies des différents acteurs
La voie publique est perçue par les acteurs d'une
manière distincte. La perception que chacun a de la voie influence sa
manière d'utiliser la voie. Les différentes installations sur la
voie ne sont pas sans conséquence ; elles ont un impact sur la
population (passants et les habitants riverains) voire sur la configuration de
l'espace. Les agents des communes affirment qu'ils prennent en compte ces
différents impacts lors de l'attribution du permis d'occupation, mais en
réalité les populations se plaignent de ces installations. Nous
allons ainsi analyser les différentes nuisances liées à
ces occupations et l'appréciation de la population des différents
usages de la voie et de sa gestion.
I.3.1. Les occupants et leur perception de la voie
La voie ne représente pas la même chose pour
tout un chacun. Les occupants qui s'installent sur la voie ont pour seul but
d'exercer une activité économique (du moins ceux qui ont fait
l'objet de notre étude). De ce fait bon nombre d'entre eux (89%)
considèrent que la voie publique est un support pour leurs
activités. Cela joue donc sur leur façon d'occuper la voie et par
là peuvent constituer de source de nuisance pour les autres usagers de
la voie.
Figure I.27 : Perception de la voie par les
occupants
Espace de circulation
Espace de détente et de loisir
Un espace d'expression
Un support pour les activités
|
|
|
0% 20% 40% 60% 80% 100%
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
90
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Rares sont ceux qui pensent à la dimension
récréative de la voie. La voie en tant qu'espace de circulation
et d'expression n'est pas importante pour les occupants. Le seul
côté qui leur intéresse est le support pour leur
activité. Cela s'explique par le fait que ces voies ne sont pas
aménagées pour d'autres usages à part la circulation et
les espaces libres entre les chaussées sont occupées par ces
occupants pour exercer leur activité. En plus, les occupants ne sont pas
sensibilisés sur les fonctions de la voie, ni sur les effets des
occupations. Une personne vient s'installer, une autre la suit et ainsi de
suite les occupations se prolifèrent. Les occupants savent que la voie
est destinée pour des fonctions particulières (la circulation),
mais les pratiques influencent de même la perception qu'ils ont de cet
espace.
I.3.2. L'appréciation des occupations par la
population
La vie en milieu urbain est souvent agitée à
cause des mouvements quotidiens, le bruit des engins, etc. Avoir un cadre de
vie calme et paisible est une préoccupation de tout citadin. Dans le
contexte de notre étude, la population qui habite non loin des voies et
les piétons enquêtés ont tous le même avis sur les
occupations de la voie publique. Respectivement, chaque catégorie trouve
que ces installations sont inappropriées. L'appréciation de ces
populations peut être justifiée par le niveau de nuisance des
occupations.
Figure I.28 :
L'appréciation des installations sur la voie
80%
70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0%
|
|
|
|
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
91
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
En effet, les occupations produisent de nuisances à
différents niveaux. Cela peut être du bruit, de
l'insalubrité ou encore une entrave à la circulation. Les
occupants ne prennent pas en compte tous ces détails en s'installant et
créent ainsi ces désagréments au niveau de la
population.
I.3.3. Les nuisances des occupations sur la voie
L'impact des occupations sur la voie se traduit en termes de
nuisance sur ces dernières. Une majorité parmi les
enquêtés au niveau des ménages et les piétons
affirme être touchée par ces nuisances comme l'on peut constater
dans le diagramme ci-dessous.
Figure I.29 : La part des
personnes impactés par les occupations
Non
Oui
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80%
Ménages rivérains Passants (piéton)
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
A la question de savoir si les occupations nuisent-elles,
plus de la moitié de la population enquêtés répond
à l'affirmatif. Les occupants impactent donc les populations à
plusieurs niveaux et de différentes manières. Parmi eux, certains
affirment (56%) s'occuper de leur production de déchets, mais aussi ne
produisent aucun bruit (93%). Mais pour les populations, la situation se
présente autrement, car nous avons répertorié
différents types de nuisance que les populations ont soulevée.
92
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Figure I.30 : Les
différents types de nuisances
Autre Risque d'accidents Encombrement Bruit
Insalubrité
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60%
Passants (piéton) Ménages rivérains
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les ménages riverains et les piétons sont tous
impactés par les occupations. Pour les ménages, l'encombrement
des voies et l'insalubrité sont les plus grandes nuisances. Pour les
piétons, ce sont l'encombrement et le risque d'accident. Certains
occupants, en s'installant, mettent des barrières sur les voies (parking
de vente par exemple) et cela agace les ménages et les piétons
qui veulent traverser la voie. Les piétons se retrouvent souvent sur les
chaussées partageant ainsi avec les voitures cet espace et courent un
risque d'accident en permanence d'autant plus que 73% des piétons
enquêtés empruntent fréquemment ces voies. Parmi les autres
nuisances, on peut souligner le fait que les occupants dénaturent le
paysage, une disharmonie avec le cadre urbain, mais aussi
l'insécurité des personnes.
Face à ces problèmes, les populations ne
signalent pas cependant leur situation à la municipalité. Au
niveau des ménages, 3 sur 14 seulement en ont signalé. Quant au
fait de discuter de ces nuisances avec les occupants, uniquement 1/16 en ont
fait. Cela aurait pu mettre la pression à la commune et aux occupants
afin qu'ils limitent les nuisances liées aux occupations sur la voie.
Pis encore, la majorité des ménages et des piétons
s'approvisionnement auprès de ces occupants.
93
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Figure I.31 : niveau
d'approvisionnement des populations
Ménages rivérains
Passants (piétons)
|
|
|
|
0% 10% 20% 30% 40% 50% 60%
Non Oui
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
En effet, les ménages et les piétons pour une
part de 56% chacun s'approvisionnent auprès des occupants. Ces derniers
offrent des produits au détail et accessibles par ces populations sans
effectuer un long déplacement au marché. Vue cette situation,
nous pouvons dire que les occupants sont encouragés dans leur position
quand la population vient acheter quelque chose auprès de lui.
Même si les ménages et les piétons se plaignent, ils
cautionnent d'une part les installations sur la voie.
I.3.4. L'appréciation de la gestion des voies
publiques
Les avis divergent sur la gestion des voies par la commune.
Interrogés sur cette question, occupants, ménages et passants
répondent par rapport à leur position et leur cadre de vie,
c'est-à-dire que chacun voit la gestion de la commune par rapport
à son usage (les piétons s'intéressent à la
circulation par exemple).
94
Troisième partie :
présentation des résultats et
recommandations
Figure I.32 :
Appréciation des différents acteurs de la gestion de la
voie
60% 50% 40% 30% 20% 10% 0%
|
|
|
|
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|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Ménages Occupants Passants (piétons)
|
|
|
Source : enquêtes
mémoire / Moussa Dicker 2016
Les appréciations sont en général
favorables. Toutes les trois catégories appréciation moyennement
le travail de la municipalité. Et exceptionnellement parmi les
occupants, 42% trouvent qu'elle est bonne et 3% très bonne. Ces chiffres
s'expliquent par le fait que tous les jours, une voiture passe ramasser les
ordures et des travailleurs nettoient les rues.
Par contre, ceux qui trouvent que la gestion est mauvaise
représentent aussi une part importante (44% des ménages, 26% des
passants et 16% des occupants). Pour les ménages et les passants, cette
mauvaise appréciation est liée aux nuisances que causent les
occupations autorisées par la commune. Quant aux occupants, ce sont les
déguerpissements temporaires et le harcèlement des agents leurs
principaux soucis.
L'impact des occupations sur le cadre de vie de la population
est souvent ignoré par les occupants eux-mêmes et les acteurs de
la municipalité. Les populations n'ont pas tout à fait une bonne
perception des différentes occupations parce que ces dernières
les gênent à un moment donné. Une mauvaise gestion
entraîne des occupations irrégulières ou anarchiques qui
ont à leur niveau des effets sur les autres usagers de la voie.
Même si la commune est généralement bien
appréciée, il reste que la gestion des occupations sur la voie
est toujours problématique. Les causes sont plus ou moins connues et, de
ce fait, des dispositions peuvent être prises afin d'améliorer la
situation.
95
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Chapitre III : Recommandations
Au vu des différentes contraintes qui ont
été soulevées dans les analyses, quelques recommandations
vont être proposées afin dans le sens d'améliorer les
conditions des différents acteurs. Ces recommandations prennent en
compte les préoccupations des différentes parties prenantes.
III.1. Les recommandations générales
Les contraintes rencontrées par les acteurs et les
usagers se présentent à différents niveaux. Certains
problèmes sont d'ordre général et requièrent
l'attention des autorités supérieures (l'Etat par exemple). C'est
le cas de la règlementation dans les textes (surtout en matière
d'urbanisme) où il faudrait prendre en compte des dispositions relatives
aux espaces publics en général et à la voie publique
particulièrement.
En effet, dans les différents textes (codes de
l'urbanisme, des collectivités ou encore du domaine de l'Etat), il
n'existe pas des normes spécifiques aux différentes
installations. Des normes qui auraient pu aider les acteurs durant
l'instruction pour prendre des décisions nécessaires liées
aux types d'installation. Car il est ressorti de notre étude que les
occupations n'ont pas les mêmes envergures et s'installent distinctement
sur la voie. L'intégration de ces normes dans les textes
nécessiterait certes une réforme. Mais une actualisation de ces
textes dans le contexte actuel (où les collectivités ont plus de
responsabilités) permettrait aux municipalités de mettre en place
des outils de gestion beaucoup plus efficaces.
Les communes sont aussi limitées à cause du
manque de ressources, surtout financières. C'est à cause de ce
handicap que les communes sont complaisantes face au non-respect des normes en
se focalisant sur les redevances des occupants. Un transfert des moyens en
même temps que celui des compétences - déjà
enclenché - permettrait aux municipalités de recruter des
ressources humaines qualifiées mais aussi de disposer des outils
nécessaires pour assurer une bonne gestion de leur territoire. L'Etat
peut donc intervenir à ces niveaux pour contribuer à
l'amélioration de la situation des acteurs.
96
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
A l'échelle des communes, il existe des solutions plus
technique et à la portée des gestionnaires de la voie publique.
Ces recommandations se regroupent en trois (03) catégories :
· Mettre en place un dispositif de contrôle avec
des outils mieux adaptés pour la gestion de la voie publique
· Aménager les voies pour mieux contrôler
les installations
· Créer un cadre de dialogue avec les occupants
afin d'éviter tout conflit entre les acteurs
· Mettre en place un cadre de sensibilisation
III.2. Les recommandations spécifiques
Les solutions proposées dans les recommandations
générales peuvent être détaillées à ce
niveau et ainsi leur mise en place sera facile.
III.2.1. La mise en place d'un dispositif de
contrôle avec des outils adaptés
· Mettre en place un outil SIG et
· Créer une base de données foncière
de la commune
· Élaborer des documents cartographiques
parcellaires des espaces publics
· Faire un recensement de tous les occupants
· Réalisation des enquêtes (auprès de
toutes les parties prenantes) pour la création de la base de
données
· Instaurer des normes spécifiques relatives aux
différents types d'installation
· Renforcer le dispositif de contrôle
· Élaboration de logiciels de gestion des
données urbaines
III.2.2. Aménager les voies
· Faire un zonage de la voie publique et des espaces
publics en général : zone des équipements marchands, zone
de circulation, zone de récréation, etc.
· Paver les emprises de la voie
· Mettre en place les éclairages
· Aménager des espaces verts pour vivifier ces
espaces
97
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
III.2.3. Mettre en place un cadre de sensibilisation
? Faire des descentes régulièrement pour
sensibiliser la population
? Concerter et impliquer les populations et les occupants
dans les prises de décisions
? Restituer publiquement des dispositions prises qui sont
relatives à la gestion des espaces publics
? Impliquer la population dans le contrôle de ces
espaces
Ces recommandations ne sont pas exhaustives, mais peuvent
être un départ pour la résolution des différents
problèmes liés à l'occupation et la gestion des voies - et
des espaces publics. Le déguerpissement n'est pas une solution
pérenne. Ces solutions s'inscrivent dans le long terme. L'étude
des occupants (qui peut être renforcée par d'autres recherches)
permet de comprendre les dynamiques des occupations et d'agir en
conséquence. La maîtrise des occupants est importante pour
contrôler les différentes installations.
« Tout ce qui est fait pour moi, sans moi, est fait
contre moi » disait Nelson Mandela. L'implication de la population
dans la gestion des espaces est ainsi essentielle pour rendre efficace les
différentes actions. Elle peut être un relais des bonnes pratiques
pour tous les acteurs. C'est aussi un moyen de pérenniser les
initiatives en matière de gestion de la voie. Etant directement
touchée par les effets des occupations, la population sera plus
disposée à aider la commune dans ses tâches - si cette
dernière l'implique.
98
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
III.3. Le plan d'action des recommandations Tableau
n°8 : Plan d'action des différentes propositions
Propositions
|
objectifs
|
Acteurs
|
Contraintes
|
Résultats attendus
|
Mettre en place un outil SIG
|
Avoir un contrôle du territoire ;
Analyser et suivre les données
Améliorer la gestion du patrimoine foncier
|
Communes ; partenaires
|
Coût élevé ;
Manque de personnes qualifiées
|
Création d'une base de données cartographique et
foncière ;
Maitrise des occupations sur la voie
|
Élaborer des documents cartographiques
parcellaires des espaces publics
|
Faciliter le contrôle des espaces publics ;
Maîtriser la gestion de ces espaces
|
Communes ; partenaires
|
Coût élevé ;
Manque de personnes qualifiées ;
Longue durée de réalisation
|
Une bonne gestion de la voie ;
Renforcement des outils de
gestion
|
|
99
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Faire un recensement des occupants
|
Contrôler les occupations ;
Maîtriser les recettes
|
Communes ; partenaires
|
Coût élevé ;
Complications avec les occupants ;
|
Mise en place d'une base de données des occupants
Organisation des occupants Recouvrement des recettes
|
Renforcer le dispositif de contrôle
|
Dissuader les
occupations irrégulières et anarchiques
|
Communes
|
Non coopération des occupants
|
L'éradication des occupations
irrégulières et anarchiques
|
Instaurer des normes spécifiques
|
Contrôler les installations ;
Réduire l'impact des occupations
|
Communes ; l'Etat
|
Risque de refus de collaboration des occupants
|
La mise en place des règles de bases
pour les différentes
procédures administratives
|
Réalisation des enquêtes (auprès de
toutes les parties prenantes)
|
Avoir une base de données urbaines
|
Communes ; partenaires
|
Le coût élevé ; le temps
|
Création de base de données pour
l'élaboration des plans ;
Cartographie (thématique) des
données
|
|
100
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Élaboration de logiciels de gestion des
données urbaines
|
Faciliter le recueil et le traitement des données ;
Maîtriser, accroître et consolider les ressources
financières
|
Communes ; partenaires
|
Coût élevé ;
Manque de personnes qualifiées
|
Mise en place d'un outil de
traitement et d'analyse ;
Améliorer les procédures
administratives ;
Recouvrement des recettes
|
Faire un zonage
|
Délimiter les zones ; Contrôler les occupations
|
Communes
|
Manques de ressources;
|
Organisation de l'espace ; Réduction des nuisances ;
Stabilisation des occupants
|
Paver les emprises
|
Réduire les espaces non aménagés
|
Communes ; partenaires
|
Coût élevé
|
Rationalisation de l'espace ; Mise en valeur des espaces
|
Mettre en place les éclairages
|
Réduire l'insécurité ;
|
Communes ; Etat
|
-
|
Fréquentation des voies jour et nuit ;
Réduction de l'insécurité
|
|
101
Troisième partie : présentation des
résultats et recommandations
Aménager des espaces verts
|
Améliorer l'esthétique ;
Créer une zone d'attraction
|
Communes ;
Etat et partenaires
|
Coût élevé ;
Entretien des espaces
|
Embellissement des voies ;
Augmentation des fréquentations
dans la zone
|
Faire des descentes régulièrement pour
sensibiliser
|
Sensibiliser les occupants et la population sur les normes de la
voie
|
Commune
|
-
|
Réduction des nuisances ; Prise de conscience des
acteurs
|
Concerter et impliquer les populations et les
occupants
|
Faire participer la population
|
Commune
|
Conflit d'intérêts
|
Réduction des occupations
anarchiques,
Sensibilisation de la population
|
Impliquer la population dans le
contrôle
|
Renforcer le contrôle
|
Commune
|
-
|
Eradication des occupations
anarchiques et irrégulières ;
Optimisation de la collecte des taxes
|
|
102
CONCLUSION
Les espaces publics urbains sont organisés d'une
manière à mettre en relation différents acteurs : «
Tout espace urbain, qu'il soit réel ou idéal, est
caractérisé par une répartition des activités et
des hommes, une organisation de leurs relations » (Gilli
Frédéric, 2001). L'Homme, quand il occupe un espace, a tendance
à le spécialiser selon ses besoins et dans une logique bien
déterminée (Von Thünen 1826). L'analyse de la
problématique liée à m'occupation et de la gestion de la
voie publique dans les communes de Ouakam et de Mermoz Sacré-Coeur a
permis de caractériser les différents occupants, les types
d'installation, les modalités de gestion de la voie ainsi que les
différents impacts des occupations sur la population. La voie publique,
en tant qu'espace publique, met en interaction différents acteurs au
niveau de la ville.
Notre première hypothèse de départ
stipule que « les caractéristiques des occupants
déterminent les modes d'occupation sur la voie publique ». Les
occupants sont majoritairement représentés par des hommes (71%)
et des jeunes (54% la tranche d'âge 16 - 30 ans). Les activités
qu'ils pratiquent sont variées avec des niveaux de revenus
majoritairement faibles. Les types d'installations vont des simples
étales aux constructions en dur. Mais au-delà de ces
caractéristiques, les différentes occupations s'effectuent soit
par rapport à l'activité exercée, soit les moyens dont
dispose l'occupant. En effet, les vendeurs de café ont des chariots, les
propriétaires de parking installent leurs containers et/ou construisent
des enclos en dur, parfois démontables. Notre première
hypothèse, à travers ces résultats, se confirme. En plus,
il ressort que les activités récréatives ne sont presque
pas présentes dans la zone.
La deuxième hypothèse de notre travail est la
suivante : « Les procédures d'autorisation se font plutôt
selon un standard défini par les acteurs de la commune selon la nature
domaniale du lieu ». Selon les normes, l'occupation de la voie
publique est précaire et révocable. La gestion de ces voies est
donc une compétence des compétences de la commune. Durant la
procédure pour l'octroi d'un permis d'occuper la voie, les services
techniques, à part la norme évoquant la précarité
de l'occupation, n'ont aucune autre règle sur laquelle ils doivent se
baser. Ainsi donc, après analyse des différentes
procédures dans les deux communes, l'hypothèse avancée se
confirme car, il n'existe pas encore des normes urbanistiques sur lesquelles
les agents peuvent se
103
baser pour instruire une demande. Mais aussi toutes les
demandes sont traitées de la même manière, même si
les types d'installation peuvent être différents.
Quant à la troisième hypothèse, elle
affirme que « La perception que les populations ont de la voie
publique et de ses usages est relative au niveau de nuisance de ces derniers
sur leur cadre de vie ». Les occupations causent des nuisances et
impactent les habitants riverains (68%) et les piétons (74%). Les
riverains et les passants trouvent majoritairement ces occupations
inappropriées. Ils considèrent qu'elles encombrent, salissent et
à cause d'elles les passants courent des risques d'accident. De ce fait,
les populations trouvent qu'à ce niveau, la commune n'assure pas bien
son rôle et que les voies ne sont pas bien gérées.
L'exception en est qu'une majorité d'entre elles trouve que la commune
gère moyennement bien. Cette perception est liée à la
salubrité de la voie qui est plus ou moins entretenue par la commune.
Notre troisième hypothèse se confirme, mais il faut d'abord
prendre en compte certains paramètres.
Les problèmes liés à l'occupation de la
voie publique à Dakar sont nés avec la création de la
ville elle-même. C'étaient des occupations anarchiques ou
irrégulières qui arpentent les artères les plus
fréquentées au niveau de la ville. On pouvait distinguer les
mendiants, les tabliers, les vendeurs ambulants etc. Plus tard avec les
différentes crises qui ont touché le pays, Dakar est sous une
pression démographique. Cette vague de population pour s'adapter dans la
ville s'ajoute aux occupants de la rue et aggrave le
phénomène.
Les différentes communes ont donc pour combat
régulier la lutte contre ces occupants ambulants et anarchiques. Ils
encombrent les voies, salissent les passages et cause même des accidents
de circulation. Les tentatives de déguerpissement sont nombreuses, mais
le fléau ne cesse d'augmenter. Cependant, notre étude a
porté sur les occupants qui sont fixes. Des nouveaux types d'occupation
sont constatés au niveau des principales voies (VND) dans les communes
de Ouakam et Mermoz Sacré-Coeur. On compte parmi eux principalement les
parkings de vente de véhicules et des stations de lavage et de
nettoyage. Ces installations se multiplient en grand nombre sur ces
artères au dépend de l'esthétique urbain et des
préoccupations des populations concernées. Les communes, quant
à elles cherchent à bénéficier des taxes à
travers ces occupations et autorisent les installations qui sont pour les
passants et habitants
104
riverains sources de nuisances. Et depuis la mise en oeuvre de
l'Acte 03, les communes profitent de nouvelles compétences qui leur ont
été transférées et autorisent des installations
à leur guise, en priorisant les ressources qu'elles peuvent en tirer.
Ainsi se résume la situation des occupations et la
gestion de la voie publique dans les communes de Ouakam et Mermoz
Sacré-Coeur. Les recommandations qui ont été
formulées peuvent contribuer dans la mise en place d'un cadre
idéale pour l'amélioration des conditions de tous les acteurs.
Elles ne sont certes exhaustives, mais apportent une solution à long
terme aux différents problèmes des deux communes.
En dehors des objectifs fixés par cette étude,
l'analyse des résultats ouvre la voie à d'autre recherche. Le
manque des activités de loisir remarqué dans ces zones, la place
du piéton dans le contexte actuel où la motorisation est remise
en question, etc. sont des thématiques actuelles faiblement
traitées dans cette étude. « La nature des
déplacements influence la nature des frontages, et
réciproquement. » (Nicolas Soulier, "Reconquérir
les rues" 2012, p.136). Une étude à une échelle multi
scalaire avec étude approfondie du phénomène contribuera
à la compréhension des dynamiques liées à
l'occupation de la voie publique.
105
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages généraux
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ouest-africaine : modèles de planification de l'espace urbain,
2013. 368 p.
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Guéladio CISSE et Vincent KAUFMANN Quelques rues d'Afrique.
Observation et gestion de l'espace public à Abidjan, Dakar et Nouakchott
; 2009. 256 p.
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·
106
MBEMBO MBEMBO Laure Laurentia, problématique des
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nationale n°1, tronçon Bontou Pikine-Poste, mémoire
ESEA 2012. 103 p.
· MVOUNOU NJONA Phred Rommel, la
problématique de l'occupation anarchique des abords des voies publiques
de Dakar : cas des voies publiques de Médina ; mémoire ESEA
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· NGANAT T. N. Chantal, les effets de l'alimentation
de rues dans la zone urbaine de Dakar : cas des restauratrices de la ville de
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Rapports, lois et dictionnaires
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3eédition, 2010.
· Schéma directeur d'aménagement et de
développement territorial de la zone Dakar-Thiès-Mbour, rapport
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· Loi n° 76-66 du 02 juillet 1976
portant code du domaine de l'État.
· Loi n° 2013-10 du 28
décembre 2010 portant Code général des
collectivités locales Revues en ligne et sites web
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· Antoine FLEURY, Espace public in.
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consulté le 09.05.16
· Arrigazzi Lucila, Jallade Lucila Arrigazzi. «
Niveau d'instruction et salaires. In: Revue française de
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· Cheikh Samba Wade, Rémy Tremblay et El Hadji
Mamadou Ndiaye, in Études caribéennes «Etude de la
complexité de la gestion des espaces publics à vocation de
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· Dahlgren Peter, Relieu Marc. L'espace public et
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volume 18, n°100, 2000. Communiquer à l'ère des
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· TOMAS François. L'espace public, un concept
moribond ou en expansion ? Géocarrefour, vol. 76, n°1, 2001.
L'espace public. pp. 75-84
·
107
www.senenews.com publié le
09/02/2015 à 19:45
108
ANNEXES
109
Questionnaire adressé aux ménages
2016 - ESEA
Cette enquête est réalisée dans le cadre
d'un mémoire de fin d'étude portant sur l'occupation de la voie
publique
Analyse de la perception
1. Comment qualifierez-mus les installations sur les voies
publiques?
m 1. Appropriées 0 2. Non appropriées,
2. Est ce que ces occupations vous nuisent-elles?
m 1.Oui O 2. Non
3. Si 'Our, comment?
D 1. Insalubrité D 2. Bruit D 3. Encombrement
4. Autre
Vous pouvez cocher plusieurs cases {3 au maximum).
La question n'est pertinente que si Nuisance des
installations = "Oui"
4. Si 'Autre', préciser
La question n'est pertinente que si Niveau des nuisances =
'Autre"
5. En avez-mus parlé avec les occupants?
m 1.Oui O 2. Non
La question n'est pertinente que si Nuisance des
installations = "Oui"
6. Les nuisances ont-elles diminué?
m 1.Oui O 2. Non
La question n'est pertinente que si Discussion avec les
occupants = 'Oui"
7. En avez-vous signaler à la commune?
m 1.Oui O 2. Non
La question n'est pertinente que si Nuisance des
installations = "Oui"
8. La commune est elle intervenue pour gerer la situation?
m 1.Oui 0 2. Non
La question n'est pertinente que si Perception des
insta&utions = Won appropriées," ou Nuisance des installations =
"Oui"
9. Comment trouvez-mus la gestion par la commune?
m I. Mauvaise O 2. Moyenne 0 3. Bonne
10. Vous approvisionnez-mus de ces occupants?
m 1.Oui O 2. Non
11. Quelles sont vos recommandations pour une bonne gestion de
la mie?
Questionnaire adressé aux occupants
2016 - ESEA
Ce questionnaire est élaboré dans le cadre
d'une récherche pédagogique pour un mémoire de fin
d'étude.
Identification
1. Quel est votre genre?
m I.M 0
2. Quel est votre âge?
m 1.0-15 0 2. 16-30 0 3.31-45 0 4.46-60 0 5.60+
3. Quel est votre niveau d'élude?
m 1. Supérieur(Bac+) 0 2.
Secondaire
m 3. Primaire 0 4. Alphabétisé
m 5. Daara 0 6. Non scolarisé
14. Si 'OUF où étiez-vous
avant?
m 1. Ville de Dakar
m 2. Hors de la Ville de Dakar
m 3. Hors de la Légion de Dakar
la question n'est pertinente que si
Nouvelle_activité = 'Oui"
15. Pourquoi avez-vous quitter votre ancienne
place?
D 1. Déguerpis sement D 2. Moins rentable
D 3. Taxes chères D 4. Autre
Vous pouvez cocher plusieurs cases (2 au maximum).
Ill question n'est pertinente que si
Nouvelle_activité = 'Oui"
16. Si "Autre" préciser
4. Quel activité exercée-vous?
m 1. Vente et location de véhicules
m 3. Restaurateur
m 5. Vendeur de fiuits
m 2 Garagiste
m 4. Boutiquier
m 6. Autre
la question n'est pertinente que si Motif
deménagement= 'Autre"
5. Si 'Autre', précisez :
6. Quel est en moyenne votre niveau de revenus par
mois?
m 1.0-50000Fr O 2 50 000- 100 000 Fr
m 3. 100 000 - 200 000 f O 4.200 000 Fr et p lus
7. Exercez-vars une autre activité?
m 1.Oui 0 2. Non
8. Si 'Oui' précisez
m 1. Agriculteur 0 2. Etudiant 0 3. Attisant
m 4. Commerçant 0 5. Chauffeur 0 6. Autre La question
n'est pertinente que si Autre activité = "Oui"
Analyse de l'occupation
9. Quel est votre type d'installation?
D 1. Construction en dur 2. Enclos demontable
D 3. Etale D 4. Container
q 5. Gille pour stockage D 6. Chariot
q 7. Autre
L
Vous pouvez cocher plusieurs cases (2 au maximum).
10, Si 'Autre', précisez :
11. Combien de superficie occupez-vous?
m L0 - 100 mz O 2 100 -150 nix O
3. 150 - 200 nix
m 4.200-250nif O 5.+250mz
12. Depuis quand occupez-vous cette place?
m 1. Zéro - Six mois 0 2. Six mois - Un
an
m 3.Un- Deux ans 0 4. Deux- Trois ans
m 5. Plus de Ibis ans
13. Fkercez-vous cette activité avant de vous
installez ici?
m I. Oui 0 2. Non
17. Pourquoi avez-vous choisi cette place?
D
110
I. Accessibilité des clients 2. Moins de
contrôle
q 3. Taxe communale moins chère El 4.
Visibilité
D 5. Autre
Vous pouvez cocher plusieurs cases (3 au maximum).
18. Si 'Autre', précisez :
Information sur les vendeurs de
véhicule
Cette catégorie est adressée uniquement aux
vendeurs de véhicules.
19. Combien de véhicule
disposez-vous?
m 1.0-10 0 2.10-20 0 3.20-30 0 4.+30 La
question n'est pertinente que si Activtié = 'Vente et location de
véhicules"
20, Combien de véhicules vendez-vous en moyen
dans une semaine?
m 1.0-05 0 205-10 0 3.10-20 0 4. Plus de 20
La question n'est pertinente que si Activtié =
'Vente et location de véhicules"
21. Combien de visite de clients avez-vous par
jour?
m 1.0-05 0 205-10 0 3.10-20
m 4.20-30 0 5.+30
La question n'est pertinente que si Artivtié =
'Vente et location de véhicules"
22. D'où proviennent vos
véhicule?
D 1. France D 2. Espagne D 3.
Allemagne
D 4. Belgique D 5. Italie D 6. USA
q 7. Autre
Vous pouvez cocher plusieurs cases (6 au maximum).
la question n'est pertinente que si Activtié =
'Vente ei location de véhicules"
23. Si'Autre', précisez :
La question n'est pertinente que si Activtié = 'Vente
et location de véhicules"
Dispositions règlementaires
24. Avez-vous une autorisation d'occuper?
m 1. Oui 0 2. Non
25. Si'Non', pour quelles raisons?
D L Ignorance 0 2. lourdeur administrative
q 3. Demande réfuser El 4. Procédure couteuse
q 5. Autre
Vous pouvez cocher plusieurs cases (3 au maximum).
La question n'est pertinente que si Pennis_d'occup =
'Non"
26.1.a commune mus à-t-elle interdit l'occupation?
m I. Oui O 2. Non
La question n'est pertinente que si Pennis_d'occup =
27. Payez-mus la taxe même si mus n'avez pas de permis?
m 1. Oui 0 2. Non
La question n'est pertinente que si Permis_d'occup =
'Non"
28. Si mus avez de permis, il est délivré pour
combien de temps?
m I. Zéro - Six mois 0 2. Six mois - Un an
m 3.Un-Deux ans 0 4. Plus de deux ans
m 5. Illimité
La question n'est pertinente que si Permis d'occup =
"Oui"
29. Vous avez réçu votre permis dans combien de
jours après le dépôt du dossier?
m 1. Une semaine 0 2. Deux semaines 0 3. Un mois
m 4. Plus d'un mois
La question n'est pertinente que si Pennis_d'occup =
"Oui"
32. Produisez-mus déchets?
m
1.Oui O 2. Non
33. Si' Oui' ,les fierez-mus?
m I.Oui 0 2. Non
La question n'est pertinente que si Dechets_ordures =
'Pur'
34. Vos activités causent-elles du bruit?
m 1.Oui O 2. Non
35. Si'Oui',les habitants se plaignent-ils?
m ].Oui 0 2. Non
La question n'est pertinente que si Bruit = 'Oui"
36. Quelles mesures avoz-mus pris pour le reduire?
La question n'est pertinente que si Bruit =Oui"
37. Comment appreciez-sous le montant de la taxe?
m I. Tros chèr 0 2. Moyen 0 3. Moins chèr
La question n'est pertinente que si Permis_d'aec'up =
"Oui"
38. Comment trouvez la gestion de la mie paNique par la
commune?
m 1. Mauvaise 0 2, Moyenne 0 3. Bonne
m 4. Très bonne
39. Quelles sont les contraintes que mus rencontrez?
111
Perception et impacts
40. Quelles sont vos recommandation?
30. Qu'est ce que la voie pudique représente pour mus?
D
1. Un support pour les activités
D 2. Un espace d'expression
q 3. Espace de détente et de loisir
q 4. Espace de circulation
q 5. Autre
Vous pouvez cocher plusieurs cases {4 au maximum).
31. Si'Autre', précisez :
La question n'est pertinente que si Perception =
'Autre"
112
Questionnaire adressé aux passants (piétons)
2016 - ESEA/UCAD
Ce questionnaire est adressé dans le cadre d'une
recherche pédagogique (mémoire de fin d'étude) sur la
problématique de la gestion et l'occupation de la voie publique. Merci
de bien vouloir nous répondre.
1. Emprunter-vous fréquement cette
voie?
m 1. Oui O 2. Non
2. Comment appréciez-vous les occupations sur
celte voie publiquue?
m I. Appropriées 0 2.
Innappropriées 0 3. Sans avis
3. Ces occupations vous contraignent-elles lors
de entre déplacement sur cette voie?
m I. Oui O 2. Non
4. Si 'OUT, comment?
D 1. Encombrement D 2 Insalubrité
D 3. Risque d'accidents 4. Autres
Vous pouvez cocher plusieurs cases.
La question n'est pertinente que si Contraintes dans la
mobilité = "oui"
5. Acheter-vous des tiens auprès de ces
occupants?
m 1. Oui O 2. Non
fi. Comment trouvez-Wons la gestion de la voie publique
parla Mairie?
m 1. Bonne O 2. Assez-bonne O 3. Moyenne O 4.
Mauvaise
1. Quelles solutions proposerez-vous pour un bon usage et
une bonne gestion de la voie?
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