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Impact de l'introduction de l'ETP sur les transformations des systèmes d'activités et les transformations identitaires des infirmières devenant aussi "éducatrices".

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par Malika Salhi-Bouyagoub
Paul-Valéry Montpellier II - Master 2 2015
  

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Annexe n°3 : Les grands modèles pédagogiques de l'ETP

Sur quels courants théoriques reposent les diverses pratiques pédagogiques de l'ETP ? Tous les écrits que nous avons consultés, affirment que la notion de l'éducation thérapeutique s'est fondée en combinant les modèles des sciences de la psychologie, de la sociologie, de la psychologie sociale, de l'anthropologie et les modèles de science de l'éducation avec ceux de la médecine (modèle biomédical).

Nous nous basons sur le travail de C. Eymard (2003, 2010) et sur l'étude de A. Giordan (2010), pour présenter une synthèse des grands modèles pédagogiques, que ces auteurs estiment en lien avec la pratique de l'ETP.

Comme nous l'avons déjà précisé dans la première partie de ce travail, l'ETP ne peut se réduire qu'à la simple information de savoirs ou de savoir-faire, celle-ci vise l'appropriation de ces savoirs et savoirs faire par les malades. Elle exige un modèle d'apprentissage spécifique. D'après Eymard (2003), malgré la tentation de nombreuses disciplines à faire sortir l'ETP de la seule logique de l'information « Toutefois, les notions et concepts ne sont pas toujours explicités et référés, ce qui rend difficile leur appropriation par les professionnels » (p. 42). En effet, l'ETP se décline suivant les lieux d'enseignement, selon quatre grands modèles pédagogiques (classique, behavioriste et constructiviste), que nous tentons de présenter.

a) Le modèle de la pédagogie classique

Nommé aussi « pédagogie traditionnelle, frontale ou transmissive ». La pédagogie classique présente deux caractéristiques à savoir : le guidage par l'enseignant et la mémorisation par l'apprenant. Cette forme classique d'enseignement, nous l'avons tous connue à un moment donné de notre cursus scolaire. L'enseignant transmet des connaissances (fait le cours, expose et explique). L'apprenant écoute, prend des notes et mémorise. Sans l'intervention de l'enseignant par le guidage, ce modèle ne peut être en pratique. Il sollicite la mémoire de l'apprenant par l'assimilation du message transmis par l'enseignant. D'après Giordan (2010, p. 2), la transmission des connaissances de ce modèle serait donc à sens unique, l'enseignant détient le savoir, l'apprenant se contente de le recevoir. Il s'agit d'un rapport unilatéral selon Giordan. Pour lui, si on applique ce modèle pédagogique pour ETP, le soignant serait considéré comme le détenteur du savoir, il a le rôle « d'émetteur », et le patient serait le « récepteur », il enregistre et mémorise les messages transmis par le soignant. En plus du rôle de transmetteur, le soignant peut éduquer en s'appuyant sur des illustrations (photos, schémas...). Giordan rajoute que ce modèle pédagogique n'apparaît pas totalement dépassé. Il peut se révéler très efficaces pour ETP : « si le soignant et le patient se posent le même type de question ; s'ils possèdent le même cadre de référence à commencer par le même vocabulaire ; s'ils ont une façon identique de raisonner ; s'ils produisent du sens de la même façon » (p. 3). Par contre, les limites de ce modèle pour Giordan, peuvent s'identifier dans : le décalage entre le patient et le savoir médical ; la grande distance entre le soignant et le soigné ; le mode de raisonnement et la culture de chacun ; leur préoccupation et attentes qui peuvent être très diverses (p. 3).

b) Le modèle de la pédagogie behavioriste

D'après C. Eymard (2010, p. 42), les fondements théoriques du behavioriste remontent jusqu'à Aristote. Le terme béhavioriste a été introduit aux sciences de la psychologie par le psychologue américain John Watson au XXe siècle, qui avait repris les travaux du physiologiste russe Pavlov, en élaborant la théorie psychologique du stimulus-réponse par rapport au comportement humain. Selon Eymard, Watson suppose que les humains naissent avec des réflexes et des réactions émotionnelles (l'amour, la rage...) et tout autre comportement est le résultat des associations stimulus-réponse crées par le conditionnement.

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Donc, l'apprentissage est expliqué par une modification du comportement et cette modification est la conséquence d'une réponse à des stimuli externes d'après Giordan (2010, p. 2). Pour lui, en ce qui concerne l'ETP, cette approche a été appliqué dans des exercices « autoprogrammés » sur papier ou sur ordinateur comme : les enseignements assistés par ordinateur (EAO) et les exercices de pratiques thérapeutiques (Gestalt the-rapy, thérapie familiale) qui sont surtout développé dans les pays anglo-saxons. L'auteur rajoute que le seul avantage de cette pédagogie béhavioriste par rapport à la pratique de l'ETP, repose sur l'apprentissage de gestes techniques (dosage de glycémie), et sur l'apprentissage de réflexe de santé (savoir renoncer à un aliment). Mais, cette approche demeure très limitée pour Giordan, le fait qu'elle intervient peu sur la motivation du patient, étant les désirs et les intentions du patient peu pris en compte. Pour l'auteur, ce modèle pédagogique renonce à comprendre le moral du patient.

Pour Chantal Eymard (2010), l'ETP s'inscrit dans cette approche behavioriste lorsqu'elle privilégie la transmission des savoirs pour éviter les complications de la maladie d'un patient, étant ce dernier considéré comme ignorant des savoirs en lien avec la santé. Cette méthode apporte des réponses types à mettre en oeuvre par le soignant. Dans ce cadre, l'éducation thérapeutique s'inscrit dans un rapport expert/novice, ne prenant pas en compte l'apprenant dans ses dimensions cognitives, émotionnelles. Pour l'auteur, les compétences de l'éducateur s'évaluent sur son niveau de maîtrise des savoirs à enseigner et sur sa capacité à les transmettre (p. 45).

c) Le modèle de la pédagogie constructiviste

Pour C. Eymard (2010, p. 42), le modèle de la pédagogie constructiviste est fondé de la théorie de Piaget qui explique que : « tout est l'affaire d'assimilation et d'accommodation dans l'apprentissage ». L'auteur explique que la théorie de Piaget consiste à rattacher la nouvelle information à ce qui est déjà connu, de la greffer sur des notions en prenant en considération les « schèmes » dont dispose au préalable le sujet. Ces derniers sont réorganisés par les nouvelles données. Donc, l'apprenant fait entrer dans sa propre organisation cognitive les données du monde extérieur, les informations nouvelles sont traitées en fonction des acquis antérieurs, le sujet les « assimile ». En retour, il y a « accommodation », c'est-à-dire modification des pensées en place en fonction des circonstances nouvelles. Dans ce cas, Eymard explique que l'ETP devient « un processus personnel » centré sur l'apprenant. Par contre pour Giordan (p. 2), l'apprenant en ETP construit progressivement son savoir en travaillant avec d'autres personnes (le groupe) par le biais d'expressions et d'activités. Il s'agit de faire exprimer le patient, de le confronter en s'appuyant sur un conflit cognitif. L'auteur exprime qu'il est possible aussi de confronter le patient à la réalité par des exercices qui le conduisent à reformuler les idées ou les questions. Pour Giordan, cette méthode pédagogique constructiviste aborde le vécu du patient, son avantage porte sur le pouvoir de l'apprentissage à enrichir ou à modifier légèrement une croyance en lien avec la santé. D'après Giordan, l'ETP s'inscrit dans cette approche constructiviste lorsqu'elle vise la connaissance de soi du patient dans un environnement social. L'intérêt de cette approche, c'est les expériences d'entraînement en groupe, en valorisant un apprentissage coopératif des réunions entre patients. Le soignant éducateur a le rôle de l'organisateur. Pour l'auteur, ce modèle pédagogique employé en ETP favorise le développement des compétences psychosociales en tant qu'aptitude d'une personne à maintenir un état de bien-être mental, par rapport à sa propre culture, à son environnement et grâce aux relations entretenues avec le groupe.

d) Le modèle de la pédagogie allostérique

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Ce modèle pédagogique est présenté par A. Giordan (2010, p. 5). Il s'agit d'un nouveau modèle pédagogique proposé pour l'ETP. D'après l'auteur, les limites des trois approches pédagogiques, que nous avons synthétisé ci-dessus, ont conduit les experts de l'ETP à réfléchir sur un nouveau modèle connu sous le nom de « pédagogie allostérique », sans exclure les autres pratiques pédagogiques dans les limites de leurs possibilités. Cette nouvelle méthode, dirigée par le Professeur Alain Golay, est en cours de test et de développement au niveau du service d'Enseignement Thérapeutique pour Maladies Chroniques, auprès des Hôpitaux Universitaires de Genève.

L'approche de cette « pédagogie allostérique » repose sur trois hypothèses complémentaires, à savoir : (1) l'importance des différentes interactions entre le patient, son corps, sa pathologie, son traitement, son environnement, son entourage, les soignants et le système de soins ; (2) la prise en charge de la personne dans ses cinq dimensions (émotionnelle, cognitif, sensoriel, méta cognitif et inter cognitif) ; (3) l'introduction d'une « pédagogie systémique » basée sur la transformation des conceptions, par le biais d'un « environnement didactique ». D'après Giordan, le but de l'introduction de la pédagogie systémique est d'emmener le patient à décoder un message, à comprendre sa situation et à changer de comportement. Le fait que le patient apprend à partir de ses conceptions (de ce qu'il est et de ce qu'il sait), il va transformer son savoir dans un processus de construction/déconstruction. Le soignant l'accompagne, le sensibilise et met en place l'environnement didactique nécessaire pour l'apprentissage en mobilisant les outils et les ressources éducatives.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand