La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA
Julio Chancel
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INTRODUCTION GENERALE
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La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
L'impossibilité de recouvrer les crédits
immobiliers aux États-Unis d'Amérique a causé une grave
crise bancaire, qui s'est progressivement généralisée, au
point d'affecter le système financier international dans son
ensemble1. Cette situation qui, de par le monde, s'est suivie de
l'interventionnisme des États dans l'économie, notamment par des
injections massives de fonds publics en vue de soutenir le système
bancaire, a révélé une fois de plus le rôle crucial
que jouent les banques dans l'économie mondiale.
Quel que soit la nature de la banque concernée, leurs
activités exigent une attention particulière tant de la part du
législateur que des personnes en charge de l'administrer. Cette
assertion trouve toute sa pertinence en Afrique subsaharienne, et surtout dans
les pays de la CEMAC2, où en l'absence de marchés
financiers dynamiques, les banques constituent les principaux catalyseurs de
développement. Dans cette partie du monde en effet, de profondes
mutations législatives ont eu lieu ces deux dernières
décennies, affectant parallèlement l'activité
bancaire3.
Dans ces pays, comme ailleurs, l'activité bancaire se
compose de trois (03) principales opérations: la réception des
fonds du public, la gestion des moyens de paiement, et l'octroi de
crédit4. Concernant singulièrement cette
dernière opération, elle est définie comme: «
tout acte par lequel une personne met ou promet de mettre des fonds
à la disposition d'une autre personne ou prend, dans
l'intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel un aval, un
cautionnement ou une garantie»5. De cette
définition, se dégagent deux principaux types de crédit
à savoir: le crédit de décaissement des fonds et le
crédit par signature. Ces crédits, qui sont
généralement accordés pour des durées
variables6, ont pour conséquence commune de faire peser sur
le banquier un certain nombre de risques. Notamment, celui
d'insolvabilité du débiteur, d'immobilisation des fonds et de
responsabilité.
1 Allusion faite ici à la crise
financière internationale de 2008. V. Jeune Afrique N°2491 du 5 au
11 octobre 2008.
2 Communauté économique et
monétaire d'Afrique Centrale. Crée le 16 mars 1994 à
Ndjamena entre le Cameroun, la Centrafrique, le Congo, le Gabon, la
Guinée Équatoriale et le Tchad, en remplacement de l'Union
Douanière des États d'Afrique Centrale(UDEAC).
3 Ces mutations législatives vont de la
reforme et de la restructuration du système bancaire dès 1990
à la suite de la crise bancaire des années 1980 en Afrique
centrale, à l'adoption des premiers actes uniformes OHADA notamment ceux
relatifs aux sûretés, aux voies d'exécution et aux
procédures collectives d'apurement du passif en 1998. Cf. sur la
restructuration du système bancaire en Afrique Centrale; ADAM MADJI :
Point sur la restructuration du système bancaire en Afrique Centrale.
www.beac.int consulté le 08-01-2009.
4 Cf. Article 4 de l'annexe à la Convention
du 17 janvier 1992 portant harmonisation de la réglementation bancaire
dans les États de l'Afrique Centrale.
5 Article 6 de l'annexe à la convention
précitée.
6 On distingue généralement, le
crédit à court terme qui est un crédit accordé pour
une durée n'excédant pas deux (2) ans; le crédit à
moyen terme accordé pour une période supérieure à
deux (2) ans et inférieure à sept (7) ans, et le crédit
à long terme dont la durée est supérieure à sept
(7) ans. Voir, BONNEAU (T), Droit bancaire 4e édition,
Montchrestien 2001, P. 44.
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Alors que le risque de responsabilité découle
généralement d'une faute du banquier7, les risques
d'insolvabilité et d'immobilisation sont par contre le fait du
débiteur. Cependant l'activité de crédit, bien
qu'intimement liée au risque, conserve une importance
manifeste8. D'abord, à l'égard du banquier pour qui
elle constitue une opération lucrative9. Puis, à
l'égard des entreprises et des particuliers pour qui elle permet de
soutenir l'investissement et la consommation. Ainsi, face aux risques
émanant du débiteur, le banquier a pour principale option de
recourir aux garanties10.
Les principales garanties, ou mieux les
sûretés11, sont régies en zone CEMAC par le
droit OHADA12 qui distingue, dans un acte uniforme y relatif, les
sûretés personnelles, des sûretés réelles.
Tandis que les premières consistent à l'engagement d'une personne
de répondre de l'obligation du débiteur principal en cas de
défaillance de ce dernier ou à première demande du
bénéficiaire de la garantie, les secondes consistent dans le
droit du créancier de se faire payer, par préférence, sur
le prix de la réalisation du bien meuble ou immeuble affecté
à la garantie de l'obligation de son débiteur13.
Les sûretés réelles immobilières,
qui occupent une place de choix parmi les sûretés14,
forment en réalité une catégorie
monolithique15. Car, elles sont essentiellement
constituées
7 Idem P. 492 et suivantes. V. aussi, LHOSPICE (A)
MEISSONNIER (M), La responsabilité du banquier fondée sur
l'octroi de crédit excessif, Cahier de recherche n°3,
www.resposabilitédubanquier-distributeurdecrédit.com
8 LEGEAIS (D), sûretés et
garanties du crédit, 6e édition LGDJ, 2008. P.2.
AYNES (L) ET CROCQ (P), Droit civil, les sûretés la
publicité foncière, 2e édition
Défrénois 2006 P. 7. SIMLER (Ph). DELEBECQUE(Ph), Les
sûretés, la Publicité foncière, 4e EJA, Paris,
2004. P.11
9 BONNEAU (T), op. cit, P.39
10 Les garanties représentent l'ensemble des
moyens juridiques permettant de garantir le créancier contre le risque
d'insolvabilité du débiteur. Voir, GUILLIEN (R) et VINCENT (J),
Lexique des termes juridiques. 13e édition Dalloz
2001. P. 308. Cette acception est très proche de la définition
des sûretés telles que prévues à l'article
1er de l'acte uniforme OHADA y relatif, cependant, il faudrait bien
se garder de confondre les deux notions en ce que la notion de garantie est
plus large, c'est un terme générique qui englobe les
sûretés. Voir aussi, ANOUKAHA, (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI
FOLI, ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA SAMB, OHADA
Sûretés, collection Droit uniforme Africain, édition
Bruylant, Bruxelles 2002. P. 1.
11 Lire dans ce sens LEGEAIS (D), op cit. P. 1.
Notons également que les sûretés se distinguent des
garanties en ce qu'elles constituent une catégorie plus fermée.
Elles sont définies par l'A.U.S comme des moyens accordés au
créancier par la loi de chaque Etats parties ou la convention des
parties pour garantir l'exécution des obligations, qu'elle que soit la
nature juridique de celle-ci.
12 Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires, créée par le traité signé
à Port-Louis (île Maurice), le 17 octobre 1993 entre quatorze (14)
États dans le but d'harmoniser leur droit des Affaires. Aujourd'hui
l'OHADA comprend environ dix sept (17) membres, et reste aux termes de son
article 53 ouvert à l'adhésion de tout État membre de
l'OUA ou non. Pour une vue d'ensemble sur L'OHADA, voir POUGOUE (P.G),
présentation générale et procédure en
OHADA, Yaoundé, P.U.A, 1998.
13 Article 2 de l'acte uniforme OHADA sur les
sûretés.
14 L'hypothèque est parfois
considérée comme la reine des sûretés. V. AYNES (L)
ET CROCQ (P), op. cit P.361.
15 ANOUKAHA (F), Le droit des
sûretés dans l'acte uniforme OHADA, P. 42. Lire dans le
même sens, ISSA-SAYEGH (J), La liberté contractuelle dans le droit
des sûretés OHADA
www.ohada.com/ohadata
D-05-06
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La protection du banquier dans les opérations de
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des hypothèques. L'usage de cette notion au pluriel
fait surtout référence aux diverses sources dont elles peuvent
être issues. En effet, il ressort de l'article 117 de l'acte uniforme
OHADA relatif aux sûretés (AUS) que « l'hypothèque
est une sûreté réelle immobilière conventionnelle ou
forcée ». Elle est forcée lorsqu'elle est prise sans
consentement du débiteur soit par la loi, soit par une décision
de justice16. On parle ainsi d'hypothèque légale ou
d'hypothèque judiciaire. Elle est conventionnelle, par contre,
lorsqu'elle résulte d'un accord consenti par le titulaire d'un droit
réel immobilier. En règle générale, c'est sous sa
forme conventionnelle que l'hypothèque est consentie au banquier pour
garantir le crédit. Cette transaction est encore connue sous la
dénomination de crédit hypothécaire.
La notion de crédit hypothécaire est
ambivalente. Dans sa conception restrictive, elle renvoie au prêt
consenti par un établissement de crédit à un particulier
ou une entreprise, pour l'acquisition ou la transformation d'un bien immobilier
sur lequel est constituée une hypothèque au profit du
prêteur des fonds. Dans sa conception extensive, elle s'analyse comme
tout prêt financier garanti par une hypothèque quelque soit son
objet17. Dans cette conception extensive que nous
retenons18, le prêt hypothécaire s'adresse à
tout type d'emprunteurs ayant les besoins les plus divers. Il suffit de
posséder un patrimoine immobilier susceptible de faire l'objet
d'hypothèque et de pouvoir le donner en garantie contre l'obtention d'un
crédit.
Dans d'autres pays, les opérations de crédit
hypothécaire donnent également lieu aux transactions
boursières via le marché hypothécaire19. Mais
dans les pays de la CEMAC, dont fait parti le Cameroun, les marchés
financiers n'ont pas encore développé cette activité.
C'est donc à juste titre que notre étude n'intégrera pas
cet aspect du sujet.
Dans notre environnement, les opérations de
crédit hypothécaire sont très fréquentes dans les
milieux bancaires en raison des atouts que présente l'hypothèque.
En effet, décrite comme une sûreté indivisible et
accessoire à une ou plusieurs créance(s), l'hypothèque
répond parfaitement aux attentes des débiteurs qui n'ont pas
à se dessaisir de leurs biens, et à celles des créanciers
qui ont la quasi-certitude d'obtenir le remboursement de leurs fonds. Ce
sentiment de sécurité est principalement alimenté par
l'assiette de l'hypothèque, qui est
16 Article 132 (1) de l'A .U.S.
17 SOUSI- ROUBI, Lexique de banque et de
bourse. P. 87
18 Dans sa conception restrictive la notion est plus
proche du crédit immobilier. V. SOUSI- ROUBI, op cit P. 87
19 En Europe, en Amérique, en Asie et dans les
pays ayant un marché financier bien structuré et dynamique.
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essentiellement immobilière20, et le fait
que l'hypothèque nantit le créancier d'un droit
réel21 qui lui permet de poursuivre l'immeuble, dans quelques
mains qu'il passe, et de se faire payer par préférence sur le
prix de la réalisation de l'immeuble22.
Pourtant, la vertu sécurisante d'une
sûreté ne saurait s'apprécier exclusivement au regard de sa
nature, de ses caractères et des droits qu'elle confère. Elle
doit en effet intégrer, en plus des critères sus
évoqués, l'aptitude de la sûreté à faciliter
le recouvrement des fonds prêtés le plus simplement et rapidement
possible23. Cette considération fait référence
à la réalisation des sûretés. Or, comme le
constatait déjà François ANOUKAHA, le législateur
OHADA « n'a pas du tout règlementé la réalisation
de l'hypothèque. Il s'est contenté de renvoyer sur la question
aux règles relatives à la saisie immobilière
»24. Une telle démarche, pour un législateur
dont l'objectif est d'attirer et d'inciter les investissements, est un peu
curieuse. Surtout, lorsque l'on sait que cette procédure de saisie
immobilière est d'ordre public et particulièrement protectrice
des intérêts du débiteur25. A cela peut
s'ajouter le risque d'une éventuelle ouverture des procédures
collectives d'apurement du passif, à l'endroit du débiteur, qui
attenterait inéluctablement au recouvrement du
crédit26. Cet ensemble de chose légitime et actualise
l'intérêt de s'interroger sur la protection du banquier dans les
opérations de crédit hypothécaire dix ans après
l'entrée en vigueur des actes uniformes OHADA.
La notion de protection renvoie à l'idée de la
préservation. De façon plus claire, elle renvoie à
l'ensemble des moyens visant à prémunir, sauvegarder ou
défendre une personne, ses biens ou ses intérêts contre les
éventuels risques susceptibles de porter atteinte à son
intégrité, à celui de son patrimoine ou de ses
intérêts. Dans le cadre de notre étude cette protection se
veut essentiellement juridique. Il s'agit donc de rechercher à travers
les moyens de droit, les mesures de nature à prémunir,
sauvegarder et défendre les intérêts du banquier. Par
ailleurs, il sied de préciser que, le choix du banquier au centre de
cette étude est dû à sa longue expérience en la
matière et à son rôle d'acteur économique majeur.
20 Ce qui réduit les risques de
déplacement et de dépréciation de la sûreté.
Car, on sait en effet que les biens immeubles sont moins que les meubles,
exposés à ces risques. Voir, dans le même sens DJOUMESSAP
METSOBO (J.C), L'hypothèque conventionnelle dans la pratique
bancaire, mémoire de DESS en juriste conseil d'entreprise
FSJP/Université de Douala P. 3
21 Le droit réel étant indivisible,
l'hypothèque l'est également. Cette indivisibilité est
d'ailleurs double en ce qu'il concerne aussi bien à la créance
qu'à l'immeuble grevé. Cf. LEGEAIS (D), op cit, P. 400.
22 Il s'agit là du droit de suite et du droit
de préférence affirmés par l'article 117 AUS.
23 V. dans ce sens AYNES (L) et CROCQ (P), op cit, P.
9
24 ANOUKAHA (F), op. cit. P.65
25 Lire à ce propos KUATE TAMEGHE (S.S),
La protection du débiteur dans les procédures individuelles
d'exécution, L'harmattan 2004.
26 KOUNGA (G.J) Procédures collectives et
voies d'exécution, mémoire de D.E.A Université de
Yaoundé II.
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L'intérêt de ce thème est donc manifeste
puisque l'étude permet d'évaluer le régime juridique des
hypothèques. Ce qui le rend fondamentale à trois niveaux:
Au plan économique, la protection du banquier dans les
opérations de crédit hypothécaire permet de
sécuriser, de rentabiliser et de fluidifier les transactions bancaires,
afin d'encourager les placements et les investissements.
Au plan juridique, la recherche vise à attirer
l'attention du législateur sur la complexité et les
éventuelles défaillances du dispositif juridique des
hypothèques, afin de permettre au banquier, et à tout
créancier, de faire crédit en toute sécurité.
Au plan sociologique, l'objectif est de susciter la confiance
dans les rapports entre le banquier et ses clients et de promouvoir, d'une
manière ou d'une autre, l'intégration de la culture bancaire dans
la mentalité des populations.
Ainsi, même si une réponse affirmative s'imposait
à la question de savoir si le banquier est protégé
lorsqu'il octroie des crédits en garantie
d'hypothèque27, une autre question plus délicate
demeure. Celle de savoir: est ce que le banquier est efficacement
protégé lorsqu'il consent un crédit en garantie d'une
hypothèque?
Pour répondre à cette interrogation deux
méthodes de recherche ont été combinées. Celle dite
exégétique, qui permet de saisir les implications
législatives de la question. Et, celle dite de l'observation empirique
qui permet de saisir les implications pratiques nées des
activités bancaires et des décisions de justice rendues en la
matière. Ces deux méthodes complémentaires nous aideront
à mieux rendre compte de la protection du banquier dans les
opérations de crédit hypothécaire.
Déjà, en prenant en compte les exigences
légales de constitution, les clauses conventionnelles soumises au
débiteur du fait de l'ascendance psychologique du banquier, et le fait
que ce dernier ne libère les fonds qu'une fois la sûreté
consentie conformément à toutes ces prescriptions28,
il nous semble convenable de dire que le banquier jouit d'une protection
certaine lors de la constitution du crédit hypothécaire.
Cependant, son assujettissement à la procédure de saisie
immobilière lors du recouvrement des crédits hypothécaires
et
27 L'hypothèque comme toutes les
sûretés a évidemment un rôle de garantie.
28 V. MEVOUNGOU NSANA, La situation juridique de
l'emprunteur immobilier en droit Camerounais, Penant n°810
octobre-Décembre 1992. V. aussi, GALVADA (C) et STOUFFLET, Droit de
la Banque, P.U.F, 1999. P.570.
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l'éventualité d'une ouverture des procédures
collectives, à l'endroit du débiteur, sont des circonstances de
nature à fragiliser cette protection.
Ainsi, deux axes constitueront l'essentiel de notre
réflexion. Celui d'une protection garantie lors de la constitution du
crédit hypothécaire (Partie I), et celui d'une protection
compromise lors du recouvrement (Partie II).
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8
PREMIER PARTIE : UNE PROTECTION BIEN ASSUREE LORS DE LA
CONSTITUTION
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L'opération de crédit hypothécaire est un
contrat synallagmatique29 car il fait naître des obligations
tant à l'égard du banquier qu'à celui du client. Ainsi, le
banquier, qui y consent, se doit de mettre les fonds à la disposition du
client et de ne demander le remboursement qu'à l'échéance
du prêt ou en cas de déchéance du terme. Le client, quant
à lui, se doit de fournir l'hypothèque et de se conformer
à toutes les formalités prévues par la convention de
crédit hypothécaire. En pratique, les stipulations des
conventions de crédit hypothécaire subordonnent
généralement la prestation du banquier à l'accomplissement
préalable des prestations auxquelles est tenu le client emprunteur.
Autrement dit, la mise à disposition du crédit est
différée jusqu'à l'accomplissement de toutes les
formalités convenues. Ce procédé permet au banquier,
d'analyser préalablement la situation de l'emprunteur et, d'obtenir une
sûreté fiable avant à la mise en place du crédit.
Au rang des formalités que doit respecter le client
figure principalement celles prévues expressément par le
législateur. Ces mesures légales garantissent la protection du
banquier (Chapitre I) puisqu'elles conditionnent la validité et
l'opposabilité de l'hypothèque. Parallèlement, le client
doit honorer les engagements purement contractuels convenus entre lui et le
banquier. Ces engagements que nous regroupons sous le vocable de mesures
conventionnelles de protection (Chapitre II) contribuent à renforcer de
la sécurité du banquier.
29 Sur les contrats synallagmatiques, voir
l'article 1102 du C. civ. Et, pour une vue générale sur la notion
lire, BENABENT (A), Droit civil les obligations, 9e
édition Montchrestien 2003. Notamment les P. 13 et P. 257.
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CHAPITRE I : LES MESURES LEGALES DE PROTECTION
L'opération de crédit hypothécaire est
d'abord un contrat soumis globalement à la théorie
générale des obligations30. Autrement dit, sa
constitution exige à peine de nullité31 le respect des
conditions énumérées à l'article 1108 du
C.civ32. Il s'agit précisément du «
consentement de la partie qui s'oblige, sa capacité de contracter,
l'existence d'un objet certain qui forme la matière de l'engagement et
d'une cause licite dans l'obligation »33. Mais,
l'opération de crédit hypothécaire, parce qu'elle est
constitutive d'une sûreté réelle immobilière, est
finalement un contrat particulier soumis à des conditions
spécifiques34.
Ces conditions, auxquelles veille le banquier lors de la
constitution des crédits hypothécaires, sont principalement
contenues dans les articles 126 à 131 de l'A.U.S. Etant dans l'ensemble
relatives au constituant de l'hypothèque, à la garantie
hypothécaire, à la créance cause d'hypothèque et
à la forme de la convention de crédit hypothécaire, ces
conditions obligatoires pour la validité et l'opposabilité de
l'hypothèque, peuvent être reparties en condition de fond (Section
I) et en condition de forme (Section II).
SECTION I: LES CONDITIONS DE FOND
Elles sont principalement prévues à l'article
127 de l'AUS qui dispose que « l'hypothèque conventionnelle ne
peut être consentie que par celui qui est titulaire du droit réel
immobilier régulièrement inscrit et capable d'en disposer. Elle
doit être consentie pour la garantie de créances
individualisées par leur cause et leur origine, représentant une
somme déterminée et portées à la connaissance des
tiers par l'inscription de l'acte.». Cet article vise trois
conditions particulières à savoir: l'obligation du constituant
d'être titulaire d'un droit réel immobilier et d'avoir la
capacité d'en disposer ainsi que l'obligation pour l'hypothèque
d'être consentie pour des créances individualisées. Ainsi,
pouvons-nous dire,
30 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI FOLI,
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA SAMB, op. cit. P. 176.
31 La nullité est une sanction de
l'inobservation des conditions de formation de contrat. Elle entraine une
disparition rétroactive du contrat. V. GUILLIEN (R) et Vincent (J),
(sous la direction de...) Lexique des termes juridique 13e
édition Dalloz 2001 P.424.
32 Il s'agit du Code civil
camerounais. Textes coordonnés par GATSI (J), P.U.L
édition 2010. P. 164
33 V. TERRE (F), SIMLER (P) et LEQUETTE (Y), Droit
civil les obligations, 2e édition Précis Dalloz,
Paris 2002
34 Cette mention vise notamment à relever
que l'impact du caractère réel influence les conditions
constitutives de l'hypothèque. Voir, dans le même sens, ANOUKAHA
(F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI FOLI, ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I),
MOUSSA SAMB, op. cit. P. 176. Voir aussi, AYNES (L) et CROCQ (P), op. cit, P.
281
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après analyse, que le législateur fixe les
conditions de fond en tenant compte du constituant de l'hypothèque
(Paragraphe I), et de la règle de spécialité de
l'hypothèque (Paragraphe II).
Paragraphe I: Les conditions relatives au constituant de
l'hypothèque
Il s'agit de l'obligation pour le constituant d'être
titulaire de droit réel immobilier (A) et d'avoir la capacité
d'en disposer (B).
A)- La qualité de titulaire de droit réel
immobilier
L'A.U.S exige que le constituant de l'hypothèque soit
titulaire de droit réel immobilier sur le bien à
hypothéquer. Les principaux droits réels sont les droits de
propriété et ses démembrements35. Concernant
les démembrements du droit de la propriété, le
législateur OHADA en cite quelques uns susceptibles de faire l'objet
d'hypothèque. Il s'agit précisément « de
l'usufruit, le droit de superficie, le bail emphytéotique ou le bail
à construction »36. Cette liste a été
complétée par la doctrine qui estime que le législateur
aurait omis d'y mentionner « la nue- propriété » qui,
conformément aux lois organisant le régime foncier, peut
également faire l'objet d'hypothèque37. Par ailleurs,
exiger du constituant d'être titulaire de droit réel immobilier
signifie que celui qui consent une hypothèque doit, être
propriétaire de l'immeuble hypothéqué, justifier d'un
droit susceptible d'hypothèque ou encore d'une procuration
émanant du propriétaire38.
Dans la pratique bancaire, en particulier, le contrôle
de la qualité de propriétaire d'immeuble ou de titulaire de droit
réel immobilier n'est pas difficile à réaliser. En effet,
les banquiers procèdent d'abord à la confrontation des
informations contenues sur les documents officiels du constituant (carte
d'identité ou passeport), avec celles contenues dans la copie du titre
foncier. Et, au besoin, avec les informations recueillies lors de l'ouverture
du compte bancaire39. Ensuite, ils requièrent, du
conservateur foncier, un certificat de propriété sur la base de
la copie du titre foncier fournie par le constituant. Ce processus explique que
la
35 ATIAS (C), Droit civil, Les biens 2e
édition Litec 1991. P. 41 et suivant
36 Art 122 al 4 A.U.S
37 ANOUKAHA (F), op cit. P. 25. ISSA- SAYEGH,
commentaire de l'acte uniforme portant sûreté, in OHADA
Traité et actes uniformes commentés et annotés. Juriscope
2008. P. 723.
38 SAKHO(A) et NDIAYE (I), Pratique des
garanties du crédit, 1ère édition Dakar
1998. P48. Pour la procuration voir l'art 128 al 2 A.U.S.
39 Sur les informations recueillies lors de
l'ouverture d'un compte bancaire, voir SOUOP (S), La réalisation des
crédits garanties : Mission impossible? Ohadata D- 08-11.
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La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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constitution d'hypothèque par un
non-propriétaire soit un fait extrêmement rare40.
D'autant plus, qu'en principe, seuls les immeubles immatriculés peuvent
être hypothéqués41.
L'exigence de la qualité de propriétaire ou de
titulaire de droit réel immobilier induit certaines conséquences
que le banquier ne saurait ignorer. La première est la nullité
absolue de l'hypothèque des choses d'autrui. Cette nullité
insusceptible de régularisation est encourue alors même que le
constituant viendrait à acquérir ultérieurement la
propriété de l'immeuble hypothéqué42. La
seconde conséquence est que l'hypothèque est soumise aux
modalités qui affectent le droit de
propriété43. Ainsi, lorsque le droit de
propriété est conditionnel, l'hypothèque l'est
également.
Cependant, en ce qui concerne les immeubles indivis, une
distinction est faite selon que l'hypothèque est consentie par l'un des
co-indivisaires ou par tous les copropriétaires. Dans le premier cas, la
validité de l'hypothèque sera fonction du partage ou de la
licitation ultérieure. Si l'immeuble est attribué au constituant,
l'hypothèque conserve sa validité. Au cas contraire, elle est
rétroactivement annulée. Dans le second cas, l'hypothèque
conserve son effet quel que soit, ultérieurement, le résultat de
la licitation ou du partage44. Encore faudrait-il dans tous les cas
que le constituant ait la capacité d'aliéner le bien objet
d'hypothèque.
B)- La capacité d'aliéner le bien
hypothéqué
La capacité est l'aptitude à acquérir des
droits et des obligations et le pouvoir de les mettre en oeuvre soi-
même45. En exigeant que le constituant ait la capacité
d'aliéner, l'A.U.S exclut des opérations de crédit
hypothécaire certaines catégories de personnes, notamment celles
frappées d'incapacité.
La capacité étant un attribut fondamental de la
personnalité juridique46, elle touche aussi bien les
personnes physiques que les personnes morales. Concernant les personnes
physiques, il est constamment relevé conformément à
l'article 1124 du C.civ applicable au Cameroun, qu'il s'agit d'exclure de la
relation contractuelle les mineurs non émancipés et les
40 Sauf, cas de complicité avec les agents de
la conservation foncière.
41Art 119 A.U.S. La règle admet certes un
assouplissement concernant les immeubles en cours d'immatriculation, mais en
pratique, cette situation n'est pas de nature à semer la confusion.
42 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit. P. 178 et
suivant.
43 Art 121 al1 de l'A.U.S
44 Tel est le sens de l'art 121 al 2 de l'A.U.S
45 V. dans le même sens, SAKHO(A) et NDIAYE (I),
op. cit. P.49
46 BENABENT (A), op. cit. P.25
13
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crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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majeurs protégés47. Quant aux
personnes morales, la question de la capacité peut paraître
délicate. Le banquier cherche à s'assurer que le constituant a
effectivement la qualité et le pouvoir d'engager la personne morale.
Ainsi, est généralement requis du constituant, la production d'un
extrait de son immatriculation au registre du commerce et du crédit
Mobilier (R.C.C.M), lorsqu'il s'agit des sociétés commerciales,
des groupements d'intérêt économique, et des
sociétés civiles, la copie certifiée du
récépissé de la déclaration d'existence lorsqu'il
s'agit des associations, et la production d'une copie certifiée conforme
des statuts qui contient toutes les indications utiles à ce sujet.
Toutefois, si cette dernière s'avère insuffisante, la banque peut
demander communication de tout acte ou délibération investissant
le mandataire d'un pouvoir effectif de représentation48. Un
maximum d'informations est donc utile d'autant plus que par le biais de
l'article 449 al 1 de l'A.U.S.C.G.I.E par exemple, le législateur OHADA
soumet à l'autorisation du conseil d'administration, les cautions, aval,
garanties, et garanties à première demande, souscrits par une
société, pour les engagements pris par les tiers.
L'exigence d'une capacité d'aliéner conduit le
banquier à faire particulièrement attention aux risques
liés à l'ouverture d'une procédure collective à
l'endroit du client. En effet, dans bien de cas l'ouverture des
procédures collectives affecte la capacité du constituant
d'aliéner ses biens. En ce qui concerne le règlement
préventif par exemple l'article 11 de l'A.U.P.C.A.P interdit, sauf
autorisation motivée du président de la juridiction
compétente, de consentir des sûretés49. Il y a
là restriction manifeste de droit du constituant voire une sorte
d'altération de la capacité d'aliéner. La nuance demeure
tout de même en ce que la violation de cette disposition est
frappée d'inopposabilité50, contrairement au
défaut de capacité qui est sanctionné de nullité.
Cette situation peut d'ailleurs être rapprochée de la phase de
redressement judiciaire où l'hypothèque ne peut être
consentie, à peine d'inopposabilité, que sous assistance du
syndic51. Ainsi, est-il fréquent de voir le banquier
requérir du constituant (personne morale ou physiques commerçant)
un certificat attestant l'absence d'ouverture des procédures collectives
à son encontre.
47 Notons que la participation des mineurs non
émancipés aux opérations de crédits
hypothécaires nécessite qu'ils soient représentés
par un administrateur légal ou un tuteur. Tandis que, les majeurs
protégés doivent être représentés un tuteur
ou un curateur. V. pour plus amples explications, BENABENT (A), op. cit. P.25
et suivantes.
48Outre les procurations, il en sera ainsi des
procès verbaux de l'assemblée constituante, des procès
verbaux du conseil d'administration nommant les directeurs et fixant les
pouvoirs qui leur sont conférés.
49 Dans le même sens, FILIGA SAWADOGO, OHADA
Droit des entreprises en difficulté, Bruylant 2002. P. 65.
50 L'inopposabilité est une sanction qui
n'affecte pas la validité d'un acte, mais offre la possibilité
aux tiers d'écarter les effets dudit acte. V. GUILLIEN (R) et Vincent
(J), op. cit P.342.
51 Art 52 A.U.S.
14
La protection du banquier dans les opérations de
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Une attention particulière est également
portée lorsque le constituant est marié sous le régime de
la communauté des biens. En effet, en vertu de l'hypothèque
légale reconnue à la femme mariée par l'article 2121 du
C.civ, le banquier exige systématiquement l'accord de la femme lors de
la constitution des hypothèques. Ce consentement, valant renonciation
à son droit d'hypothèque légale, permet de mieux
protéger le banquier dans la constitution de crédit
hypothécaire. Puisque qu'il rend l'opération opposable au deux
époux.
Toutefois, ce n'est qu'après avoir
vérifié la capacité d'aliéner et la qualité
de propriétaire que le banquier doit observer la règle de
spécialité afin que les conditions de fond soient
complètement observées.
Paragraphe II: Les conditions relatives à la
spécialité de l'hypothèque
La règle de spécialité est posée
doublement dans l'A.U.S en ce qui concerne l'hypothèque. En effet, avant
que l'article 127 al 2 ne précise que l'hypothèque «
doit être consentie pour la garantie de créances
individualisées par leur cause et leur origine, représentant une
somme déterminée et portée à la connaissance des
tiers par l'inscription de l'acte.», l'article 120 al 1 du même
acte soulignait que « l'hypothèque ne peut porter que sur les
immeubles présents et déterminés. ». Ces
exigences de spécialité de l'hypothèque, quant à
son assiette (A) et quant à la créance garantie (B),
méritent d'être examinées.
A)- La spécialité de l'hypothèque
quant à l'assiette
La règle de la spécialité de
l'hypothèque quant à l'assiette signifie que l'immeuble
l'hypothéqué doit être désigné de
façon précise par l'acte constitutif52. Elle ne
constitue pas une interdiction pour le débiteur de consentir une
hypothèque sur tous ses immeubles, mais induit l'obligation d'une
indentification précise de chaque immeuble hypothéqué.
Dans la pratique bancaire, cette exigence à une
connotation particulièrement intéressante. En effet, elle fonde
la logique des descentes sur le terrain afin d'évaluer l'immeuble
certes, mais également de s'assurer de sa nature (s'il s'agit d'un
immeuble bâti ou non), ses dimensions et sa situation
géographique. Ces informations sont certes déjà contenues
dans le titre foncier, qui est la certification officielle de la
propriété immobilière, mais le banquier, en règle
générale, veut s'assurer de l'effectivité
matérielle de ces informations. Car, la chronique bancaire est
prolifique des situations où des hypothèques ont
52 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit. P. 187.
15
La protection du banquier dans les opérations de
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été données sur des immeubles inexistant,
ou encore sur des immeubles ayant pour indications cadastrales un terrain du
domaine public, ou un fleuve53.
Notons, par ailleurs, que les biens susceptibles
d'hypothèques sont déterminés par la loi. L'article 119 de
l'A.U.S énonce clairement que « Seuls les immeubles
immatriculés peuvent faire l'objet d'une hypothèque ».
Ces immeubles immatriculés sont notamment: les fonds bâtis ou non
bâtis et leurs améliorations ou constructions survenues (à
l'exclusion des meubles qui en constituent l'accessoire), ainsi que les droits
réels immobiliers régulièrement inscrits selon les
règles du régime foncier. Quant aux immeubles et droits
réels immobiliers en cours de procédure d'immatriculation,
l'A.U.S soumet leurs hypothèques à l'autorisation des textes
nationaux54, à charge toutefois de procéder à
une inscription définitive après l'établissement du titre
foncier.
Il est acquis que l'hypothèque peut porter sur les
immeubles corporels ou incorporels55, sur les immeubles par nature
ou par destination lorsque ces derniers sont attachés aux immeubles par
nature auxquels ils empruntent la nature immobilière, sur les
démembrements du droit de la propriété tel que: l'usufruit
immobilier, la nue propriété, le droit de superficie, le bail
emphytéotique ou le bail à construction. Cependant,
l'hypothèque ne saurait porter sur les immeubles insaisissables et
indisponibles (tels que : les immeubles dépendant du domaine public)
parce qu'ils ne sont pas dans le commerce juridique. De même,
l'hypothèque est elle-même insusceptible
d'hypothèque56.
Par ailleurs, l'immeuble objet de l'hypothèque, en plus
d'être déterminé avec exactitude, doit
nécessairement être présent. Cette exigence de l'article
120 al 1 de l'A.U.S a pour conséquence, l'interdiction
d'hypothéquer les immeubles à venir57. Cette
règle critiquée58 qui a conduit à l'admission
de nombreux tempéraments importants en droit
53 Lire à ce propos SOUOP (S) op. cit, P.4.
Et, aussi MILONGO ELLONG (J.J), La sécurité des créances
bancaires dans la sous région CEMAC. P. 58
54 Cette inscription d'hypothèque
autorisée par les textes nationaux n'est que provisoire. Art 119 de
l'AUS, lire également à ce propos le commentaire dudit article
par ISSA-SAYEGH (J), in OHADA, traité et actes uniformes
commentés et annotés. Juriscope 2008. P. 723
55 V. ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit. P. 186.
56 Ibidem. Il est pourtant techniquement concevable
qu'un créancier hypothécaire accorde des hypothèques afin
de permettre à ses créanciers de venir selon leur rang se faire
payer, en cas de distribution du prix du bien hypothéqué, sur le
fond revenant au constituant. Mais, l'OHADA comme le droit français ont
opté pour une interdiction de cette pratique qui s'en doute
complexifierait les transactions hypothécaires. Cependant, la
portée de cette interdiction est en réalité
limitée, puisque le créancier hypothécaire peut subroger
une ou plusieurs personnes de son hypothèque.
57 ANOUKAHA (F), op. cit. P.25.
58 TANAGHO (S), L'hypothèque des biens à
venir, RTD Civ. 1970. P. 441.
16
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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français depuis l'entrée en vigueur de
l'ordonnance du 23 mars 200659, garde toute sa rigidité en
droit OHADA où le législateur n'admet de tempérament que
dans deux hypothèses à savoir: celle permettant le financement de
l'acquisition immobilière et celle des immeubles en cours
d'immatriculation60. En effet, dans le premier cas
l'hypothèque est consentie par le propriétaire avant le
commencement des travaux, soit au profit des architectes, entrepreneurs ou
autres personnes employées dans l'édification, soit au profit du
banquier qui a fourni l'argent. Dans le second cas, il s'agit d'une
anticipation législative permettant au constituant qui n'est pas encore
titulaire de droit immobilier de consentir l'immeuble en cours
d'immatriculation.
B)- La spécialité de l'hypothèque
quant à la créance garantie
L'article 127 al 2 de l'A.U.S qui pose le principe de la
spécialité de l'hypothèque quant à la
créance garantie signifie que la créance que garantit
l'hypothèque doit être identifiée par sa cause et son
origine, puis déterminée dans son montant.
L'identification de la créance par sa cause est un
élément fondamental de la convention de crédit
hypothécaire. Elle permet d'apprécier la raison d'être de
ce contrat, et partant sa validité. En effet, l'hypothèque
étant un contrat de garantie, elle suppose nécessairement
l'existence d'une créance qui en est la cause61. Or,
conformément à la théorie générale des
obligations et à l'article 6 de code civil applicable au Cameroun, la
validité d'une convention ne saurait être retenue si la cause de
ladite convention est illicite, immorale ou contraire à l'ordre public
et aux bonnes moeurs. Cette règle d'identification de la créance
par sa cause s'analyse d'abord comme une mesure de protection du constituant.
Mais, l'exigence de son respect par le législateur est telle qu'elle
permet de protéger le banquier qui s'y conforme. Car, la sanction
d'inobservation de cette exigence est la nullité de la convention de
crédit hypothécaire. Ainsi, en pratique, le banquier prend
toujours le soin d'indiquer la cause par des mentions telles que ; la
créance garantie provient de tel prêt ou de tel contrat de
prêt.
59 En droit français les exigences du
crédit ont conduit à l'admission de l'hypothèque des biens
à venir dans de nombreux cas notamment: insuffisance des biens
présents, perte ou dégradation de l'immeuble
hypothéqué, construction d'un bâtiment sur le terrain
d'autrui. Les tempéraments en droit français vont beaucoup plus
loin qu'en droit OHADA. Voir, les articles 2419 et 2420 du code civil
français. Également, LEGEAIS (D), op. cit, p. 405. Et, AYNES (L)
et CROCQ (P), op. cit, P. 288.
60 ANOUKAHA (F), op. cit. P.24
61 V. Dans le même sens, ANOUKAHA (F), CISSE-
NIANG (A), MESSANVI (F), ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op.
cit. P. 184.
17
La protection du banquier dans les opérations de
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Par contre, l'identification de la créance par son
origine c'est à dire sa source62, ou mieux ce qui permet de
l'individualiser par rapport à d'autres créances, vise
l'interdiction d'une prise d'hypothèque pour toutes les créances
nées et à naitre au profit du créancier, sans limitation
aucune63. En effet, en cas de survenance d'une autre créance,
le banquier comme tout créancier doit prendre une hypothèque
nouvelle sur la base d'un nouvel acte64. Cette hypothèque
nouvelle ou complémentaire qui est dite hypothèque de second
rang, lorsqu'elle porte sur l'immeuble précédemment
hypothéqué, prend acte au jour de son inscription.
Enfin, quant à la détermination de la
créance, il s'agit plus précisément pour les parties
d'indiquer le montant de celle-ci dans la convention de crédit
hypothécaire65. Autrement dit, lorsque l'hypothèque
garantit une créance dont le montant est connu de façon
précise, ce montant doit être indiqué dans l'acte
constitutif. Ce qui se traduit concrètement par la mention dans la
convention de crédit hypothécaire, du capital, des
intérêts et de la date à partir laquelle ils courent.
Cependant, lorsque le montant de la créance est
indéterminé, la doctrine indique66 et la pratique
confirme67 que, le procédé par estimation est l'unique
issue. Les parties se doivent ainsi de faire état des
éléments en leur possession qui rendent le montant de la
créance déterminable. C'est ce procédé qui permet
en effet de garantir par une hypothèque, le solde débiteur d'un
compte courant ou d'une ouverture de crédit.
A l'examen du principe de la spécialité, il
ressort que la règle de spécialité vise surtout la
protection du constituant et non du banquier. Toutefois on peut, d'abord,
constater que le respect de cette exigence de spécialité permet
au banquier d'éviter la nullité de la convention
hypothécaire et par ricochet de se protéger. Ensuite, on peut
considérer que la règle de spécialité
protège le banquier au regard de son usage pratique par le banquier. En
effet, la règle soutient la nécessité des descentes sur
les lieux afin d'évaluer, d'identifier et mieux localiser l'immeuble
hypothéqué. Par ailleurs, le principe de
spécialité, pris dans sa globalité, intéresse
également l'inscription de l`hypothèque qui entre dans les
conditions de forme.
62 SAKHO(A) et NDIAYE (I), op. cit. P. 51.
63 ibidem
64 Dans le même sens, ISSA- SAYEGH, commentaire
de l'acte uniforme portant sûreté, in OHADA Traité et actes
uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2008. P.727 à
728.
65 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op cit. P. 184. SAKHO(A) et
NDIAYE (I), op. cit. P. 51. AYNES (L) et CROCQ (P), op. cit, P. 283.
66 Ibidem.
67 Voir, les conventions de crédit
hypothécaire garantissant un compte courant en annexe.
18
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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SECTION II : LES CONDITIONS DE FORME
Les conditions de forme sont régies par les articles
122 al (1) et 128 al (1) de l'A.U.S. Alors que le premier dispose que «
Tout acte conventionnel ou judiciaire constitutif d'hypothèque doit
être inscrit au livre foncier conformément aux règles de la
publicité foncière prévues à cet effet.
», le second dispose que « l'hypothèque
conventionnelle est consentie, selon la loi nationale du lieu de la situation
de l'immeuble: - par acte authentique établi par le notaire
territorialement compétent ou l'autorité administrative ou
judiciaire habilité à faire de tel acte; - ou par acte sous seing
privé dressé suivant le modèle agréé par la
conservation foncière.». Il résulte de l'analyse de ces
articles que le législateur OHADA requiert la publicité de la
convention de crédit hypothécaire (Paragraphe II) ainsi que, la
nécessité pour ladite convention d'être
présentée sous la forme écrite (Paragraphe I).
Paragraphe I : La nécessité de
l'écrit
Cette nécessité se déduit aisément
de l'analyse de l'article 128 de l'A.U.S. Cependant, bien que ledit article
ait, contrairement au droit français68, diversifié les
formes de l'écrit (A), de nombreux Etats parties à l'OHADA ont
gardé une sorte de préférence pour l'acte constitué
en la forme notariée. Cette attitude contribue également à
la protection du banquier (B).
A)- Les différentes formes de l'écrit
Selon l'article 128 de l'A.U.S, la forme que doit prendre
l'acte hypothécaire est déterminée par le
législateur national. Toutefois, le législateur communautaire a
pris le soin de limiter et encadrer ses formes. Ainsi, lorsque cet acte est en
la forme authentique, il doit être établi par un notaire
territorialement compétent, une autorité administrative ou
l'autorité judiciaire, habilité à faire de tel acte.
Cependant, lorsque cet acte est établi sous seing privé, il doit
être dressé suivant un modèle agréé par la
conservation de la propriété foncière. Les actes
hypothécaires, constitués au mépris des formes
sus-énoncées, sont nuls et de nullité
absolue69. L'analyse des formes édictées par le
législateur communautaire ainsi que la sanction de leur inobservation
appellent à quelques observations.
La première consiste à relever que la convention
de crédit hypothécaire, en plus d'être un contrat
écrit, est un contrat solennel. Cette observation se déduit de la
sanction réservée à
68 L'article 2416 du Code civil français
énonce que l'hypothèque ne peut être consentie que par un
acte notarié.
69 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op cit. P. 182.
19
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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l'écrit. En règle générale,
l'exigence de l'écrit emprunte deux voies. Tantôt elle est
prescrite `'ad probationem»c'est-à-dire, à titre de preuve
pour établir l'existence ou la teneur d'un acte. Dans cette
hypothèse, le défaut de l'écrit n'entame pas la
validité du contrat. Mais, son efficacité pratique peut se
trouver restreinte (difficultés d'être prouvée,
d'être publiée voire d'être exécutée
convenablement). Tantôt cette exigence est faite `'ad validitatem».
Dans ce cas, l'exigence de l'écrit conditionne la validité de
l'acte faisant de lui un acte solennel70. L'inobservation des formes
prescrites par législateur, en matière de crédit
hypothécaire, entraine la nullité de la convention. Il est donc
clair que la convention de crédit hypothécaire est un acte
solennel dans l'entendement du législateur OHADA.
La seconde observation consiste à souligner la
volonté du législateur de protéger les parties à la
convention hypothécaire. Cette volonté, plus visible dans l'acte
notarié, est présente dans l'acte sous seing privé. En
effet, en raison des développements réservés à
l'acte notarié, nous pouvons simplement noter que le banquier, à
l'instar de tout créancier hypothécaire, se trouve
également protéger dans les actes sous seing privés. Car,
dans les pays où les lois nationales admettent l'acte sous seing
privé, l'OHADA invite le banquier à constituer
l'hypothèque suivant un modèle agréé par la
conservation de la propriété foncière. On peut donc penser
que l'intervention du conservateur foncier, en plus de faciliter la
constitution du crédit hypothécaire, permettra d'exercer un
contrôle plus accru et certainement semblable à celui
exercé par le notaire.
B)- La prévalence de l'acte notarié
Le recours à l'acte notarié dans la constitution
des crédits hypothécaires est quasiment la règle dans les
Etats membres de l'OHADA71. Cette orientation, qui se justifierait
surtout par les lois foncières africaines72, contribue
à la protection du banquier. En effet, l'intervention du notaire,
longtemps présentée comme une mesure visant à
protéger le
70 Voir dans le même sens, BENABENT (A), op.
cit. P.74 et suivantes
71 SAKHO(A) et NDIAYE (I), op. cit. P. 53.
72 V. dans ce sens ANOUKAHA (F), op. cit. P. 37. A
ce propos l'article 8 de l'ordonnance n°74-1 du 06 juillet 1974 fixant le
régime foncier au Cameroun dispose que « Tous les actes
constitutifs, translatifs ou extinctifs de droit réel immobilier doivent
à peine de nullité, être établis en la forme
notariée»
20
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
constituant73, sert également les
intérêts du banquier. Ce constat, fait par Dominique
LEGEAIS74, semble principalement être soutenu par deux
arguments.
Le premier argument réside dans le fait que le notaire
qui établit l'acte doit s'assurer, sous peine d'engager sa
responsabilité, que toutes les conditions de validité de la
garantie sont bien réunies. De façon plus générale,
le notaire doit s'assurer de l'efficacité de l'acte qu'il rédige.
Il peut même être responsable de l'évaluation de la garantie
telle qu'elle figure dans l'acte constitutif. Ce qui profite en fin de compte
au banquier, puisque le notaire doit encore veiller à ce que les
conditions de fonds aient bel et bien été respectées.
Le second argument est offert par l'article 33 de
l'A.U.P.S.R.V.E qui, en indiquant les titres exécutoires, cite les actes
notariés revêtus de la formule exécutoire. Le titre
exécutoire75 étant un préalable fondamental
à la mise en oeuvre des mesures d'exécution forcée, l'on
peut donc voir dans la prévalence de l'acte notarié, un
véritable moyen de protéger le banquier. En effet, comme le
soulignait un auteur, « L'unanimité est fait sur le point
qu'ils (les actes notariés) offrent des garanties de
sécurité et d'exactitude rendant superflu d'exiger du
créancier qu'il fasse vérifier sa créance en justice
dès lors que les parties avaient déjà fait recours pour en
constater l'existence et le montant. »76.
L'on peut donc valablement penser que l'intervention du
notaire est un véritable moyen de protection du banquier. D'autant plus
que ce dernier se charge très souvent de la publicité de la
convention hypothécaire.
Paragraphe II : la publicité de la convention de
crédit hypothécaire
Conformément aux exigences du législateur OHADA,
la convention de crédit hypothécaire doit faire l'objet de
publicité à la conservation foncière77. Le but
de cette publicité est de garantir la sécurité des
transactions juridiques portant sur des immeubles78. Ainsi, la
publicité foncière permet d'informer en temps réel tous
tiers intéressés par un immeuble de sa situation juridique
exacte. Elle se fait au moyen d'une inscription au livre
73 Il a surtout été avancé
que, l'hypothèque est un acte dangereux et, le notaire tenu d'un devoir
de conseil, doit éclairer le constituant sur la portée de son
engagement. Mais, cet argument a été jugé non
décisif. En faisant valoir que le cautionnement est de par ses
conséquences un acte tout aussi grave et pourtant le recours à un
officier ministériel n'est pas imposé. LEGEAIS (D), op. cit, P.
415
74 ibidem
75 Sur le titre exécutoire lire, KUATE TAMEGHE
(S.S), op. cit. P.43 et suivantes.
76 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit. P.46.
77 Art 122 al 1 de L'A.U.S.
78 LEGEAIS (D), op. cit, P.417
21
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
foncier (A), et confère au créancier qui s'y
conforme d'important droits sur l'immeuble hypothéqué (B).
A)- L'inscription de l'hypothèque
Elle consiste à porter au livre foncier les
informations contenues dans la convention de crédit hypothécaire.
Il ressort de l'article 122 al 1 que l'inscription doit se faire
conformément aux législations nationales79. En
règle générale, ces informations sont relatives au
créancier hypothécaire et au montant de la
créance80. En principe, toute personne peut requérir
du conservateur foncier l'inscription de l'hypothèque81.
Mais, en pratique très souvent la réquisition est faite par le
notaire qui aura constitué l'hypothèque. Elle doit être
accompagnée d'une expédition de la convention de crédit
hypothèque et de la copie du titre foncier de l'immeuble
concerné82.
Le conservateur avant de déférer à la
demande d'inscription doit, dans la majeure partie des cas, veiller à la
régularité formelle des documents qui lui sont
présentés. Il ne serait donc pas « juge de leur
régularité quant au fond. » comme l'affirmait
François ANOUKAHA83, en constatant cependant que la
législation gabonaise du 8 mai 1963 adhère à un
système différent84. Dans tous les cas, les
vérifications auxquelles se prête le conservateur sont
également à la faveur du banquier qui en général
conditionne la mise à disposition du crédit à
l'accomplissement particulière de cette formalité d'inscription.
Ainsi, lorsqu'aucun motif n'est de nature à empêcher de
procéder à l'inscription, le conservateur délivre au
banquier un certificat d'inscription hypothécaire lui permettant de
servir et valoir ce que de droit85.
Il faut également souligner qu'il n'existe pas de
délai précis pendant lequel l'inscription hypothécaire
doit être faite. Ainsi, le banquier pourrait toujours y procéder
après régularisation d'un dossier rejeté par le
conservateur foncier. Par ailleurs, en ce qui concerne particulièrement
les prêts à court terme, le législateur OHADA
prévoit la possibilité pour le
79 ISSA- SAYEGH, commentaire de l'acte uniforme
portant sûreté, in OHADA Traité et actes uniformes
commentés et annotés, Juriscope, 2008. p.724.
80 LEGEAIS (D), op. cit, P.417
81 ANOUKAHA (F), op. cit. P.42.
82 Ibidem.
83 ANOUKAHA (F), op. cit. P.42
84 L'article 49 de la loi précitée
exige du conservateur foncier de vérifier, sous sa
responsabilité, non seulement en la forme, mais également au fond
la régularité des pièces produites à l'appui de la
réquisition. Cette option gabonaise nous semble encore plus protectrice
des intérêts du banquier, notamment lorsque la réquisition
de publicité est initiée par le créancier et l'acte
hypothécaire dressé selon le modèle agrée par la
conservation foncière.
85 Voir en annexe pour un exemple du certificat
d'inscription hypothécaire.
22
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
créancier de différer l'inscription pendant, un
délai maximum de 90 jours sans qu'il perde le rang qui lui est
acquis86. A charge pour ce dernier de se conformer aux dispositions
prévues par les lois nationales à cet effet87.
Toutefois, outre le cas des hypothèques garantissant
les prêts à court terme, il est bon de savoir que le banquier a
tout intérêt de procéder le plus rapidement possible
à cette inscription. Car, elle est attributive de rang88. De
même, il existe des événements dont on dit qu'ils «
arrêtent le cours des inscriptions »89,
c'est-à-dire qu'ils rendent l'inscription inutile voire impossible. Tel
est le cas de l'ouverture des procédures collectives d'apurement du
passif90. Et, celui de la publication d'un commandement valant
saisie91 qui précisément interdit au débiteur
d'aliéner l'immeuble, et de le grever d'un droit réel ou d'une
charge. De plus, l'article 129 de l'A.U.S dispose de façon claire que
« tant que l'inscription n'est pas faite, l'acte d'hypothèque
est inopposable aux tiers et constitue, entre les parties, une promesse
synallagmatique qui les oblige à procéder à la
publicité ».
L'inscription de l'hypothèque une fois
réalisée conserve le droit du créancier jusqu'à la
date fixée par la convention aux termes de l'article 123 de l'A.U.S.
Cette disposition à pour conséquence de faire correspondre la
durée de l'inscription pratiquement à celle du remboursement du
crédit92ce qui est également d'un grand
intérêt pour le banquier. De plus, lorsque le banquier use de la
faculté d'adopter une durée déterminée, il a la
possibilité de renouveler cette durée à condition que ce
renouvellement intervienne avant l'expiration du délai pour faire
conserver l'hypothèque à son rang93. Car, le
défaut de renouvellement entraine la péremption de l'inscription.
L'intérêt de l'inscription s'appréhende encore mieux au
regard des droits qu'elle confère.
B)- Les droits relatifs à l'inscription de
l'hypothèque
Une fois inscrite, l'hypothèque confère au
banquier deux prérogatives importantes. Ces prérogatives qui
s'imposent au constituant de l'hypothèque et aux tiers se
résument dans les notions de droit de suite (1) et droit de
préférence (2).
86 Art 130 A.U.S
87 Référence est faite plus
précisément ici, à la procédure de
prénotation des hypothèques. ISSA- SAYEGH, commentaire de l'acte
uniforme portant sûreté, in OHADA Traité et actes uniformes
commentés et annotés, Juriscope, 2008. P.727 à 728.
88 Art 122 A.U.S
89 AYNES (L) et CROCQ (P), op. cit, P.293.
90 Art 11 et 53 A.U.P.C.A.P
91 Art 262 A.U.P.S.R.V.E
92 ANOUKAHA (F), op. cit, p.44.
93 Ibidem.
23
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
1)- Le droit de suite
Le droit de suite consiste à poursuivre, en cas de non
remboursement du crédit, la réalisation de l'immeuble en quelques
mains qu'il se trouve. C'est donc un droit de mettre en oeuvre l'action
hypothécaire94. En d'autres termes, il s'agit du droit de
déclencher les procédures de réalisation de l'immeuble
hypothéqué. Ce droit s'exerce aisément contre le
débiteur95 ou tout tiers dont le titre est publié
postérieurement à l'inscription de
l'hypothèque.96
Cependant, dans son exercice le droit de suite est soumis
à certaines conditions. En effet, en plus de satisfaire aux
formalités de publicité sus évoquées, il faudrait
qu'à l'échéance du remboursement du crédit, le
débiteur n'ait pas honoré ses engagements. Cette condition, qui
rappelle la notion d'exigibilité de la créance, connaît de
nombreux tempéraments dont l'un est organisé par l'article 145 de
l'A.U.S qui dispose que : « Dans le cas où l'immeuble
hypothéqué devient insuffisant pour garantir sa créance,
par la suite de destruction ou de dégradation, le créancier peut
poursuivre le paiement de sa créance avant le terme ou obtenir une autre
hypothèque.». Peut également être
évoqué la cessation de paiement qui, d'après l'article 107
de l'A.U.P.C.A.P, est une cause résolutoire des contrats conclu intuitu
personae. Ces tempéraments que l'on regroupe dans les conventions de
crédit hypothécaire sous les vocables de clauses
d'exigibilité anticipée, sont également des points de
départ de la mise en mouvement du droit de suite.
Ce droit aux termes de l'article 117 de l'A.U.S s'exerce
conformément aux règles de la saisie immobilière. Ce qui
suppose au plan procédural, l'existence d'un titre exécutoire qui
permettra de dresser un commandement de saisi. Condition pas difficile à
remplir pour les banquiers qui préfèrent, en
général, recourir à un notaire lors de
l'établissement de la convention de crédit hypothécaire.
Le droit de suite est donc, avant tout, un droit de saisie dont la mise en
oeuvre vise à rendre l'immeuble hypothéqué indisponible,
à restreindre les droits du débiteur sur l'immeuble, et surtout
à rendre inopposables les actes du débiteur
94 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit, p. 192.
95 Lorsqu'il est exercé contre le
débiteur, on parle davantage de droit de saisi.
96 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit,P.195
24
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
accomplis au préjudice des intérêts du
banquier sur l'immeuble. Cependant, l'idée même du droit de suite
est intimement liée à celle du droit de
préférence97.
2- Le droit de préférence
Le droit préférence est une prérogative
qui s'exerce sur le prix représentant la valeur de l'immeuble. Il permet
à son titulaire d'échapper au concours des autres
créanciers. L'A.U.S qui l'organise précise son étendue
à l'article 117 et la procédure de distribution des deniers
provenant de la réalisation des immeubles à l'article 148 se fait
conformément à ce droit.
Pour ce qui est de son étendue, il ressort de
l'alinéa 3 de l'article 117 que le droit de préférence
s'exerce « pour garantir le principal, les frais et les trois ans
d'intérêt au même rang, sauf à prendre des
inscriptions particulières portant hypothèques à compter
de leurs dates pour les intérêts autres que ceux conservés
par l'inscription initiale. » Cette disposition comme le
précisait Joseph ISSA-SAYEGH doit être comprise comme une
règle permettant au créancier de prendre des inscriptions
particulières, pour des intérêts moratoires de plus de
trois ans « lorsque le débiteur n'a pas acquitté sa
dette à l'échéance ou aux échéances
prévues » 98. Par contre, s'il s'agit d'une
opération de crédit hypothécaire conclue en raison d'un
échéancier préétabli et portant sur une
période plus longue que trois ans, les intérêts
conventionnels ou légaux de ce plan d'amortissement seront inclus dans
les montants des échéances. Il n'y aura donc pas lieu d'appliquer
cette règle restrictive, car, celle-ci ne s'applique que pour les
intérêts moratoires qui courent à partir de
l'échéance du prêt, et qui sont supérieurs à
trois ans.
Par ailleurs, l'alinéa 4 de l'article
précité indique que « le droit de
préférence s'exerce également, par subrogation, sur
l'indemnité d'assurance de l'immeuble sinistré.» Cette
disposition conduit aussi à poser certaines questions, lorsque l'on sait
qu'il n'existe pas de principe général de subrogation
réelle.99 Comment les créanciers doivent ils s'y
prendre pour subroger le débiteur sur l'indemnité d'assurance?
N'y a-t-il pas risque pour l'assureur de verser directement les
indemnités dues à la survenance d'un sinistre? Certains auteurs
ont proposé de faire consentir au débiteur une cession
d'indemnité100. La solution est très pratique
97 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit. P 195.
98 V. ISSA SAYEGH, commentaire de l'acte uniforme
droit des sûretés, in OHADA, Traité et actes uniformes
commentés et annotés. Juriscope 2008. P. 772.
99 LEGEAIS (D), op. cit. P.433
100 Ibidem. Voir. Aussi, CROCQ (P) et AYNES (L), op. cit P.
301
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
lorsque l'immeuble hypothéqué est
déjà assuré. A contrario la solution passerait par la
souscription d'une police d'assurance au profit du banquier101.
Concernant la distribution du prix provenant de la
réalisation des immeubles, on constate avec l'article 148 de l'A.U.S que
le droit de préférence du créancier hypothécaire
n'est primé que par les privilèges généraux de
justice et par les superprivilèges de salaires. En revanche, il prime
les privilèges généraux soumis à publicité
selon le rang de leur inscription au R.C.C.M, les privilèges
généraux non soumis à publicité selon l'ordre
établi à l'article 107 de l'A.U.S, ainsi que les
créanciers chirographaires munis d'un titre exécutoire lorsqu'ils
sont intervenus par voie de saisie ou d'opposition à la
procédure.
Quant aux questions relatives au contentieux de l'inscription,
la question a été résolue par la règle `'prior
tempore, prior jure102, c'est à dire, celui premier dans
le temps, l'emporte en droit. Ce qui justifie encore l'importance de
l'inscription hypothécaire.
25
101 Solution très utilisées en zone CEMAC.
102 DJOUMESSAP METSOBO (J.C), l'hypothèque
conventionnelle dans la pratique bancaire camerounaise. Mémoire de DESS
en Juriste conseil d'entreprise FSJP/Université de Douala 2001- 2002.
26
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
CHAPITRE II : LES MESURES CONVENTIONNELLES DE
PROTECTION
Parallèlement à la prise en compte des mesures
légales, qui conditionnent la validité des opérations de
crédit hypothécaire et leur opposabilité aux tiers, les
conventions de crédit hypothécaire comportent d'autres mesures
visant à améliorer la protection du banquier. Ces mesures dites
conventionnelles sont en réalité des clauses contractuelles qui
ne relèvent pas d'une prescription expresse du législateur en la
matière. Leur présence dans les conventions de crédit
hypothécaire peut donc être considérée comme le
fruit de la clairvoyance juridique du banquier ou encore celui du
réalisme imposé par sa longue expérience dans les
transactions de crédit hypothécaire. Ces clauses ou mesures
conventionnelles sont de plusieurs ordres. Certaines ont un aspect plus
spécifique en ce qu'elles sont intimement liées à
l'immeuble hypothéqué (Section I), d'autres par contre sont plus
générales, en ce qu'elles touchent également le
crédit et, font parties du lot des mesures contractuelles
utilisées dans d'autres types de conventions (Section II).
Tout compte fait, ces différentes mesures contribuent
au renforcement de la protection juridique du banquier dans les
opérations de crédit hypothécaire. D'où
l'intérêt de les analyser.
SECTION I: LES MESURES SPECIFIQUES DE PROTECTION
La constitution des crédits hypothécaires
confère au banquier d'importants droits réels sur l'immeuble
hypothéqué sans pour autant interdire au constituant, qui demeure
le maître des biens103, d'en disposer en les aliénant
ou en les grevant de nouvelles hypothèques104. Bien que le
banquier n'ait pas à craindre les actes passés par le
constituant, puisqu'ils lui sont inopposables dès lors qu'ils
interviennent postérieurement à son inscription105,
l'immense pouvoir que conserve le constituant de l'hypothèque peut lui
faire perdre conscience de la gravité de l'acte qu'il a posé.
Ainsi, pour éviter une telle situation et maintenir une sorte de
pression psychologique sur le débiteur, le banquier conditionne de plus
en plus la prise de l'hypothèque à l'insertion dans la convention
des clauses prohibitives d'hypothèque (Paragraphe I), et à la
conservation par-devers lui des titres fonciers des immeubles
hypothéqués (Paragraphe II).
103 ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F), ISSA-SAYEGH
(J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit. P. 192.
104 Ibidem.
105 Article 122 et 129 A.U.S.
27
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Paragraphe I: Les clauses prohibitives
d'hypothèque
Encore appelées hypothèques négatives,
les clauses prohibitives sont en réalité de restrictions
contractuelles auxquelles consent le constituant de l'hypothèque. Leur
présence, dans la quasi-totalité des conventions de crédit
hypothécaire, invite à se pencher davantage sur le contenu des
ces clauses (A) avant d'évoquer leur portée juridique (B).
A)- Le contenu des clauses prohibitives
Les clauses prohibitives ont principalement pour objet
d'interdire le constituant de disposer du bien hypothéqué, d'en
réduire la valeur, et de constituer de nouvelles hypothèques sur
les immeubles déjà donnés en garantie106.
L'interdiction de disposer des immeubles hypothéqués est une
sorte de clauses d'inaliénabilité visant à interdire la
vente, l'apport en société, et la donation. Quant aux
interdictions de réduire la valeur et de concéder de nouvelles
sûretés, elles permettent de stabiliser le patrimoine en mettant
à la charge du débiteur une obligation de maintenir l'immeuble en
l'état. Dans certaines conventions les clauses prohibitives
s'étendent à la destination et donc à la gestion des
immeubles107.
Cependant, pour être valables les clauses prohibitives
d'hypothèque doivent, comme toutes obligations de ne pas faire,
être temporaires108. En règle générale,
leur durée est fonction de la durée de la convention de
crédit hypothécaire. Si la convention est conclue à
durée indéterminée, ces clauses produiront des effets
jusqu'au remboursement complet des fonds reçus. Et ce, en dépit
du principe de prohibition des engagements perpétuels109. De
même, les clauses prohibitives doivent être
déterminées avec précision dans leur objet, autrement dit,
elles ne doivent porter que sur les immeubles hypothéqués afin de
ne pas paralyser l'activité du débiteur. Elles doivent être
possibles car les obligations de ne pas faire sont le domaine d'application par
excellence de l'adage « impossibilum nulla obligatio
»110. Enfin, ces clauses doivent être
justifiées par un intérêt sérieux et
légitime. Et, leur cause doit être licite et conforme à
l'ordre public.
106 V. dans ce sens Mandessi Bell (E), La rétention de
titres fonciers dans le cadre de la prise de garanties hypothécaires.
Les bonnes pratiques. In La chronique des opérateurs
financiers.
www.ohadalegis.com consulté le 10 juin 2010.
107 Dans ce cas, « l'emprunteur s'engage à ne
modifier la destination des immeubles, à ne consentir des baux et
location d'une certaine durée, à ne résilier ou modifier
ceux existant, voire de les céder.».
108 DJOMBOU (C), la sécurité du banquier
dispensateur de crédit. Mémoire de DEA en droit privé
université de Douala 2005- 2006.
109 Principe général de droit, d'origine
jurisprudentielle, développé sur la base de l'article 1780 du
code civil de 1804. Ce principe offre la faculté de résiliation
unilatérale du contrat. Sur la notion lire, BENABENT (A), op. cit.
P.228.
110 « À l'impossible nul n'est tenu
».
28
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
A défaut d'observer ces conditions, ces clauses
prohibitives encourent la nullité. Mais, il faut bien préciser
que la nullité de ces clauses n'affecte en rien la validité de la
convention de crédit hypothécaire.
B)- La portée des clauses prohibitives
Les clauses prohibitives régulièrement conclues,
font foi de loi entre les parties et, sont opposables aux tiers dans les
mêmes conditions que les contrats de droit commun111. Elles
sont d'une importance considérable en ce qu'elles renforcent la
stabilité et l'intégrité du patrimoine du débiteur.
Ces clauses ne sont pas dépourvues de mérite dans la mesure
où leur constitution est souple et pas du tout coûteuse. Leur
efficacité dépend certes de la bonne volonté du
débiteur, mais leur violation par celui-ci entraine la
déchéance du terme au sens de l'article 1188 C.civ112.
Cette violation peut aussi être constitutive de comportement gravement
répréhensible selon le cas, et justifier la rupture
unilatérale du crédit. Par ailleurs, le tiers complice de cette
violation verra son acte purement et simplement ignoré par le banquier.
Tel est le cas lorsque le tiers contracte avec le débiteur en
connaissance de l'existence des ces clauses et au mépris de
celles-ci.
Toutefois, il y a lieu de remarquer que ces hypothèques
négatives sont assorties d'une exception, à savoir la
possibilité pour le client d'accomplir les actes prohibés sous
condition d'une autorisation préalable du banquier. Mais, il en
résulte dans ces types de formulation un danger considérable pour
le banquier qui pourrait voir sa responsabilité engagée, si son
attitude est assimilée à une immixtion dans les affaires du
débiteur. En effet, la qualité de dirigeant de fait ou
d'associé de fait pourrait être retenue à son encontre pour
déboucher à une condamnation en comblement du passif. Pour cette
raison nous estimons que ces clauses constituent une arme à utiliser
avec prudence. Bien que leur usage conduit généralement le
banquier à procéder à la conservation des titres
fonciers.
Paragraphe II : La conservation des titres fonciers
Technique née de la pratique bancaire, la conservation
de titres fonciers accompagne de nombreuses conventions de crédit
hypothécaire sans pour autant oser y figurer de manière
écrite dans lesdites conventions. Cette situation rend floue la
compréhension de cette pratique (A), et l'expose à des critiques
parfois trop virulentes (B).
111 Article 1134 du C.civ
112 Article 1188 du C.civ « Le débiteur ne
peut réclamer le bénéfice du terme lorsque par son fait,
il a diminué les sûretés qu'il avait donné par le
contrat au créancier».
29
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
A)- Le pratique de conservation du titre foncier
Le titre foncier est défini comme étant «
la certification officielle de la propriété
immobilière »113. C'est donc un acte qui
matérialise la propriété des biens immobiliers et, par
conséquent, permet d'effectuer les transactions immobilières
(hypothèque, vente, échange ou donation d'immeuble.). Cet acte
doit en principe être détenu par leurs propriétaires
à l'instar de la majeure partie des documents officiels à
caractères personnels. Cependant, dans le cadre des opérations de
crédit hypothécaire, la pratique bancaire a
développé un procédé de rétention et
conservation du titre foncier pendant toute la durée du prêt
jusqu'à complet remboursement du crédit. Cette pratique
déjà forte ancienne dans le secteur bancaire est malheureusement
encore occulte114. En effet, elle accompagne de nombreuses
conventions de crédit hypothécaire sans jamais oser être
inscrite de manière formelle.
La preuve de cette pratique nous est tout de même
fournie par les nombreux litiges portant sur la restitution du titre foncier
opposant les banques à leurs clients. Tel est le cas de l'affaire qui
opposait la Standard Chartered Bank Cameroon S.A au conservateur de la
propriété foncière du Mfoundi et la Société
Internationale d'Equipement. En l'espèce, la banque qui avait
reçu notification d'une ordonnance lui prescrivant de donner
mainlevée à hypothèque et de restituer le titre foncier
à la Société Internationale d'Equipement, va
requérir du président du Tribunal de Première Instance
(TPI) du Mfoundi, la rétractation de ladite ordonnance au motif pris de
ce que, le constituant qui avait contracté un crédit avec
affectation hypothécaire courant 1993, lui était encore
redevable. Le président du TPI a donné gain de cause à la
banque sur les bases des articles 2092 et 2093 du C.civ qui dispose
respectivement que « Quiconque s'est obligé personnellement,
est tenu de remplir son engagement sur tout ces biens mobiliers et immobilier,
présent et à venir. » et que « Les biens du
débiteur sont le gage commun de ses créancier...
»115.
Il ressort de cette décision que la rétention ou
conservation du titre foncier est une forme autonome de garantie qui dans cette
hypothèse s'est greffée à l'hypothèque. Le
véritable objectif de ce procédé est de contribuer
à la stabilité de l'immeuble hypothéqué et de
maintenir une pression psychologique sur l'emprunteur. De par la
rétention du titre foncier, le débiteur devient plus diligent car
il a l'impression de ne plus être maître absolu de l'immeuble
113 Voir, le décret n°76- 165 du 27 avril 1976
fixant les conditions d'obtention du titre foncier, modifié et
complété par le décret n° 2005/481 du 16
décembre 2005.
114 Voir, MEVOUNGOU NSANA (R), op. cit P. 292.
115 Ordonnance de référée n° 159/D
du 27 Mars 2008. Affaire Standard Chartered Bank Cameroon S.A c/ conservateur
de la propriété foncière du Mfoundi et la
Société Internationale d'Equipement.
30
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
hypothéqué. Cependant, le recours à cette
pratique ne doit pas dispenser le banquier de la procédure d'inscription
de l'immeuble telle que prévue par la loi. Car, en l'absence
d'inscription de l'hypothèque, la pratique de conservation des titres
fonciers n'a pas efficacité réelle.
B)- La portée de la conservation du titre
foncier
La conservation des titres fonciers sans préalablement
inscrire l'hypothèque à la conservation foncière est une
mesure sans véritable efficacité. En effet, cette pratique
dénommée `'dépôt libre»très
répandue dans le secteur bancaire, notamment celui des microfinances, ne
garantit en rien la protection du banquier. Puisque, les clients de mauvaise
foi peuvent toujours obtenir de nouveaux duplicata, après
établissement des certificats de pertes et mise en oeuvre de certaines
procédures de reconstitution d'acte, qui leur permettront de disposer de
l'immeuble ou de le grever de nouvelles hypothèques.
En doctrine, la conservation des titres fonciers des immeubles
hypothéqués a été vivement
critiquée116. Il a été avancé qu'elle
dénature la garantie hypothécaire en affectant son
caractère de garantie sans dépossession, et en empêchant le
constituant de consentir une autre hypothèque de second rang. Dans
l'ensemble, cette mesure est perçue comme un signe de manque de
confiance des banques à l'égard de l'administration des domaines
et un abus de droit. Cependant cette critique, bien que fondée en
partie, nous semble un peu trop sévère.
En effet, concernant la dénaturation de l'institution
juridique de la garantie hypothécaire, rappelons d'abord que
l'hypothèque porte sur les immeubles ou les droits immobiliers, tandis
que la conservation porte sur le titre foncier. Cette différence d'objet
suffit pour soutenir que nous avons à faire à deux
mécanismes distincts quand bien même la conservation du titre
s'appuie sur le mécanisme d'hypothèque. Ceci dit,
l'hypothèque ne perd pas son caractère de garantie sans
dépossession par la rétention du titre foncier. Pour que ce
caractère soit affecté, il faudrait que le constituant n'ait plus
la maîtrise de l'immeuble. Autrement dit, qu'il ne soit plus en mesure
d'exercer les droits que lui reconnait la loi à la suite de la
constitution d'une hypothèque, notamment, le droit d'usage, de
jouissance et d'administration117.
116 Sur l'essentiel de la critique V. l'auteur
précité, P.293.
117 Sur les droits du constituant sur l'immeuble
hypothéqué. V. ANOUKAHA (F), CISSE- NIANG (A), MESSANVI (F),
ISSA-SAYEGH (J), YANKHOBA NDIAYE (I), MOUSSA (S), op. cit. P. 191 à 192.
Et, AYNES (L) et CROCQ (P), op. cit. P.298 à 301. Ainsi que, LEGEAIS
(D), op. cit P. 424 à 425.
31
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Cependant, tel n'est pas le cas. Bien que le banquier conserve
le titre foncier, le débiteur continue d'user et de jouir de l'immeuble.
Seul est légèrement affecté son droit de disposition. Et
ce, non pas seulement par la conservation du titre foncier, mais
également, en vertu des clauses prohibitives régulièrement
consenties par le client lors de la constitution de l'acte de crédit
hypothécaire. De même, ce sont ces clauses qui justifient la
restriction du droit de constituer une nouvelle hypothèque de second
rang. La conservation des titres fonciers n'est donc qu'une mesure qui permet
de concrétiser les clauses prohibitives. Bien qu'à ce niveau
aussi une nuance s'impose. En effet, en dépit du fait qu'il soit
difficile pour les banques d'accepter une hypothèque de second rang, le
banquier, lorsqu'il est créancier de premier rang d'une
hypothèque, n'interdit pas d'une façon drastique la constitution
d'une hypothèque de second rang. Il soumet simplement une telle
constitution à son avis ou à son accord préalable. En
réalité, les parties s'aménagent un terrain de
négociation qui en cas d'impasse pourrait faire intervenir le juge. Ce
dernier pourrait apprécier cette situation, par exemple, en fonction de
la valeur du bien, du risque que court le banquier, ainsi que de
l'opportunité qu'il y a de concéder la nouvelle
hypothèque.
Quant à l'argument d'abus de droit, il n'est valable
que dans le cas où le banquier conserve le titre sans avoir
préalablement obtenu le consentement de son client. En effet, en
pareille hypothèse, le problème de la légitimité de
cette rétention se poserait118. Mais, dans le cas contraire,
la rétention du titre foncier ne saurait être
considérée comme un abus de droit. D'où,
l'intérêt pour le banquier d'inscrire expressément cette
clause dans les conventions de crédit hypothécaire. Même
s'il est vrai que le droit de rétention tel que prévu par l'OHADA
est soumis à aucune condition de forme.
En somme, il faut reconnaître que la conservation du
titre foncier a une importance pratique pour toutes les parties à la
convention de crédit hypothécaire. En effet, si elle a l'avantage
de sécuriser le banquier en paralysant le risque de distraction de
l'immeuble, elle aide également le client en ce qu'elle comble l'effet
d'illusion souvent reproché à l'hypothèque119.
L'hypothèque est considérée comme un acte dangereux parce
qu'elle fait croire au client qu'il conserve l'immeuble en pleine
propriété, alors que, ce dernier risque de se voir
déposséder de l'immeuble hypothéqué. Or,
grâce à la conservation du titre foncier, le constituant de
l'hypothèque prend de plus en plus conscience du risque qui le
guette.
118 Le droit de rétention a été
organisé par le droit OHADA qui prévoit parmi les conditions de
validité, la nécessité pour la créance d'être
exigible. Or, la créance du banquier qui exerce son droit de
rétention, sans consentement du constituant et, après avoir
inscrit l'hypothèque n'est généralement pas encore
exigible.
119 AYNES (L) et CROCQ (P), op. cit. P. 278.
32
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
SECTION II : LES MESURES GENERALES DE PROTECTION
Il s'agit ici des mesures non spécifiquement
applicables aux opérations de crédit hypothécaire, mais,
fréquemment utilisées pour renforcer la protection du banquier.
Ces mesures sont au nombre de deux. La première est l'assurance (A), et
la seconde une clause conférant le droit de regard (B).
Paragraphe I : L'assurance des crédits
hypothécaires
Le recours à l'assurance dans les conventions
hypothécaires est une pratique si courante que législateur OHADA
ne l'a pas perdu de vue. En effet, bien que ne légiférant pas en
ce domaine qui échappe à sa compétence, il a tout de
même indiqué à l'article 117 al 4 que, le droit de
préférence du créancier hypothécaire «
s'exerce également, par subrogation, sur l'indemnité
d'assurance de l'immeuble sinistré. ». Cette indication de
l'étendue du droit de préférence, mettant en relief
l'assurance dans les opérations de crédit hypothécaire,
incite à s'attarder sur le mécanisme d'assurance dans les
conventions de crédit hypothécaire (A) avant d'évoquer sa
portée (B).
A)- Le mécanisme d'assurance dans les
conventions de crédit hypothécaire
Plusieurs conventions de crédit hypothécaire
comportent des clauses par lesquelles, le débiteur s'engage à
souscrire une police d'assurance au profit du banquier. Cette police
d'assurance dans la majeure partie des cas est double, puisqu'elle porte aussi
bien sur l'immeuble hypothéqué que sur la personne du
débiteur. Concernant l'immeuble hypothéqué, l'assurance
garantit le risque d'incendie et de destruction. Quant à la personne du
débiteur, l'assurance garantit l'invalidité et le
décès. Il s'agit donc d'une assurance groupe120,
laquelle peut être souscrite aussi bien par le banquier lui-même
que par le débiteur121. Dans tous les cas de figure, la
police d'assurance doit être souscrite au profit du banquier. En clair,
nous avons un contrat d'assurance greffé à une opération
de crédit hypothécaire. En général, le
débiteur s'engage à maintenir l'assurance de l'immeuble durant
toute la période du prêt, et de le renouveler s'il y a lieu.
Ainsi, consent-il également à payer régulièrement
les primes d'assurance. Mais, très souvent, le banquier s'aménage
la possibilité de payer les primes en
120 Les assurances groupes couvrent une multitude de risque
(invalidité, décès, incendie...). Mais, il arrive aussi
des cas où le banquier pour alléger la charge du débiteur
opte pour une assurance qui ne concerne que le bien hypothéqué.
Voir, pour amples détails, LAMBERT-FAIVRE (Y), Droit des assurances
11e édition Dalloz 2001.
121 Lorsque le débiteur souscrit lui-même une
police d'assurance pour garantir sa solvabilité, on parle de
l'assurance- caution qui constitue une autre forme d'assurance - crédit.
A ce propos voir ASSI-ESSO (A.M), ISSA-SAYEGH (J) et LOHOUES-OBLE (J), CIMA,
Droit des assurances, Bruylant 2002. P. 180
33
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
cas d'inertie du débiteur. L'immeuble
hypothéqué est en principe assuré pour un montant au moins
égal à celui des concours bancaires accordés. Et, les
parties à la convention hypothécaire se réserve
généralement le droit d'augmenter ce montant afin d'éviter
les inconvénients pouvant résulter de l'application de la
règle proportionnelle122.
Lorsque la police d'assurance est souscrite par le du
banquier123, ce dernier se doit d'informer l'emprunteur sur les
conditions et les limites de l'assurance souscrite124 à peine
d'engager sa responsabilité. Ainsi, doit-il porter à la
connaissance de l'emprunteur les particularités de l'assurance et
l'option qu'elle comporte ainsi que les éventuelles conditions
restrictives. Par exemple le fait que la garantie ne joue que lorsque
l'invalidité totale entraine l'assistance obligatoire d'une tierce
personne. La jurisprudence française a d'ailleurs prolongé cette
obligation d'information par un devoir de conseil qui oblige le banquier
à expliquer à l'assuré les conséquences de
l'assurance ou de l'absence d'assurance125. L'obligation
d'information du banquier se poursuit pendant l'exécution du contrat.
Ainsi, averti par la compagnie du refus de prise en charge après
réalisation du sinistre, le banquier souscripteur doit en informer
l'assuré pour lui permettre d'exercer ses recours. Mais le devoir
d'information pesant sur le banquier ne dispense pas l'emprunteur de toute
diligence.
B)- La portée de l'assurance dans les
conventions de crédit hypothécaire
L'usage de l'assurance dans les conventions de crédit
hypothécaire renforce la protection du banquier et ces chances de se
faire payer intégralement sur l'immeuble hypothéqué en cas
de défaillance du débiteur. En l'absence d'une assurance portant
sur l'immeuble, le banquier passerait très facilement de la situation
d'un créancier hypothécaire à un créancier
chirographaire, si le sinistre se produisait. En effet, la destruction ou
l'incendie de l'immeuble entrainerait à coût sur une
dépréciation de la valeur de l'immeuble à défaut de
sa disparition. Ainsi, peut-on considérer que l'assurance aide le
débiteur à honorer son engagement de maintenir la valeur de
l'immeuble hypothéqué durant toute la période du
prêt126.
122 Règle entrainant la réduction de
l'indemnité d'assurance en proportion du taux de prime payé par
rapport au taux de prime qui aurait été du, si les risques
avaient été complètement et exactement
déclarés.
123 Dans ce cas en utilise plus la notion
d'assurance-crédit.
124 LAMBERT-FAIVRE (Y), op. cit, p. 751.
125 Cass. Civ. 1ère 22 février 1984,
Dalloz 1984, p. 386 note BERR et GROUTEL.
126 Engagement pris dans le cadre des hypothèques
négatives encore appelées clauses prohibitives.
34
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
En cas de survenance du sinistre, les droits du banquier
créancier hypothécaire sont en principe reportés sur
l'indemnité d'assurance127. Toutefois, la survenance du
sinistre n'entraine pas forcément remboursement du crédit
hypothécaire. Pour qu'il y ait remboursement du crédit, il
faudrait que la créance du banquier soit devenue liquide et exigible, au
moment du règlement du sinistre128 ou que les parties aient
fait de la survenance du sinistre une cause d'exigibilité
immédiate. Mais, dans ce dernier cas aussi, des difficultés
peuvent se poser. Notamment, si le sinistre est partiel, le versement de
l'indemnité au banquier peut priver le débiteur de la
faculté de reconstruire l'immeuble grâce à
l'indemnité d'assurance. Ainsi, pensons-nous qu'il conviendrait
d'insérer dans les contrats d'assurance annexés à la
convention de crédit hypothécaire, une clause prévoyant
que si l'immeuble est reconstruit, le banquier devra reverser
l'indemnité d'assurance au débiteur.
Précisons, par ailleurs, que le banquier comme tous les
créanciers hypothécaires, ne reçoit l'indemnité que
dans la limite du montant de sa propre créance, le surplus étant
versé à l'assuré. En outre, l'attribution de
l'indemnité d'assurance a lieu suivant la procédure d'ordre
prévue à l'article 148 de l'A.U.S. Ce qui théoriquement
est un avantage pour le banquier qui en règle générale ne
prend que des hypothèques de premier rang sans
concurrence129.
Certes, on peut se plaindre du fait que le mécanisme
d'assurance, contrairement à la rétention des titres fonciers et
l'insertion des clauses prohibitives, ait pour effet pervers d'augmenter la
charge du débiteur, mais il demeure un moyen efficace et prudent pour
renforcer la protection du banquier.
Paragraphe II : Les clauses conférant le droit de
regard
Les clauses conférant un droit de regard au banquier
sont généralement contenues dans les conventions de crédit
hypothécaire. Elles créent une obligation pour le débiteur
de fournir au banquier certains renseignements durant l'exécution de la
convention de crédit hypothécaire. Ces renseignements qui
s'obtiennent suivant certaines modalités (A), sont d'une grande
importance pour la protection du banquier (B).
127 Article 117 al 4 de l'A.U.S
128 LAMBERT-FAIVRE (Y), op. cit, p. 420.
129 En pratique cette précaution peut comporter des
limites notamment en cas d'ouverture des procédures collectives
d'apurement du passif. Les droits du banquier peuvent être
supplantés par ceux des créanciers des frais de justice
engagés dans la réalisation de l'immeuble et les
créanciers de salaire superprivilégiés.
35
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
A) Les modalités du droit de regard
Les clauses conférant un droit de regard permettent
d'obtenir des informations sur le patrimoine du client à travers des
investigations conventionnellement autorisées. Dans le cadre des
opérations de crédit hypothécaire, ces clauses permettent
au banquier de réaliser une sorte de contrôle sur
l'activité du client et sur les immeubles hypothéqués.
L'étendue du contrôle est parfois fonction de la présence
ou non d'une clause d'affectation spéciale du crédit. En effet,
lorsque le crédit est affecté à une activité
précise, le droit de regard du banquier est plus important parce qu'il
s'étend également à l'usage des fonds prêtés.
Mais, en l'absence d'une clause d'affectation spéciale, le
contrôle du banquier est plus restreint.
Tout de même, le banquier peut poser des questions que
les clients se doivent de répondre. Au besoin, et selon les cas, le
banquier peut requérir les états financiers et rapports du
commissaire aux comptes pour avoir une idée sur la santé
financière du débiteur. Il peut aussi demander des renseignements
sur les actes accomplis en relation avec les immeubles
hypothéqués à son profit.
L'information due au banquier est si proche de celle que les
dirigeants sociaux doivent fournir aux actionnaires, qu'il donne à
penser que le droit de regard est susceptible de conférer au banquier un
droit d'alerte130. Mais, la mise en oeuvre d'une telle
procédure devrait en principe se heurter au secret
bancaire131. Bien que, ces informations peuvent être
exigées pour servir de preuve en vue d'une procédure judiciaire.
Par ailleurs, l'usage des clauses conférant un droit de regard n'est pas
toujours de nature à servir les intérêts du banquier,
lequel, en pareille hypothèse, court le risque de voir sa
responsabilité engagée.
B) La portée du droit de regard
L'importance de l'information recueillie par le banquier sur
l'état du patrimoine de son client n'est plus à démontrer.
Que se soit à l'occasion de la conclusion ou au cours de
l'exécution du contrat de crédit, l'intérêt pour le
banquier de s'informer de la situation du client est évident. En effet,
cette information facilite l'appréciation du risque. Ainsi, dans le
cadre d'une ouverture de crédit garantie par une hypothèque, le
banquier peut par exemple se
130 Procédure dont la finalité est de permettre
la détection précoce des difficultés des entreprises, afin
de susciter le plus rapidement possible une réaction de la part des
dirigeants. Elle est régie en droit OHADA par les articles 150 et
suivants de l'AUSCGIE. Voir également, SAWADOGO (F.M), OHADA Droit
des entreprises en difficulté, Bruylant 2002, p. 36 et suivants.
131 Obligation professionnel du banquier l'imposant de taire
les confidences recueillies au cours de l'exercice de ses activités.
Lire à ce propos, DJOMBOU (C), op. cit, p. 27
36
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
permettre de limiter le crédit lorsque celui-ci est
excessif et de nature à handicaper le bon fonctionnement des
activités du débiteur.
Le droit de regard peut cependant être dangereux pour le
banquier. En effet, le contrôle qu'il permet au banquier d'exercer sur
l'activité du banquier peut conduire à retenir, à son
égard, la qualité de dirigeant de fait. Ce qui en cas d'ouverture
d'une procédure collective d'apurement du passif, pourrait engager sa
responsabilité pour violation du principe de non ingérence et le
condamner en comblement du passif. Il est donc capital de faire bon usage du
droit de regard et éviter une immixtion assez prononcée sur dans
les affaires du client.
37
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Au terme de cette première analyse, il y a lieu de
constater que la protection du banquier est véritablement garantie lors
de la constitution des crédits hypothécaire. En effet, les
différentes mesures légales et conventionnelles, auxquelles se
conforme le banquier, lui permettent d'être à l'abri d'une
pluralité de risques.
Concernant les mesures légales, il en ressort qu'elles
protègent le banquier contre le risque de nullité et
d'inopposabilité. En effet, le banquier, qui respecte les conditions de
fond et de forme telles que prescrites par le législateur, ne saurait
voir sa garantie annulée ou encore ses effets ignorés par les
tiers. Bien au contraire la loi lui reconnaît, en cas de non
remboursement du crédit, le droit de réaliser l'immeuble en
quelques mains qu'il se trouve, et de se faire payer par
préférence sur le prix de la réalisation du bien.
Les mesures conventionnelles, quant à elles, viennent
renforcer la protection du banquier en prenant en compte une autre
catégorie de risques. Notamment, le risque de dépréciation
de l'immeuble (du à des actes posés par le débiteur) et le
risque de destruction de l'immeuble. Ces risques, qui peuvent se produire
après la constitution légale de l'hypothèque et la mise en
place du crédit, conduisent à l'inconsistance de la garantie
voire à l'insolvabilité du débiteur. Alors que le risque
d'incendie et de destruction est pris en compte par une clause d'assurance
insérée à la convention de crédit
hypothécaire, le risque de dépréciation est pris en compte
par les clauses prohibitives, la rétention de titres fonciers et les
clauses conférant un droit de regard.
Toutefois, pour avoir une vue synoptique sur la protection du
banquier dans les opérations de crédit hypothécaire, une
seconde analyse s'impose. En effet, lorsque l'on sait que l'efficacité
de toute sûreté s'apprécie à l'aune de sa
capacité à satisfaire le recouvrement du crédit, on est
bien obligé d'analyser la protection du banquier dans le
recouvrement.
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA
Julio Chancel
38
DEUXIEME PARTIE : UNE PROTECTION RELATIVE LORS DU
RECOUVREMENT
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Le recouvrement est la finalité de toutes les
opérations de crédit. En effet, le banquier ne recourt aux
garanties que dans le but de mieux préparer le recouvrement. C'est
d'ailleurs pourquoi Laurent AYNES et Pierre CROCQ ont affirmé que «
les banques n'ont que faire d'un droit réel. Ce qui les
intéresse, c'est le recouvrement des fonds, le plus simplement et
rapidement possible. »132. Recouvrer les fonds, c'est
mettre en oeuvre les moyens susceptibles d'amener son débiteur à
s'exécuter et, au besoin, liquider les droits du créancier afin
de se faire rembourser133. Il y va de l'intérêt de
l'économie que le recouvrement des créances se fasse de
façon aussi simple que rapide. Car, le banquier ne consentira son
crédit qu'aux emprunteurs qui peuvent lui apporter de solides garanties,
c'est-à-dire des garanties qu'il peut facilement réaliser pour
rentrer dans son dû.
Conscient de cette réalité, le
législateur OHADA a reconnu et consacré le droit de tous les
créanciers de pouvoir réaliser l'immeuble affecté à
la garantie du crédit, en cas de non paiement spontané du
débiteur, et de se faire payer par préférence sur le
produit de la vente134. Cette garantie offerte aux créanciers
a été, cependant, biaisée lors de la détermination
des procédures suivant lesquelles les créanciers devraient
recouvrer les crédits garantis par les hypothèques. En effet, les
procédures de recouvrement prévues à cet effet ont toutes,
en fonction des considérations diverses qui les
justifient135, un impact considérable sur les droits et
intérêts des créanciers. Cet impact est plus ou moins
accentué selon que l'on se trouve face à un débiteur en
difficulté (Chapitre II) ou un débiteur in bonis (Chapitre I).
39
132 AYNES (L) CROCQ (P), op. cit. P.9
133 V. Dans le même sens GATSI (J), le recouvrement des
créances bancaires en droit OHADA, op. cit P.2
134 Article 117 A.U.S.
135 Sur les justificatifs de la saisie immobilière, lire
notamment, KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit. P. 246
40
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
CHAPITRE I : LE RECOUVREMENT FACE AU DEBITEUR IN
BONIS
Le débiteur in bonis est celui dont la cause du non
respect des engagements bancaires n'est pas liée à l'ouverture
d'une procédure collective à son encontre136. Mais,
simplement à son infortune ou à sa mauvaise foi. Ce cas de figure
est très fréquent et concerne, au regard de la jurisprudence, la
majorité des débiteurs défaillants engagés dans les
opérations de crédit garanties par les hypothèques. Il est
également très fréquent de voir un tel débiteur,
qui pourtant avait volontairement consenti une hypothèque, multiplier
des astuces permettant, à défaut de se soustraire du paiement,
d'immobiliser les fonds du banquier. Et ce, après avoir obtenu de
nouveaux reports d'échéance137 qu'il n'a pas
également pu honorer.
L'observation de cette situation conduit à constater
que les manigances d'un tel débiteur sont parfois favorisées par
la loi. En effet, face à un tel débiteur et, même en
l'absence de toute manigance, le législateur invite le banquier à
recourir à la procédure de saisie
immobilière138. Cette procédure, régie par les
articles 246 et suivants de l'acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies
d'exécution (A.U.P.S.R.V.E), se singularise par son caractère
d'ordre public qui conduit à sanctionner de nullité tout
recouvrement qui ne lui est pas conforme139. Pourtant, à
l'analyse, la procédure de saisie immobilière se
révèle être inadaptée aux nécessités
économiques. Car, elle est particulièrement longue (Section I) et
complexe (Section II)140.
Section I : L'assujettissement du banquier à une
procédure particulièrement longue
En l'état actuel du droit OHADA, la saisie
immobilière est quasiment l'unique mode de recouvrement des
crédits hypothécaires. Cette procédure, organisée
préalablement pour permettre de poursuivre la vente par expropriation
forcée des immeubles appartenant à tout débiteur
défaillant, est également devenue par le biais du renvoi
opéré par l'article 117 de l'A.U.S, celle qui gouverne la
réalisation des hypothèques. La procédure de saisie
136 Un tel débiteur, est encore solvable et demeure
maître de ses biens contrairement au débiteur en
difficulté. Voir pour cette définition, GUILLIEN (R) et VINCENT
(J), op. cit. P.331
137 En pratique, le banquier ne procède pas
spontanément à la réalisation des hypothèques, il
octroie très généralement de nouveaux délais afin
de conduire le débiteur à s'acquitter de sa créance. C'est
la phase amiable du contentieux. Lire à ce propos GATSI (J), op. cit
P.4
138 Article 117 al 2 de l'A.U.S
139 Cf. article 246 de l'A.U.P.S.R.V.E. Voir pour application
Niamey, chambre civile. Arrêt n°79 du 19 avril 2004. Y.K c/ B.I et
N.C.
www.ohada.com/Ohadata J-05-182.
140 La doctrine et les praticiens s'accordent à le
dire. V. TEPPI KOLOKO (F), POUGOUE (G), op cit P. 135. ASSI ESSO (AM), NDIAW
DIOUF, op. cit, P. 191, ANOUKAHA (F), op. cit P.65, SOUOP (S) op. cit P. 8,
KUATE TAMEGHE (S.S) op. cit. P. 246. ANOUKAHA (F), TJOUEN (A.D), les
procédures simplifiées de recouvrement et les voies
d'exécution P.U.A Yaoundé P.45
41
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
immobilière, dont l'observation est d'ordre public, est
une procédure particulièrement longue. Cette
caractéristique, préjudiciable pour le banquier141, se
manifeste à travers les différentes formalités qui
structurent ladite procédure. Ces formalités,
séparées les unes des autres par des délais, vont de la
saisie de l'immeuble (Paragraphe I), à sa vente (Paragraphe II).
Paragraphe I : Le formalisme préalable à la
réalisation des hypothèques
Il s'agit des formalités qui entourent la mise de
l'immeuble sous main de justice. Car, la vente de l'immeuble par saisie
immobilière est une procédure essentiellement judiciaire. Mais,
dans un premier temps, la procédure se passe en dehors des tribunaux et
s'articule principalement autour du commandement de saisie. Lequel doit
être établi (A), signifié et publié (B)
conformément aux prescriptions légales prévues à
cet effet.
A)- L'établissement du commandement de
saisie
Le commandement de saisie est l'acte qui déclenche la
procédure de saisie immobilière. Il ne peut être
rédigé que par un huissier ou l'agent
d'exécution142. Son établissement est régi par
l'article 254 de l'A.U.P.S.R.V.E qui sanctionne de nullité non seulement
les procédures qui n'observent pas cet acte, mais également
celles dont l'acte viole les énonciations prévues par ledit
article, notamment:
- la reproduction ou la copie du titre
exécutoire et le montant de la dette, ainsi que les noms, prénoms
et adresses des personnes directement impliquées et, s'il s'agit d'une
morale, ses formes dénomination et siège social;
- la copie du pouvoir spécial de
saisie donnée à l'huissier ou à l'agent d'exécution
par le créancier poursuivant;
- l'avertissement que, faute de payer dans
les vingt (20) jours, le commandement pourra être transcrit à la
conservation foncière et vaudra saisie à partir de sa
publication;
- l'indication de la juridiction où
l'expropriation sera poursuivie;
- le numéro du titre foncier et
l'indication de la situation précise des immeubles faisant l'objet de la
poursuite;
141 La logique économique est celle de la
simplicité et célérité des transactions. V.
ANOUKAHA (F), op. cit. P. 4 et suivantes. Or, le fait que la procédure
soit longue compromet le bon fonctionnement des activités bancaires.
142 En effet, L'A.U.P.S.R.V.E a étendu le monopole
jadis réservé aux huissiers, aux agents d'exécution. V.
dans ce sens ASSI- ESSO (A.H) et NDIAW DIOUF, op. cit. P.203.
42
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
- la constitution de l'avocat chez lequel le
créancier poursuivant élit domicile et où devront
être notifiés les actes d'opposition au commandement, offres
réelles et toutes significations relatives à la saisie.
Concernant les nullités sus-évoquées, il
y a lieu de retenir que l'article 297 al 2 de l'A.U.P.R.S.V.E subordonne leur
prononcé à l'existence d'un préjudice causé aux
intérêts de celui qui l'invoque143. Cependant, la
formulation dudit article est un peu curieuse. En effet, elle pourrait faire
croire que même le défaut de commandement de saisie est soumis
à une nullité relative nécessitant l'existence d'un
préjudice allégué. Une telle analyse est cependant
erronée selon notre entendement car, elle contredirait le
caractère d'ordre public de la saisie immobilière posée
par l'article 246 du même acte. Ainsi, nous pensons que la nullité
qui gouverne le défaut de commandement de saisie est une nullité
d'ordre public. L'établissement du commandement étant la
formalité qui marque le point de départ de la procédure,
celle-ci se doit d'être complétée par les formalités
de signification et la publicité.
B)- La signification et publicité du
commandement
Le commandement de saisie une fois établi doit
être signifié au débiteur, et le cas échéant,
au tiers détenteur de l'immeuble poursuivi. Le législateur OHADA
n'ayant pas prévu des modalités particulières de cette
signification, celle-ci devrait donc valablement se faire à personne ou
à domicile conformément aux règles de procédure
civile et commerciale144. Tout en respectant cependant les
règles de droit commun des saisies posées par l'article 46 de
l'A.U.P.S.R.V.E qui interdit d'effectuer les saisies « un dimanche ou
un jour férié si ce n'est en cas de nécessité et en
vertu d'une autorisation spéciale du président de la juridiction
dans le ressort de laquelle se poursuit l'exécution », et
« avant huit heures et après dix- huit heures, sauf en cas de
nécessité avec autorisation de la juridiction compétente
et seulement dans les lieux qui ne servent pas à l'habitation
»145.
143 Sur le régime général des
nullités prévues par l'AUPSRVE, V. IPANDA, Le régime de
nullité des actes de procédures depuis l'entrée en vigueur
de l'acte uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement
et voies d'exécution. Ohadata D-02-01.
144 Article 7 du code de procédure civil et commerciale
édition 2009 P.U.L GATSI (J), (sous la coordination de...)
145 A propos de cette disposition, il est fait échos de
l'importance d'adapter les textes de procédures civiles ou les textes
organisant la profession d'huissier dans la plupart des Etats membres de
l'OHADA à l'A.U.P.S.V.E. V. KUATE TAMEGHE op. cit, P.78 et suivants.
43
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Par ailleurs, lorsque la signification du commandement de
saisie est faite au tiers détenteur, l'article 255 de l'A.U.P.S.R.V.E la
subordonne à peine de nullité à l'accomplissement d'une
formalité supplémentaire qui est la sommation soit de payer
l'intégralité de la dette en principal et intérêts,
soit de délaisser l'immeuble hypothéqué, soit enfin de
subir la procédure d'expropriation146.
Enfin, la formalité de publicité du commandement
est prévue par l'article 259 al 1 de l'A.U.P.S.R.V.E, qui indique qu'il
revient à l'huissier ou à l'agent d'exécution de faire
viser le commandement de saisie par le conservateur de la
propriété foncière à qui copie est remise pour la
publicité, ou par l'autorité administrative dans le cas d'une
saisie immobilière pratiquée sur des impenses
réalisées par le débiteur. Cette formalité se doit
d'être accomplie dans un délai de (03) trois mois maximum à
compter de la signification du commandement147. Faute de quoi, le
créancier poursuivant devrait reprendre la poursuite en
réitérant un nouveau commandement.
En tout cas, même s'il advenait que le commandement de
saisie ait été remis au conservateur foncier pour
l'accomplissement des formalités de publicité, le jour même
de la signification de l'acte au débiteur et au tiers saisi le cas
échéant, le banquier poursuivant se devra d'attendre
l'écoulement du délai de vingt (20) jours conformément aux
exigences légales. Et, ce n'est qu'après ce délai,
à défaut de paiement spontané, qu'il pourra engager les
formalités de vente.
Paragraphe II : Les formalités relatives à la
vente de l'immeuble
La vente de l'immeuble hypothéqué est une
procédure formaliste (B). Mais, sa tenue est
précédée par une série d'actes préparatoires
(A), qu'il convient de présenter.
A)- Les actes préparatoires de la vente
L'A.U.P.S.R.V.E fait obligation à tout
créancier, au rang desquels figure le banquier voulant recouvrer son
crédit, d'accomplir une série d'acte visant à
préparer la vente. Ces actes qui, pour reprendre certains auteurs,
« gravitent autour du cahier des charges »148 (1)
donnent généralement lieu à une éventuelle audience
qui précède la publicité dudit cahier (2).
1)- Le cahier des charges
146 Sur la saisie immobilière déclenchée
à l'encontre du tiers détenteur, lire TEPPI KOLOKO (F), POUGOUE
(G), op. cit, p. 24 et suivantes. De même que, ASSI ESSO (A.M), NDIAW
DIOUF, op. cit, p. 206 et suivantes.
147 Art 259 al 3 A.U.P.S.R.V.E
148 ASSI- ESSO(A.H) et NDIAW DIOUF, op. cit. P.210. Dans le
même sens, KUATE TAMEGHE (S.S) op. cit. P. 250.
44
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Aux termes de l'article 266 de l'A.U.P.S.R.V.E, « le
cahier des charges est le document, rédigé et signé par
l'avocat du créancier poursuivant, qui précise les conditions et
les modalités de la vente de l'immeuble saisi». Ce document
doit à peine de déchéance être déposé
au greffe de la juridiction compétente dans un délai maximum de
cinquante (50) jours à compter de la publication du commandement de
saisie149. Les mentions que doivent comporter ce document sont
également prescrites à peine de nullité150. Il
ressort par ailleurs des dites mentions qu'il revient au poursuivant de fixer
la mise à prix. Toutefois, l'article 269 du même texte fait
obligation au créancier poursuivant dans les huit (08) jours au plus
tard qui suivent le dépôt au greffe du cahier des charges, de
sommer le saisi et les créanciers inscrits de prendre communication
dudit cahier et d'y insérer leurs dires et observations.
Sont également prescrites à peine de
nullité, les mentions devant figurées sur cette
sommation151. Celle-ci doit être signifiée à
peine de nullité au saisi, à personne ou à domicile, et
aux créanciers inscrits à domicile élu152.
Par « dires et observations », il faut entendre les
contestations, « les critiques »153 ou le «
contrôle »154 que peuvent formuler les
intéressés sur la forme ou le fond du cahier des charges. Ces
contestations, qui en général se rapportent à «
l'absence du titre exécutoire, au montant de la mise à prix
et aux dispositions attentatoires à la liberté des
enchères »155, font l'objet d'une audience
spéciale dénommée `'audience éventuelle».
2)- L'audience éventuelle et publicité
du cahier des charges
L'audience éventuelle est une audience qui
précède celle de l'adjudication, et dont les jours et heures sont
prévus dans la sommation fait au saisi et aux créanciers inscrits
de prendre connaissance du cahier des charges. Cette audience est dite
éventuelle en ce que sa tenue est conditionnée par les dires et
observations formulés par les personnes intéressées par
cette adjudication. Mais en pratique, elle a généralement lieu.
D'autant plus qu'elle constitue un moyen pour le débiteur saisi de
rallonger la procédure. En effet, l'article 270 de l'AUPSRVE,
prévoit que cette audience ne peut avoir lieu moins de trente (30) jours
après la
149 La juridiction compétente qui est celle du lieu de
situation de l'immeuble saisi.
150 Article 267. Il s'agit encore là d'une
nullité qui ne peut être prononcée que si
l'irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux
intérêts de celui qui l'invoque. Article 297 al 2 V. aussi pour
application de cette article T.G.I du Mfoundi Jugement n° 55/Civ rendu en
date du 17 avril 2008 entre la Société TOP INTER-SARL, KAMGANG
André, KAMMOE KAMGANG Jonas Hervé c/ AFRILAND FIRST BANK «
CCEI BANK ».
151 Art 270 A.U.P.S.R.V.E
152 Art 269 al 2 A.U.P.S.R.V.E
153 COUCHEZ (G), op. cit, P. 188
154 ibidem
155 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit, P. 250 et suivantes
45
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
dernière sommation. Ce qui donne donc des
bouffées d'oxygène au saisi tandis que le banquier, à
l'instar des autres créanciers, va devoir encore observer
l'écoulement de ce délai. De plus, il n'est pas impossible que la
date de cette audience soit reportée. En effet, en cas de causes graves
et dûment justifiées ou bien lorsque la juridiction
compétente exerce son contrôle sur le cahier des charges,
l'article 273 de l'AUPSRVE admet que l'audience éventuelle soit remise.
Par ailleurs, ce n'est qu'après le règlement des contestations
relatives à une audience éventuelle, que le cahier des charges
acquiert un caractère définitif156. Ce qui d'ailleurs
a conduit certains auteurs à souscrire que « le cahier de
charge n'est à l'origine qu'un projet »157. Devenu
définitif, le cahier des charges s'impose à tous et le
poursuivant peut dès lors procéder à sa
publicité.
Le législateur a également organisé les
formalités de publicité qui aux termes de l'article 276 de
l'AUPSRVE doivent intervenir, « trente (30) jours au plus tôt et
(15) quinze jours au plus tard avant l'adjudication », à la
diligence de l'avocat du poursuivant. Ce dernier doit publier un extrait du
cahier de charge dans un journal d'annonce légale, et apposer des
placards à la porte du domicile du saisi, de la juridiction
compétente ou du notaire convenu, ainsi que dans les lieux officiels
d'affichage de la commune de la situation des biens. Cette publicité,
dont les formes sont régies à peine de
nullité158, peut être restreinte ou accrue suivant la
nature et la valeur des immeubles saisis. Pour se faire, il faudrait une
décision du président de la juridiction compétente rendue
sur requête, laquelle est insusceptible de recours. Ces formalités
de publicités conditionnent la tenue du «
cérémonial de la vente »159 proprement dite.
B- La vente proprement dite
Également dénommée adjudication, la vente
de l'immeuble a lieu à la barre du tribunal ou en l'étude du
notaire convenu. Elle se tient en principe à la date figurant dans les
sommations. Aux termes de l'article 270 de l'AUPSRVE, la vente ne peut avoir
lieu qu'entre le trentième (30ème) et le
soixantième (60ème) jour après l'audience
éventuelle. Lorsqu'elle est fixée par la juridiction
compétente, à l'occasion de l'audience éventuelle, la date
d'adjudication ne peut être remise160 que pour causes graves
et légitimes. La décision judiciaire qui reporte cette date doit
être motivée et rendue sur requête déposée
(05) cinq jours
156 COUCHEZ (G), op. cit, P.190
157 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit P. 250. V. COUCHEZ (G), op. cit,
P. 187
158 Article 277 A.U.P.S.R.V.E. Le régime de nullité
est celui prévu l'Article 292 al 2
159 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit, P. 253
160 T.G.I du Moungo Jugement n°47/Civ du 21 mars 2002.
Dans cette affaire, « le greffier avait omis d'enrôler le dossier de
procédure duquel il ressortait que les dires avaient été
déposés par un premier conseil, constituer par le saisi, à
la date fixée comme étant comme étant celle de l'audience
éventuelle aussi bien dans le cahier des charges que dans la sommation
d'en prendre connaissance.».
46
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
au moins avant le jour fixé pour la
vente161. En pratique, il n'est pas rare de voir la date de
l'adjudication remise. Cet événement amène le juge
à fixer une nouvelle date qui, aux termes de l'article 281, ne doit
excéder plus de (60) soixante jours. De plus, la remise de la date
d'adjudication entraine l'obligation pour le banquier poursuivant de
procéder à une nouvelle publication. Ce qui constitue, en plus de
la rallonge de la procédure, une source de dépense pour le
créancier saisissant.
Mais au-delà, l'adjudication est poursuivie au jour
indiqué à la barre du tribunal ou à l'étude du
notaire convenu par enchères publiques. Elle est
précédée d'une réquisition de l'avocat du
poursuivant ou de tout créancier inscrit. Les enchères sont
portées par ministère d'avocat ou par les enchérisseurs
eux-mêmes. L'article 283 de l'AUPSRVE prévoit un
cérémonial de la vente qui « consiste à faire
brûler des bougies pendant la présentation d'achat
»162. S'il ne survient pas d'enchère, après
que l'on ait allumé trois bougies, le poursuivant est
déclaré adjudicataire. A moins qu'il ne demande la remise de
l'adjudication à une autre audience pour une nouvelle mise à
prix. Ce cas de figure supposerait certainement une nouvelle publicité
et par ricochet de nouveaux frais à débourser. Si aucune
enchère n'est portée lors de la nouvelle adjudication, le
poursuivant est déclaré adjudicataire pour la première
mise à prix.
Néanmoins, la situation la plus courante correspond
à celle où plusieurs enchères sont portées. Il y a
un chronométrage assuré par des bougies spéciales dont la
durée est d'environ une minute. Si pendant la durée d'une bougie
il survient une enchère, celle-ci ne devient définitive et
n'entraîne l'adjudication que s'il n'en survient pas une nouvelle avant
l'extinction de deux bougies. Lorsque l'adjudication est devenue
définitive, une expédition de la décision ou du
procès verbal d'adjudication doit être déposée dans
les deux (02) mois, à l'initiative de l'adjudicataire, à la
conservation de la propriété foncière ou auprès de
l'autorité administrative lorsqu'il s'agit d'impenses
réalisées par le débiteur sur le terrain affecté
par une autorité administrative. L'inobservation de cette
formalité entraine la revente de l'immeuble sur folle
enchère163.
Toutefois, le dépôt d'une expédition de la
décision ou du procès verbal d'adjudication ne met pas
forcément un terme à la procédure. Des rebondissements
peuvent encore rallonger cette procédure par le biais notamment du droit
de surenchérir reconnu à « toutes
161 Art 281 al1 A.U.P.S.R.V.E
162 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit, P. 254. Toutefois, il est
bon savoir que l'article 284 limite le droit d'enchérir en interdisant
les membres du tribunal ou de l'étude du notaire, l'avocat poursuivant
pour son propre compte, le débiteur saisi et les personnes notoirement
insolvables. A cette limite s'ajoute naturellement les personnes
frappées d'incapacité de droit commun. V. ASSI- ESSO(A.H) et
NDIAW DIOUF, op. cit. P. 220
163 La folle enchère est un incident de procédure
que nous allons développer plus bas.
47
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
personnes »164 dans les dix (10) jours qui
suivent l'adjudication. En cas de surenchère, qui doit être du
dixième au moins du prix initial de la vente, de nouvelles
formalités apparaissent. Le surenchérisseur doit faire une
déclaration au greffe de la juridiction qui a ordonné la vente ou
devant le notaire. Mention de la déclaration de surenchère doit
est faite dans le cahier des charges. Puis, dans les cinq (05) jours qui
suivent, la déclaration le surenchérisseur doit la
dénoncer par acte extrajudiciaire au saisi, au poursuivant et à
l'adjudicataire. La dénonciation doit comporter des indications sur date
de la nouvelle audience éventuelle et sur la date de la nouvelle
adjudication. La nouvelle audience éventuelle, qui statuera sur les
contestations de la surenchère, ne peut se tenir avant l'expiration du
délai de vingt (20) jours à compter de la dénonciation. La
nouvelle adjudication, qui met fin à la procédure dans
l'hypothèse de la surenchère, ne peut avoir lieu plus de trente
(30) jours après celle de l'audience éventuelle. Ce n'est
qu'à la suite de cette nouvelle adjudication que la surenchère
prendra fin. Soit par consolidation des droits de l'adjudicataire initial, soit
par annulation rétroactive du droit du premier adjudicataire et
transfert de la propriété de l'immeuble à un nouveau.
A l'analyse de ces différentes formalités, l'on
peut noter que le législateur n'a pas voulu simplifier le recouvrement
des crédits hypothécaires. En effet, en dehors du risque de
nullité qui est permanent à tous les stades de la
procédure, les délais à observer sont assez longs. Pour
s'en convaincre, il suffit de comparer le délai à observer,
à la suite de la publicité du commandement de saisie, selon qu'on
se trouve en matière mobilière ou immobilière. Alors qu'en
matière mobilière ce délai est de huit (08) jours, en
matière immobilière ce délai est de vingt (20) jours.
Aucun argument ne peut mieux justifier cette différence si ce n'est
celui d'une volonté délibérée de retarder le
recouvrement. L'argument est d'ailleurs sous-tendu par d'autres
éléments qui complexifient la procédure.
Section II: L'assujettissement du banquier à une
procédure complexe
Si le déploiement de la saisie immobilière tel
qu'envisagé ci-dessus semble déjà complexe, il y a lieu de
souligner que dans certaines circonstances, cet aspect s'amplifie et la
procédure de saisie immobilière devient particulièrement
lourde et « harassante »165. Ces
164 Malgré la formule large utilisée par
l'article 287 de l'A.U.P.S.R.V.E concernant les personnes susceptibles de
surenchérir, la doctrine affirme à la suite de la jurisprudence
française Civ 2e, 20 mars 1989 que: le droit de
surenchérir ne peut être reconnu aux personnes frappées
d'incapacité d'enchérir. V. ASSI- ESSO(A.H) et NDIAW DIOUF, op.
cit, p. 226. Sont concernées les personnes frappées
d'incapacité de droit commun et celles désignées par
l'article 284 de l'A.U.P.S.R.V.E.
165 ANOUKAHA (F), op. cit P.65.
48
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
circonstances sont notamment celles où la
procédure de saisie immobilière entraine des incidents
(Paragraphe I) et des restrictions aux droits des créanciers (Paragraphe
II).
Paragraphe I : Les incidents de la saisie
immobilière
Il s'agit plus précisément des «
contestations nées de la procédure de saisie ou qui s'y
réfèrent directement et qui sont de nature à exercer une
influence immédiate et directe sur cette procédure.»
166. Les incidents de la saisie immobilière,
dont il y a lieu de constater la pluralité et la
spécificité (A), contribuent à rallonger et compliquer la
procédure167 en dépit de la volonté
affirmée du législateur de les solutionner avec
célérité (B).
A)- La pluralité et la diversité des
d'incidents de la saisie immobilière
Conformément aux dispositions de
l'A.U.P.S.R.V.E168, les incidents de la saisie immobilière
peuvent être rangés en quatre (04) catégories à
savoir: les incidents nés de la pluralité de saisies, les
demandes en distraction, les demandes en annulation et la folle enchère.
Une analyse de ces contestations permettra de mieux les cerner.
Les incidents nés de la pluralité des saisies
sont des contestations mettant en évidence une pluralité des
créanciers poursuivant un même débiteur. Régies par
les articles 302 à 310 de l'A.U.P.S.R.V.E, ces contestation donnent lieu
tantôt à des jonctions de poursuites, tantôt à la
subrogation du premier saisissant.
Les jonctions de poursuites sont prévues dans deux
hypothèses notamment: celle où deux ou plusieurs
créanciers ont fait publier des commandements relatifs à des
immeubles différents appartenant au même débiteur et dont
les saisies sont poursuivies devant la même juridiction, et celles
où le second commandement englobe, outre l'immeuble de la
première saisie, d'autres immeubles.
Dans la première hypothèse, les poursuites sont
réunies à la requête de la partie la plus diligente et
continuées par le premier saisissant169. Dans la seconde
hypothèse, le second
166 La notion n'a pas été définie par
l'A.U.P.S.R.V.E, mais par la jurisprudence. Lire dans ce sens TEPPI KOLOKO (F),
POUGOUE (G), op. cit, p. 77 et suivantes. De même que, ASSI ESSO (A.M),
NDIAW DIOUF, op. cit, p. 229 et suivantes. V. aussi, Tribunal Régional
de Dakar Jugement n° 132 du 2 février 1999, Issa Sall c/
Crédit sénégalais Répertoire. P 119. Lire
également le commentaire de NDIAW DIOUF sur L'Acte Uniforme portant
organisation des procédures simplifiées de recouvrement et voies
d'exécution. In OHADA Traité et actes uniformes
commenté et annotés. P.856.
167 V. SOUOP (S), op. cit. P.9. L'auteur, qui est par ailleurs
avocat au barreau du Cameroun, rapporte qu' « il est fréquent
de lire sur le rôle du tribunal des incidents de saisie introduits depuis
plus de (04) quatre ans.».
168 V. les articles 302 à 323
169 Article 302 A.U.P.S.R.V.E
49
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
saisissant se doit de dénoncer son commandement au
premier saisissant, lequel poursuit les deux saisies si elles sont au
même état. Dans le cas contraire, il sursoit à la sienne,
poursuit la deuxième afin de la mettre au même niveau. Ainsi, les
deux saisies seront alors réunies devant la juridiction de la
première saisie170.
La subrogation est également envisagée dans deux
hypothèses. La première hypothèse correspond à
celle où le premier saisissant à qui une seconde saisie est
dénoncée s'abstient de diriger les poursuites. Dans cette
hypothèse, la demande en subrogation est faite par acte écrit
adressé au conservateur de la propriété
foncière171. La seconde hypothèse correspond aux
situations de collusion, fraude, négligence ou autre cause de retard
imputable au saisissant. En pareil hypothèse, le «
créancier ne peut demander la subrogation que (08) huit jours
après une sommation restée infructueuse de continuer les
poursuites, faite par acte d'avocat à avocat aux créanciers dont
les commandements ont été antérieurement mentionnés
à la conservation de la propriété foncière.
»172
Les demandes en distraction173, cependant,
concernent les contestations auxquelles un tiers qui se prétend
propriétaire de l'immeuble cherche à le soustraire à la
saisie. De telles contestations ne peuvent être introduites que par des
tiers qui ne sont tenus ni personnellement de la dette, ni réellement
sur l'immeuble. « La demande en distraction fait partie des incidents
qui peuvent être présentés après l'audience
éventuelle, mais seulement jusqu'au huitième jour avant
l'adjudication. »174. Elle a pour effet de suspendre les
poursuites si elle porte sur la totalité des biens. En revanche, si elle
porte sur une partie des biens saisis, il pourra être
procédé à l'adjudication du surplus. Mais, le tribunal
peut, à la demande des parties intéressées, ordonner le
sursis pour le tout. En cas de distraction partielle, le poursuivant est admis
à changer la mise à prix portée au cahier des charges.
Les demandes en annulation, quant à elles, constituent
les incidents les plus fréquents dans le déroulement de la
procédure de saisie immobilière. On distingue les nullités
pour vice de fonds des nullités pour vice de formes qui sanctionnent les
actes irrégulièrement accomplis. Les demandes en annulation
interviennent à tous les stades de la procédure. Lorsqu'elles
précèdent l'audience éventuelle, elles doivent être
insérées dans le cahier des charges (05) cinq jours au plus tard
avant la date fixée pour cette audience. Quant elles sont
170 Article 303 A.U.P.S.R.V.E
171 Article 304 A.U.P.S.R.V.E
172 Article 305 A.U.P.S.R.V.E. Le texte précise par
ailleurs que le saisi n'est pas mis en cause.
173 Elles sont régies par les articles 308 à 310 de
l'A.U.P.S.R.V.E
174 ASSI ESSO (A.M), NDIAW DIOUF, op. cit, p. 235. V. notamment,
L'article 308 de l'A.U.P.S.R.V.E
50
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
dirigées contre la procédure suivie à
l'audience éventuelle, les demandes en annulation peuvent être
présentée jusqu'au (08) huitième jour avant
l'adjudication. Il faut souligner que dans ce dernier cas, les demandes en
annulations entrainent ipso facto un report de la date d'adjudication. Car, le
poursuivant doit procéder à une nouvelle publicité dans le
respect délais prévue à l'article 270 de l'A.U.P.S.R.V.E.
Par ailleurs, il y a lieu de souligner que lorsque ces demandes sont admises,
la procédure peut être reprise à partir du dernier acte
valable175.
Enfin, la folle enchère constitue un incident «
ayant pour objet de mettre à néant l'adjudication en raison
des manquements de l'adjudicataire à ses obligations et de provoquer une
nouvelle vente aux enchères de l'immeuble.»176.
Etant dirigées contre l'adjudicataire, ces contestations s'ouvrent dans
deux cas, notamment lorsque l'adjudicataire « ne justifie pas, dans
les vingt jours suivant l'adjudication, qu'il a payé le prix, les frais
et satisfait aux conditions du cahier des charges. », ou «
ne fait pas publier, la décision judiciaire ou le procès
verbal notarié d'adjudication à la conservation foncière
dans le délai » de deux mois qui suivent la décision.
Très formaliste177 également, la procédure de
folle enchère n'est cependant soumise à aucun délai, bien
qu'elle ne puisse plus être exercée lorsque les causes d'ouverture
ont disparu. La procédure de folle enchère peut être
intentée par le saisi, les créanciers poursuivants et les
créanciers inscrits et chirographaires.
Conscient de l'impact que les incidents pourraient avoir sur
la procédure, le législateur communautaire les a soumis à
un régime de célérité en ce qui concerne leur
règlement. Mais en pratique, cet objectif peine à être
atteint.
B)- Le règlement des incidents
En dehors des règles spécifiques
sus-évoquées, les incidents de la saisie immobilière
obéissent à un ensemble de règles communes relatives
à la compétence et à la procédure.
Concernant la compétence, il y a lieu de relever que le
règlement des incidents ne pose pas de problème particulier. En
effet, comme l'ont constaté ASSI- ESSO(A.H) et NDIAW DIOUF «
Tout incident suppose une instance principale. On peut considérer
comme telle la
175 Article 311 al 1 de l'A.U.P.S.R.V.E
176 Article 314 de l'A.U.P.S.R.V.E
177 Les formalités organisant la folle enchère sont
également prescrites à peine de nullité. Lire
également les articles 316 à 323 de l'A.U.P.S.R.V.E.
51
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
saisie immobilière elle-même.». Les
incidents étant liés à la procédure, le tribunal
compétent pour trancher les incidents est donc celui qui connaît
de la saisie immobilière.
Quant à la procédure suivie, la lecture des
articles 300 et 301 de l'A.U.P.S.R.V.E donne à constater que cette
procédure est simple. En effet, le législateur a formellement
interdit l'opposition des décisions rendues en matière de saisie
immobilière et à limiter l'appel à des cas bien
précis. Notamment: lorsque les décisions statuent sur «
le principe même de la créance ou sur des moyens de fonds
tirés de l'incapacité d'une partie, de la
propriété, de l'insaisissabilité ou de
l'inaliénabilité des biens saisis »178. Par
ailleurs, la décision d'appel ne saurait connaître d'opposition
précise l'article 300 al 4. Quant aux conditions d'exercice des voies de
recours, ledit article indique qu'elles sont exercées dans les
conditions de droit commun. Cette notion « droit commun » a
été précisée par la CCJA179 comme
étant un renvoi non pas au code de procédure civil et commercial
nationaux, mais à l'article 49 al 2 de l'A.U.P.S.R.V.E180 qui
fixe ce délais à (15) quinze jours à compter du
prononcé de la décision sans que l'appel ne soit suspensif.
A l'analyse de ces textes, il est clair que le
législateur OHADA souhaite solutionner les incidents avec
célérité ou mieux en urgence, comme le prévoit
l'article 49 de l'A.U.P.S.R.V.E.
Cependant, la réalité dans la pratique est bien
différente. En effet, de nombreuses difficultés s'opposent
à l'atteinte de cet objectif de célérité. Au rang
desquelles la non-conformité des règles de procédure
interne à cette volonté de législateur communautaire. A
s'en tenir à la situation qui prévaut au Cameroun, l'article
191al 2 du code de procédure civil et commercial concernant la
requête d'appel « Aussitôt qu'elle aura été
reçue, le greffier fera notifier à la partie appelante, le
montant de la consignation à verser. Cette consignation doit, à
peine de déchéance d'ordre public de l'appel, intervenir dans un
délai de quatre mois à compter de la notification... ».
Ce délai de quatre mois permet en effet au saisi, qui
178 Article 300al 2 de l'A.U.P.S.R.V.E
179 La Cour Commune de justice et d'arbitrage (C.C.J.A) est
conformément à l'article 14 du Traité OHADA l'instance
habilitée à « assurer l'interprétation et
l'application commune» du Traité OHADA. Pour une vue
générale sur question, lire notamment, ISSA- SAYEH (J) et
LOHOUES-OBLES (J), Harmonisation du droits des affaires, Juriscope, Bruylant
2002
180 C.C.J.A arrêt n°013/2002 du 18 Avril 2002,
Banque international pour le commerce et l'industrie de Côte d'Ivoire
(BICIC) c/ DIOUM MBANDY et Boucherie Moderne de Côte d'Ivoire DIOUM ET
FILS.
www.ohada.com/Ohadata J-03-162, il faut souligner cette notion de droit
commun a donné lieu à de nombreuses interprétations. Pour
certains, il s'agissait du renvoi implicite au code de procédure civil.
Pour d'autres, il s'agissait de l'article 313. V. notamment, la C.A d'Abidjan
arrêt n° 205 du 06 février 2004 AKA Joséphine
épouse BENSON, Mr BENSON TAHI GEORGES c/ Société
Général des banques en Côte d'Ivoire dit « SGBCI
».
52
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
généralement interjette appel, de rallonger le
délai. Puisqu'il ne s'acquittera de sa consignation que la veille de son
expiration.
A cela s'ajoute le retard des magistrats dans la
rédaction des décisions de justice. En effet, comme l'ont
souligné Paul Gérard POUGOUE et Fidèle TEPPI KOLLOKO
« ceux -ci pour la plupart, ne rédigent leur décision
que plusieurs mois plus tard, ce qui constitue une sérieuse entorse de
fait à la célérité recherchée par le
législateur communautaire.». Alors qu'une expédition du
jugement frappé d'appel doit être annexée à la
requête d'appel pour permettre à la Cour de pouvoir
apprécier. Dans ce contexte, il n'est donc pas étonnant de savoir
qu' « il est fréquent de lire sur le rôle du tribunal des
incidents de saisie introduits depuis plus de (04) quatre
ans.»181. Soulignons par ailleurs que les incidents ne
sont pas les seuls éléments qui complexifient la
procédure.
Paragraphe II: Les restrictions imposées aux
banquiers
Le banquier qui engage la procédure de saisie
immobilière peut, à l'instar de tous les créanciers
saisissants, subir des restrictions particulières. Ces restrictions, qui
entrainent une certaine immobilisation de la créance et complexifient la
procédure de saisie immobilière, portent tantôt sur la
valeur (A), tantôt sur la situation géographique des immeubles
(B).
A- Les restrictions relatives à la valeur des
immeubles saisis
Les restrictions fondées sur la valeur des immeubles
hypothéqués ont leurs sièges dans les articles 264 et 265
de l'A.U.P.S.R.V.E.
En effet, l'article 264 offre au débiteur saisi, la
possibilité d'obtenir de la juridiction compétente, la suspension
des poursuites sur un ou plusieurs immeubles désignés dans le
commandement, lorsque la valeur des immeubles saisis dépasse notablement
le montant du crédit. Cette disposition, qui vise certainement la prise
en compte du principe de proportionnalité182, n'est pas de
nature à gêner le banquier lorsque la continuation des poursuites
sur les autres immeubles permet d'assurer le remboursement de la
créance. Cette préoccupation nous semble avoir été
prise en compte par le législateur lorsqu'il prescrit à
l'alinéa 3 qu'«A l'appui de sa demande le débiteur doit
justifier que la valeur des biens sur
181 V. SOUOP (S), op. cit. P.9
182 Sur principe de proportionnalité V. LEGEAIS (D), op.
cit, P. 138 et suivants. Et aussi. KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit P.243 à
245
53
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
lesquels les poursuites seront continuées est
suffisante pour désintéresser le créancier saisissant et
tous les créanciers inscrits.».
Par contre l'article 265 permet au débiteur d'obtenir
du juge la suspension des poursuites s'il « justifie que le revenu net
et libre de ses immeubles pendant deux années suffit pour le paiement de
la dette en capital, frais et intérêt et s'il offre
délégation au créancier ». Une telle
disposition, qui porte considérablement atteinte au droit de saisie des
créanciers, est particulièrement néfaste pour
l'économie.
En effet, notons d'abord qu'au plan juridique, cette exigence
consacre une sorte
d' « insaisissabilité» de certains immeubles
tenant lieu du rapport de la créance, à la valeur locative des
immeubles sur (02) deux ans. Et, comme le constate un auteur183, une
telle disposition offre une grande probabilité au débiteur de
conserver sa propriété immobilière au regard de la crise
du logement observée dans les grandes villes africaines. « A
supposer par exemple que l'immeuble hypothéqué dont il s'agit
soit un immeuble bâti situé en zone universitaire doté de
22 chambres louées chacune à 35 000 Francs CFA le mois, la saisie
initiée par le banquier n'aura de chance de prospérer que si la
créance qui en est la cause est d'un montant supérieur à
18 480 000 Francs CFA; car il suffira que le débiteur multiplie le
montant des revenus que lui procure ce loyer par les 24 mensualités
à courir pour que le chiffre soit atteint.»184. Cette
illustration très révélatrice de l'impact de cette
disposition, a également des implications économiques. Au plan
économique, il s'ensuit une certaine immobilisation de la
créance. Notons également que, le report d'échéance
sur (02) deux ans que consacre cette disposition, est de nature à
bouleverser les prévisions du banquier.
B- Les restrictions relatives à la situation
géographique des biens saisis
Il s'agit ici de l'article 252 de l'A.U.P.S.R.V.E qui interdit
de poursuivre la vente simultanée des immeubles situés dans le
ressort des juridictions différentes. Cette interdiction introduit une
suspension du droit de saisir en se fondant uniquement sur la situation
géographique des immeubles. En effet, la loi invite les
créanciers, dont le banquier, à procéder de manière
graduelle comme a pu le constater un auteur, dans ce cas de figure, «
le créancier qui remplit les conditions prescrites pour provoquer la
saisie immobilière ne peut pas, à
183 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit, P. 243 et suivantes
184 L'exemple a été adapté à la
démonstration, il avait déjà été
rapporté par KUATE TAMEGHE (S.S) dans des termes similaires.
54
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
l'inverse de ce qui se ferait s'agissant de la saisie
d'effets mobiliers, mettre l'ensemble des immeubles de ce dernier sous main de
justice.»185.
Une telle situation est de nature à inquiéter
lorsque l'on connaît la longueur et la complexité de la
procédure de saisie immobilière. Car, devoir réaliser les
immeubles hypothéqués successivement pour recouvrer sa
créance est un processus pas du tout aisé. Surtout lorsque l'on
connaît la longueur et la complexité de la procédure de
réalisation. Dans ce cas de figure en réalité, le risque
d'immobilisation de créance est bien présent.
Certes, l'on peut noter l'exception portée à
l'alinéa 2 du même article qui autorise la vente simultanée
des immeubles « lorsque les immeubles poursuivis constituent une seule
et même exploitation» ou « après autorisation
du président de la juridiction compétente, lorsque la valeur des
immeubles situés dans un même ressort est inférieur au
total des sommes dus tant au créancier saisissant qu'aux
créanciers inscrits. L'autorisation peut concerner tout ou partie des
biens.». Mais, l'on constatera également que, dans le premier
cas, le législateur est plus mû par le souci de protéger le
débiteur qui gagnerait à une réalisation d'ensemble des
immeubles situés dans le même ressort. En effet, « la
valeur d'ensemble devrait être plus supérieure à la valeur
additionnée des immeubles, s'ils devraient être saisis et vendus
isolément. ». Dans le second cas, on peut à
première vue penser que le législateur veut prendre en compte le
principe de proportionnalité entre les créances et la valeur des
immeubles à réaliser. Si tel est le cas, il y a lieu de relever
que le calcul est faussé puisque lors de la distribution du prix de la
vente, il va falloir prélever d'abord les frais de justice. L'on peut
donc imaginer l'hypothèse où la valeur de l'immeuble est
égale ou légèrement supérieure au total des sommes
dues tant au créancier saisissant qu'aux créanciers inscrits.
Dans une telle hypothèse, la distribution du prix pourra devenir
insuffisante et le créancier non satisfait devrait à nouveau
reprendre la longue et complexe procédure de saisie
immobilière.
En somme, la procédure de saisie immobilière est
inadaptée au recouvrement des crédits hypothécaires. En
effet, elle entraine une immobilisation des créances qui peut
déboucher sur l'insolvabilité du débiteur au cas
où, une procédure collective advenait à être ouverte
à son encontre avant que l'adjudication de l'immeuble
hypothéqué ne devienne définitive.
185 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit, P. 245
55
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
CHAPITRE II : LE RECOUVREMENT FACE AU DEBITEUR EN
DIFFICULTE
Le débiteur en difficulté est celui qui est
soumis à une procédure collective186. Celle-ci
désigne « toute procédure dans laquelle le
règlement des dettes et la liquidation éventuelle des biens du
débiteur ne sont pas abandonnés à l'initiative
individuelle de chaque créancier, mais organisés de
manière à ce que tous les créanciers puissent faire valoir
leur droit »187. Cette définition,
dégagée par Gérard Cornu, donne une idée de l'effet
des procédures collectives sur le créancier ou mieux des enjeux
du recouvrement face à un débiteur en difficulté.
Les procédures collectives instituées par
l'OHADA sont au nombre de trois (03). Il s'agit notamment: du règlement
préventif, du redressement judiciaire et de la liquidation des
biens188. Le règlement préventif se singularise
principalement par son caractère anticipatif à la cessation de
paiement189 ou la cessation d'activité qu'il permet
d'éviter190. Cela explique pourquoi il n'est pas
considéré comme une procédure collective stricto
sensu191. En effet, même s'il vise également
l'apurement du passif192 et dispose du même champ
d'application in personam que le redressement judiciaire et la liquidation des
biens193, le règlement préventif, dont l'initiative
est réservée au débiteur qui connaît une situation
économique et financière difficile mais non
irrémédiablement compromise, n'a pour principal effet sur le
banquier créancier hypothécaire que de suspendre provisoirement
les poursuites individuelles. Tandis que les procédures de redressement
judicaire et de liquidation des biens, qui ne sont prononcées
qu'après la cessation de paiement, produisent à l'égard du
banquier, tout comme des autres créanciers, des effets plus
contraignants en les assujettissant d'ailleurs, à la discipline
collective (Section I). Cependant, en dépit de toutes les restrictions
imposées au banquier son paiement demeure aléatoire (Section
II).
186 Il s'agit bien sûr des procédures collectives
d'apurement du passif régit par l'A.U.P.C.A.P.
187 CORNU (G), op. cit, P. 167
188 Article 1 de l'A.U.P.C.A.P
189 La cessation de paiement s'entend aux termes de 25 de
l'A.U.P.C.A.P comme étant la situation dans laquelle le débiteur
est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec
son actif disponible.
190 Article 2 de l'A.U.P.C.A.P
191 SAWADOGO (F.M), Droit des entreprises en
difficulté. P. 2
192 L'apurement du passif une finalité commune aux
procédures collectives. V. L'article 1 et 2 de l'A.U.P.C.A.P.
193 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 59. Voir aussi, TIGER (P), les
procédures collectives après la cessation de paiement, in Petites
affiches du 13 octobre 2004. N° 205. P.37. Et, les articles 2 et 4 de
l'A.U.P.C.A.P.
56
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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Section I: L'assujettissement du banquier à la
discipline collective
Comme l'indique leur dénomination, le redressement
judiciaire et la liquidation des biens sont deux procédures tout
à fait distinctes dans leur finalité. Mais, qu'il est tout
à fait possible de rapprocher au regard de leur effet sur les
créanciers. Ainsi que l'indique l'article 72 de l'A.U.P.C.A.P, le
jugement d'ouverture desdites procédures à l'encontre du
débiteur constitue « les créanciers en une masse
représentée par le syndic qui, seul, agit en son nom et dans
l'intérêt collectif et peut l'engager ». Ce premier
effet, qui conduit à l'effacement des créanciers (au rang
desquels figure le banquier) au profit du syndic, est suivi et
concrétisé dans leur assujettissement à la discipline
collective. Celle-ci désigne l'ensemble des règles applicables
aux créanciers en cas d'ouverture d'une procédure de redressement
judiciaire ou de liquidation des biens à l'endroit du débiteur.
Ces règles, qui visent à organiser les créanciers «
afin que le paiement se fasse dans l'égalité et la justice
»194 ont, cependant, pour effet de restreindre
considérablement leurs droits (Paragraphe I) et, de les soumettre
à la fondamentale obligation de déclarer leurs créances
(Paragraphe II).
Paragraphe I: Les restrictions imposées aux droits
du banquier
A l'instar de tous les créanciers, le banquier
titulaire d'une créance hypothécaire voit ses droits
considérablement restreints face à un débiteur soumis aux
procédures collectives ouvertes après la cessation de
paiement195. Ces désagréments touchent le banquier
aussi bien dans sa créance qui subit l'arrêt du cours
d'intérêts (B) que dans l'exercice personnel de son droit au
recouvrement qui se trouve suspendu (A).
A)- La suspension des poursuites individuelles
C'est une mesure qui s'applique aux créanciers aussi
bien dans le règlement préventif196 que dans le
redressement judiciaire et la liquidation des biens.
Dans la procédure de règlement préventif,
la suspension des poursuites individuelles s'applique à tous les
créanciers dont la créance est antérieure à la
décision de suspension, à
194 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 2. L'auteur souligne que cette
égalité n'est qu'un leurre. Voir, notamment sur la question
NEMEDEU (R), Le principe d'égalité des créanciers : vers
une double mutation conceptuelle. Etude à la lumière du droit
français et OHADA des entreprises en difficulté. R.T.D Com
N°2 Avril /Juin 2008.
195 Il s'agit ici des procédures collectives stricto
sensu qui sont le redressement judiciaire et la liquidation des biens. SAWADOGO
(F.M), op. cit. P. 2, TIGER (P), op. cit. P.37. Lire également GATSI
(J), Le recouvrement des créances bancaires en droit OHADA, op. cit. P.
15.
196 Précisons que dans le règlement
préventif, les créanciers ne sont pas soumis à la
discipline collective. Le rapprochement vise exclusivement à ressortir
la portée de la suspension des poursuites individuelles qui varie selon
que l'on se trouve dans le règlement préventif ou dans les
procédures collectives stricto sensu.
57
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
condition que cette créance ait été
visée dans la requête du débiteur197. En effet,
le débiteur a l'obligation d'indiquer, dans sa demande de
règlement préventif198, les créances pour
lesquelles il sollicite une suspension de poursuite199. Dans le
redressement judiciaire ou dans liquidation des biens par contre, la suspension
de poursuites individuelles s'applique à tous les créanciers de
la masse dès le prononcé de la décision
d'ouverture200. Notons qu'il n'est pas étonnant dans ces
conditions que le banquier titulaire d'une créance hypothécaire
puisse toujours voir son droit suspendu. En effet, si cela paraît plus
évident dans le cas du redressement et de la liquidation, l'on peut
également convenir dans l'hypothèse du règlement
préventif, que le débiteur va, certainement, «
opérer une discrimination en fonction des caractéristiques de
ses dettes: montant élevé ou faible, exigibilité
immédiate ou à terme, existence ou non d'une sûreté,
importance du bien servant à l'assiette de la
sûreté.»201. Situation dans laquelle le
banquier s'y retrouvera certainement.
Qu'il s'agisse du règlement préventif, du
redressement judiciaire ou de la liquidation des biens, le champ d'application
de la suspension des poursuites individuelles est bien large. En effet, sont
visées par cette suspension aussi bien les demandes en paiement que les
voies d'exécution202. S'agissant particulièrement des
voies d'exécution, principal moyen d'action du banquier créancier
hypothécaire. L'on peut noter sur la base de l'article 75 al 1 qui
concerne le redressement judiciaire et la liquidation des biens, que dès
le prononcé de la décision d'ouverture, les saisies
immobilières sont interdites ou suspendues. L'interdiction concerne les
procédures non encore entamées, alors que la suspension vise les
procédures déjà entamées mais, qui ne sont pas
encore devenues définitives203. Ainsi, l'on peut
aisément constater que même après adjudication, si la
publication du jugement n'est pas intervenue, la procédure de saisie
immobilière sera suspendue en cas d'ouverture d'une procédure
collective204.
197 Article 9 de l'A.U.P.C.A.P. Lire également SAWADOGO
(F.M), Commentaire de l'A.U.P.C.A.P in OHADA Traité des actes uniformes
commentés et annotés 3e édition, Juriscope 2008, P.
900.
198 Cette requête doit s'accompagner ou être suivi
dans les trente jours (30) à compter de son dépôt d'une
offre de concordat. Article 7 de l'A.U.P.C.A.P.
199 Article 5 de l'A.U.P.C.A.P.
200 Article 75 de l'AUPCAP. V. NEMEDEU (R), op. cit. P.253
201 SAWADOGO (F.M), Droit des entreprises en
difficulté. P. 60
202 Idem P. 64 et 206.
203 KOUNGA (G.J) Procédures collectives et voies
d'exécution, mémoire de D.E.A Université de
Yaoundé II. P. 23
204 V. pour un jugement d'ouverture intervenu entre
l'adjudication et la surenchère : civ. 2e 24 mars 1993
Bulletin. civ. II, n°128.
58
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Cependant, il y a lieu de souligner quelques limites à
la règle de suspension. L'on notera d'abord que la procédure
d'ordre n'est pas une mesure d'exécution, mais une mesure de
distribution, de sorte qu'elle n'est pas concernée par la mesure de
suspension205. On remarquera, ensuite, que la suspension de
poursuite ne s'étend pas aux tiers. Ainsi, les cautions
hypothécaires peuvent être poursuivies. Par ailleurs, la
suspension des poursuites ne s'applique pas également aux actions
tendant en l'annulation ou la résolution du concordat de
redressement206. Enfin, la suspension des poursuites individuelles
ne joue plus en cas d'annulation ou résolution du concordat de
redressement, et qu'en cas de liquidation des biens, lorsque (03) trois mois
après la décision de liquidation, le syndic n'a pas entrepris la
procédure de réalisation de l'hypothèque207.
En effet, l'article 134 al 4 et l'article 150 de l'A.U.P.C.A.P
reconnaissent respectivement au banquier, créancier hypothécaire,
le droit de pouvoir procéder à la réalisation de
l'hypothèque après annulation ou résolution du concordat
de redressement, ainsi que le droit d'exercer ou de reprendre leurs poursuites
individuelles, à charge d'en rendre compte au syndic, si dans les
délais de trois (03) mois suivant la décision de liquidation des
biens, le syndic n'a pas entrepris la procédure de réalisation
des immeubles. Toutefois, la suspension des poursuites n'est pas l'unique
désagrément qui touche le banquier créancier
hypothécaire.
B)- l'arrêt du cours des
intérêts
Après avoir subi la suspension de son droit de
recouvrer personnellement son crédit garanti par une hypothèque,
le banquier, à l'instar des autres créanciers formant la masse,
doit à nouveau subir un autre désagrément qui consiste
à l'arrêt du cours des intérêts208. Cette
mesure, qui porte atteinte au contenu même de la
créance209, s'explique au travers de considérations
diverses.
En effet, l'arrêt du cours des intérêts,
qui ne s'applique qu'aux procédures collectives ouvertes après la
cessation de paiement, autrement dit, le redressement judicaire et la
liquidation des biens210, se fonde sur un argument technique, qui
consiste en la facilitation de
205 KOUNGA (G.J), op. cit. P. 23
206 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 208, NEMEDEU (R), op. cit.
P.253
207 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 208
208 « L'arrêt du cours des intérêts
moratoires apparaît comme l'une des conséquences immédiates
de la suspension des poursuites individuelles.». NEMEDEU (R), op. cit.
P.254
209 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 202, NEMEDEU (R), op. cit. P.253
et suivantes.
210 L'arrêt du cours des intérêts ne concerne
pas le règlement préventif. L'article 10 de l'A.U.P.C.A.P.
59
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
la connaissance du passif du débiteur211.
Sur un argument de pure logique, qui consiste à évoquer,
l'inopportunité des intérêts, là où le
remboursement est incertain212. Et, sur un argument juridique,
tiré du principe d'égalité et de la volonté de
niveler la condition juridique des créanciers213.
S'agissant de la portée de l'arrêt du cours des
intérêts, l'on peut noter son étendue214, en ce
qu'elle vise tous les créanciers peu importe qu'ils soient
chirographaires ou titulaires de sûretés. Cependant, il y a lieu
de relever également que cette mesure ne s'étend pas aux
codébiteurs et donc à la caution hypothécaire, envers qui
les intérêts continueront de courir, et, envers qui, ils peuvent
être réclamés à tout moment215. La
doctrine semble d'ailleurs convenir que les intérêts peuvent
même être réclamés aux débiteurs après
clôture de la procédure et en cas de retour à meilleure
fortune216. L'article 77 de l'A.U.P.C.A.P, qui pose la règle
de l'arrêt du cours des intérêts, prévoit
également une exception consistant à la poursuite du cours des
intérêts, lorsque ceux-ci résultent « de contrats
de prêt conclus pour une durée à un an ou de contrats
assortis d'un paiement différé d'un an ou plus». A
condition que, la décision ait ouvert une procédure de
redressement judiciaire.
En plus de la suspension de poursuite et l'arrêt du
cours des intérêts, d'autres désagréments peuvent
être invoqués. Il en est ainsi de l'arrêt du cours
d'inscription des sûretés qui est susceptible d'entrainer des
conséquences graves à l'égard de tout créancier qui
aurait tardé à inscrire sa garantie217. Cependant,
cette mesure peut également être perçue comme un avantage
pour les créanciers formant la masse qui ont procéder à
l'inscription de leurs sûretés avant l'ouverture des
procédures collectives218. Par ailleurs, le banquier et tous
les créanciers formant la masse devront se conformer à obligation
de déclaration des créances.
Paragraphe II : L'obligation de déclaration des
créances
Prévue à l'article 78 de l'A.U.P.C.A.P,
l'obligation de déclarer les créances s'impose à tous les
créanciers antérieurs à la décision d'ouverture du
jugement de redressement judiciaire
211 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 203, NEMEDEU (R), op. cit.
P.254
212 Ibidem.
213 SAWADOGO P.208
214 NEMEDEU (R), op. cit. P.255
215 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 204, NEMEDEU (R), op. cit.
P.254
216 Ibidem
217 Article 73 l'A.U.P.C.A.P
218 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 204. Elle permet
d'empêcher la publication des sûretés à compter du
jugement d'ouverture. Ce qui contribue à assurer une certaine
sécurité.
60
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
ou de la liquidation des biens. Cette obligation conduit au
respect d'un ensemble de règles dites de production de créances
(A), dont l'inobservation est sanctionnée par la forclusion (B).
A)- Les règles de production de
créances
La production de créances s'entend de l'obligation
faite aux créanciers formant la masse (le banquier y compris), de faire
reconnaître leurs créances au syndic en cas d'ouverture d'une
procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens
à l'encontre de leur débiteur219. Cette
formalité, qui permet au syndic de mesurer le passif du débiteur
en difficulté, est en effet soumise à un ensemble de
modalités. Notons d'abord que les créanciers doivent
déclarer l'intégrité de leur créance,
accompagnée des différentes pièces prouvant l'existence de
la créance et son quantum220. Lorsque la créance est
incertaine ou indéterminée, les créanciers se doivent tout
de même de fournir tous les éléments permettant leur
évaluation221.
Le domaine de cette obligation est également large en
ce qu'il touche les créanciers chirographaires, les créanciers
munis de privilèges généraux, les créanciers munis
d'une sûreté réelle spéciale222, les
titulaires de créances à échoir223, les
titulaires d'un droit de revendication224, les créances du
trésor public, de l'administration des douanes et des organismes de
sécurité et de prévoyance sociale225.
S'agissant du banquier, la production de sa créance
hypothécaire ne doit en principe pas constituer une difficulté.
Car, il dispose de plusieurs moyens pour rapporter la preuve de sa
créance (notamment, la convention de crédit hypothécaire
qui est généralement passée devant notaire, les
relevés de comptes...). Le danger principal pourrait donc venir de
l'inobservation des délais de production de la créance. En effet,
l'article 78 de l'A.U.P.C.A.P prescrit que l'obligation de produire la
créance commence dès le prononcé de la décision
d'ouverture et se poursuit « jusqu'à l'expiration d'un
délai de (30) trente jours suivant la deuxième insertion dans un
journal d'annonces légales prévu par l'article 36 ci- dessus, ou
suivant celle faite au journal officiel prévue par l'article 37
ci-dessus, lorsque celle-ci sont
219 LEGEAIS (D), Droit commercial et des affaires,
14e édition Dalloz Amand colin. P. 444
220 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 209.
221 LEGEAIS (D), Droit commercial et des affaires. P.
444
222 Article 78 de l'A.U.P.C.A.P
223 L'obligation de déclaration s'applique à eux
indifféremment du fait que l'absence de déchéance du terme
dans le redressement judiciaire.
224 Article 78 al 3 A.U.P.C.A.P
225 Article 81 de l'A.U.P.C.A.P
61
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
obligatoire (...). Ce délai est de (60) soixante
jours pour les créanciers domiciliés hors du territoire national
où la procédure collective a été
ouverte.».
Mais à ce niveau également, le banquier de par
sa qualité de titulaire de sûretés ayant fait l'objet d'une
publicité, bénéficie du droit d'être averti par le
syndic. Notamment, lorsqu'il n'a pas produit sa créance dans les (15)
quinze jours de la première insertion de la décision d'ouverture
dans le journal d'annonce légal. Ce droit, consacré à
l'article 79 al 1 de l'AUPCAP, impose au syndic d'informer «
personnellement certains créanciers par lettre recommandée
avec accusée de réception ou par tout moyen laissant trace
écrite adressé, s'il y a lieu, à domicile élu
».
Enfin, l'article 80 al 1 de l'A.U.P.C.A.P prescrit les
composantes de la production226 lorsqu'elle indique que «
les créanciers remettent au syndic, directement ou par pli
recommandé, une déclaration indiquant le montant de la
créance due au jour de la décision d'ouverture, des sommes
à échoir et des dates de leurs échéances.
». La date de référence est celle de la décision
d'ouverture227. Les intérêts qui courent jusqu'à
cette date doivent donc être comptabilisés. Dans sa
déclaration le banquier à l'instar de tous les créanciers,
dont la créance est assortie d'une sûreté, doit
préciser la nature de la sûreté garantissant sa
créance.
A défaut de se conformer aux règles de
production de la créance, le banquier s'expose à la
forclusion.
B)- La sanction du défaut de production des
créances : La forclusion
La forclusion, qui peut s'analyser comme une
déchéance de la faculté d'agir228, est une
sanction qui frappe tous les créanciers antérieurs qui n'ont pas
produit dans les délais en fournissant les pièces qui doivent
accompagner la déclaration. Cette sanction, présente tant dans le
redressement judiciaire que dans la liquidation des biens, empêche les
créanciers, sauf relevé de la forclusion, de participer à
la procédure de distribution des dividendes.
En effet, les créanciers forclos, ne pouvant en
principe plus produire, vont voir leurs droits ignorés par la masse.
Cette sanction est particulièrement grave en ce qu'elle empêche de
recevoir le paiement, du moins, pendant toute la durée de la
procédure. Il convient de noter
226 SAWADOGO (F.M), Commentaire de l'A.U.P.C.A.P..., op. cit. P.
900.
227 SAWADOGO (F.M), Droit des entreprises en
difficulté P. 210.
228 GUILLIEN (R) et VINCENT (J), lexique des termes
juridiques. 13e édition Dalloz 2001. P. 197.
62
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
que la forclusion en principe n'éteint pas la
créance qu'elle sanctionne229. Cependant, en ce qui concerne
le redressement judiciaire, l'article 83 al 2 prévoit clairement une
extinction des créances qu'elle sanctionne, sauf clause de retour
à meilleure fortune.
Tout compte fait, la forclusion est une sanction
réversible. En effet, les créanciers forclos peuvent être
relevés de forclusion par une décision motivée du
juge-commissaire. Mais, le relevé de forclusion intervient dans des
conditions strictes de délais et de preuve230. Il
nécessite ainsi, en premier lieu, que l'état des créances
n'ait pas été arrêté et déposé dans
les conditions prévues à l'article 86 de l'A.U.P.C.A.P. Puis, en
second lieu, que les personnes intéressées puissent faire une
demande et apporter la preuve que leur défaillance ne leur est pas
imputable. Leur défaillance doit donc résulter des circonstances
extérieures à leur volonté, telles que les cas
assimilables à la force majeure ou le défaut
d'information231.
S'agissant du défaut d'information, la publicité
du jugement d'ouverture rend difficile une argumentation basée sur elle.
Cependant, une observation peut être faite concernant le banquier
créancier hypothécaire. En effet, ce dernier pourra, à
l'instar de tous les créanciers bénéficiant d'une
sûreté ayant fait l'objet d'une publicité, se
prévaloir de son droit prévu à l'article 79 de
l'A.U.P.C.A.P, d'être personnellement informé. Dans de tels cas,
l'inobservation de son droit par le syndic, devrait en principe conduire au
relevé de la forclusion.
Par ailleurs, le recouvrement face à un débiteur
en difficulté se caractérise également par l'incertitude
du paiement. En effet, la pluralité des étapes et des facteurs
qui entrent en jeu, conduit à constater que, même lorsque le
banquier aura déclaré sa créance en conformité avec
les règles de production de celle-ci, rien ne garantira son paiement.
Section II : Le paiement réservé au
banquier
Dans les procédures collectives, le paiement est
toujours fonction de l'issue que va connaître la procédure
initiée. Celle-ci peut conduire au rétablissement ou à la
disparition du débiteur en difficulté. Mais, avant d'effectuer le
paiement proprement dit (Paragraphe II), une évaluation du passif du
débiteur (et donc, des droits des créanciers) est tenue. Laquelle
peut déboucher sur des obstacles au paiement (Paragraphe I).
229 SAWADOGO (F.M), op. cit, « Tout se passe comme en
matière d'inopposabilité où le droit existe mais est
ignoré par la masse.». P.212
230 Idem. P. 213
231 Idem. P. 213
63
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Paragraphe I : Les obstacles au paiement
Ils résultent de la vérification de
créance (A) et des inopposabilités de la période suspecte
(B).
A)- Les obstacles inhérents à la
vérification des créances
Prévue à l'article 84 de l'A.U.P.C.A.P, la
vérification des créances est une formalité obligatoire en
droit OHADA232. En effet, le législateur communautaire l'a
prescrite « quelle que soit l'importance de l'actif et du
passif». S'appliquant au redressement judiciaire et à la
liquidation des biens, la vérification des créances dont
l'objectif est d'établir la consistance exacte du passif du
débiteur, à travers examen des créances produites, et de
rechercher les éléments pouvant servir de base à une
éventuelle action en responsabilité contre les tiers, permet
également de sanctionner certains créanciers dont la
créance ou la sûreté aurait présenté quelques
anomalies.
En effet, menée par le syndic et sanctionnée par
le juge-commissaire, la vérification de créance
conformément à l'alinéa 2 de l'article 84 de
l'A.U.P.C.A.P, « doit intervenir dans les trois (03) mois suivant la
décision d'ouverture.». Ainsi, le syndic vérifie les
productions des créances au fur et à mesure, en présence
du débiteur, qui connaît bien le passif puisqu'il l'a
créé233, et des contrôleurs s'il en a
été nommé234. En cas de contestation de la
créance, ou de la sûreté qui la garantit, le syndic avise
d'une part le juge-commissaire et, d'autre part, le créancier ou le
revendiquant concerné par pli recommandé avec accusé de
réception ou par tout moyen laissant trace écrite.
Dans ces circonstances, le banquier, créancier
hypothécaire, qui voit sa créance ou sa sûreté
contestée dispose, à compter de la réception de l'avis
dressé par le syndic, d'un délai de (15) quinze jours pour
fournir des explications écrites ou verbales au
juge-commissaire235. Passé ce délai, il ne peut plus
contester la proposition du syndic, même s'il s'agit d'un rejet pur et
simple de la créance236.
232 Contrairement au droit français qui ne l'a
prévue que lorsqu'il apparaît que l'actif sera absorbé par
les frais de justice Idem. P. 214
233 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 215
234 Cependant, l'absence du débiteur ou des
contrôleurs ne constitue pas un obstacle à la vérification.
Pourvu qu'ils aient dûment été appelés par pli
recommandé ou par tout moyen laissant trace écrite
235 Précisons que ce délai est de (30) trente
jours, pour les créanciers domiciliés hors du territoire. Article
85 al 2 A.U.P.C.A.P.
236 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 215
64
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Le non respect des délais sus mentionnés a une
conséquence grave. Elle empêche l'admission définitive des
créances et constitue le premier obstacle au paiement.
Par la suite, le syndic dressera un état de
créance contenant ses propositions d'admission définitive,
provisoire ou de rejet. Avec indication précise pour chacune, de sa
nature chirographaire ou non, ainsi que de la garantie à laquelle elle
est assortie. Au cas où la contestation ne porte que sur
l'hypothèque, le banquier pourra être admis provisoirement
à titre de créancier chirographaire237. Ce qui peut
également rendre difficile le paiement.
L'état de créance établi, le juge
commissaire vérifie la fiabilité du travail effectué par
le syndic. Il peut éventuellement y apporter des modifications, puis
confère à la décision finalement prise un caractère
juridictionnel ou quasi juridictionnel238.
La décision du juge-commissaire après
vérification et signature est déposée au greffe, qui est
chargé immédiatement d'avertir les créanciers et
revendiquants du dépôt de l'état des
créances239. Par ailleurs, les créanciers et
revendiquants, dont la créance, la revendication ou la
sûreté est totalement ou partiellement rejetée, sont
informés par le greffe, qui adresse un avis avec accusé de
réception ou par tout moyen laissant trace écrite, de ce qu'ils
peuvent former une réclamation240.
Les créanciers et revendiquants concernés
disposent de 15 jours pour faire la réclamation à dater de la
réception de l'avis adressé par le greffier ou de l'insertion
faite dans le journal d'annonce légal. Aux termes de l'article 88 de
l'A.U.P.C.A.P, les réclamations contre la décision du
juge-commissaire doivent être formées par voie d'opposition
directement au greffe ou par acte extrajudiciaire adressé au greffe. Le
défaut d'opposition dans les délais rend la décision
irrévocable. Et, empêche le paiement.
L'opposition régulièrement formée donne
lieu au règlement qui varie selon que la juridiction de la
procédure est, ou non compétente.
237 Article 86 al 2 A.U.P.C.A.P.
238 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 216 Mais, avant de se
prononcer, le juge-commissaire est tenu d'entendre le créancier ou le
revendiquant, ainsi que le débiteur et le syndic. Pour ce faire,
l'article 86 al 4 de l'A.U.P.C.A.P lui astreint de les convoquer par lettre
recommandée avec accusé de réception ou par tout moyen
laissant trace écrite. Ce n'est qu'à la suite de cette
formalité qu'il peut, soit rejeter en tout ou en partie une
créance ou une revendication, soit se déclarer
incompétent238.
239 L'avertissement des créanciers se fait par
insertion dans un ou plusieurs journaux d'annonce légales et par une
insertion au Journal officiel contenant indication du numéro du journal
légal dans lequel a été faite la première
insertion. En outre, le greffier se doit adresser aux créanciers une
copie intégrale de l'état de créances. Article 87 de
l'A.U.P.C.A.P.
240 Al 3 de l'article 87 de l'A.U.P.C.A.P. Précisons
que l'avis adressé par le greffier doit contenir la reproduction de
l'article 88 de l'A.U.P.C.A.P.
65
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Dans le premier cas, le greffier renvoie les revendications et
les créances contestées ou admises provisoirement pour être
jugées sur rapport du juge-commissaire à la première
audience. Puis, donne avis de ce renvoi aux parties (08) huit jours au moins
avant l'audience, par lettre recommandée avec accusé de
réception ou tout moyen laissant trace écrite. Dans le cas
où la juridiction ne peut statuer au fond avant la clôture de la
procédure, elle admet le créancier ou le poursuivant à
titre provisoire afin de ne pas retarder le déroulement ou le
dénouement de la procédure. En fin de compte, le greffier avisera
les intéressés de la décision prise par la juridiction de
procédure, dans les (03) trois jours, par lettre recommandée avec
accusée de réception ou par tout moyen laissant trace
écrite. Et fera mention de la décision prise sur l'état
des créances.
Dans le second cas, la juridiction de procédure se
déclare incompétente et admet provisoirement la créance
contestée. Le greffier avise les intéressés, dans les (03)
trois jours, par lettre recommandée avec accusée de
réception ou par tout autre moyen laissant trace écrite. Puis,
mentionne la décision prise sur l'état des créances.
Cependant, les intéressés se doivent de saisir le tribunal
compétent pour connaître la contestation dans un délai d'un
mois. Faute de quoi, ils deviendront forclos et la décision du
juge-commissaire devient irrévocable.
L'admission des créances par le juge-commissaire
produit l'effet d'une décision de justice à laquelle est
attachée l'irrévocabilité241. Elle met les
créanciers à l'abri de toute contestation ultérieure
tendant à réduire ou modifier la créance242.
Cependant, la procédure de vérification n'est pas l'unique
procédé susceptible de faire obstacle au paiement des
créanciers. Les inopposabilités de la période suspecte en
sont d'autres.
B)- Les inopposabilités de la période
suspecte
La période suspecte s'étend du jour de la
cessation des paiements, ou dans certains cas, des six mois qui l'ont
précédé, à celui du jugement d'ouverture ou du
jugement déclaratif243. Durant cette période, dont la
durée ne peut excéder 18 mois244, les actes accomplis
par le débiteur sont suspectés de fraude245. Ainsi,
« pour protéger les intérêts en présence et
traiter de manière égalitaire les créanciers, certains
droits obtenus pendant la
241 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 218
242 Sauf, en cas de dol, fraude ou violence d'une disposition
impérative. Idem P. 219
243 NEMEDEU (R), op. cit. P.260. SAWADOGO (F.M), op. cit. P.
223.
244 Article 34 al 2 de l'A.U.P.C.A.P
245 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 223.
66
La protection du banquier dans les opérations de
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Chancel
période suspecte, plus ou moins
présumés frauduleux, peuvent être frappés
d'inopposabilité à l'égard de la
masse...»246.
Les inopposabilités de la période suspecte
sanctionnent donc les actes frauduleux, ou simplement supposés
frauduleux, accomplis par le débiteur. Mais cette sanction, qui touche
surtout les créanciers dans la masse, peut constituer un obstacle au
paiement. En effet, ayant généralement
bénéficié de tels actes pour se protéger des
difficultés apparentes du débiteur, les créanciers vont
voir leurs droits ou mieux leurs sûretés, remises en cause par le
syndic, qui seul peut exercer l'action en inopposabilité au nom et dans
l'intérêt de la masse. La juridiction compétente
étant la même qui connaît de la procédure collective,
le juge va prononcer, soit des inopposabilités de droit247,
soit des inopposabilités facultatives248.
Les premières sont celles que le juge est tenu de
prononcer dès lors que les conditions légales sont
réunies. Tandis que les secondes sont celles pour lesquelles le juge
dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation pour prononcer ou non les
inopposabilités, même lorsque les conditions légales sont
réunies249.
Lorsque les inopposabilités sont prononcées
à l'encontre du banquier créancier hypothécaire, pour des
hypothèques dont il aurait bénéficié pendant la
période suspecte, sa créance ne sera pas annulée car tel
n'est pas le but des inopposabilités. L'inopposabilité «
est une sanction qui admet, d'une part, la validité de l'acte mais,
d'autre part, restreint ses effets à l'égard de certaines
personnes.»250. Ainsi, sa créance sera valable,
mais les créanciers antérieurs ne sauraient souffrir d'une
manière ou d'autre, des ses effets. Par conséquent, il pourra
produire sa créance, mais sa garantie ne sera pas opposable à la
masse qui d'ailleurs y sera colloquée.
246 NEMEDEU (R), op. cit. P.260. Dans le même sens Article
67 de l'A.U.P.C.A.P
247 Les inopposabilités de droit sont régies
à l'article 68 de l'A.U.P.C.A.P qui précise les conditions, les
actes susceptibles d'être frappés par elles. Il s'agit notamment:
des actes à titre gratuit translatif de propriété
mobilière ou immobilière; des contrats commutatifs
déséquilibrés; des paiements des dettes non échus;
des paiements des dettes échus par des procédés anomaux;
des sûretés réelles constituées pour la garantie
d'une dette antérieure, des inscriptions de sûretés
judiciaires conservatoires. Lorsqu'ils sont accomplis pendant la période
suspecte.
248 Les inopposabilités facultatives, qui ont un
domaine plus large que les inopposabilités de droit, sont régies
à l'article 69 de l'A.U.P.C.A.P. Leur prononcé nécessite
la réunion de trois conditions à savoir: que l'acte soit accompli
pendant la période suspecte, que celui qui traite avec le
débiteur ait eu connaissance de la cessation de paiement au moment ou
l'acte a été passé, que l'acte du débiteur ait
causé un préjudice à la masse. Elles visent cependant tous
les actes qui échappent aux inopposabilités de droit et les
actions avec les effets de commerce. V. sur la question SAWADOGO (F.M), op.
cit. P. 234.
249 SAWADOGO (F.M), Commentaire de l'A.U.P.C.A.P... op. cit. P.
950.
250 NEMEDEU (R), op. cit. P.261
67
La protection du banquier dans les opérations de
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Chancel
Et, c'est en cela que les inopposabilités peuvent
constituer des obstacles au paiement. Car, le banquier perdra le rang et la
préférence que lui conférait la garantie. Dans pareille
circonstance, le banquier semblable à un créancier chirographaire
ne pourra obtenir paiement si les deniers provenant de la réalisation de
l'immeuble s'avéraient insuffisants. Cette réalité est
plus perceptible dans l'analyse du paiement proprement dit.
Paragraphe II : Le paiement proprement dit
Les procédures collectives peuvent se terminer de
diverses façons. Et, le paiement qu'obtiennent les créanciers est
toujours tributaire de l'issue de la procédure. Celle-ci peut conduire
à un rétablissement du débiteur (A), dans ce cas, la
longue et tortueuse attente du banquier sera enfin récompensée ou
mieux consolée par le paiement de ce qui lui est dû. Mais, dans le
cas où le patrimoine du débiteur devrait être
liquidé, le paiement des créanciers sera fonction de l'actif
réalisable du débiteur (B).
A)- Le paiement en cas rétablissement du
débiteur
Le sauvetage de l'entreprise est l'un des objectifs
clés des procédures collectives251. Cet objectif, qui
tient compte de l'impact négatif de la disparition des entreprises sur
l'économie nationale252, est présent à travers
la procédure de règlement préventif et de redressement
judiciaire régies par l'OHADA. En effet, en raison de la neutralisation
des droits des créanciers253 et la continuation de
l'activité du débiteur qu'elles entrainent, ces procédures
hissent au premier rang le sauvetage de l'entreprise.
Ce sauvetage de l'entreprise n'est d'ailleurs pas contraire
à l'objectif d'apurement du passif, qu'il tente de mieux
aménager. En effet, le débiteur, qui se voit soumis au
règlement préventif ou au redressement judiciaire, a plus de
chances de se relever de ces difficultés et de payer
intégralement ces créanciers. De plus, les différents
concordats auxquels donnent lieu ces procédures participent beaucoup
à l'atteinte de cet objectif. Notamment, par le biais de nouveaux
délais de paiement, des remises consentis au débiteur sinon
imposés aux créanciers ainsi que, des stratégies de
continuation et renflouement de l'entreprise mieux définies par la
participation d'un expert254 (cas du règlement
préventif), des syndics, du juge-commissaire,
251 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 4
252 ibidem
253 Il s'agit de la suspension de poursuites individuelles
analysée plus haut.
254 Article 8 de l'A.U.P.C.A.P
68
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
voire des créanciers. Le sauvetage réussi d'un
débiteur en difficulté conduit à son rétablissement
et se suit d'un paiement pacifié des créances.
En effet, lorsque le débiteur en difficulté se
rétablit à la suite d'un règlement préventif ou du
redressement judiciaire, le banquier créancier hypothécaire,
à l'instar de la majeure partie des créanciers, est enfin
consolé de sa longue et tortueuse attente. Il recouvrera en principe sa
créance conformément aux stipulations
contractuelles255.
Concernant le redressement judiciaire en particulier, il faut
tout de même relever que dans l'hypothèse où
l'hypothèque du banquier aurait été frappée des
inopposabilités de la période suspecte, ces sanctions n'auraient
aucun impact sur le paiement. En effet, ce dernier se faisant en principe en
numéraire, la garantie déjà neutralisée par
l'ouverture des procédures collectives, ne jouera pas.
Quant à l'hypothèse où la créance
du banquier aurait été frappée de forclusion, seule la
stipulation d'une clause de retour à meilleure fortune, contenue dans le
concordat de redressement, lui permettra de pouvoir jouir du paiement dans les
limites des stipulations concordataires256. Car, la forclusion selon
article 83 al 3 de l'A.U.P.C.A.P éteint la créance dans la
procédure de redressement judiciaire.
Le rétablissement du débiteur, on l'aura
compris, est une suite heureuse des procédures de sauvetage des
débiteurs en difficulté. Ces procédures reposent
principalement sur le concordat. Acte sur lequel devraient veiller le
débiteur, le syndic et les créanciers afin d'éviter que
des situations néfastes telles que son annulation et sa
résolution puissent venir interrompre sa poursuite. Car, de telles
situations donneraient certainement lieu à un désordre pouvant
aboutir, lorsque la situation est irrémédiablement compromise,
à la liquidation du débiteur.
255 Notons ici, la polémique établie par
l'article 83 al 2 de l'A.U.P.C.A.P qui dispose qu'en cas de redressement
judiciaire les créanciers forclos ne pourront, sauf clause de retour
à meilleur fortune et sous réserve des remises concordataires,
disposer du paiement. Cette réserve dans les limites des remises
concordataires, a conduit certains penseurs à conclure qu'elle induisait
une reconnaissance pour les créanciers non forclos de pouvoir allez
au-delà, et réclamer les remises concordataires. V. SAWADOGO
(F.M), op. cit. P. 284. En l'absence de précision législative et
attendant que la C.C.J.A se prononce sur la question. L'auteur préconise
de fixer l'étendue de cette clause lorsqu'elle est insérée
dans un concordat. Cela éviterait une interprétation divergente.
Ce conseil nous semble tout à fait sage et prudent.
256 Article 83al 2de l'A.U.P.C.A.P
69
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
B)- Le paiement en cas de liquidation du
débiteur
La liquidation du débiteur ou la liquidation des biens
est une issue malheureuse des procédures collectives, mais parfois
inévitable. Comme le constatait un auteur avisé « la
recherche à tout prix du sauvetage de l'entreprise peut conduire
à un échec sur toute la ligne, c'est-à-dire que finalement
l'entreprise ne sera pas sauvée et les créanciers ne seront pas
désintéressés de façon
substantielle.»257. Ainsi, pour éviter une telle
situation, il est souhaitable de procéder immédiatement aux
opérations de liquidation des biens258 lorsque l'entreprise
ne peut plus être sauvée.
La liquidation des biens doit en principe aboutir à
l'apurement du passif après la réalisation des
biens259. Régi par les articles 164 et suivants de
l'A.U.P.C.A.P, l'apurement du passif, qui consiste à une
répartition des deniers entre les créanciers, est ordonné
par le juge-commissaire. Ce dernier qui en fixe également la
quotité, est chargé de veiller à ce que tous les
créanciers, dont le banquier, soient avertis de ladite
répartition. Cependant, deux cas sont à distinguer.
Lorsque la répartition est possible260, le
syndic adresse sur autorisation du juge-commissaire, à chaque
créancier admis en règlement de son dividende, un chèque
à son ordre tiré sur compte ouvert spécialement à
cet effet dans un établissement bancaire ou postal ou au Trésor
public261. Mais, une telle répartition obéit à
la procédure d'ordre prévue au 166 et 167 A.U.P.C.A.P selon qu'il
s'agit des deniers provenant de la réalisation des immeubles ou des
meubles.
Concernant le banquier créancier hypothécaire,
préalablement intéressé par les deniers provenant de la
réalisation de l'immeuble hypothéqué, son paiement
n'interviendra qu'après désintéressement intégral
des créanciers de frais de justice engagés pour la
réalisation du bien
257 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 294
258 La liquidation peut se faire, soit par cession globale
d'actif, soit par vente isolée des biens formant le patrimoine du
débiteur. La cession globale d'actif, qui permet la vente de tout ou
partie de l'actif mobilier ou immobilier constituant une unité
économique, permet d'obtenir un meilleur prix. C'est la raison pour
laquelle elle est préférable à la vente isolée. V.
sur la réalisation des biens. SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 294 et
suivants. POUGOUE (P.G) et KALIEU (Y), L'organisation des procédures
collectives d'apurement du passif OHADA, P.U.A, 1999. GATSI (J), op. cit.
P. 19 et suivants. NEMEDEU (R), op. cit. P.256 et suivants. KOUNGA (G.J), op.
cit. P. 23.
259TIGER (P), op. cit. P. 42.
260 Cette hypothèse suppose que l'actif réalisable
ne soit pas déclaré insuffisant.
261 Article 164 al 2 de l'A.U.P.C.A.P. De l'analyse des
articles 164 et suivant, il en ressort que l'admission de la créance est
une condition de paiement. Ainsi, le banquier dont la créance n'aura pas
été admise ne pourra, quand bien même sa créance
serait valable, accéder au paiement. Rappelons que les créances
peuvent ne pas être admises dans plusieurs cas. Notamment: pour
défaut de production, ou pendant la vérification, ou encore
après vérification lorsque le bénéficiaire n'a pas
satisfait à la procédure de réclamation. Voir supra P.
70
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
vendu et à la distribution elle-même du prix
(venant en premier rang), ainsi qu'aux créanciers de salaire
superprivilégiés (venant en deuxième rang)262.
En cas de pluralité des créanciers hypothécaires, le
paiement se fera en fonction de l'antériorité de la
publication263. Ainsi, selon la consistance des deniers, il recevra
son paiement qui peut être intégral ou partiel. En cas de paiement
partiel, l'article 187 l'A.U.P.C.A.P le soumet pour le reliquat non payé
de sa créance au même traitement que les créanciers
chirographaires. Autrement dit, il sera payé au marc le
franc264 sur le reliquat provenant de la vente d'immeuble.
Lorsque que la répartition n'est pas possible, c'est
notamment l'hypothèse d'insuffisance d'actif prévue à
l'article 173 A.U.P.C.A.P, la juridiction compétente, sur le rapport du
juge-commissaire, et à la demande de tout intéressé ou
même d'office, prononce la clôture de la procédure pour
insuffisance d'actif. Cette décision qui fait recouvrer à chaque
créancier l'exercice individuelle ses actions, contraindra surement le
banquier, qui avait entamé la procédure de réalisation de
l'hypothèque, à reprendre la poursuite de la longue et complexe
procédure de saisie immobilière, à partir du dernier acte
utile.
262 Précisons que les créanciers de salaires super
privilégiés obtiennent paiement en proportion de la valeur de
l'immeuble par rapport à l'ensemble de l'actif. Article 166 de
l'A.U.P.C.A.P.
263 SAWADOGO (F.M), op. cit. P. 255.
264 Proportionnellement au montant de sa créance.
71
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
A l'analyse du recouvrement des crédits
hypothécaires, il y a lieu de constater que le banquier est
insuffisamment protégé. En effet, qu'il soit face à un
débiteur in bonis ou face à un débiteur en
difficulté, les procédures qui conditionnent le recouvrement ne
sont pas favorables à sa situation de dispensateur de crédit.
Car, elles comportent toutes des risques d'immobilisation des fonds.
Face à un débiteur in bonis, les
désagréments sont relatifs à la procédure de saisie
immobilière. Cette procédure, qui est d'ordre public, se
caractérise par sa longueur et sa complexité. Ce qui la rend
particulièrement préjudiciable. En effet, au delà du
risque de nullité qui est quasiment présent pour sanctionner le
non respect des formalités qui structurent la procédure de saisie
immobilière, nous avons relevé que les délais
prévus pour entreprendre le recouvrement sont particulièrement
longs. A cela se s'ajoutent, les incidents de la procédure de saisie
immobilière et les restrictions imposées au créancier
poursuivant dans certaines hypothèses. Ces deux situations contribuent
également à rallonger la procédure.
Lorsqu'il est face à un débiteur en
difficulté, le banquier se trouve assujetti aux procédures
collectives qui, en règle générale, entrainent de profonds
désagréments. Il a été souligné que le
banquier subissait d'abord des restrictions plus accrues à ces droits.
Qu'il était ensuite assujetti à une nouvelle obligation, dite de
déclaration des créances, dont le non respect peut conduire
à une impossibilité de recouvrer sa créance. Et enfin,
qu'en dépit de tous ses désagréments, le paiement du
banquier demeurait incertain.
Un tel bilan, singulièrement néfaste pour
l'économie et contraire aux objectifs du législateur OHADA, n'est
pas de nature à encourager le banquier à octroyer les
crédits en garantie de l'hypothèque. Cela peut expliquer la
surliquidité des banques en zone CEMAC et les difficultés
d'accéder au crédit. En effet, dans un environnement miné
par la pauvreté et où les immeubles constituent l'essentiel de la
richesse des populations, rendre la garantie hypothécaire difficilement
réalisable équivaudrait à interdire aux populations
l'accès au crédit265. D'où
l'intérêt de songer aux aménagements des procédures
de recouvrement de crédits hypothécaires.
265 Conformément à l'adage « on ne
prête qu'aux riches ».
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA
Julio Chancel
72
CONCLUSION GENERALE
73
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Au terme de l'étude relative à la protection du
banquier dans les opérations de crédit hypothécaire en
zone CEMAC, il y a lieu de souligner que cette protection est
mitigée.
Certes, il a été démontré dans une
première analyse que le banquier jouit d'une protection certaine lors de
la constitution du crédit hypothécaire. Et ce, en vertu de la
sûreté hypothécaire affectée au crédit.
Sûreté que l'on sait spéciale au regard de sa nature (moins
exposée au risque de détournement et de
dépréciation) et aisée de par sa constitution. D'autant
plus qu'en dehors des mesures légales, dont le respect suffit pour
assurer la validité et l'opposabilité de cette
sûreté, d'autres mesures spécifiques viennent
généralement renforcer la protection du banquier. Et que,
très souvent, la mise à disposition des fonds est
conditionnée par le respect préalable des mesures
sus-évoquées.
Mais, la seconde analyse axée sur le recouvrement des
crédits hypothécaires, en dehors du cadre des remboursements
spontanés, nous contraint à admettre que la protection du
banquier était bel et bien insuffisante. En effet, force a
été de constater que les procédures prévues par le
législateur pour recourir au recouvrement ne conviennent pas aux
intérêts du banquier. Et ce, qu'il s'agisse de la procédure
de saisie immobilière exigée face au débiteur in bonis ou
des procédures collectives réservées au débiteur en
difficulté. La première, se caractérisant par sa longueur
et sa complexité, consacre le risque d'immobilisation des fonds. Tandis
que les secondes, en plus de l'immobilisation des créances et des
nombreuses atteintes portées au droit des créanciers, font
demeurer le paiement incertain.
Face à ces difficultés de recouvrement et leur
impact négatif sur l'économie, il serait souhaitable que le
législateur OHADA procède à un aménagement des
procédures de recouvrement. Lequel pourrait déboucher sur une
véritable réglementation des procédures de
réalisation des hypothèques. Pour ce faire, certaines solutions
sont suggérées :
La première consisterait à une modification de
l'alinéa 2 de l'article 246 de l'A.U.P.S.R.V.E. Cet article, qui soumet
le recouvrement des crédits hypothécaires au respect des
formalités structurant la saisie immobilière, permet
également d'annuler par son alinéa 2 toutes les conventions
favorables à une réalisation amiable de
l'hypothèque266. Or, un tel article, bien qu'il
réaffirme la condamnation de la clause de voie parée,
empêche l'usage du pacte commissoire qui serait certainement une
alternative intéressante.
266 V. Niamey, chambre civile. Arrêt n°79 du 19 avril
2004. Y.K c/ B.I et
N.C.
www.ohada.com/Ohadata J-05182.
74
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
En effet, défini comme une convention par laquelle un
créancier gagiste ou hypothécaire obtient de son débiteur
qu'il deviendra propriétaire de la chose gagée ou
hypothéquée en cas de non paiement, le pacte commissoire a
l'avantage de faciliter la réalisation des biens
hypothéqués. Ce qui peut constituer un avantage de temps et
d'argent.
L'avantage de temps sera mis au profit du banquier qui ne
verra pas sa créance immobilisée pendant une longue
période sauf, en cas d'ouverture de procédure collective à
l'endroit du débiteur survenant avant l'exigibilité de sa
créance. Tandis que, l'avantage d'argent sera mis au profit du
débiteur. Car, s'il est parfois avancé que la vente judiciaire
des immeubles permet au débiteur d'obtenir un meilleur
prix267, l'on peut également souligner qu'elle est
généralement une source de dépense pour ce dernier et que
l'usage du pacte commissoire n'empêche pas une vente à meilleur
prix. Les parties pourront toujours indexer le prix conformément
à la pratique réalisée pour la vente d'immeubles
situés aux alentours de l'immeuble hypothéqué. Et, en cas
de contestation, recourir au juge afin qu'il désigne un expert
immobilier pour fixer le prix.
La seconde solution consisterait à reconnaître au
banquier un droit de solliciter l'attribution de judiciaire de l'immeuble.
Cette solution existe déjà en pratique. En effet, si l'on observe
attentivement la réalisation des immeubles hypothéqués par
voie de saisie immobilière, on se rendra bien compte que le banquier
poursuivant est déclaré adjudicataire au cas où aucune
enchère était portée sur la mise à prix. Cette
solution aboutit en réalité à l'attribution judiciaire de
l'immeuble à charge pour lui de s'acquitter du surplus du prix
fixé dans le cahier des charges. Une telle solution permettra d'ailleurs
d'aligner le droit du créancier hypothécaire sur celui du
créancier gagiste et d'éviter le risque d'immobilisation de la
créance.
Le pacte commissoire et l'attribution judiciaire de l'immeuble
peuvent parfaitement être adoptés en tenant compte de
l'équilibre entre les droits des créanciers poursuivants, du
saisi et des tiers268. Pour se faire, ces procédures
pourraient être réservées à la réalisation
des immeubles ne constituant pas le principal domicile du débiteur. Et,
exercer par les différents intéressés en fonction de
l'ordre établi par l'inscription des droits à la conservation
foncière.
Ces solutions déjà applicables dans certains
pays pour servir boussole au législateur OHADA.
267 KUATE TAMEGHE (S.S) op. cit. P. 246
268 V. Dans ce sens, l'ordonnance 26 mars 2006 reformant les
sûretés en France.
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75
ANNEXES
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76
1- COPIE DU TITRE FONCIER
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77
2- CERTIFICAT DE PROPRIETE
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78
3-CONVENTION DE CREDIT HYPOTHECAIRE
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79
5- CERTIFICAT D'INSCRIPTION HYPOTHECAIRE
80
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
BIBLIOGRAPHE
OUVRAGES GENERAUX
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affaires, 14e édition Dalloz Armand colin, Paris.
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contractuelle, 2e édition Francis Lefebvre 1999.
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Universitaire d'Afrique, Yaoundé 1998.
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La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
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Articles
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- Annexe de la convention du 17 janvier 1992
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États de l'Afrique Centrale.
83
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
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aux diligences des établissements assujettis en matière de lutte
contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme en Afrique
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1985 relative à l'exercice de l'activité bancaire des
établissements de crédit modifiée et
complétée par la loi n°88/06 du 15 juillet 1988, la loi
n° 90/019 du 10 Août 1990 et la loi n° 97/014 du 18 juillet
1997 portant loi de finance 1997/1998.
- Ordonnance 26 mars 2006 reformant les
sûretés en France.
- Décret n° 90/1469 du 09
novembre 1990 portant définition des établissements de
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- OHADA : Traité et actes uniformes
commentés et annotés 3e édition, Juriscope
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- Code civil Camerounais (textes
coordonnées par GATSI jean), édition 2010 P.U.L.
- Code civil Français.
- Code procédure civile et commerciale
P.U.L édition 2009.
Dictionnaires et lexiques
- CORNU (G), Vocabulaire juridique PUF paris
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- GUINCHARD (S), MONTAGNIER (G), (Sous la
direction de ...) Lexique des termes juridiques 13e édition
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- SOUSI- ROUBI (B), Lexique de banque et bourse
3e Dalloz, Paris 1990.
Quelques sites web utiles
www.beac.int ;
www.easydroit.com
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www.credau.org ;
www.Droit-Afrique.com
www.juriscope.org ;
www.ohada.com ;
www.ohadalegis.com ;
www.resposabilitédubanquier-distributeurdecrédit.com
84
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TABLE DES MATIERES
DEDICACES .i
REMERCIEMENTS .iii
ABREVIATIONS ...iii
SOMMAIRE vi
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE: UNE PROTECTION GARANTIE LORS DE LA
CONSTITUTION ..8
CHAPITRE I : LES MESURES LEGALES DE PROTECTION
|
10
|
SECTION I : LES CONDITIONS DE FOND
|
10
|
Paragraphe I : Les conditions relatives au constituant de
l'hypothèque
|
.....11
|
A- La qualité de titulaire de droit réel
immobilier
|
11
|
B- La capacité d'aliéner le bien
hypothéqué
|
.12
|
|
Paragraphe II : Les conditions relatives à la
spécialité de l'hypothèque
|
14
|
A- La spécialité de l'hypothèque quant
à l'assiette
|
14
|
B- La spécialité de l'hypothèque quant
à la créance garantie
|
16
|
|
SECTION II : LES CONDITIONS DE FORME
|
........17
|
Paragraphe I : La nécessité de l'écrit
|
18
|
A- Les différentes formes de l'écrit
|
18
|
B- La prévalence de la forme notariée
|
19
|
Paragraphe II : La publicité de la convention
hypothécaire
|
.20
|
A- L'inscription de l'hypothèque
|
20
|
B- Les droits relatifs à l'inscription de
l'hypothèque
|
.22
|
1)- Le droit de suite
|
.22
|
2)- Le droit de préférence
|
23
|
|
85
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
CHAPITRE II : LES MESURES CONVENTIONNELLES DE PROTECTION
|
..26
|
SECTION I : LES MESURES SPECIFIQUES DE PROTECTION
|
26
|
Paragraphe I : Les clauses prohibitives d'hypothèque
|
27
|
A- Le contenu des clauses prohibitives
|
27
|
B- La portée des clauses prohibitives
|
.....28
|
|
Paragraphe II : La conservation des titres fonciers
|
..28
|
A- La pratique de conservation du titre foncier
|
...29
|
B- La portée de conservation de titre foncier
|
30
|
|
Section II : LES MESURES GENERALES DE PROTECTION
|
....32
|
Paragraphe I : L'assurance des crédits
hypothécaires
|
32
|
A- Le mécanisme d'assurance dans les conventions de
crédit hypothécaire
|
32
|
B- La portée de l'assurance dans les conventions de
crédit hypothécaire
|
33
|
Paragraphe II : Les clauses conférant le droit de regard
|
34
|
A- Les modalités du droit de regard
|
35
|
B- La portée du droit de regard
|
35
|
Conclusion de la première partie
|
37
|
DEUXIEME PARTIE: UNE PROTECTION COMPROMISE LORS
RECOUVREMENT
|
DU
38
|
CHAPITRE I: LE RECOUVREMENT FACE AU DEBITEUR IN BONIS
|
40
|
Section I: L'assujettissement du banquier à une
procédure particulièrement longue
|
.....40
|
Paragraphe I: Le formalisme préalable à la
réalisation des hypothèques
|
.....41
|
A- L'établissement du commandement de saisie
|
41
|
B- La signification et publicité du commandement
|
42
|
Paragraphe II: Le formalisme consécutif à
l'hypothèque
|
43
|
A- Les actes préparatoires de vente
|
43
|
1)- Le cahier de charges
|
43
|
2)- L'audience éventuelle et publicité du cahier
de charges
|
44
|
|
B- La vente proprement dite
|
45
|
86
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
Section II: L'assujettissement du banquier à une
procédure complexe
|
.........47
|
Paragraphe I: Les incidents de la saisie immobilière
|
48
|
A- Diversité et spécificité des incidents
|
48
|
B- Le règlement des incidents
|
50
|
|
Paragraphe II: Les restrictions imposées au banquier
|
52
|
A- Les restrictions relatives à la valeur de l'immeuble
hypothéqué
|
52
|
|
B- Les restrictions relatives à la situation
géographique de l'immeuble hypothéqué.........53
CHAPITRE II : LE RECOUVREMENT FACE AU DEBITEUR EN DIFFICULTE
55
|
Section I : L'assujettissement du banquier à la discipline
collective
|
56
|
Paragraphe I : Les restrictions imposées aux droits du
banquier
|
56
|
A- La suspension des poursuites individuelles
|
..........56
|
B- L'arrêt du cours des intérêts
|
58
|
|
Paragraphe II : L'obligation de déclaration des
créances
|
.59
|
A- Les règles de production de créances
|
60
|
B- La sanction du défaut de production de créances
: La forclusion
|
61
|
Section II : Le paiement réservé au banquier
|
62
|
Paragraphe I : Les obstacles au paiement
|
62
|
A- Les obstacles inhérents à la vérification
des créances
|
63
|
B- L'inopposabilité de la période suspecte
|
65
|
Paragraphe II : Le paiement proprement dit
|
67
|
A- Le paiement en cas de rétablissement du
débiteur
|
67
|
B- Le paiement en cas de liquidation du débiteur
|
68
|
|
Conclusion de la deuxième partie
|
71
|
CONCLUSION GENERALE
|
72
|
ANNEXES
|
75
|
1 Copie du titre foncier
|
76
|
2 Certificat de propriété
|
77
|
3 Convention de crédit hypothécaire
|
78
|
4 Certificat de propriété hypothécaire
|
79
|
87
La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA
Julio Chancel
BIBLIOGRAPHIE .80
TABLE DE MATIERES 84
|