Université Rennes 2
UFR Arts Lettres et Communication. Département Arts
plastiques Master 2 Arts Plastiques
SCULPTURE ET VIDéO, MODES DE FABRICATION ET
PRéSENTATION : LE PROCESSUS D'UNE COALESCENCE DES FORMES.
Année universitaire 2011-2012
Kévin Fouasson Sous la direction de Pascale Borrel
Université Rennes 2
UFR Arts Lettres et Communication. Département Arts
plastiques Master 2 Arts Plastiques
SCULPTURE ET VIDéO, MODES DE FABRICATION ET
PRéSENTATION : LE PROCESSUS D'UNE COALESCENCE DES FORMES.
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Kévin Fouasson Sous la direction de Pascale Borrel
Année universitaire 2011-2012
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Table des matières.
Avant propos: quelques mots sur l'installation Spectres.
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Introduction. 24
Artefacts et artifices: pour une image palimpseste. 26
La sculpture: processus de stratification. 26
La vidéo: recouvrement et altération. 27
La forme comme palimpseste. 29
Mode de présentation: l'installation vidéo
projection. 36
Instauration d'un dispositif de cohabitation. 36
Espace contaminant. 43
Le temps comme matériaux. 47
La durée de l'éternité. 47
Texture de la lenteur. 51
Des formes à l'agonie. 54
Renversements et retournements. 54
De l'obscurité à la coalescence des formes.
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Informes figures humaines et sentiment d'effroi. 64
Ce qui lévite et ce qui rampe, ce qui nous
élève et ce qui nous abaisse. 68
Les présences du drapé. 68
Mise en scène pour des objets tabous. 73
Conclusion. 78
Annexes. 80
Le travail du son. 80
Entretien avec Ben Patterson. 82
La piste de la « vague figure ». 84
Bibliographie. 87
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Vous trouverez, à la fin de ce mémoire, un dvd
contenant des vidéos et des photographies liées à
l'installation Spectres, ainsi que plusieurs autres
réalisations vidéos.
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Avant propos : quelques mots sur l'installation
Spectres.
J'ai articulé toute la réflexion de ce
mémoire, et les recherches qui en résultaient, autour d'un projet
artistique particulier. Ce projet se présente sous la forme d'une
installation projection vidéo, composée de six sculptures
disposées dans l'espace, et d'un écran.
L'intérêt premier de cette installation est
qu'elle présente ensemble les deux médiums plastiques qui
composent ma pratique artistique. Cela me permet donc d'aborder à
travers ce mémoire non seulement les modes de productions relatifs
à chacun des deux médiums, mais aussi les liens et les effets
produits par le rapprochement de ces deux médiums en un même
espace mis en scène, celui de l'installation projection.
Avant de débuter ma réflexion, il m'a
semblé approprié de décrire formellement le dispositif de
l'installation, ainsi - et bien que je me soit appliqué à
toujours mettre en avant les conditions de l'installation tout au long de mon
discours - vous pourrez revenir sur ce texte, si vous éprouvez le besoin
de mieux visualiser certains aspects de ce dispositif. Ce texte à donc
pour objectif d'être un rappel des formes et des conditions de
présentation de la vidéo et des sculptures, au même titre
que les documents iconographiques et numériques présents au sein
de ce mémoire.
L'installation projection est donc constituée d'une
vidéo projetée sur un écran translucide de forme convexe.
Face à cet écran se trouvent trois sculptures à l'aspect
humanoïde, positionnée en triangle. Elles sont composées
d'un socle en métal et d'un corps en bois recouvert d'argile et de
tissu. Enfin trois autres sculptures de même nature sont disposées
contre le mur se trouvant à l'opposé de l'écran. Toutes
ces sculptures sont tournées en direction de l'écran de
projection.
Sur cet écran est donc projetée une vidéo
montrant un corps blanc statique flottant sur un fond noir. Toutes les six
minutes, cette figure se met en mouvement, puis reprend sa position initiale.
L'écran étant translucide, l'image vidéo philtre donc
à travers la toile et se retrouve projetée jusque sur le mur
opposé ainsi que les sculptures. De part et d'autre des sculptures
centrales se trouvent deux projecteurs lumineux, les trois autres sculptures
bénéficient quant à elles de la luminosité de la
projection vidéo. Le tout est accompagné d'une ambiance sonore
monotone fonctionnant en boucle au même titre que la projection
vidéo.
La projection vidéo s'effectue sur un écran de
180 cm suspendu à 20 cm du sol, en toile blanche, deux tiges
métalliques courbes lui confèrent sa forme convexe.
Cette toile blanche, matériau léger et
translucide, permet à la vidéo de se projeter au delà de
l'écran, sous une forme quelque peu altérée, jusque sur le
mur situé en face, ainsi que les divers éléments
environnants et aux éventuels spectateurs qui traverseraient le faisceau
lumineux.
Ainsi la projection vidéo ne se trouve pas réduite
à l'écran, mais occupe la quasi totalité de l'espace.
Cette occupation - ou cette contamination - de l'espace par la projection
vidéo vient amplifier un cer-
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tain aspect théâtral de l'installation en
instaurant une atmosphère quelque peu étrange et spectaculaire en
affirmant le surgissement des figures au sein de l'obscurité
dominante.
La vidéo représente un corps enveloppé
d'une toile transparente légèrement laiteuse, on devine ainsi la
nature humaine de ce qui est recouvert. L'image souffre d'un fort contraste
entre le fond noir et la figure blanchâtre qui semble flotter dans
l'espace, à la manière d'un spectre. On notera également
le caractère altéré de cette image, obtenu par un
procédé de re-filmage et d'altération de la captation
vidéo lors du tournage, ainsi que par un traitement subit lors du
montage.
Les trois premières minutes de la vidéo montrent
un corps figé, sans identité, dont la position rappelle autant
celle du mort recouvert d'un linceul, que celle d'une figure statuaire
dressée face au spectateur qui pénètre dans
l'installation. Mais bien qu'il paraisse absolument inerte, ce corps en
lévitation possède pourtant un mouvement, celui d'une lente
respiration. Au bout de ces trois minutes, le mouvement s'amplifie, la
respiration se fait plus pressante, et progressivement, un voile lumineux et
translucide, provenant de la partie supérieure de l'image, vient
irradier le corps sans pour autant le dissimuler. Puis, et alors que le voile
se délasse, le corps se met soudainement à s'agiter, froissant
ainsi la toile qui l'emprisonne. Ce mouvement, perçu à travers la
toile, vient fortement perturber notre perception des formes du corps. Mais
alors que la figure devient presque informe, elle semble s'assagir, la
respiration saccadée se calme progressivement, et accompagnée
d'un rapide flou de l'image elle retrouve sa position initiale. Vient enfin un
troisième temps, identique au premier et qui, par un effet de boucle, se
confond avec ce dernier.
La vidéo fonctionne donc en boucle, ainsi cette courte
période d'agitation de l'image suis et précède de longs
moments de statisme. Cette projection instaure ainsi un rythme cyclique au sein
de l'installation, le temps est alors à éprouver dans sa
durée comme dans son apparente fixité. L'ambiance sonore qui
accompagne l'installation vient alors soutenir le statisme - ou le mouvement -
de la vidéo
projetée.
Ces sculptures, mesurant entre 100 cm et 150 cm, ont vocation
à évoquer une forme humaine, mais ici l'humain est réduit
à une saillie, simple forme érectile dont la stature figée
rappelle celle d'un gardien, d'une vigie toute entière
dédiée à sa tâche. Ces figures humanoïdes,
penchant parfois en avant, emportées par un élan qui s'est
fané, semblent vouloir nous parler d'un temps perdu, d'un temps
figé. Ce temps est celui de leur réalisation, qui par des couches
successives de matériaux, bois, terre, tissu, pigment, encre, produit un
effet plus pictural que sculptural. C'est aussi la durée du
séchage des couches inférieures entre chaque ajout de
matériau, qui apporte à la sculpture ses fissures et ses
incidents de matière sur lesquels il faut sans cesse revenir. Le travail
de la fluidité est omniprésent, l'utilisa-tion de tissu
imbibé d'argile liquide, permet l'élaboration de drapés
offrants des formes organiques et charnelles. L'élaboration de ces
sculptures s'effectue donc dans une logique de retour, de retouche, de
recouvrement et d'altération.
Au sein de l'installation, les sculptures sont
disposées en deux groupes. Le premier groupe rassemble les sculptures
que j'appelle « statiques», c'est-à-dire celles dont la
position évoque un personnage figé,
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en observation, à l'image d'une vigie. Ces sculptures
« statiques » sont disposées dos au mur situé face
à l'écran.
Le second groupe de sculptures est composé de trois
sculptures que j'appelle « penchées », c'est-à-dire
qu'elles sont légèrement courbées, évoquant un
élan vers l'avant. Elles sont disposées comme si elles
s'avançaient vers l'écran, à la manière du
spectateur pénétrant dans la salle et s'approchant de la
projection.
Le spectateur déambule donc parmi ces statues vaguement
humaines, stoppées dans leur élan, et qui réceptionnent
les derniers résidus de la projection, tout en se retrouvant face
à un écran sur lequel est projetée une scène
presque arrêtée, se mettant en action de manière
cyclique.
Plan de l'installation Spectres
1/ vidéo projecteur
2/ enceintes
3/ écran translucide
4/ groupe central de trois sculptures
5/ projecteurs lumineux
6/ second groupe de trois sculptures, aligné contre le
mur
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Photographies réalisées par Morgane
Léonard lors de la mise en place de l'installation Spectres, le
23 novembre 2011 à l'Université Rennes 2. Cette version de
l'installation comp-portait deux projections vidéos identiques.
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Photographies réalisées lors de l'expostion
«Spectres». Espace M, Université Rennes 2 (du 24 au 27 janvier
2012)
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La vidéo
7'00, couleur, son, boucle
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Les sculptures
Argile, bois, tissu, encre, pigment, métal de 100 cm
à 150 cm
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Photographies réalisées lors de l'exposition
«Anisédora», Blaison Gohier, septembre 2012.
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