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Prise de décision intuitive dans un environnement virtuel.

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par Mickael ESKINAZI
Université Catholique de Paris - Psychologie 2016
  

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1.3 L'intuition en psychologie

1.3.1 L'intuition selon la psychanalyse

Pour la psychanalyse, l'intuition est un outil à double tranchant. En effet, Freud ne portait pas l'intuition haut dans son coeur, il la comparait à la divination, ou à la voyance, termes qu'on aurait pu employer pour caractériser la psychanalyse au début du XXème siècle et dont il n'aura de cesse de se défendre. Il insistera : la vision du monde scientifique assure qu'il n'y a d'autre source de connaissance de l'univers que le travail intellectuel sur des observations soigneusement scrutées, en d'autres mots, ce que nous appelons recherche - et à cotéde cela, nulle connaissance qui soit dérivée de la révélation, l'intuition ou la divination. (Freud, 1933, p. 4758). La psychanalyse ne devait pas être assimilée à de la parapsychologie, discipline très en vogue au début du XXème siècle. D'autre part, même si Freud admet que de nombreux philosophes tels que Leibniz, Schopenhauer, ou Nietzsche aient eu des intuitions similaires aux siennes, il se défend par sa position de scientifique, Etant moins soucieux des questions d'antérioritéque de garder mon esprit libre et sans embarras, j'ai longtemps évitéde fréquenter la pensée de

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Nietzsche, cet autre philosophe, dont les conjectures et les intuitions sont d'une si étonnante convergence avec les recherches laborieuses de la psychanalyse. (Ibid, p. 4234).

Pourtant Freud s'est toujours intéresséaux formes vacillantes de l'esprit en étudiant les rêves, mais en
s'intéressant aussi aux pressentiments et même à la télépathie. Il possède à la fois une fascination et une aversion pour ces sciences de l'occulte. Dans son article Rêve et télépathie, il voit le phénomène télépathique comme une simple information qui viendrait étayer le rêve, sans toutefois être l'essence du rêve: Le message télépathique est traitécomme un morceau du matériel destinéà la formation du rêve, comme tout autre stimulus qu'il vienne de l'extérieur ou de l'intérieur, comme un bruit gênant venant de la rue, comme une sensation insistante venant d'un organe du dormeur. (Rêve et Télépathie de Freud, citépar Turnheim, 2008, p. 5).

Denis (2009) relie l'intuition à la sensibilité, qui serait un contact sensible avec un objet mental, avec la psyché. Tout comme la pensée incidente (lapsus, actes manqués, erreurs de lecture, méprise), l'intuition serait un aperçu conscient de l'inconscient, un surgissement de l'inconscient dans la conscience. L'intuition proviendrait aussi d'une

représentation primaire, archaïque, infinie même, celle oùla pensée, l'imagerie mentale n'existait pas encore, mais le vécu s'exerçait seulement à travers la sensation. Il existerait en l'homme une infinitéde représentations possibles,

ce qui lui permettrait de ne jamais vraiment s'étonner, comme si tout l'existant était contenu potentiellement : ~ Les gens qui disent que l'homme apprend tout par l'éducation sont des imbéciles, y compris les grands philosophes qui ont soutenu cette thèse. Quelque singuliers et inattendus que soient les spectacles qui s'offrent à nos yeux, ils ne nous surprennent jamais complètement; il y a en nous un écho qui répond à toutes les impressions : ou nous avons vu cela ailleurs, ou bien toutes les combinaisons possibles des choses sont à l'avance dans notre cerveau. En les retrouvant dans ce monde passager, nous ne faisons qu'ouvrir une case de notre cerveau ou de notre âme. Comment expliquer autrement la puissance incroyable de l'imagination? (Eugène Delacroix, citépar Denis, 2009, p. 76). C'est ainsi que l'analyste peut ressentir ce qui se trame chez l'analysant, peut-être est-ce aussi par cela que l'empathie existe, qu'il est possible de ressentir totalement ce qui se joue en l'autre, tout comme il est possible de ressentir le vol d'un oiseau ou du moins de le deviner, alors même que nous n'avons pas d'ailes. C'est d'ailleurs cette qualitéde ressentir l'invisible dévoilédans la manifestation, qui fait le poète.

Lorsque Delacroix parle d'écho il fait référence à cette capacitéde vivre en soi ce qui est perçu à l'extérieur, de placer sa conscience dans ce qui est perçu. Cela rejoint la définition de l'intuition proposée par Bergson (1934) comme la sympathie par laquelle on se transporte à l'intérieur d'un objet pour coïncider avec ce qu'il a d'unique et par conséquent d'inexprimable (Bergson, 1924, p.61). Ce qui est étrange, comme nous le souligne Delacroix, c'est la possibilitéde coïncider avec cet objet alors même qu'il est un étranger, et que de prime abord, rien ne nous aurait permis de croire à cette sympathie. C'est ce que peut éprouver de temps à autre l'analyste face à l'analysant, il y a une totale compréhension du symptôme et un accès au symbolique de l'analysant est possible.

Comment discriminer l'intuition de la conviction délirante, quand toutes deux viennent d'un Einfall ? Selon la théorie de l'intuition proposée par Einstein, la vérifiabilitéde l'intuition serait nécessaire, il faudrait être capable d'exprimer dans un langage partagécette sensation de l'ordre du sensible, en dehors du langage.

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Dans le cas de la paranoïa il y aurait unification des fantasmes' dans le but de les systématiser, de construire une unique réalitéenglobant l'ensemble des intuitions. Ainsi ces systèmes délirants ne reposent pas sur la réalité, mais sur la réalitépsychique de la personne qui ne s'est pas confrontée à l'épreuve de réalité(Bernat, 2002), et qui coûte que coûte souhaite mettre en sens cette insondable souffrance.

La conviction délirante se définit toujours comme une sensation de savoir sans savoir comment ', mais contrairement à l'intuition, elle serait basée sur un socle délirant. Pour autant qu'une démonstration peut se baser sur un postulat faux, un raisonnement peut tout aussi bien se construire à partir d'un incipit délirant. Comme le mentionnait Jaspers, dans les idées délirantes véritables, l'erreur réside dans le contenu, mais la pensée formelle reste tout à fait intacte ' (Jaspers, 1933,p.86). L'intuition délirante ne peut se communiquer, se partager, elle est close dans son monde, au contraire d'une intuition partageable grâce à un langage, à une logique. Notons toutefois, que la limite qui sépare l'intuition saine de celle pathologique est difficile à déceler.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote