CHAPITRE II : LES PRATIQUES FONCIERES LOCALES EN MILIEU
RURAL : CAS DE LA CHEFFERIE DE NGWESHE
SECTION I : LES PRATIQUES EN MATIERE D'ACQUISITION DES
TERRE
§ 1. Les autorités territoriales et la gestion
des terres à walungu
Les autorités territoriales dont il est question ici
sont principalement les commissaires du district et l'administrateur du
territoire. Ceux-ci s'arrogent aussi des pouvoirs fonciers sans qu'aucun texte
ne les leur reconnaisse. Ils exploitent astucieusement le plan juridique
contenu dans l'article 69 de la loi du 20 juillet 1973dispose qui :
« En attendant l'accomplissement des formalités de
concession d'un fonds appartenant au domaine privé de l'Etat, celui-ci
peut autoriser le demandeur à occuper ledit fonds par le bornage, la
délimitation et, éventuellement, la clôture et
l'entreposage. Cette autorisation est donnée à titre
précaire, et ce, aux risques et péril du demandeur, sauf la
responsabilité services publics en cas de négligence fautive et
de vol29 ».
La délivrance de cette attestation est l'aboutissement
d'une procédure qui part de la « demande de délimitation du
champ » et passe par l'établissement d'un procès-verbal de
constat de lieux » et d'une fiche de reboisement individuel. L'attestation
est, à l'instar du contrat de concession, contresigné par «
le propriétaire du terrain ».
Au Bushi, le foncier actuel est un système complexe
dans lequel se superposent deux juridictions : le système «
traditionnel, coutumier » et le droit « moderne »
édicté par l'Etat, la loi foncière n° 73-021 du 20
juillet 1973, telle que modifiée et complétée par la
loi
28 MUGANGU MATABARO Séverin, La tenure
foncière coutumière en RDC : Etat de lieux et perspectives pour
la réforme de la législation, Rapport, Etudes de
référence sur la tenure en RDC, RIR (Right and ressources
Initiative), Bukavu, septembre, 2014, inédit, p.16-17.
29 Journal officiel de la RDC, loi n°
73-021 du 20 juillet 1973 portant régime général des
biens, régime foncier et immobilier et régime des suretés
telle que modifiée et complétée par la loi n° 80-008
du 18 juillet 1980, p.22
30 M. Jean-Baptiste Safari Bagula et BAKWI Jules,
Problématique de gestion foncière dans la région du
Bushi au Sud-Kivu, Bukavu, 2010, p.11.
25
n° 080-008 du 18 juillet 1980. Dans les pratiques
foncières du Bushi, la propriété purement privée
n'existe pas. La terre appartient à la famille qui l'a reçu du
clan, lui-même l'ayant obtenu du Mwami. Ce dernier incarne de passage, la
chefferie et est le garant moral et première référence de
gestion des terres. Tous les règnes Bashi considèrent la terre,
en premier lieu, comme un patrimoine collectif inaliénable. Les
différents types de récompenses qui caractérisent les
différentes formes d'octroi n'est pas à considérer comme
des « prix » payés pour l'obtention de la terre. Ils
confèrent plus les droits d'usage et d'habitation, de cultures, de
pâturage, de chasse, de passage, de rite et d'enterrement que celui de
propriété. Ces droits d'usage étant transférable
à la descendance par le fait d'héritage, de succession, de
lignage, ils deviennent permanent, se pérennisent et sous-tendent aux
droits définitifs tant que le clan et ses membres restent loyaux au
Mwami et au système du règne en place.30
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