Emmanuel DELARUE Promotion 18 - Année 2015 - 2016
LE TRANSFERT DE
CONNAISSANCE CHEZ
LES EXPERTS
En quoi le transfert des connaissances chez les
experts
est-il un enjeu stratégique dans la recherche
de
croissance d'une entreprise de l'industrie du
nucléaire
français ? Le cas d'AREVA
Mémoire de recherche appliquée
CFA - Institut de Gestion Sociale
Titre de l'IGS certifié Niveau I
Responsable en Management et Direction des Ressources
Humaines
Maitre d'apprentissage : Madame Valérie CAILLOT Tuteur de
mémoire : Monsieur Bernard MERCK
CONFIDENTIALITÉ
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rapport sont
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l'étudiant l'ayant
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Tout lecteur s'interdit avant, pendant ou après
l'évaluation, de révéler,
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tiers ou utiliser directement ou indirectement, partiellement
ou totalement,
les informations qu'il contient.
REMERCIEMENTS
Je remercie mon maître d'apprentissage, Madame
Valérie CAILLOT pour m'avoir permis de réaliser ce mémoire
et pour avoir m'avoir fait porter attention sur certaines problématiques
sujettes à l'expertise chez Areva.
Je remercie aussi mon tuteur de mémoire, Monsieur
Bernard MERCK qui m'a apporté son encouragement sur la
problématique du mémoire, son aide à la rédaction
et son soutien pour la réalisation de l'enquête.
Je tiens aussi à remercier Monsieur Martin
ROULLEAUX-DUGAGE pour les encouragements et le temps passé à me
transmettre son savoir qui m'a guidé tout au long de la
réalisation de ce mémoire. Son aide m'a ainsi permis de mieux
cerner l'ensemble des problématiques du sujet et de prendre le recul
nécessaire pour l'analyse qui y est réalisée.
Je remercie également Monsieur Laurent DADA pour avoir
pris le temps de m'aider à mieux comprendre le contexte global de
l'entreprise ainsi que pour les encouragements qu'il m'a apporté.
Je remercie également Mademoiselle Céline
FRIEDRICH, pour les encouragements et le soutien qu'elle m'a apporté
tout au long de cette année, et particulièrement durant la
rédaction de ce mémoire.
Je remercie aussi toutes les personnes qui ont
participé de près ou de loin à ce mémoire, par les
éléments qu'ils m'ont fournis dans l'enquête, par
l'écoute de mes problématiques rencontrées et des
réponses qu'ils ont su y apporter. Je remercie également les
personnes qui m'ont conseillés et aidés sous différentes
formes.
Enfin, je remercie le corps enseignant et professionnel de la
formation de titre de niveau I, Responsable en Management et Direction des
Ressources Humaines de l'Institut de Gestion Sociale pour toutes leurs
connaissances qu'ils m'ont transmis.
INTRODUCTION
SOMMAIRE
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE - APPRIVOISER LA CONNAISSANCE
6
1.1. La connaissance chez AREVA 6
1.1.1. AREVA, un leader sur marché en évolution
6
1.1.2. La connaissance créer de la richesse 11
1.1.3. Le transfert des connaissances est capital pour
subsister 17
1.2. Les experts possèdent la connaissance
20
1.2.1. Les experts sont les acteurs clés de l'industrie
du nucléaire 20
1.2.2. Le processus de transfert des connaissances chez les
experts 26
1.2.3. La spécificité des communautés de
savoir 30
DEUXIEME PARTIE - LE TRANSFERT DES CONNAISSANCES SOUS
TOUTES
SES FORMES 33
2.1. Protocole d'enquête 33
2.1.1. Travail en amont 33
2.1.2. Les interviews et le débriefing : les
difficultés rencontrées 35
2.2. Les programmes mis en place par Areva
37
2.2.1. GapExpert : un programme pour les jeunes
générations 37
2.2.2. L'arrivée des nouvelles
générations 40
2.2.3. Un dispositif spécifique pour les experts
à la retraite 43
2.3. Des initiatives individuelles de transfert de
connaissances 45
2.3.1. Les transferts ponctuels 45
2.3.2. Les moyens de partage de connaissance dans la
carrière de l'expert 48
2.4. Le transfert collectif de connaissances
51
2.4.1. L'identification des connaissances critiques 51
2.4.2. Les différentes formes de communautés
existantes chez Areva 56
2.4.3. Les outils informatiques 61
TROISIEME PARTIE - SOUTENIR LES EFFORTS ENTREPRIS PAR
AREVA 65
3.1. Un outil pour agir rapidement 65
3.1.1. Création d'un guide de transfert de connaissance
65
3.1.2. Cadrer le projet 68
3.2. Modéliser la connaissance chez Areva
71
3.2.1. Proposer une méthode de modélisation des
connaissances 71
3.2.2. KALAM® ou MASK : deux méthodes
différentes de modélisation de la
connaissance 72
3.3. Développer une vision collective à
long terme 78
3.3.1. Favoriser une vision globale 78
3.3.2. Développer les communautés 81
CONCLUSION 87
BIBLIOGRAPHIE 90
GLOSSAIRE DES CIGLES 94
Annexe 1: Prévision de croissance de la
production d'électricité par l'énergie
nucléaire
dans le monde en 2007. 95
Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires
96
Annexe 3 : Modèle systémique d'un
Système de Gestion des Compétences 97
Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA
98
Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif
102
Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du
tableau Excel 104
Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint
105
Annexe 8 : La plate-forme Yammer 106
Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK
107
TABLE DES ANNEXES 108
TABLE DES FIGURES 109
TABLE DES MATIERES 110
Page 1 sur 113
INTRODUCTION
INTRODUCTION
« L'actuelle accélération des
progrès de la science et de la technologie doit s'interpréter par
le fait que les économies des pays de l'OCDE sont de plus en plus
fondées sur la connaissance »1. Le rapport de l'OCDE en
1999 est clair : le rapport à la connaissance a changé et la
croissance accrue des nouvelles technologies en est le symptôme. Deux ans
plus tôt, Lionel JOSPIN parlait de « bataille de l'intelligence
»: « les produits issus de l'activité intellectuelle
représentent déjà, et représenteront encore
davantage dans l'avenir, une part déterminante de la richesse collective
»2. Peter Drucker est alors encore plus catégorique
puisqu'il nous dit dans la même période « Les organisations,
notamment les plus grandes, auront peu d'autres choix : elles devront
s'organiser autour du savoir et de l'information »3. Depuis 15
ans, la situation confirme ces intuitions et des entreprises comme Apple, qui
ont basé leur croissance sur l'innovation, ont des chiffres d'affaires
qui dépassent les centaines de milliards de dollars, soit le PIB
réuni de plusieurs pays. Pourtant, les richesses physiques et
matérielles de ces entreprises sont parfois loin de ces chiffres. Pour
en arriver là, il leur a fallu capitaliser de la connaissance. Mais ils
ne sont pas les seuls à le faire. La nature est la plus grande
encyclopédie qui nous ait jamais été donnée. Son
répertoire de connaissances semble illimité. Idriss J. Aberkane,
chercheur en gestion de la connaissance et en biomimétisme,4
nous dit que la nature est un livre ouvert que nous ne savons pas lire ou dont
nous ne connaissons même pas l'existence. La nature possède des
technologies bien plus développées que l'être humain avec
des impacts proches du zéro. Elles sont totalement
biodégradables. La nature en sait plus sur nous que nous-mêmes. Et
tout cela, pour une simple raison : elle a développé une gestion
parfaite de la connaissance. Elle ne sait pas détruire sa connaissance
et ne peut donc pas partir de zéro pour se développer.
Grâce à cela, elle a développé les meilleurs
écrans au monde dont Samsung tente de s'inspirer aujourd'hui pour
développer les
1 OCDE, Science, technology and industry
scoreboard 1999 : benchmarking knowledge-based economies, septembre 1999,
http://www.oecd.org//dsti/sti/stat-ana/prod/scorebd_summ.htm
2 Lionel Jospin, discours inaugural au
Programme d'action gouvernemental pour la société de
l'information (PAGSI), Hourtin, août 1997, [en ligne],
consulté le 12 juin 2016, URL :
http://discours.vie-publique.fr/notices/993002100.html
3 Peter Drucker, L'émergence de la
nouvelle organisation, Le knowledge management, Harvard Business
Review, aux Editions d'Organisation pour la traduction française, Paris,
1999.
4 Etopia, Introduction au biomimétisme -
« L'innovation inspiré par la nature », traduction par
Lydia Blaise, [en ligne], consulté le 17 juin 2016, URL :
http://www.etopia.be/IMG/pdf/biomimetisme.pdf
Page 2 sur 113
INTRODUCTION
siens. Elle a développé des matériaux
plus résistants et plus légers que ceux développés
par l'armée américaine pour le blindage. Elle a mis au moins une
colle que même la NASA n'a encore jamais réussie à
réaliser et un système de propulsion sous l'eau que les plus
grandes puissances militaires tentent, en vain, de mettre au point. Nous
l'avons compris : la nature, en capitalisant et en transférant
son patrimoine génétique à elle-même, a
développé des technologies extrêmement efficaces, à
coût zéro et non polluantes. Autrement dit : à efficience
parfaite. Et cela ne semble pas vouloir s'arrêter. Et pour cause : la
connaissance a la capacité d'être illimitée. Elle
s'enrichit lorsqu'on la partage, c'est-à-dire qu'on devient plus riches
lorsqu'on décide de la mettre en commun. Les matières
premières sont inutiles sans la connaissance. Le bois ne peut
brûler si nous ne savons pas allumer un feu, le pétrole ne peut
faire tourner un moteur si nous ne savons pas le raffiner ni construire le
moteur. L'uranium ne peut pas produire d'énergie si nous ne savons pas
l'enrichir, le transporter et le maitriser. Aujourd'hui, nous avons
accès à des richesses minières ou fossiles,
limitées dans le temps et l'espace. Demain, nous aurons probablement
épuisé la majorité de ces ressources. Nous devrons en
trouver d'autres. Pour cela, l'innovation est obligatoire et passe par le
transfert des connaissances (TC) car si nous perdons nos connaissances, nous
revenons au point de départ. C'est pourquoi l'Homme cherche depuis
toujours à conserver sa connaissance, à la partager pour
l'enrichir et s'enrichir lui-même. L'apparition de l'écriture, du
papier, de l'imprimerie, des ordinateurs et maintenant d'internet ont
été des révolutions qui lui ont permis de faire de
nouvelles découvertes. Aujourd'hui, la quantité de savoir double
tous les 7 ans5. Ce qui signifie que l'homme crée plus de
savoir en 7 ans et 1 jour que tout ce qu'il a créé durant les 100
000 dernières années. Nous recherchons la croissance et pour
cela, nous devons continuer à échanger, enrichir et
transférer nos connaissances, car il y a une corrélation entre
augmentation de la connaissance et richesse. Certains pays l'ont bien compris
et avec moins de matières premières, exportent bien plus que les
gros producteurs d'hydrocarbures. Pour exemple, la Russie est 171 fois plus
grande que la Corée du Sud avec trois fois plus d'habitants. Elle a tous
les hydrocarbures, minéraux et terres rares qu'elle souhaite. Pourtant,
la Corée du Sud exporte 20% de plus que la Fédération de
Russie. C'est 100 milliards de dollars supplémentaires chaque
année. En 1957, le PIB de la Corée du Sud était
équivalent à celui de la Somalie. Aujourd'hui, leur PIB est
supérieur à celui de la France. La différence ?
5 Idriss J. Aberkane, Economie de la
connaissance, Fondation pour l'innovation politique, mai 2015, 52p, [en
ligne], consulté le 12 juin 2016, URL :
http://www.fondapol.org/etude/idriss-j-aberkane-economie-de-la-connaissance/
Page 3 sur 113
INTRODUCTION
Un bâtiment, un nom, quelques personnes : Un
ministère de la connaissance. Les Coréens l'ont bien compris, la
gestion de la connaissance (GC) est stratégique. Elle est facteur de
création de richesse et l'Homme le sait depuis plusieurs milliers
d'années. Ainsi, la première forme de savoir a été
développée il y a plus de quarante mille ans. Il s'agissait
d'entailles réalisées dans la roche qui permettait de
réaliser des calculs à des fins commerciales6. Puis
avec Aristote, est venue la gestion des connaissances. A force d'accumuler des
informations qui sont elles-mêmes une accumulation de données,
l'Homme en a constitué une connaissance grâce à ses
capacités cognitives et en a formalisé un savoir. Aristote a
alors introduit l'idée de mettre en place une organisation collective
(le lycée) afin de l'identifier, de le classer, de se l'approprier, d'en
discuter et enfin de le transmettre. En effet, sans chacune de ces
étapes le savoir perd de sa valeur. S'il n'est pas identifié,
personne ne saura où il se situe et peu ou pas d'individu en
profiterons. S'il n'est pas classé, il sera peu utilisé, car les
individus ne voudront pas perdre de temps à le retrouver. Si personne ne
se l'approprie, il ne deviendra pas une connaissance et aura peu
d'utilité. Si aucun d'entre nous ne choisit d'en discuter, il
n'évoluera ni ne s'enrichira. Enfin, si personne ne la transmet, elle
meurt et disparait. Cette dernière étape est alors la plus
importante. En effet, tant qu'un individu détient un savoir, quelle
qu'en soit la forme, elle subsiste. Si cet individu décède sans
le transmettre, le savoir disparait. Ainsi, la clé de voute de la
connaissance réside dans son transfert. On en prend alors conscience
lorsque l'on fait le parallèle avec l'apparition des modes de
transcription. En effet, plus ces derniers évoluent dans l'histoire de
l'humanité plus la quantité de savoir augmente et plus les
inventions sont nombreuses et innovantes. Petit à petit, l'Homme
s'enrichit.
Ainsi, le savoir est créateur de richesse, uniquement
lorsque ce dernier se l'approprie, créant une connaissance, puis le
transfert. La connaissance doit donc être transmise pour subsister,
évoluer et être synonyme de croissance pour celui qui la
détient. Dans l'industrie du nucléaire, cette
réalité est d'autant plus vraie que le savoir y est en
quantité. En effet, la capacité de l'Homme à produire de
l'énergie électrique grâce à la fission des atomes
d'uranium est la résultante d'une étonnante quantité de
savoir accumulé et intégré par l'homme. Il s'agit en effet
de la maitrise d'une longue chaîne de processus partant de l'extraction
minière de l'uranium jusqu'au retraitement des déchets en passant
par la fission des atomes de la matière. Les techniques utilisées
sont extrêmement complexes et évoluent sans cesse afin de donner
un
6 Jean-François Ballay, Tous managers du
savoir I La seule ressource qui prend de la valeur en le partageant, Editions
d'Organisation, 2002, p.6
INTRODUCTION
meilleur rendement, d'être plus puissant et plus
sûr. Ainsi, une course au développement des technologies se joue
dans le secteur du nucléaire. Elle est courue par les plus grandes
multinationales du nucléaire. L'une d'entre elles, nommée Areva,
y participe activement. Cette multinationale Française née dans
les années 2000 est aujourd'hui un des fleurons de l'industrie du
nucléaire avec EDF. Présente dans de nombreux pays dans le monde,
elle se distingue par sa particularité à maitriser l'ensemble du
cycle du combustible nucléaire. L'exploitation des centrales est le
métier d'EDF. Cependant, Areva maitrise à ce jour la construction
et le démantèlement d'une centrale nucléaire,
l'extraction, l'enrichissement et la fabrication du combustible
nucléaire (l'uranium), son retraitement après usage ainsi que son
stockage ou son recyclage. Cela inclut alors la maitrise de l'ensemble de ces
technologies. Il y a ainsi un savoir-faire très important qu'Areva
détient dans le domaine du nucléaire. Cependant, ce savoir-faire
a un jour été rendu possible grâce à un groupe de
personnes qui ont su maitriser la technologie en connaissant ses origines, en
sachant pourquoi un composant réagit avec tel autre. Ils avaient ainsi
la connaissance de la réaction chimique des composants concernés.
Ils avaient la possibilité d'expliquer les différents
scénarios possibles existant à sa connaissance. Ils savaient
pourquoi et comment les maitriser. Ils étaient experts. Ainsi, les
experts ont un poste qui peut se révéler stratégique pour
l'entreprise, car ils « savent pourquoi ».
Aujourd'hui, Areva traverse une crise importante. La revente
de ses activités de construction et de démantèlement de
centrales nucléaires à EDF devrait être
réalisée en 2017 et l'entreprise a dû mettre en place un
Plan de Départ Volontaire afin de réduire ses effectifs. Ces
évènements voient alors des experts quitter l'entreprise. En
parallèle, les experts les plus qualifiés ne sont plus
qu'à quelques années de la retraite. Les nouvelles
générations arrivent dans l'entreprise et prennent petit à
petit la relève d'un papy-boom, résultant d'une embauche massive
suite à la croissance rapide du secteur du nucléaire dans les
années 1980. Ainsi, si les connaissances détenues par les experts
les plus qualifiés ne sont pas transférées, Areva perdra
ces connaissances qui disparaitront avec le départ de leurs
détenteurs. Il semble pourtant que ces connaissances soient
stratégiques pour l'entreprise, car elles permettent de répondre
aux questions des autorités de sûretés, des clients
demandant conseil ou encore pour développer de nouvelles technologies
plus sûres dans le nucléaire. Le groupe Areva fait donc face
à un défi de taille : transférer les connaissances de ses
experts. Le groupe doit aussi relever un second défi : traverser sa
période de crise et reprendre le chemin de la croissance. Nous avons vu
que le fait de ne pas transférer une connaissance la faisait
disparaitre. Or pour traverser sa
période de crise et se développer, Areva a
besoin de toutes ses connaissances et en particulier celles qui lui permettent
de maitriser une technologie qui la différencie de ses concurrents, afin
de les mettre à profit auprès de ses clients. Nous nous demandons
ainsi légitimement en quoi le transfert des connaissances chez les
experts peut être un enjeu stratégique pour elle dans sa recherche
de croissance.
Ainsi, tout au long de ce mémoire nous allons chercher
à répondre à la problématique suivante : En quoi le
transfert des connaissances chez les experts est-il un enjeu stratégique
dans la recherche de croissance d'une entreprise de l'industrie du
nucléaire français ? Le cas d'AREVA
Pour cela, il nous faudra analyser en détail le
transfert des connaissances chez les experts au sein de l'entreprise Areva
grâce à des interviews réalisés auprès d'une
population d'experts, mais aussi de managers et responsable au sein de la
Direction Recherche & Développement d'Areva. Nous nous pencherons
particulièrement sur la nouvelle entité nommée New Areva
et nous en analyserons les différentes activités et processus mis
en place.
Ainsi, dans un premier temps nous chercherons à mettre
en avant l'ensemble des enjeux de cette problématique en posant le
contexte de l'industrie du nucléaire et d'Areva puis en
définissant les termes nécessaires à la
compréhension complète du sujet. Nous chercherons à
définir un cadre théorique clair et précis permettant
d'éclairer l'analyse de l'entreprise qui suivra. Dans un deuxième
temps nous analyserons les différents processus de transfert de
connaissance au sein de la population des experts Areva. Pour cela, nous
réaliserons l'analyse suivant le type de transfert de connaissance afin
de tirer des conclusions par thème. Cela nous amènera alors dans
un troisième temps, à fournir des préconisations qui
seront à mettre en place progressivement dans le temps, suivant
l'urgence de la situation rencontrée par Areva.
Page 6 sur 113
Première partie - Apprivoiser la connaissance
Première partie - Apprivoiser la
connaissance
1.1. La connaissance chez AREVA
1.1.1. AREVA, un leader sur marché en
évolution
1.1.1.1. Une industrie basée sur des
connaissances pointues
Avec 58 réacteurs nucléaires, la France
possède le parc nucléaire le plus important du monde au vu de sa
population. Cela lui permet ainsi d'exporter une partie de son énergie
électrique à l'Europe et de réduire son importation
d'énergie fossile. Cependant, cette industrie ne s'est pas construite en
trois jours. Si certains facteurs, comme le choc pétrolier de 1973, ont
poussé la France à investir à grande échelle dans
ce domaine, cela n'aurait pas été possible sans les recherches
scientifiques préalables. Les bases en ont été
jetées dès la fin du XIXe siècle. Ainsi, de
nombreux scientifiques effectuent des recherches sur l'uranium et Henri
Becquerel, physicien diplômé de l'École polytechnique,
découvre en 1896 la radioactivité7. En 1903, avec
Pierre et Marie Curie, il reçoit le prix Nobel de physique pour la
découverte de nouveaux matériaux potentiellement utilisables dans
l'énergie nucléaire. En mai 1939, quatre physiciens
français8 déposent trois brevets pour la production
d'énergie à partir d'uranium9. La France est alors
titulaire des premiers brevets en la matière. À la suite de la
Seconde Guerre mondiale, le gouvernement a conscience de l'importance de cette
énergie. Pour continuer les recherches scientifiques, il crée le
Commissariat à l'Energie Atomique (CEA) en octobre 1945 et une branche
nommée CEA-Industrie est créée plusieurs années
après pour débuter l'industrie du nucléaire. Les enjeux
militaires et les démonstrations de forces liées au contexte de
la guerre froide forcent les recherches. La France décide alors
d'être totalement autonome sur le développement de cette
technologie et arrive rapidement à maitriser l'ensemble du cycle
nucléaire tant militaire que civil (Extraction d'uranium, fabrication du
combustible, construction de centrale ou d'arme nucléaire, traitement et
recyclage des déchets radioactifs). En 1963, le premier réacteur
nucléaire est construit et en 1971, six réacteurs sont en service
et
7 Bernard Pire, Découverte de la
radioactivité naturelle, Encyclopædia Universalis
[en ligne], consulté le 17 août 2016. URL :
http://www.universalis.fr/encyclopedie/decouverte-de-la-radioactivite-naturelle/
8 Frédéric Joliot-Curie, Hans von
Halban, Lew Kowarski et Francis Perrin
9 Paul REUSS, L'épopée de
l'énergie nucléaire: une histoire scientifique et
industrielle, Paris, EDP SCIENCES, 8 février 2007, 167 p.
Page 7 sur 113
Première partie - Apprivoiser la connaissance
produisent 5% de l'énergie consommée par la
France10. Le développement de l'industrie du nucléaire
civil bat son plein, les entreprises comme Framatome (société
Franco-Américaine), la Compagnie Générale
d'Électricité (CGE), CEA-Industrie, puis COGEMA (COmpagnie
Générale des MAtières nucléaires) ou encore EURODIF
Production font surface. Cependant, la mondialisation générale
des marchés n'épargne pas l'industrie du nucléaire
français. La loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative
à la modernisation et au développement du Service public de
l'Électricité ouvre ainsi le marché de l'énergie
à la concurrence. Les catastrophes nucléaires freinent aussi la
progression du marché. En 1999, la Cogema devient l'actionnaire
principal de Framatome. Puis en septembre 2001, AREVA naît de la fusion
de Cogema, Framatome, CEA-Industrie et Technicatome. Anne Lauvergeon, PDG de la
Cogema, devient alors présidente du directoire d'AREVA, leader mondial
du Nucléaire.
La réussite de l'Industrie du nucléaire
français n'est pas due au hasard et son statut d'acteur majeur sur
l'échiquier du marché de l'énergie atomique est en partie
la résultante de l'ensemble des connaissances qu'elle a su mettre
à profit. Ainsi, Areva a été créée en
s'appuyant sur un ensemble colossal de connaissances.
1.1.1.2. Le parcours d'Areva
À la suite de sa création, le groupe a connu une
croissance rapide grâce à l'acquisition de nombreuses
sociétés. Son objectif est alors de proposer une offre
complète en rachetant les sociétés nécessaires
à la maitrise du cycle du Nucléaire. En 2001, la
société américaine Canberra est intégrée au
sein d'Areva pour les solutions de mesures nucléaires relatives à
la sûreté et à la sécurité. En 2002, Areva
acquiert la société américaine Duke Engineering and
Services, dans le domaine des services et ingénieries nucléaires.
Puis en 2004, le groupe élargit ses activités en intégrant
Areva T&D, ancienne branche d'Alstom, afin de couvrir le domaine de la
transmission et de la distribution d'électricité. C'est alors
qu'en 2006, le nom des principales sociétés du groupe est
modifié. Ainsi Cogema devient Areva NC et Framatome ANP est
renommée Areva NP. Avec plus de 350 entités légales
réparties dans le monde, le groupe devient la seule entreprise
multinationale en mesure d'intervenir sur l'ensemble de la chaîne
nucléaire presque partout dans le monde. En 2010, en tant que leader
10 Alain MALLEVRE, L'histoire de
l'énergie nucléaire en France de 1895 à nos jours,
[en ligne], consulté le 3 juillet 2016. URL :
http://arcea-dif.fr/bulletins/133/energie.pdf
n°1 sur son marché, la société
s'organise en « Business Groups » (BG), divisés
eux-mêmes en « Business Units », pour sectoriser ses
activités. Il est alors mis en place le pôle Mines,
axé sur la recherche, l'extraction et le traitement de l'uranium.
Les activités Amont s'occupent de la conversion et de
l'enrichissement de l'uranium avec la conception et la fabrication du
combustible des centrales nucléaires. Le pôle Réacteurs
et Services conçoit, fabrique, réalise la maintenance,
modernise et contrôle les réacteurs. Le BG Aval a pour
mission principale de recycler les matières valorisables (uranium et
plutonium), mais aussi d'emballer, de transporter et d'entreposer les
matières nucléaires usagées. Ses activités sont
aussi tournées vers l'assainissement des équipements et des
installations et la direction du démantèlement de sites
nucléaires. Enfin, le BG Energies Renouvelables travaille sur
les éoliennes avec Areva Wind, l'énergie solaire avec Areva
Solar, les bioénergies avec Areva Koblitz et réalise des
recherches dans l'énergie à base d'hydrogène avec la
société Hélion. Par ailleurs, le groupe est soutenu par
les BG Corporate, Services partagés et Ingénierie.
Ainsi, la Direction des Ressources Humaines et la Direction Recherche
& Développement (DRD) que nous verrons par la suite se situent au
sein du BG Corporate. L'expertise détenue par un seul groupe
dans le domaine du nucléaire civil est sans précédent. Il
y a derrière plusieurs dizaines d'années de recherches
scientifiques, de tests, de retour d'expérience, de pratiques et des
connaissances qui semblent percer les plafonds de l'imaginable.
Cependant, en 2015, avec près de 44 000
salariés, le groupe annonce une perte nette de 4,83 milliards d'euros
pour l'année précédente. Les retards pris sur la
construction d'une centrale nucléaire de type EPR (Evolutionary Power
Reactor) en Finlande, les dépréciations d'actifs sur
l'acquisition de la société canadienne UraMin dont les mines
d'uranium se sont révélées inexploitables ou encore les
difficultés rencontrées dans les activités sur les
énergies renouvelables sont les principales causes de cette perte.
Depuis, c'est toute une restructuration qui a été lancée.
Un Plan de Départ Volontaire (PDV) a été mis en place en
2016 pour permettre à 2700 salariés de quitter le groupe. Depuis
le 1er juillet 2016, deux entités distinctes ont
été créées dans le but de céder les
activités Réacteurs et Services en 2017 à EDF. Il
s'agit de New CO11 centrée sur les activités
liées au combustible nucléaire et d'Areva NP liée à
la construction, entretien et démantèlement des centrales
nucléaires. C'est cette
11 New Co est l'appellation temporaire de la
nouvelle structure d'Areva chargée de reprendre le coeur de
métier du groupe avec Areva Mines, Areva NC, Areva Projet et Areva
Business Support. New CO est aujourd'hui filiale d'Areva SA. Areva NP
étant cédé à EDF, Areva SA est chargé de
continuer et clôturer les projets en cours (comme la construction d'OL3,
le réacteur nouvelle génération en Finlande).
dernière qui va alors être rachetée par
EDF. Le système de fonctionnement en BG a été
remodelé et le groupe fonctionne aujourd'hui uniquement par BU,
l'objectif étant de décentraliser les activités aux
unités. Enfin, les sociétés Areva Énergies
Renouvelables, Areva TA et Canberra seront elles aussi revendues. Areva doit
maintenant se recentrer sur son coeur de métier. Ainsi, les
activités Mines, Amont et Aval seront conservées pour la maitrise
du cycle du combustible. Philippe KNOCHE, président du groupe annonce en
juin 2016 que « la structure financière solidifiée, l'outil
industriel renouvelé, ainsi que le renforcement du socle technologique
et d'innovation de NEW CO seront la base de cette stratégie
»12. En octobre 2016, le groupe Areva a 8 ans de carnet de
commandes devant lui, soit environ 33 milliards d'euros, ce qui lui permet de
rassurer les acteurs prenant part à son projet de restructuration. Il a
aussi d'autres arguments comme celui d'être le seul industriel à
maitriser, à ce jour, la vitrification et la fabrication du combustible
MOX13 à grande échelle pour l'industrie civile. Les
connaissances du groupe sont ainsi une des clés de réussite du
développement d'Areva. Pour mieux situer Areva et l'intégrer dans
un contexte plus global, il est important de comprendre les perspectives
d'avenir de son marché.
1.1.1.3. Une industrie qui n'a pas dit son dernier
mot
Les critiques sur l'énergie nucléaire sont
nombreuses et Areva est loin d'être la seule entreprise à
être la cible des attaques de mouvements écologiques. En 1979 un
premier incident grave intervient aux États-Unis14. Aucune
victime n'est cependant à déplorer. Puis en France un
deuxième incident grave se déroule à la centrale
nucléaire de Saint-Laurent en 1980. C'est le 26 avril 1986 que survient
la crise la plus importante du nucléaire civil. Suite à des
défauts de conception et des erreurs humaines, le coeur du
réacteur nucléaire n°4 de Tchernobyl rentre en fusion puis
explose, créant un nuage radioactif15. De là, les
questions sur la sûreté nucléaire ont commencé
à surgir en nombre et un sérieux doute a plané sur la
12 Philippe KNOCHE, Président du groupe
AREVA, Flash Areva n° 929 - Feuille de route Areva 2016-2020, 15
juin 2016
13 Combustible nucléaire performant
utilisant un mélange d'uranium et du plutonium (majoritairement
utilisé dans la technologie nucléaire militaire).
14 Institut de Radioprotection et de
sûreté nucléaire, Three Mile Island (États-Unis)
1979, [en ligne], consulté le
11 juillet 2016, URL :
http://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-accidents-
nucleaires/three-mile-island-1979/Pages/sommaire.aspx#.WAH2QcnS7K0
15 Bernard Bigot, Point sur les
conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl, [en ligne],
consulté le 11 juillet 2016, URL :
http://www.cea.fr/Documents/CONSEQUENCES%20SANITAIRES%20DE%20L%E
2%80%99ACCIDENT%20DE%20TCHERNOBYL.pdf
longévité d'une industrie potentiellement
dangereuse pour l'Homme. Après une reprise difficile, c'est en 2011 que
l'industrie subit son deuxième choc : Fukushima. Une nouvelle fois les
autorités, et l'industrie avec elle, sont prises pour cible. Cependant
le constat est là : la demande en électricité dans le
monde est en croissance de 2% chaque année, et ce jusqu'en 2035 au
moins. Or le secteur électrique est responsable d'un quart des
émissions de gaz à effet de serre. Les énergies fossiles,
estimées à haute émission de CO2, restent majoritaires
dans la production d'électricité, mais leur épuisement
futur et leur bilan carbone ne laissent pas d'autres choix aux Etats que de
trouver de nouvelles alternatives. Le nucléaire, estimé bas
carbone, ne représente que 12% de la production mondiale
d'électricité. Et selon l'AIE (Agence Internationale de
l'Énergie) le nucléaire permettrait en 2040 de réduire les
émissions annuelles de CO2 de 50% pour la Corée du Sud, de 8%
pour la Chine ou encore de 10% pour les États-Unis. C'est donc une des
nombreuses raisons pour laquelle une centaine de réacteurs
nucléaires pourraient être construits d'ici à l'horizon
203016. L'AIEA (Agence Internationale pour l'Énergie
Atomique) donne aussi son chiffre en 2014 : de 8% à 88% de
développement de l'énergie nucléaire d'ici à
203017. La Société Française d'Énergie
nucléaire (SFEN) est confiante à ce jour : « Sur un
marché en forte croissance, qui compte 430 réacteurs en
exploitation (autant de clients potentiels en biens et services) et 72 en
construction, les perspectives de croissance pour les entreprises de la
filière française sont excellentes et pérennes
»18. Chez Areva les prévisions sont aussi à la
hausse (cf. Annexe 1: Prévision de croissance de la production
d'électricité par l'énergie nucléaire dans le monde
en 2007. p.95). Ainsi, malgré les controverses connues du
nucléaire, ce dernier apparait aujourd'hui comme une alternative
sérieuse pour pallier à un besoin croissant
d'électricité tout comme le besoin de diminuer les
émissions de CO2. Par ailleurs, le vieillissement des centrales (cf.
Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires p.96)19 va
amener le parc existant à se renouveler. Certaines seront
démantelées, d'autres verront leurs composants remplacés.
Dans sa publication « Énergie : les clinquantes prochaines
années » (2015), l'OECD souligne l'arrivée de la
16 Sabrina Tiphaneaux, Le marché mondial
du nucléaire et ses perspectives - Quels sont les groupes les mieux
positionnés pour tirer profit de l'évolution du marché
?, Les Echos Etudes, [en ligne], consulté le 25 juillet 2016, URL :
https://www.lesechos-etudes.fr/etudes/energie-services-collect/etude-marche-mondial-nucleaire/#
fndtn-presentation
17 AIEA, Rapport d'ensemble sur la technologie
nucléaire pour 2015, 13 juillet 2015, [en ligne], consulté
le 25 juillet 2016, URL :
https://www.iaea.org/About/Policy/GC/GC59/GC59InfDocuments/French/gc59inf-2_fr.pdf
18 Société Française
d'Énergie nucléaire, Le nucléaire dans le monde,
sfen.org, [en ligne], consulté le
25 juillet 2016, URL :
http://www.sfen.org/fr/lenergie-nucleaire/le-nucleaire-dans-le-monde
19 Sophie Fabrégat, Vieillissement du
parc nucléaire : la prolongation de la durée de vie, un enjeu
stratégique et économique, Actu-environnement, [en ligne],
consulté le 25 juillet 2016, URL :
http://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/nucleaire/viellissement-parc-centrales-nucleaires-prolongation.php4
nouvelle génération de réacteurs plus
sûrs et plus performants. Pour elle, l'avenir du nucléaire se joue
dans le perfectionnement de la technologie, dans sa viabilité
commerciale et dans son acceptation par le public avec les sujets liés
à la sûreté et la sécurité. Or, la
sûreté, la sécurité, le perfectionnement de la
technologie sont directement liés au monde de la recherche et des
sciences. La connaissance y prend une place prépondérante. La
gérer semble fondamental. Avant d'aller plus loin, il nous est
nécessaire de creuser sa définition.
1.1.2. La connaissance créer de la richesse
Dans un premier temps, nous allons regarder plus
précisément pourquoi nous parlons de connaissance et non de
savoir, de savoir-faire ou de compétence.
1.1.2.1. Éviter les confusions
De nombreuses définitions existent et les livres et
ouvrages scientifiques tentent tant bien que mal de donner une
définition des différents termes pouvant exister. Nous
retiendrons ici les principaux : le savoir, le savoir-faire, la
compétence et la connaissance. Dans ce mémoire, nous aborderons
le thème de la connaissance et utiliserons parfois le terme de «
savoir ». La principale distinction entre les deux est que la connaissance
est liée à un individu tandis que le savoir est lié
à un groupe. Par exemple, un savoir est « certifié par une
autorité institutionnelle ou morale »20. Ainsi, le
savoir s'inscrit dans le temps. Il est en quelque sorte figé par la
certification donnée par l'autorité. Tandis que la connaissance
est en mouvement puisqu'elle est liée à une personne. Ainsi, les
communautés d'experts ont déterminé le « savoir
» sur le comportement des atomes d'uranium tandis qu'un expert a la «
connaissance » du comportement des atomes d'uranium.
Cependant, il est fréquent de confondre la
connaissance avec le savoir-faire ou la
compétence. Le savoir-faire permet à un
individu d'effectuer une tâche en sachant quoi faire. Par exemple, la
réalisation d'une soudure sur un matériau. La
compétence, elle, englobe un ensemble de savoir-faire, de
savoir-être et de connaissances permettant d'atteindre un objectif plus
large que la réalisation d'une tâche. Exemple : la
réparation des fuites sur les matériaux par différents
procédés comme le soudage. En effet, d'après un expert en
gestion des
20 Brice Mallié, Transformer le savoir
en profit - Enjeux et bénéfices du knowledge management,
Village Mondial, Pearson Education France, Paris, 2003, p.30
connaissances chez Areva, la compétence est la «
capacité pour un individu à tenir un poste », comme celui de
« Soudeur ».
Ainsi, nous n'aborderons pas la notion de
compétence, car elle se rattache plus
généralement aux notions de poste. Les compétences
sont le « comment-faire » tandis que les connaissances
sont le « savoir-pourquoi ». Il est donc possible de savoir
quoi faire sans savoir comment le faire. Et il est possible
de savoir comment faire sans savoir pourquoi. C'est la raison
pour laquelle, la notion de connaissance est plus généralement
liée à l'idée de conceptualisation et au domaine de
l'expertise tandis que la compétence est liée à un
poste.
1.1.2.2. Replacer le sujet dans son contexte
Pour situer un peu mieux ce qu'est la connaissance, il nous
faut la replacer sur une échelle de valeurs permettant de mieux la
différencier des autres termes s'y rapprochant. Appelé «
spectre » ou « pyramide » du savoir, le schéma ci-contre
donne une première vue claire et synthétique de ce dont nous
allons parler tout au long de ce mémoire. Ainsi, la donnée
constitue la base de l'échelle. C'est une notion « factuelle,
neutre, objective, souvent unitaire et autonome »21. Par
exemple : « 1650 MégaWatt ». C'est factuel et cela ne porte
pas de sens. L'information est quant à elle marquée
|
Figure 1 - La pyramide du savoir
|
|
par la subjectivité de son émetteur, car elle
regroupe plusieurs données pour leur donner un sens avec un objectif
précis. Ainsi : « Les réacteurs de troisième
génération ont une puissance de 1650 MW ». En
intégrant une donnée dans un contexte et en lui donnant un sens,
nous créons de l'information. Enfin, la connaissance est
l'interprétation cognitive d'une masse d'informations. La personne qui
la détient la modifie et la fait évoluer en fonction de ses
nouveaux besoins. En accumulant des données, nous créons de
l'information. En accumulant des informations, nous les intégrons dans
un contexte et nous leur donnons un sens grâce à
21 Brice Mallié, Transformer le savoir en
profit - Enjeux et bénéfices du knowledge management,
Village Mondial, Pearson Education France, Paris, 2003, p.27
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Page 13 sur 113
Première partie - Apprivoiser la connaissance
nos capacités cognitives. Nous transformons ainsi les
informations en une connaissance La connaissance contient ainsi de
l'information ayant un sens et un contexte particulier.
Il y a alors plusieurs types de connaissance. En 1966, Polanyi
ou encore Nonaka et Takeuchi en 1995 (experts en Knowledge Management)
distinguent deux types de connaissances : celles qui sont tacites et celles
explicites.
Les connaissances explicites sont celles qui ont
été formalisées sous forme de textes, vidéos, sons
ou images. Elles peuvent être facilement transmises d'un individu
à un autre. Les données qui la composent sont clairement
identifiables. Ce sont en quelque sorte des connaissances « conscientes
» comme, par exemple, lorsqu'un expert crée un document pour
démontrer la résistante d'un matériau. Ces connaissances,
si elles sont bien organisées, peuvent être stockées et
réutilisées pendant plusieurs dizaines d'années. Elles
sont rendues statiques. Certaines seront utiles dans un avenir proche par
l'expert lui-même ou par ses pairs. D'autres ne seront utiles que dans
10, 20 ou 30 ans du fait qu'elles ne peuvent être exploitées, par
exemple, en raison de la non-compatibilité d'un nouveau matériau
avec d'autres. Si un expert trouve une compatibilité possible dans 20
ans, alors le stockage de la connaissance aura été très
profitable. Son utilisation la rendra pendant un temps, non plus statique, mais
dynamique.
Les connaissances tacites sont celles qui sont les
plus difficiles à définir. Jean-François Ballay le
reconnait, la définition de la connaissance tacite « pose
même, à dire vrai, un sérieux problème
épistémologique, trop peu souligné »22.
Cependant, dans sa tentative de définition, l'auteur parle de «
connaissance incorporée »23. La connaissance tacite est
donc inhérente à un individu. Elle lui est indissociable et
regroupe ses aptitudes, habilités et intuitions. Elle est difficile
à traduire et fait souvent référence à une
situation particulière. Elle doit être remise dans son contexte.
Son transfert d'un individu à un autre n'est donc pas
réalisé de façon formelle. Elle se transmet
généralement dans l'action via des groupes de travail, des
communautés de savoir, car cela nécessite que les interlocuteurs
aient un niveau de connaissance relativement proche. Ce type de connaissance
est d'ailleurs souvent inconscient. L'expert lui-même qui transmet cette
connaissance de façon naturelle ne la reconnait pas
nécessairement comme telle. La connaissance est vivante. À ce
titre : « Sans cette conception
22 Jean-François Ballay, « Tous
managers du savoir ! La seule ressource qui prend de la valeur en la partageant
», Editions d'Organisation, 2002, p.18
23 Idem
vivante de la connaissance, il est impossible d'expliquer ce
qui se passe dans les situations professionnelles d'action, de communication,
de coopération, de décision, de production », nous dit
Jean-François Ballay.24
Pour appuyer cette vision, l'auteur précise que les
modalités de la connaissance doivent être vues sous deux angles :
une version statique et une autre dynamique. C'est d'ailleurs ce que nous
pouvons voir lorsque nous mettons en parallèle les connaissances
explicites (qui ont tendance à être stockées, tout du moins
inscrites sur un support et figées dans le temps et l'espace) et tacites
(sans cesse en mouvement, vues comme dynamique). La connaissance est donc soit
stockée soit dans un flux dynamique. Ces deux formes ne doivent pas
être sous-estimées.
La connaissance revêt ainsi plusieurs formes et se
définit comme le traitement cognitif dynamique d'une accumulation de
données ayant un sens dans un contexte précis.
1.1.2.3. Les enjeux de la connaissance
Pour le domaine du nucléaire, la quantité de
données qui a été cumulée depuis plusieurs
générations est colossale. Il est donc nécessaire de la
conserver. De plus, son avenir étant basé sur les recherches dans
la sécurité, la sûreté et le développement
des nouvelles technologies, il est capital de la développer en faisant
appel aux nouvelles générations. Le domaine du nucléaire
est fondé sur la connaissance. Cette situation est aussi vraie, mais
dans une moindre mesure, pour l'ensemble des autres industries. En effet,
depuis l'ère post-industrielle, les métiers ont
évolué, le mode de fonctionnement des entreprises a
changé. Déjà en 1996, la différence entre les
chiffres de capitalisation boursière des entreprises et la valeur de
leurs actifs physiques et matériels était très importante.
Cette différence était composée de perspectives de
croissance, de gains futurs, et de biens dits « immatériels ».
Ces derniers sont alors composés pour partie, de la connaissance que
possède l'entreprise [MALLIE (2003, p.15-16)]. Nous pouvons donc
facilement affirmer que la connaissance est aujourd'hui valorisée
financièrement de façon indirecte. Par exemple, Microsoft avait
en 1996 une valeur boursière totale de 85,5 milliards de dollars et
comptabilisait seulement 930 millions d'actifs
24 Ibid
physiques et matériels (locaux,
équipements...)25. La différence étant donc due
aux éléments que nous avons cités plus haut. De plus, la
part des métiers dit « intellectuels » faisant appel à
la manipulation de concepts et d'idées est en forte hausse dans notre
société post-industrielle. Les métiers de
l'ingénierie, de l'innovation ou de la créativité sont en
pleine croissance. Les technologies avançant, les recherches
scientifiques sont poussées toujours plus loin et sont toujours plus
nombreuses. L'apparition récente (une vingtaine d'années) des
métiers de la Gestion des connaissances (GC) en est d'ailleurs un
symptôme marquant. Si ces métiers sont en croissance, c'est que la
demande est bien présente. Pour Brice Mallié (2003), « le
retour sur investissement du Knowledge Management [ou Gestion des
Connaissances] n'est plus à démontrer »26. En
effet, d'après lui, deux types de gains se dégagent d'une
démarche de GC. Le premier est lié aux économies directes
facilement identifiables permettant une optimisation de la connaissance au sein
de l'entreprise. Ainsi, des gains de productivités de 13% ont
été observés au centre d'appels clients de 3M suite
à la mise en place d'un outil de GC. Cela a permis aussi une baisse de
35% en besoins de formation des téléconseillers. Avec un simple
intranet permettant l'échange de bonnes pratiques entre techniciens,
l'entreprise Xerox économise plus de 7 millions de dollars chaque
année. L'entreprise Dow Chemical, quant à elle, a vu la valeur de
ses brevets augmenter de plus de 400% grâce à de nouvelles
méthodes de gestion des connaissances. Le deuxième type de gains
est plus indirect. Il est lié à un changement de culture au sein
de l'entreprise avec une meilleure communication, des échanges de bonnes
pratiques et un développement accru des compétences. Ainsi
d'après les responsables de l'entreprise Buckman, les ventes de nouveaux
produits de l'entreprise ont augmenté de 50% et les
bénéfices par associé de 93% après la mise en place
d'un projet de GC. Brice Mallié identifie alors la potentialité
d'une autre utilisation de la connaissance : celle dirigée vers la
création de valeur directe. C'est-à-dire, la « vente »
de la connaissance. Celle qui est directement dirigée vers les clients.
Il montre que le savoir peut être utilisé comme une arme
commerciale et marketing et qu'il peut aussi être sujet à la vente
par des « produits » comme le conseil, la formation, les brevets, les
supports informatiques, etc... Chez Areva, cette « vente » de
connaissance existe déjà sous une forme indirecte. En effet, les
experts sont souvent à l'appui des projets de vente. Ils « vendent
» alors leur expertise aux clients en les accompagnant. Le client veut
être suivi et soutenu. Il veut avoir l'assurance, d'autant plus
25 Brice Mallié, Transformer le savoir
en profit - Enjeux et bénéfices du Knowledge management,
Village Mondial,Pearson Education France, Paris, 2003, 236 p.
26 Idem
dans le nucléaire, que son produit est sans danger et
que le fournisseur maitrise parfaitement les produits et services. Ce n'est
plus le client passif, apolitique et relativement compréhensif qui
existait dans les années 1970. Le client d'aujourd'hui est exigeant, car
le milieu économique est exigeant. Il veut comprendre comment et
pourquoi il lui est préférable de choisir tel produit ou service
plutôt qu'un autre. Ainsi les entreprises doivent prendre conscience de
l'importance de la maitrise et du développement de leurs connaissances
pour répondre aux attentes du client. Tôt dans la Gestion des
Connaissances, la notion de business apparait. Dès 1994, Stan Davis et
Jim Botkin mettent en avant le caractère avantageux à fournir des
informations à ses clients. Pour eux, les entreprises qui
réussiront le mieux seront celles qui auront réussi à
transformer des informations en savoir. Aujourd'hui, les entreprises
spécialisées sur la mise à disposition d'experts dans un
domaine de connaissance spécialisé pour les entreprises se sont
développées. L'entreprise Experconnect27, dont Areva
est cliente, en est un bon exemple. Pour Areva, l'enjeu de la connaissance est
primordial. En effet, comme nous l'avons vu, le secteur du nucléaire est
particulièrement rattaché à la gestion de la connaissance.
De plus, d'après le Directeur des Ressources Humaines du groupe,
l'innovation pour Areva est inévitable, car l'énergie atomique
est aujourd'hui plus chère que d'autres sources d'énergie. Les
études réalisées par Jean-François Ballay ou
Jean-Louis Ermine, deux experts en GC, sur le domaine du nucléaire
montrent à quel point ce secteur est en besoin. La rareté des
connaissances au sein du nucléaire amplifie ce phénomène
et permet aux entreprises de se distinguer sur un marché
concurrentiel.
Dans le secteur du nucléaire, il peut être vital
pour une entreprise de conserver les connaissances acquises depuis plusieurs
générations. Or, les départs à la retraite et
l'arrivée des nouvelles générations peuvent être
synonymes de perte de savoir. Il est donc fondamental de s'intéresser au
transfert de connaissances (TC).
27 Experconnect propose aux entreprises
d'accéder à des compétences de jeunes retraités
souhaitant apporter leurs connaissances (pointues ou rares) à des
projets de haute valeur ajoutée dans l'industrie ou les services.
1.1.3. Le transfert des connaissances est capital pour
subsister
1.1.3.1. Approche théorique du processus de
transfert des connaissances
À ce propos, Nonaka et Takeuchi ont identifié
plusieurs flux de connaissances en distinguant l'explicite du tacite.
Désignés sous le sigle SECI ([Nonaka 2000]), les deux experts ont
identifié quatre mouvements : la socialisation, l'externalisation, la
combinaison et l'internalisation qui se résument dans le schéma
suivant :
Figure 3 : Le processus de capitalisation et de partage
des connaissances
Socialisation
Externalisation
Connaissances explicites
Connaissances tacites
Combinaison
Connaissances explicites
Connaissances tacites
Internalisation
Nous identifions ici deux méthodes pour
transférer des connaissances. La première est celle de la
socialisation. Jean-Louis Ermine, président de l'Association
pour la gestion des connaissances dans la société et les
organisations, parle de « transfert direct »28lorsqu'un
expert sénior forme un expert junior par un accompagnement. Le transfert
se fait lorsque le deuxième s'imprègne du premier. Ce processus
est aussi rencontré dans les réseaux, les différents types
de communautés ou encore les équipes projet. La deuxième
façon de transférer est le « transfert indirect
»29 décomposé en trois sous-processus.
L'externalisation est basée sur l'explicitation de la
connaissance. On externalise une connaissance qui était tacite pour
qu'elle devienne explicite et ainsi exploitable par d'autres. C'est le point de
rupture par lequel passe toute connaissance explicite. Il n'existe pas de
connaissance explicite avant qu'elle ne soit passée par le stade de
l'externalisation. Ce qui signifie que la connaissance tacite est à
l'origine de la connaissance explicite. Cette dernière a
été exprimée pour la première fois avec
l'arrivée du langage et des codes puis lors des premiers écrits.
Ce point est à retenir, car il est fondamental pour la suite du
mémoire. Il est cependant impossible d'expliciter toutes les
connaissances, car comme nous l'avons vu précédemment, certaines
d'entre elles sont totalement inhérentes aux personnes. Pour
externaliser une connaissance, on peut la transcrire sur un support. Cela ne
demande aucune méthode ni savoir-faire et peu de
28 Jean-Louis Ermine. Management et
ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes.
Hermes-Lavoisier, 2008, p.20.
29 Idem
moyens. Cette méthode est donc simple et applicable par
un grand nombre d'individus. Une deuxième méthode consiste
à modéliser la connaissance via des codes et des langages
spécifiques demandant plus de ressources - comme des logiciels
informatiques - que la transcription simple. Cette méthode demande une
expertise dans le domaine de la gestion des connaissances pour être
pleinement appliquée. Le second processus de transfert indirect des
connaissances est celui de la combinaison. C'est ici que se
transmettent les connaissances explicitées sur un support (papier,
vidéo, audio, ...). Les principaux lieux de combinaison des
connaissances sont les intranets, les Sharepoints ou les disques réseau.
Le troisième sous processus est celui de l'appropriation. C'est
lorsqu'un individu acquiert une connaissance explicite qu'il la travaille pour
qu'elle devienne sienne. En quelque sorte, il code la connaissance pour pouvoir
résoudre les situations problématiques qu'il rencontre. Il
intègre la connaissance. On retrouve ce processus
généralement dans les formations ou dans les laboratoires dans
lesquels les scientifiques expérimentent un savoir théorique.
Dans son ouvrage sur l'ingénierie des
connaissances30, Jean-Louis Ermine met en avant le système
AIK (cf. Annexe 3 : Modèle systémique d'un Système de
Gestion des Compétences p.97)31. « À »
étant le réseau d'acteur dans l'entreprise, « I » le
système d'information et « K » le patrimoine de connaissance.
Ce système montre l'importance des flux de connaissances qui
résultent de l'interaction des acteurs avec le système
d'information au sein des entreprises. En effet, ces interactions créent
un patrimoine de connaissances (K) qui s'accumule chaque jour. K ne pourra
alors créer de la valeur que s'il revient vers A. Le flux de
connaissances est alors crucial. La connaissance est stérile si elle ne
circule pas. Sans flux de connaissances, pas de création de valeur.
C'est pourquoi tout au long de ce mémoire nous essaierons de nous
focaliser uniquement sur le processus de transfert des connaissances qui est
une pièce importante du puzzle de la gestion des connaissances.
30 Jean-Louis Ermine, Management et
ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes.
Hermes-Lavoisier, Paris, 2008, 212p.
31 AIK : A = réseaux d'acteurs ; I =
Système d'information ; K = Le patrimoine de connaissance
1.1.3.1. Les enjeux du transfert de la connaissance
Comme nous l'avons vu précédemment, la
réussite du secteur nucléaire tient en grande partie aux
recherches sur la sûreté, la sécurité et les
nouvelles technologies. Les entreprises doivent ainsi continuer leurs
recherches. Pour cela, elles doivent maintenir et développer leurs
connaissances. Le départ à la retraite, suivi de près par
la réorganisation de tous types (fusion, acquisition, externalisation,
recentrage sur le coeur de métier, changement de projet, etc...) sont
les deux principales causes de perte de savoir pour les entreprises. Et ces
deux facteurs touchent particulièrement le domaine du nucléaire.
Avec une croissance rapide du marché dans les années 1970-1980,
les embauches ont été importantes, ce qui a créé
une pyramide des âges hétérogène. Au sein d'Areva,
les experts de niveau 3 (les fellows), qui détiennent les connaissances
les plus pointues au sein du groupe, sont plus de 69% à avoir plus de 58
ans en 2015. Il peut paraitre logique que ce soient les plus âgés
qui détiennent un plus grand nombre de connaissances. D'ailleurs, cette
tendance est aussi observable au sein du CEA puisque la majeure partie des
experts de niveau 4 (correspondant au niveau 3 chez Areva) ont entre 56 et 62
ans32. Or, ce sont aussi eux qui sont les plus proches de la
retraite. L'effet « papy-boom », que rencontre actuellement le
secteur nucléaire, accroit considérablement le risque de perte de
connaissances pour l'entreprise. Les réorganisations sont aussi un
facteur de cette perte. Lors des réorganisations, le risque de perdre
les plus qualifiés est d'ailleurs bien connu. Chez Areva, c'est plus de
2600 départs qui ont été enregistrés depuis
l'annonce du Plan de Départ Volontaire (PDV) dont des experts hautement
qualifiés. Si aucun processus de transfert de connaissances n'est mis en
place, ce sont des domaines entiers de connaissances que l'entreprise peut voir
disparaitre. De plus, comme nous l'avons vu, si la connaissance reste
figée, elle se stérilise. Il ne suffit donc pas de gérer
uniquement le transfert de connaissances lors des départs, mais durant
toute la carrière des détenteurs de connaissances. Il s'agit donc
de continuer les recherches et de les partager sans cesse pour que la
création de valeur se réalise. La concurrence sur le secteur
nucléaire est bien présente et les entreprises doivent se
démarquer. Pour cela, elles doivent répondre du mieux possible au
client en l'accompagnant. Transférer de la connaissance n'est pas un
transfert de marchandise. Sans transfert de connaissances, l'entreprise sera
dans une situation de perte constante de connaissances. Si ces dernières
sont critiques, et que leur perte est avérée, le chiffre
d'affaires peut être impacté et le coût financier pour
retrouver les connaissances acquises durant plusieurs années sera
32 Olivier MUSSEAU (CEA/DEN/DRH), L'organisation de
l'expertise scientifique et technique à la Direction de l'Énergie
nucléaire du CEA, Revue Générale Nucléaire,
numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.22-28
important. D'autres situations nécessitent un transfert
de connaissances. Par exemple, lorsqu'un expert évolue et change de
domaine de travail, il doit transférer ses connaissances à un
autre. Sinon, l'entreprise sera à nouveau en perte de connaissances.
Cette situation moins fréquente est généralement peu
abordée, car les risques encourus par l'entreprise sont moins
importants. Le salarié reste dans l'entreprise et de ce fait, le
transfert de connaissances semble toujours possible. Cette situation est en
fait perverse. La connaissance étant en partie dynamique, cette
dernière sera nécessairement perdue si elle n'est pas
partagée ou mise en mouvement par l'expert.
Nous avons pris conscience maintenant que la connaissance est
un facteur important sur l'échiquier de la performance des entreprises
et en particulier celle du nucléaire. Son transfert entre les
différents acteurs d'une organisation est synonyme de création de
valeur. Il nous faut alors dès à présent identifier les
acteurs et les différents moyens de transfert des connaissances
possibles.
1.2. Les experts possèdent la connaissance
1.2.1. Les experts sont les acteurs clés de
l'industrie du nucléaire
1.2.1.1. Pourquoi l'expert : définition et
différenciation
En soi, la connaissance ne peut être
gérée. Peter Drucker disait « On ne peut pas gérer la
connaissance. La connaissance est entre deux oreilles, et seulement entre deux
oreilles ». Cette phrase montre à quel point la connaissance peut
être inhérente aux individus. Ainsi, il est important de
déterminer les personnes qui détiennent la connaissance pour
pouvoir réaliser un transfert. Dans ce mémoire, nous souhaitons
cibler en priorité les personnes pour lesquelles l'enjeu du transfert de
connaissance est le plus fort. Cela amène à se diriger vers les
populations qui détiennent un haut niveau de connaissance
potentiellement stratégique pour leurs entreprises. Il est alors
possible d'acquérir de la connaissance de plusieurs manières
comme nous l'avons vu précédemment (cf. Figure 2 : Le processus
de capitalisation et de partage des connaissances). Ce processus de
capitalisation et de partage se réalise notamment lors
d'expériences où les informations ayant un sens dans un contexte
donné sont capitalisées. Et la personne qui capitalise le plus de
connaissances semble être l'expert. En effet, Niels
Bohr, physicien danois, définit l'expert comme «
une personne qui a découvert par sa propre expérience douloureuse
toutes les erreurs que l'on peut faire dans un domaine précis
»33. L'idée de niveaux élevés de
performance de par sa pratique prolongée dans un domaine donné
est centrale (Ericsson et al., 1993)34. L'expert est aussi
un individu reconnu comme légitime par la
société35 et selon Jean Baechler (Membre de
l'Académie des Sciences Morales et Politiques), cette reconnaissance
doit aussi se faire au niveau de ses pairs36 et c'est ce qui fait sa
légitimité37. Ainsi, on ne s'autoproclame pas expert.
Il doit par ailleurs être en capacité de répondre à
une question précise inhérente à son domaine d'expertise.
Pour les entreprises, cela doit leur permettre de s'adapter aux
particularités qu'elles rencontrent dans un monde globalisé et
normalisé. À ce titre, en mai 2003 la norme AFNOR NFX 50-110 a
défini l'expertise comme une démarche permettant
l'élaboration d'avis, ou de recommandations avec comme objectif de
prévoir, d'innover ou d'expliquer l'origine d'évènements
ou de catastrophes et d'établir des responsabilités ou
d'évaluer des dommages, des objets ou des services. Le travail d'analyse
et la compréhension des origines des phénomènes
grâce à la connaissance acquise lors de ses expériences
sont donc le coeur de l'expertise. Une expertise est alors « l'expression
d'une connaissance formulée en réponse à une demande
» 38 s'inscrivant dans un processus de décision. L'expert n'est
donc pas à confondre avec le spécialiste ou le savant. Le
spécialiste travaille dans un domaine déjà maitrisé
techniquement. Les situations que ce dernier rencontre sont relativement
simples. Il obtient une réponse immédiate grâce à la
mémoire des évènements. Les réponses sont
préétablies. Quant au savant, il intervient pour des
problèmes et des questions générales et universelles. Il a
pour objectif principal la création de connaissances et mobilise ce que
Le Boterf appelle le savoir-faire cognitif39. Ainsi, ce qui
distingue l'expert du spécialiste et du savant, ce sont les sujets
33 Robert Coughlan, Dr. Edward Teller's
Magnificent Obsession, LIFE magazine (6 September 1954), p. 62, [en
ligne], consulté le 25 juin 2016, URL :
https://books.google.fr/books
34 Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert
en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux
de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.
35 Philip Schlesinger, Frédéric
Junqua, « Expertise, politiques publiques et économie
créative : le cas britannique », Actes de la recherche en sciences
sociales2012/3 (n° 193), p. 80-95.
36 Académie des technologies, Charte de
l'expertise de l'Académie des technologies, 4 juillet 2012, [en
ligne], consulté le 2 août 2016, URL :
http://academie-technologies-prod.s3.amazonaws.com/2014/08/22/15/56/26
/231/CHARTE_DEF_vot_e_le_4_juillet_2012_.pdf
37 Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert
en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux
de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.
38 Académie des technologies, Charte de
l'expertise de l'Académie des technologies, 4 juillet 2012, [en
ligne], consulté le 2 août 2016, URL :
http://academie-technologies-prod.s3.amazonaws.com/2014/08/22/15/56/26
/231/CHARTE_DEF_vot_e_le_4_juillet_2012_.pdf
39 Jean-Philippe Bootz, Comment définir
et gérer l'expert ?, [en ligne], consulté le 25 juin 2016,
URL :
http://www.agecso.com/wp/wp-content/uploads/2016/01/BourbaKeM-5.pdf
relatifs à la capitalisation et aux transferts de
connaissances d'experts qui lui sont réservés40. De
plus, leur mission est en partie d'apporter une réponse adaptée
à une question particulière. Il apporte en quelque sorte, des
outils d'aide à la décision. Et pour le domaine du
nucléaire, où chaque décision est surveillée,
où chaque information est regardée de près, où il
n'est laissé aucune place à l'erreur, l'expert tiens un double
statut stratégique. Il est à la fois acteur de
développement, d'innovation, de recherche de performance, tout en
étant un « outil » d'aide à la décision. Enfin,
l'expert est celui qui détient des connaissances et compétences
particulières par rapport aux autres membres d'une entreprise. Il fait
donc l'objet d'une attention particulière dans le champ de la gestion
des compétences41.
C'est donc pour ces raisons que ce mémoire porte
exclusivement sur la population des experts.
1.2.1.2. Les experts chez Areva
1.2.1.2.1. Des experts opérationnels
Pour Areva, un expert est un collaborateur qui est reconnu
comme ayant une expertise dans un domaine en particulier. Il est
missionné avec un objectif comme celui de résoudre un
problème ou de fournir des conseils avisés. Enfin, il est
évalué suivant la réalisation de sa mission ce qui fait
alors sa réputation. Il est distingué de l'expertise qui est la
compétence ou la connaissance dans un domaine précis. Elle peut
être individuelle ou collective, utilisée pour la conception et le
développement de nouvelles offres ou dans la gestion de problèmes
divers. Pour Areva, l'expertise est une accumulation d'expérience qui se
transfère soit « au fil de l'eau », par le tutorat, le
contrôle par les pairs, soit en mode projet par la formation, les retours
d'expériences, etc... La meilleure façon de construire
l'expertise est alors de garder les experts dans un même domaine. Il y a
quatre règles pour cela : La première est de permettre à
l'expert de rester focalisé sur un domaine particulier en évitant
qu'il se disperse dans d'autres domaines. La deuxième est de
développer le réseau pour lui donner la possibilité de
savoir où son expertise est nécessaire à l'instant «
t ». L'expert doit aussi développer sa collaboration afin qu'il
puisse être là où c'est nécessaire en tant que
véritable expert. Le développement des
40 Jean-Philippe Bootz, Eric Schenk, L'expert
en entreprise : proposition d'un modèle définitionnel et enjeux
de gestion, Management & Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.
41 Idem
partenariats est la quatrième règle afin de
travailler avec les plus grands experts dans le monde. Un expert est donc une
personne ayant de l'expérience et des connaissances dans un domaine
précis travaillant potentiellement collectivement, pour la
création de nouvelles offres ou la résolution de
problèmes. Nous observons que la définition des experts est
difficile à maitriser. Elle peut être différente selon le
contexte dans lequel se situe l'expert.
Les principales différences à noter entre la
définition de l'expert au sein d'Areva et la définition
donnée dans le monde scientifique s'expliquent par la
nécessité de donner un rôle opérationnel à
l'expert chez Areva. Dans le monde scientifique, l'expert est consulté
sur des questions parfois plus théoriques pour faire avancer la
recherche par exemple. La notion d'analyse est mise en avant. Chez Areva,
l'expert est orienté « terrain » avec la conception de
nouvelles offres pour les clients, leur accompagnement ou la gestion des
problèmes présents au sein des unités. Il est investi
d'une mission particulière.
Pour comprendre qui est aujourd'hui un expert chez Areva, il
est important de prendre conscience de l'évolution de son rôle au
sein de l'entreprise. Dans les années 1980, les experts étaient
un groupe de spécialistes en support au développement des
affaires et orientés sur des produits à haute valeur
ajoutée. Leur responsabilité n'était pas
nécessairement définie et la reconnaissance passait par le titre
d'expert. Dans les années 1990, où chacun était un
gestionnaire, ils étaient axés sur les technologies et les
produits et ils avaient souvent des responsabilités managériales.
Ils étaient reconnus de par leur fonction. Puis dans les années
2000, l'expert était celui qui réalisait une troisième
carrière après celle de management et de gestion de projet. Il
était orienté technologie et étroitement lié
à la Recherche & Développement ou à la gestion de
l'ingénierie. Il était identifié de par son rôle au
sein de l'organisation. Enfin, depuis les années 2010, la
carrière d'expert prend une identité bien spécifique. Elle
se différencie de celle du management ou de la gestion de projet. Elle
est à l'origine d'un choix à réaliser qui se distingue et
non une suite de carrière après le management, due à une
longue expérience dans un domaine. Il est orienté aujourd'hui
innovation et technologie et se distingue par les missions qu'il effectue. Par
ailleurs, une fiche appelée « Expert model » (cf. Annexe 4 :
La fiche « Expert model » AREVA p.98) clarifie les rôles et
responsabilités de l'expert qu'il doit s'efforcer de remplir au fur et
à mesure de sa carrière. Ses objectifs, qualifiés de
« SMART » sont décomposées en 5 grands domaines. Ainsi,
il est chargé d'accompagner les activités de l'entreprise. Cet
objectif peut se décliner concrètement par la contribution
à des appels d'offres afin de résoudre des problèmes
techniques, la collaboration avec les autorités de sûreté
nucléaire ou l'apport de conseils
scientifiques à des équipes projets par exemple.
L'expert participe aussi à l'innovation en générant de
nouveaux concepts, en évaluant les innovations au sein de l'entreprise
ou encore en déposant des brevets. L'expert doit également
communiquer au sein de son réseau. Ainsi, il publie des articles en
interne ou en externe pour améliorer l'image scientifique et technique
d'Areva. Il participe à des conférences nationales ou
internationales et développe sa visibilité au sein d'Areva comme
à travers le monde. Il est actif sur les réseaux internes comme
externes pour le soutien des communautés techniques ou scientifiques. Il
est aussi chargé de soutenir la stratégie de développement
d'Areva. Il planifie des processus pour le développement de l'expertise,
il assure des vieilles technologiques et s'implique dans la modélisation
et la simulation pour la capitalisation des connaissances. Enfin, l'expert a
une mission de transfert des connaissances vers les nouvelles
générations. Cela se traduit par le développement de
formations, des relations avec des écoles et des laboratoires ou encore
l'accompagnement des doctorants dans leurs travaux. L'expert Areva est donc
tourné vers des missions « opérationnelles ».
1.2.1.2.2. Spécificités et processus
Nous le voyons, entre être expert chez Areva et
être expert en dehors du groupe, il y a des différences. En dehors
d'Areva, un expert n'a pas à candidater pour l'être (il est
défini expert en étant reconnu par ses pairs, en appartenant
à un groupe d'experts). Chez Areva il est en revanche nécessaire
de respecter un processus défini pour prétendre au statut
d'expert. Une campagne de nomination est donc lancée tous les deux ans.
L'objectif est double. Il s'agit de mettre à jour
régulièrement la liste des experts, ce qui montre que ce type de
carrière n'est ni définitif, ni exclusif. Mais cela permet aussi
à l'entreprise de vérifier que les différents domaines
d'expertise lui sont toujours utiles. Ainsi en 2014, il existait 15 domaines
d'expertise, en 2015 il n'en existait plus que 14. Comme nous le voyons,
l'expertise ne reste pas figée dans le temps. Elle évolue en
fonction des besoins de l'entreprise. La responsabilité de la
candidature est donnée au manager qui la préremplit de son
initiative. Si le collaborateur est en accord avec cette dernière, il
complète le document. La décision de passer expert doit donc
être motivée et justifiée. Il est important ici de
souligner la notion de volontariat des candidatures. À noter par
ailleurs qu'à ce jour, Areva ne distingue pas le statut d'expert par une
reconnaissance financière. Cependant, tous ne peuvent prétendre
à ce statut puisque cela nécessite de posséder une ou des
connaissances dans les 14 domaines scientifiques et
techniques identifiés par Areva à ce jour. Un
comité donnera ensuite son avis sur la pertinence des dossiers en
validant ou non la candidature. Comme nous avons pu le voir
précédemment, la carrière d'expert devient de plus en plus
le résultat d'un choix et non d'une situation subie. Ainsi, dans sa
politique, Areva a distingué trois niveaux d'experts,
précédés d'un niveau « spécialiste » qui
permet de se préparer à devenir expert. Ces derniers doivent
démontrer un niveau de pratique et de développement de leurs
connaissances sur un certain nombre de domaines. L'expert de niveau 1 est
reconnu soit dans sa « Business Unit » (BU), soit au sein de son
« Business Group » (BG). Il doit démontrer une pratique sur la
majorité de ses domaines de connaissance. Au niveau 2, l'expert est
reconnu soit dans son BG soit dans le groupe Areva. Il doit démontrer un
certain niveau de maturité sur une majorité de ses domaines de
connaissance. Ils sont aussi appelés « séniors experts
». Et enfin, l'expert de niveau 3, appelé « Fellow », est
reconnu tant au sein du groupe qu'à l'international par la
Communauté scientifique. Il doit quant à lui, montrer un niveau
excellent dans la majorité de ses domaines de connaissance. Il est
intéressant de voir dès à présent que ces 4 niveaux
(comprenant le « spécialiste ») correspondent aux 4 niveaux
mis en place au CEA qui comprenait en 2014 près de 4000
experts42. Cela montre que ce système semble
déjà avoir fait ses preuves dans d'autres organisations du
nucléaire. Chez Areva, chaque niveau d'expert possède son propre
comité de validation des candidatures. Au niveau BU pour le niveau 1, au
niveau BG pour le niveau 2 et niveau groupe pour le niveau 3. Cette distinction
de niveau permet d'identifier la filière « expert » comme
ouvrant à une réelle possibilité de carrière avec
des évolutions possibles. Par ailleurs, avant de devenir experts, les
collaborateurs deviennent dans un premier temps des « spécialistes
». Ce sont principalement de jeunes ingénieurs qui ont l'ambition
de devenir experts par la suite.
Cette approche par niveau montre l'importance du statut
d'expert tout en mettant aussi en relief les différences de
connaissances entre les niveaux. Ainsi, les « Fellows » seront plus
à même de transmettre leurs connaissances aux «
séniors experts », les « séniors experts » aux
« Experts niveau 1 ». Par ailleurs, les 5 domaines de missions
fixés dans la fiche « Expert model » doivent être
inscrits à différents niveaux dans les objectifs lors de
l'entretien annuel d'évaluation. Pour les experts de niveau 1, 20% des
objectifs doivent concerner les missions définies dans la fiche «
Expert model ». Pour les experts de niveau 2, il s'agit de 40% et pour
42 Olivier MUSSEAU (CEA/DEN/DRH),
L'organisation de l'expertise scientifique et technique à la
Direction de l'Énergie nucléaire du CEA, Revue
Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un
expert, Juillet-Août 2014, p.22-28
les experts de niveau 3, il s'agit de 60%. Après avoir
cerné de façon précise ce qu'est un expert et en
particulier chez Areva, nous pouvons maintenant nous intéresser au
processus de transfert de connaissances sur cette population.
1.2.2. Le processus de transfert des connaissances chez les
experts
Dans le cadre d'un transfert de connaissances, nous avons pu
définir jusqu'à présent la nature de ce qui est
déplacé (la connaissance) d'un point A à un point B. Nous
avons aussi déterminé quels étaient les principaux flux de
connaissances d'un point de vue systémique. Il est maintenant important
d'aborder le processus d'un point de vue concret en déterminant les
acteurs, les rôles et les facteurs d'influence.
1.2.2.1. Identifier les différents acteurs y
prenant part
En reprenant le flux systémique de la capitalisation et
du transfert de connaissances, deux questions principales doivent être
posées : qui sont les acteurs jouant un rôle dans le flux de la
connaissance et comment ce flux est-il permis ?
Il y a plusieurs situations pour lesquelles la connaissance se
situe dans un flux. Ainsi, lorsqu'un expert cherche à capitaliser la
connaissance pour elle-même ou son entreprise, l'externalisation et
l'internalisation seront les deux flux de connaissances qui seront
concernés. Par exemple, lorsqu'un expert souhaite expliciter une
connaissance dans le souci d'en établir un référentiel
dans son domaine de connaissance. Ou bien lorsqu'il s'agit de la
présenter à ses pairs dans le cadre d'une conférence,
notamment dans le cadre de découvertes réalisées à
la suite de ses recherches. L'acteur qui participe au flux de connaissance est
l'expert lui-même. Son manager est cependant aussi acteur, car c'est lui
qui décide d'allouer, ou non, du temps et des moyens à l'expert
pour effectuer ce travail. Il est aussi possible qu'il se fasse aider par une
personne de type « documentaliste éditeur » dans la mise en
forme du savoir43. Enfin, les autres acteurs principaux sont les
personnes qui recevront la connaissance. En quelque sorte, les « clients
» qu'il faudra mobiliser via les réseaux professionnels, mais aussi
parfois personnels. Il existe encore d'autres acteurs, parfois plus indirects,
qui peuvent
43 Jean-François Ballay, « Tous
managers du savoir ! La seule ressource qui prend de la valeur en la partageant
», Editions d'Organisation, 2002, p.251
être les unités techniques qui pourront avoir
accès à la connaissance dans un temps plus ou moins long.
Un autre acteur qui est identifié ici est le
département des Ressources Humaines. En effet il intervient dans les
processus de mobilité, départs et arrivées, des
collaborateurs d'une société. Il organise la mise en place d'un
contrat d'apprentissage, d'un tutorat, d'une formation ou de la décision
de recruter un collaborateur pour remplacer l'expert quittant l'entreprise ou
pour superviser les opérations de transfert de connaissances. Il sera
celui qui soutient la démarche par la mise en place de ressources
adaptées. De plus en plus, en collaboration avec la Direction des
Systèmes d'Information, la fonction Ressources Humaines met en place
dans les entreprises les outils nécessaires à la collaboration,
à la gestion des compétences ou à la formation. Ainsi,
l'arrivée des TIC (Technologies de l'information et de la communication)
a totalement bouleversé les méthodes d'apprentissage. Or la GRH
est pleinement centrée sur ce domaine. Par ailleurs, dans leur
rôle de « partenaire du business », les RH doivent être
centrées sur l'accomplissement des objectifs stratégiques et donc
en particulier sur le partage des connaissances (Ballay, 2002).
Dans toutes ces situations et bien d'autres encore, il est
nécessaire que la direction de l'entreprise soutienne la
démarche. Cela est d'autant plus vrai si elle se fait de façon
continue, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit de la mise en place d'une
stratégie globale où la culture du partage devient une valeur
première dans l'entreprise. Les directeurs doivent avoir conscience que
leur rôle est primordial dans ce type de situation. Ce sont en effet les
décisionnaires sur le modèle d'organisation de l'entreprise qui
va favoriser, ou non, le partage en son sein. Ils sont aussi allocataires de
ressources et sont à ce sens les acteurs permettant la mise en place
d'un processus global de gestion des connaissances.
Avec l'arrivée des TIC, le processus de transfert des
connaissances est de plus en plus demandeur d'outils informatiques. Il peut
s'agir de logiciels de mise en commun de documents (SharePoint) pour un partage
simple. Il existe de plus en plus aujourd'hui de logiciels de solutions
intégrées permettant de relier les acteurs entre eux, de
créer des communautés de partage et/ou de modéliser
rapidement de la connaissance. Le service informatique est donc un acteur qui
peut se révéler fondateur dès lors que la situation le
demande.
Enfin, les métiers autour de la gestion des
connaissances comme le « Knowledge manager » sont chargés
d'orchestrer toute la démarche en pilotant les ressources, en animant
les
processus, en identifiant les besoins, en accompagnant les
parties prenantes ou encore en effectuant une veille sur les outils et les
méthodes. Il possède donc un rôle central et travaille en
équipe avec tous les acteurs énoncés
précédemment afin de les articuler du mieux possible pour en
tirer un profit plus grand.
Nous venons de voir ici que les situations de transfert sont
multiples et que chaque situation semble unique tant les situations peuvent
être spécifiques dès lors que l'on adapte un processus au
système d'organisation. Cependant, en prenant un peu de recul sur la
démarche nous allons nous apercevoir que la connaissance se transmet de
deux façons différentes.
1.2.2.2. A chaque connaissance sa méthode
Jean-Louis Ermine parle de transfert « direct » et
« indirect ». Cette distinction est fondamentale pour comprendre les
deux approches que nous allons identifier dans le transfert de connaissances.
Comme nous l'avons vu, la connaissance est d'abord implicite avant d'être
explicite. Il est donc nécessaire de passer par différents moyens
pour expliciter la connaissance.
Durant toute sa carrière, l'expert rédige de
manière continue des documents de tous types à différentes
occasions (présentations, articles, travaux de recherche, etc...). Cela
consiste en la première explicitation de la connaissance. Cette
méthode a l'avantage de demander peu de ressources et d'être
incluse dans les missions de l'expert. Ces documents sont présents sur
le disque dur du collaborateur, sont parfois partagés (articles), mais
pas toujours classés ou enregistrés sur une base
spécifique. Pour qu'ils puissent être utilisés par
d'autres, il est nécessaire de les classer par des systèmes de
modélisation de la connaissance.
Aujourd'hui, plusieurs outils de modélisation ont
été mis en place, à l'image de la méthode
MASK44 (anciennement MKSM) développée par Jean-Louis
Ermine. Cet outil a été élaboré la première
fois en 1989 en université puis au CEA (Commissariat de l'Énergie
Atomique). D'après l'auteur, cet outil qui a fait l'objet de nombreuses
expérimentations, est aujourd'hui opérationnel et sert au sein de
nombreuses entreprises telles que PSA ou Cofinoga. Il permet de créer un
« Livre de la connaissance » dans l'entreprise avec pour objectif
final de capitaliser et de faciliter la transmission de la connaissance. Il
s'inscrit dans une approche
44 Méthode d'Analyse et de Structuration de
Konnaissances
« processus » globale et son principal avantage est
de pouvoir fédérer plusieurs démarches existantes
regroupant tous les domaines de connaissance, à tous niveaux dans
l'entreprise. En effet, il peut être facilement utilisé,
modifié, documenté par tous et nécessite des outils
informatiques de mindmapping bien connus de nos jours. Cependant, la
modélisation de la connaissance n'est pas toujours connue de tous.
Les documents écrits ne sont pas les seules sources de
connaissance dans une entreprise. Ainsi, les enregistrements vocaux ont
aujourd'hui plus d'intérêt à l'utilisation qu'auparavant.
Depuis quelques années, des logiciels de reconnaissance vocale, ouverts
au grand public permettent de traduire sous format texte l'enregistrement
d'interviews, de notes orales, etc... Encore onéreuse pour certains
logiciels, cette technologie se développe et trouve petit à petit
sa place dans les entreprises. Dans la catégorie de conversion de
données, il existe les logiciels de reconnaissance optique de
caractères (OCR) permettant la conversion de données papier en
données numériques. L'avantage considérable de cette
technologie est d'une part sa fiabilité qui a très largement
progressé depuis une dizaine d'années et d'autres parts, son
accessibilité et sa rapidité de réalisation. L'expert y
trouve généralement l'avantage de structurer ses travaux dans une
base de données. Chez Areva un « Record manager » est
d'ailleurs chargé d'enregistrer des documents via un logiciel OCR.
Enfin, il est aussi nécessaire de transmettre la
connaissance tacite comme vu précédemment. Pour cela, parmi les
méthodes classiques, le compagnonnage par tutorat est une des
méthodes les plus classiques et reconnues. Il se développe aussi
dans les entreprises (la tendance est à la hausse) le coaching. Cette
méthode est cependant plus orientée et développée
de nos jours sur le développement personnel que sur le transfert de
connaissance. Dans les autres méthodes connues de socialisation, il
existe le retour d'expérience ou la revue par les pairs. Moins connue,
elle est présente dans les communautés de personnes et notamment
celles ayant trait spécifiquement au savoir. Toutes ces méthodes
de socialisation ont l'avantage de valoriser les personnes qui s'y attardent.
Les actions de « faire savoir », de discussion et d'exploration sont
les fondements de cette méthode qui est un levier de reconnaissance
à mettre en place dans l'entreprise (Ballay, 2002). Cela comporte aussi
l'avantage de légitimer la connaissance par la proximité des
acteurs en action. Une méthode parait alors à la fois puissante
et légitime par le nombre d'acteurs qu'elle touche. Il s'agit de la
communauté de savoir. Nous allons donc nous y intéresser plus
particulièrement et nous verrons qu'elles ont un fort potentiel dans le
domaine du partage de connaissances.
Page 30 sur 113
Première partie - Apprivoiser la connaissance
1.2.3. La spécificité des communautés
de savoir
1.2.3.1. Définition d'une communauté
La notion de communauté de savoir est implicitement
liée à celle de capital social. En effet, ces deux notions sont
basées sur l'échange. Le capital social est ce qui permet aux
individus et aux organisations d'échanger leurs connaissances de
façon fluide et à moindre coût. Plus fort est le capital
social, moins onéreux et plus libres seront les échanges. Ainsi,
une communauté sera d'autant plus forte et efficace si le capital social
de l'entreprise est important. De plus, il est aussi la marque d'une confiance
entre les personnes qui est un facteur de fluidité dans
l'échange. Il favorise la communication par la capacité à
accepter de façon optimiste de se rendre vulnérable en laissant
un autre s'occuper au mieux de ses intérêts (Roulleaux-Dugage,
2007). L'existence et l'efficacité d'une communauté de savoir
sont donc conditionnées par le capital social de l'entreprise. Par
ailleurs, cette communauté est caractérisée par une
construction cognitive collective. Il y a donc un processus d'apprentissage
entre les individus qui amène à la création d'une
connaissance collective. Le principal avantage de ce type de communauté
est sa transversalité au sein des organisations. Le deuxième
avantage considérable est celui de l'autogérance. Les membres de
la communauté adhèrent volontairement sur la base de la passion
pour le domaine d'activité. Les normes sont généralement
implicites et générées par les collaborateurs
eux-mêmes au cours de leurs échanges. Jean-Yves Prax identifie
quatre périodes de vie pour une communauté. La première
durant laquelle les membres s'identifient et apprennent à se
connaître, à trouver une identité commune. Pour le moment
ils sont un réseau informel et non reconnu. Puis ils se mettent à
participer ensemble à la réalisation d'un objectif commun qu'ils
définissent eux-mêmes (pour les communautés de savoir, il
s'agit de développer la connaissance). Vient ensuite le moment de la
performance, c'est-à-dire que l'organisation qui accueille la
communauté lui demande de justifier son existence par la production de
livrable à son égard. Des rapports officiels apparaissent et les
normes se développent. Enfin, les communautés s'ouvrent à
l'organisation, elles sont pleinement reconnues. Leurs productions profitent
à l'organisation dans son ensemble et le savoir est partagé.
C'est le principe des communautés autoapprenantes, car les «
utilisateurs » créent eux-mêmes le contenu. Les
hiérarchies sont moins imposantes que dans l'organisation qui
l'accueille, ce qui a tendance à favoriser la coopération. Un
autre avantage notable est celui de l'apprentissage en action. L'énergie
cinétique de la connaissance qui se développe dans ces milieux
dynamiques est très favorable à la promotion de ce mode de
fonctionnement. Ainsi, non seulement les coûts de fonctionnement sont
nettement inférieurs à
Page 31 sur 113
Première partie - Apprivoiser la connaissance
ceux des communautés basées sur une organisation
formelle et hiérarchique, mais elle crée en plus une valeur de
connaissance potentiellement supérieure. En exemple, nous pouvons
prendre le cas de l'entreprise qui réussissait à conserver ses
clients avec des produits parfois plus défectueux que ses concurrents.
Grâce à ses communautés d'experts, le client était
accompagné, quelle que soit la situation. Ce dernier
préférait alors être accompagné et avoir des
produits moins performants que de bénéficier de meilleurs
produits sans avoir la possibilité de les réparer. Par ailleurs,
la confiance d'un client se gagne sur l'image qu'il se fait de l'ensemble de
l'entreprise. Ainsi, s'il s'aperçoit que les services rendus pour une
même prestation sont différents à deux endroits de la
planète (cf. le cas de Schlumberger, entreprise pétrolière
multinationale), alors la confiance avec le fournisseur sera
dégradée. Aujourd'hui, le client veut à la fois avoir un
accompagnement personnalité et uniformisé. Les communautés
répondent pleinement à cet enjeu puisqu'elles permettent
d'uniformiser un processus par sa modélisation, tout en accompagnant le
client. Cependant, les communautés de savoirs tenus par les experts
présentent des caractéristiques quelque peu différentes en
vue du profil des experts. Chez Areva, il y a les communautés de
métier, dont l'objet est de faire circuler les bonnes pratiques et les
retours d'expériences. Elles se différencient des
communautés technologiques qui ont pour objectif de partager sur les
profits et la mise en oeuvre spécifique de technologie nouvelles. Et
enfin il existe les communautés d'expertise dont l'objet est de
partager, voire de modéliser la connaissance scientifique et
technique.
1.2.3.2. La différenciation avec les
communautés d'experts
Nous l'avons vu, l'expert se caractérise par la
détention de connaissances dans un domaine précis dans l'objectif
de répondre à une question ou une demande de création
d'offres, de donner un avis. La connaissance détenue donne ainsi
à l'expert la capacité de répondre à ses missions.
Cette fonction influe alors sur le comportement des experts au sein de leurs
communautés. Cela traduit une plus forte réglementation entre les
membres des communautés d'experts (P. Chohendet, F. Créplet, O.
Dupouët, 2006). Les procédures, les rôles et les «
recrutements » implicites sont définis de façon plus stricte
que dans les communautés de savoir classique. Les sentiments de
cohésion sont parfois plus faibles et les interactions sont moins
fréquentes et nombreuses. C'est la raison pour laquelle des
coordinateurs ou des leaders sont appréciés dans ce type de
communautés afin d'assurer la circulation de l'information et la mise en
valeur de connaissances novatrices pour l'entreprise. Il y a donc en
quelque sorte une institutionnalisation de ces
communautés. En revanche, il est remarqué que les experts peuvent
former des communautés sans pour autant travailler dans un même
domaine de connaissance et sans se connaître particulièrement
bien. Cela peut venir du statut d'expert particulier qui tend à
l'isoler. Par réaction à cela, ce dernier se tourne vers d'autres
experts pour former une communauté de façon spontanée. On
observe alors un effet de groupe qui tend à faire converger les
idées pour arriver à l'acceptation d'un consensus global. Il est
alors intéressant de remarquer que la définition d'expert renvoie
à l'appartenance à un groupe (Trépos, 1996).
Cela montre que l'expert présente des
caractéristiques différentes d'un collaborateur qui ne se situe
pas dans ce type de carrière. L'approche du transfert des connaissances
peut donc être sensiblement différente à son égard.
Or, les enjeux pour cette population sont forts de par la rareté des
connaissances qu'ils détiennent, de par leur capacité à
influencer les décisions, à jouer un rôle dans la relation
client, l'innovation et la résolution de problématiques parfois
critiques. Les avantages concurrentiels que peuvent en retirer les entreprises
pour se différencier sur un marché en plein rebond sont
stratégiques aujourd'hui. Pour Areva en pleine restructuration
occasionnant des départs d'experts, le transfert des connaissances est
plus que jamais cruciale pour ses performances futures. Nous allons donc
étudier en profondeur le système de transfert des connaissances
chez les experts Areva afin de proposer des pistes de développement pour
répondre aux enjeux du groupe.
Deuxième partie - Le transfert des
connaissances sous toutes ses formes
Pour réaliser l'analyse du transfert de connaissances
chez les experts au sein de l'entreprise Areva, il a été
nécessaire de rechercher l'information au plus près de la
population. Ainsi, une enquête auprès des experts a
été menée sous la forme d'interviews.
2.1. Protocole d'enquête
2.1.1. Travail en amont
2.1.1.1. L'interview et la socialisation
Nous avons vu jusqu'à présent que le
modèle le plus approprié pour transférer de la
connaissance tacite était la socialisation. Or la socialisation se
réalise soit par des échanges ponctuels sur une longue
durée, soit par des échanges physiques, en profondeur, sur une
courte durée, soit par des échanges longs sur une longue
durée. Dans un objectif d'enquête, d'analyse d'un système,
l'interview qui est caractérisée par des échanges longs
sur une courte durée semble être le meilleur moyen de capter les
connaissances à la fois explicites et tacites. C'est à ce titre
que l'interview est utilisée notamment dans l'externalisation des
connaissances pour la création de livres de connaissances par exemple.
La méthode MASK utilise d'ailleurs prioritairement l'interview pour
modéliser la connaissance. Ainsi, durant l'interview il est possible de
s'imprégner de l'expérience d'une personne. Et c'est en effet, ce
qui a été recherché durant les entretiens. Cela a permis
de mettre en avant le fait que chaque personne se retrouve dans une situation
unique avec un angle de vision qui peut être parfois très
différent de celui d'une autre personne. Les propos doivent être
remis dans leur contexte et il est nécessaire de comprendre qu'il s'agit
de vision spécifique. Cependant, l'avantage est considérable, car
il permet de creuser les problématiques rencontrées que les
interviewés ont bien souvent en tête, mais qu'ils n'expriment pas
nécessairement. Les systèmes, programmes, modes d'organisation,
et modes de travail sont ainsi mieux décrits pour être mieux
analysés. Cela permet aussi de faire avancer la réflexion en
apportant aussi à l'interviewé des éléments de
réponse et de construire durant l'entretien de potentielles solutions.
Ainsi, les préconisations sont alors d'autant plus adaptées aux
situations qu'elles sont formulées en cohérence avec le
schéma de pensée du terrain. Certains interviewés ont
plusieurs dizaines d'années d'ancienneté et connaissent
parfaitement l'entreprise et les problématiques.
L'interview est alors un excellent moyen de prendre
connaissance de situations ancrées dans l'entreprise.
2.1.1.2. Cibler la population
La vente des activités Réacteurs et services
à EDF va scinder profondément le groupe en deux
entités totalement autonomes. Le monde de l'expertise qui fonctionne sur
le mode des communautés et réseaux va donc voir les
communautés se scinder en deux. Aujourd'hui, les experts sont
situés dans l'ensemble du groupe et sont tous concernés par le
transfert de connaissances. Cependant, afin de déterminer une population
précise durant l'enquête, les interviews ont été
menées exclusivement auprès de la population présente
à la Direction Recherche & Développement du Corporate
(fonction support). Les résultats des interviews montrent malgré
cela que les problématiques touchent la totalité du groupe. Avec
la création des deux entités, les préconisations qui
seront réalisées dans ce mémoire porteront cependant
exclusivement sur New Areva (New CO). En effet, les deux sociétés
sont dès aujourd'hui soumises à des choix stratégiques
différents. Analyser et proposer des préconisations pour une
même population dont les directions sont différentes pourraient
les rendre inadaptés à leur situation. Par ailleurs,
l'enquête a été réalisée auprès de
différents profils afin de réunir des informations de plusieurs
points de vue. Au fur et à mesure de l'avancement de l'enquête, il
est apparu nécessaire d'adapter le type d'interlocuteur. Les
premières interviews ont en effet montré l'importance d'appuyer
l'analyse sur des domaines devant faire l'objet d'attentions
particulières comme celui des communautés de savoirs. C'est donc
la raison pour laquelle, les populations interviewées ont
été les suivantes : 6 experts (dont 3 étaient aussi
directeurs ou anciens directeurs), 4 collaborateurs ou responsables (dont 1 sur
l'innovation, 1 sur la gestion des connaissances, 1 responsable d'une
communauté, 1 ancien expert et responsable dans le programme GapExpert
que nous verrons par la suite). Enfin, 2 entretiens complémentaires ont
été réalisés auprès de la même
population afin d'approfondir des sujets nécessitant des
éclaircissements.
2.1.1.3. La rédaction du guide d'entretien
Afin de recueillir un maximum d'informations permettant de
construire une connaissance dans le domaine, il fut nécessaire de ne pas
se restreindre à un mode de fonctionnement. Un guide d'entretien
semi-directif (cf. Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif p.102) a donc
été réalisé afin qu'il permette d'atteindre deux
objectifs : le premier était de répondre à des questions
précises. En effet, le guide a été réalisé
une fois que les premiers travaux de recherche exploratoire ont
été réalisés. À ce moment-là venaient
déjà des questions sur la place de certains acteurs ou le
rôle des communautés d'experts par exemple. Il fut aussi
nécessaire de cerner les enjeux, les différents acteurs ou encore
les actions mises en place au sein de l'entreprise. Le deuxième objectif
fut de conserver tout au long des entretiens une vision ouverte permettant
d'être à l'écoute des expériences, des
difficultés rencontrées par les collaborateurs, de la
réussite des projets. Le guide se composait d'une première page
d'informations à remplir pour une part avant l'entretien et pour une
autre, au début de l'entretien (poste, missions du collaborateur,
domaines de connaissances). Venaient ensuite trois chapitres principaux
regroupant eux-mêmes trois questions. L'ensemble était donc
constitué de 9 questions. Le premier visait à mieux
connaître le système (processus) de transfert des connaissances
chez Areva en essayant d'être le plus objectif possible. Le
deuxième avait pour but de cerner les points forts et les points
faibles, d'indiquer les évolutions nécessaires et/ou les
changements à effectuer. Et enfin, le troisième portait sur des
questions relatives à des propositions de solutions. Après
plusieurs phases de rédaction et de vérification (tutrice,
collègues de travail puis membre de la direction R&D et expert), les
interviews ont pu démarrer.
2.1.2. Les interviews et le débriefing : les
difficultés rencontrées
2.1.2.1. La réalisation des entretiens
Comme nous l'avons vu précédemment, les
connaissances tacites se transmettent par socialisation. Cela signifie que
moins la distance entre deux individus est grande, plus le niveau de
socialisation est élevé. Ainsi, 8 entretiens ont
été menés en face à face avec les collaborateurs,
les 3 autres ont été réalisés par écrit ou
par téléphone. La durée des interviews était de
1h15 en moyenne avec une amplitude allant de 45 minutes à 2h. Cela
dépendait de temps dont disposaient les interviewés ou du type
des réponses qui étaient recherchées et
apportées. Ils ont été
réalisés dans le respect de l'anonymat et de la
confidentialité des informations.
Les entretiens ont été réalisés
à partir du mois de juillet 2016 pour se terminer au début du
mois d'octobre. Globalement, le guide d'entretien a permis de conserver une
ligne directrice, un « fil rouge », durant les interviews. La
multitude des acteurs, des enjeux, des processus de transfert de connaissances
et la nécessité de garder le cap sans digresser, ont
été les principales difficultés durant ces interviews. Le
guide semi-directif a ainsi permis de retrouver le sujet principal sans pour
autant casser la dynamique de l'entretien. Il fallait en effet capter un
maximum d'informations de chaque personne, tout en vérifiant qu'il
s'agissait bien du sujet de ce mémoire. En effet, les connaissances
apportées par chacun des interviewés ont formé une base
d'information importante. Cependant, il fallait les remettre constamment dans
leurs contextes afin de retrouver le sens qu'elles portaient pour ce
mémoire.
Les prises de notes durant les entretiens ont d'abord
été réalisées par ordinateur puis sur papier. En
effet, l'écran s'est rapidement révélé être
un élément gênant pour instaurer un climat propice aux
échanges et à la convivialité nécessaire pour un
partage de connaissances ouvert. Lors de certains entretiens, l'utilisation
d'un enregistrement a été réalisée avec l'accord de
la personne. Cela a permis de ne pas rester focalisé sur la prise de
notes, mais plutôt sur l'écoute et l'échange.
En plus des 12 interviews réalisées, 5
échanges informels d'au moins 20 minutes chacun ont aussi
été réalisés auprès de collaborateurs
différents. Ils ont permis de mieux cerner certains enjeux, de
compléter certaines visions du sujet ou de mieux comprendre la
globalité du sujet.
2.1.2.2. Le débriefing
À la suite de chaque entretien, il était
nécessaire de revenir sur les éléments importants et sur
certains détails afin de les retranscrire. La difficulté fut de
savoir sur quel format les informations devaient être recueillies. Le
format informatique permettait de conserver longuement l'information. Le risque
de perte restait cependant présent. Le format papier était
parfois le plus pratique dans certaines situations. La multiplicité des
supports utilisés a donc rendu plus compliquée l'analyse des
entretiens. Lors de l'analyse, il a fallu réunir les différents
supports. Pour que le travail permette une vraie compréhension de
l'ensemble tout en conservant les détails de l'enquête, toutes les
informations des interviews ont été
retranscrites dans un tableau Excel. Le travail d'analyse a
enfin pu commencer. Chaque information a été classée
suivant les différentes thématiques repérées durant
les interviews (cf. Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du tableau
Excel. p.104). Cela a permis d'analyser les enquêtes de la façon
la plus rigoureuse possible. Enfin, la très grande majorité des
informations qui ont été retranscrites ont pu être
exploitées dans ce mémoire.
Par ailleurs, lors des enquêtes, des documents
techniques faisant état des lieux de la gestion de l'expertise au sein
d'Areva ont été analysés. Leurs contenus strictement
confidentiels ne peuvent être divulgués dans ce mémoire,
mais les conclusions des analyses permettent tout de même d'étayer
les interviews.
Ce qui est ressorti en premier lieu des entretiens et ce qui a
été mis en place par Areva pour permettre le transfert des
connaissances, fut la création de programmes divers que nous allons voir
dès maintenant.
2.2. Les programmes mis en place par Areva
2.2.1. GapExpert : un programme pour les jeunes
générations
2.2.1.1. Former les futurs experts
Depuis toujours, Areva a conscience que sa force et sa
compétitivité passent par la maitrise de ses technologies ainsi
que par la recherche d'innovation afin de se distinguer sur le marché du
Nucléaire. Comme nous l'avons vu, les experts détiennent la
connaissance. Ils l'enrichissent, la font circuler et participent ainsi
activement à sa performance. Pour amortir le choc du « papy-boom
», Areva a mis en place un programme en 2008 visant à former de
jeunes ingénieurs, doctorants, appelés « GapExpert ».
Du même nom, le programme a pour objectif de transformer ces jeunes
ingénieurs, ou doctorants, en de futurs experts par une
expérience terrain. Ce programme est alors « sponsorisé
» par la Direction Recherche & Développement (DRD) du Corporate
localisée au siège, qui prend alors en charge
financièrement les salaires pour une durée de trois ans. Le
responsable hiérarchique de ces jeunes ingénieurs est
situé au siège et appartient à la DRD. Leur tuteur est
alors un manager de l'unité, basé en région. Ce programme
a pu aussi servir dans le cadre de la recherche et du développement de
nouveaux domaines de connaissances ou de nouveaux projets chez Areva. Pour
résumer la situation, à la page suivante, un schéma aide
à mieux comprendre son fonctionnement.
Figure 4 : Schéma du fonctionnement du programme
GapExpert
Comme nous le voyons dans le schéma ci-contre,
l'unité (de production) est largement
bénéficiaire de ce
programme. Elle ne
supporte peu ou pas les coûts financiers. Cependant
elle a comme objectif de former le GapExpert. Il est donc
à sa charge de le faire monter en compétence. Au fur et à
mesure de ces trois années, celui-ci acquiert ainsi le savoir-faire et
les connaissances dans un ou plusieurs domaines de l'unité. À la
fin de cette période, il intègre l'unité pour y travailler
à temps complet et continuer à monter en compétences et
à acquérir des connaissances. Selon son niveau, il pourra par la
suite prétendre à une carrière d'expert. Le transfert de
connaissances est donc ici réalisé grâce au tutorat.
L'expérience est d'autant plus intéressante qu'il s'agit
d'être formé avec les connaissances du terrain. Ainsi, la
majorité des connaissances explicites et implicites sont transmises.
Cela permet à la société non seulement de conserver ses
connaissances, mais de se donner aussi les capacités de les
développer pendant de longues années à venir. Toute la
carrière de l'expert peut ainsi être pleinement profitable
à l'entreprise.
2.2.1.2. Un avenir prometteur
Pour des raisons majoritairement financières, ce
programme a été arrêté en 2014. Aujourd'hui il est
en phase d'être reconduit. Rien d'étonnant, car la majorité
des personnes interviewées ont une bonne vision de ce programme. Pour
eux, il s'agit d'une réussite. Ainsi, avec le seul soutien de la DRD, 75
jeunes ont été formés en 6 ans ce qui représente
plus de 10 personnes formées par année uniquement grâce au
programme. La DRD a ainsi contribué à une partie du
renouvellement de l'expertise Areva. Au début de l'année 2015,
c'est-à-dire après l'arrêt du programme, 7 jeunes
étaient devenus « spécialistes », c'est-à-dire,
en phase de devenir de nouveaux experts, 14 d'entre eux étaient
déjà experts et 1 « expert sénior ». Pour une
unité au sein d'Areva nommée « HRP », 6 GapExperts ont
été formés et aujourd'hui 3 d'entre eux sont expert niveau
1. Cela signifie que moins de 4 ans après la sortie du programme (qui
dure 3
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
ans), 22 anciens GapExperts sont aujourd'hui dans la
filière « expert » du groupe Areva. D'autres finalisent leurs
parcours et d'autres encore sont en passe de devenir des experts.
Cependant, certaines difficultés ont tout de même
été rencontrées. Elles sont à la fois liées
à la mission de tutorat, mais aussi à la place que tient ou a pu
tenir le jeune ingénieur. En effet, les entretiens de performance et de
développement (nommé « PDA » chez Areva) étaient
menés par le tuteur de l'unité en région. Il était
donc difficile pour le responsable hiérarchique, basé au
siège, d'être présent lors de l'entretien. Les
collaborations tuteur / responsable et GapExpert / responsable, ont donc
été impactées principalement par la distance
géographique. Certains responsables ont néanmoins
décidé de collaborer avec les tuteurs en amont des entretiens
PDA. Par ailleurs, les responsables ou tuteurs n'étaient pas
nécessairement des experts. Ainsi, alors que le programme va être
relancé, certains directeurs et managers émettent l'idée
que le responsable hiérarchique puisse être un expert afin de
faciliter à la fois la collaboration et le transfert de connaissances.
L'idée de permettre au GapExpert de travailler à la fois sur des
sujets académiques et techniques auprès des unités est
aussi remontée. L'objectif serait ainsi de faire progresser plus
rapidement les futurs experts dans leur domaine de connaissance.
Par ailleurs, les GapExperts participaient à des
programmes de formations spécifiques comme celui du cycle du combustible
nucléaire, de la propriété intellectuelle ou de la gestion
de sl'innovation. Ils participaient aussi à des conférences
techniques leur permettant de mettre un pied dans le monde de l'expertise. Pour
certains, ces mesures ont alors survalorisé ces collaborateurs. Un
problème d'équité s'est alors posé entre les
experts, qui avaient parfois des difficultés à dégager du
temps et des moyens pour cela, et les GapExperts, encore jeunes
ingénieurs ou doctorants.
Néanmoins, ce programme est une réussite dans sa
globalité, les volontés de le relancer en sont un bon indicateur.
Quelques mesures pourront alors être prises afin de permettre à
chacun de prendre une place encore plus juste dans ce processus de formation et
de transfert des connaissances.
Toujours en direction des jeunes, l'entreprise
développe aujourd'hui des partenariats visant à créer une
émulation intellectuelle dans les domaines du nucléaire. Ainsi,
Areva a mis en place le mécénat en direction de thèse ou
de chaire.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
2.2.2. L'arrivée des nouvelles
générations
2.2.2.1. Le mécénat des chairs
Depuis que la très renommée Business School
ESSEC a créé la première chaire d'entreprise en 1986, le
système de partenariat entre l'enseignement et l'entreprise n'a
cessé de croitre. Il permet en effet de développer à la
fois des expertises d'enseignements pour les écoles et les
universités, tout en faisant avancer les recherches scientifiques
profitables aux entreprises. Areva a alors de multiples avantages à
développer de telles relations. Une chaire peut se résumer en la
conclusion d'un contrat de financement entre une école ou une
université, un laboratoire de recherche et une entreprise. Le concept
est le suivant : une ou plusieurs entreprises financent un programme de
recherche d'une école ou d'une université, en lien avec un
laboratoire sur un sujet qui les intéressent. Cela permet aux
entreprises de faire avancer les connaissances dans un domaine qui peut leur
être stratégique tout en favorisant la création d'un vivier
de futurs experts. Les chaires sont composées de professeurs
généralement connus dans leurs domaines, de doctorants et/ou
d'ingénieurs. Les recherches sont réalisées sur des sujets
pointus et spécifiques. Les partenaires de la chaire
bénéficient alors des avancées scientifiques qui auront
été réalisées. Les avantages sont donc nombreux :
avancées réalisées dans les domaines scientifiques
intéressés, formation de doctorants qui deviennent de potentiels
candidats ou encore mise en relation de problématiques industrielles
avec le monde académique. Cependant, ce système a un coût.
Celui-ci monte parfois à plusieurs centaines de milliers d'euros qu'il
est important de nuancer grâce à l'exonération
d'impôt à 60%, car il s'agit bien d'un don réalisé
aux écoles. Ce système permet donc aux entreprises de
découvrir de nouvelles connaissances de façon ponctuelle à
l'aide de coûts maitrisés et budgétés. Cependant,
les jeunes formés peuvent aussi partir à la concurrence, et les
résultats ne sont pas exclusivement partagés avec les
partenaires. Ils prennent d'ailleurs la forme d'une revue de littérature
académique et professionnelle. Pour certains résultats de chaire,
une conférence internationale est organisée. Jusqu'à
aujourd'hui, Areva a réalisé plusieurs mécénats de
thèse et en réalise encore aujourd'hui. En effet, les missions de
l'expert sont donc claires à ce sujet puis la fiche « Expert model
» mentionne explicitement les missions de relations avec les
universités, les instituts ou les laboratoires. L'enseignement dans les
écoles et l'établissement de liens étroits avec des
laboratoires de recherche sont ainsi au programme.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Ce système de recherche permet donc de
transférer de la connaissance de l'externe vers l'interne et les
résultats restent disponibles, quelle que soit la situation et à
tout moment, même après le départ d'un expert. De plus, le
recrutement en cas de besoin de l'ex-doctorant peut se révéler
être une excellente opération pour l'entreprise. Areva peut aussi
marquer, à travers ce dispositif, sa présence dans des domaines
de connaissances pointus. Ainsi, elle montre la maitrise qu'elle possède
dans ces domaines ce qui a pour effet d'attirer à la fois de potentiels
candidats plus éloignés, mais aussi des clients. Cela peut donc
aussi être vu en quelque sorte comme un outil de mise en valeur de ses
connaissances.
Nous voyons donc ici qu'à travers ce système, le
transfert de connaissances ne se réalise pas toujours qu'en interne. Il
existe aussi d'autres possibilités qu'Areva utilise aujourd'hui. Il
s'agit des contrats CIFRE.
2.2.2.2. Les contrats CIFRE
Via le dispositif CIFRE (Convention Industrielle de Formation
par la Recherche) géré par l'ANRT (Association Nationale de la
Recherche et de la Technologie), il est possible pour une entreprise de
recruter en CDI ou en CDD, un diplômé de niveau M (doctorat)
à qui elle confie une mission de recherche stratégique pour son
développement économique. Le salarié-doctorant
réalise alors en partenariat avec un laboratoire, des travaux de
recherche qui conduiront à la soutenance d'une thèse. Ce qui
permet à ce dernier de bénéficier d'une formation tant
professionnelle qu'académique. Ces travaux peuvent être
réalisés dans tous les domaines de recherche souhaités par
l'entreprise. Cependant, la CIFRE doit être validée par un
comité d'évaluation qui statue en fonction des expertises
réalisées par le DRRT (délégué
régional à la recherche et à la technologie) sur les
conditions suivantes : « la santé financière de
l'entreprise, son implication effective sur le domaine d'expertise, sa
capacité à donner une formation « professionnalisante »
au candidat ». Le DRRT évaluera aussi « la pertinence du
partenariat avec la formation doctorale »45. Ainsi, le jeune
doit pouvoir justifier à la fin de sa thèse d'une réelle
expérience professionnelle de recherche et la valoriser. L'entreprise
est alors subventionnée par l'État sous deux formes. La
première subvention est constituée d'un
45 ANRT - Association Nationale de la Recherche et
de la Technologie, CIFRE - Définition, mode d'emploi, [en
ligne], consulté le 6 septembre 2016, URL :
http://www.anrt.asso.fr/fr/espace_cifre/mode_emploi.jsp?p=40#
.WA0CtcnS7K0
Page 42 sur 113
Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
versement direct de 14 000€ par année, la
deuxième est réalisée par la possibilité
d'être subventionné par le Crédit Impôt Recherche
(CIR) à hauteur d'au moins 10 595 € par année. Enfin, si le
doctorant est embauché, son salaire est éligible pour deux ans au
CIR. Hormis l'aspect financier, les avantages de ce dispositif peuvent
être d'ordre plus stratégique encore. En effet, sous certaines
conditions préalablement justifiées par l'entreprise, il est
possible pour elle de bénéficier de licence d'exploitation des
résultats de la thèse, du droit au brevet déposé,
du droit à la confidentialité des informations. Tout ceci est
cependant très règlementé et impose une justification
stricte des droits. Jusqu'à présent, Areva a pu faire appel
à de nombreuses CIFRE pour le développement et le transfert de
ses connaissances. Ainsi, en 2014 Areva a fait appel à 131
étudiants doctorants. En effet, les experts ont la possibilité de
demander la mise en place d'une CIFRE et de tutorer le jeune. Par cette
méthode, ils peuvent à la fois transmettre et créer de la
connaissance en collaboration avec le doctorant. Le tutorat se fait alors
uniquement en binôme. Une fois de plus, le dispositif montre que
l'environnement de l'entreprise peut être un formidable moyen
d'acquisition de connaissances. Cependant, il n'y a aujourd'hui pas de vue
globale de ce dispositif au sein d'Areva. Peu ou pas de consolidation des
données à ce sujet n'a été recensé durant
l'enquête. Il semble alors assez difficile d'observer une
transversalité de l'information. Chaque unité peut faire appel
à ces contrats occasionnant ainsi l'existence de risques de sujets
doubles, identiques ou proches. En consolidant les informations, Areva
gagnerait à une meilleure gestion et attribution de ses ressources.
2.2.2.3. Le tutorat chez Areva
Que cela se fasse avec des stagiaires, avec le programme
GapExpert ou la CIFRE, les possibilités de tutorat par des experts sont
nombreuses. Nous avons pu voir jusqu'à présent que le programme
GapExpert avait permis la formation de plusieurs experts à ce jour et
qu'il s'agissait donc d'un programme efficace. Le dispositif CIFRE suivi par un
expert Areva permet de déboucher sur des licences, des brevets ou plus
simplement, sur l'accès aux résultats de thèses
accessibles et donc potentiellement profitables à Areva. Le groupe fait
aussi régulièrement appel à des stagiaires. Outre l'aspect
financier intéressant, ce dispositif est pour certains experts Areva, un
« bon moyen de recruter des ingénieurs », notamment lorsqu'il
s'agit de stage de fin d'études. Pour un expert Areva, tuteur d'un
stagiaire de 6 mois (durée maximum), 4 phases de formations sont
distinguées : La première consiste en
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
l'explicitation (« le débroussaillage ») du
problème, la deuxième en la formation aux logiciels, aux modes de
calcul. Puis les travaux de recherche sont effectués afin de
déboucher sur un rapport. Enfin, le rapport est soutenu par le jeune
dans sa formation et les travaux peuvent être exploités. C'est
donc un dispositif de formation qui débouche sur de nouvelles
thématiques de scientifiques et qui fait donc avancer la recherche. En
effet, pour plusieurs experts, il s'agit de développer un sujet
académique qui présente plusieurs avantages : sa formation aura
permis à la fois de faciliter son recrutement et son intégration
(s'il y a lieu) et en même temps, de lui apporter de la connaissance
tacite et explicite. En revanche, en cas de recrutement en CDI ou CDD, les
connaissances transmises devront être complétées. Dans le
cas où le stagiaire ne serait pas embauché, les travaux de ce
dernier sont conservés par le tuteur (ici un expert) sous format papier.
Areva conserve ainsi les recherches et leur exploitation est possible. Dans ce
cadre, un expert Areva interviewé a pu former plus de 35 stagiaires. 10
d'entre eux ont été embauchés par la suite. Cependant, les
embauches se font rarement sur les domaines de recherche étudiés
durant le stage.
D'une manière plus générale, le choix
d'Areva de faire appel aux jeunes est inscrit dans la fiche « Expert model
». Ainsi, dans un objectif de transfert de connaissances le recours au
mentorat, au tutorat et à la supervision sur une période
relativement longue est encouragé. Les experts « sénior
» et « fellow » doivent ainsi pouvoir dégager du temps
pour former leurs « jeunes collègues » à hauteur de 3
à 5 personnes par expert. La fiche « Expert model »
précise que les missions de transfert de connaissances doivent pouvoir
être réalisées en dégageant du temps à cet
effet. Cependant, comme le remonte l'enquête, la difficulté est
justement liée à une problématique de
disponibilité.
Cette fiche mentionne aussi la possibilité d'utiliser
le dispositif « Experconnect » pour tous les experts de niveau 2 ou 3
qui ont atteint l'âge de départ à la retraite.
2.2.3. Un dispositif spécifique pour les experts
à la retraite
2.2.3.1. « Experconnect » : ou mettre en
relation l'expertise et
l'entreprise
« Experconnect » est une société de
mise à disposition de personnels scientifiques et techniques de haut
niveau provenant de retraités experts dans leur domaine. Son ambition
est de devenir une plate-forme d'échange de compétences par
filière. Ainsi, depuis 6 ans environ,
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
lorsqu'un expert part à la retraite, il a la
possibilité de mettre ses connaissances et l'ensemble de son savoir
à disposition d'Areva. Il peut s'agir de rédactions de documents,
d'articles, de supports techniques sur un domaine d'expertise en particulier,
de participations à des conférences ou encore de transferts de
connaissances. L'expert doit pour cela créer une société
d'autoentrepreneur (ou une SAS) à son nom. Experconnect est
chargée d'établir un contrat de prestation entre l'expert et
Areva. Elle s'occupe alors des formalités administratives (sociales,
juridiques, fiscales). Ce service a l'avantage de garantir la
propriété intellectuelle au sein de l'entreprise et de garantir
l'entreprise face à d'éventuelles poursuites judiciaires de
l'expert. Le processus est simple et aucune formalité spécifique
n'est à réaliser pour les deux parties. Il doit ainsi permettre
à Areva de pallier en cas de besoin à un manque d'expertise. Cela
peut ainsi être un bon moyen de réaliser que la connaissance est
cruciale, au point d'avoir à faire appel aux services de ce type de
société. Cas en effet, rappeler un expert à la retraite
montre combien ses services et ses connaissances sont utiles à
l'entreprise.
2.2.3.2. La vision terrain du dispositif
Dans l'enquête, il ressort cependant que le dispositif
est utilisé à des fins quelque peu différentes. Ainsi,
pour certains, ce dispositif permet de continuer la transmission de ses
activités aux unités, de piloter les sorties de projets,
d'effectuer des rapports dans un objectif de capitalisation et de transmission
de connaissances ou plus généralement de gérer la fin
d'affaire en recherche & développement. Toutes ces actions se
résument alors en la gestion de transfert d'activités et montre
que parfois, le passage d'un expert à la retraite peut se
révéler plus compliqué qu'il n'y parait. Bien des services
réalisés à ce titre pourraient alors être
effectués en amont au sein d'Areva. Et les coûts peuvent
rapidement grimper. En effet, les services d'Experconnect sont facturés
à hauteur du dernier salaire de l'expert, majoré de 20 à
30%. Ainsi, il n'est pas rare que les prestations soient facturées
plusieurs dizaines de milliers d'euros pour les services d'un expert sans que
des retours sur investissements ne soient calculés. En effet, ces
commissions sont payées par Areva pour une durée de 3 ans
après le départ à la retraite. La difficulté
à connaître les coûts globaux de ces services semble montrer
qu'il n'existe pas à ce jour de consolidation des informations à
ce sujet. L'enquête met aussi en avant la difficulté des experts
à « sortir de leur métier » lors de l'arrivée
à la retraite. Après de nombreuses années engagées
dans un domaine de connaissance au service d'une entreprise, l'arrivée
de la retraite peut parfois être difficile à gérer. Ce
phénomène observé
Page 45 sur 113
Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
plus particulièrement auprès de populations
ayant un haut niveau de connaissance semble logique. En effet, l'attachement au
travail qui peut naître d'un fort investissement de ces populations dans
leur travail rend plus difficile le détachement du monde de
l'entreprise.
Ainsi, l'existence d'un tel dispositif montre deux actions
qu'Areva pourrait mettre en place. Il s'agirait d'anticiper plusieurs
années auparavant le départ à la retraite de l'expert d'un
point de vue métier, transfert des activités et transfert des
connaissances. Dans un deuxième temps, il s'agirait de préparer
l'expert à quitter le mode de fonctionnement qu'il a pu avoir pendant
des dizaines d'années.
En conclusion, nous voyons ici que les programmes et
dispositifs au sein d'Areva sont divers et variés. Il ne semble pas
exister de centralisation de l'information ce qui est parfois vu comme la
capacité des unités à s'adapter aux situations
rencontrées. Globalement les projets mis en place sont plutôt
indépendants. Cela montre que des initiatives variées sont
lancées en termes de transferts des connaissances sans pour autant faire
l'objet d'une stratégie au niveau groupe. Les initiatives sont
laissées principalement aux unités. Nous allons donc voir que
dans le prolongement de cette logique, il existe d'autres initiatives à
un niveau plus individuel cette fois-ci.
2.3. Des initiatives individuelles de transfert de
connaissances
2.3.1. Les transferts ponctuels
Chez Areva, la filière « expert » est
chargée d'établir une stratégie globale et
centralisée autour de la gestion de la connaissance. Cependant, elle
demande aujourd'hui à être développée. Nous avons vu
qu'il existe des programmes, des dispositifs qui sont impulsés soit par
les unités elles-mêmes (CIFRE, mécénat) soit par la
DRD au Corporate (GapExpert). Avec Experconnect, les experts ont la
possibilité de transférer de la connaissance. Ce dernier
dispositif permet de pallier de potentiels manques de transferts de
connaissances, d'activités, d'arrêts de projets, etc... D'autres
pratiques au sein d'Areva permettent cependant de transférer des
connaissances ponctuellement, pour des raisons précises. Chaque
unité met ainsi en place ses propres processus, sa propre capitalisation
des connaissances, son propre système de transfert. Chaque individu peut
aussi mettre en place des pratiques plus ou moins complexes et que chacun
adapte à sa situation.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
2.3.1.1. Les différentes façons de
transférer de la connaissance
Dans cette enquête, trois types de pratiques ont
été identifiées. Le premier est appelé «
succession planning », qui se traduit simplement par « planning de
succession ». Elle consiste en la planification d'actions en
coopération avec le manager, visant à « externaliser »
ou mettre à disposition ses connaissances. Cela peut se faire
grâce à la transmission ou au stockage de documents, à la
mise à jour d'une base documentaire ou encore à la
réalisation et la mise en ligne de cours sur des sujets de
connaissances. Une fois de plus, ces actions sont réalisées sans
coordination avec le reste du groupe Areva. Il est alors parfois difficile
d'identifier les actions à réaliser puisque les experts comme les
managers n'ont pas de vision globale. Ils ne savent donc pas toujours s'il est
nécessaire de transmettre la connaissance, si une autre personne
détient cette connaissance dans le groupe et à qui la
transmettre. Ainsi, il est régulièrement décidé que
seules les connaissances immédiatement utiles soient
transférées. On remarque assez aisément que le temps
investi et les actions réalisées dépendent principalement
de l'intérêt qu'ont les acteurs (expert et manager) à
transférer une connaissance. S'il s'agit de faciliter une prise de
poste, des actions seront entreprises en ce sens, si aucun enjeu direct n'est
identifié alors les connaissances auront moins d'intérêt
à être transférées. Cette méthode n'aboutit
donc pas toujours.
Avec les experts Areva, le système de tutorat pour un
recrutement fonctionne particulièrement bien. Cependant, il est
nécessaire de distinguer le tutorat dans le cadre d'une passation et
dans le cadre d'une formation, de l'accompagnement et dans le
développement de l'expertise d'un collaborateur. Dans le cadre de la
passation, il s'agit d'intégrer le successeur de l'expert avant le
départ de ce dernier. Malgré cela, l'objectif peut être
commun. Car il s'agit de transférer ses connaissances au successeur en
l'accompagnant tout au long de son intégration. Cela passe par le
transfert de dossiers, de documents, de savoir-faire, par des conseils afin de
mieux appréhender un sujet. Lors du programme GapExpert, les jeunes
étaient accompagnés par un tuteur qui jouait aussi le rôle
de formateur, de mentor. L'avantage principal de cette pratique et que le
transfert est complet (cf. Nonaka & Takeuchi). L'expert se socialise avec
son successeur. Les connaissances tacites sont ainsi transmises. Il produit des
documents, externalisant ainsi sa connaissance qui est ainsi transmise et
internalisée par son successeur. Étant complet, ce programme est
globalement apprécié par la sphère des experts, c'est pour
eux, un des meilleurs moyens de transférer de la connaissance. Dans le
cadre d'un recrutement, l'investissement se calcule sur le nombre de semaines
ou mois indexés sur le salaire du tutoré. C'est un avantage qui
peut devenir un inconvénient. En effet, la qualité du
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
transfert de connaissances dépend de sa durée.
Or d'un point de vue financier, les managers auront plutôt tendance
à vouloir réaliser des économies. Suivant l'enjeu du
transfert pour le manager, la durée sera ainsi plus ou moins longue.
Cependant, afin de réaliser le tutorat, tout comme le « succession
planning », il est important de déterminer les actions de
chacun.
2.3.1.2. Chaque acteur joue un rôle
particulier
Les rôles sont tenus par un ou deux experts qui
transfèrent leurs connaissances de façon directe (par
socialisation) ou indirecte (par le transfert d'une base documentaire
essentiellement). Cependant, quelle que soit la situation, d'autres acteurs
peuvent entrer en jeu. Par exemple la planification d'actions pour le transfert
de connaissances lors d'un recrutement est réalisée avec le
manager. L'expert et le manager s'entendent sur une série de
tâches nécessaires avant le départ à venir. Pour le
manager, cela demande d'accompagner l'expert et pour ce dernier de
réaliser ces tâches, ce qui prend du temps. Cependant, sur le
terrain, par manque de temps et de moyens, ces actions ne sont pas toujours
réalisées, voire planifiées. En ce qui concerne le
système de tutorat, deux acteurs doivent s'entendre auparavant : il
s'agit du département des Ressources Humaines qui intervient sur le
processus de mobilité d'un point de vue administratif et des managers
qui prennent la décision d'intégrer ou non le nouveau
collaborateur avant la date de départ de l'expert. Ainsi, soit le
manager et l'expert font part aux RH d'un projet de départ, soit les RH
effectuent une veille sur leur population et alerte le manager et l'expert d'un
potentiel départ. Sur le terrain, les situations sont là aussi
très différentes. Il n'y a pas de règle et chaque
unité étant indépendante sur ce sujet, il n'est pas
possible de faire ressortir un état des lieux à la fois
précis et global. De plus, il n'existe à ce jour aucune personne
qui soit chargée de vérifier le bon transfert des documents,
fichiers informatiques ou connaissances lors des mouvements de personnels.
Ainsi les RH effectuent le processus de mobilité sans pour autant
être engagées sur cette question de transfert de connaissances.
Les managers mettent en place ce système selon les ressources et le
temps dont ils disposent. Aujourd'hui, comme partout ailleurs, le manager est
en demande de ressources de tous types, dont le temps. Une posture proactive,
de coopération entre RH et manager permettrait de mieux gérer les
ressources afin de réaliser ce transfert de façon optimale.
Prévenir les parties prenantes d'une mobilité (interne ou
externe) devient alors un enjeu qui peut se révéler important.
Pour cela, il est nécessaire que les acteurs puissent se coordonner et
prévoir plusieurs mois, voire années, pour la mobilité des
experts.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Cette coopération entre RH et manager devient alors le
point central pour la réalisation d'un transfert efficace de
connaissances. En effet, plus le transfert est réalisé en amont,
plus il pourra passer d'un « succession planning » à ce que
l'on peut nommer un « proactive planning » et plus le système
de tutorat pourra être efficace. En outre, il est nécessaire de
mettre en place un système d'incitation pour les managers et experts,
car chaque acteur doit y trouver un intérêt personnel afin que le
système fonctionne au mieux et sur du long terme.
Tous ces systèmes de transfert de connaissances que
nous avons vus jusqu'à présent sont la résultante
d'actions coordonnées entre plusieurs acteurs et non uniquement de
l'expert. Nous avons pu identifier les difficultés rencontrées,
ce qui nous permettra d'apporter des éléments de réponses.
En prenant un regard différent, nous voyons que l'expert a d'autres
moyens de transférer ses connaissances tout au long de sa
carrière. Ce transfert est alors réalisé de façon
plus ou moins intense selon son niveau d'expertise, son réseau, son
domaine d'activité et sa personnalité. Ainsi, plus le niveau
d'expertise est élevé, plus il sera amené à
exporter ses connaissances en interne comme en externe.
2.3.2. Les moyens de partage de connaissance dans la
carrière de l'expert
En matière de transfert de connaissances, Areva a mis
en place un moyen permettant de réaliser des formations en interne.
2.3.2.1. Créer des cours
Ainsi, les experts peuvent réaliser des cours
à destination d'ingénieurs ou pour d'autres experts au sein
du groupe. Cela a l'avantage de transmettre de façon explicite des
connaissances à un plus grand nombre de personnes. Les capacités
d'externalisation et d'internalisation de connaissances des experts sont alors
fortement mises à contribution. Cependant, ce support est utilisé
de façon très ponctuelle pour diverses raisons. Pour
réaliser un cours, il est nécessaire de connaître ses
interlocuteurs, il doit y avoir un besoin, une demande. Cette règle vaut
pour tout transfert de connaissances. S'il n'y a pas de demande ni de besoin,
soit aucun transfert n'a lieu, soit le processus n'est pas conservé. Par
ailleurs, cela ne peut se faire sans investissement, soit sous la forme du
temps passé à réaliser les cours soit sous la forme d'un
support (outil d'enregistrement, support documentaire, plate-forme
informatique). Ce dernier doit alors être en cohérence avec les
besoins. L'expert doit saisir
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
pleinement les tenants et aboutissants de l'opération.
Une coopération entre les différentes parties prenantes est donc
une nouvelle fois nécessaire.
Les cours sont ainsi une bonne méthode de transfert de
connaissances. Cependant, peu d'experts en réalisent, car ils sont
très spécifiques. Il existe alors un autre moyen de
transférer des connaissances, plus largement ouvert à la
communauté scientifique.
2.3.2.2. Les documents de synthèse
Durant leurs travaux de recherche ou lorsque les
résultats souhaités ont été obtenus, certains
experts prennent la décision d'écrire des documents de
synthèse. Ils permettent de récapituler la démarche,
les calculs, les outils utilisés, les méthodes employées
et enfin les résultats d'une ou plusieurs recherches. Ils permettent
aussi à un expert de clôturer sa carrière d'expertise. Le
nombre de pages dépend du contexte et de l'objectif du document qui peut
faire plusieurs centaines de pages notamment lors du départ à la
retraite d'un expert. L'objectif est de pouvoir mieux capitaliser les
connaissances et ainsi de pouvoir les développer plus aisément
par la suite. Cette réalisation dépend principalement du mode de
fonctionnement des experts et de leur niveau d'expertise. Plus il sera
élevé, plus la réalisation de tels documents sera
opportune à des fins de partage. Ils peuvent d'ailleurs aider l'expert
à réaliser plus tard des cours, des conférences et des
articles qui participent à la circulation des connaissances explicites
au sein de l'entreprise. Cette méthode est relativement répandue
puisqu'elle ne demande pas de moyen particulier ni de coopération
obligatoire avec d'autres acteurs. Cependant, plus le document est
conséquent, plus il sera important d'effectuer des relectures pour
s'assurer que le contenu est non seulement compréhensible, mais aussi
exploitable.
De plus, la démarche devra être soutenue
grâce à des outils d'hypertexte46 afin
d'améliorer les capacités de ces documents à transmettre
de la connaissance de façon efficace. Par ailleurs, il est important
pour tous les documents que l'expert indique scrupuleusement les sources des
informations données, ce qui permet alors de revenir sur certaines
notions non maitrisées. Ces notions sont fondamentales, car si elles
font défaut, le document sera inexploitable et tous les jours de travail
passés à sa réalisation seront perdus. Par ailleurs, le
stockage de ces
46 Dictionnaire Larousse : Technique ou
système permettant, dans une base documentaire de textes, de passer d'un
document à un autre selon des chemins préétablis ou
élaborés lors de la consultation, [en ligne], consulté le
3 octobre 2016, URL :
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/hypertexte/41106
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
documents est aussi une question importante, car il
définira son accessibilité au sein de l'entreprise.
D'après les experts Areva, il est crucial de faire en sorte que les
connaissances soient disponibles en interne pour ainsi limiter les
investissements. En effet, un simple abonnement à une revue scientifique
peut coûter 200k€. La gestion documentaire est donc importante. Il
existe à ce jour des plates-formes de type SharePoint pour stocker les
documents. Cependant, leur utilisation n'est pas toujours optimisée en
vue des capacités du logiciel. La qualité des méthodes de
classement des documents et des plates-formes pourra alors déterminer
une partie de la valeur du document. En effet, un document qui n'est pas
consulté est un document qui n'a potentiellement pas de valeur au moment
présent. Cela demande aussi du temps pour le réaliser, ce que n'a
pas toujours l'expert.
2.3.2.3. Organiser des conférences
La sphère scientifique a régulièrement
recours aux conférences pour présenter les
résultats des travaux de recherche. C'est sur ce principe que les
thèses sont soutenues en public ou que les résultats des chaires
sont publiés dans les revues scientifiques. Il en va de même pour
les experts appartenant au monde de la science et de la technique. Les experts
de niveau 3 (Fellow) participent à des conférences tant
nationales qu'internationales ou les organisent en relation avec des
entreprises et organismes reconnus. Par exemple, un expert Areva peut
participer à une conférence avec l'AIEA ou l'ASN où il va
côtoyer des membres d'EDF et de nombreuses autres multinationales. Bien
entendu, ce type de rencontres ne va pas nécessairement permettre
à l'expert de découvrir un nouveau mode de calcul pour ses
recherches. Cependant, elles lui permettront d'enrichir son réseau
professionnel tout en lui ouvrant des axes de recherches ou des enjeux sur
certains domaines scientifiques. Cela peut être l'occasion de
découvrir de nouvelles technologies et d'ouvrir un nouveau champ de
réflexion lui permettant de capter des connaissances directement
applicables dans son domaine scientifique. C'est ainsi à ce titre que la
reconnaissance par les pairs, inclue dans la définition même de
l'expert, prend forme. Le transfert de connaissances est ici basé sur
une connaissance plus tacite qu'explicite. Il se réalise sur un plan
transverse, avec ses pairs, et les conférences participent à la
création d'un réseau d'experts.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
2.3.2.4. Rédiger des articles scientifiques
Enfin, selon son niveau, l'expert écrit plusieurs fois
dans sa carrière des articles scientifiques avec plusieurs
objectifs. Le premier est de participer à la création d'un savoir
et à la capitalisation de connaissances tant internes qu'externes
à l'entreprise. Il s'agit de conserver les traces des travaux
réalisés. Il s'agit aussi de faire connaître ses recherches
auprès de ses pairs. En effet, conformément à la
définition d'un expert, ce dernier recherche l'approbation, la
reconnaissance de ses pairs sur le résultat de ses travaux. C'est en
effet ce qui lui permettra de « dire vrai », d'avoir un poids, de
montrer la maitrise de son sujet. Ces articles peuvent être
publiés soit en interne, soit en externe, car selon le niveau de
l'expert, la reconnaissance doit se faire aussi à l'international. Par
ailleurs, les publications sont aussi réalisées à
plusieurs. En effet, les sujets d'expertises sont « multi-physiques
», « multi-métiers » d'après les experts
interviewés. Les domaines étant aussi très pointus, il est
nécessaire de faire appel à son réseau. Il est alors
fréquent que les experts publient leurs travaux sur internet grâce
à des sites professionnels destinés aux scientifiques comme le
désormais renommé « Research Gate »47. Chez
Areva, des réseaux formels et informels se sont développés
comme nous allons le voir dès maintenant.
2.4. Le transfert collectif de connaissances
2.4.1. L'identification des connaissances critiques
2.4.1.1. L'état actuel des domaines de
connaissances chez Areva
Avec la mise en place de l'expertise et des carrières
d'experts, les connaissances ont été regroupées par
domaines et sous-domaines. Ainsi, une vue globale et un état des lieux
sont devenus possibles. Leur identification est aussi un repère pour les
groupes, les réseaux et les communautés d'experts. C'est un
préalable indispensable à la structuration de l'expertise au sein
d'une entreprise. Ainsi, pour l'ensemble du groupe Areva, 14 grands domaines et
100 sous-domaines d'expertises scientifiques et techniques ont
été identifiés pour la dernière campagne de
nomination des experts. Deux autres domaines spécifiques ont
été identifiés regroupant à eux deux 20
sous-domaines. Suite à cela, le directeur scientifique Areva et le
47 Ce site créé en 2008 est un de
plus importants réseaux de scientifiques, en libre accès avec
plus de 100 millions de publications et 11 millions de chercheurs inscrits. Ce
site permet alors la mise en relation des experts partout à travers le
monde.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
responsable de la gestion des connaissances, appuyé par
le collège des fellows et les experts séniors ont effectué
une analyse précise de l'état des recherches scientifiques, des
nouvelles offres et activités quotidiennes de chacun des domaines au
sein d'Areva. Pour chacune d'elles une analyse a été
effectuée sur les niveaux d'expertise suivant trois critères : le
niveau d'impact pour Areva, les exigences actuelles des autorités de
sûreté et les exigences futures. À noter que chez EDF,
l'identification des connaissances se fait par l'expert lui-même tous les
trois ans lorsque la mission de l'expert est « questionnée »,
mais aussi tous les ans lorsque la « Revue de compétences » a
lieu à la R&D48. Pour Areva, cela se fait tous les deux
ans. Pour chaque domaine de connaissances, Areva peut identifier les
éventuelles actions à réaliser afin de répondre aux
enjeux stratégiques qui s'imposent à elle (être en
adéquation avec les attentes des organisations types clients et
autorités de sûreté). Hormis l'aspect stratégique
d'une connaissance pour l'entreprise, cette dernière devient «
critique » par le niveau de maitrise et le nombre d'experts
détenant cette connaissance. Ainsi, moins il y a aura d'experts sur une
connaissance stratégique, plus elle sera en capacité d'être
perdue. Il est donc important de s'intéresser à la population des
experts présents sur chaque domaine d'expertise.
2.4.1.1. Identifier la population des experts
Sur le courant de l'année 2015, 180 « Experts
clés »49 ont été identifiés
permettant un état des lieux et la mise en relief de certains domaines
en difficulté. Ainsi, le niveau de criticité a pu être
évalué pour chaque domaine de connaissances selon l'importance
stratégique, le nombre d'experts-clés présents et les
besoins de développement des technologies. Dans certains domaines, les
Experts-clés sont en sous-nombre par rapport aux besoins de
l'entreprise, ce qui occasionne des risques importants de perte de savoir.
Cette identification permet de mettre un point d'attention sur le transfert, le
développement et le partage des connaissances des Experts-clés au
sein du groupe. Leurs potentiels départs doivent ainsi être
surveillés de près. De manière générale,
c'est sur cette population que les plus grands efforts de vigilance doivent
porter. Cependant, étant données l'actualité du groupe et
sa séparation en deux entités principales, les domaines et les
experts se retrouvent eux aussi divisés entre New Areva et
48 Stéphane Andrieux (Directeur scientifique
EDF R&D), Reconnaitre l'expertise, mais surtout mieux la
solliciter, Revue Générale Nucléaire, numéro 4
Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.34-37
49 Les « Experts clés » ont
été identifiés par les managers et leurs pairs comme ayant
un haut niveau de connaissance qui, en cas de départ sans transfert de
connaissances, représenterait pour Areva une perte de connaissances
certaine.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Areva NP. Ainsi, avant le plan de départ volontaire,
414 experts (tous niveaux confondus) ont été identifiés
pour la structure New Areva. Au 22 août, 40 experts étaient
enregistrés comme étant partis ou sur le départ d'ici
à 2017 ce qui donne un ratio de départ de 9,6%. Pour comparaison,
le pourcentage des départs d'experts sur les mêmes
périmètres avant le PDV, entre 2013 et la fin 2015, était
de 7% environ. Cependant, ce chiffre aura probablement augmenté à
la date de fin des départs possibles avec la PDV. De plus, selon le
niveau d'expertise, ce ratio augmente. Ainsi, à l'horizon 2017, ce
serait plus de 80% des experts de niveau 3 qui seraient partis grâce au
PDV. En effet, le dispositif intègre plusieurs possibilités pour
permettre le départ des collaborateurs vers la retraite. Or les experts
de niveau 3 ont, logiquement, la moyenne d'âge la plus
élevée. C'est donc cette population qui est la plus à
même de partager ses connaissances.
En parallèle, il est important de noter qu'une
connaissance seule n'existe pas. Comme nous l'avons vu
précédemment, les technologies sont multiphysiques. Elles
regroupent plusieurs domaines de connaissance. La carte à la page
suivante (créée par un collaborateur au sein d'Areva) montre 110
domaines et sous-domaines d'expertises.
Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Figure 5 : Représentation graphique de
l'expertise chez Areva
Sur cette carte, plus un noeud est épais, plus cela
montre son interconnexion avec d'autres domaines. Les liens entre chaque noeud
représentent les experts et les couleurs une communauté de
connaissance distincte. Cette carte montre à la fois l'isolement et
l'interconnexion des domaines ou sous-domaines. Nous voyons ici que certains
sont maitrisés par un seul expert et d'autres par plusieurs dizaines
d'experts et la carte met ainsi en avant le niveau de criticité des
domaines et sous-domaines.
2.4.1.1. L'identification des technologies critiques
chez EDF
Au sein d'EDF, le raisonnement n'est pas effectué en
termes de domaines et sous domaines de connaissance, mais suivant la «
capacité à maitriser une technologie ». L'entreprise
raisonne ainsi selon la maitrise d'une connaissance globale. Pour chaque
technologie, il existe un responsable qui identifie les collaborateurs
travaillant pour cette technologie avec leur niveau de maitrise de cette
dernière. Leur importance est évaluée selon trois niveaux.
Certains sont identifiés comme « non nécessaires à la
maitrise » de la technologie, car leurs
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
connaissances sont « génériques »,
c'est-à-dire qu'elles peuvent être retrouvées
aisément sur le marché du travail. Le deuxième niveau
regroupe ceux dont le départ rendra difficile la maitrise de la
technologie. Il faudra environ 6 mois pour remettre une nouvelle personne au
niveau de connaissance nécessaire pour que la technologie soit
maitrisée. Enfin, le troisième niveau concerne ceux dont le
départ engendre la perte totale de la capacité de l'entreprise
à mettre en oeuvre la technologie50. Il faudra alors
plusieurs années pour reformer une personne afin de réunir les
conditions nécessaires à la maitrise et à la mise en
oeuvre de la technologie. Pour la majorité des technologies, il faut
plusieurs experts sur un ou plusieurs domaines de connaissance pour que
l'entreprise en ait sa maitrise. Par ailleurs, pour Stéphane Andrieux,
Directeur scientifique de la R&D, « l'essentiel pour l'entreprise est
de savoir transmettre ce qui ne s'apprend pas dans les livres ou hors d'elle
» parce que « la vraie transmission de l'expertise, ce n'est pas la
transmission des connaissances, mais la transmission de la culture
d'entreprise, de son expérience et de son patrimoine technique
»51. Par ce témoignage, EDF montre à quel point
la prise de recul et une vue globale sont importantes.
Cette vision par technologie permet alors d'identifier plus
rapidement les acteurs clés dans une société. La
connaissance collective priorise l'idée de pouvoir mettre en oeuvre une
technologie face aux connaissances individuelles qui sont improductives si
elles sont isolées. La direction d'une entreprise aura alors plus
d'incitation à investir dans un programme visant à conserver une
technologie, car elle en voit directement les enjeux. Le transfert des
connaissances des acteurs identifiés comme critiques aura alors plus de
probabilité d'aboutir, car les enjeux seront plus rapidement
identifiables.
En effet, l'objectif de l'entreprise est de répondre au
client par la maitrise de ses technologies nécessaires à la vente
de biens ou de services. La stratégie de l'entreprise est alors
directement en adéquation avec la nécessité de transfert
des connaissances. Le résultat reste le transfert de connaissances, mais
l'approche différente de la situation donne de meilleures
capacités d'action de la part des dirigeants. Une vision ainsi globale
semble plus profitable.
50 Comme nous l'avons vu, les domaines de
connaissance sont multiphysiques, ce qui signifie qu'une technologie
réunit plusieurs domaines de connaissance pour être mise en
oeuvre.
51 Stéphane Andrieux (Directeur scientifique
EDF R&D), Reconnaitre l'expertise, mais surtout mieux la
solliciter, Revue Générale Nucléaire, numéro 4
Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.34-37
Page 56 sur 113
Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
2.4.2. Les différentes formes de communautés
existantes chez Areva
2.4.2.1. Le collège des fellows
Chez Areva, les groupes d'experts peuvent se retrouver sous
plusieurs appellations. Ainsi, le « Collège des Fellows »
(CdF) est un groupe d'experts de niveau 3 fondé en 2014 par le directeur
scientifique d'Areva. Son objectif a été dans un premier temps de
réaliser un bilan complet à destination du COMEX permettant
d'évaluer les forces et les faiblesses de la filière expertise
afin de fournir des préconisations nécessaires pour anticiper les
besoins futurs. Il a donc été nécessaire de donner une vue
globale sur l'expertise chez Areva. C'est la raison pour laquelle trois
documents récapitulant l'état actuel de l'expertise ont
été communiqués à la fin de l'année 2015 au
COMEX. Nous l'avons vu, cela a permis l'identification des connaissances
critiques et des « Experts-clés ». Des recommandations ont
été émises et une partie d'entre elles ont
été mises en oeuvre. Ainsi, les communautés « Tech
Talks », dont nous parlerons par la suite, sont apparues. La mise en place
de « Domain leader »52 a été soutenue pour
favoriser le développement des communautés. Un rapport
scientifique annuel a aussi pu être publié permettant de recenser
les réalisations scientifiques importantes sur l'année
écoulée. Il a eu pour objectif de démontrer la valeur
créée par les sciences et techniques au sein d'Areva. Il
participe ainsi activement à montrer les enjeux des connaissances chez
Areva et donc à la nécessite de les capitaliser et de les
transférer. Ainsi, cette communauté n'a pas pour objectif le
partage de connaissances, mais la protection directe et indirecte de
l'entreprise contre ses éventuelles pertes de savoir. Si l'on devait
calculer son ROI53, cela reviendrait à calculer les
éventuelles pertes économiques (dues aux pertes de savoirs) par
rapport aux gains réalisés si les connaissances étaient
restées présentes chez Areva. Par ailleurs, les recommandations
du CdF ont été de redémarrer le programme GapExpert.
Recommandation suivie, puisque le programme va être relancé
prochainement. Par ailleurs, nous avons vu précédemment que les
Chaires et CIFRE avaient besoin que les programmes, informations et budgets
soient consolidés, ce que le CdF a recommandé de faire. Il a
aussi fait la même recommandation pour les projets scientifiques
menés par les experts séniors et fellows, ainsi que pour les
participations aux conférences internationales dont l'accès
serait donné en priorité aux réseaux techniques. Par
ailleurs, avec la cession d'Areva NP à EDF, il a été
recommandé de dupliquer le collège des fellows dans les deux
entités avec la mise en place
52 Domain leader : personne chargée d'animer
une communauté. Il a aussi un rôle dans le transfert des
connaissances.
53 ROI (Return On Investment) : Retour sur
investissement
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
d'une réunion annuelle commune sur la gestion des
experts. Le CdF a aussi recommandé la mise en place des « Tech
Talks » et il a encouragé le développement des « Peer
Reviews » qui constituent des réseaux au sein d'Areva.
2.4.2.2. Les « Tech Talks » et « Peer
Reviews »
Les Tech Talks sont des conférences données par
des experts à destination des managers et des « spécialistes
» (futurs experts) qui sont suivies soit en présentiel, soit sur le
réseau internet d'Areva. Elles portent sur divers domaines de
connaissances maitrisés par Areva. Ainsi entre juillet et
décembre 2014, 4 Tech Talks ont été organisés sur
des technologies comme la « vitrification » ou les « effets
d'irradiation sur le matériel des réacteurs à eau
légère ». Ces conférences ont pour objectif de
permettre la compréhension globale et non la maitrise pleine d'une
technologie par les managers et spécialistes. Cependant, elles
permettent de faire circuler l'information sur les technologies d'Areva
d'autant plus qu'elles sont enregistrées et stockées pour des
utilisations futures. Elles contribuent ainsi à la capitalisation de la
connaissance. Ce partage de connaissances est d'autant plus intéressant
qu'il permet aussi d'identifier les experts travaillant sur ces technologies et
donc les réseaux qu'ils constituent. Lors des Teck Talks, de vrais
réseaux se constituent, ce qui contribue aussi à la
création de connaissances collectives.
La Peer Reviews, littéralement la « revue par les
pairs », entre pleinement dans le processus de collaboration entre les
experts. Il n'a pas pour vocation de participer au transfert de connaissances
à proprement parler. Cependant, il s'agit de donner la capacité
pour Areva de développer l'autocontrôle au sein des réseaux
de la filière expert. Cela passe alors par une collaboration et donc un
transfert de connaissances tacites. Les BU et la DRD choisissent des projets
sur lesquels des Peer Reviews seront mis en place. Elles ont pour objectif
d'aider à identifier et à atténuer les risques
technologiques, scientifiques et techniques des projets. Concrètement,
des experts de niveau 3, par exemple, vont émettre des recommandations
sur un projet de recherche afin d'en améliorer la qualité. Ce
système était déjà mis en place chez Areva et le
CdF a permis de confirmer et soutenir ces actions.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
2.4.2.3. Les réseaux techniques
Comme nous le voyons, les communautés chez Areva sont
plus ou moins organisées. Le témoignage d'un expert montre que
plus le réseau est développé et dynamique, plus les flux
de connaissances sont puissants et permettent une transmission rapide des
connaissances. En effet, cet expert a pu travailler aux États-Unis et
s'est aperçu qu'après un an de travail, il avait réussi
à acquérir au moins autant de connaissances qu'après 5 ans
de travail en France. Dans les raisons évoquées,
l'omniprésence des communautés et du travail en groupe ainsi
qu'une réelle capacité à faire circuler la connaissance.
Ainsi, pour cet expert, il est beaucoup plus intéressant de travailler
en réseau que de travailler seul. Cette caractéristique
très ancrée sur le sol américain l'est dans une moindre
mesure en France ce qui explique cette différence de capacité
à internaliser de la connaissance en une seule année.
Par ailleurs, il est dénombré pas moins de 29
réseaux techniques regroupés sur des technologies
différentes dans l'ensemble du groupe Areva. Ainsi il existe le
réseau « ION-A (Uranium Chemistry) », « Robotics »,
« Virtual reality » ou encore « Vitrification ». Chacun
d'eux est soutenu par un SharePoint dédié. Ils ne sont pas
composés exclusivement d'experts et ils ont pour objectifs de partager
de la connaissance, d'acquérir une culture globale, une ouverture sur le
groupe afin d'obtenir une synergie entre les acteurs et d'avoir une approche
multiphysique. Il est important de distinguer les « réseaux ouverts
», c'est-à-dire la mise en relation de plusieurs collaborateurs se
connaissant respectivement et échangeant partiellement des
connaissances, des communautés organisées et reconnues
officiellement. En moyenne les réseaux techniques chez Areva aujourd'hui
sont à mi-chemin entre un réseau ouvert et une communauté.
Pour les plus développés d'entre eux, un responsable dirige le
réseau en collaboration avec un « Knowledge Manager » et des
experts. Ce noyau de collaborateurs est généralement
chargé de faire vivre ces communautés. Leur objectif est de tirer
parti des économies d'une collaboration entre des entités
indépendantes en facilitant la libre circulation des connaissances, des
ressources et des personnes. Pour cela, elles partagent les connaissances,
aident à résoudre les problèmes clés de
l'entreprise, font évoluer les meilleures pratiques et
développent les collaborateurs dans le but d'ajouter de la valeur
à l'entreprise. Elles sont sponsorisées par une organisation, une
direction (comme la DRD). Concrètement cela se traduit par la mise en
place de conférences, de réunions téléphoniques, de
contacts fréquents entre les membres du groupe sous différentes
formes. Plusieurs fois dans l'année, les réseaux peuvent se
retrouver soit en face à face soit via le Net, pour partager sur des
sujets particuliers. Une partie des membres de ces réseaux sont actifs
et peuvent créer du contenu,
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
d'autres sont passifs et uniquement « consommateurs
» de contenu. Leur situation dépend aussi de leurs relations avec
la DRD. Plus cette relation sera étroite, plus elle sera soutenue.
Quatre niveaux de relations ont été identifiés : celui
où aucun support n'est réalisé par la DRD (11
réseaux), celui pour lequel des supports de base (outils, assistance)
sont apportés (7 réseaux), celui où la DRD apporte une
aide financière (4 réseaux) et enfin, le 4e niveau,
celui où le réseau est dirigé en collaboration avec la DRD
(7 réseaux). À titre d'exemple, le réseau « ION-A
» fait partie de ceux ayant un support financier et réalise des
conférences grâce aux experts tous les 2-3 mois sur des
thématiques différentes.
Les différentes formes de communautés que nous
avons vues jusqu'à présent ont des problématiques qui se
rejoignent.
2.4.2.4. Les problématiques communes pour la
mise en place et le développement des communautés
Chaque communauté est différente. Leurs
objectifs, la forme sous laquelle elles se présentent, les ressources
qu'elles utilisent, les moyens de communication, leur structure
organisationnelle, leur durée d'existence ou les plans de
développement sont tout autant de facteurs qui définissent leur
identité. Cependant, dans un contexte donné, des similitudes
peuvent apparaitre. Areva est une société dont la structure
organisationnelle est en silo (BU, Directions et sites géographiques
sont relativement indépendants les uns des autres). L'industrie du
nucléaire et l'ensemble du cycle du nucléaire rassemblent des
métiers différents et poussent ainsi à ce mode de
fonctionnement. La collaboration et le partage au sein, ou même en
dehors, des communautés sont parfois rendus compliqués par une
culture qui a tendance à s'opposer à la notion de
transversalité. En effet, la confidentialité dans le domaine du
nucléaire est très présente, en particulier de par l'enjeu
des informations qui y circulent. Cette culture est ancrée dans
l'histoire du nucléaire qui s'est développée sur deux
fronts : la technologie militaire et la technologie civile. On retrouve
à ce titre certaines similitudes avec le domaine militaire, soit dans le
langage, soit dans l'organisation de l'entreprise. Par ailleurs, de par son
histoire et son secteur d'activité (l'industrie), l'héritage
Taylorien par une segmentation des activités et des tâches est
elle aussi ancrée dans l'entreprise. L'information y est
contrôlée. La transversalité des communautés est
donc rendue plus compliquée. Le premier constat est le suivant : le
niveau de la culture de partage
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
d'une entreprise est influencé par son histoire, son
secteur d'activité et l'héritage tiré d'un courant de
pensée de son pays d'origine.
Ainsi, il est nécessaire pour les communautés
d'être soutenues dans leurs développements. Au sein d'Areva, deux
acteurs principaux peuvent avoir cette capacité d'influence : Le
département des Ressources Humaines et le « Top management »
(COMEX, Directeurs de BU, de directions). Dans plusieurs entretiens, les
interviewés ont identifié ces acteurs pour plusieurs raisons.
Pour le « Top management », ils ont la capacité de mettre sur
la table des ressources financières nécessaires au
développement d'outils qui peuvent soutenir les communautés. Ils
ont une capacité de décider la mise en place de projets et de
communautés. Ce sont eux qui peuvent donner leur autorisation pour leur
création et leur développement. Nous avons vu
précédemment que les communautés de savoir se
développent sans que l'organisation hiérarchique y soit
intégrée. Cependant, au sein d'Areva, le contexte et la forme que
peuvent prendre les communautés diffèrent sur certains points.
Les Ressources Humaines sont aussi un appui sur plusieurs points. Dans un
premier temps, ils sont présents dans le processus de transfert de
connaissances et de mobilité en organisant les systèmes
hiérarchiques au sein de l'entreprise. Or les communautés ont
aussi pour objectif chez Areva, le transfert des connaissances et peuvent y
participer activement selon leur niveau de structure. Dans un deuxième
temps ils appuient les communautés en traitant directement avec les
managers sur la thématique de la gestion des ressources. Ils n'ont pas
vocation à agir directement sur les communautés, mais à en
être « sponsors ».
Dans une ère de difficulté financière,
les ressources sont à ce titre très contrôlées et
les réductions budgétaires ont plus tendance à être
à l'ordre du jour. Ainsi, le temps donné et les ressources
accordées pour l'animation et la participation des acteurs dans leurs
communautés sont aussi une barrière non négligeable.
D'où la nécessité d'être soutenu par le « Top
management ».
La difficulté vient aussi de la nature des
communautés : elles ne sont réellement productives et efficaces
que sur le long terme, ce qui est vrai aussi pour un système de
transfert des connaissances. En effet, la connaissance est
transférée pour qu'elle soit toujours disponible dans 20 ou 30
ans. Ainsi, pour que les communautés soient efficaces et
légitimes, une vision et une stratégie doivent être
données sur plusieurs dizaines d'années. C'est ce qui fait
défaut aujourd'hui dans une économie instable.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Les communautés ont aussi besoin d'être
dirigées et animées par des leaders, des responsables qui ont le
temps et les ressources nécessaires pour cela. La gestion du contenu des
sites intranet ou internet, l'organisation des conférences ou le contact
avec les membres d'une communauté chez Areva doivent être
organisés. En 2014, une technologie a fait son apparition au sein
d'Areva : la fabrication additive. Autrement dit : La fabrication d'objet par
imprimante 3D. Parce que cette technologie peut avoir d'importants retours sur
investissement, une communauté a été créée.
La personne qui s'est intéressée de près à cette
technologie a pu mettre en place une communauté. Des publications
sortent tous les trimestres, des réunions et des journées
dédiées spécifiquement à cette nouvelle technologie
sont organisées chaque année. Des liens et des réseaux se
créent avec les unités. Tout cela prend du temps à la fois
pour être animé, mais aussi pour que la technologie se
répande au sein d'Areva. Les difficultés sont alors de faire en
sorte que les acteurs y trouvent un intérêt particulier et qu'ils
participent eux-mêmes à la création de contenu et aux
échanges.
De plus, pour partager et transférer ses connaissances
dans un objectif de créer une connaissance collective, l'expert a besoin
d'être confiant dans la stratégie de long terme de l'entreprise.
En effet, si la connaissance devient collective, qu'elle est détenue par
d'autres et qu'elle a été externalisée à son
maximum, l'entreprise peut être tentée de réduire les
effectifs d'experts puisqu'elle détient au moment voulu, les
connaissances dont elle a besoin. Cependant, si elle se situe dans une
stratégie de long terme et de développement, elle n'aura aucun
intérêt à réduire le nombre d'experts, car elle
risquerait alors de perdre sa capacité d'innovation et de maitrise des
technologies en évolution. Ainsi, nous le voyons, la vision à
long terme de l'entreprise est primordiale pour créer de la confiance et
donc favoriser le partage.
Enfin, avec l'arrivée des jeunes
générations de plus en plus mobiles et de la numérisation
des échanges, les communautés doivent aujourd'hui
s'équiper d'outils informatiques performants.
2.4.3. Les outils informatiques
2.4.3.1. Stocker de la connaissance
Comme nous avons pu le voir, les outils informatiques sont des
supports nécessaires au transfert de connaissances. Ils permettent de
stocker des masses de données très importantes et sont de plus en
plus populaires avec la numérisation des entreprises. Parce que la
masse
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
d'information est devenue importante au fil des années,
de nombreux outils de gestion documentaire sont apparus et se sont
considérablement améliorés.
Aujourd'hui, Areva possède plusieurs plates-formes de
stockage. La plus communément utilisée est le logiciel «
SharePoint » (cf. Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint. P.105),
développé par Microsoft pour le partage de documents. Il permet
de stocker des documents principalement conçus par Microsoft. Peu ou pas
de fonctionnalités et documents non conçus par Microsoft ne
peuvent donc y être ouverts (ex : Mindmapping54). Cependant,
il a la capacité d'héberger des pages du style « Wiki
»55 pour le partage de connaissances et le travail en groupe.
Areva utilise ce système sous le nom de « Wikipiti ». Pour les
experts, ou de manière générale pour tous les
collaborateurs, il offre la possibilité de partager et rédiger du
contenu dans un système collaboratif. Pour les experts, le logiciel
SharePoint est un outil intéressant, mais il reste cependant encore
aujourd'hui à la marge des utilisations et n'est pas toujours
dynamique.
Aujourd'hui, les experts ont besoin d'un outil qui permette
d'effectuer des recherches rapides et efficaces sur l'ensemble des documents
appartenant à la société. Les recherches se font
aujourd'hui principalement pas mots-clés. Or, il n'existe à ce
jour aucun logiciel existant chez Areva qui réponde à ces
critères. Cela est d'autant plus difficile qu'aucune méthode
globale de gestion documentaire n'a été imposée. De plus,
les recherches par mots-clés nécessitent que les documents de
type PDF et images soient retravaillés via un logiciel de type
OCR56 et les documents audios via des logiciels de reconnaissance
vocale afin de retranscrire les informations. À noter que ces derniers
ne sont pas toujours fiables. Chez Areva, il existe une personne
dédiée au traitement de document via un logiciel OCR, mais la
quantité de documents détenus par les experts de la
société ne permettrait pas de stocker numériquement tous
ces documents. À ce titre, l'enquête montre aussi qu'il existe une
masse importante de documents dits « dormants ». Cela signifie que
des documents contiennent de l'information qui pourrait être exploitable
sans pour autant être ni classé, ni enregistré et
partagé.
54 Mindmapping : Carte heuristique très
utilisée dans la gestion de projet, l'éducation, la formation, ou
le travail d'équipe.
55 Un « Wiki » est une application
permettant la création et la modification de pages à
l'intérieur d'un site web par tous les collaborateurs y ayant
accès. Grâce aux balises il est possible de circuler dans les
différentes notions existantes dans le Wiki.
56 OCR : Optical Character Recognition. Traduction :
Reconnaissance optique de caractère
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
2.4.3.2. Les plates-formes de réseaux
La plate-forme SharePoint a deux fonctions pour les experts
Areva. Elle permet de stocker des données comme nous avons pu le voir
tout en servant de support pour la gestion et l'animation des
communautés. Il est ainsi possible de créer un profil et de
renseigner des informations sur ses expériences, ses travaux. Les
utilisateurs peuvent effectuer des recherches par mots-clés pour
retrouver un expert, un spécialiste dans un domaine de connaissance.
Depuis quelque temps, une nouvelle version a été
installée, ce qui a profondément modifié son
fonctionnement. Ses fonctionnalités ont été rendues plus
compliquées à utiliser d'après certains experts. En effet,
il existe maintenant plusieurs pages accessibles par onglets au lieu d'une
seule regroupant toutes les informations. Ainsi, pour certains, cela semble
ralentir la fluidité de la plate-forme et sa facilité
d'utilisation.
Un autre outil permet aussi de prendre contact avec les
collaborateurs du groupe Areva. Il s'agit d'un annuaire disponible et ouvert
à tous. Il donne accès aux coordonnées pour contacter la
très grande majorité des collaborateurs du groupe (mail,
numéro de téléphone, numéro du bureau, site
géographique...). Il permet d'identifier les personnes dans
l'organisation grâce à leurs informations administratives et
à un organigramme que la personne peut renseigner (entité
d'appartenance, groupe de métier, ...). Les principales
difficultés sont liées à l'actualisation des fiches
personnelles, le renseignement et la nature des informations. En effet, la
fiche est liée à une base de données où les erreurs
peuvent subsister et des données peuvent être manquantes. Enfin,
toutes les informations nécessaires aux experts (domaines de
connaissances, niveau de recherche, etc...) ne sont pas accessibles.
Le logiciel SharePoint permet aussi de structurer une
communauté via des modules pour la création de
présentation et de partage d'informations utiles pour les
communautés. Par ailleurs, chaque réseau technique possède
une page spécifique. Cependant, elle n'est pas toujours
optimisée, car les fonctionnalités semblent compliquées
à utiliser. Il est aussi possible de retrouver tous les domaines
d'expertises chez Areva grâce à un annuaire intégré
au SharePoint. Cependant, les tests montrent qu'il est difficile, dans les
faits, de retrouver rapidement une information et que la fluidité de
navigation et une réorganisation de son fonctionnement permettraient
certainement d'améliorer le résultat des recherches.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Une autre plate-forme indépendante à Areva,
nommée « Yammer »57 (cf. Annexe 8 : La plate-forme
Yammer. p.106) est apparue il y a quelques années. C'est un
réseau social d'entreprise (RSE) qui permet la collaboration, le partage
des idées, le transfert de documents. Racheté par Microsoft, il
permet aujourd'hui d'être intégré à un service
global avec « Office 365 » pour réaliser des documents
à plusieurs ou effectuer des recherches sur les documents
partagés. Le réseau prend progressivement de l'ampleur. Ses
marges de progression sont importantes comme le montre son utilisation par plus
d'un million de personnes et une présence au sein des plus grandes
multinationales (CapGemini, L'Oréal, AMD, Alfa Laval, Cisco ou encore
Telefonica). Ce réseau a ainsi de nombreuses capacités de
développement au sein d'Areva. À ce jour 31 communautés
ont été recensées. Cependant, toutes ne sont pas actives
et d'autres sont composées de 1 à 5 personnes, ce qui est
relativement faible. La sécurisation des informations et des contenus
serait certainement un bon moyen de rendre Yammer plus intéressant
à utiliser.
Il existe donc à ce jour plusieurs moyens de stocker
des données au sein d'Areva. À ce titre, le groupe étant
organisé en silo, il est possible que d'autres outils informatiques
soient utilisés sans pour autant être connus par le plus grand
nombre.
Chez Areva, il existe une multitude de moyens pour que le
transfert de connaissances se réalise au sein du groupe. La
difficulté est ainsi de consolider les informations pour permettre une
optimisation des processus tout en laissant aux unités la
capacité de s'adapter à leur situation spécifique.
L'avenir du nucléaire oblige les entreprises à innover et
développer leurs connaissances ce qui inclut de devoir les
transférer afin de les conserver.
Un terrain favorable au partage des connaissances est
nécessaire pour que les transferts se généralisent au sein
d'une entreprise. Une culture du partage et une vision par technologie peuvent
être un terreau fertile pour le développement des initiatives et
des processus de transfert de connaissances. Les communautés sont des
puissants outils de maitrise des technologies grâce à la
connaissance collective qu'elles génèrent. Leur
développement est nécessaire pour créer un climat de
partage et pousser à des perspectives de long terme.
Nous allons donc voir dès à présent les
moyens qu'Areva pourrait éventuellement mettre en oeuvre pour pallier
les difficultés identifiées dans l'analyse.
57 Yammer est un réseau social d'entreprise
totalement gratuit. Créé en 2008 sur un style « Tweeter
».
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
Troisième partie - Soutenir les efforts
entrepris par Areva
3.1. Un outil pour agir rapidement
3.1.1. Création d'un guide de transfert de
connaissance
3.1.1.1. Faire face au départ des
volontaires
Nous avons vu précédemment que la situation de
l'entreprise avait poussé à la mise en place d'un Plan de
Départ Volontaire. Avec le dispositif spécifique incitant au
départ à la retraite, le nombre d'experts en mobilité
externe en particulier de niveau fellow a fortement augmenté. Nous avons
pu voir aussi qu'il existait des dispositifs que les unités ou les
experts eux-mêmes pouvaient mettre en place. Cependant, la mise à
disposition d'un guide complet aux experts et aux managers permettrait de
pallier les questions comme celles qui apparaissent sur le réseau
Yammer58:
Ainsi, chaque collaborateur Areva aurait la possibilité
de mettre en place de lui-même un transfert de connaissances. Cela
présenterait alors l'avantage de conserver l'autonomie et la
capacité d'adaptation des BU au sein d'Areva.
Le guide ne serait cependant qu'une mesure d'urgence dont la
mise à disposition ne pourrait remplacer un processus et une culture
globale de transfert de connaissance au sein du groupe. Il est ainsi important
de cibler précisément son rôle sur une durée
définie. Ainsi, le guide a pour objectif de pallier l'absence
potentielle d'un dispositif « groupe » unique de transfert de
connaissances. Il doit pouvoir faire office de référence dans le
cas d'un départ d'un expert, mais pourra aussi être
utilisé, en adaptant les étapes, pour la formation de futurs
experts. Il devra être pragmatique et flexible pour s'adapter le plus
possible aux situations du terrain.
Afin de répondre aux besoins de l'entreprise et en vue
du contexte, il est recommandé que la date du livrable soit au plus tard
le 28 février 2017. En effet, sur l'année 2017 à partir du
1er
58 La question a été posée le
7 octobre 2016 par un expert de niveau 2 sur le réseau Yammer d'Areva,
URL :
https://www.yammer.com/areva.com
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
avril, 10 départs d'experts (dont 2 experts fellow)
sont déjà prévus dans le dispositif du Plan de
Départ Volontaire et 5 autres après 2017 (dont 1 expert fellow).
Ces chiffres ne prennent bien entendu pas en compte les départs et
mobilités qui peuvent se réaliser en dehors du PDV. Nous l'avons
vu, les départs étaient d'environ 7% entre 2013 et 2015. Ainsi,
il peut être intéressant pour Areva de mettre en place un guide
ouvert à toute la communauté des experts. Cependant, les «
Experts-clés » identifiés par leurs pairs et les managers
seront prioritairement concernés. Par ailleurs, ce guide doit pouvoir
être réalisé en présence des acteurs majeurs qui
auront un rôle défini dans le processus de transfert de
connaissances. Chaque acteur doit ainsi pouvoir se sentir concerné et
adhérer au dispositif à l'image de la méthode
Cognicoach®59 de recueil ponctuel de
connaissances60. Ainsi, le guide aura d'autant plus de
réussite que chacun des acteurs participe à sa rédaction.
Nous allons donc voir dès maintenant les différentes
étapes nécessaires à sa réalisation.
3.1.1.2. Réaliser le guide de transfert de
connaissance
Nous avons déterminé plus haut que les
différents acteurs directement concernés par un guide de
transfert de connaissances sont les experts, les managers et les ressources
humaines. Pour réaliser le guide, il nous est nécessaire
d'identifier plus précisément chaque acteur afin qu'il soit
intégré dans la démarche. Ainsi nous différencions
pour les experts, le « donneur » et le «
bénéficiaire » (même s'il n'est pas encore expert ou
s'il s'agit d'un groupe de personnes). L'expert « donneur » pourra
alors être un des 180 « Experts-clés ». Le
collège des fellows représenté par le directeur
scientifique de la DRD pourra être bien entendu intégré
à la démarche. La présence d'un Knowledge Manager
(KManager) sera bien entendu une force dans l'établissement du guide.
Pour les managers, il faut distinguer le « top management »
c'est-à-dire le COMEX qui validera la démarche et les «
managers » des deux experts concernés (dans certaines situations il
y a potentiellement un seul manager). Enfin en ce qui concerne les ressources
humaines, le RRH fournira un appui, des conseils et se portera avec le manager,
garant de la bonne réalisation du processus. Le DRH validera la
démarche et le département des Ressources Humaines pourra
effectuer les actions de communication. Dans
59 La méthode montre que si la
réalisation d'un référentiel se fait de façon
collective en utilisant les interactions (questions & réponses) de
chacun, alors le taux d'appropriation des informations et des rôles sera
largement supérieur à une rédaction individuelle.
60 Jean-Yves Prax, Le manuel du Knowledge
Management - Mettre en réseau les hommes et les savoirs pour
créer de la valeur, Dunod, Stratégies et management, Paris,
3e édition, 2012, p.238
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
un premier temps il est nécessaire de réunir les
principaux acteurs (experts, KManager, directeur scientifique, manager(s) des
deux experts, RRH et/ou DRH) afin d'établir un rétroplanning des
différentes tâches. Cela permettra aussi de donner à chaque
acteur une vision globale et unifiée du guide, de définir les
rôles de chacun, de faire remonter les remarques sur le projet et
d'établir une première ligne directive du guide. La
première réunion pourrait donc avoir lieu dans le courant du mois
de novembre 2016. Puis des réunions seront organisées entre les
experts (« donneur », « bénéficiaire »), le
KManager et le(s) manager(s), pour la réalisation du guide. Les phases
de vérifications du guide seront réalisées avec
l'équipe précédente ainsi que le RRH et la validation
faite par le COMEX et le DRH. Enfin une réunion de lancement
présentera le guide dans sa version finalisée.
Afin d'aider à le réaliser à l'aide d'un
premier brouillon, voici des pistes pour l'identification des étapes
d'un transfert de connaissances ponctuel :
Étape 1 : Identifier le « donneur », les
connaissances essentielles à risque qu'il détient et la
date de démarrage de début du processus en fonction de :
l'impact de la connaissance sur la maitrise d'une technologie au sein d'Areva,
de l'isolement de la technologie et de l'expert sur son domaine, du temps
nécessaire pour former une personne sur cette technologie et des besoins
futurs d'Areva.
Étape 2 : Identifier le «
bénéficiaire » et ses besoins, ses domaines de
connaissances, son style d'apprentissage (auditif, visuel,
kinesthésique). Puis mettre en relief les points de correspondance et de
divergence entre « donneur » et « bénéficiaire
» (que cela soit sur les besoins en connaissance, la situation
géographique ou le niveau d'expertise)
Étape 3 : Déterminer les outils les
plus adaptés à la réalisation et au contexte du transfert
(entretiens, collaboration, questionnaires, externalisation sur document,
schématisation des processus, mentorat, formation à distance,
...)
Étape 4 : Définir les objectifs et les
indicateurs de réussite du processus. S'assurer qu'ils sont
réalisables en vue du contexte et de la situation. Donner des dates
limites pour les actions et créer une fiche de suivi
renseignée à plusieurs reprises durant le processus,
permettant d'identifier les freins et d'engager des actions pour les
résoudre. Enfin, il s'agira de s'assurer avec le manager que les
rôles sont compris par chacun.
Étape 5 : Mettre en place les actions, les surveiller
et les évaluer. Pendant et à la fin du processus, il faudra
déterminer si les objectifs sont atteints dans la limite du temps
fixé.
Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
En annexe du guide sera récapitulé l'ensemble
des dispositifs de transfert de connaissances réalisables, dont une
brève description sera donnée avec les définitions
afférentes au transfert de la connaissance (les différentes
formes de connaissances, le schéma SECT,...). Ce guide servira ainsi
d'appui au transfert ponctuel de connaissance et ne devra pas dépasser
une quinzaine de pages, contenu et annexes confondus. Nous devons maintenant
voir plus en détail les bénéfices qui peuvent être
attendus tout en ayant conscience des limites qu'il peut représenter.
3.1.2. Cadrer le projet
3.1.2.1. Évaluer les coûts et la
réussite
En ce qui concerne le coût financier du processus de
transfert, il dépend nécessairement des outils utilisés et
de l'investissement de chaque acteur. Tl est donc flexible, ce qui lui permet
d'être accessible à tous, et peut parfaitement ne
nécessiter aucun investissement financier. Cependant, tout comme la mise
en place du guide, le processus de transfert nécessite un investissement
en termes de temps de chacun des acteurs. Ainsi, pour la création du
guide, aucun investissement financier n'est à prévoir. Les moyens
de réalisation et de communication utilisés seront ceux
déjà en place chez Areva (Intranet, mail, word, etc...). Voici un
calcul, théorique a priori, du temps passé pour sa
réalisation :
Actions
|
Nombre de parties prenantes
|
Nombre d'action
|
Durée
|
Total
|
Identification des acteurs comme vu précédemment et
communication pour la mise en place de la réunion
|
1
|
1
|
4h
|
4h
|
Réunion des acteurs pour la création du guide
|
8
|
1
|
3h
|
24h
|
Réunions des experts et managers avec le KManager
|
5
|
6
|
2h
|
60h
|
Travail nécessaire entre les réunions
|
5
|
5
|
1h
|
25h
|
Réunions de vérification du guide
|
5
|
2
|
1h
|
10h
|
Validation (COMEX et DRH)
|
2
|
1
|
1h
|
2h
|
Lancement / Communication / Mise en ligne du guide
|
1
|
1
|
3h
|
3h
|
Total sur le projet
|
|
17
|
13h
|
128h
|
Ainsi, la durée totale, tous acteurs confondus, pour la
création du guide est de 128h. Ce qui signifie que l'entreprise
investira 128h de travail de ses salariés pour la création du
guide. La
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
durée du projet en heures est égale au nombre
d'actions multiplié par leur durée soit un total de 30h.
Voici un planning théorique en projetant de commencer
la première réunion mi-novembre : Avec une première
réunion entre experts et managers sur la semaine du 21 au 25 novembre et
un intervalle d'une semaine et demi entre chacune d'elle, la dernière
réunion serait planifiée sur la semaine du 23 au 27 janvier. Les
2 réunions de vérification à une semaine d'intervalle se
finiraient sur la semaine du 6 au 10 février. La validation du COMEX et
du DRH pourrait alors être réalisée au maximum fin
février avec un lancement entre le 27 février et le 3 mars
2017.
Pour que le projet soit marqué comme partiellement
réussi, en 1 an, 50% des départs d'experts devront avoir fait
l'objet d'un transfert de connaissances grâce au guide. Pour qu'il soit
réussi, le pourcentage précédent devra atteindre 70%.
Enfin, s'il atteint 85%, le guide pourra être considéré
comme ayant dépassé les objectifs initiaux qui étaient
principalement d'en faire un usage ponctuel.
3.1.2.2. Les limites au guide de transfert de
connaissance
Les bénéfices d'un tel guide sont clairs : comme
nous l'avons vu au début de ce mémoire, son enjeu est celui
d'éviter la perte du savoir et de la capacité à maitriser
une technologie. Ce guide vise ainsi à minimiser ce risque en donnant la
capacité aux experts de transférer leurs connaissances même
quelques semaines avant leur départ. Le calcul des
bénéfices se réalise aisément lorsqu'un expert,
détenant une connaissance-clé pour la maitrise d'une technologie
Areva, est sur le départ. Si le transfert est réalisé,
Areva conserve sa maitrise, si le transfert n'est pas réalisé,
Areva perd la maitrise de sa technologie est les contrats commerciaux en sont
affectés. Par ailleurs, le principal avantage d'une telle
démarche est son adaptation au terrain. Il ne porte en aucun cas
l'obligation de privilégier un outil de transfert plutôt qu'un
autre. Par exemple, en fonction des besoins le tutorat ou la création de
documents sera plus sollicité. Ce sont les besoins des parties qui
feront le choix des moyens utilisés. De plus, cette méthode
permet aussi de s'adapter au niveau de connaissance de l'expert. La
rédaction et les méthodes de classement sont parfois bien
différentes selon les experts. La durée de sa mise en place est
variable, ce qui laisse le choix aux principaux concernés de
réaliser un transfert plus ou moins important, plus ou moins long
suivant les capacités de chacun à dégager du temps et
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
des moyens. Les acteurs participant au transfert peuvent
être plus ou moins nombreux (en faisant appel à une tierce
personne pour mettre en place un cours, un retour d'expérience, etc...).
Par ailleurs, les technologies évoluant, certaines connaissances sont
devenues « obsolètes ». Transférer une connaissance n'a
donc pas toujours une utilité pour l'entreprise. Ce guide doit ainsi
pouvoir être mis en application à bon escient. Enfin, comme nous
l'avons vu, aucun investissement financier n'est requis pour la
réalisation du guide, ce qui peut inciter l'entreprise à le
mettre en place.
Cependant, ces avantages peuvent rapidement devenir les
limites de ce processus. Tout d'abord, il est nécessaire que chaque
acteur puisse reconnaitre ce guide comme un moyen légitime de
transférer de la connaissance au sein d'Areva. Sans cette
reconnaissance, il ne sera pas ou peu utilisé. Ainsi, la communication a
une importance capitale et c'est aussi la raison pour laquelle le COMEX doit
porter sa validation. La faiblesse de ce projet réside dans son statut.
En effet, il ne doit pas s'agir d'un processus standardisé qui
remplacerait une politique et une culture globale de transfert de connaissances
chez les experts. En effet, cela réduirait le transfert de connaissances
à un seul projet ponctuel. Et comme nous l'avons vu, pour être
pleinement efficace, le transfert de connaissances chez les experts doit
être un ensemble de processus passant par la capitalisation et
l'échange de connaissances tout au long de sa carrière. Le statut
de processus ponctuel le rend ainsi moins efficace et donc potentiellement
moins légitime aux yeux de tous. Enfin, ce projet peut potentiellement
ne pas aboutir pour deux raisons principales. Tout d'abord, les acteurs
participant à sa création peuvent ne pas approuver la
démarche parce que certains enjeux ont été incompris ou
inconnus lors de la réalisation de l'enquête et de l'analyse.
Ensuite, parce que les directions et Business Units décideraient de ne
pas adopter le processus.
Ainsi, ce guide d'entretien devra être
rédigé avec rigueur et par l'ensemble des parties prenantes afin
de bien cerner les enjeux et besoins de chacun. Une phase de test pourra
être à prévoir.
Comme nous l'avons vu dans l'enquête, Areva a besoin de
consolider les données, notamment celles qui ont trait aux programmes
mis en place et certains experts ont mis en avant la nécessité
d'établir une gestion documentaire permettant de retrouver rapidement
les documents produits au sein d'Areva.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
3.2. Modéliser la connaissance chez Areva
3.2.1. Proposer une méthode de modélisation
des connaissances
3.2.1.1. Pourquoi proposer de modéliser la
connaissance au sein d'Areva
Durant l'enquête nous avons remarqué qu'Areva
avait mis en place diverses méthodes de gestion des connaissances. Elle
fait aussi appel à des logiciels comme SharePoint de Microsoft. Dans
leur volonté de transférer de la connaissance, les experts ont
aussi identifié la problématique du stockage de l'information.
Entre les cours, les conférences, les articles ou encore les
écrits des jeunes en contrat CIFRE ou stages, la masse d'information est
conséquente. Nous avons vu que les communautés avaient la
capacité à créer de la connaissance collective en agissant
comme un catalyseur des connaissances individuelles. Cela permettait alors de
la modéliser. Or la modéliser permet de la transmettre beaucoup
plus aisément. En effet, la modélisation est l'«
opération par laquelle on établit le modèle d'un
système complexe, afin d'étudier plus commodément et de
mesurer les effets sur ce système des variations de tel ou tel de ses
éléments composants » (GIRAUD-PAMART, Nouv. 1974).
Ainsi, modéliser de la connaissance revient à la rendre
accessible à d'autres pour en étudier les composantes. Ce qui se
traduit par le fait d'externaliser de la connaissance pour permettre de
l'internaliser. En réalisant ces actions, la connaissance se dynamise,
trouve un canal lui permettant d'être transmise à d'autres
individus. Ainsi, la modélisation de la connaissance trouve pleinement
son sens dans le transfert de connaissances.
Cartographier les connaissances d'une entreprise est in
fine un processus nécessaire au transfert de connaissances au sein
de l'entreprise. Sa réalisation donne la capacité aux acteurs
d'agir sur un capital de connaissances qui devient commun à tous. C'est
aussi le moyen de donner aux futures générations la
possibilité d'aller y puiser une capacité d'action. Pour
l'entreprise, c'est un formidable outil qui permet d'accompagner un processus
plus global et en même temps, la garantie de pouvoir reprendre de
façon optimisée les travaux entrepris il y a plusieurs
années de cela par un expert. En quelque sorte, il s'agit de la
sécurisation des travaux sur une technologie. Cela peut être une
base solide pour la création de connaissances collectives. Dans sa
recherche de performance, de développement et de
compétitivité, Areva pourrait ainsi dépasser une partie
des facteurs qui freinent le processus de transfert de connaissances.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
Cependant, cela demande de pouvoir réaliser un travail
de modélisation de manière régulière. Selon les
méthodes de modélisation, les capacités d'actualisation,
les outils utilisés ou les processus mis en place pour leur
réalisation peuvent être profondément différents.
Des méthodes plus ou moins développées sont ainsi apparues
depuis les années 1980. Durant les recherches pour ce mémoire,
deux méthodes se sont distinguées par les preuves qu'elles ont
faites dans de nombreuses entreprises et leur capacité à pouvoir
être suivies et mises en place par des entreprises et acteurs
externes.
3.2.2. KALAM® ou MASK : deux méthodes
différentes de modélisation de la
connaissance
KALAM® ou MASK®, voici deux
méthodes qui ont été développées
après de nombreuses années de recherche, de développement
et de phases d'amélioration. Mises en place aujourd'hui dans de
très grandes entreprises françaises et multinationales, ces deux
méthodes présentent des similitudes et des différences
notamment sur le type de population ciblée.
3.2.2.1. La méthode KALAM® : tournée
vers l'humain
KALAM® signifie Knowledge And Learning in
Action Mapping, ce que nous traduirons ici « Cartographie des
connaissances et de l'apprentissage en action ». La méthode
développée par Jean-Yves Prax, auteur du livre « Le manuel
du knowledge management », a pour objectif d'« animer la cartographie
participative des connaissances et compétences utiles à
l'exécution des tâches d'un processus de l'entreprise ». Pour
la société Polia Consulting qui a déposé la marque
KALAM®, l'Homme doit être au coeur du dispositif. Ainsi,
la dimension participative est très largement mise en avant afin de
démultiplier les capacités de réappropriation des
apprenants (que nous avons appelés précédemment «
bénéficiaires »). La société propose ainsi
d'animer une cartographie participative des processus qui se fera uniquement
sur les connaissances clés, c'est-à-dire les
éléments prioritaires pour l'entreprise. En effet, pour l'auteur,
il n'est ni bon ni nécessaire de vouloir tout documenter. Cela peut
même être contreproductif puisqu'un trop-plein de documentation
n'incitera pas les « bénéficiaires » à revenir
sur un tel processus. Comme le spécifie le cabinet Polia Consulting,
KALAM® permet une approche par processus. C'est aussi
d'après lui un véritable outil de gestion prévisionnelle
des emplois et des compétences (GPEC) nécessaires à la
maitrise des technologies. La transversalité y est aussi un avantage.
L'outil permet alors de concilier deux approches : la partie gestion des
connaissances et la partie gestion des compétences. L'expertise est
ainsi
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
imbriquée dans un système de gestion globale
avec une dimension participative pour permettre d'appliquer cette
méthode à tous les niveaux de l'entreprise. Polia Consulting
s'appuie d'ailleurs sur cet argument en montrant que des ouvriers ou des agents
de maitrise mettent la méthode KALAM® en oeuvre au sein
de leur service.
Dans son livre Jean-Yves Prax détaille 9 étapes
dans la modélisation collective de la connaissance et de
l'apprentissage.
Dans un premier temps il s'agit de cibler les processus
(uniquement) critiques pour l'entreprise qui feront l'objet d'une cartographie.
Pour cela, il sera nécessaire de réunir les acteurs des
différentes unités ou départements (si le processus est
transverse) qui y participent. L'objectif sera alors de déterminer
collectivement sur un logigramme toutes les étapes, partant de
l'évènement déclencheur jusqu'à la
réalisation finale du processus. La deuxième étape
permettra d'identifier et de travailler sur les différents flux
d'information afin de déterminer dans quel sens ils se dirigent, leurs
points de départ et d'arrivée, leurs formes. En troisième
lieu il sera nécessaire de déterminer « Qui fait quoi »
qui se résume par un détail des actions menées par chacun.
Ensuite, en fonction de cette dernière analyse, un indice de
criticité et de vulnérabilité des tâches sera
calculé. De la même manière que nous l'avons vu dans ce
mémoire : si un expert proche de la retraite quitte l'entreprise alors
qu'il permettait l'accomplissement d'une tâche nécessaire à
la mise en place de la technologie, l'entreprise perd sa capacité
à produire cette technologie. La tâche aura un niveau de
criticité et de vulnérabilité maximal. La cinquième
étape est celle de la cartographie des compétences
génériques aux fonctions. L'avantage sur une démarche GPEC
interne est de voir le processus dans sa totalité, y compris dans le cas
où une activité a été externalisée
auprès d'un sous-traitant. C'est à la sixième étape
que la cartographie des connaissances spécifiques à chaque
tâche peut être réalisée. Tous les documents, y
compris les plans, cartes, modes opératoires, consignes d'exploitation
sont analysés. Il sera bien entendu nécessaire de soutenir la
démarche par un outil en ligne qui recueillera l'ensemble des documents
nécessaires à la réalisation du processus qui constitue la
septième étape. Puis l'avant-dernière étape
consistera en la réintégration du processus au sein de
l'organisation afin de permettre l'appropriation de la démarche pour
tous les acteurs dans leurs activités. Enfin, le support
managérial consiste à manager l'ensemble du processus dans une
démarche qualité. Le processus étant observé d'une
façon plus globale, l'évaluation de chaque tâche remonte et
permet le retour d'expérience, une analyse a posteriori. C'est
le reengineering (ou l'application des leçons du
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
retour d'expérience) du processus qui se met en place
avec pour effet, une amélioration du processus.
Cette méthode complète met ainsi l'accent sur
une vision globale et participative de la solution. La méthode MASK est
quant à elle axée sur la connaissance en elle-même.
3.2.2.2. La méthode MASK : orientée
capitalisation
En effet, la méthode MASK est basée uniquement
sur la modélisation de la connaissance. Les aspects de type GPEC ne sont
pas pris en compte, car la méthode part de l'analyse de ce qu'est la
connaissance. Son auteur, Jean-Louis Ermine, l'a mise au point en 1989
après de nombreuses phases de développement dans
différentes entreprises et en particulier au CEA qui en a alors
déposé une marque « MKSMTM ». Elle peut
être traduite par « Modèle d'Analyse et de Structuration de
Konnaissances »61. Ce modèle propose une vision
systémique d'un projet de capitalisation des connaissances dans une
organisation. Cette dernière fonctionne alors avec trois
sous-systèmes indispensables, le système opérant (ici les
experts), le système de décision (la direction et managers) et le
système d'information (où se situe l'information, comment elle
est stockée). Pour les besoins de la capitalisation des connaissances,
on identifie le patrimoine des connaissances apportées par les «
agents » des sous- systèmes. Il est alors nécessaire pour
modéliser la connaissance, de faire appel à un Ingénieur
des Connaissances ou Ingénieur Cogniticien (IC). Il peut être
interne ou externe à l'organisation. Dans le cas d'un projet où
l'IC est externe, on a souvent en plus un Chef de projet qui fait le lien entre
l'organisation et l'IC. La particularité de cette méthode est
qu'elle peut s'adapter à tous les processus et méthodes de
fabrication d'une entreprise. Cela peut être la création d'une
fiche technique, le démarrage d'un réacteur nucléaire ou
le processus de nomination des experts. Elle ne comporte pas d'aspects
collaboratifs particuliers. En effet, la méthode se base sur la
réalisation d'entretiens entre l'IC et la population interviewée
(ici, les experts). Les connaissances prendront la forme d'un Livre de la
Connaissance (LC) sous format numérique grâce à des outils
de plus en plus connus comme Microsoft Visio, PowerPoint, MindManager ou Xmind
(pour le mindmapping). Certains de ces outils sont payants (MindManager),
d'autres gratuits (Xmind, FreeMind, FreePlane, Mindmapple). Les
61 En gestion des connaissances, la lettre « K
» fait souvent référence à la connaissance.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
avantages du mindmapping sont la fluidité de l'outil,
sa rapidité d'utilisation et de lecture ainsi que son aspect à la
fois synthétique et parfaitement complet.
Pour pouvoir réaliser les interviews, l'IC se base sur
le « macroscope de la connaissance » 62 qui est une
méthodologie pour identifier tous les aspects de la connaissance et
ainsi externaliser le plus de connaissances tacites possibles. Ainsi, la
modélisation de la connaissance avec la méthode MASK se base sur
deux hypothèses cumulées : la première appelée
« sémiotique » part du principe que la connaissance se
perçoit comme un signe qui contient de l'information, du sens, et un
contexte. La deuxième appelée « systémique »
voit la connaissance comme un système global ayant une structure, une
fonction et une évolution. Par exemple, sur une montre, lorsque
l'aiguille est tournée vers le haut (c'est l'information), je prends
conscience qu'il est midi (c'est le sens que je perçois) et qu'à
cette heure-ci j'ai un rendez-vous (c'est le contexte). Par ailleurs, une
montre donne l'heure (c'est sa fonction), possède un mécanisme
particulier (c'est sa structure) et peut avoir la dernière technologie
inventée (c'est l'évolution). Puis à partir de chaque
point de vue « sémiotique » (information, contexte, sens), on
peut analyser l'aspect « systémique » (structure, fonction,
évolution).
Figure 6 : Le macroscope de la connaissance
Ci-contre, le schéma du
« Macroscope de la connaissance » par J-L Ermine,
montre l'imbrication entre le système sémiotique et
systémique.
Pour exemple, l'information (du système
sémiotique) se décrit en termes de données (qui est
l'aspect structurel de l'information dans le système systémique),
de traitements
62 Jean-Louis Ermine. Management et
ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes.
Hermes-Lavoisier, 2008, p.13
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
(qui est l'aspect fonctionnel du système
systémique), de datation (qui est l'aspect évolution de
l'information dans le système systémique). Par souci de
synthèse, nous ne détaillerons pas ici les deux autres
caractéristiques de l'hypothèse sémiotique.
Grâce à ce système, la personne en charge
des interviews va décrypter puis modéliser une connaissance dans
un processus global. C'est donc une méthode exhaustive qui structure la
connaissance. Cela peut être très apprécié par les
experts. À la fin des trois à sept entretiens (pour la
capitalisation poussée), il en résulte le Livre de Connaissance
qui modélise les connaissances en six points de vue : les connaissances
fondamentales, les activités, le contexte historique, les savoirs faire,
les concepts ainsi que l'historique des solutions et de leur justification.
À ce jour, trois versions de la méthode existent
(voir Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK. p.107) : MASK I
pour la réalisation du livre de la connaissance, MASK II pour
l'alignement entre la stratégie de l'entreprise et les
compétences et les domaines critiques, MASK III pour le partage et le
transfert des connaissances. Cependant, MASK II et MASK III sont exclusivement
mis en place par le cabinet KIP en lien avec Serge Ariès et Jean-Louis
Ermine. En effet, ces méthodes ne sont pas modélisées
à ce jour. À ce titre, il existe un Livre de la Connaissance sur
la méthode MASK I. Ainsi, toute la méthode est accessible sur
internet et permet de se former. Le livre « Management et
ingénierie des connaissances : Modèles et méthodes »
(2008) de Jean-Louis Ermine permet aussi de comprendre le macroscope de la
connaissance. Cependant, il semble peu probable que cela permette sa maitrise
totale. Par conséquent, les recours à un Ingénieur des
Connaissances ainsi qu'à une prestation globale sont très
recommandés afin de pouvoir maitriser la démarche.
À noter que la méthode MKSMTM
(aujourd'hui MASK) a déjà été mise en place chez
Areva à une autre époque et dans des circonstances
différentes. En effet, avant la formation du groupe en 2001, Areva NC
(anciennement COGEMA), avait mis en place cette méthode. Il s'agissait
en effet de mettre à disposition de l'entreprise les connaissances
accumulées pendant la phase de R&D (dix ans par 300 personnes) du
procédé SILVA d'enrichissement de l'uranium. L'objectif final
étant alors d'industrialiser le projet dans les meilleures
conditions.
La méthode MASK semble donc être une forte
alternative à la méthode KALAM®.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
3.2.2.3. Définir les besoins pour choisir la
méthode
Areva a ici le choix d'adopter deux démarches
différentes. Il y a l'approche qui consiste à se focaliser sur
les connaissances, la création d'un livre avec la possibilité de
développer une démarche de transfert comme le montre l'annexe 9
(p.107). Ce LC donne accès à une documentation très
exhaustive. La méthode KALAM® se base plus sur une
approche plus globale avec une gestion participative, voir collective de la
connaissance, mais aussi des compétences, proche des communautés,
faisant appel à tous les acteurs d'un processus. Cette méthode
intègre directement le retour d'expérience dans son
fonctionnement.
La question pour Areva doit alors être : a-t-on besoin
d'enrichir un capital de connaissance scientifique et technique ? De
l'organiser et de créer une base commune pour tous ? Ou a-t-on plus
besoin d'avoir une approche par processus ? Par capacité à
maitriser une technologie ?
Dans ce mémoire, l'ensemble de l'enquête ne
permet pas de répondre à ces questions. Ce sont deux approches
possibles ayant leurs avantages et leurs inconvénients qu'il sera
nécessaire d'étudier plus en profondeur par la suite. Il est
important de prendre aussi en compte le contexte de l'entreprise et son
évolution future ainsi que les choix stratégiques de ses
dirigeants. Cependant, quelle que soit la méthode, l'urgence est de
pouvoir sécuriser les connaissances des « Experts-clés
». Ainsi, modéliser leurs connaissances devrait pouvoir être
une priorité lors de la mise en place d'une de ces deux
méthodes.
Par ailleurs, chacune des méthodes nécessite des
investissements dans la formation, le consulting, la mise en place d'outils de
supports. Ainsi pour la méthode MASK il existe deux cabinets qui forment
à la méthode : la société Plénitudes, ou la
société KIP (agrées pour la formation continue). Le «
Club Gestion des connaissances » présidé par Jean-Louis
Ermine, permet aussi la formation pour les entreprises adhérentes
(possibilité d'y adhérer. Formation en janvier 2017). Par
ailleurs, une école forme à cette méthode de
modélisation, l'ENSC de Bordeaux INP. Il est alors proposé des
partenariats avec la mise en place de stagiaires sur trois niveaux
d'enseignements. Areva peut ainsi faire appel à un stagiaire pour la
gestion des connaissances et soutenir la mise en place de MASK. Pour la
méthode KALAM®, une seule possibilité de
formation / mise en place, semble possible avec le cabinet Polia
Consulting. A priori donc, la méthode MASK offre plus de
possibilités de mise en place et un soutien plus important. Cependant,
elle demande aussi peut-être plus d'investissement avec
l'intégration de logiciels de mindmapping et la méthode peut
être plus fastidieuse. Ainsi, le choix entre ces deux méthodes
dépendra des besoins de l'entreprise et des capacités
d'investissement. Cela
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
demandera une étude plus approfondie qui
nécessitera la réalisation d'entretien avec les principaux
acteurs (experts, DRD, KManager) puis l'établissement d'un cahier des
charges avec la validation du COMEX.
Enfin, nous avons vu dans ce mémoire qu'Areva
fonctionnait en silo avec des BU indépendantes les unes des autres.
3.3. Développer une vision collective à
long terme
3.3.1. Favoriser une vision globale
3.3.1.1. Consolider les budgets et les données
RH
Lors de l'analyse sur les programmes mis en place par Areva,
il a été remonté que les budgets des chairs, des contrats
de CIFRE ou encore des services d'Experconnect étaient directement
gérés par les unités de manière
indépendante. Dans un contexte de réorganisation, Areva doit
pouvoir optimiser ces budgets. Pour cela, il est nécessaire de les
consolider au niveau de la DRD afin de permettre le pilotage de ces programmes
sur l'ensemble du groupe. Il serait aussi intéressant de faire remonter
les informations par domaine d'expertise concerné puis de
réaliser une analyse afin d'harmoniser les pratiques. Il s'agirait
d'avoir une vision d'ensemble et de chiffrer les montants sur chaque domaine
d'expertise. L'objectif final sera de pouvoir mieux contrôler les
coûts de ces programmes. Le calcul du retour sur investissement pourra
alors être plus facilement réalisable en coordination avec les BU.
Sa réalisation peut ainsi mettre en évidence l'efficacité,
ou non, d'un dispositif afin d'engager les actions nécessaires à
son amélioration. L'objectif final est de fluidifier le transfert de
connaissances lors de ces processus. En ce qui concerne le dispositif
Experconnect, le résultat de l'enquête montre qu'une partie des
actions peuvent être réalisées avant le départ de
l'expert. L'analyse des budgets consolidés et des motifs de recours au
dispositif permettra ainsi de cibler les actions à anticiper en
priorité. À cela devra s'ajouter une étude plus
approfondie des besoins des experts lors de leur départ à la
retraite afin de fournir les outils nécessaires facilitant la
démarche. Bien entendu, le guide de transfert des connaissances pour les
experts, préconisé précédemment, pourra servir de
base de travail afin de créer un processus plus élaboré
sur le transfert des connaissances dans le cadre d'un départ.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
À la suite de la consolidation de ces données
concernant directement la DRD, il sera intéressant de réaliser
une veille spécifique sur les mobilités (internes et externes)
des experts. Une fois de plus, il est nécessaire de se situer dans une
posture proactive en anticipant les situations à venir. Le
département des Ressources Humaines doit ainsi, grâce aux
données administratives et au dispositif de « people review »
tous les deux ans, anticiper le départ des experts. Cette veille
consistera en la réalisation d'un tableau de bord pour l'ensemble du
groupe, récapitulant en particulier les données suivantes :
âge, âge théorique de départ à la retraite,
durée théorique avant mobilité (interne, externe), motif
de départ, appartenance à la population des «
Experts-clés », domaine de connaissance, présence d'un livre
de connaissance (Si le processus est adopté). Ce tableau de bord,
réactualisé chaque année devra permettre l'identification
anticipée des départs à la retraite. Cette identification
devra être suivie d'actions d'accompagnement à mettre en place
avec les Ressources Humaines, l'expert et le manager.
3.3.1.2. La culture du partage
Nous avons vu jusqu'à présent qu'il existait de
nombreuses façons de transmettre de la connaissance et une partie
d'entre elles ont été analysées dans l'enquête.
Chacune d'elle possède ses caractéristiques, ses avantages et ses
inconvénients. À ce titre, sur le terrain, chacun soutient une
méthode plutôt qu'une autre suivant ses expériences, son
niveau de connaissance, sa perception de la réalité ou encore la
réussite de telle ou telle méthode. Tous peuvent tout de
même s'accorder sur un point : le partage est la condition sine qua
non du processus. Ainsi, développer le transfert de connaissances
se résumerait à développer la culture du partage.
C'est-à-dire insuffler au sein de l'organisation une atmosphère
qui fluidifie les échanges et incite les acteurs à transmettre ce
qu'ils ont eux-mêmes appris. Développer cette culture serait comme
réduire les points de frottement d'un engrenage. La force
nécessaire pour le faire tourner est alors fortement réduite. La
confiance agit de même avec la circulation du savoir. En effet, c'est la
confiance qui motive les personnes à partager (Roulleaux-Dugage, 2007).
En fait, le transfert de connaissances est proportionnel à la confiance
entre les individus. Si une entreprise souhaite transférer de la
connaissance en interne à moindre coût, elle doit favoriser
l'apparition de la confiance entre ses collaborateurs. Martin Roulleaux-Dugage
montre alors dans son livre (2007) intitulé « Organisation 2.0 : Le
knowledge management nouvelle génération », que la confiance
se construit dans la
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
collaboration. Or la collaboration, qui n'est pas naturelle,
commence lorsque les personnes développent une attention et une
écoute permettant de développer un intérêt pour
l'autre. Après le dialogue vient alors la revue par les pairs lorsque
chacun est prêt à accepter la critique de l'autre. À ce
titre, Areva développe petit à petit la revue par les pairs
(« peer reviews »). Au sommet de la pyramide de la confiance se situe
la collaboration synergique. Les acteurs s'ajustent constamment entre
eux, formant un groupe autonome. Ils n'ont plus besoin du système
hiérarchique pour tourner leurs regards sur l'atteinte d'un objectif
commun, ils s'auto-organisent de façon totalement autonome pour cela.
Ainsi, développer la confiance dans une organisation par la
collaboration revient ainsi à permettre aux acteurs d'atteindre
d'eux-mêmes les objectifs de cette dernière. Les gains peuvent
être considérables (économie du système
hiérarchique, rapidité, efficacité, augmentation de la
fiabilité du travail, etc...). Areva a donc de nombreux avantages
à développer la culture du partage. Comme nous l'avons vu dans ce
mémoire, les réseaux sont à l'origine des
communautés. Cependant, ils ne se transforment pas toujours en
communauté. Pour Areva, développer un processus de transfert de
connaissances global reviendrait ainsi à favoriser l'apparition des
communautés. Pour qu'une communauté apparaisse, il est
nécessaire qu'elle soit visible au sein de son organisation
accueillante. Elle doit donc être soutenue en fonction de son niveau de
développement (les quatre périodes de vie de Jean-Yves Prax).
Lorsque la communauté est encore sous la forme d'un réseau,
l'organisation accueillante doit pouvoir favoriser sa mutation en structurant
les espaces communautaires. Martin Roulleaux-Dugage en identifie sept : le
hall d'accueil qui est l'espace d'information, puis l'espace
privé, là où les membres peuvent converser. Il y a
aussi le café, là où le dialogue se noue, puis
les tables rondes où les échanges sont plus formels, il
peut d'ailleurs y avoir les revues par les pairs. Il y a ensuite l'espace
projet où la collaboration est menée, les livrables y sont
produits. Enfin viens l'amphithéâtre, lieu de
communication à toute la communauté et avec l'extérieur,
et la bibliothèque, là où se situe la
mémoire de la communauté. Lorsque le réseau se transforme
et commence à être connu et reconnu, il devient une
communauté. L'organisation peut alors agir directement pour la soutenir
en communiquant dans un premier temps puis en l'aidant à s'animer et se
structurer. Nous allons donc voir les points sur lesquels il serait
intéressant qu'Areva agisse.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
3.3.2. Développer les communautés
3.3.2.1. Les multiples ressources des
communautés
Nous avons vu qu'il y avait chez Areva, des communautés
plus ou moins formalisées, plus ou moins développées. Le
collège des fellows est une communauté qui a été
créée par la direction scientifique Areva. Elle est donc
officielle et a eu des missions précises à réaliser. Les
« Tech Network », sont des réseaux, moins officiels, qui ne
possèdent pas de Lettre de Mission. Leurs niveaux de
développement semblent assez hétérogènes. Pour
Martin Roulleaux-Dugage (2007), lorsqu'une communauté arrive à
maturation (le troisième niveau d'une communauté si l'on
réalise un parallèle avec Jean-Yves Prax), une alliance se noue
avec l'organisation formelle (l'entreprise). Un soutien financier apparait et
des outils de gestion et de collaboration viennent soutenir sa croissance. Ce
qui est alors intéressant de voir, c'est que l'organisation se met
à accompagner les nouveaux entrants dans la communauté.
L'apprentissage prend forme et la publication de documents montre ses
capacités à dégager de la connaissance et à la
partager. Pour une culture du partage, il est donc nécessaire pour
l'entreprise de porter ses communautés vers la maturation. Il existe
pour cela plusieurs moyens.
Pour les réseaux au sein d'Areva, il est important de
pouvoir les soutenir de l'intérieur afin qu'ils puissent se
développer de façon structuré. Pour cela, certaines
actions peuvent les aider de façon directe comme la mise en place d'un
animateur et d'un co-animateur. Un animateur de communauté est un
collaborateur interne à la communauté qui prend entre 20%
à 50% de son temps pour faire vivre sa communauté
(ROULLEAUX-DUGAGE, 2007). Son investissement dépendra du niveau de
développement et des besoins de la communauté. Il s'agit d'une
personne qualifiée et reconnue dans son domaine. Pour cela, il doit
avoir un large réseau professionnel afin de communiquer et mobiliser
rapidement. Son réseau peut être constitué de
collaborateurs internes et/ou externes à l'entreprise. L'objectif sera
en effet d'organiser des conférences ou d'obtenir un soutien pour «
vendre » sa communauté auprès de potentiels sponsors. Il a
ainsi pour tâche de permettre l'intégration de sa
communauté dans l'organisation. Pour cela, il est chargé de lui
donner du sens, de définir sa mission principale et de la communiquer.
En développant les règles et en gérant le «
recrutement » des membres, il permet une croissance structurée et
contrôlée. Si besoin, il devra refondre la communauté pour
lui permettre de s'adapter à un nouveau contexte ou pour faire
évoluer sa structure. Enfin, il facilite les rencontres importantes et
élabore le calendrier des évènements.
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Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
Cependant, il est important de bien concevoir que le
rôle d'un animateur de communauté ne peut être tenu
uniquement grâce à un bon réseau. En effet, sa position
nécessite un vrai savoir-faire professionnel et des méthodes
très spécifiques à maitriser. Deux techniques
(ROULLEAUX-DUGAGE, 2007) semblent plus particulièrement
appropriées pour Areva : la première est la revue par les pairs
et est déjà mise en place chez Areva sous son nom anglais «
peer reviews ». La deuxième est l'analyse de scénario qui
est conçu pour faire face à des changements importants et
incertains dans l'environnement de l'entreprise. Le processus consiste à
rassembler un large éventail de perspectives (des évolutions
technologiques, de la concurrence, d'un marché spécifique ou
global ou encore de l'économie) afin d'envisager des scénarios
différents des prévisions déjà
réalisées par le groupe. Ainsi, cette technique a comme avantage
de permettre aux dirigeants d'une entreprise d'être en mesure de
reconnaitre une situation dès ses débuts. Pour exemple, le groupe
Shell a mis en place cette méthode avant le choc pétrolier de
1973, ce qui lui a permis d'être largement préparé à
la situation. La marque a ainsi considérablement amélioré
sa position concurrentielle sur son marché durant le choc63.
Cela donne aussi la possibilité de prendre les bonnes décisions
bien en amont d'une situation difficile à affronter pour l'entreprise.
Elle réunit alors essentiellement les cadres supérieurs de
l'entreprise avec des experts ainsi que certains managers de l'entreprise afin
d'identifier le plus possible de scénarios dans les moindres
détails (qui pourraient se révéler important). En mettant
en place cette technique, l'animateur valorise largement sa communauté
en faisant participer ses membres à une vision stratégique du
groupe. Il pourra ainsi plus largement « vendre » sa
communauté.
Les investissements de l'entreprise pour la mise en place d'un
animateur peuvent être tout de même rapidement importants. Si l'on
considère que ce dernier investit en moyenne 35% de son temps à
la réalisation de cette tâche, l'investissement sera de 35% du
salaire de cette même personne. Comme il s'agit d'un expert de reconnu
par ses pairs, au moins sur un plan national, parfois international, et
constituant un bon réseau professionnel, le montant de l'investissement
peut rapidement grimper. Suivant les entreprises, un ingénieur chimiste
confirmé gagne en moyenne 102k€/ an64, s'il est
animateur dans sa communauté, l'investissement peut être ainsi de
35,7k€ / an (pour un investissement à 35% de son temps en
63 NetMBA, Scenario Planning, [en ligne],
consulté le 19 octobre 2016, URL : http://www.netmba.com/
strategy/scenario/
64 Romain Proton, Salaire ingénieur :
métier par métier, [en ligne], consulté le 23 octobre
2016, URL :
http://www.ingenieurs.com/infos/salaire-ingenieur-1535.php
Page 83 sur 113
Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
moyenne). À titre informatif, le guide «
Travailler, apprendre et collaborer en réseau » du CEFRIO
(Québec) estime le coût total d'une communauté d'environ 15
membres (actifs chaque semaine), à 125,5k$. Le coût comprend
73,5k$ de frais annuels récurrent, dont 20k$ pour l'animateur ayant un
investissement à 40% de son temps65. Les 52k$ restants sont
essentiellement composés des frais de licence pour l'achat d'une
plate-forme informatique ainsi que le coaching et différentes
interventions extérieures. À noter que les deux autres principaux
points de dépenses sont le coût du temps passé de chacun
des membres (1h/ semaine à la participation de la vie de la
communauté), ainsi que leurs frais de déplacement aux
réunions. En proportion permet d'estimer le coût moyen d'une
communauté au sein d'Areva à environ 90k€ de frais annuels.
Ce chiffre est donné bien entendu à titre indicatif afin de mieux
prendre conscience de l'investissement dans un tel dispositif. Il peut
évoluer suivant l'utilisation les investissements souhaités dans
les outils de partage, le niveau d'engagement des membres, la fréquence
des conférences, etc... Pour le CEFRIO, les données recueillies
dans leur analyse montrent que l'animation est la seule pratique de gestion des
communautés qui soit significativement associée à la
réussite d'une communauté. Afin d'appuyer le travail de
l'animateur, l'entreprise peut faire appel à des jeunes pour la
co-animation. Chez British Telecom ou Schneider Electric, de jeunes
étudiants ont été recrutés en stage afin de prendre
ce rôle. En effet, au sein de leur université, ces derniers
développent des réseaux qu'ils mettent à profit pour
l'entreprise. Ils sont aussi connus pour leur connaissance des outils de
collaboration qui se développent particulièrement dans ce milieu.
Facebook qui était à l'origine, une plate-forme d'échange
entre universitaires à Harvard University, en est le meilleur exemple
à ce jour. Le rôle du co-animateur est tourné vers un
relationnel interne et sur un support à la communication et à la
circulation de l'information. Il est chargé en particulier de publier
les articles écrits par les experts, de partager des informations sur la
plate-forme d'échange et de collaboration afin de faire vivre les
échanges. En publiant du contenu, les membres vont pouvoir réagir
à ce contenu, commenter, argumenter et ainsi créer de
façon indirecte des nouvelles connaissances. Nous voyons ici
l'importance des outils de collaboration. Nous allons donc nous y
intéresser particulièrement.
65 CREFRIO, Travailler, apprendre et collaborer
en réseau - guide de mise en place et d'animation de communautés
de pratique intentionnelles, 2005, p.29, [en ligne], consulté le 23
octobre 2016, URL :
http://www.cefrio.qc.ca/media/uploader/2_travailler_apprendre_collaborer.pdf
Page 84 sur 113
Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
3.3.2.2. Les outils numériques de collaboration
et de partage
Pour une communauté, il existe plusieurs outils
à mettre en place pour favoriser la collaboration et le partage. Il y a
d'une part ceux qui sont liés au monde du numérique et d'autre
part ceux liés à la présence physique du collaborateur.
Dans ce dernier, nous avons vu qu'il existe des outils pour animer une
communauté comme la revue par les pairs ou l'analyse des
scénarios. Ces derniers sont aussi des outils qui déclenchent une
collaboration entre les membres d'une communauté ou avec le reste de
l'organisation. Il en existe d'autres réunissant physiquement les
collaborateurs comme l'open space, les projets ou encore les congrès.
Cependant, à l'ère de l'ultra-connexion, les outils informatiques
de réseaux sont de plus en plus développés et performants.
Ils sont d'ailleurs fortement appréciés par les nouvelles
générations comme vu dans la sous-partie
précédente. Les pages internet de collaboration comme les pages
« Wiki » explosent en nombre depuis quelques années. Elles
offrent la possibilité pour chacun d'apporter sa connaissance.
Cependant, encore à ce jour, ce sont majoritairement des individus
passionnés dans un domaine qui vont contribuer à la
création et à la modification du contenu de ces pages. En effet,
l'adhésion volontaire à une communauté se fait sur la
motivation et la passion pour une activité. Leur nombre doit alors
être suffisant pour que le site internet soit actif. Ainsi, dans
l'hypothèse où les membres des communautés adhèrent
par passion ou intérêt personnel et dans le cas où le
nombre d'adhérents est suffisant le fonctionnement de page Wiki pourrait
avoir une place toute particulière chez Areva. En effet, pour le moment,
les pages « Wikipiti » ne sont pas toujours actives,
optimisées, ni développées dans les domaines
d'activités du groupe. Pourtant, si les conditions sont suffisantes,
leur généralisation l'entreprise pourrait être un atout
puissant, car la collaboration y est forte. Par ailleurs, si la méthode
de modélisation de la connaissance, KALAM®, ou MASK,
venait à être effectivement développée au sein
d'Areva, les connaissances dégagées pourraient être
incluses dans les « Wikipiti ». Ainsi des modifications pourront
être apportés régulièrement afin faire
évoluer les Livres de Connaissances notamment. Une ouverture du Wiki
à l'ensemble du groupe serait alors intéressante pour
développer et diffuser une connaissance tout en favorisant la
collaboration. Un suivi des modifications devra bien entendu être mis en
place pour reconnaitre la contribution de chacun. Ainsi les experts, principaux
concernés par la contribution à la création du contenu des
connaissances, peuvent très largement participer à la
création d'une connaissance collective. Ce sont en effet les plus
à même de maitriser une technologie, un processus de fabrication
grâce aux connaissances qu'ils ont développés dans leur
domaine.
Page 85 sur 113
Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
Cependant, pour pouvoir collaborer rapidement et augmenter le
niveau d'échange, il est nécessaire de pouvoir communiquer
grâce à une plate-forme de type Yammer (cf. Annexe 8 p.106). Les
fonctionnalités permettant l'intervention de chacun, les commentaires,
les simples « Like », la publication d'une demande comme celle que
nous avons vue précédemment, et d'autres encore permettent
à chacun de se sentir concerné. Elles ont pour fonction d'inciter
au partage, même les plus simples. Le « Like », mis en place et
popularisé par Facebook est un des plus formidables outils permettant
aux membres de rester en contact. En effet, même s'il n'y a rien à
dire, même si aucune connaissance particulière n'est à
partager, il permet de montrer sa présence, d'être vu dans la
liste des personnes qui ont « liké » et de montrer son
intérêt pour le sujet. Ils sont des indicateurs efficaces sur
l'activité d'un réseau, l'importance et l'utilité des
sujets partagés. Pour la personne qui publie, il s'agit d'un outil de
mesure qui permet de savoir si son sujet est intéressant, accrocheur,
vendeur ou bien utile à la communauté. Il participe aux mesures
et indicateurs d'activités d'une communauté. Il est
intéressant de noter que le « Like » suit les règles
définies par Karl-Erik Sveiby et Roland Simsons (2002) sur les
indicateurs de performance des communautés. Ainsi, les indicateurs
doivent être définis par la base afin que toutes les parties
soient impliquées, ils doivent être utilisés par ceux qui
les produisent et les résultats doivent être rendus publics afin
que chacun puisse apprendre des autres. Martin Roulleaux-Dugage (2007)
identifie quatre types d'indicateurs appelés « métrique
typique » : les indicateurs d'activité communautaire
(réunions, documents produits, etc.), les indicateurs de capital social
(densité des liens entre personnes, centralité, etc.), les
indicateurs de production communautaire (problèmes résolus,
publications, séminaires, etc.) et enfin les indicateurs de
résultat (satisfaction des membres, des clients, marge sur affaire,
etc.). Pour vendre les communautés auprès d'Areva et obtenir des
soutiens de tout ordre (finance, communication, mise à disposition de
ressources, ...), les communautés doivent s'aider d'indicateurs. Cela
leur donnera alors la capacité de montrer leurs valeurs, leur
développement au sein du groupe ou encore leurs capacités de
progression.
Pour résumer la troisième partie de ce
mémoire, l'entreprise doit pouvoir agir rapidement en soutenant le
transfert des connaissances par un guide à destination des experts et
des managers. Areva peut aussi avoir intérêt de mettre en place la
méthode KALAM® ou MASK pour modéliser et
transférer son capital de connaissance. Enfin, le groupe a tout
intérêt à développer une vision globale et une
culture de partage. Pour cela, il sera nécessaire de développer
les communautés en les soutenants grâce à des animateurs et
co-animateur, de développer la collaboration avec des outils de type
Wiki et des plates-formes comme
Page 86 sur 113
Troisième partie - Soutenir les efforts entrepris par
Areva
Yammer. Il faudra alors vendre ces projets en créant
des indicateurs qui donneront des éléments tangibles de leur
participation aux résultats du groupe.
Page 87 sur 113
CONCLUSION
CONCLUSION
Nous savons maintenant que l'économie mondiale tend
vers l'économie de la connaissance. Les exemples comme celui de la
Corée du Sud sont des preuves vivantes que les organisations ont tout
intérêt à capitaliser à long terme sur leurs
connaissances, les technologies qu'ils ont développées et donc
sur ceux qui les maitrises. Avec le développement des populations, les
demandes en énergie sont en constante évolution. Le
développement exponentiel des technologies connectées fait
croitre de façon proportionnelle la demande en
électricité. Cependant, l'Homme ne peut se permettre de se
tourner indéfiniment vers les énergies à haute
émission de CO2 qui sont principalement utilisées à ce
jour. Les défis environnementaux poussent ainsi l'Homme à
développer ses technologies pour les rendre plus performantes et
à innover pour trouver de nouvelles solutions. L'énergie
nucléaire est une des alternatives qui a encore de forts potentiels
d'évolution. Ainsi, l'arrivée de nouvelles technologies dans ce
domaine permet d'augmenter les capacités de production. Cependant, la
sûreté et la sécurité des installations sont parfois
remises en cause. L'industrie doit ainsi prouver qu'elle peut parfaitement
répondre à ces défis. Pour cette raison, Areva
développe ses technologies à la fois pour les rendre plus
sûrs et en même temps plus performante pour répondre aux
attentes de ses clients. Ses experts détiennent ses connaissances les
plus avancées dans l'entreprise. Le départ de certains
identifiés comme « clés » peuvent faire perdre à
Areva la maitrise de certaines technologies qui étaient essentielles
à la production de service ou de biens envers le client. Il est alors
crucial pour Areva de conserver leur maitrise au sein de son organisation. Pour
cela, le transfert de connaissance dans la population des experts est
fondamental. Or, avec le Plan de Départ Volontaire et une population
d'experts de niveau 3, majoritairement proche de la retraite, Areva fait face
à un défi stratégique de taille. Il s'agit en effet de
transférer leurs connaissances, explicite comme tacite, afin de
continuer à répondre aux attentes de son marché. De plus,
avec le développement du marché asiatique du nucléaire,
Areva a aujourd'hui une importante opportunité de développement
à saisir si elle continue à accompagner ses clients en
particulier grâce à son réseau d'expert. Cela permettra
ainsi au groupe de retrouver le chemin d'une croissance confortable
après plusieurs années difficiles.
Pour faire face à ces différents enjeux,
l'entreprise a mis en places différents programmes et plusieurs
initiatives locales sont lancées par les unités. Cependant, elles
sont aujourd'hui
Page 88 sur 113
CONCLUSION
indépendantes les unes des autres et certains
programmes ont besoin d'être ajustés. Afin de mieux organiser la
filière expertise, le collège des fellows a fourni de nombreuses
recommandations qui permettent à l'entreprise d'orienter plus justement
sa politique et ses actions à ce niveau. L'enquête a ainsi
montré un besoin d'obtenir une vision d'ensemble. Dans un premier temps,
la mise en place d'un guide de transfert des connaissances pour les experts a
été préconisée. Ce guide a pour objectif de
soutenir les besoins accrus de transfert des connaissances des experts dues au
PDV et aux importants départs à la retraite des experts les plus
qualifiés. Dans un second temps, il a été
recommandé de réaliser la modalisation des connaissances des
experts, en particulier, ceux définis comme « clés ».
Cela permettrait à la fois de sécuriser leurs connaissances, de
les capitaliser, et en même temps, d'en faire une base commune pour un
partage transverse au sein de l'entreprise. Cela doit ainsi lancer une vision
d'ensemble et une culture de partage au sein de toute l'entreprise. Pour cela,
Areva doit obtenir une vision d'ensemble. La consolidation des données
et des informations a ainsi été préconisée afin de
mieux anticiper les départs, d'optimiser les programmes mis en place
chez Areva et de mieux contrôler les ressources. Ces mesures doivent
alors s'inscrire dans une dynamique plus large de culture du partage. Cela doit
permettre de transférer la connaissance entre les individus tout au long
de leur carrière, et en particulier en ce qui concerne la population des
experts. Un des avantages serait de tendre vers une
homogénéisation des pratiques et du niveau de service du groupe
envers ses clients qui engendrerait une plus grande confiance de ces derniers
envers Areva. Pour cela, les communautés qui sont vecteurs de
collaboration, de connaissance collective et donc de création de
richesse doivent être soutenues et encouragées dans leur
développement. Des animateurs soutenus par des stagiaires doivent ainsi
permettre de créer une dynamique à la fois interne et externe
à la communauté. L'énergie cinétique ainsi
développée devra permettre de tirer vers le haut les performances
et la croissance d'Areva.
Cependant, toutes ces actions nécessitent un
investissement qui est à la fois humain et financier. Or, pour Areva la
difficulté est justement de pouvoir investir sur du long terme pour
mettre en place une culture du partage grâce aux communautés par
exemple. À ce jour, l'entreprise est dans une situation instable avec la
vente d'Areva NP à EDF qui n'est pas encore réalisée. Il
reste plusieurs opérations financières en attente, comme
l'augmentation de capital du groupe afin de garantir la vente à EDF.
Aujourd'hui, le groupe doit aussi faire face à une
économie toujours instable et difficilement prévisible. Sa
nécessité d'obtenir des résultats à court terme (1
à 3 ans) influence nettement
Page 89 sur 113
CONCLUSION
ses investissements qui seront dirigés vers des actions
de courts termes. Ainsi, le soutien aux communautés peut sembler
aujourd'hui difficile. En effet, les arguments pour le développement
d'une culture de partage par les communautés sont valables sur le long
terme et moins sur le court terme. Comme le précise Martin
Roulleaux-Dugage, une communauté ne commence à être
réellement à son plein potentiel qu'à partir de 5 ans
d'existence minimum et cela peut parfois mettre 10 ans. Les résultats
opérationnels des investissements seront donc particulièrement
visibles qu'au bout de plusieurs années. Il peut donc y avoir de fortes
réticences à réaliser ces investissements. De plus, Areva
est une entreprise qui a eu plusieurs phases de croissances alternées
par des réorganisations. En effet, malgré l'augmentation du parc
nucléaire mondial, chaque centrale est un projet important pour
l'entreprise et mobilise plusieurs milliers de collaborateurs. Ainsi, avec le
développement du marché en Asie (en Chine principalement), Areva
va à nouveau faire face à une demande importante. Les
communautés doivent pouvoir s'adapter alors aux différentes
phases de croissances. Pour cela, elles doivent être suffisamment matures
pour supporter ces évolutions. Les difficultés auxquelles doit
faire face l'entreprise pour la mise en place d'une culture de partage, sont
donc liées à des choix stratégiques à poser. Il
s'agit en effet de préparer l'avenir de l'entreprise en instaurant une
culture de partage qui nécessite des investissements. Le contexte actuel
n'y semble pas favorable, cependant Areva a ici les moyens de contribuer
à la reprise de sa croissance en réalisant ces
investissements.
Certaines entreprises, comme Google, ont compris que la
connaissance pouvait être un facteur de réussite et leur
développement en est le signe. Leur fonctionnement interne le montre :
la collaboration et le partage de connaissance y sont très largement
favorisés. Facebook ou Wikipédia sont des preuves vivantes que
les mentalités ont aujourd'hui profondément évolué
sur le partage de l'information. Les utilisateurs sont aujourd'hui des parties
prenantes actives dans la création et le partage de connaissances. Chez
les jeunes générations particulièrement, l'information
circule de plus en plus vite. Les organisations apprenantes montrent
qu'aujourd'hui la collaboration est de plus en plus ancrée dans les
mentalités en cette première partie du 21e
siècle. Alors que les individus sont de plus en plus autodidactes,
allons-nous observer un changement profond dans le mode d'apprentissage
professionnel ? La formation telle que nous la connaissons aujourd'hui,
va-t-elle un jour, disparaitre pour laisser place aux communautés de
pratique ?
Page 90 sur 113
Bibliographie
Bibliographie
Livres :
P. Cohendet, F. Créplet, O. Dupouët, La
gestion des connaissances- Firmes et communautés de savoir,
Economica, Gestion, Paris, 2006, 202 p.
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communautés de pratique dans l'entreprise, Eyrolles,
Stratégie, Paris, 2007, 258 p.
Jean-Yves Prax, Le manuel du Knowledge Management - Mettre
en réseau les hommes et les savoirs pour créer de la valeur,
Dunod, Stratégies et management, Paris, 3e édition,
2012, 528p.
Hirotaka Takeuchi, Ikujiro Nonaka, La connaissance
créatrice : La dynamique de l'entreprise apprenante, De Boeck,
Management, 1997, 303p.
Jean- Yves Trépos, La sociologie de l'expertise,
Presses Universitaires de France (PUF), Que sais-je ?, Paris, 1996,
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d'un modèle définitionnel et enjeux de gestion, Management
& Avenir, 2014/1 (n°67), p.78-100.
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Bibliographie
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expert, Juillet-Août 2014, p.34-37
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l'expertise scientifique et technique à la Direction de l'Énergie
nucléaire du CEA, Revue Générale Nucléaire,
numéro 4 Etre un expert, Juillet-Août 2014, p.22-28
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Effectiveness of Knowledge Work - an Empirical Study, Journal of Knwoledge
Management, Vol. 6 Iss: 5, pp.420 - 433
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/index.php?page=content/MASK/SA32#MASKI
Ressources internes à Areva :
Philippe KNOCHE, Président du groupe AREVA, Flash
Areva n° 929 - Feuille de route Areva 2016-2020, 15 juin 2016
Fiche « Expert model »
Prévision de croissance de la production
d'électricité par l'énergie nucléaire dans le monde
en 2007
Le logiciel de partage SharePoint
Page 94 sur 113
Glossaire des cigles
Glossaire des cigles
GC : Gestion des connaissances
TC : Transfert des connaissances
KM : Knowledge Management
AIEA : Agence International de l'Énergie Atomique
CEA : Commissariat à l'Énergie Atomique
DRD : Direction Recherche & Développement
PDV : Plan de Départ Volontaire
PDA : Entretien de performance et de développement
CIR : Crédit Impôt Recherche
ANRT (Association Nationale de la Recherche et de la
Technologie),
CIFRE (Convention Industrielle de Formation par la
Recherche)
COMEX : Comité Exécutif
ROI : Return On Investment = Retour sur investissement
CdF : Collège des Fellows
RRH : Responsable Ressources Humaines
Annexe 1: Prévision de croissance de la
production d'électricité par l'énergie nucléaire
dans le monde en 2007.
Annexe 1: Prévision de croissance de la
production d'électricité par l'énergie
nucléaire
dans le monde en 2007.66
66 Source : AIEA, Areva Direction Stratégie
Corp.
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Page 96 sur 113
Annexe 2 : Âge moyen des parcs nucléaires
Annexe 2 : Âge moyen des parcs
nucléaires67
67 Sophie Fabrégat, Vieillissement du
parc nucléaire : la prolongation de la durée de vie, un enjeu
stratégique et économique, Actu-environnement, [en ligne],
consulté le 25 juillet 2016, URL :
http://www.actu-environnement.com/ae/dossiers/nucleaire/viellissement-parc-centrales-nucleaires-prolongation.php4
Annexe 3 : Modèle systémique d'un
Système de Gestion des Compétences
Annexe 3 : Modèle systémique d'un
Système de Gestion des Compétences68
68 Source : Jean-Louis Ermine, Management et
ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes.
Hermes-Lavoisier, 2008, p.20.
Page 97 sur 113
Annexe 4 : La fiche « Expert model » AREVA
Annexe 4 : La fiche « Expert model »
AREVA
Page 98 sur 113
Annexe 4 : La fiche « Expert model »
AREVA
de develappernent intere9sante pur les experts
hauLerrenl qualifia, dill l'ayancement de cerrlére esl base
prindpelerrtient Sur l'experIFM. et le rratarielk
proless.anneiles au se.i et en derxAs d'AFEVA.
sien que la principale ms9ian d'un expert Salt de
latrnir un support métier a court terme. San entité Sur des
Sujets acienitngum el techniques_ les experts AREVA sont censés
également coltacrei une partie de leur temps de travai a des
r7iesens
qui ,rant eu de ce périmètre, soit
pare
qu'elles recouuren1 leg leriMes alternes du Gratpe
AREVA, Sail parce qu'elles concernent des questions slrtilexuesa
moyen strong larme.
Lea Marins types d'un expert AREVA sant les
sulvenles
1-Accur 1pagner les activity s de le ritrc
prise
· Inleracrian avec Ins LIIer11B pour
resbudre des probiérnes techniques .
çantrr>buer sok appela «Mes
cvrmtiereieux Ut les problèmes iechriques loua en adoptant tel
état d'esprit métier; proposer des ex lainons realisabies, slides
et mies aux pradtérnes lschrig as rencontres air le terrain_
§ Collabbr9lien BveC les abri /4.S de
Sûreté
Développer une connais
solen-Utique
approlardre du lorraine d'81ude afin d'aider les sourdes de
saleté 8 prendre lest bannes déclama
réglernentalre3
· Réelieetian de revue techniques sur les
projets tits
offrir deg aerti,ce de conseil scientifiques et lechr.
ues aux tiuipee projet, dans le contexte des examens. de ccnceplian, des revues
pat les pairs cu des retours d'expérience.
2- Encourager l'innovation et la créatI
vita
+ Dynamisalibrti le l'esprit d'entreprise
Agir comme un catalysait d-rrnavaben de 1-entreprise,
en générant des concepts .irovanls etyani un potentiel commercial
et en les Vanslarmanl en projets réels 3.rec Partie de ccaabaraletrs
Lenéllciant de moins d'andennelé.
§ Periicipatlen attire aux delis de
l'innovation
&valuer les Idem einauanLes deg aulnes et gulden
les equiles pollard I'Ir.ic,ration pour qu'elles
réussissent_
· Creation i es actifs de le preprieté
irSlelktluelle d'AREVA
Page 99 sur 113
Deventer les breveta dès narwesee Inve hire
arsrilrIxer activement aua nouveaux prote simukslion et de rnodéllsairon
IirYcrmerique_
3- Communication et rdseaux
I. Publication iraniiLfrs
Publier les rasulLate de le recherche sdentttique eat
Interne (MM, rapport sdentrrque, Ilvres blancs, el c4 ou en externe
(artmles dans des revues sdentdlques et lechr.ques seedallsée3` etc.) de
ragcn donner deuanlege d'exposition 8 l'expert et arnAllarer
l'Image aden4M1que et technique d'ARE VA_
· Participation a des conferences comme urareur
ill uilk
Pertici er corme canlérencier amie 8 des
cailérences Inlernallorrales est tri Signe de reoonnel9eancederexcertrse
par des pairs_ Erg :Veine, mener deg i< débats teemrques . avec
rn public plus large de ccialocwateurs AREVA
eel Bellement une raglan d'eccroiLre la Velbaile et I'expasitcn de
I'e.erL
·
Être arteriole actif de réseaux
Internes tresebu.t LeCh
·iique
·ml
Jeerer un role actif dens le cr'aat an el le
soutien aux communautés 'techniques, qt scull le pierre argidere des
ciretpouee de geslioin des
cerÏlal d'AREVA .
§ Eire membre men' de rdeeaux externes
{sudètes scientifiques et organismes de rlbrmali9-dlidn)
Jouer uni rale actif dans le eréat i.i e1 le
soutien &Jx Societ s edenttri'ques telles que I'AFCEN_ la
5FEN, etc.) au les orgeersmeS de rrarma119aGafi .I.
X ii& et mimes), avec l'abjecur de madeler l'Image el
l'enulror.ement regiemenleare d'AREVA.
4- Soutenir la strategic de
developpanient LT d'AREVA
§ Jouer un rôle de leader dans le
plenificetibn tecinnolegique et les processus dee
planification
CantrIIuer activement eui
Initiatrres de pianln[aLan techndaglque_
nctarrrne lt en venait le respcnsa11l1l1.5 d'elabllr les plans
Cane' associés Cu dér Ioppee ent de reuertr e
technique nécessaire parr exéa,ier celteleue de
raite.
Annexe 4 : La fiche « Expert model »
AREVA
·
· Assurer une veille Lechn uluyiq ur
Rester informe des actides déreloppées
partout dans le monde dans le drrrlaine de fel.ertrse, natammai1 che2 les
oonourrenLs
d ARE VA.
· NodéllsatIon et déveluppErriEgit
de at simulation
Être activement Irnpllqué data les
pro}ete de rrrDdéli9at~rl eL de sarrulaton. qui sont
les me~eurec 2COrCi he9 pour capitaliser les cor.1 iscanees s4ienlinques eL les
translerer_
5-Transfert dos connaissances aux
n ouvelles generatI ares
· Conduite de stages de forrnstioe en interne
sau thex le client
D i oçper des 4daclldels. dor ier des
coniéraeees et mener des * Débats lechniques
· Établissement de retch /16 tonstantee
awei les unirtrrtit'S, les Inalitut5
· ou Ins Laboratoires
Enseigner dans des écales d'Ingénieurs
ou é funlverslté et établir des liens étrcltc
avec les leboralalres de recherche.
· AttorripiugnerrIent et mentbrat de
dertdraul8
Superviser le l'aval de Ihéee et accarragner
les ruturs experts.
Support de mission
Chaque année- las Experte AREVA doivent se
llxer des etJectlls SMART clercs au rt1Oirra deux de cox tiny cdrrduriex et
s'sficircer de couvrir lea cinq tategorla de mission.
au fur et 8 rrresure du d .+eloppernerrt da
leur carfare. Ces iecilfs doivent compter pour au moins :
· 20 "A de !aima ot ecttle connue expert,
de
d 'eau 1-
· 417 9à comme experts de niveau
2.
· 60 % comme experts de niveau 3,
el doivent concerner de plus en plus l'ensemble du
Groupe AREVA tandis que le niveau deuerase augmente.
Demeure. les experts di?vatl elle &values
rormenament 8 f.ssue de ces 1117l9 errs par leurs client
interne. el 'm uniqutinenl peat leur
nom alter. Per conséquent, Ice experts
*Ment comrnunlgr.er le tom de leurs éiraluateur9. el ces deniers dv?c'tt
etre adaptés par leur manager. Les evalluateurs doivent fournir
trie évaluation l'annelle per écilt au ramager de l'expert dans
le cadre de revaluat:on ormaie des perfamicnces. Les experts AREVA
sont autorisés 8 rece.+oïr un 9ourllen de leur direction et de
l'trganisation de le gourernance de l'expertise clin daoeompir leur missaon de
lalaçon la plus éoonorrique.
Le soutien aux experts oerrorend notamment
n Du tenrrps is libre 4 preieye peur IC9 atiiritb9
d'expertise
Les managers des experts AREVA acceptent de renoncer 4
contrôler une partie du temps de t'aval des experts afin que ces dentiers
pulsent réaliser les arasions dexpertee dérlriea ci-dessus.
parilculléreraent lorsque eella9 1 concernent daut ee
enbles AREVA_ Ces missrons peuvent apç araltre 8 premlére vue
comme une perte de ressources, mals les managers peuvent réclamer la
cnntrlbutlon d-everts AREVA d'autres &ripés pour soutenir
écplamenl leurs activités.
· Aularite sur lei jeunes retruec
Une des missions Importantes des experts est de
transférer leurs canrialssances 8 des colleguee plus Jeunes. Il Faut
pour cela recourir au luloral_ au mentoral et le su er.1ek i
sur une pémde de 1emprs relativement lampe. Arisa, les excerta serrions
et les * rellows dclrent nouialr exercer leur aulnaie 8 temps partiel sur les
renourees nécessaires 8 fexeculton de lens Mores
d'expertlse-parboulierement leurs pures cdlégues lglealement 3 s 5
Femmes'.
§ Soutien visant 8 Mir une neputation
Les 'finies aenices ad ulnistralirc doivent 81re
fournis par la DFn pour ander les e.kperls AREVA 8 gérer leur
noLexlété $ frrterleur du
Q
CORPORATE - R&D RH
|
AREVA
rent. pwranary.e
|
Page 100 sur 113
Annexe 4 : La fiche « Expert model »
AREVA
Page 101 sur 113
Page 102 sur 113
Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif
Annexe 5 : Le guide d'entretien
semi-directif
Questionnaire d'enquête terrain semi-directif
pour Expert AREVA
- Âge :
- Ancienneté en tant qu'Expert et niveau d'expertise : -
Domaines d'activités :
- Missions réalisées :
- Compétences spécifiques au poste :
Objectifs de l'entretien :
? Mieux connaître le système de transfert de
connaissances au sein d'AREVA
? Faire une analyse critique du fonctionnement du transfert :
Déterminer les points forts (moteurs) du processus et les points faibles
(freins) qui entravent le bon fonctionnement du transfert et indiquer les
évolutions et/ou les changements à effectuer.
? Proposer des solutions/schémas prenant en compte les
résultats de l'analyse critique
Le transfert des compétences au sein de la
filière Expert du groupe AREVA
1) Mieux connaître le système de transfert
au sein d'AREVA :
- Comment se déroule le transfert des connaissances au
sein d'AREVA ? Quelles en sont les étapes ?
Acteurs :
Moyens :
Quand :
Types de connaissances :
Page 103 sur 113
Annexe 5 : Le guide d'entretien semi-directif
- Avez-vous déjà eu à mettre en oeuvre un
transfert d'une partie ou de la totalité de vos connaissances ?
- Comment partagez-vous de façon informelle (ou formelle)
vos connaissances aujourd'hui ?
2) Déterminer les points forts et les points
faibles du processus (qui entravent le bon fonctionnement du transfert) et
indiquer les évolutions et/ou les changements à
effectuer.
- 2.1/ Tenant compte de votre expérience, quels sont
aujourd'hui les points (techniques,
relationnels) qui, en évoluant, pourraient fluidifier le
processus et le rendre plus efficient ?
- 2.2/ Quelle est la place de la communauté des
experts dans le processus ? Comment fonctionne-t-elle ?
3) Proposer des
solutions/schémas prenant en compte les
résultats de l'analyse critique
- 3.1 /En principe quel est l'élément qui devrait
être à l'origine du transfert de connaissance ? Est-ce aux Experts
d'impulser le processus ? Ou est-ce à un acteur externe à la
communauté des Experts (RIT, management, ...) ?
- 3.2/Et plus particulièrement, dans votre cas, quel est
l'élément qui vous pousse à effectuer le transfert des
connaissances ?
- 3.3/ Selon vous, quel est le meilleur schéma type pour
le transfert de compétences ?
Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du
tableau Excel
Annexe 6 : L'analyse des entretiens : Extrait du
tableau Excel69
|
Date
|
Moyen I
|
Entretien n°1
|
31/08/2016
|
Face à face
|
Entretien n°2
|
22/08/2016
|
Face à face
|
Entretien n°3
|
02/09/2016
|
Face à face D
|
|
|
|
|
|
|
Entretien n°4
|
27/09/2016
|
Face à face E5
|
|
|
|
Entretien n°5
|
04/10/2016
|
Face à face Ea
|
|
|
|
|
|
|
Entretien n°6
|
10/10/2016
|
|
|
|
|
Entretien n°7
|
05/07/2016
|
G
|
|
|
5
|
Entretien n°8
|
25/08/2016
|
r
u
Face à face
|
Entretien n°9
|
22/08/2016
|
c
Téléphone j E
Face à face
|
Entretien n°10
|
27/07/2016
|
n
Par écrit G
|
|
|
Face à face A
|
Entretien n°11
|
27/07/2016
|
d
Par écrit
|
dée 1 : Les programme mis en place
Problématique identifiées Solutions Idée 2 :
GC / TC Problématique identifiée
Solution
FCEN par ex)
etraite, il se créer une société
d'auto-entrepreneur (ou ne SAS). Experconnect s'occupe alors des
formalités xperconnect : Depuis 5-6 ans. avant
relation avc des dministratves (social, juridique, fiscal) et
met ensuit
on effectués. Il le reconnait, "pas grand-chose"
n'est
éalisé.
vantage : Fourni des garantis sur les risques de
poursuite
0% du temps pour résoude des
problémaiques xperconnect : Chez Areva, lorsqu'un
expert part à la rticles scientifiques
: 70% à l'initiative de l'expert, 10% emandés par
les unités ou pour des projets. Ils ermettent de se faire
connaitre, d'activer et de travailler
iagramme
ap expert :
0% du temps sur des problématiques
académiques
ap experts, Financements de thèses,
mécénat (chairs,
nsultants, des universités, des
laboratoires.
iciaire et sur l propriétés ntellectuelle
(clause d
'est un moyen de rattraper des
transfe
ud xperconnect : c rts
rapport à d'autres experts. Ex :
Invitations aux congrets Experconnect
: Pas de ROI calculé Pas de budget consolidé au
niveau groupe
Les BU dépenses slon les besoins
Continuer à financer les
thèses et
de
temps et de moyens) fait que peu
L'expert, cest une personne qu
de choses sont mises en place.
Des connaissances sont
dans la
Le problème principal est
d'identifier les connaissances
critiques.
GAPexperts : Trop valorisés par
les chairs. Financer les réseaux. (Pb
= les attentes pourraient être trop
La réalité des situations
(peu
tête
Tutur : au sen de a RDI
mais pas écrites
Difficultés de compréhension entre
Trouver un équilibre entre livre et
discussion (tacite / explicite)
calcul de ROI pour prendre
conscience du coût. Puis, si
Biblithèqu virtuel avec les
Consolider les budgets, effectuer
un Des documents et des formations sur le transfert de
connaissances ont été dispensés pour 3 experts.
La phase pilote na pour le mo Formation commune
entre opérationnels et expert pour la
collaboration.
Il faut désigner une personne qui va
rassembler les personnes du
domaine de cette compétence (en
Areva a recruté un Knowledge manager
notamment pour mettre en place des outils et des moyens de
réseaux afin d'aider les Transfert se fait sur un long terme
(20 à 30 communautés en proposant des
supports
ans) pour avoir une efficacité et une vrai
vision stratégique. Le transfert ponctuel
Un TC se fait au fil de l'eau, qui peut se faire
un peu plus intense lors des départs à
la
retraite. Pas de transfert "encyclopédique"
de
KM
Page 104 sur 113
A
r
p
I
69 Les données ont été
floutées pour conserver l'anonymat de l'enquête
Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint
Page 105 sur 113
Annexe 7 : Le logiciel de partage SharePoint
Annexe 8 : La plate-forme Yammer
Annexe 8 : La plate-forme Yammer
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Martin Roulleaux Dugage -26 Août à 1:40pr,
® L'expertise technologique d'AREVA a longtemps
été reconnue comme son actif le plus
précieux, et nos dirigeants le rappellent dans quasiment
tous leurs discours. Pensez-vous que cette expertise...
sera moins importante demain car les outils de conception et de
modélisation prennent la
relève Ajoutez des fichiers ou
7% des liens de référence
sera tout aussi importante qu'aujourd'hui en raison du besoin de
comprendre et d'innover pour ce groupe.
50%
sera encore plus importante demain en raison d'un marché
qui se mondialise GROUPES LIÉS
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Annexe 9 : Les différentes méthodes
MASK
Annexe 9 : Les différentes méthodes
MASK70
70 Source : Serge Ariès, MASK, [en
ligne], consulté en ligne le 17 octobre, URL :
http://aries.serge.free.fr/index.php?page=content/MASK/SA32#MASKI
Page 107 sur 113
Page 108 sur 113
Table des annexes
Table des annexes
ANNEXE 1: PREVISION DE CROISSANCE DE LA PRODUCTION
D'ELECTRICITE PAR L'ENERGIE NUCLEAIRE DANS LE MONDE EN
2007 95
ANNEXE 2 : ÂGE MOYEN DES PARCS NUCLEAIRES
96
ANNEXE 3 : MODELE SYSTEMIQUE D'UN SYSTEME DE GESTION
DES
COMPETENCES 97
ANNEXE 4 : LA FICHE « EXPERT MODEL » AREVA
98
ANNEXE 5 : LE GUIDE D'ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF
102
ANNEXE 6 : L'ANALYSE DES ENTRETIENS : EXTRAIT DU
TABLEAU EXCEL
104
ANNEXE 7 : LE LOGICIEL DE PARTAGE SHAREPOINT
105
ANNEXE 8 : LA PLATE-FORME YAMMER 106
ANNEXE 9 : LES DIFFERENTES METHODES MASK
107
Page 109 sur 113
Table des figures
Table des figures
Figure 1 - La pyramide du savoir 12
Figure 2 : Le processus de capitalisation et de
partage des connaissances 17
Figure 3 : Schéma du fonctionnement du
programme GapExpert 38
Figure 4 : Représentation graphique de
l'expertise chez Areva 54
Figure 5 : Le macroscope de la connaissance
75
Page 110 sur 113
Table des matières
Table des matières
INTRODUCTION 1
PREMIERE PARTIE - APPRIVOISER LA CONNAISSANCE
6
1.1. La connaissance chez AREVA 6
1.1.1. AREVA, un leader sur marché en évolution
6
1.1.1.1. Une industrie basée sur des connaissances
pointues 6
1.1.1.2. Le parcours d'Areva 7
1.1.1.3. Une industrie qui n'a pas dit son dernier mot 9
1.1.2. La connaissance créer de la richesse 11
1.1.2.1. Éviter les confusions 11
1.1.2.2. Replacer le sujet dans son contexte 12
1.1.2.3. Les enjeux de la connaissance 14
1.1.3. Le transfert des connaissances est capital pour subsister
17
1.1.3.1. Approche théorique du processus de transfert des
connaissances 17
1.1.3.1. Les enjeux du transfert de la connaissance 19
1.2. Les experts possèdent la connaissance
20
1.2.1. Les experts sont les acteurs clés de l'industrie du
nucléaire 20
1.2.1.1. Pourquoi l'expert : définition et
différenciation 20
1.2.1.2. Les experts chez Areva 22
1.2.1.2.1. Des experts opérationnels 22
1.2.1.2.2. Spécificités et processus 24
1.2.2. Le processus de transfert des connaissances chez les
experts 26
1.2.2.1. Identifier les différents acteurs y prenant part
26
1.2.2.2. A chaque connaissance sa méthode 28
1.2.3. La spécificité des communautés de
savoir 30
1.2.3.1. Définition d'une communauté 30
1.2.3.2. La différenciation avec les communautés
d'experts 31
Page 111 sur 113
Table des matières
DEUXIEME PARTIE - LE TRANSFERT DES CONNAISSANCES SOUS
TOUTES
SES FORMES 33
2.1. Protocole d'enquête 33
2.1.1. Travail en amont 33
2.1.1.1. L'interview et la socialisation 33
2.1.1.2. Cibler la population 34
2.1.1.3. La rédaction du guide d'entretien 35
2.1.2. Les interviews et le débriefing : les
difficultés rencontrées 35
2.1.2.1. La réalisation des entretiens 35
2.1.2.2. Le débriefing 36
2.2. Les programmes mis en place par Areva 37
2.2.1. GapExpert : un programme pour les jeunes
générations 37
2.2.1.1. Former les futurs experts 37
2.2.1.2. Un avenir prometteur 38
2.2.2. L'arrivée des nouvelles générations
40
2.2.2.1. Le mécénat des chairs 40
2.2.2.2. Les contrats CIFRE 41
2.2.2.3. Le tutorat chez Areva 42
2.2.3. Un dispositif spécifique pour les experts à
la retraite 43
2.2.3.1. « Experconnect » : ou mettre en relation
l'expertise et l'entreprise 43
2.2.3.2. La vision terrain du dispositif 44
2.3. Des initiatives individuelles de transfert de
connaissances 45
2.3.1. Les transferts ponctuels 45
2.3.1.1. Les différentes façons de
transférer de la connaissance 46
2.3.1.2. Chaque acteur joue un rôle particulier 47
2.3.2. Les moyens de partage de connaissance dans la
carrière de l'expert 48
2.3.2.1. Créer des cours 48
2.3.2.2. Les documents de synthèse 49
2.3.2.3. Organiser des conférences 50
2.3.2.4. Rédiger des articles scientifiques 51
2.4. Le transfert collectif de connaissances
51
2.4.1. L'identification des connaissances critiques 51
2.4.1.1. L'état actuel des domaines de connaissances chez
Areva 51
2.4.1.1. Identifier la population des experts 52
Page 112 sur 113
Table des matières
2.4.1.1. L'identification des technologies critiques chez EDF
54
2.4.2. Les différentes formes de communautés
existantes chez Areva 56
2.4.2.1. Le collège des fellows 56
2.4.2.2. Les « Tech Talks » et « Peer Reviews
» 57
2.4.2.3. Les réseaux techniques 58
2.4.2.4. Les problématiques communes pour la mise en place
et le développement des
communautés 59
2.4.3. Les outils informatiques 61
2.4.3.1. Stocker de la connaissance 61
2.4.3.2. Les plates-formes de réseaux 63
TROISIEME PARTIE - SOUTENIR LES EFFORTS ENTREPRIS PAR
AREVA 65
3.1. Un outil pour agir rapidement 65
3.1.1. Création d'un guide de transfert de connaissance
65
3.1.1.1. Faire face au départ des volontaires 65
3.1.1.2. Réaliser le guide de transfert de connaissance
66
3.1.2. Cadrer le projet 68
3.1.2.1. Évaluer les coûts et la réussite
68
3.1.2.2. Les limites au guide de transfert de connaissance 69
3.2. Modéliser la connaissance chez Areva
71
3.2.1. Proposer une méthode de modélisation des
connaissances 71
3.2.1.1. Pourquoi proposer de modéliser la connaissance au
sein d'Areva 71
3.2.2. KALAM® ou MASK : deux méthodes
différentes de modélisation de la
connaissance 72
3.2.2.1. La méthode KALAM® :
tournée vers l'humain 72
3.2.2.2. La méthode MASK : orientée capitalisation
74
3.2.2.3. Définir les besoins pour choisir la
méthode 77
3.3. Développer une vision collective à
long terme 78
3.3.1. Favoriser une vision globale 78
3.3.1.1. Consolider les budgets et les données RH 78
3.3.1.2. La culture du partage 79
3.3.2. Développer les communautés 81
3.3.2.1. Les multiples ressources des communautés 81
3.3.2.2. Les outils numériques de collaboration et de
partage 84
Page 113 sur 113
Table des matières
CONCLUSION 87
BIBLIOGRAPHIE 90
GLOSSAIRE DES CIGLES 94
ANNEXE 1: PREVISION DE CROISSANCE DE LA PRODUCTION
D'ELECTRICITE PAR L'ENERGIE NUCLEAIRE DANS LE MONDE EN
2007. 95
ANNEXE 2 : ÂGE MOYEN DES PARCS NUCLEAIRES
96
ANNEXE 3 : MODELE SYSTEMIQUE D'UN SYSTEME DE GESTION
DES
COMPETENCES 97
ANNEXE 4 : LA FICHE « EXPERT MODEL » AREVA
98
ANNEXE 5 : LE GUIDE D'ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF
102
ANNEXE 6 : L'ANALYSE DES ENTRETIENS : EXTRAIT DU
TABLEAU EXCEL
104
ANNEXE 7 : LE LOGICIEL DE PARTAGE SHAREPOINT
105
ANNEXE 8 : LA PLATE-FORME YAMMER 106
ANNEXE 9 : LES DIFFERENTES METHODES MASK
107
TABLE DES ANNEXES 108
TABLE DES FIGURES 109
TABLE DES MATIERES 110